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This document provides an introduction to the concept of obligations under French law. It covers the definition of obligation, as well as different sources of obligations, including those arising from contracts, quasi-contracts, delicts (torts), and laws. It examines the evolution of the principles and clarifies the fundamental distinction between acts and facts creating obligations, according to French Civil Code 2016.
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Introduction §1 La notion d’obligations Définition du droit romain : obligatio est juris vinculum → l’obligation est un lien de droit (qui nous oblige, qui nous astreint à la nécessité de payer une chose selon le droit de notre cité). Elle est valable dans les pays issus du droit romain et de comm...
Introduction §1 La notion d’obligations Définition du droit romain : obligatio est juris vinculum → l’obligation est un lien de droit (qui nous oblige, qui nous astreint à la nécessité de payer une chose selon le droit de notre cité). Elle est valable dans les pays issus du droit romain et de common law. Le centre de gravité de la définition est la contrainte mais l’objet de cette contrainte est le fait d’exécuter une prestation déterminée. L’obligation est une dette (utilisée en anglais pour désigner les aspects passifs et actifs de l’obligation) A. Dualité de la terminologie L’approche contemporaine est double : La définition technique demeure la même que la définition issue du droit romain. C’est le lien juridique qui, unissant le créancier au débiteur, permet au créancier d’exiger du débiteur une prestation. Il y a quelque chose à faire (objet de l’obligation) et il y a quelqu’un qui peut contraindre l’autre à faire cela (le créancier) et celui qui est assujetti à cette contrainte (le débiteur). La définition large : l’obligation désigne tout devoir d’agir sanctionné par le droit. Est obligation tout ce qui est obligatoire. Cette définition absorbe la définition technique et le devoir juridique. Cela peut être regrettable car la distinction est réelle. La créance (obligation stricte) a tout un régime qui lui est propre, un ensemble de règles juridiques qui s’applique uniquement au sens strict. Un titulaire d’une créance peut la céder par exemple → c’est le régime des obligations. B. Transversalité de la notion Que ce soit au sens large ou dans sa définition technique, la notion d’obligation est commune à tout le droit (privé ou public, français ou étranger). C’est une notion fondamentale. Le droit est relationnel. Il contemple des relations (entre des personnes, entre des personnes et des choses, entre des choses) et les ordonne vis à vis de ce que le droit exige. L’obligation exprime le versant patrimonial de toute relation entre personnes. Ces relations sont envisagées par le droit sous cet angle patrimonial → Ex : le droit des contrats a pour objet de dire à quoi est obligée telle partie au contrat. La notion d’obligations vient du droit civil. Ce droit inspire toutes les branches du droit privé (travail, commercial…). Le droit privé lui-même inspire le droit public, le droit des obligations tel qu’il existe dans les rapports de droit public. Le droit des obligations de toutes ces matières juridiques se trouve modelé par le droit des obligations qui se trouve dans le Code civil. Celui-ci est développé au Titre des obligations contractuelles. Il fixe le modèle du droit des obligations. Les règles de droit des contrats présentes dans le Code civil sont décrites de manière ordonnée. Cette description (formation, effet, exécution, extinction) forme la théorie générale du contrat. Cette théorie générale du contrat est ancienne. Le Code civil de 1804 recueille cette tradition et la présente de manière écrite et ordonnée ce qui participe au rayonnement du Code civil dans le monde. 