Module 5: Introduction à la prévention des accidents PDF

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Université Laval

2023

Michel Pérusse

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accident prevention workplace safety health and safety occupational health

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This document is a module on accident prevention in the workplace. It discusses the definition of work-related accidents, different diagnostic techniques, types of interventions, and the importance of continuous safety management. It's focused on the Canadian context.

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Santé et sécurité au travail Notions de base Module 5 Introduction à la prévention des accidents Michel Pérusse Département de médecine sociale et préventive Faculté de médecine Université Laval Santé et sécurité au travail : notions de base 2 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents Éq...

Santé et sécurité au travail Notions de base Module 5 Introduction à la prévention des accidents Michel Pérusse Département de médecine sociale et préventive Faculté de médecine Université Laval Santé et sécurité au travail : notions de base 2 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents Équipe de production Responsable du cours Michèle Bérubé Département de médecine sociale et préventive Conception pédagogique Marc Champagne, service des ressources pédagogiques Denise Vigneault, conseillère en APTIC Yves Cantin, département de médecine sociale et préventive Mise à jour 2023 Michèle Bérubé Traitement de texte Louiselle Desjardins Michèle Gagnon 3 Santé et sécurité au travail : notions de base 4 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents Table des matières Objectifs d'apprentissage................................................................................. 7 Introduction...................................................................................................... 9 1. Définition de l'accident du travail..................................................... 11 1.1 Définition de l'accident du travail............................................ 11 1.2 Principales causes des accidents.............................................. 12 2. Les techniques de diagnostic des problèmes.................................... 14 2.1 Les techniques post-accidents.................................................. 14 2.2 Les techniques préventives...................................................... 18 2.3. Complémentarité des techniques diagnostiques....................... 21 3. Le choix du mode d'intervention...................................................... 21 3.1 Les interventions à la source.................................................... 22 3.2 Interventions entre la source et les personnes.......................... 23 3.3 Interventions auprès des personnes.......................................... 26 4. Suivi des interventions...................................................................... 30 4.1 Gestion de la sécurité............................................................... 31 Conclusion..................................................................................................... 33 5 Santé et sécurité au travail : notions de base 6 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents OBJECTIFS D'APPRENTISSAGE Après l'étude de ce module, vous serez en mesure de : 1. Définir le concept « d'accident du travail ». 2. Identifier diverses causes ou « antécédents de l'accident ». 3. Expliquer dans quel sens s'est effectuée la façon d'aborder la « prévention des accidents ». 4. Décrire quatre techniques de diagnostic des problèmes d'accidents du travail et en démontrer leur complémentarité. 5. Utiliser les trois indicateurs statistiques utilisés pour décrire le nombre et la gravité des accidents et en comprendre les limites. 6. Décrire l'utilisation de l'enquête et l'analyse d'accidents. 7. Distinguer les quatre types d'inspection et en décrire le mode d'utilisation. 8. Décrire la démarche d'utilisation de l'analyse de la sécurité de la tâche. 9. Distinguer les trois grandes catégories d'intervention préventive. 10. Identifier la place du suivi qui doit être donné aux propositions de correction des risques identifiés. 11. Expliquer comment la prévention s'inscrit dans le processus de gestion de l'entreprise. 7 Santé et sécurité au travail : notions de base 8 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents INTRODUCTION Lorsque l'on sait qu'il se produit au Québec chaque année plus ou moins 100 000 accidents de travail dont 10 % entraînent 21 jours et plus d'absence et que plus de 200 personnes perdent la vie au travail, la prévention des accidents devient une priorité de tout premier plan. Étant donné que la définition qu'on se fait de l'accident oriente le type de prévention qui sera par la suite adopté, le premier chapitre de ce texte traitera d'une conception de l'accident qui permet une démarche de prévention par l'élimination à la source des risques d'accidents. Il va de soi que si, dans notre milieu de travail, on veut réaliser une bonne prévention, la première étape consistera à bien identifier les risques. Plusieurs techniques peuvent nous aider à réaliser cette activité d'identification. Elles seront exposées au chapitre 2. Lorsque les risques sont identifiés, il faut nous pencher sur le choix d'une solution. Ce thème fera l'objet du chapitre 3 et il en sera brièvement question au chapitre 4. Le module 11 reprendra en détail le thème du suivi des activités de prévention. 