Module 8 Lois et intervenants en santé et sécurité du travail PDF

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Université Laval

2023

Michèle Bérubé

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Workplace Health and Safety Occupational Health Quebec Labour Laws Safety and Security

Summary

This document is a module on workplace health and safety in Quebec, covering the laws, stakeholders, and procedures related to occupational health and safety. It's intended for professionals in healthcare and related fields during learning.

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Santé et sécurité au travail Notions de base Module 8 Lois et intervenants en santé et sécurité du travail Mise à jour Michèle Bérubé Département de médecine sociale et préventive Faculté de médecine Université Laval Santé et sécurité au travail : notions de base 2 Module 8: Lois et intervenants en...

Santé et sécurité au travail Notions de base Module 8 Lois et intervenants en santé et sécurité du travail Mise à jour Michèle Bérubé Département de médecine sociale et préventive Faculté de médecine Université Laval Santé et sécurité au travail : notions de base 2 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail Équipe de production Responsable du cours Michèle Bérubé Département de médecine sociale et préventive Conception pédagogiques Marc Champagne, service des ressources pédagogiques Denise Vigneault, conseillère en APTIC Yves Cantin, département de médecine sociale et préventive Mise à jour 2023 Michèle Bérubé Traitement de texte Louiselle Desjardins Michèle Gagnon 3 Santé et sécurité au travail : notions de base 4 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail Table des matières Objectifs d'apprentissage................................................................................. 7 Introduction..................................................................................................... 9 1. La loi sur la santé et la sécurité du travail........................................ 11 1.1 Historique................................................................................ 11 1.2 Le régime proposé................................................................... 11 1.3 Le contenu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail........ 12 1.4 Application de la Loi............................................................... 21 1.5 Résumé des principales modifications apportées à la LSST par la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail……23 2. La loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.. 26 2.1 Présentation et historique......................................................... 26 2.2 Les notions d'accident du travail et de maladie professionnelle27 2.3 Les présomptions..................................................................... 28 2.4 Les indemnités de remplacement de revenu............................ 30 2.5 Le transfert de la responsabilité............................................... 31 2.6 Le droit de retour au travail, art. 234 à 264............................. 31 2.7 La réadaptation........................................................................ 32 2.8 Les mécanismes d'appel........................................................... 33 2.9 Résumé des principales modifications apportées à la LATMP par la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail……34 Conclusion..................................................................................................... 36 5 Santé et sécurité au travail : notions de base 6 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail OBJECTIFS D'APPRENTISSAGE À la fin de ce module, vous serez en mesure de : 1. Expliquer les fondements du régime de santé et de sécurité du travail au Québec; 2. Expliquer les droits et obligations des travailleurs et des employeurs; 3. Faire connaître les outils, les mécanismes de participation; 4. Définir les notions d’accident du travail et de maladie professionnelle; 5. Expliquer en quoi consistent les présomptions dont bénéficient les travailleurs lorsqu’ils sont victimes de lésions professionnelles; 6. Expliquer les droits des travailleurs victimes de lésions professionnelles; 7. Distinguer les mécanismes d’appel en matière de lésions professionnelles. 7 Santé et sécurité au travail : notions de base 8 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail INTRODUCTION En 1978, le gouvernement québécois publiait un livre blanc en matière de santé et de sécurité intitulé : Politique québécoise de la santé et de la sécurité des travailleurs. Cette publication annonçait une réforme majeure du régime de santé et de sécurité qui était le nôtre depuis 1931. Des changements étaient réclamés par les syndicats depuis le début des années 1970 et des grèves importantes dans les régions de Thetford-Mines et de Sorel ont porté uniquement sur des questions de cet ordre. On assistait à l’époque à un changement de mentalité pleinement illustré par cette citation de René Lévesque en 1977 : « L’économie qui prétendrait encore faire passer l’homme après les machines serait vouée à l’échec. » Le livre blanc annonce alors trois changements importants : 1. abolition de la Commission des accidents du travail et son remplacement par la Commission de la santé et de la sécurité du travail ; 2. adoption d’une première loi de prévention : la Loi sur la santé et la sécurité du travail; 3. abolition de la vieille Loi des accidents du travail de 1931 et son remplacement par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Ce sont ces deux1 lois qui feront l’objet de ce module. 1 La sanction du projet de loi 59 « Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST) » le 6 octobre 2021 apporte des changements importants à la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST) ainsi qu’à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP). Ces modifications s’appliquent sur 3 ans. Nous vous présentons un aperçu de ces modifications au point 1.5 pour la LSST et au point 2.9 pour la LATMP. Les modifications qui s’appliquent en 2023 ont été intégrées au contenu. Nous vous référons au site de la CNESST pour de plus amples informations. 