1 sur 108 Cette matière a été re-modelée en 2016 par l’ordonnance du 10 février 2016. Elle re-modèle la présentation des règles sans pour autant l’altérer. Il s’agissait de la présenter de manière rationnellement plus ordonnée qu’elle ne l’était avant. Cette réforme laisse intacte le droit de la responsabilité civile. La réforme touche aussi à la réforme des classifications. §2 Les sources des obligations Les sources proviennent de Rome. Il y avait 4 sources d’obligations. Les obligations résultant des contrats : un accord de volonté destiné à produire des obligations Les obligations quasi-contractuelles : elles ne naissent pas d’un accord de volontés mais d’un fait unilatéral bénéfique accompli par une partie/une personne au bénéfice d’une autre. L’obligation qui résulte de cette relation non consentie mais bénéfique est une obligation pour le bénéficiaire d’indemniser celui qui a agit en sa faveur si ce dernier a subit un dommage ou une perte à l’occasion de son acte de bienfaisance. Le régime de ces obligations est inspiré de certains contrats. Exemple → gestion d’affaires : je pars en vacances et mon voisin remarque une fenêtre restée ouverte chez moi. Craignant un vol ou des dommages, il décide d’entrer chez moi pour fermer la fenêtre sans que je ne lui ai demandé. Dans ce cas il protège mes intérêts. À mon retour, bien que je n’ai pas signé de contrat avec lui, la loi impose une obligation quasi contractuelle selon laquelle je dois indemniser mon voisin pour les frais raisonnables qu’il a engagés en agissant pour moi (ex: coût du matériel pour sécuriser la fenêtre) → une obligation peut naître sans qu’il n’y ait eu de contrat formel entre les parties : Fait unilatéral : le voisin a agit sans me demander Bénéfique au profit d’une autre personne : a permis de réduire/éviter les risques de vol ou de dommage pour moi Les délits : résultent d’un rapport non consenti, d’un fait unilatéral maléfique (non bénéfique). Le fait unilatéral d’une personne a causé un dommage à une autre. De cette relation résulte une obligation d’indemniser à la charge de celui qui a unilatéralement fait mal. L’acte était volontairement malfaisant. Les romains distinguent les délits des quasi-délits par la volonté de celui qui est à l’origine de ce fait unilatéral. Les obligations légales (ajoutées par Napoléon): obligations connues mais n’appartenant à aucune catégorie romaine. Elles résultent d’une décision de la loi qui dit qu’un tel est obligé envers tel autre en vertu de la loi. La réforme de 2016 simplifie cette classification : art.1100Cciv « Les obligations naissent d'actes juridiques, de faits juridiques ou de l'autorité seule de la loi. / Elles peuvent naître de l'exécution volontaire ou de la promesse d'exécution d'un devoir de conscience envers autrui. » A. L’obligation résultant d’un acte juridique Acte juridique : manifestation de volonté destinée à produire les effets de droit que la loi lui attache → art.1100-1Cciv : « Les actes juridiques sont des manifestations de volonté destinées à produire des effets de droit.» 2 sur 108 Plusieurs catégories d’actes juridiques : Actes bilatéraux (base sur laquelle le droit des contrat s’édifie) : accord entre deux parties destiné à produire des effets juridiques. Actes multilatéraux : accords qui unissent plus de 2 parties. Ces accords sont aussi des contrats mais le droit des contrats ne s’est pas modelé sur cette base. Ex : règlement de co- propriété (organisation des relations juridiques entre les co-propriétaires → le droit considère qu’ils sont tous partie au contrat) ou encore les sociétés à plusieurs actionnaires. Actes unilatéraux : manifestation unilatérale de volonté destinée à reconnaitre les effets de droit que la loi lui attache : reconnaissance d’enfant, le testament, la renonciation à un droit… - Ils sont généralement extinctifs, récognitifs. - Ils sont rarement créateurs d’obligations. ‣ Pour qu’il soit créateur d’une dette à la charge de celui qui manifeste cette volonté, il lui faut le secours d’une disposition législative reconnaissant les effets créateurs d’une obligation à une telle manifestation unilatérale de volonté. ‣ L’offre de contracter est un acte unilatéral. La loi prévoit que des obligations naissent à la charge de celui qui exprime cette offre → lorsqu’une personne exprime une telle offre (ex : vendre un bien/fournir un service), elle se lie juridiquement par sa proposition. Cet engagement peut créer des obligations légales à sa charge même si la partie à qui l’offre est adressée n’a pas encore accepté. L’obligation naît donc dès l’expression de cette volonté (l’offre) et non seulement à partir de l’acceptation par l’autre partie (« promesse d’exécution d’un devoir de conscience envers autrui » al.2.art.1100Cciv) ‣ La jurisprudence a reconnu des effets créateurs dans