CRFPA 2023 Droit fiscal PDF
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This document is a study guide for the CRFPA 2023 fiscal law exam. It covers various aspects of French fiscal policies, including taxations on businesses, individuals, and international taxation.
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CRFPA 2023 DROIT FISCAL PRÉAMBULE SECTION 1 - PROGRAMME ET OUTILS Programme. Le décret du 17 octobre 2016 (art. 5-3°, décret no 2016-1389 du 17 octobre 2016) instaure une « épreuve destinée à vérifier l’aptitude à résoudre un ou plusieurs cas pratiques ou à rédiger une ou plusieurs consultations,...
CRFPA 2023 DROIT FISCAL PRÉAMBULE SECTION 1 - PROGRAMME ET OUTILS Programme. Le décret du 17 octobre 2016 (art. 5-3°, décret no 2016-1389 du 17 octobre 2016) instaure une « épreuve destinée à vérifier l’aptitude à résoudre un ou plusieurs cas pratiques ou à rédiger une ou plusieurs consultations, d’une durée de trois heures, au choix du candidat, exprimé lors du dépôt de son dossier d’inscription, dans l’une des matières suivantes […] ». L’annexe de l’arrêté du 2 octobre 2018 définit le programme de l’épreuve de droit fiscal de manière très large, à savoir : 1. Les sources du droit fiscal (sources nationales, sources internationales et communautaires) ; 2. L’imposition du résultat des entreprises (la classification fiscale des sociétés et des groupements, la détermination du résultat imposable des sociétés, l’imposition des résultats dans les groupes de sociétés) ; 3. L’imposition du chiffre d’affaires de l’entreprise (le champ d’application de la TVA, la TVA exigible et la TVA déductible) ; 4. L’imposition du revenu et du patrimoine des personnes physiques (l’impôt sur le revenu, l’imposition du patrimoine) ; 5. Contrôle et contentieux fiscal (le contrôle fiscal, les recours du contribuable). Précisions du CNB : Concernant le thème IV susvisé, le CNB a précisé que, à compter de l’examen pour 2021, ce thème inclut « l’imposition de la transmission, à titre gratuit ou onéreux, du patrimoine des personnes physiques (y compris de leurs biens à caractère professionnel) ». C’est pourquoi le présent document contient également des développements relatifs aux droits de mutation à titre onéreux et à titre gratuit. Le présent manuel se concentre donc sur les thématiques essentielles de ces cinq différents éléments, thématiques qui ont pu être abordées, selon le cursus de chacun(e), soit en L3, soit en Master I, soit en Master II. Guide de lecture : les paragraphes grisés correspondent aux points essentiels et d’actualité que vous devez connaitre. De manière générale et en moyenne, il peut être observé que les candidat(e)s à l’examen disposent de moins de connaissances et/ou d’aisance concernant les points suivants : - Sources internationales du droit fiscal (Thématique I rappelée ci-dessus), - Régime fiscal des sociétés de « semi-transparentes » fiscalement, dites « sociétés à l’IR » (Thématique II rappelée ci-dessus), - Imposition des revenus du patrimoine des personnes physiques (donation/succession en particulier) et Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) (Thématique IV rappelée ci-dessus), - Contrôle en contentieux fiscal (Thématique V rappelée ci-dessus). Il en résulte que les candidat(e)s concerné(e)s apporteront utilement une attention toute particulière aux points ci-dessus dans le cadre de leurs révisions. S’agissant de l’étendue du programme de l’épreuve susvisée, le choix pédagogique a été fait, dans un souci de prudence comme d’exhaustivité, d’inclure les notions de base concernant : - Le droit fiscal international ; - Et les restructurations. Si ces deux derniers points ne sont pas expressément mentionnés en tant que tels dans le programme de l’épreuve, une conception large de son libellé conduit à devoir les inclure (les règles de base de la fiscalité Objectif Barreau – Droit fiscal 1 internationale pouvant être incluses dans la thématique I et les règles de base des restructurations pouvant être comprises dans la thématique II). Finalité de l’ouvrage. Le présent manuel a été conçu pour permettre la préparation à l’épreuve de droit fiscal de l’examen d’entrée au CRFPA. L’objectif est ici de proposer un cours relativement complet malgré l’étendue du programme officiel de la matière. Toutefois, la majeure partie des informations historiques et doctrinales inutiles à la résolution d’un cas pratique ont volontairement été exclues. Seul le droit positif est, à titre de règle de principe, présenté. De ce fait, les éventuels débats doctrinaux ne sont évoqués que lorsqu’il existe une incertitude sérieuse quant à l’interprétation ou à la portée d’une règle de droit fiscal. Enfin, de nombreux conseils pratiques méthodologiques, des exemples concrets et des mises à jour jurisprudentielles illustrent ce manuel. Enseignements pouvant être tirés des épreuves des sessions précédentes. En raison de la réapparition du droit fiscal à l’examen d’entrée de l’école des avocats depuis 2019, ne seront ici traités que les libellés concernés depuis cette date. À cet égard, les épreuves de 2019 et 2020 permettent de conclure aux mêmes enseignements, à savoir : a) Session 2019 : - Un examen relativement long : de ce fait, si l’on recherche les règles de droit applicables le jour de l’examen, il deviendra impossible de le traiter dans son intégralité ; - Un examen technique : il s’agissait souvent de savoir envisager, pour une même opération (ex. : TVA sur vente ou imposition des distributions de dividendes), chaque solution particulière, et ce même en matière de fiscalité internationale (ex. : dividendes versés aux USA) ; - Un examen tourné essentiellement vers l’IS et la TVA : il convenait, pour 2020, de n’en tirer aucune conclusion quant à la pertinence d’éventuelles « impasses » possibles (à proscrire en toute hypothèse !) en 2020. La preuve en a d’ailleurs été donnée dès l’année suivante… b) Session 2020 : - Un examen tout aussi long (mise à part son amputation en raison du cas no 2 hors programme relatif aux droits d’enregistrement) ; - Et tout aussi technique (ex. : intégration fiscale et TVA), bien que des questions théoriques déguisées aient été posées (ex. : remboursement crédit de TVA) ; - Un examen contenant des questions finales (pour chacun des cas) qui requièrent des connaissances allant bien au-delà de celles pouvant être acquises en Master I, voire dans certains Master II (ex. : conventions d’intégration fiscale et avantages/pénalisations générés en cas de sortie de groupe intégré) ; il y a fort à parier que ces questions finales visaient à récompenser les candidat(e)s qui pouvaient aller plus loin dans l’analyse que la mise en œuvre des règles de base. c) Session 2021 : - Un examen toujours assez long ; - Toujours aussi technique (ex. : BIC et TVA), bien que des questions théoriques déguisées aient été posées (ex. : déficits fonciers) ; - Un examen contenant des questions finales (pour les cas 1 et 3) qui requièrent des connaissances allant bien au-delà de celles pouvant être acquises en Master I, voire dans certains Master