9 Santé et sécurité au travail : notions de base 10 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail 1. LA LOI SUR LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL2 1.1 Historique Jusqu’en 1978, le régime de santé et de sécurité du travail au Québec était caractérisé par un système d’indemnisation des accidents et des maladies professionnelles. Il y avait une absence quasi totale de droits et de pouvoirs clairement définis pour les premiers intéressés : les travailleurs. La prévention s’insérait à travers les services d’inspection de six ministères avec une absence complète de coordination entre eux. Jusqu’à cette date, le législateur a toujours agi comme si la santé et la sécurité des travailleurs étaient d’abord et avant tout l’affaire du gouvernement et des employeurs, le rôle des travailleurs se bornant essentiellement à se conformer aux directives qui leur étaient données. 1.2 Le régime proposé Le régime proposé en 1978 a pour objectif l’élimination des accidents du travail et des maladies professionnelles en s’attaquant à l’ensemble des risques qui existent sur les lieux de travail. Il privilégie la participation et la coopération des travailleurs et des employeurs et préconise l’utilisation de mécanismes qui favorisent la prise en charge par les parties concernées de la protection de leur santé et de leur intégrité physique. Finalement, il revient au gouvernement le rôle de créer un ensemble de conditions qui feront que le monde du travail sera en mesure d’assumer la responsabilité première de se donner les mesures de santé et de sécurité qui lui sont nécessaires. Les modifications apportées par Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST) adoptée en octobre 2021 viennent confirmer ces éléments. Cinq conditions sont nécessaires afin que se réalise cette prise en charge par les parties : 1. 2 établir des droits et des obligations pour les travailleurs et les employeurs; La Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail entraîne des changements à la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST) telle que nous la connaissions. Les modifications sont présentées au point 1.5. Les modifications qui s’appliquent à ce jour ont été intégrées au document. Nous vous référons au site de la CNESST pour de plus amples informations sur ces modifications ainsi qu’au texte la Loi. 11 Santé et sécurité au travail : notions de base 2. reconnaître à chacune des parties le droit d’exiger la formation d’un comité paritaire de prévention au sein même de l’entreprise; 3. favoriser l’émergence d’associations paritaires de santé et de sécurité dans divers secteurs d’activité (les associations sectorielles); 4. attacher une importance primordiale à la mise sur pied d’activités et de programmes de formation et d’information et pour ce faire, mettre à contribution les comités de santé et de sécurité, les associations patronales et syndicales, les associations sectorielles, les services de santé au travail et la C.S.S.T.3; 5. intensifier et mieux orienter les travaux de recherche relatifs à la santé et à la sécurité. Ces cinq conditions vont se concrétiser avec l’adoption, le 21 décembre 1979, de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. 1.3 Le contenu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST) Il est important, après avoir parlé des grands principes de la réforme proposée à l‘époque, d’examiner les deux premiers articles qui concernent le champ d’application et l’objectif de cette loi. On sait que dans l’ancienne Loi sur les accidents du travail, c’est la notion d’employeur qui prédominait quant au champ d’application, mais le législateur a voulu que la Loi sur la santé et la sécurité du travail repose avant tout sur le concept d’établissement que l’on définit comme l’ensemble des installations et des équipements se retrouvant sur un même lieu et sous l’autorité d’une même personne dans le but de produire ou de distribuer un produit ou un service sauf un chantier de construction. (LSST : art 1) Pour le libellé des articles, cliquez sur le texte qui suit : Loi sur la santé et la sécurité du travail 3 Remplacée depuis janvier 2016 par la CNESST, soit la Commission des Normes, de l’Équité, de la santé et de la sécurité du travail. 12 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail Article 2 : Objet de la loi L’objectif visé par la LSST est primordial, c’est ce qui lui donne tout son sens et sa portée. Elle vise l’élimination à la source même des dangers pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique et psychique4 des travailleurs. Pour permettre aux parties d’atteindre l’objectif de la loi, cette dernière prévoit pour chaque établissement : 1. des outils, 2. des mécanismes de participation des travailleurs et de l’employeur, 3. des services rendus par des organismes intervenants, 4. des droits et des obligations pour les travailleurs et les employeurs. Les mécanismes de participation sont : 1. le comité de santé et de sécurité, 2. le représentant à la prévention ou, le représentant en santé et en sécurité ou l’agent de liaison en santé et sécurité5 Les organismes intervenants sont : 1. les organismes paritaires dont les conseils d’administration sont composés d’un nombre égal de membres représentant les associations d’employeurs et les associations de travailleurs. Ces organismes sont : les associations sectorielles, la CN.E.S.S.T. et 4 La notion « d’intégrité psychique » vient tout juste d’être intégrée à LSST par l’adoption de la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST) en octobre 2021. 5 Le représentant en santé et en sécurité et l’agent de liaison en santé et sécurité sont des intervenants issus de la LMRSST. 13 Santé et sécurité au travail : notions de base l’I.R.S.S.T. (Institut de recherche Robert Sauvé en santé et sécurité du travail) ; 2. les organismes du réseau de la santé : la direction de la santé publique (D.S.P.), les Centres Intégrés de Santé et de Services Sociaux (CISSS), les Centres Intégrés Universitaires de Santé et de Services Sociaux (CIUSSS) et les centres locaux de services communautaires (C.L.S.C.) qui, comme nous le verrons dans le module 12, ont un rôle important à jouer en santé au travail; 3. les organismes patronaux et syndicaux. Voyons maintenant chacune de ces composantes en détail. 