certaines circonstances spéciales : en droit du travail on admet qu’un engagement unilatéral d’un employeur à l’égard de ses salariés oblige l’employeur à respecter cette prise d’engagement. L’apport de la réforme de 2016 : il n’y a pas une série d’exception mais une catégorie plus générale où un engagement unilatéral est créateur d’engagement à la charge de celui qui l’exprime : al.2.art1100Cciv : « Elles peuvent naître de l'exécution volontaire ou de la promesse d'exécution d'un devoir de conscience envers autrui.» L’engagement unilatéral est une promesse d’exécution. Si cette promesse d’exécution n’est pas tenue par son créateur, il en résulte une obligation au sens stricte donc civile susceptible d’être engagée en justice même si son créateur change d’avis. C’est une obligation naturelle. C’est une obligation qui résulte d’un devoir de justice selon les canons du droit naturel. 2 types de devoirs de conscience : Les devoirs moraux qui n’ont jamais été consacré par le droit : ex : obligation naturelle de participer aux charges du ménage qu’impliquent la vie de couple. La loi consacre cette obligation dans le cadre du mariage mais la Cour de cassation dit que pour les couples non mariés ou non pacsés il existe aussi une obligation naturelle de contribuer aux charges communes. C’est un devoir moral, une conception naturelle que la justice impose. Si un membre du couple s’engage à accomplir ce devoir, il en devient juridiquement obligé quand bien même il n’y aurait pas de preuve de l’engagement de l’autre membre du couple. Le devoir de conscience peut correspondre à un devoir qui est reconnu par le droit, à une obligation au sens large reconnue par le droit mais dont le droit ne permet plus d’exiger l’exécution dans les circonstances de l’espèce → une obligation contractuelle mais plus susceptible d’exécution forcée car elle a été éteinte par prescription. L’obligation n’est plus 3 sur 108 justiciable, elle ne peut plus être réclamée en justice. Elle a dégénéré. Il demeure un devoir moral d’exécuter ce qui a été promis. L’engagement moral re-vivifie cette obligation. Elle redevient justiciable devant un juge. A a emprunté une somme d'argent à B avec un contrat. Cependant, A ne rembourse pas la dette dans les délais, et après un certain temps, cette dette devient prescrite. B ne peut plus exiger le remboursement de cette dette en justice, car le délai pour intenter une action est écoulé. L’obligation est éteinte d’un point de vue juridique. Cependant, malgré cette prescription, A peut ressentir un devoir moral de rembourser la somme empruntée à B, car il est conscient d’avoir contracté cette obligation initiale. Si A reconnaît volontairement cette dette en dehors du cadre légal en décidant de la rembourser malgré la prescription, l'engagement moral réactive cette obligation. Dans ce cas, si A fait un nouveau engagement explicite de rembourser, cet acte moral re-vivifie l’obligation et peut être à nouveau justiciable. B pourrait alors, sur la base de cet engagement, demander l’exécution de l’obligation en justice, car l'acte de reconnaissance volontaire d'A redonne une force juridique à l’obligation initialement éteinte. B. Les obligations résultant d’un fait juridique Définition + simple selon le prof : est fait juridique tout ce qui n’est pas acte juridique. Art.1100-2Cciv : « Les faits juridiques sont des agissements ou des événements auxquels la loi attache des effets de droit » + al.2 : « Les obligations qui naissent d'un fait juridique sont régies, selon le cas, par le sous-titre relatif à la responsabilité extra-contractuelle ou le sous-titre relatif aux autres sources d’obligations. » → opposition entre les obligations naissant d’un fait juridique bénéfique ou maléfique. Nées d’un fait juridique maléfique : réglées par la responsabilité civile extra-contractuelle. Nées d’un fait juridique bénéfique = faits unilatéraux bénéfiques : les quasi-contrats font naître à la charge du bénéficiaire une obligation de rendre indemne celui qui a unilatéralement agit dans son intérêt. Le droit recherche un certain équilibre entre la récompense que l’on peut donner à l’altruisme d’un individu et l’intrusion d’autres individus dans les affaires des autres, parfois même contre leur volonté. Le régime des quasi-contrats recherche cet équilibre. C. Les obligations seulement