II (ex. : transfert de déficits à l’IS) ; - Particularité : le cas no 3 reposait sur la compréhension d’une réponse ministérielle en matière de TVA (activité d’enseignement) qui a perturbé certains candidats. Vos révisions comprendront donc utilement la lecture de jurisprudences d’actualité ou de réponses ministérielles afin de vous habituer à la lecture de ce type de textes. d) Session 2022 : - Un examen toujours assez long ; Objectif Barreau – Droit fiscal 2 - Toujours aussi technique (ex. : BIC et TVA), bien que des questions théoriques déguisées aient été posées (ex. : concession de licence d’exploitation d’un logiciel, activité de location exercée par une SCI à l’IR…) ; - Un examen contenant des questions finales qui requièrent des connaissances allant bien au-delà de celles pouvant être acquises en Master I, voire dans certains Master II (ex. : intégration fiscale et report de déficits). Covid-19. La Commission nationale de l’examen d’accès au CRFPA indique que, pour la session 2022, « les sujets devront être traités en faisant abstraction des dispositions légales ou règlementaires temporaires adoptées depuis le mois de mars 2020, en réaction à l’épidémie de Covid-19 ». À ce jour, aucun communiqué de nature identique n’a été pris concernant la session à venir même si la probabilité d’une règle identique peut paraître forte. Références bibliographiques indicatives. Tout d’abord, chaque étudiant(e) devra impérativement apprendre à travailler avec ses codes, à savoir le Code Général des Impôts et le Livre des Procédures Fiscales. Concrètement, cela suppose non seulement d’avoir localisé les textes en cause (V. ci-dessous point 6 sur les éléments de localisation permis) avant l’examen mais également de les avoir lus. Divers éditeurs publient les codes susvisés, en général en juin ou juillet de chaque année. Il est donc souhaitable que vous disposiez, le jour de l’examen, de codes à jour (dernières éditions). Il est conseillé aux étudiant(e)s de privilégier les codes non annotés ; si ce choix est de nature à priver les étudiant(e)s du côté rassurant d’un code annoté, il a la vertu de leur permettre d’éviter toute citation de jurisprudence non travaillée préalablement et généralement non comprise à la seule lecture des annotations. Enfin, il convient que chaque étudiant(e) connaisse bien son propre type de mémoire (écrite, visuelle ou verbale) afin d’adapter ses modalités de révisions en conséquence (réalisation de fiches en cas de mémoire écrite, surlignage en cas de mémoire visuelle, déclamations et/ou auto-enregistrements en cas de mémoire verbale). Ces méthodes peuvent bien évidemment être cumulées mais l’une d’entre elles sera utilement privilégiée. Bibliographie indicative : - M. Cozian et F. Deboissy – Précis de fiscalité des entreprises – Lexis-Nexis M. Cozian - Les grands principes de la fiscalité des entreprises - Litec D. Gutman – Droit fiscal des affaires – LGDJ Mémento fiscal - Francis Lefebvre Revue de Droit Fiscal – Lexis Nexis (pour la jurisprudence) Conseils de révision : Le travail requis au vu du programme de l’épreuve requiert de « fragmenter » les révisions dans le temps, cellesci s’apparentant plus à un marathon qu’à une course de vitesse. De ce point de vue, les étudiant(e)s utiliseront à profit la méthode du « rétroplanning » qui leur permettra de déterminer au préalable l’avancement de leurs travaux de révisions dans le temps, et ce sans compter a minima la dernière semaine avant l’épreuve qui constituera une « zone tampon » permettant d’effectuer les dernières mises au point nécessaires. Ouvrages et éléments autorisés le jour de l’examen. Conformément à ses prérogatives, la Commission nationale de l’examen d’accès au CRFPA a indiqué que les candidats à l’examen pourront utiliser les documents suivants pour les épreuves d’admissibilité : - Les codes annotés mais non commentés ; - Ainsi que les recueils (ou photocopies tirées de sites Internet officiels) de textes réglementaires, législatifs et supralégislatifs nationaux, et de normes européennes et internationales, ne contenant aucune indication de doctrine ; - Sont interdites les photocopies des circulaires et de la jurisprudence. Objectif Barreau – Droit fiscal 3 Ces documents pourront être surlignés ou soulignés y compris sur la tranche. Cependant, aucune annotation manuscrite ne pourra y figurer. Les onglets, marque-pages ou signets non annotés sont autorisés. De manière plus spécifique pour l’épreuve de droit fiscal, il a été précisé que les éventuels calculs à effectuer ne nécessitent pas l’usage d’une calculatrice, dont la détention est interdite. Il en résulte que c’est donc le raisonnement qui sera privilégié par le correcteur et non la justesse des éventuels calculs. Cette interdiction ne saurait toutefois conduire à devoir ignorer les conséquences financières chiffrées des analyses qui seront exposées. Ainsi, il conviendra de s’entraîner préalablement à la résolution de calculs mentaux simples. → ILLUSTRATION No 1 : Si une opération est imposable à la TVA française et que la base imposable est de 40 000 € HT, tandis que le taux de TVA applicable est de 20 %, un simple calcul mental conduit à conclure que le montant de TVA sera de 8 000 €. Calculs mentaux sous-jacents possibles (2) : • Solution no 1 : multiplier par 20 % équivaut à diviser par 5, mais 40 000 € divisé par 5 n’est pas forcément aisé, donc je retire momentanément les milliers (trois zéros), ce qui conduit à poser mentalement l’opération « 40/5 » ; le résultat étant 8 (cf. table de 5 ou de 8), j’y ajoute les milliers retirés précédemment, ceci aboutissant au résultat de 8 000 € de TVA. • Solution no 2 : je multiplie, non pas par 20 %, mais par 10 %, puis je multiplie ensuite par deux. Ainsi, 40 000 € x 10 % = 4 000 €, puis 4 000 € x 2 = 8 000 € de TVA. → ILLUSTRATION No 2 : Si une cession d’actions effectuée par une société relevant de l’IS et générant une plus-value est bien éligible au régime dérogatoire dit des « titres de participation », seule une quote-part de 12 % de la plus-value sera imposable. Supposons que la plus-value imposable soit de 100 000 €. Solution : d’abord calculer mentalement 100 000 € x 10 % (ce qui consiste à retirer un zéro), j’obtiens 10 000 €. Je dois ensuite ajouter 2 % de la plus-value, c’est-à-dire 1/5e des 10 % déjà calculés (soit 10 000 € / 5), donc 2 000 €. Le total (la valeur chiffrée de la quote-part de plus-value imposable) sera donc de 12 000 € (10 000 € + 2 000 €). Mises à jour de la matière. Le droit fiscal est, par nature, une matière en évolution constante d’une année sur l’autre et même au cours de chaque année. Il convient donc que les étudiant(e)s demeurent attentifs à la survenance de lois fiscales en cours d’année, et plus particulièrement aux modifications législatives en matière de droit fiscal (de fond comme de procédure). Il en est de même concernant la jurisprudence du Conseil d’État et de la Cour de cassation. S’agissant des dernières lois de finances à venir, et afin d’aiguiller les étudiant(e)s dans leurs révisions, un fascicule complémentaire vous sera