Toxicité des analgésiques PDF
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Université Paris-Saclay
Pr F. COUDORE
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This document provides an overview of the toxicology of analgesics, focusing on paracetamol and salicylates. It covers topics such as kinetics, metabolism, symptoms, and treatment.
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Toxicologie du paracétamol et des salicylés Pr F. COUDORE Toxicologie du paracétamol 1. Introduction 2. Cinétique et métabolisme 3. Symptomatologie 4. Biologie 5. Traitement 6. Toxicologie analytique 7. Conclusion 2 1. Introduction Dérives de l’aniline. 1- Acétanilide = 1er médicament antipyrétique...
Toxicologie du paracétamol et des salicylés Pr F. COUDORE Toxicologie du paracétamol 1. Introduction 2. Cinétique et métabolisme 3. Symptomatologie 4. Biologie 5. Traitement 6. Toxicologie analytique 7. Conclusion 2 1. Introduction Dérives de l’aniline. 1- Acétanilide = 1er médicament antipyrétique introduit en thérapeutique (Antifébrine®) en 1886 par des chercheurs strasbourgeois : Mais toxicité excessive 2- Bayer : Phénacétine® : Antalgique et antipyrétique depuis 1887 Mais responsable de méthémoglobinémies, d’anémies hémolytiques et de néphropathies chroniques. Paracétamol : 1ères études en 1893 Principal métabolite de la phénacétine et de l’acetanilide, Commercialisé en 1955 aux USA Peu d’effets secondaires à dose thérapeutique Toxicité hépatique dose-dépendante pouvant conduire au décès à forte dose, Remarque : paracétamol et acetaminophen (anglo-saxons) (Doliprane, Efferalgan, Dafalgan en France, Tylenol et Panadol à l'étranger) 3 1. Introduction Surdosage en paracétamol : Cause la plus fréquente d’insuffisance hépatocellulaire aiguë aux USA et dans la plupart des pays occidentaux le Paracétamol est le deuxième médicament à l'origine des appels d'urgence au centre antipoison de Paris pour les intoxications volontaires et est le premier médicament incriminé dans les intoxications accidentelles devant le Bromazépam, l'Ibuprofène et le Tramadol (2018) Majoration du risque d’hépatotoxicité : Surdosage accidentel Abus d’alcool Maladies hépatiques sous-jacentes Hépatotoxicité lésionnelle Dose Toxique Adulte : tentative de suicide > 10 g chez l’adulte Enfant : négligence des parents > 100 mg/kg chez l’enfant 4 2. Cinétique et Métabolisme 2.1. Cinétique Absorption intestinale rapide et complète 30 à 60 min à doses thérapeutiques > 4 h à doses toxiques (risque d’agglomération des comprimés) Demi-vie A dose thérapeutique : 2 heures Augmentée > 4 h si cytolyse hépatique en cas de surdosage > 12 h si encéphalopathie Elimination urinaire 90 % de la dose ingérée est éliminée par les reins en 24 heures 2.2. Métabolisme Hépatique à doses thérapeutiques Métabolites glucuroconjugués (60%) Métabolites sulfoconjugués (30%) + Métabolite toxique (7%) issu du CYP2E1, inactivé par le glutathion Conjugué à la cystéine 5 2. Cinétique et Métabolisme 60% Paracétamol CYP2E1 Induction par l’alcool 30% 7% NAPBQI 6 2. Cinétique et Métabolisme 2.2. Métabolisme 1. A doses toxiques (> 125 mg/kg) : Saturation des voies de conjugaison 2. ➔ Voie d’élimination accessoire = CYP2E1 (induit par l’éthanol) Formation de dérivés électrophiles (quinones imines) ➔ N-Acétyl-ParaBenzoQuinone Imine (NAPBQI) 3. Fixation du NAPBQI sur les groupements thiol (-SH) des protéines hépatiques centrolobulaires. 4. + Epuisement du glutation ➔ Accumulation du NAPBQI et Nécrose centrolobulaire. Rq : La toxicité du paracétamol est majorée par une hépatopathie pré-existante (éthylisme) 7 3. Symptomatologie 1er signes de l'intoxication Entre 12 et 24 h après l'ingestion Vomissements (80% cas) Nausées et douleurs abdominales Conscience normale L'absence de symptômes précoces ne préjuge en rien du pronostic !!! Evolution sans traitement spécifique (antidote) Possible évolution en 3 à 6 jours vers une hépatite cytolytique : Douleurs abdominales Insuffisance hépatocellulaire aiguë ➔ Ictère Encéphalopathie hépatique Coagulopathie Hépatite fulminante d'évolution mortelle Réversion possible Autre troubles plus rares : Insuffisance rénale (néphropathie tubulaire aiguë) Pancréatite, myocardite 8 4. Biologie 4.1. Cytolyse hépatique = Augmentation des transaminases ASAT et ALAT (x 10 à 20 N) 12 à 48 heures après ingestion et maximum au 3ème jour 4.2. Insuffisance hépatocellulaire = Diminution du fibrinogène = Diminution des facteurs de coagulation (II, V, VII, X) ➔ Risques hémorragiques importants 4.3. Atteinte tubulaire rénale = Augmentation de la créatininémie 4.4. Acidose lactique Les retards de diagnostic sont fréquents et graves !!! 