9 Santé et sécurité au travail : notions de base 10 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents 1. DÉFINITION DE L'ACCIDENT DU TRAVAIL 1.1 Définition de l'accident du travail Lorsqu'on parle de sécurité au travail, on fait référence à un phénomène qui est malheureusement encore trop répandu aujourd'hui, à savoir celui des accidents du travail. Lorsque vient le moment de définir ce qu'est un accident du travail, il y a une certaine confusion qui règne. De fait, il existe autant, sinon plus de définitions qu'il y a d'auteurs qui ont écrit sur le sujet. Il faut voir l'accident du travail comme la rencontre fortuite dans le temps et dans l'espace d'un certain nombre de circonstance propices à causer un dommage, qu'il s'agisse de dommage matériel ou de dommage à une personne sous forme de blessure ou d'atteinte à son intégrité. Selon une autre définition, les blessures seraient le résultat du contact entre un agent agresseur et une personne. Ainsi, au moment du contact, il y aurait transfert sur la personne humaine d'une quantité d'énergie provenant de l'agent agresseur; cette énergie dépasserait la capacité de résistance de la personne. À la lumière de ces définitions, on peut envisager deux façons de faire de la prévention des accidents : 1. Une première façon viserait à empêcher ce contact entre les agents susceptibles de produire des blessures et les personnes exposées à ces agents ou les personnes qui ont à manipuler lesdits agents. 2. Une deuxième façon consisterait à faire disparaître complètement le potentiel de dangers présents dans le milieu. Cette approche viserait donc à corriger ou à faire disparaître les agents agresseurs. 11 Santé et sécurité au travail : notions de base 1.2 Principales causes des accidents Traditionnellement, on considérait qu'il y avait deux causes ou deux familles de causes au fait accidentel. Une première portait sur les personnes ellesmêmes, à savoir qu'il y avait chez des personnes des caractéristiques qui pouvaient les rendre plus vulnérables à l'accident; une deuxième catégorie portait sur les équipements eux-mêmes, c'est-à-dire que les machines ou les outils pouvaient présenter des caractéristiques dangereuses. À ces deux catégories, progressivement, se sont ajoutées trois ou quatre autres catégories d'antécédents aux faits accidentels. Une première catégorie concerne les conditions environnementales. Il est maintenant reconnu que certains types d'environnement sont plus propices que d'autres à produire des accidents. Une deuxième catégorie regroupe les variables organisationnelles. Plusieurs recherches récentes tendent à démontrer que certaines politiques, certaines procédures dans les entreprises, certaines façons d'organiser ou de répartir le travail pourraient représenter des problèmes potentiels et entraîner éventuellement des accidents. Une autre catégorie concerne les facteurs reliés à la tâche. Il faut entendre par là que la façon même dont certaines tâches sont conçues peut rendre ces tâches plus propices que d'autres à produire des accidents. Enfin, certains auteurs utilisent la catégorie des variables temporelles. Ces variables concernent la période de l'année ou la période de la semaine ou l'heure du jour ou le quart de travail. Cependant, ces variables ne sont pas nécessairement des facteurs d'accidents en soi. Elles deviennent des facteurs d'accidents dans la mesure où, conséquemment, cette augmentation entraînerait une plus grande exposition, donc une plus grande probabilité d'accident. Donc, depuis la fin des années 30 et le début des années 40, les modèles ou les façons de concevoir l'accident se sont quelque peu complexifiés. Il est loin le temps où l'on identifiait une seule cause importante aux accidents qui était la prédisposition aux accidents ou ce que l'on appelait en anglais accident proneness. Cette théorie voulait qu'il y ait des variables, surtout des variables de personnalité, inhérentes aux victimes d'accidents qui les rendaient plus susceptibles que d'autres de subir des accidents. 12 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents Comme, au cours des cinquante dernières années, les recherches visant à identifier les caractéristiques de personnalité n'ont pas produit de résultats fiables, il faut donc chercher ailleurs les causes possibles des accidents. Même s'il était possible d'identifier des variables de personnalité qui démontreraient une certaine constance dans leur relation avec les taux d'accidents, l'intervention sur ces variables poserait un double problème : d'une part, un problème d'éthique, puisqu'on peut toujours se demander de quel droit on pourrait « modifier » des caractéristiques d'une personne, même si les caractéristiques visées étaient reliées aux accidents; d'autre part, cette intervention s'en prendrait principalement aux victimes plutôt qu'aux causes et irait carrément à l'encontre de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. En effet, à l'article 2 de la loi, on lit : « l'objet de la loi est de corriger à la source même les dangers pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique des travailleurs ». 1.3 Approche préventive appliquée à la sécurité Cette intervention à la source, on peut alors la situer dans une approche proprement préventive. Généralement, la démarche préventive est la suivante : il faut - Identifier clairement le problème et ses origines. Dans le domaine de la sécurité, il y a certain nombre de techniques qui nous permettent de diagnostiquer le problème auquel nous sommes confrontés; - Choisir une solution adéquate qui doit assurer la non-répétition des événements malheureux, à savoir les accidents; - Implanter la solution choisie; - Évaluer nos interventions, afin de nous assurer que les solutions retenues sont bonnes. 13 Santé et sécurité au travail : notions de base 2. LES TECHNIQUES DE DIAGNOSTIC DES PROBLÈMES Voyons maintenant, plus en détails le processus de la démarche préventive appliquée à la sécurité, c'est-à-dire à l'élimination des problèmes qui causent les accidents du travail. Quelles sont les techniques dont dispose le préventionniste pour bien diagnostiquer le problème accidentel auquel il doit faire face? Il y a quatre outils diagnostiques qui sont les plus souvent utilisés dans le domaine de la prévention des accidents. Deux de ces techniques, qu'on appelle postaccidents, reposent sur le fait que des accidents se sont déjà produits et qu'il convient d'en tirer les leçons qui s'imposent pour éviter qu'ils ne se reproduisent. Les deux autres techniques sont proprement préventives, c'està-dire qu'elles visent à identifier des problèmes potentiels d'accidents avant que ceux-ci ne se produisent (voir le tableau 1). TABLEAU 1 : Les activités d'identification de problèmes techniques POST-ACCIDENTS PRÉVENTIVES Descriptives Statistiques d'accidents Inspection des lieux de travail Analytiques Enquête et analyse des accidents Analyse de la sécurité des tâches 2.1 Les techniques post-accidents 2.1.1. Les statistiques d'accidents La première technique est d'ordre descriptif. Il s'agit des statistiques d'accidents. Les statistiques les plus couramment utilisées sont la fréquence relative, le taux de gravité et l'indice de gravité. 