transmis sur ce point. L’examen du CRFPA est exigeant. Il convient toutefois de garder à l’esprit que les étudiants maîtrisant à la fois connaissances juridiques et méthodologiques des épreuves performent davantage. Il est ainsi essentiel, dans le cadre de votre préparation, d’allier de solides connaissances de fond, un esprit de synthèse et développer une capacité à raisonner, notamment en tirant les enseignements de la jurisprudence récente. L’objet de ce manuel est de proposer une préparation complète à l’épreuve de spécialité de Droit fiscal. Partant, il ne s’agit pas d’un « manuel de cours », mais bien d’un « manuel d’examen », destiné aux candidats désireux d’assoir leurs connaissances académiques, en les complétant par une préparation orientée vers un objectif : devenir élèveavocat. Objectif Barreau – Droit fiscal 4 SECTION 2 - CONSEILS MÉTHODOLOGIQUES Méthodologie. Le cas pratique est l’un des exercices académiques qui se rapproche du quotidien de l’homme ou la femme de loi que vous souhaitez devenir. Dans cet exercice, il vous est demandé, au regard d’une situation de fait, d’apporter aux questions qui en découlent une solution juridique motivée. Cette solution est l’aboutissement d’un raisonnement juridique dans lequel aucune étape ne doit être négligée. Le décret du 17 octobre 2016 (art. 5-3°, décret no 2016-1389 du 17 octobre 2016) vise également l’exercice de consultation, lequel repose sur l’activité de « conseil » de l’avocat. L’exercice de consultation peut nécessiter l’adoption d’une méthodologie adaptée, en raison de la dimension prospective ou rétrospective de la consultation. Dans le premier cas (dimension prospective), le fait générateur juridique n’est pas encore intervenu. Il vous est demandé de vous prononcer sur un projet du client (par exemple, vous êtes sollicité(e) dans la perspective de créer une société, pour répondre à divers objectifs formulés par le client (objectifs d’ordre organisationnel, social, fiscal…). Il vous revient d’en envisager et présenter toutes les conséquences. Dans le second cas, la consultation présente une dimension rétrospective. Il s’agit alors de se prononcer sur une situation déjà intervenue. En somme, le fait générateur juridique s’est déjà produit et le rôle de l’avocat consiste alors à se prononcer sur les conséquences juridiques d’un événement (décès, par exemple) ou d’une opération (cession de titres par exemple). Qu’il s’agisse d’un cas pratique ou d’une consultation, votre raisonnement doit s’articuler autour du syllogisme juridique. Sans préjuger de l’épreuve à venir, il peut être observé que dans les années précédentes, l’épreuve reposait sur une série de petites consultations. L’objectif tenait alors à répondre et prendre position. C’est pour cette raison que votre client vous consulte : il attend une réponse éclairée, argumentée, et partant une solution aux difficultés qu’il expose. Les différentes étapes. Le traitement de chaque cas pratique pourra utilement suivre l’ordre ci-dessous. • Temps no 1 : lecture cursive du libellé de la totalité de l’examen (accepter de prendre ce temps de première lecture) afin de repérer les sujets en cause et les thèmes abordés par le cas (mentions à porter de manière manuscrite en marge du libellé). • Temps no 2 : relecture de chaque cas pour un traitement dans leur ordre de présentation par le libellé afin de sélectionner les faits utiles/peut-être utiles/inutiles. Ex. : pour un cas pratique en matière de TVA, la mention du capital social d’une société assujettie à la TVA ne sera d’aucune utilité. Cette seconde lecture s’accompagnera d’une prise de notes de brouillon des faits pertinents PUIS des règles de droit nécessaires à la résolution du cas. Le conseil qui suit n’est pas nouveau ; il n’en demeure pas moins essentiel : il est primordial de résoudre entièrement le cas pratique, avant même d’entamer la rédaction. Cette étape est indispensable pour vous permettre de mieux évaluer la construction de votre raisonnement (il est fréquent que des questions soient liées entre elles ; la réponse apportée à telle question est déterminante de celle apportée à telle autre) et de mieux organiser vos réponses. Ce travail préalable vous permettra d’identifier : les points à évacuer (il faut alors motiver ce choix), les points qui vous posent difficulté (et sur lesquels vous serez amenés à consacrer plus de temps), les éléments qui trouvent, en jurisprudence, deux séries de réponses (il vous faudra alors prendre position dans le débat). En procédant ainsi, vous serez mieux à même de gérer votre temps. Dans la perspective d’une introduction simple, mais efficace, veiller à toujours bien lire l’énoncé et à en retracer la chronologie. En effet, le plus souvent, la chronologie des faits présente une importance dans la résolution du cas pratique (fait générateur de l’impôt, exigibilité…). Votre introduction doit présenter cette chronologie des faits, après avoir sélectionné – dans l’énoncé – les faits pertinents pour répondre aux questions qui vous sont posées et/ou celles que vous aurez identifiées, sans qu’elles ne soient directement posées (il ne s’agit pas de recopier l’intégralité des faits énoncés ; vous devez opérer une sélection). L’objectif est de « baliser » votre consultation ou votre cas pratique. • Temps no 3 : la résolution de chaque cas à l’écrit. ATTENTION à bien respecter la méthode du syllogisme juridique ! Ainsi, toute démonstration écrite doit être formulée, sauf si la question ne s’y prête absolument pas, en respectant la méthodologie suivante : Objectif Barreau – Droit fiscal 5 - « Majeure », soit la présentation des seules règles de droit pertinentes en partant des normes supérieures vers les normes inférieures, et des règles générales vers les règles particulières (le tout dans un ordre de progression logique) ; - « Mineure », soit la qualification juridique des seuls faits pertinents, en n’omettant pas de JUSTIFIER EN L’ESPÈCE À CHAQUE FOIS ; - « Conclusion », c’est-à-dire la solution en l’espèce, avec les préconisations y afférentes le cas échéant (la conclusion peut être très courte). → ILLUSTRATION : Si un cas pratique porte, de manière très large, sur le traitement fiscal applicable à une plusvalue de cession d’un bien qui est la propriété d’une entreprise individuelle (EI), il conviendra de suivre le schéma d’analyse suivant : - Au titre de quelle catégorie de revenus est imposable cette EI ? (BIC, BNC, BA ?) car les règles applicables peuvent varier d’une catégorie à l’autre ; - Le bien est-il affecté à l’activité professionnelle de l’EI ? (si oui, la PV sera de nature professionnelle, si non elle sera de nature privée) ; - Quelle est la nature de ce bien ? est-ce un stock (dont la cession doit être prise en compte dans le résultat) ou un élément d’actif (dont la cession doit être prise en compte au titre des plus-values) ? - Le bien est-il ou non amortissable ? (le calcul de la PV en sera modifié en raison de la prise en compte des amortissements le cas échéant) ; - Quelle est la nature de la PV ainsi réalisée ? (court ou long terme, les