9 5. Traitement 5.1. Lavage gastrique Non systématique et peu d’intérêt A discuter selon le niveau de conscience et l’heure de prise 5.2. Charbon activé (50 g per os) : Risque de neutraliser la N-acétyl cystéine administrée per os 5.3. Antidote = N-Acétyl-Cystéine (NAC) = Fluimucil® 5 g/25 ml Une paracétamolémie > 200 mg/l à la 4èmeh (50 mg/l à la 12ème h) imposent le traitement antidotique. Si le dosage n'est pas réalisable en urgence, le traitement est mis en route avant l'obtention du résultat du dosage. La paracétamolémie doit être obtenue en urgence ! Si l'heure de l'intoxication est inconnue, 2 prélèvements sont pratiqués à 4 heures d'intervalle. 10 5. Traitement La NAC est disponible sous forme orale et injectable. Le traitement doit être : - Commencé au mieux avant la 10ème heure - Poursuivi tant que le paracétamol reste détectable dans le sang - Si persistent les perturbations hépatiques Un traitement chronique par le paracétamol avant l’intoxication aiguë rend celle-ci plus grave. Si absence de traitement antidotique : Evolution possible en 3 à 6 jours vers une hépatite cytolytique Insuffisance hépatocellulaire aiguë ➔ Indication d’une transplantation hépatique 11 5. Traitement 5.3.1. Pharmacodynamie de la NAC Aux premiers stades de l’intoxication, Reconstitution des stocks de glutathion et des réserves en sulfates nécessaires pour la sulfoconjugaison Correction des lésions oxydantes provoquées par le NAPBQI 5.3.2. Posologie de la NAC IV : Dose de charge : 150 mg/kg en 1 h Dose d'entretien : 50 mg/kg dans 500 ml de G5 sur 4 h puis 100 mg/kg en 16 h La capacité de la NAC à protéger le foie commence à baisser à partir de la 8ème h après l’ingestion. Autres traitements associés : G5, furosémide. 5.3.3. Effets indésirables (NAC) Nausées, accidents allergiques cutanés (rash, prurit), thrombopénie exceptionnelle 12 Métabolisme du paracétamol = paracétamol NAPBQI 13 Synthèse du glutathion 14 6. Toxicologie analytique Dosages par méthodes colorimétrique, HPLC, immunochimique Permet d’apprécier le retentissement hépatique IMPORTANT : Connaître le délai depuis l’ingestion, qui doit être 4 heures pour que le dosage soit interprétable avec le nomogramme de Prescott (Rumack– Matthew) 15 6. Toxicologie analytique Ancien nomogramme de Prescott Modifié par Rumack–Matthew Concentration plasmatique du paracétamol Estimation des lésions hépatiques après ingestion d’une dose de paracétamol à un temps connu Nécessité de : - Dosage de la paracétamolémie - Connaitre l’intervalle de temps depuis l’ingestion Problèmes Si Ingestion chronique Si Temps d’ingestion inconnue Si paracetamol et codeine Si facteurs de risque comme l’alcoolisme et la malnutrition. Délai avant 4 heures non interprétable Heures après ingestion de paracétamol 16 7. Conclusion Le paracétamol est le médicament le plus fréquemment impliqué dans les intoxications volontaires (en France). L’intoxication par paracétamol est responsable d’une hépatite cytolytique aiguë, dose dépendante potentiellement mortelle (transplantation hépatique). La prise en charge initiale de l’intoxication par le paracétamol est bien codifiée : - Mesure de la paracétamolémie - Administration de NAC dans les 10 heures Education du public très importante. L’évolution d’une intoxication pris en charge précocement est en général favorable. http://efurgences.net/seformer/toxicologie/208-paracetamol.html B. MÉGARBANE : Intoxication par le paracétamol : quoi de neuf ? Méd. Intensive Réa (2017) 26:383-395 17 Toxicologie des salicylés 1. Introduction 2. Cinétique et métabolisme 3. Symptomatologie 4. Mécanismes toxiques 5. Biologie 6. Traitement 7. Conclusion 18 1. Introduction Essentiellement l’aspirine (acide acétylsalicylique) Intoxication grave du fait des anomalies métaboliques induites. Discrétion et délai d’apparition des troubles initiaux ➔ Difficulté et retard du diagnostic Polymorphisme clinique et biologique Intoxication plus grave pour des populations à risque Enfant Sujet âgé Femme enceinte Dose toxique > 10 g - adulte > 100 mg/kg - enfant Forte diminution de la fréquence de cette