14 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents La fréquence relative, qu'on appelle aussi parfois le taux de fréquence, consiste à diviser le nombre d'accidents par le nombre d'heures travaillées et à multiplier ce résultat par une constante, généralement 200 000, ce qui nous donne un nombre d'accidents par 200 000 heures travaillées. Cet indicateur nous permet de comparer des usines entre elles ou des départements entre eux pour vérifier où se retrouve la fréquence d'accidents la plus élevée. Nombre d'accidents Fréquence = X 200 000 Nombre d'heures travaillées Exemple : Une entreprise emploie 50 personnes travaillant toutes 2 000 heures par année. Il se produit 10 accidents dans l'année entraînant 60 jours de perte de temps. Fréquence = 10 50 x 2000 X 200 000 = 20 accidents par 200 000 heures travaillées L'indice de gravité est généralement celui qui nous intéresse le plus en matière de prévention des accidents. En effet, c'est l'indice de gravité qui nous indique dans quelle mesure les accidents qui se produisent sont sérieux ou entraînent des conséquences graves. L'indice de gravité se calcule simplement en divisant le nombre de jours perdus par le nombre d'accidents, ce qui nous donne un nombre moyen de jours perdus par accident. Indice de gravité Nombre de jours perdus = Nombre d'accidents Dans notre exemple : Indice de gravité = 60 = 6 jours par accident 10 15 Santé et sécurité au travail : notions de base Quant au taux de gravité, il consiste simplement à diviser le nombre de jours perdus à cause des accidents par le nombre d'heures travaillées et à multiplier encore une fois par une constante, souvent 200 000. Le taux de gravité n'est ni plus ni moins que la fréquence relative multipliée par l'indice de gravité : c'est donc un indicateur mixte. Taux de gravité = Nombre de jours perdus X 200 000 Nombre d'heures travaillées T.G. = N.A. X N.H.T. N.J.P. N.A = N.J.P. N.H.T. Dans notre exemple: Taux de gravité = 60 50 x 2 000 X 200 000 = 120 jours perdus par 200 000 heures travaillées Ce qui nous intéresse en tant que préventionniste ou coordonnateur en santé et sécurité, c'est de savoir si les accidents ou certains types d'accidents sont fréquents et si les accidents qui se produisent sont graves. C'est pourquoi les deux indicateurs les plus utiles pour nous sont la fréquence relative et l'indice de gravité. Il faut bien comprendre que les statistiques ont leurs limites, en ce sens que, généralement, elles sont compilées uniquement pour tenir compte des lésions que les accidents ont produites. Peu de systèmes de statistiques, tels que nous les connaissons, compilent les causes d'accidents. Or, pour faire de la prévention, ce sont ces causes qui nous intéressent puisque ce sont elles qu'il faut éliminer pour empêcher les accidents de se produire. C'est pourquoi les statistiques ont un usage limité. À la limite, les statistiques peuvent permettre de localiser géographiquement les problèmes. Ainsi, si l'on veut comparer les départements d'une entreprise entre eux, le taux de fréquence le plus élevé nous indiquera dans quel département les accidents se produisent le plus fréquemment. De 16 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents même, l'indice de gravité nous permettra de dépister, par exemple, le département où les accidents se produisent sont les plus graves. 2.1.2 L'enquête et l'analyse d'accidents Donc si les statistiques nous disent où se situent les problèmes, elles nous disent rarement pourquoi ces problèmes se produisent. Le pourquoi nous est révélé par la deuxième méthode, à savoir l'enquête et l'analyse d'accidents. L'étape de l'enquête d'accident, à proprement parler, vise à disséquer toutes les circonstances qui ont contribué à la production d'un accident. Lorsqu'on analyse en profondeur ces circonstances, on en retrouve généralement plusieurs qui se présentent non pas sous une forme linéaire, c'est-à-dire : « A » entraînant « B », « B » entraînant « C » et ainsi de suite, mais on retrouve plutôt des conjonctures, des rencontres simultanées de plusieurs circonstances. C'est justement ce que le préventionniste devra identifier. En effet, les antécédents que l'on classe en cinq ou six catégories, comme nous le disions précédemment, c'est-à-dire les catégories individu, environnement, matériel, organisation et temps, ces antécédents donc vont nous faire ressortir les circonstances auxquelles le préventionniste doit s'attaquer. Les étapes d'une enquête d'accident consistent, dans un premier temps, à recueillir les données, c'est-à-dire à rencontrer les témoins, à prendre des échantillons, à faire des relevés, donc à identifier toutes les circonstances et à recueillir tous les témoignages. Dans un deuxième temps, l'analyse vise à arranger les faits recueillis pour reconstruire le portrait global du déroulement de l'accident. Ensuite, le préventionniste doit formuler des recommandations comme mesures préventives qui viseront à attaquer le problème accidentel à la source. À ce titre, les recommandations les plus efficaces que le préventionniste peut formuler sont celles qui concernent les circonstances de type matériel ou équipement et de type milieu puisque, généralement, c'est dans ce genre d'antécédents que se trouve la source des accidents. 