fondées sur la loi Art.1100Cciv : « […] ou de l’autorité seule de la loi ». L’obligation est imposée par la loi de l’extérieure dans certaines situations. C’est une catégorie résiduelle ancienne. Elle est très variée. Au sein de cette variété, il y a un ensemble assez visible : les obligations que la loi impose à une personne en raison de son statut social → en raison de sa position au sein d’un groupe social, d’une communauté déterminée. Ex : parce que vous êtes résident français il y a un certain nombre d’obligations qui naissent à votre charge comme payer des impôts. Certains pays attachent l’obligation fiscale non pas à une résidence mais à la nationalité (les EU). Ex : le fait d’être enfant au sein d’une famille (= membre d’un groupe familial) est un facteur de création d’obligations envers les parents. 4 sur 108 Ex : les obligations liées à une profession → du seul fait de l’appartenance à ce groupe socio- professionnel, des obligations s’imposent à l’individu (ex : le notaire doit un devoir de conseil à son client ainsi qu’à l’autre partie qui n’est pas son client par sa qualité d’officier ministériel. Il doit un devoir de conseil à tous ceux à qui il dispense son art). §3 la notion de contrat A. Le contrat, un outil essentiel à la vie économique C’est principalement dans les relations économiques que le contrat trouve son utilité. L’invention du contrat est comparé à l’invention de la roue. Il n’y a pas de vie sociale sans l’usage du contrat. Cette importance du contrat est commune au droit privé et au droit public voire aux rapports sociaux en général. Le contrat est un des trois piliers de l’ordre social avec la famille et la propriété. Définition juridique du contrat : Il ne désigne pas tout espèce d’accord art.1101Cciv : « Le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. » Elle est centrée sur la notion d’obligations (définition illustrée par l’art.1163Cciv : « l’obligation a pour objet une prestation » : concept qui relève de l’ordre économique : c’est le service fourni, la prestation) Le contrat est le vêtement juridique d’une opération économique c’est à la fois : - le negotium : c’est l’opération économique sur laquelle les parties sont tombées d’accord. - l’instrumentum : document qui reflète l’accord des parties. Le mot contrat a deux sens : - concret (negotium : ce qui a été convenu) - abstrait (instrumentum : l’instrument, le support, le papier) Il y a quelques grandes catégories d’opérations économiques autour desquelles se structurent les rapports économiques humains : La transmission des utilités d’une chose (prêt/location/vente). L’accord des transmissions est centrée sur l’utilité d’une chose. La transmission des utilités qu’une personne ou qu’une organisation humaine (entreprise) peut déployer : divertissement, enseignement, réparation L’attribution de la charge d’un risque, d’un aléa : le contrat d’assurance L’organisation d’une action collective : organisation d’un événement, d’une action collective Le droit des contrats reflète cette réalité pratique. Il s’organise autour de la règlementation de ces rapports économiques fondamentaux. Cela donne de grandes catégories de contrats dits spéciaux (contrat de vente, d’entreprise ou de mandat réuni sous l’appellation de contrat de prestation de service, règles de contrats aléatoires, contrats des sûretés, des sociétés…). Au delà de ces blocs fondamentaux, le droit ajoute la liberté contractuelle. Elle permet aux individus de spécifier leurs relations au regard de ce que leurs intérêts respectifs commandent dans les circonstances de temps et de lieux qui sont les leurs. Cela permet d’ajuster les modèles aux particularismes du projet que leur imagination leur inspire. Cela permet de les ajuster, de les combiner voire de convenir d’opérations atypiques. 