modalités d’imposition étant différentes) ; - L’EI dispose-t-elle d’autres PV/MV de même nature ? (si oui, il faudra les imputer sur la PV ainsi constatée) ; - Le CGI ne prévoit-il pas, dans ce cas de figure, un régime de faveur de l’imposition de la PV ? Chacun de ces éléments devra être mentionné dans la majeure PUIS résolu dans la mineure au vu des données de l’espèce mentionnées dans le libellé, à l’exception possible des deux dernières questions ci-dessus qui pourraient ne pas se poser (ceci dépendant du libellé). Dans vos développements, il s’agit de s’attacher à la technique du syllogisme juridique. Le schéma de votre raisonnement doit presque « sauter aux yeux » : faits – droit – application du droit aux faits. L’objectif tient alors à apprécier votre faculté à raisonner de manière méthodologique, motivée et convaincante. Il vous est vivement recommandé de raisonner, condition par condition, en les appliquant successivement aux faits développés dans la consultation, en optant éventuellement ensuite pour un résumé récapitulatif. Il ne revient pas au correcteur (tout comme au client que vous pourriez conseiller) de faire le tri dans vos développements. C’est à vous d’organiser votre développement, notamment en subdivisant/découpant plusieurs étapes de vos réflexions. Lorsque votre motivation repose sur la jurisprudence, il faut veiller à vous limiter aux décisions de principe qui participent à l’énoncé (à l’interprétation) de la règle de droit. Si vous faites, exceptionnellement, appel à une décision d’espèce ou d’illustration, il est préférable de prendre quelques précautions : par exemple « concernant des faits similaires, les juges ont tranché » dans tel sens. Pour ce qui est de la doctrine, elle peut être citée (en dernier lieu) lorsque la règle de droit telle qu’interprétée par le juge est incertaine ou sujette à controverse. Il faut alors bien veiller à restituer la pensée de l’auteur (dont le nom sera bien orthographié). • Temps no 4 : Enfin, il conviendra de veiller à la bonne correction grammaticale et orthographique des développements. Pour ce faire, il sera pertinent de : - Faire des phrases (évitez les tirets) ; Veiller à leur correction syntaxique et orthographique ; Demeurer simple dans l’expression écrite (phrases courtes et précises techniquement) ; Garder 5 à 8 minutes in fine pour une relecture attentive. Objectif Barreau – Droit fiscal 6 SOMMAIRE Préambule ............................................................................................................................................. 1 Sommaire .............................................................................................................................................. 7 Partie introductive - Les sources ......................................................................................................... 8 Première partie - l’impôt sur le revenu ............................................................................................ 16 Sous-partie 1 - Territorialité .......................................................................................................... 16 Sous-partie 2 - Les revenus catégoriels ......................................................................................... 20 Sous-partie 3 -L’imposition du revenu global .............................................................................. 85 Sous-partie 4 - Contribution exceptionnelle sur les hauts revenus .......................................... 104 Deuxième partie - L’imposition du bénéfice des entreprises ..................................................... 106 Sous-partie 1 - Régime des sociétés de personnes ...................................................................... 106 Sous-partie 2 -Régime des sociétés de capitaux .......................................................................... 114 Sous-partie 3 - Cessation d’entreprise et opérations assimilées ............................................... 138 Troisième partie - L’imposition du chiffre d’affaires des entreprises (TVA) .......................... 141 Sous-partie 1 - Champ d’application de la TVA ..................................................................... 142 Sous-partie 2 - Calcul de la TVA ................................................................................................. 162 Sous-partie 3 - La TVA sur le commerce avec l’étranger ....................................................... 183 Sous-partie 4 - Déclaration, paiement, contrôle et contentieux .............................................. 196 Quatrième partie - L’imposition du patrimoine des personnes physiques ............................... 206 Sous-partie 1 - L’impôt sur la fortune immobilière ................................................................ 206 Sous-partie 2 - La fiscalité liée à la transmission du patrimoine ............................................ 236 Cinquième partie - Contrôle et contentieux fiscal ...................................................................... 284 Index alphabétique ........................................................................................................................... 294 Table des abréviations...................................................................................................................... 302 Table des matières ............................................................................................................................ 304 Objectif Barreau – Droit fiscal 7 PARTIE INTRODUCTIVE - LES SOURCES 1. Un fiscaliste ne peut plus, de nos jours, se contenter de la lecture (et compréhension) du seul Code général des impôts. Il doit connaître, maîtriser et savoir mobiliser les autres sources du droit. C’est pourquoi nous étudierons les sources internes du droit fiscal (leçon 1), sur lesquelles peuvent, parfois, prévaloir les normes européennes et internationales (leçon 2), ce qui soulève d’épineuses difficultés d’articulation. LEÇON 1 - SOURCES INTERNES 2. En droit interne, la loi constitue la principale source du droit fiscal (section I). La Constitution tient également un rôle essentiel, haut-delà de sa supériorité dans l’ordre interne, au regard tout à la fois du contrôle a priori, devenu systématique à l’égard des projets de lois de finances, et du contrôle a posteriori extrêmement riche en matière fiscale (section II). Une troisième section sera consacrée à la portée de la doctrine fiscale (section III). SECTION I - LA LOI 3. En droit interne, la loi constitue la principale source du droit fiscal. Elle est codifiée dans le Code général des impôts et le Livre des procédures fiscales. L’article 14 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 dispose que « tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée ». Depuis lors, ce principe de légalité de l’impôt a été repris, sans interruption, par les différentes constitutions françaises. L’article 34, alinéa 6, de la Constitution du 4 octobre 1958 précise que la loi érige les règles concernant « l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature ». Le législateur a donc compétence exclusive pour ériger la loi fiscale. Deux enseignements, au moins, peuvent être tirés de cette compétence. 