17 Santé et sécurité au travail : notions de base Une fois les recommandations préventives formulées, il s'agit alors de les communiquer à toutes les instances concernées pour qu'une action corrective soit entreprise le plus tôt possible. Généralement, le temps de mise en application des recommandations est d'une importance primordiale. Par ailleurs, lorsqu'on interroge les témoins et la ou les victimes d'un accident, il est important que la notion de culpabilité soit complètement absente. En effet, il ne s'agit pas de trouver un coupable, mais bien de comprendre ce qui s'est passé. On sait maintenant que le fait d'insinuer qu'une personne pourrait être coupable d'une certaine façon de la production d'un accident, place cette personne en position défensive, ce qui a souvent pour effet de faire en sorte que la personne « oublie » certains indices pouvant l'incriminer. Il faut donc mettre les témoins ou la victime à l'aise lors de cette entrevue qui vise à recueillir des faits, uniquement. Évidemment, le préventionniste devra faire un rapport détaillé de tous les accidents qui ont présenté une certaine gravité. Il faut se rappeler toutefois que ce n'est pas seulement les accidents qui ont produit des blessures graves qui peuvent nous donner des informations précieuses en matière de prévention. Il est fort possible que certains accidents n'aient entraîné que des conséquences très légères sur le plan matériel ou sur le plan des blessures mais, si on les regarde de plus près, ils auraient pu avoir des conséquences très sérieuses. C'est pour cela que le préventionniste ou le coordonnateur en santé et sécurité qui en a la possibilité devrait s'intéresser non seulement aux accidents graves, mais à tous les accidents qui auraient pu avoir des conséquences, même s'ils n'en ont pas eues. Ce n'est que par une analyse systématique des cas d'accidents, à plus forte raison si on y ajoute un survol rétrospectif de plusieurs cas d'accidents, que le préventionniste pourra comprendre pourquoi les accidents se produisent dans le milieu dont il a la charge. 2.2 Les techniques préventives Une fois les statistiques compilées et les enquêtes et analyses d'accidents bien documentées, le préventionniste doit examiner attentivement le milieu, le lieu 18 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents de travail, l'exécution du travail, de façon à y déceler des problèmes potentiels. Cela nous amène donc aux deux techniques plus préventives, à savoir l'une d'ordre descriptif, qui vise l'inspection des lieux de travail, et l'autre d'ordre analytique, c'est-à-dire l'analyse de sécurité des tâches. 2.2.1 L'inspection des lieux de travail En ce qui concerne l'inspection des lieux de travail, il s'agit d'identifier sur les lieux mêmes les risques d'accidents et non de faire de l'inspection routinière. Aussi faut-il bien s'assurer que cette inspection, si elle décèle des problèmes, des milieux inadéquats ou la présence de facteurs de risque, soit obligatoirement suivie d'actions correctives. C'est pourquoi il convient de confier aux personnes qui font de l'inspection des lieux de travail, le pouvoir d'émettre des recommandations préventives qui devront être exécutées dans les plus brefs délais. Il existe plusieurs types d'inspection des lieux de travail. Certaines se font sur une base ponctuelle, à la demande, et consistent à vérifier un ou des éléments très précis dans un endroit bien déterminé. D'autres, plus générales, visent à identifier tous les risques présents dans un milieu de travail. Il y a aussi des stratégies d'inspection des lieux de travail qui visent à vérifier certains éléments prédéterminés. Enfin, il y a d'autres stratégies de type « stratégie ouverte » où l'inspecteur a pour mandat de tout examiner. Ces stratégies peuvent être localisées géographiquement ou s'étendre à la grandeur de l'usine. Elles peuvent se limiter à des catégories de risques très précises comme les risques de foyers d'explosion, les risques électriques et ainsi de suite ou elles peuvent viser toutes les catégories de risques. Une saine prévention doit pouvoir reposer sur des inspections ponctuelles, assez régulières, de même que sur des inspections très systématiques, sur une base un peu plus espacée, comme des inspections générales qui auraient lieu une fois l'an, par exemple. 19 Santé et sécurité au travail : notions de base 2.2.2 L'analyse de la sécurité des tâches Quant à l'analyse de sécurité des tâches, c'est une technique qui vise à décomposer une tâche dans ses éléments fondamentaux et à identifier, pour chacun de ces éléments, tous les risques qui peuvent se présenter lors de l'exécution de cette tâche. Une fois les éléments de risque identifiés pour chacune des étapes de la tâche, il s'agit alors de formuler une mesure préventive qui tente d'empêcher ce risque de se matérialiser sous forme d'accident. Pour identifier le risque à chacune des étapes de la tâche, on peut se poser des questions comme : « À cette étape, est-ce que le sujet ou la personne qui travaille est susceptible d'être en contact avec des éléments coupants, avec des éléments très chauds, très froids? Est-ce que la personne est susceptible de se heurter, d'être frappée? Est-ce que la personne est susceptible de tomber? » Et ainsi de suite. Quant aux recommandations de mesures préventives, elles seront de type modification de la façon de procéder, modification de la tâche, réaménagement du poste, modification des équipements, etc. Il faut mentionner cependant que l'analyse de sécurité des tâches, lorsqu'elle est bien faite est un processus extrêmement complexe qui ne peut être accompli sur une base routinière. Il faut faire ces analyses de sécurité des tâches dans des circonstances particulières comme, par exemple, lors de l'implantation d'un nouveau procédé, la modification d'un procédé existant, l'installation d'un nouvel équipement ou l'entretien préventif annuel. Pour cette technique comme les autres techniques d'identification ou de diagnostic des problèmes, l'un des éléments extrêmement importants c'est le suivi qui est accordé à cette intervention. Il est très important de vérifier si les recommandations, si les mesures préventives contribuent bel et bien à faire disparaître le problème. Si les mesures préconisées ne font que déplacer le problème ou ne règlent rien, il faut alors revenir en arrière et réévaluer le problème concerné. Nous reviendrons sur cet aspect un peu plus loin. 20 