1.3.1 Les outils En plus du programme de prévention qui fera l’objet d’étude du module 10, la Loi sur la santé et la sécurité du travail prévoit l’élaboration de deux registres (LSST : art. 52.) Pour chaque poste de travail dans un établissement, il faut énumérer6 : 1. Les caractéristiques du poste : description, fonction, outils, appareils et machines, les contaminants et matières dangereuses, les facteurs susceptibles de comporter des risques ainsi que les moyens et équipements de protection utilisés à ce poste. 2. Les caractéristiques concernant le travail exécuté par chaque travailleur : la description de la fonction du travailleur, les tâches exécutées, les postes de travail occupés, le temps passé à chaque poste, les activités physiques, l'organisation du travail, le mode de rémunération et le type de travail. 6 Ces registres seront remplacés, à la date fixée par le gouvernement, mais au plus tard le 6 octobre 2025 par un registre des matières dangereuses et des contaminants, qui sont présents dans l’établissement. Le contenu du registre pourra notamment inclure la liste des travailleurs exposés à ces contaminants ou à ces matières dangereuses. 14 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail C’est à l’employeur qu’appartient l’obligation de dresser et de maintenir à jour ces registres. Il doit également les mettre à la disposition des membres du comité de santé et de sécurité et du représentant à la prévention. (Des formulaires standardisés de ces registres sont disponibles dans les bureaux régionaux de la C.N.E.S.S.T.) Depuis l’entrée en vigueur du SIMDUT (Système d’Information sur les Matières Dangereuses Utilisées au Travail), l’employeur doit également faire l’inventaire de tous les produits contrôlés utilisés dans son établissement et tenir à jour un registre des fiches signalétiques de chacun de ces produits. En ce qui concerne le registre des accidents du travail, des maladies professionnelles et des événements qui auraient pu les causer, il sert à identifier et compiler les accidents, les maladies professionnelles et les événements dangereux ainsi que les postes de travail où ils surviennent. Il démontre également les points faibles du programme de prévention. Il est tenu par le comité de santé et de sécurité. 1.3.2 Les mécanismes de participation des travailleurs et des employeurs7 Le comité de santé et de sécurité est la clé de la prise en charge par les parties. La loi prévoit qu’il peut être formé au sein d’un établissement groupant plus de vingt travailleurs par l’une ou l’autre des parties sur simple avis à l’autre partie. Ce comité a cinq pouvoirs de décision 8: 7 L’adoption de la LMRSST apporte certaines modifications à l’application des mécanismes de participation. Ainsi, la LMRSST prévoit étendre les mécanismes de participation des travailleurs à tous les établissements du Québec par l’adoption d’un Règlement sur les mécanismes de prévention et de participation avant le 6 octobre 2024 ou au plus tard le 6 octobre 2025. 8 La LMRSST modifie certaines des fonctions prévues à l’article 78 de la LSST. Ces modifications seront applicables à une date fixée par le gouvernement et au plus tard le 6 octobre 2025. Pour plus d’informations concernant ces modifications, consultez les articles 150 à 158 de la Loi modifiant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST). 15 Santé et sécurité au travail : notions de base 1. choisir le médecin responsable 2. approuver le programme de santé 3. établir les programmes de formation et d’information contenus dans le programme de prévention ; 4. choisir les moyens et équipements de protection individuels; 5. déterminer le temps que peut consacrer le représentant à la prévention à l’exercice de ses fonctions. Le comité de santé et de sécurité a d’autres pouvoirs que l’on retrouve à l’article 78 de la loi : mentionnons entre autres : - faire des recommandations sur le programme de prévention; - participer à l’identification et à l’évaluation des risques dans le milieu de travail; - recevoir copie des avis d’accidents et enquêter sur les événements qui ont causé ou qui auraient été susceptibles de causer un accident ou une maladie professionnelle; - recevoir les suggestions et les plaintes des travailleurs et de l’employeur et y donner suite; - recevoir et étudier les rapports d’inspection effectués dans l’établissement. - 1.3.3 Les organismes intervenants Ces organismes sont de trois ordres : - les organismes paritaires, c’est-à-dire où sont présents à la fois des représentants, des employeurs et des travailleurs; 16 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail - des organismes du réseau de la santé et des services sociaux et finalement; - des organismes syndicaux et patronaux. A) Les organismes paritaires 1. L’association sectorielle L’organisme le plus près des besoins et des problèmes des travailleurs et des employeurs est l’association sectorielle paritaire. Comme son nom l’indique, elle regroupe en son sein des représentants des associations d’employeurs et des associations de travailleurs appartenant au même secteur d’activité économique. Pendant les trois années suivant sa création, une association sectorielle reçoit de la C.N.E.S.S.T une subvention annuelle avec laquelle elle engage du personnel formé en prévention, loue des locaux et dispense des services à ses membres. Ces services sont : la création d’un centre de documentation, la mise sur pied de comités dans les entreprises appartenant au secteur d’activité concerné, l’élaboration de programmes de formation et d’information, la publication de monographies et d’articles touchant des problèmes communs aux membres et finalement, elle offre des services de recherche et de conseil. Par la suite, une cotisation supplémentaire adressée aux employeurs du secteur concerné assure le financement de l’association. 