intoxication ➔ Usage accru du paracétamol et de l’ibuprofène 19 2. Cinétique et métabolisme Absorption Digestive Rapide et complète en 30 min Formation d’agglomérats intragastriques retardant l’absorption Biodisponibilité 60 %, dose > 500 mg 90 %, dose > 1 g (saturation du métabolisme) Distribution Large et rapide (SNC, fœtus, lait …) Forte liaison aux protéines plasmatique (90 %) Demi-vie plasmatique 15 à 20 minutes pour l'acide acétylsalicylique 2 à 4 heures pour l'acide salicylique En cas d’intoxication, augmentation jusqu’à 40 heures 20 2. Cinétique et métabolisme Métabolisme Hydrolyse en acide salicylique Métabolisme hépatique (90%) de l’acide salicylique saturable Conjugaison à l’acide glucuronique et à la glycine Élimination Voie urinaire sous forme de Acide salicylique et de glucuroconjugués Acide salicylurique et d'acide gentisique Durée d’élimination augmentée en fonction de la quantité ingérée Elimination rénale Filtration glomérulaire Réabsorption Sécrétion tubulaire Elimination rénale prépondérante en cas de surdosage La clairance rénale augmente avec le pH urinaire 21 3. Symptomatologie Association évocatrice de l’intoxication : - Signes digestifs (nausées, vomissements, épigastralgies), - Troubles neurosensoriels (acouphènes, hypoacousie, céphalées, vertiges) - Hyperventilation (d'origine centrale) Autres signes cliniques : Hyperthermie, tachycardie, hypertension artérielle Déshydratation, conséquence des pertes (vomissements), cutanées et respiratoires digestives Troubles de conscience fréquents chez l'enfant Convulsions possibles chez l'enfant Coma rare chez l'adulte 22 3. Symptomatologie Concentration en salicylés dans le SNC Stimulation des centres respiratoires ➔ Hyperventilation Diminution de la PCO2 Alcalose respiratoire L’alcalose respiratoire entraine : excrétion de HCO3- et rétention de H+ Découplage de la phosphorylation oxydative ➔ Production d’acides pyruvique et lactique Inhibition du cycle de Krebs : ➔ Production d’acides organiques Consommation glucose périphérique et production de corps cétoniques Acidose métabolique 23 4. Mécanismes toxiques Muqueuse digestive - Inhibition de la synthèse des prostaglandines - Effet toxique cellulaire direct de l’ion salicylate Système nerveux central ➔ Action excitante puis dépressive sur les centres respiratoires Système nerveux autonome ➔ Stimulation sympathique Cellulaire : découplage des réactions de phosphorylations oxydatives au niveau mitochondrial Augmentation de la consommation d’O2 Hyperthermie Baisse de la synthèse protéique et de la glycogénogénèse Inhibition de l’ATPase membranaire 24 5. Biologie Hypokaliémie : équilibre avec les H+, pertes urinaires et intra-cellulaires Hypernatrémie : déshydratation Troubles de l'hémostase : Prothrombine et agrégation plaquettaire Hypoglycémie (gravité +++ chez l’enfant) : déplétion en glycogène Recherche des salicylés dans les urines : Bandelette Phénistix® (si taux > 200 mg/l) Dosage sanguin de la salicylémie ➔ Intérêt diagnostic et pronostic : Méthodes colorimétriques et immunochimiques En urgence et dosages répétés (ne pas ignorer le pic plasmatique) Premiers symptômes si > 0,25 g/l Troubles sévères si > 0,5 g/l 25 5. Biologie Nomogramme de Done Évaluation du risque dans les intoxications par les salicylés Inconvénients : - Pas d’indications avant 6 heures après l’ingestion - Ingestion aiguë unique - Pas utilisable pour des formes à libération modifiée La clinique reste prédominante sur le nomogramme ! 26 6. Traitements Traitement symptomatique - Réhydratation - Correction des troubles acido-basiques - Assistance respiratoire, … Lavage gastrique, même tardif jusqu’à + 24h (car ralentissement de la vidange gastrique pour les formes retards et tamponnées). Charbon activé à doses répétées Alcalinisation des urines (7,5 < pH urinaire < 8,5) Perfusion de bicarbonate de Na à 1,4 % Augmentation de l’élimination rénale Épuration extrarénale efficace, mais utilisation rare Indications exceptionnelles (intoxication grave, insuffisance rénale, OAP) 27 7. Conclusion Intoxication aigue par salicylés plus rare, au profit du paracétamol et de l’ibuprofène Clinique de l’intoxication : mixte - Signes digestifs - Troubles neurosensoriels (acouphènes, hypoacousie) - Hyperventilation + Alcalose respiratoire et acidose métabolique Pas de traitement antidotique Traitements des troubles métaboliques 28