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents 2.3 Complémentarité des techniques diagnostiques Soulignons un dernier point important sur les mesures de diagnostic des problèmes : dans les quatre techniques citées, il y a une certaine complémentarité. Les deux techniques de type descriptif, à savoir les statistiques et l'inspection, nous permettent de quantifier le problème et de le localiser dans l'entreprise. Mais elles ne nous disent pas nécessairement pourquoi les accidents arrivent ou sont susceptibles de se produire. Pour répondre à ces questions, il nous faut des techniques analytiques comme l'analyse d'accidents et l'analyse de sécurité des tâches. Par ailleurs, dans l'analyse d'accidents et dans l'analyse de sécurité des tâches, il n'y a pas d'élément de pondération permettant d'établir des priorités d'intervention. C'est pourquoi le préventionniste, faisant de l'analyse d'accidents et de l'analyse de sécurité des tâches, devra nécessairement utiliser des techniques plus quantitatives comme les statistiques pour essayer de dépister les problèmes qui sont les plus fréquents et les plus graves, parce que c'est par ces problèmes que l'intervention doit commencer. 3. LE CHOIX DU MODE D'INTERVENTION Une fois que le problème est bien diagnostiqué, que les priorités d'intervention sont établies, le préventionniste doit choisir parmi les différentes approches, quelle forme prendra son intervention. Ces catégories sont évidemment des sursimplifications de la réalité, mais elles permettent de placer en quelque sorte un ordre relatif d'efficacité parmi les modes d'intervention. Ces trois grandes catégories d'intervention sont: 1. Celles qui visent à corriger le problème à la source; 2. Celles qui se situent entre la source des problèmes et les personnes exposées; 21 Santé et sécurité au travail : notions de base 3. Celles qui concernent d'une façon spécifique les personnes exposées aux problèmes accidentels. 3.1 Les interventions à la source Les interventions à la source sont de plusieurs types. Généralement, elles vont prendre la forme de modifications. Ce peut être des modifications aux procédés utilisés. Par exemple, on a constaté, lorsque l'abattage forestier a été mécanisé, que certains problèmes, comme les fractures de la colonne vertébrale des abatteurs, sont à toute fin pratique disparus. Précisons par contre que la mécanisation de l'abattage a engendré un certain nombre d'autres problèmes. Il faut donc s'assurer, lorsqu'un procédé est modifié à des fins préventives, que le nouveau procédé ne génère pas d'autres formes de problèmes. Les modifications peuvent prendre également la forme de changements apportés aux outils utilisés. Par exemple, pour améliorer la visibilité de l'opérateur au poste de commandes, les cabines des ponts roulants ont été modifiées et vitrées de façon à permettre à l'opérateur de voir la charge sous le pont roulant. On peut penser également à la modification des commandes. On installe de plus en plus sur la machinerie des commandes de type naturel, c'est-à-dire qui correspondent aux réflexes de n'importe quel opérateur. Ainsi, par exemple, si je pousse une manette vers l'avant, je devrai m'attendre à ce que la machine avance et non l'inverse. La modification d'outils plus petits a également entraîné une amélioration de certains problèmes. On pense par exemple aux cas de tendinite (inflammation des tendons) du poignet chez les personnes qui désossent les poulets. On a tout simplement incliné la lame du couteau de façon à ce que ces personnes puissent effectuer leur travail avec le poignet en position normale plutôt que surinclinée. On pense également à l'inclinaison du bec des pinces à bec : cela permet aux personnes qui font de l'assemblage de composantes électroniques, de travailler à l'aise sur un plan de travail plat. Les modifications peuvent également porter sur l'agencement du poste de travail. On connaît plusieurs aménagements qui ont eu leur efficacité dans la conception du poste de travail de personnes oeuvrant dans le domaine de l'informatique ou à des terminaux à écrans cathodiques, par exemple. Les 22 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents modifications à l'agencement des lieux ont également pris la forme d'une meilleure disposition de la chaise, de la table de travail et des différentes composantes à l'intérieur de ce plan de travail. Il est bien connu qu'un poste de travail difficilement habitable, parce que mal conçu, posera une multitude de problèmes aux personnes qui ont à y travailler huit heures par jour, cinq jours par semaine, pendant plusieurs années. Les modifications de l'environnement, quant à elles, sont bien connues. Tout le monde apprécie les effets d'un meilleur éclairage, d'un milieu sonore atténué, dune température ambiante convenable. Mais les interventions à la source peuvent prendre une autre forme. On peut penser, entre autres, à un bon entretien des équipements qui, en plus d'assurer une meilleure productivité et une plus grande longévité à ces équipements, aura pour effet d'empêcher la panne ou le bris qui pourrait entraîner un accident. À ce titre, l'entretien préventif est l'une des formes d'intervention privilégiées par la Loi sur la santé et la sécurité du travail. 3.2 Les interventions entre la source et les personnes Quant aux méthodes qui visent à intervenir entre la source du danger et les personnes exposées, on peut les classer grosso modo en deux catégories. D'une part, certaines interventions seront de type barrière ou garde et ce type d'intervention se situera beaucoup plus proche de la source du danger. L'autre forme d'intervention consiste en équipements de protection individuels qui sont beaucoup plus proches des personnes exposées que de la source du danger. 