2. La Commission des Normes, de l’Équité, de la Santé et de la Sécurité du travail (C.N.E.S.S.T.) Nous ne parlerons que très brièvement de la C.N.E.S.S.T. et de son rôle en SST puisqu’un module lui est consacré. Elle fut créée le 13 mars 1980 sous l’appellation de Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Elle remplace la 17 Santé et sécurité au travail : notions de base Commission des accidents du travail (C.A.T.). La CSST fut par la suite remplacée en janvier 2016 par la C.N.E.S.S.T., soit la Commission des Normes, de l’Équité, de la santé et de la sécurité du travail, dont le Conseil d’administration est composé de 15 personnes soit sept représentants patronaux, sept représentants syndicaux et d’une présidente ou d’un président du Conseil d’administration et de la présidente-directrice générale ou du président-directeur général qui est membre d’office sans droit de vote. Ses trois services sont tous appelés à jouer un rôle d’intervenant, mais par rapport à l’application de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, le service de prévention - inspection nous intéresse plus particulièrement. C’est en effet ce service qui fait les enquêtes d’accidents graves (article 62), approuve et vérifie l’application du programme de prévention, procède aux inspections, enquête sur les plaintes et rend les décisions appropriées, se prononce sur les cas de refus de travail, prend des arrangements avec les CISSS ou CIUSSS, pour le volet santé et fait respecter tous les règlements découlant de la loi ou des lois remplacées par la Loi sur la santé et la sécurité du travail. 3. L’Institut de recherche Robert Sauvé en santé et sécurité du travail (I.R.S.S.T.) Son Conseil d’administration est composé des mêmes quinze personnes qui forment le Conseil d’administration de la C.N.E.S.S.T. Sa mission est de contribuer par la recherche à l’identification d’abord et à l’élimination à la source des dangers pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique du travailleur et à la réadaptation des travailleurs victimes d’accidents ou de maladies professionnelles. Elle publie un bulletin d’information qui résume ses activités et les résultats des recherches effectuées. B) Les organismes du réseau de santé Nous analyserons plus en détail les fonctions (en santé au travail) des organismes du réseau de la santé et des services sociaux à l’intérieur du 18 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail module 12. Disons cependant quelques mots à propos des D.S.P. et des C.L.S.C. 1. Le directeur de la santé publique (D.S.P.) Les D.S.P. sont responsables de la mise en application du contrat conclu entre la C.N.E.S.S.T. et chacun des CISSS ou CIUSSS quant à l’application des programmes de santé spécifiques. D’autres fonctions lui ont été attribuées, il s’agit entre autres : - de colliger les données sur l’état de santé des travailleurs et sur les risques à la santé auxquels ils sont exposés; - de voir à l’application et à l’évaluation des programmes de santé; - d’évaluer les ressources techniques, professionnelles et financières requises pour l’application des programmes de santé; - d’effectuer des études épidémiologiques. La Loi sur la santé et la sécurité du travail attribue aux CISSS ou CIUSSS la responsabilité d’assurer les services nécessaires à la mise en application des programmes de santé au travail sur leur territoire. À cette fin, la C.N.E.S.S.T. conclut, avec chaque CISSS ou CIUSSS, un contrat qui stipule entre autres choses les montants d’argent nécessaires pour assurer ces services (personnel, équipements, locaux, etc.). Le personnel en santé au travail peut comprendre un médecin, un hygiéniste industriel, un agent de recherche, une secrétaire et un coordonnateur. À son tour, le CISSS ou CIUSSS conclut un contrat de service avec les C.L.S.C. de son territoire par lequel ces derniers s’engagent à fournir des services de santé spécifiques à chaque établissement. 2. Le centre local de services communautaires Le C.L.S.C. constitue l’unité fonctionnelle élémentaire d’organisation des services de santé. C’est un établissement public et autonome qui est chargé 19 Santé et sécurité au travail : notions de base de la prestation des services sociosanitaires courants et de l’organisation communautaire. En santé au travail, il possède une équipe composée d’infirmières, de techniciens en hygiène industrielle et de médecins qui en collaboration avec le CISSS ou du CIUSSS assurent les services nécessaires pour la mise en application des programmes de santé au travail. Par exemple, il procède aux examens requis par le programme de santé au travail. C) Les organismes patronaux et syndicaux Depuis toujours les employeurs et les travailleurs ont senti le besoin de former des associations qui leur sont propres pour défendre leurs intérêts particuliers. Avec l’arrivée de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, plusieurs de ces organismes ont accordé une attention prioritaire à la santé et à la sécurité et dispensent à cette fin des services de conseil à leurs membres. Des subventions à des fins de formation leur sont également versées par la C.N.E.S.S.T. Il serait inutile ici de dresser la liste de ces associations, mais mentionnons cependant que certaines d’entre elles offrent depuis déjà plusieurs dizaines d’années des services de formation, d’information et de conseil en matière de santé et de sécurité. C’est le cas des principaux syndicats au Québec ainsi que de l’association des mines de métaux du Québec. 1.3.4 Les droits et les obligations des employés et des employeurs Pour les droits et obligations des employeurs et des travailleurs, consultez la page du site de l’Association Paritaire Secteur Affaires Municipales (APSAM) en cliquant sur le lien suivant : droits et obligations 20 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail 1.4 Application de la Loi En 1980, on comptait plus de 200 000 établissements couverts par le régime québécois de santé et de sécurité, répartis dans une trentaine de secteurs d’activité économique. Il était donc impossible d’appliquer toutes les dispositions de la loi en même temps, d’autant plus que cette Loi constituait une réforme globale de tout un système de santé et de sécurité. Le législateur a plutôt opté pour une application progressive de la loi. Pour ce faire, il s’y est pris de deux façons : - premièrement, lors de l’adoption de la loi en 1979, plusieurs articles n’étaient pas entrés en vigueur et c’était le cas encore pour quelques articles qui concernent les chantiers de construction9 jusqu’en janvier 2023; - deuxièmement, même si la loi s’applique à toutes les entreprises, certains articles ne s’appliquent qu’aux économique appelés secteurs ou groupes secteurs d’activité prioritaires.10 C’est à la C.S.S.T. (maintenant la C.N.E.S.S.T.) qu’a été confié le mandat d’établir des priorités d’application de la loi. C’est ainsi qu’elle a établi des secteurs d’activité économique considérés comme prioritaires en fonction de la gravité des accidents dans ces secteurs. Chaque année, un groupe de six secteurs d’activité est désigné comme groupe prioritaire et dès lors soumis aux articles de la loi qui sont d’application progressive. 