4. Premièrement, peuvent être mises en échec les lois sur le fondement de l’incompétence négative du législateur. Peut être cité, à titre d’exemple, l’avortement de la taxe « GAFA » initiée dans le cadre de la loi de finances pour 2017. Ce projet a été censuré par le Conseil constitutionnel, sur le fondement de l’incompétence négative du législateur, dès lors qu’il subordonnait la détermination de son champ d’imposition à une décision de l’administration (Cons. const., 29 déc. 2016, no 2016-744 DC). Le projet prévoyait en effet qu’il revenait à l’administration fiscale le rôle de déterminer lesquelles, parmi les plateformes numériques utilisées par les résidents français, entraient effectivement dans le champ de l’imposition. Il est à noter que la loi n o 2019-759 du 24 juillet 2019 a instauré en France une taxe sur certains services fournis par les grandes entreprises du secteur numérique (TSN). 5. Deuxièmement, le fait d’adopter des dispositions trop imprécises expose le législateur à la censure du Conseil constitutionnel (par exemple, Cons. const., 29 déc. 2014, no 2013-685 DC, censurant l’article 96 de la loi de finances pour 2014, sur le fondement de l’imprécision de la notion de « schéma d’optimisation fiscale »). L’adoption de normes floues tend en effet à confier un rôle législatif au pouvoir réglementaire, ce à quoi s’oppose le principe de compétence exclusive du législateur en matière fiscale. 6. En effet, en matière fiscale, le pouvoir réglementaire est doté d’une compétence liée, consistant en la mise en œuvre de la loi fiscale. Le pouvoir réglementaire ne dispose d’aucune latitude dans l’accomplissement de ce rôle. Il ne peut donc y avoir de règlement autonome (sauf en matière d’organisation de l’administration fiscale). Ainsi, le texte voté doit être parfaitement identique à celui codifié, à défaut de quoi la version du texte voté doit être préférée. Objectif Barreau – Droit fiscal 8 SECTION II - LA CONSTITUTION 7. Trois principes en matière fiscale ressortent du bloc de constitutionnalité. Premièrement, le principe de nécessité de l’impôt est posé à l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ». L’impôt est obligatoire, car il est nécessaire. Il poursuit ainsi un double objectif : - L’impôt permet d’alimenter le budget de l’État ; - Il favorise la solidarité nationale (objectif de redistribution sociale). Deuxièmement, le principe de légalité de l’impôt est posé à l’article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature. » (sur le contrôle de ce principe par le Conseil constitutionnel, v. supra no 3 et 4). Troisièmement, le principe de l’égalité devant l’impôt résulte du bloc de constitutionnalité. La source de ce principe est celui, général, de l’égalité des citoyens devant la loi (art. 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La loi doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. » Toutefois, le Conseil constitutionnel considère que ce principe ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général (pour un exemple de loi jugée conforme, sur ce fondement, v. infra no 263), sous réserve dans un cas comme dans l’autre, que la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec la loi qui l’établit. Sur ce fondement, le Conseil constitutionnel a déclaré en 2005 que cette exigence d’égalité n’était pas respectée quand, d’une part, l’impôt présente un caractère confiscatoire ou, d’autre part, fait peser sur une catégorie de contribuables une charge excessive au regard de leurs facultés contributives (Cons. const., 29 déc. 2005, no 2005530, DC). Sur la question de savoir si un impôt est confiscatoire et donc inconstitutionnel, il est utile de revenir sur la taxe à 75 % envisagée lors du mandat présidentiel de M. Hollande, destinée à frapper les revenus dépassant un million d’euros par an. Le Conseil constitutionnel a censuré ce projet, énonçant dans un premier temps que la création d’une tranche supérieure d’imposition des revenus, qui viendrait s’ajouter à celle de 45 %, ne porte pas atteinte, par nature, au principe d’égalité devant les charges publiques. Dans un second temps, les sages ont conclu qu’une taxe à 75 % y ferait obstacle (Cons. const., 29 déc. 2012, no 2012-662 DC). Le Conseil d’État a rendu un avis (CE, avis, 21 mars 2013, no 387402), selon lequel un taux d’imposition à 66 % doit être considéré comme un maximum au-delà duquel l’impôt serait considéré comme confiscatoire et donc ferait peser une charge excessive sur une catégorie de contribuables, en méconnaissance du principe d’égalité. 8. Ces trois principes à valeur constitutionnelle peuvent fonder deux types de contrôle de la part du Conseil constitutionnel. D’une part, le contrôle a priori repose sur un examen de la constitutionnalité des lois (il survient avant la promulgation d’une loi). Le Conseil constitutionnel ne se prononce pas sur l’opportunité de la disposition législative ; son rôle tient à l’appréciation de sa conformité à la Constitution. La saisine du Conseil constitutionnel est faite par le président de la République, le Premier ministre, le président de l’Assemblée nationale ou du Sénat ou encore soixante députés ou sénateurs. Ce contrôle est devenu quasi-systématique et aboutit régulièrement à la censure des lois de finances. D’autre part, le Conseil constitutionnel peut être saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). La QPC a été introduite en 2008 et est entrée en vigueur le 1er mars 2010. Elle permet aux justiciables, lors d’une instance en cours (que ce soit en première instance, en appel ou dans le cadre d’un pourvoi), de soutenir qu’une loi qui lui a été appliquée porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution (Const., art. 61-1). Une QPC est, en théorie, de nature à viser toutes les dispositions législatives de nature fiscale : c’est donc l’ensemble des dispositions du CGI qui peuvent, en principe, être examinées. Il s’agit, pour l’essentiel, des dispositions susceptibles de porter atteinte aux trois principes précités ou encore au droit au respect de la propriété. Pour qu’une QPC puisse être posée au Conseil constitutionnel, plusieurs conditions doivent être satisfaites : Objectif Barreau – Droit fiscal 9 - La disposition mise en cause doit avoir la nature d’une disposition législative et être applicable au litige (1re condition) ; - La disposition ne doit pas avoir été préalablement déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision (2e condition) ; - La question doit être nouvelle et présenter un caractère sérieux. On peut relever que le contentieux fiscal est le principal fournisseur de QPC, puisque près de la moitié des QPC déposées relèvent de ce champ. Lorsqu’une disposition législative est, à la suite d’une QPC, déclarée nonconforme, elle est en principe abrogée, à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel (sauf report de la date d’effet de l’abrogation). Qu’en est-il des impositions passées ? Le Conseil constitutionnel a jugé que la décision d’inconstitutionnalité bénéficie non seulement à l’auteur de la QPC, mais également aux instances en cours à la date de publication de la décision (CC, 25 mars 2011, no 2010-108 QPC). SECTION III - PORTÉE DE LA DOCTRINE ADMINISTRATIVE 9. L’interprétation des sources du droit fiscal est confiée à l’administration fiscale et au juge de l’impôt (sources interprétatives du droit fiscal). Alors que l’administration ne dispose d’aucun pouvoir normatif, le juge profite d’un tel pouvoir à l’égard des parties à l’instance. 