3.2.1 Barrières et gardes En ce qui concerne les barrières et gardes, ils sont de plusieurs types. On peut penser, par exemple, à des cages qui vont s'abaisser lorsque la machine est en opération ou à des mécanismes de blocage qui feront en sorte que les parties mobiles, souvent les plus dangereuses sur un équipement, se bloqueront instantanément en cas d'arrêt soudain de la machine ou encore à des systèmes qui nécessitent l'utilisation des deux mains des personnes pour faire fonctionner la machine et ainsi de suite. On peut penser aussi aux garde- 23 Santé et sécurité au travail : notions de base corps qui visent à clôturer les zones dangereuses. Les formes que peuvent prendre les gardes, les garde-corps, les barrières sont innombrables. Il faut bien se rappeler, toutefois, que les barrières et gardes, tout comme les équipements de protection individuels, ne font pas disparaître l'agent qui pourrait causer la blessure. Tout au plus cherchent-ils à empêcher le contact entre l'agent dangereux et la personne qui pourrait en souffrir. 3.2.2 Équipements de protection individuels Quant aux équipements de protection individuels, on doit les envisager un peu comme un dernier recours. Comme il vient d'être mentionné, ces équipements ne font pas disparaître le danger. Ils ne visent qu'à empêcher le contact entre l'agent dangereux et une partie vulnérable de l'être humain exposé à ce danger ou à en atténuer les conséquences. À ce titre, ils portent bien leur nom : ce sont des équipements de protection et non pas des équipements de prévention. Les équipements de protection individuels comportent d'autres désavantages. Ainsi, pour régler un problème, ils créent parfois un problème secondaire. On peut penser, par exemple, au masque respiratoire qui crée une certaine difficulté à respirer. Ou encore, aux équipements de protection auriculaire, aussi appelés « coquilles » qui, s’ils permettent de réduire le bruit, gênent en même temps la capacité de l'être humain à localiser la provenance d'un son. De plus, ces équipements auriculaires ont souvent pour effet de créer une pression sur les côtés de la tête qui, avec le temps, devient assez pénible. En plus de causer des problèmes de chaleur, certains modèles de lunettes protectrices s'embuent sous l'effet de la transition du froid au chaud ou encore accumulent de la poussière ou de l'humidité; certains modèles vont même gêner la vision périphérique, ce qui tend à réduire le champ visuel d'environ 40 %. Comme la plupart des équipements de protection individuels comportent des désavantages bien identifiés, il n'est pas surprenant que certains travailleurs manifestent des réticences marquées face à l'utilisation de 24 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents ces protecteurs qui, dans certaines circonstances, nuisent à l'exécution du travail lui-même. Malgré ces inconvénients, il se peut que dans certaines circonstances, pour le travail en hauteur par exemple, l'élimination du risque à la source soit impossible et qu'on doive se limiter à ce type de protection. Il faut toutefois se rappeler que le fait de fournir des équipements de protection individuels ne dispense pas l'employeur et c'est écrit, en toutes lettres dans le texte de la Loi se son obligation de chercher à réduire le danger à la source. 3.2.3 Programme d'implantation du port des équipements de protection individuels La façon adéquate d'implanter le port de ces équipements a fait l'objet de certains documents qui, sans avoir force de règlement, n'en sont pas moins le fruit de recherches sérieuses et systématiques. Les étapes recommandées sont les suivantes : dans un premier temps, il convient de poser un diagnostic fiable et très précis sur le problème qui nous concerne. Une fois le diagnostic posé, le préventionniste doit identifier, parmi toute la gamme des modèles de protecteurs disponibles, ceux qui correspondent le plus adéquatement à la solution du problème. Par exemple, il faut s'assurer que les modèles de protecteurs auditifs sélectionnés atténuent efficacement le bruit aux fréquences qui sont présentes dans le milieu de travail. On remarquera, le plus souvent, qu'il n'y a pas qu'un seul modèle, mais généralement plusieurs modèles qui peuvent faire le travail efficacement. Dans un tel contexte, il convient d'impliquer les travailleurs dans l'identification de la solution. Cette implication comporte deux étapes : il faut clairement expliquer aux travailleurs les démarches que l'entreprise effectue afin de chercher à corriger le problème à la source. On doit être le plus précis possible sur ce point et citer les échéances lorsqu'il y a lieu. Une fois ces détails précisés aux travailleurs, il convient, dans un deuxième temps, de les impliquer dans le processus de choix des équipements de protection individuels et de demander aux travailleurs de faire un essai de quelques-uns de ces modèles et de choisir eux-mêmes le modèle qui leur 25 Santé et sécurité au travail : notions de base convient. Cette période d'essai aura un double avantage : d'abord, ayant fait l'essai pendant quelque temps d'un certain nombre d'équipements, les travailleurs acquerront l'habitude de les porter, ce qui les amènera par la suite à adopter plus facilement lesdits équipements. Deuxièmement, les travailleurs auront choisi eux-mêmes les protecteurs qui leur conviennent après expérimentation. Ils les porteront donc plus volontiers, puisque ce sont eux qui les auront choisis. De plus, ils retiendront probablement ceux qui créent le moins de problèmes, qui sont les moins nuisibles. Généralement, il n'y aura pas qu'un seul modèle retenu; les travailleurs auront probablement exprimé une préférence pour deux ou trois modèles différents. Il ne pose pas plus de problèmes de commander quelques unités de plusieurs modèles que de commander le même modèle pour tout le monde. Le fait de commander le même modèle pour tout le monde risque, dès lors, de poser des problèmes, car pour convenir à la majorité, on créera un plus grand inconfort, des désavantages plus marqués pour toute une catégorie de travailleurs à qui ces protecteurs standards conviennent moins bien. Enfin, un bon programme d'implantation de port d'équipements de protection individuels devra comprendre toutes les informations concernant la façon adéquate de bien porter ces équipements de protection individuels et aussi sur la façon de bien entretenir ces équipements. 