9 C’est l’adoption de la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail, qui a changé la donne le 1er janvier 2023. 10 D’ici 2025, la notion de groupes prioritaires sera abandonnée (LMRSST). Entretemps, cette notion est importante pour l’application du régime intérimaire qui permet de faire le lien entre le régime actuel et le nouveau régime qui sera en vigueur au plus tard le 6 octobre 2025. Les modalités d’application du régime intérimaire sont abordées dans le module 10. 21 Santé et sécurité au travail : notions de base Ce principe sera exposé en détail au module 10. Nous avons joint au présent document la liste des secteurs prioritaires (voir page suivante), en vous rappelant que : 1. le groupe 1 a été déclaré prioritaire en juillet 1982; 2. le groupe 2 a été déclaré prioritaire en mai 1983; 3. le groupe 3 a été déclaré prioritaire en mars 1985. Depuis 1985, il n’y a pas eu de changement quant à la déclaration d’autres secteurs prioritaires. Ainsi, les entreprises des groupes 4, 5, et 6 n’étaient toujours pas couvertes par les articles de la LSST concernant le programme de santé, le programme de prévention, le représentant à la prévention et le comité de santé et de sécurité. Cependant, la sanction de la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST) le 6 octobre 2021 apporte des changements importants la Loi sur la santé et la sécurité du travail, entre autres, en prévoyant étendre les mécanismes de participation des travailleurs à tous les établissements du Québec. Ainsi, la notion de groupe prioritaire devrait être abandonnée lors de l’adoption du nouveau Règlement sur les dispositions des mécanismes de participation et de prévention d’ici octobre 2024 par la CNESST ou au plus tard par le gouvernement le 6 octobre 2025. D’ici là, la LMRSST prévoit un régime intérimaire qui fera le lien entre le régime actuel et le nouveau régime relativement aux modalités d’application des mécanismes de participation et de prévention. 22 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail TABLEAU 1 : Liste des secteurs prioritaires Projet des secteurs prioritaires préparés par le comité ad hoc sur les priorités en santé et sécurité au travail Groupe 1 Groupe 11 Bâtiment et travaux publics Chimique Forêt et scierie Mines et carrières Produit en métal Bois (sans scierie) Caoutchouc, matières plastiques Équipement de transport Première transformation des métaux Produits minéraux non métalliques Groupe 111 Groupe 1V Administration Aliments et boissons Meuble Papier Transport Commerce Cuir Machine Tabac Textile Groupe V Groupe V1 Autres services commerciaux et professionnels Communication Imprimerie-édition Pétrole-charbon Produits électriques Agriculture Bonneterie et habillement Enseignement et services annexes Finance, assurance, affaires immobilières Services médicaux et sociaux 1.5 Résumé des principales modifications apportées à la LSST par la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail Tel que précisé au début du document l’adoption du projet de loi 59, visant la modernisation du régime de santé et de sécurité du travail le 6 octobre 2021 entraîne plusieurs changements au niveau de la Loi sur la santé et la sécurité du travail qui s’appliqueront graduellement, jusqu’en 2025. Voici un aperçu des principales modifications : 23 Santé et sécurité au travail : notions de base Entrée en vigueur le 6 octobre 2021 - L’application de la LSST au télétravail. - L’obligation de l’employeur de prendre les mesures nécessaires sur les lieux du travail pour contrer la violence physique ou psychologique, dont une situation de violence conjugale, familiale ou à caractère sexuel. Entrée en vigueur le 6 avril 2022 - La mise en place d’un régime intérimaire de prévention soit une solution provisoire concernant la prévention et la participation des travailleuses et des travailleurs avant l’adoption du Règlement sur les mécanismes de prévention. Le régime intérimaire permet de déployer des mécanismes tels que le programme de prévention ou plan d’action, le comité de santé et de sécurité, le représentant à la prévention, etc. à tous les établissements québécois. Les mesures varient selon la taille des établissements (20 travailleurs ou plus et moins de 20 travailleurs). Entrée en vigueur le 1er janvier 2023 - La mise en vigueur des dispositions de la Loi sur la santé et la sécurité du travail concernant le comité de chantier. - La définition du rôle de la coordonnatrice ou du coordonnateur en santé et en sécurité sur un chantier de construction. - La précision des éléments spécifiques au programme de prévention sur un chantier. - La définition du rôle de la représentante ou du représentant en santé et sécurité pour les chantiers de construction. 24 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail Entrée en vigueur prévue le 1er janvier 2024 - Permettre le remboursement des frais liés aux programmes de formation pour les mécanismes de participation. Entrée en vigueur prévue à la date fixée par le gouvernement 11 - Désigner une agente ou un agent de liaison en santé et en sécurité dans les établissements ayant moins de 20 travailleurs. - Rendre obligatoire le comité de santé et de sécurité (CSS) dans les établissements qui ont au moins 20 travailleurs au cours de l’année. - Dès qu’un comité de santé et de sécurité (CSS) est constitué dans un établissement une représentante ou un représentant en santé et sécurité – prévention doit être désigné(e) par les travailleurs. - Rendre obligatoire un plan d’action en prévention dans les établissements de moins de 20 travailleurs. - Étendre l’obligation d’élaborer un programme de prévention à tous les établissements regroupant au moins 20 travailleurs au cours de l’année et cela dans tous les secteurs d’activités. - Permettre d’établir un seul programme de prévention pour un employeur ayant plusieurs établissements où s’exercent des activités de même nature. - Inclure les risques psychosociaux liés au travail dans la démarche de prévention. Pour de plus amples informations consultez le site de la CNESST Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail en résumé 11 La CNESST doit adopter un Règlement sur les mécanismes de prévention et de participation dans les 3 ans suivant l’adoption de la LMRSSS. Si tel n’était pas le cas, le gouvernement établirait les dates d’application de ces mécanismes, qui ne peuvent être postérieures à 4 ans suivant la date de sanction de la Loi, soit le 6 octobre 2025. 