10. Ainsi, la doctrine administrative est dépourvue de valeur juridique. Par suite, elle est inopposable aux contribuables. Un commentaire publié au BOFiP ne peut pas donner de base légale à une imposition qui ne serait pas due en application de la loi fiscale. En revanche, la doctrine administrative peut être opposée à l’administration fiscale (LPF, art. L. 80-A). Concrètement, un contribuable peut s’opposer à un rehaussement d’impôt pratiqué à la suite d’un changement de doctrine administrative portant sur l’interprétation de la loi fiscale. La mise en œuvre de cette garantie est subordonnée aux conditions suivantes : - Le contribuable, en conformité avec les préconisations de la doctrine administrative, doit être de bonne foi ; - Le contribuable doit pouvoir opposer à l’administration fiscale une interprétation formellement admise par cette dernière (interprétation claire et ferme d’une règle fiscale) ; - L’interprétation sur laquelle se fonde le contribuable est antérieure au fait générateur de l’imposition litigieuse. Par ailleurs, la loi du 10 août 2018 (loi pour un État au service d’une société de confiance) offre une nouvelle garantie aux entreprises (légalisation du « rescrit contrôle »). En application de l’article L. 80-A du LPF, lorsque, dans le cadre d’un examen ou d’une vérification de comptabilité ou d’un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, l’administration a pris position sur les points du contrôle, y compris tacitement par une absence de rectification, le contribuable peut invoquer la garantie contre les changements de doctrine. Autrement dit, l’administration n’est pas admise à redresser ultérieurement le contribuable sur les points sur lesquels elle a pris position, y compris tacitement en cas d’absence de rectification. Cette garantie est soumise aux conditions suivantes : - L’administration a pu se prononcer en toute connaissance de cause ; - Le contribuable est de bonne foi ; - La demande du contribuable porte sur les points ayant fait l’objet d’un contrôle (étant précisé que les points contrôlés sont indiqués sur la proposition de rectification ou sur l’avis d’absence de rectification). Objectif Barreau – Droit fiscal 10 LEÇON 2 - SOURCES INTERNATIONALES ET EUROPÉENNES 11. Les conventions fiscales sont la source première du droit fiscal international (section I). Moins nombreuses, mais à l’origine d’un riche contentieux, les normes européennes constituent une autre source du droit fiscal (section II). SECTION I - LES CONVENTIONS FISCALES INTERNATIONALES 12. Compte tenu du champ des conventions – portant essentiellement sur la lutte contre l’évasion fiscale et l’encadrement des situations de double imposition – (I), il peut être extrêmement utile à l’administration fiscale ou au contribuable d’en tirer arguments dans le cadre d’un contentieux. Cette situation confronte parfois le juge à des conflits de normes, à l’origine de règles d’articulation des sources nationales et internationales (II). I. Interprétation et objet des conventions fiscales 13. Avec plus de 2 500 conventions bilatérales conclues de par le monde, elles jouent un rôle considérable en pratique. Analyser des conventions fiscales bilatérales suppose des références, des définitions communes, un modèle auquel les États puissent se reporter. Les organisations internationales ont ainsi mis au point des modèles de textes. Les premiers textes sont déjà anciens : le rapport du comité fiscal de la Société des nations en 1928, les conventions de Mexico en 1943 et de Londres en 1946. Ces travaux ont été repris par l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) qui a publié un modèle en 1963 puis en 1977. La convention modèle de 1977 a fait l’objet de plusieurs mises à jour (dont la dernière en 2017). Le modèle de convention bilatérale de l’OCDE est l’instrument de référence en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune, y compris pour les pays qui ne sont pas membres de l’organisation. Les commentaires de l’OCDE du modèle de convention fiscale peuvent servir à interpréter les conventions. Par principe, seuls peuvent être mobilisés les commentaires postérieurs à l’adoption d’une convention (CE, 9 nov. 2015, no 370974). Néanmoins, par deux fois, le Conseil d’État a nuancé cette règle : le juge de l’impôt peut toutefois se référer aux commentaires les plus récents, postérieurs à la convention litigieuse, lorsque ces commentaires confortent la solution (CE, plén., 11 déc. 2020, no 420174 et CE, 20 mai 2022, no 444451). D’autres conventions internationales sont inspirées d’un modèle élaboré par l’ONU, censé mieux refléter les besoins des pays en développement dans leurs relations avec les pays développés. Le modèle élaboré par l’ONU a été publié en 1980 et sa dernière version remonte à 2003. 14. L’interprétation des conventions fiscales internationales est encadrée. Elle doit être opérée conformément aux articles 31 et 32 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969. Conformément à cette convention, un traité doit être interprété selon plusieurs lignes directrices. Parmi ces lignes directrices, il est énoncé que la convention fiscale internationale doit être interprétée de bonne foi. Par ailleurs, l’interprétation qui est faite des termes doit suivre le sens ordinaire à leur attribuer, dans leur contexte et à la lumière de l’objet et du but de la convention. Lorsque cette méthode ne peut être appliquée, il peut être fait appel à des moyens complémentaires d’interprétation. Parmi eux, le Conseil d’État admet que les commentaires du modèle OCDE constituent un élément pouvant être pris en compte dans l’interprétation d’une convention conclue par la France, dès lors qu’ils lui sont antérieurs. Un certain nombre de conventions signées par la France comportent des dispositions en matière d’impôt sur la fortune (ex-ISF). À l’exception de la nouvelle convention franco-belge (signée le 9 novembre 2021), aucune de ces conventions ne vise l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). Il s’agit donc de savoir si une convention applicable à l’ISF est transposable à l’IFI ? Certes, l’administration indique que les principes guidant l’interprétation des dispositions des conventions fiscales utilisées pour les besoins de l’ancien impôt de solidarité sur la fortune (ex-ISF) sont repris en matière d’IFI. Il apparaît toutefois qu’une convention applicable à l’ISF ne l’est pas nécessairement à l’IFI, un examen au cas par cas des stipulations conventionnelles étant nécessaire (BOIPAT-IFI-10 no 30). Objectif Barreau – Droit fiscal 11 Contrairement au droit interne, les normes internationales n’ont pas pour fonction de créer des impôts. En revanche, elles peuvent aboutir à écarter partiellement ou totalement le droit pour la France d’imposer certains revenus ou éléments de patrimoine. C’est d’ailleurs l’un des objets principaux des conventions fiscales internationales (encadrer les doubles impositions). Il convient de distinguer deux types de double imposition. 