5 sur 108 Liberté contractuelle : principe général du droit, directement issu de la théorie de l’autonomie de la volonté, selon lequel les parties sont libres de contracter ou de ne pas contracter de choisir leur cocontractant et de déterminer à la fois leurs obligations réciproques et la forme du contrat, dans les limites fixées par la loi, qui interdit de déroger aux règles qui intéressent l’ordre public. La première source du droit des contrats est la pratique, la convention entre les parties, ce qu’elles décident. Leur imagination est encadrée par le droit. Il encadre leur imagination par contrat spécial. Le droit romain ne connaissait pas le droit du contrat mais bien le droit des différents contrats que la pratique révélait. En France, il y a eu au XVIIème siècle un effort doctrinal de synthèse qui a été formalisé par Domat : apparition pour la première fois de règles communes à tous les contrats quelque soit leur espèce. C’est ainsi qu’un droit commun des contrats s’est formé → consacré par le Code civil de 1804. Agencement des différentes couches de droit : les lois spéciales dérogent au général : art.1105Cciv → lorsqu’il existe une loi spéciale qui traite d’une situation spécifique, cette loi prime les lois générales qui pourraient s’appliquer à cette même situation de manière plus large. Les conventions particulières ne peuvent pas déroger aux lois impératives - Les clauses particulières de la convention telle que la pratique les aura imaginé avec les ressources de la liberté contractuelle pour adapter les normes à la volonté des parties - Les règles très spéciales qui envisagent spécifiquement le type de convention en cause - Les règles du droit spécial au contrat en cause tel qu’il est envisagé généralement - Les règles du droit commun à tous les contrats (théorie générale du contrat) Cette faculté d’ajout aux règles légales est l’effet de la liberté contractuelle. Elle est consacrée dans les textes par l’ordonnance de 2016 : art.1102.al.1 : « Chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi. ». Cette liberté n’a de vertu que si elle est suivie d’effets, que si elle est effective. Elle n’a donc d’intérêt qu’associée à la force obligatoire de ce qui est convenu donc du contrat. C’est un principe indiqué à l’art.1103Cciv : « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. » → force obligatoire → Contrat : accord modelant des obligations conclues librement et dotées de force obligatoire. B. Les vertus et les vices de l’association de liberté contractuelle et force obligatoire 1. Les vertus de la force obligatoire Sur le plan économique : Elle est forcément nécessaire. - C’est la condition essentielle pour les parties puissent projeter leur relation économique avec sécurité dans l’avenir. C’est ce par quoi le droit garanti le bon déroulé de la relation. Elle permet le crédit, l’investissement. C’est ce qui permet la prévision des parties. Elle permet les contrats de durée, de crédit où toutes les prestations ne sont pas exécutées comptant ou simultanément. 6 sur 108 - Maurice Houriou dit « le contrat est la tentative la plus hardie qui se puisse concevoir pour établir la domination de la volonté humaine sur les faits en les intégrant d’avance dans un acte de prévision ». - Elle permet des opérations qui s’inscrivent dans le temps. Sur le plan des relations sociales : sans la force obligatoire du contrat, on ne contracterait qu’avec des gens en qui on a confiance. Cela représente les coûts de transaction car les parties n’ont pas le temps de connaitre l’autre partie. La force obligatoire a la vertu sociale de favoriser les liens et les opérations entre personnes au sein du corps social. Le droit protège les parties. Sur le plan moral : la force obligatoire du contrat est aussi le reflet d’un précepte moral : le respect de la parole donnée. Il y a derrière des conceptions profondes sur la dignité humaine. Respecter sa parole c’est se respecter soi et autrui. Il faut répondre de sa parole même on n’en a plus envie. La force obligatoire a plusieurs vertus qui sont optimisées par la liberté contractuelle 2. Les vertus de la liberté contractuelle Elle permet de s’adapter à un grand nombre de situations et de laisser aux gens la liberté du contenu de leur transaction. Les gens tendent à exécuter plus facilement ce dont ils ont librement décidé. De plus, elle promeut une certaine conception de l’homme comme étant apte à se protéger ses intérêts par la combinaison de la raison et du caractère : Raison : juger ce qui est bon ou mal selon ses intérêts Caractère : dire non à ce qu’on essaie de lui imposer → notion du consentement Derrière cette représentation de l’homme qui soutient la liberté contractuelle, il y a l’idée importante que chacun est meilleur juge de ses intérêts : il digne et bon de confier à chacun ce qui est bon ou non pour lui. C’est une conformité à l’idée de justice. Le résultat de cet accord librement et lucidement (raison et caractère) convenu est, en principe, juste. - Kant : « quand quelqu’un décide quelque chose à l’égard d’un autre, il est toujours possible qu’il lui fasse quelque injustice mais toute injustice est impossible dans ce qu’il décide pour lui- même. » - Formule juridique : qui dit contractuel dit juste (Alfred Fouille) Cela présuppose que le contrat soit le fruit d’une décision libre et éclairée. Or, ce n’est pas toujours le cas. C’est pour cela que la liberté contractuelle conçue sans barrière est aussi porteuse de certains vices. 