25 Santé et sécurité au travail : notions de base 2. LA LOI SUR LES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET LES MALADIES PROFESSIONNELLES (LATMP) Présentation et historique Cette loi constitue le deuxième volet de la réforme globale dans le domaine de la santé et de la sécurité du travail annoncée dans le Livre blanc en 1978. Elle fut adoptée le 23 mai 1985 et sanctionnée le 19 août 1985. Elle fut modifiée à quelques reprises par la suite, en autres en 1992, 1997, 2016 et tout récemment en 2021.12 Lors de son adoption, le Conseil du patronat et les principales associations patronales ont dénoncé le projet de même que la C.S.N., la C.S.D. et plusieurs organismes populaires. Depuis que cette loi est en vigueur, des critiques de part et d’autre se font encore entendre, mais les deux parties se sont habituées à vivre avec les prescriptions qu’elle impose. À l’intérieur de cette partie, nous aborderons les thèmes suivants : - les notions d’accident du travail et de maladie professionnelle, - les présomptions, - le transfert de la responsabilité médicale, - le droit de retour au travail, - le droit à la réadaptation, - les mécanismes d’appel 12 La Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST) entraîne des changements à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP) telle que nous la connaissions. Les modifications sont présentées au point 2.9 du présent module. Les mesures de la LMRSST qui s’appliquent actuellement ont été intégrées au document. Nous vous référons au site de la CNESST pour de plus amples informations sur ces modifications ainsi qu’au texte la Loi. 26 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail 2.2 Les notions d'accident du travail et de maladie professionnelle La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP) regroupe sous le vocable de « lésion professionnelle » les accidents et les maladies du travail. Pour les définitions d’accident du travail, de maladie professionnelle et de lésion professionnelle, consultez les définitions à l’article 2 de la LATMP en cliquant sur le lien suivant : LATMP La définition d’un accident du travail implique donc la survenue d’un « fait accidentel ». En d’autres termes, il doit s’être produit un événement, un fait, qui a entraîné une blessure ou une maladie. Cette définition introduit également les notions de « par le fait du travail » et « à l’occasion du travail ». Un accident survenu par le fait du travail est le plus facile à définir : la personne a été blessée en exécutant son travail. C’est le cas par exemple de l’ouvrier qui se coupe avec sa scie alors qu’il effectue son travail. La notion « à l’occasion du travail » est plus floue et elle a donné lieu à plusieurs cas de contestation. La personne a été blessée alors qu’elle était sous le contrôle, la subordination ou la surveillance de son employeur sans nécessairement être à exécuter son travail. Par exemple, la jurisprudence a retenu comme des « accidents du travail » des cas où des travailleuses et travailleurs furent blessés sur le stationnement de l’employeur avant ou après le travail. On a également retenu des cas où les travailleurs furent blessés dans des bâtiments appartenant à l’employeur (dortoir, cafétéria, salle de repos) sur des chantiers éloignés (forêts, mines, etc.), en dehors des heures régulières de travail dans certaines situations. Les tribunaux ont donc décidé de définir « à l’occasion du travail » comme un accident qui, sans avoir pour cause directe le travail de la victime, a été entraîné par un acte connexe au travail et plus ou moins utile à son accomplissement. 27 Santé et sécurité au travail : notions de base 2.3 Les présomptions Le terme de « présomption » se définit comme une supposition que l’on tient pour vraie jusqu’à preuve du contraire. D’un point de vue légal, lorsque les circonstances font qu’un individu bénéficie d’une présomption, cela signifie qu’il n’a pas besoin de prouver ce qu’il avance pour bénéficier des droits que lui reconnaît la loi. La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles contient 7 présomptions13. 1. Présomption de lésion professionnelle, art. 28 : Si le travailleur démontre que sa blessure est survenue sur les lieux de travail, il n’a plus comme auparavant à faire la preuve qu’elle est arrivée par le fait ou à l’occasion du travail : sa blessure est automatiquement considérée comme causée par un accident du travail. L’employeur qui veut contester cet accident aura à faire la preuve du contraire. 2. Présomption de maladie professionnelle, art. 29 : La loi contient à l’annexe I une liste de maladies auxquelles correspondent une série de travaux ou de tâches. La Loi modifiant le régime de santé et de sécurité au travail (LMRSST) a bonifié cette annexe faisant passer de 5 à 8 les sections identifiant certaines maladies comme étant des maladies professionnelles. Elle ajoute notamment, aux catégories de maladies bénéficiant de la présomption, les maladies oncologiques et les troubles mentaux. Les maladies oncologiques et cancers ajoutés touchent principalement les pompiers ayant été exposés à des gaz et des fumées d’incendie. Sont aussi ajoutés à la liste le syndrome de stress posttraumatique, en certaines circonstances, et la maladie de Parkinson pour les travailleurs agricoles. Si un travailleur est atteint d’une maladie inscrite dans cette annexe et qu’il exerce le travail correspondant, la preuve est faite que 13 Pour le libellé des articles, cliquez sur le lien suivant : LATMP 28 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail sa maladie est une maladie professionnelle. C’est le cas par exemple des personnes atteintes de silicose et qui ont exercé un travail de mineur ou de nettoyage au jet de sable. 