15. Il s’agit premièrement de la double imposition juridique, qui survient lorsqu’une même personne est imposée deux fois à raison du même revenu ou du même patrimoine. Il en est ainsi, par exemple, lorsque deux États, au regard de leur droit fiscal interne, considèrent un contribuable comme domicilié dans chacun d’eux. Cette situation a pour effet de créer un risque de double taxation. Une autre situation de double imposition résulte de la disparité des règles de taxation d’un État à l’autre. Par exemple, un État soumet, à l’impôt, les revenus de source étrangère perçus par un résident (critère de la résidence fiscale), tandis que l’État dans lequel le revenu prend sa source opère également un prélèvement (critère de la source du revenu). L’hypothèse visée est celle d’un conflit entre « État de la résidence du titulaire du revenu » et « État de la source du revenu ». 16. Deuxièmement, la double imposition peut être simplement économique, lorsque deux personnes différentes sont imposées à raison d’un même flux financier ou d’un même fait générateur d’imposition (cas de la société mère et de la filiale, à raison des bénéfices distribués ; cette double imposition économique étant à l’origine du régime mère-fille destiné à écarter ce cumul de taxation, v. infra no 371). La double imposition économique peut se présenter dans des situations purement internes comme dans des situations internationales. En théorie, seules les doubles impositions juridiques sont encadrées par les conventions fiscales internationales. C’est pourquoi les conventions fiscales rédigées selon le modèle OCDE excluent à titre de principe le règlement des cas de double imposition économique et se concentrent sur les difficultés spécifiquement rencontrées en cas de double imposition juridique. 17. Dans cette perspective, l’effet d’une convention fiscale est, tantôt, d’éliminer purement et simplement la charge fiscale dans un État (méthode de l’exemption, l’un des États renonçant à sa compétence fiscale), tantôt, de la modérer sans la supprimer (méthode de l’imputation, les deux États conservant leur compétence fiscale, l’un octroyant un crédit d’impôt à raison de la taxation déjà opérée à l’étranger). II. Relations entre convention fiscale et droit interne 18. L’articulation des conventions fiscales internationales repose sur deux principes : le principe de subsidiarité (A) et le principe de primauté (B). A. Subsidiarité des conventions fiscales internationales 19. Ce principe constitue une exigence de méthode formulée par le Conseil d’État dans l’arrêt Société Schneider Electric du 28 juin 2002 (CE, 28 juin 2002, no 232276). Selon cet arrêt, « il incombe au juge de l’impôt, lorsqu’il est saisi d’une contestation relative à une telle convention, de se placer d’abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l’imposition contestée a été valablement établie et, dans l’affirmative, sur le fondement de quelle qualification ; […] il lui appartient ensuite le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer – en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s’agissant de déterminer le champ d’application de la loi, d’office – si cette convention fait ou non obstacle à l’application de la loi fiscale ». La formulation de ce concept est complexe, mais sa compréhension est aisée. Si un contribuable a été imposé à tort en France (il n’entrait pas dans le champ de la taxation), l’impôt doit être écarté sur la base du droit interne. En effet, lorsque l’imposition n’est pas justifiée sur le fondement de la loi fiscale interne, il n’y a pas lieu d’examiner la portée de la convention fiscale internationale. Autrement dit, la convention fiscale ne peut pas prendre le relais de la loi fiscale interne, lorsque celle-ci n’est pas applicable. Objectif Barreau – Droit fiscal 12 La raison en est que les conventions fiscales ne permettent pas, par elles-mêmes, de fonder (et donc prélever) l’impôt. Leur objet n’est pas de constituer un fondement autonome à une imposition. Il est autre : éliminer les cas de doubles impositions, lutter contre l’évasion fiscale… Cette jurisprudence connaît une récente évolution (CE, 31 mai 2022, no 461519). Le Conseil d’État distingue désormais deux situations : • Premièrement, en ce qui concerne la répartition du droit d’imposer prévue par la convention, conformément à sa jurisprudence antérieure, il incombe au juge de l’impôt saisi d’une contestation relative à l’application d’une convention, de se placer d’abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l’imposition contestée a été valablement établie avant de déterminer si la convention fait ou non obstacle à l’application de la loi fiscale (principe de subsidiarité). • Deuxièmement, le Conseil d’État précise qu’il appartient néanmoins au juge, pour la mise en œuvre des stipulations d’une convention qui sont relatives, non à la répartition du pouvoir d’imposer entre les deux États, mais aux modalités d’élimination des doubles impositions, de faire application des « stipulations claires » issues de la convention (effet direct de la convention). En l’espèce, devaient être mises en œuvre les stipulations claires de la convention franco-chinoise prévoyant l’imputation du crédit d’impôt forfaitaire. Le Conseil d’État suit en ce sens les conclusions du rapporteur public, selon lesquelles : « Lorsque la convention partage le pouvoir d’imposer un revenu, il faut appliquer directement la clause d’élimination, sans qu’il y ait lieu de faire un second crochet par le droit interne, dès lors qu’il s’agit d’une norme d’effet direct, obligatoire en tous ses éléments et qui prévaut sur toute disposition contraire de la loi interne, conformément à l’article 55 de la Constitution. » 20. Par conséquent, lorsque la convention est invoquée par l’administration fiscale ou le juge de l’impôt en vue d’asseoir l’imposition, la méthodologie doit être la suivante. Premièrement, il doit être vérifié dans un premier temps si l’imposition est valablement établie sur la base du droit interne. Deuxièmement, en cas de réponse négative (imposition non valablement établie en interne), la convention fiscale ne peut être invoquée pour fonder l’imposition. Au contraire, en cas de réponse positive, les règles qui émanent de la convention fiscale peuvent être sollicitées. Dans ce dernier cas, les conflits – qui naissent de la confrontation du droit interne et de la convention – sont résolus par application du principe de primauté de la convention fiscale. 