3.3 Les interventions auprès des personnes Dans la catégorie des moyens qui s'adressent aux personnes exposées, on retrouve trois familles de techniques. On peut penser aux techniques d'information, de formation et de sélection. 3.3.1 L'information Dans la catégorie des techniques d'information, il y a d'abord ce que les préventionnistes appellent « les manuels de sécurité ». L'expérience a démontré que ces manuels de sécurité doivent être le plus simples possible et ne comporter que les informations essentielles, les informations de base. Les manuels de sécurité qui comportent des textes longs et fastidieux sur la 26 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents façon sécuritaire d'accomplir toutes les tâches d'un travailleur ne sont que peu lus et ne sont pas garants d'une sécurité accrue. Il ne s'agit pas, lorsqu'on doit apprendre à faire une tâche d'une façon sécuritaire, de communiquer cette information par écrit mais plutôt de l'inclure dans le programme de formation, comme nous le verrons plus loin. Les manuels de sécurité ont donc intérêt à demeurer brefs, succincts et à ne porter que sur les informations essentielles par exemple, le numéro de téléphone à composer en cas d'incendie ou les procédures à suivre en cas d'accident. Pour ce qu'on appelle « la propagande de motivation » à la sécurité, l'expérience a démontré, et c'est appuyé par de nombreuses recherches, que les techniques basées sur l'horreur, comme la présentation de photographies de lésions sérieuses pouvant découler d'un accident quelconque, ne produisent pas le changement escompté. De même, les techniques basées sur l'humour ou sur l'utilisation du sexe connaissent relativement peu de succès. Pour être efficace, une communication de type propagande en matière de sécurité doit respecter trois critères : - Identifier de façon très précise quel est l'agent qui peut causer un accident; - Dire pourquoi cet agent est dangereux, c'est-à-dire décrire de façon très brève, mais sans jouer sur l'horreur, les conséquences possibles d'un accident; - Mentionner ce que la personne peut faire pour corriger cette situation ou contrôler le risque. 27 Santé et sécurité au travail : notions de base 3.3.2 La formation En ce qui concerne les techniques de formation qu'il conviendrait d'appeler plus adéquatement « les techniques visant à instaurer les comportements sécuritaires chez les personnes », il y a les cours de formation proprement dits, les techniques de renforcement positif ou négatif et, de façon plus spécifique, les concours de sécurité. Du côté des cours de formation, malheureusement, on fait souvent l'erreur de séparer cours de formation à la sécurité et cours de formation à l'exécution des tâches. Les résultats de nos propres recherches tendent à démonter que, au contraire, les éléments de sécurité liés à l'exécution d'une tâche doivent être enseignés de façon intégrée et simultanée dans les cours qui sont donnés sur l'exécution proprement dite de la tâche. En d'autres mots, on ne devrait pas enseigner deux choses distinctes à la personne, à savoir comment exécuter la tâche et la sécurité liée à cette tâche, mais on devrait enseigner une seule chose où le tout est intégré, c'est-à-dire comment exécuter la tâche d'une façon sécuritaire. Quant aux autres techniques de renforcement positif du comportement sécuritaire ou de concours de sécurité, il n'existe pratiquement pas de littérature sérieuse qui démontre que ces techniques ont un effet véritable sur la sécurité. Les seuls effets démontrés sont, d'une part, une certaine frustration, après quelque temps, de ne pas avoir gagné le concours chez ceux qui ont fait un effort louable mais qui ont eu la malchance d'avoir un accident pour des causes indépendantes de leur volonté et, d'autre part, la sous-déclaration des accidents mineurs. On constate que les accidents graves, malgré ces techniques, continuent à se produire. Il faut donc conclure que les concours de sécurité ne visent pas ou ne réussissent pas à produire de solutions durables aux principaux problèmes vécus par le préventionniste. Il faut donc considérer ces approches avec beaucoup de suspicion. 28 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents 3.3.3 La sélection L'utilité de la sélection du personnel pour réduire les accidents reste encore à démontrer. Il s'agit là d'une technique extrêmement délicate à utiliser en matière de prévention, puisqu'elle repose sur la démonstration que les caractéristiques individuelles des personnes sur lesquelles s'exerce la discrimination, lors de la sélection, ont un lien quelconque avec la survenue des accidents. Or, il y a très peu de caractéristiques individuelles qui sont mises en relation avec les accidents. Encore là, cette relation est toujours difficile à démontrer. Donc, les techniques de sélection doivent être aussi utilisées avec beaucoup de circonspection, puisque l'efficacité n'est démontrée que dans un nombre extrêmement limité de cas. On se rend compte que toutes ces techniques qui visent les personnes exposées, plutôt que la source du problème, ne peuvent régler complètement celui-ci, puisque la source elle-même du danger reste présente. Toutes les techniques qui concernent les personnes ont une caractéristique commune : elles cherchent à rendre les personnes plus aptes à composer avec un danger qui lui, demeure présent. Or, la seule prévention vraiment efficace, c'est l'élimination du danger lui-même. Bien entendu, le recours à des équipements de protection individuels, à des petits cours de formation ou à de l'information, sont des techniques relativement peu coûteuses. Cependant, il faut prendre conscience que ces techniques sont perpétuellement à répéter puisque l'expérience démontre que leur effet tend à ne durer que quatre à six mois au maximum. N'est-ce pas là une bonne indication que cette solution n'est probablement pas la bonne, alors que les interventions qui s'attaquent à la source du problème tendent à le régler une fois pour toute? Si les techniques qui visent les personnes exposées sont peu coûteuses initialement, il faut bien garder à l'esprit qu'elles sont perpétuellement à répéter et qu'elles devront atteindre toutes les personnes qui peuvent