3. Présomption d’incapacité d’exercer son emploi tant que la lésion professionnelle n’est pas consolidée, art. 46 : La loi définit la consolidation comme la guérison ou la stabilisation d’une lésion professionnelle à la suite de laquelle aucune amélioration de l’état de santé du travailleur victime de cette lésion n’est prévisible. Donc, tant que son état de santé peut s’améliorer à la suite d’une lésion, le travailleur est considéré comme incapable d’exercer son emploi. 4. Présomption d’invalidité, art. 53 : Le travailleur âgé d’au moins 60 ans victime d’une lésion professionnelle et qui subit, en raison de cette lésion, une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique qui le rend incapable d’exercer son emploi, a droit à une indemnité égale à 90% du salaire net qu’il gagnait à cet emploi jusqu’à ce qu’il occupe un nouvel emploi ou qu’il occupe ou refuse d’occuper un emploi convenable disponible chez son employeur. 5. Présomption de décès en raison d’une maladie professionnelle, art. 95: Un travailleur atteint d’une maladie professionnelle pouvant entraîner le décès, qui décède alors qu’il reçoit une indemnité de remplacement de revenu en raison de cette maladie, est présumé mort de cette maladie. Cette présomption s’applique si la C.N.E.S.S.T. a la possibilité de faire autopsier le corps du travailleur. 6. Présomption de décès, art. 96 : La C.N.E.S.S.T. peut conclure au décès d’un travailleur, si ce dernier est disparu à la suite d’un événement survenu par le fait ou à 29 Santé et sécurité au travail : notions de base l’occasion du travail et dans des circonstances qui font présumer son décès. La commission considère que la date du décès du travailleur est celle de survenue de l’événement. 7. Présomption de sanction imposée contre un travailleur victime de lésion professionnelle, art. 32 et 255 : L’article 32 stipule qu’un employeur ne peut, à l’endroit d’un travailleur, exercer de mesure disciplinaire, quelle qu’elle soit parce qu’il a été victime d’une lésion professionnelle ou à cause de l’exercice d’un droit que lui confère la loi. L’article 255, pour sa part, stipule que, si un travailleur a été l’objet d’une mesure disciplinaire dans les six mois de la date où il a exercé un droit que lui confère la loi, il y a présomption en faveur du travailleur à savoir que la mesure disciplinaire lui a été imposée en raison de son accident ou de l’exercice de ses droits. Il revient alors à l’employeur de faire la preuve que la mesure disciplinaire est juste et qu’elle a été imposée pour d’autres raisons. 2.4 Les indemnités de remplacement de revenu Un travailleur qui ne peut plus travailler en raison d’une lésion professionnelle a droit à une indemnité de remplacement de revenu tant que sa lésion n’est pas consolidée. Le jour même de l’accident, l’employeur verse au travailleur son salaire régulier. Par la suite, l’indemnité lui est versée de la façon suivante : 1. Pour les quatorze jours qui suivent l’accident, l’employeur versera au travailleur 90 % du salaire net qu’il aurait normalement gagné, c’est-à-dire son salaire brut moins l’impôt, le régime des rentes et l’assurance-chômage. Ce montant sera remboursé à l’employeur par la C.N.E.S.S.T. sur présentation du formulaire prévu à cet effet. 2. Après quinze jours de la date de l’accident, le travailleur recevra de la C.N.E.S.S.T. l’indemnité de remplacement de revenu (I.R.R.), qui correspond à 90 % du salaire net jusqu’à un maximum assurable, 30 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail indexé chaque année. En 2023, par exemple, ce maximum est de 91 000 $. Pour recevoir cette indemnité, le travailleur doit faire parvenir à la C.N.E.S.S.T. le formulaire prévu à cet effet. 2.5 Le transfert de la responsabilité En vertu des articles 192 et 199 à 225, un travailleur victime d’une lésion professionnelle a, pour se faire traiter, le libre choix du médecin, du professionnel de la santé et de l’établissement de santé. Concernant une lésion professionnelle, la C.N.E.S.S.T. est liée par le rapport, le diagnostic et la conclusion du médecin qui a à sa charge le travailleur. L’employeur peut cependant exiger du travailleur qu’il se soumette à l’examen qu’il décide. Si le rapport médical du médecin choisi par le travailleur est en désaccord avec le rapport du médecin choisi par l’employeur, le litige sera entendu par le bureau d’évaluation médicale (B.E.M.). La C.N.E.S.S.T. est alors liée par les conclusions du B.E.M. qui rend un avis dans les 30 jours de l’expédition du dossier. 2.6 Le droit de retour au travail, art. 234 à 26414 La loi introduit un nouveau droit pour le travailleur victime d’une lésion professionnelle et c’est celui de conserver son emploi. Dans les entreprises de vingt travailleurs et moins, ce droit est d’une durée d’un an à compter de la date de la lésion et il est d’une durée de deux ans dans les entreprises de plus de vingt travailleurs. Durant cette période, le travailleur continue d’accumuler de l’ancienneté et de participer aux régimes de retraite et d’assurances. Si, à l’intérieur de ces délais, le travailleur dont la lésion est consolidée ne peut réintégrer son ancien emploi parce qu’il a subi une perte 14 Pour le libellé des articles, cliquez sur le lien suivant : LATMP 31 Santé et sécurité au travail : notions de base permanente de capacité physique, il aura droit à un emploi équivalent ou à un emploi convenable. S’il y a désaccord entre l’employeur et le travailleur en ce qui regarde l’exercice de ce droit, la C.N.E.S.S.T. tranchera le débat à la demande de l’une ou l’autre des parties sauf si une convention collective prévoit des dispositions relatives au droit de retour au travail. 2.7 La réadaptation L’ancienne Loi des accidents de travail ne prévoyait que très peu de choses en regard de la réadaptation des travailleurs victimes de lésions professionnelles. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. C’est maintenant un droit clairement établi qu’un travailleur qui subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique et qui éprouve des difficultés de réinsertion sociale et professionnelle pourra bénéficier des mesures de réadaptation prévues aux articles 166 à 187 de la loi. Le plan de réadaptation est individualisé. Il est préparé et mis en œuvre avec la collaboration du travailleur. Il comporte trois volets : 1. la réadaptation physique, qui vise à éliminer ou atténuer l’incapacité physique; ce peut être par exemple des soins médicaux, des traitements de physiothérapie et d’ergothérapie, un programme d’adaptation à une prothèse, etc.; 2. la réadaptation sociale, qui vise à amener le travailleur à retrouver son autonomie dans l’accomplissement de ses activités habituelles. Elle peut se traduire par des services professionnels d’intervention psychosociale ou par la transformation du domicile et du véhicule aux capacités résiduelles du travailleur; 3. la réadaptation professionnelle, qui facilite la réintégration du travailleur dans son emploi, dans un emploi équivalent ou convenable par des programmes de recyclage, de formation 32 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail professionnelle, de support en recherche d’emploi et d’adaptation de poste de travail. En outre, la C.N.E.S.S.T. peut prendre toutes les mesures qu’elle estime utiles pour favoriser la réinsertion professionnelle du conjoint d’un travailleur décédé en raison d’une lésion professionnelle. 2.8 Les mécanismes d'appel En vertu des articles 358 et 359 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, toute décision (même en matière de financement) rendue par la C.N.E.S.S.T. en vertu de cette loi peut être contestée par une personne qui se croit lésée par cette décision. Ces contestations peuvent porter sur des questions d’ordre médical comme le diagnostic de la maladie, le temps requis à la consolidation de la blessure et le pourcentage de perte de capacité physique, appelé dans le jargon « déficit anatomophysiologique » (D.A.P.). Dans tous ces cas, la contestation doit être acheminée au Bureau d’évaluation médicale dans les trente jours de la réception du rapport médical que l’on désire contester. Une demande de révision d’une décision de la CNESST suite à un avis rendu par le B.E.M. peut, depuis avril 2023, être acheminée à la CNESST dans les 30 jours de la décision ou contester devant le Tribunal administratif du travail, un tribunal indépendant de la C.N.E.S.S.T. , dans les 60 jours suivants la notification de la décision. Les décisions rendues par le tribunal administratif du travail sont finales et sans appel. Dans les autres cas où la contestation porte sur le « fait accidentel », sur le montant d’une indemnité ou sur la notion « à l’occasion du travail », les parties ont trente jours à compter d’une décision de la C.N.E.S.S.T. pour contester celle-ci en révision administrative ou 60 jours pour la contester directement devant le tribunal administratif. La décision de la révision administrative peut également être portée en appel dans les soixante jours au Tribunal administratif du travail (TAT) qui remplace depuis janvier 2016 la Commission des lésions professionnelles (CLP). 33 Santé et sécurité au travail : notions de base 2.9 Résumé des principales modifications de la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail Dans les prochaines lignes, nous vous présentons quelques-unes des modifications apportées à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Entrée en vigueur le 6 octobre 2021 - L’adoption d’un nouveau Règlement sur les maladies professionnelles, lequel prévoit en annexe la liste des maladies bénéficiant d’une présomption d’admissibilité en vertu de l’article 29 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. - La création de nouveaux comités : au comité des maladies pulmonaires déjà existant s’ajoutent un comité scientifique sur les maladies professionnelles et des comités sur les maladies professionnelles oncologiques - L’augmentation des montants des amendes pour les infractions à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles - La clarification de la couverture du stagiaire Entrée en vigueur le 6 octobre 2022 - Un meilleur encadrement du processus d’assignation temporaire par l’utilisation d’un seul formulaire par tous les intervenants - La révision des pouvoirs du bureau d’évaluation médicale concernant la consolidation d’une lésion professionnelle - La possibilité d’accorder des mesures de réadaptation à la travailleuse et au travailleur avant la guérison ou la stabilisation de sa lésion professionnelle 34 Module 8: Lois et intervenants en santé et sécurité du travail - L’encadrement de l’obligation d’accommodement en favorisant le retour travail prompt et durable des travailleuses et travailleurs ayant subi une lésion professionnelle. Entrée en vigueur le 6 avril 2023 - L’ajout d’un délai maximal de traitement pour la révision administrative - Le choix de demander une révision d’une décision à la CNESST ou de la contester devant le tribunal administratif Pour de plus amples informations consultez le site de la CNESST Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail en résumé 35 Santé et sécurité au travail : notions de base Conclusion Au Québec, notre régime de santé et de sécurité du travail est l’un des plus avancés en Amérique du Nord et sur ce point, les opinions sont unanimes. Cependant, tout le monde s’entend également pour dire qu’il n’y a pas un régime, un système d’inspection ou une loi qui sera efficace sans la collaboration, la coopération et la participation pleine et entière des travailleurs et des employeurs. Depuis la mise en application de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, l’expérience montre par exemple que l’efficacité d’un comité de santé et de sécurité dépend uniquement de la volonté des parties de se prendre en charge et de régler ensemble leurs problèmes. Il est donc très important de susciter chez tous les intervenants dans l’entreprise une volonté de s’impliquer dans la gestion des problèmes de santé et de sécurité ainsi qu’un climat de confiance propre à susciter la participation de chacun, si l’on veut que les investissements en ressources de toutes sortes viennent à porter fruit. 36

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