3. Les inconvénients à une liberté contractuelle sans entrave Les affaires peuvent se révéler désavantageuses a posteriori. La liberté contractuelle n’a de liberté que le nom dans ces cas là. Dans la réalité du processus qui a conduit à la manifestation du consentement, la partie n’a pas été libre de dire non (compétences ou temps pour le dire). Elle n’est pas à même d’avoir décidé rationnellement de son engagement → Lacordaire : « entre le fort et le faible (…) c’est la liberté qui asservie et la loi qui libère » : il y a des contrats qu’on ne peut pas ne pas conclure si on souhaite vivre normalement selon les 7 sur 108 standards minimaux de l’époque (contrat de nécessité). Ils apparaissent au XIXème siècle avec l’émergence du prolétariat. Le droit cherche donc un équilibre entre les vices et les vertus. C. L’équilibre La force obligatoire ne vaut pas pour tout accord. Elle vaut pour les contrats légalement formels (art.1103Cciv). La liberté contractuelle peut épanouir ses vertus dans le cadre de la loi. Les contrats doivent être contractés de bonne foi. La loi abandonne à la volonté des parties le soin de dessiner les contours de l’obligation et de la norme qui régit les parties car c’est en général vertueux. Mais, la loi pose des limites que ce soit contrat par contrat ou des limites générales comme l’ordre public → doctrine de l’autonomie de la volonté : Principe : les individus sont libres de déterminer le contenu de leurs engagements contractuels et de s’engager selon leur propre volonté. Conception extrême de l’autonomie de la volonté : les parties peuvent se donner leurs propres normes sans aucune forme de limite. La volonté nue serait en soit contraignante, elle se donne ses propres règles. Cette conception n’a jamais été reçue en droit positif. Conception modérée : laisser les individus juges de ce que leurs intérêts commandent et ensuite donner force de manière pérenne à l’accord qui en résulte. Ce principe général n’a de valeur que sous le regard de la loi qui vient limiter ce dont on peut convenir et de son exécution. Le législateur pense que dans certaines limites il faut laisser aux parties une certaine liberté afin d’ajuster cette relation à leurs projets respectifs et à leurs intérêts propres. En droit, la volonté nue n’a jamais été source d’obligation. L’énergie vient d’ailleurs. Elle vient de la législation, de l’ordre juridique. Le droit des contrats vit dan une philosophie libérale de principe qui coexiste avec une philosophie dirigiste. Ce dirigisme peut s’exprimer par l’intervention du juge. Ce point d’équilibre entre liberté et dirigisme qui varie selon les types de contrats intervient dans la formation des classifications contractuelles. §4 Les classifications contractuelles A. Les distinctions liées au formalisme de formation Art.1109Cciv : « Le contrat est consensuel lorsqu'il se forme par le seul échange des consentements quel qu'en soit le mode d’expression. / Le contrat est solennel lorsque sa validité est subordonnée à des formes déterminées par la loi. / Le contrat est réel lorsque sa formation est subordonnée à la remise d'une chose.» les contrats consensuels : Il suffit de prouver l’accord de volonté et son contenu pour prouver le contrat et réclamer la sanction de ses effets attachés par la loi. Il n’est pas nécessaire d’avoir un instrumentum pour former un contrat car les paroles suffisent à lier les contractants. Il est néanmoins fréquent que les contrats soient rédigés par écrit (instrumentum = preuve). Cette recommandation est si puissante que dans un point de vue juridique en matière probatoire la preuve des obligations civiles suppose un acte littéral passé un certain enjeu. Sans preuve littérale (écrit signé) il n’y a pas de preuve (c’est une