se trouver en présence de l'élément dangereux. C'est donc dire qu'à chaque fois qu'il y aura de nouveaux travailleurs, des mutations de poste, des promotions ou que de nouvelles personnes seront amenées à œuvrer dans le milieu présentant des éléments de risque, ces interventions seront à refaire. Par contre, si le danger est éliminé à la source, le problème sera réglé pour de bon. 29 Santé et sécurité au travail : notions de base 4. SUIVI DES INTERVENTIONS Si, pendant de nombreuses années, les préventionnistes se sont acharnés à choisir des méthodes d'intervention qui n'avaient pas toujours une efficacité optimale, c'est probablement parce que la dernière étape du processus de prévention avait été mal complétée. En effet, la dernière étape veut que le préventionniste fasse le suivi des interventions, c'est-à-dire qu'il vérifie jusqu'à quel degré d'efficacité les solutions qu'il propose règlent le problème. Le préventionniste devra donc vérifier si l'effet de ces solutions perdure au-delà de la période critique de quatre à six mois. Les indicateurs habituellement utilisés sont les différentes statistiques d'accidents : la fréquence d'accidents diminue-t-elle? L'indice de gravité diminue-t-il? Si l'on constate une diminution de la fréquence des accidents sans une diminution de l'indice de gravité, il se peut que les seuls problèmes ou les seuls accidents que le préventionniste ait réussi à faire diminuer soient les accidents peu graves, les accidents bénins. Mais plus loin que cela, ce dernier doit également vérifier si les facteurs de risque qu'il a identifiés disparaissent des rapports d'inspection des lieux de travail, si ces facteurs de risque disparaissent des enquêtes et des analyses d'accidents. Si le problème est réglé pour de bon, il ne devrait plus susciter d'accidents. Il est bon que le préventionniste se penche sur les catégories spécifiques d'accidents que les interventions visaient. Ce n'est que par un suivi méticuleux des interventions que le préventionniste réussira progressivement à élaborer des solutions de plus en plus efficaces au problème des accidents du travail. 30 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents 4.1 Gestion de la sécurité Il convient, en terminant, de dire quelques mots sur la gestion de la sécurité. L'ampleur et la diversité des tâches que doit comporter la prévention des accidents nécessitent que le préventionniste sache organiser un système de sécurité. En effet, il serait impensable qu'une seule personne connaisse par cœur toutes les solutions techniques possibles ou imaginables, toutes les catégories de risques qu'on peut trouver en milieu de travail; que la même personne connaisse à fond toutes les techniques d'enquête, d'analyse, d'inspection, toutes les façons de procéder, les diverses tâches, les procédés qu'on retrouve dans une entreprise et ainsi de suite. C'est encore moins possible si l'entreprise a une certaine envergure! Il faut donc que le préventionniste puisse compter sur certaines collaborations. De fait, l'esprit de la loi sur la santé et la sécurité du travail implique que toutes les personnes oeuvrant en milieu de travail aient des responsabilités en matière de prévention des accidents. Si tel est le cas, toutes les personnes impliquées dans le processus de production, depuis les travailleurs jusqu'aux cadres supérieurs, toutes les personnes impliquées dans le service des ressources humaines, le service de la prévention, le service de la santé et de la sécurité du travail, ont un rôle à jouer. Ce rôle, ils peuvent le jouer autant dans la reconnaissance des situations à problèmes que dans l'élaboration des solutions. C'est là justement un autre des éléments importants de l'esprit de la loi qui veut que, puisque ce sont les gens qui sont dans le milieu de travail qui vivent les problèmes, ce sont probablement ces personnes qui les connaissent le mieux. De même, ces gens connaissant les problèmes sont les plus en mesure d'apporter des solutions efficaces et ingénieuses. Dès lors, le préventionniste doit se comporter comme un gestionnaire dont le rôle est de chercher à utiliser au maximum ce potentiel de ressources d'imagination et d'idées afin de la canaliser vers l'identification des problèmes et l'élaboration des solutions. Son rôle consiste donc non pas à « faire » la sécurité, mais à la faire faire par toutes les personnes concernées, par toutes les personnes qui oeuvrent dans un milieu de travail donné. Aussi, dans ce rôle de plus en plus gestionnaire, le préventionniste 31 Santé et sécurité au travail : notions de base devra fournir toute l'information dont les travailleurs, les cadres et les employeurs auront besoin pour bien connaître les problèmes auxquels ils sont confrontés et les solutions qui sont envisageables. Le rôle de gestionnaire implique enfin une fonction d'animation : si plusieurs personnes ont à œuvrer ensemble, au sein du comité paritaire par exemple, ce comité paritaire devra être efficace et œuvrer dans un contexte de concertation. Ce contexte de concertation nécessitera bien sûr beaucoup de doigté de la part du préventionniste mais, à long terme, cette approche basée sur la concertation pourrait s'avérer fort utile pour une meilleure prévention des accidents. 32 Module 5 : Introduction à la prévention des accidents CONCLUSION L'article 2 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail prône l'élimination à la source des risques à la santé et à la sécurité. L'atteinte de cet objectif nécessite l'élaboration d'un programme efficace de prévention des accidents. Celui-ci doit s'intégrer à l'intérieur d'un programme plus vaste de prévention de toute atteinte à la santé et à l'intégrité physique des travailleurs. Dans cette optique, l'approche multidisciplinaire qui fait appel aux connaissances des autres disciplines de la santé au travail et la recherche de l'approbation et de la participation de toutes les personnes touchées par ces programmes de prévention demeurent deux critères de succès de toute première importance. 33 Santé et sécurité au travail : notions de base 34

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