20 bis. Contrairement au Conseil d’État, la Cour de cassation applique directement le principe de primauté des conventions fiscales sur la loi fiscale nationale (Cass., ass. plén., 2 oct. 2015, no 14-14.256) (effet direct de la convention). B. Primauté des conventions internationales sur le droit interne 21. En matière fiscale comme ailleurs, l’article 55 de la Constitution permet au juge d’écarter la loi interne lorsqu’elle contredit les traités auxquels la France est partie (conventions bilatérales et traités internationaux). Ainsi, la relation entre convention et loi fiscales obéit aux règles habituelles gouvernant la hiérarchie des normes. Ce contrôle conventionnel est loin d’être théorique, comme en témoignent plusieurs décisions du Conseil d’État. On prendra pour exemple la censure de l’article 209 B du CGI. Dans la décision Société Schneider Electric précitée, le Conseil d’État a en effet jugé que l’ancienne rédaction de cet article n’était pas compatible avec le jeu des conventions fiscales internationales. Objectif Barreau – Droit fiscal 13 FOCUS - mise en œuvre des principes de subsidiarité et de primauté • 1re étape : le revenu est-il imposable en application du droit interne ? Le juge de l’impôt doit, dans un premier temps, vérifier que le produit est imposable en France et ce, en application des dispositions de droit interne. - Cas 1-Le droit interne ne permet pas de fonder l’imposition. Dans ce cas, la convention fiscale ne peut être mobilisée (elle ne peut prendre le relai du droit interne, alors inapplicable). The end ! - Cas 2-Les conditions d’application d’une imposition sont remplies, l’impôt est fondé en droit interne. Il faut alors passer à l’étape suivante. • 2de étape : Les dispositions de la convention fiscale font-elles obstacle au droit interne ? Lorsque le CGI fonde l’imposition (principe de subsidiarité – étape 1), il faut ensuite se demander si la convention fiscale internationale y fait obstacle. Si tel est le cas, la convention rend la disposition de droit interne inapplicable (du fait de la primauté de la convention). SECTION II - LE DROIT EUROPÉEN 22. Bien que la primauté du droit de l’Union européenne ne soit pas expressément inscrite dans le traité de Lisbonne (entré en vigueur le 1er janv. 2009), la primauté du droit communautaire sur le droit des États membres est un principe fondamental, reconnu par la CJUE. Concrètement, un contribuable peut, sur ce fondement, faire valoir l’incompatibilité d’une disposition interne avec le droit de l’UE. Cette contestation pourra être exercée devant le juge administratif ou judiciaire français compétent. On sait en effet que le juge national est le juge de droit commun de l’application du droit communautaire (CE, ass., 30 oct. 2009, no 298348). Quels sont les effets de la primauté du droit de l’Union européenne ? Ils sont doubles : - Un contribuable qui subit une imposition fondée sur une disposition non conforme au droit de l’UE peut demander une décharge au juge de l’impôt, dans le cadre d’un recours contentieux ; - Si, du fait de l’imposition erronée, le contribuable supporte un préjudice (autre que celui d’ordre fiscal), il pourra exercer un recours en responsabilité contre l’État (sous certaines conditions : o 1° la responsabilité de l’État, o 2° un préjudice autre que fiscal, o 3° un lien de causalité entre la faute et le préjudice). En effet, depuis l’arrêt Francovitch (CJCE, 19 nov. 1991), les États membres doivent réparer les dommages causés pour les violations du droit communautaire qui leur sont imputables. Ce droit à réparation inclut l’hypothèse qui tient à la non-conformité d’une disposition interne au droit communautaire (CJCE, plén., 5 mars 1996, Brasserie du Pêcheur et Factortame). 22 bis. Quelles sont les sources du Droit européen en matière fiscale ? De prime abord, il convient d’observer que peu de règlements et de directives intéressent le droit fiscal, dès lors que cette matière demeure la dernière gouvernée par l’exigence d’unanimité au sein des États membres. Dans un second temps, observons néanmoins que le droit de l’UE constitue une source, plurale, de droit fiscal : • Il en est ainsi du Traité sur le fonctionnement de l’UE. Le marché intérieur, consacré par ce traité, suppose le libre exercice des activités économiques au sein de l’UE. De ce postulat, il résulte deux exigences. Premièrement, la politique fiscale de chacun des États membres ne doit pas fausser la concurrence en privilégiant les opérations internes, au détriment de celles à portée communautaire. Dit autrement, l’impôt ne doit pas constituer une entrave à la liberté d’établissement ou encore à la liberté de circulation en Europe, garanties par le droit de l’UE (voir à cet égard la jurisprudence qui s’est dessinée sur le fondement du principe de liberté d’établissement en matière d’intégration fiscale, contraignant le législateur français à réécrire plusieurs textes, infra no 363). Deuxièmement, la réalisation d’un marché intérieur suppose que les entreprises soient placées sur un pied d’égalité. Ainsi, le traité sur le fonctionnement de l’UE interdit, par principe, de favoriser certaines entreprises en leur Objectif Barreau – Droit fiscal 14 consentant des aides (art. 107 du TFUE) ; • Les directives en matière fiscale constituent également une source du droit fiscal. Certes, peu de directives intéressent le droit fiscal, dès lors que cette matière demeure la dernière gouvernée par l’exigence d’unanimité au sein des États membres. Le plus gros effet d’harmonisation (sans atteindre cet objectif) concerne la TVA. Cela s’explique par le fait que la volonté de créer un grand marché économique, fondé sur le principe de libre concurrence, exige de lever les obstacles fiscaux à la liberté de circulation des personnes et des biens. Le texte fondateur en matière de TVA remonte à 1977 (abrogé et remplacé par une directive de 2006) et a eu pour effet d’imposer, à tous les États membres, la mise en place d’un « système TVA ». L’harmonisation n’est pas complète, notamment en raison du maintien de taux distincts d’un État à l’autre à l’intérieur de l’Union européenne. Cependant, les différentes normes européennes poursuivent l’objectif d’harmonisation des règles d’assiette. Ainsi, le champ d’application de la TVA est défini par l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2006/112 du 28 novembre 2006 relative au système commun de la taxe sur la valeur ajoutée. Peut également être citée la directive UE/2017/2455 du 5 décembre 2017 qui concerne les obligations en matière de taxe sur la valeur ajoutée applicables aux prestations de services et aux ventes à distance de biens. Par ailleurs, bien que de portée limitée en matière fiscale, la Convention européenne des droits de l’homme constitue une source du droit fiscal. Ainsi, les contribuables peuvent invoquer ces dispositions devant le juge de l’impôt sur le fondement de la contrariété d’une règle interne avec la convention. Le contentieux fiscal s’appuie, parfois avec succès, sur la Convention. Un contribuable peut invoquer la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme qui a explicitement reconnu dans un arrêt (CEDH, 11 janv. 2007,