même chose que de ne pas être 8 sur 108 prouvé). Lorsqu’il s’agit de prouver une obligation contractuelle, il faut un écrit. L’instrumentum est donc quasi systématique. Les contrats solennels : Ce n’est pas un élément de validité lorsque le contrat est solennel (donation entre vifs, l’hypothèque). (À revoir) Contrats réels (ex: prêt à l’usage) : l’obligation ne nait que par la remise de la chose. Avant les parties ne sont obligées à rien. Un échange de parole ne suffit pas à former l’acte juridique. B. Une distinction fondée sur la réciprocité des obligations 1. Distinction contrats à titre onéreux et gratuit Art.1107Cciv : « Le contrat est à titre onéreux lorsque chacune des parties reçoit de l'autre un avantage en contrepartie de celui qu'elle procure. / Il est à titre gratuit lorsque l'une des parties procure à l'autre un avantage sans attendre ni recevoir de contrepartie. » : Les différences de régime existent mais ne relèvent pas du droit commun des contrats. Il y a des contrats spéciaux qui sont objectivement à titre onéreux ou à titre gratuit → la donation n’est pas un acte unilatéral mais un contrat à titre gratuit. Il faut que le donataire accepte de recevoir. C’est un contrat qui a l’air économiquement irrationnel (donner sans recevoir = s’appauvrir). Dans la perspective du Cciv s’appauvrir volontairement au profit d’autrui est considéré comme quelque chose d’anormal. Le droit des contrats repose sur l’idée que le contractant normal/raisonnable est un contractant rationnel qui gère correctement son actif (qui peut donc faire des erreurs dans la vie économique). Il ne va pas s’appauvrir volontairement, sans aucun retour. Le Code civil invite l’homme économique à être rationnel car il n’est pas seul au monde : il a des créanciers qui espèrent de lui qu’il va gérer correctement son actif et qu’ils veulent pouvoir recouvrir leur dû. Le contractant du Code civil aura sûrement des héritiers. L’homme qui se dépouille au détriment de ses héritiers ne fait pas leur affaire. Or, il est de l’intérêt social que les fortunes se transmettent pour accroître. Le bon contractant, la personne raisonnable est celle qui pense ses actifs dans une dimension collective. Dans le droit des contrats spéciaux, certains contrats à titre gratuit économiquement peu rationnels font l’objet de conditions de validité renforcées pour les personnes physiques mais aussi pour les personnes morales. Pour celles-ci aussi faire des dons est un acte anormal de gestion. La personne morale n’est pas censée dilapider son patrimoine. La personne morale doit générer rationnellement son patrimoine dans la perspective qu’il s’accroisse. Les libéralités (tous les actes par lesquels une personne se dépouille de tout ou une partie de ses biens ou de ses droits au profit d’une autre personne sans attendre un avantage quelconque) sont donc renforcées : les donations entre vifs ne peuvent être faites que de manière solennelle (devant le notaire pour que celui-ci conseille). Le Code civil subordonne la validité des libéralités à des conditions renforcées. Sur le plan de la responsabilité civile d’un contractant s’étant engagé à titre gratuit, le Code civil fait preuve d’une certaine indulgence. Celui qui s’engage valablement sans espoir d’un avantage en retour fera l’objet d’indulgence si il fait mal. 9 sur 108 2. L’opposition entre contrats synallagmatiques et unilatéraux Art.1106 Cciv : le contrat est synallagmatique lorsque les contractants s’obligent réciproquement les uns envers les autres. /Il est unilatéral lorsqu'une ou plusieurs personnes s'obligent envers une ou plusieurs autres sans qu'il y ait d'engagement réciproque de celles-ci. Al.1 : les contrats synallagmatiques : les engagements doivent être réciproques et inter- dépendants. Une obligation trouve sa justification dans l’obligation de l’autre. Al.2 : les contrats unilatéraux : lorsqu’une seule des parties s’engage. L’obligation ne nait que si les deux parties en sont convenues. Cela reste un acte bilatéral. Un contrat unilatéral n’est pas un acte unilatéral. La donation est recevable uniquement quand celui qui reçoit ait accepté de recevoir. Si quelqu’un remet une chose à l’autre mais que celui-ci n’y a pas consenti = ce n’est pas un contrat → les effets ne seront pas gouvernés par le droit des contrats. 3. L’opposition entre contrats commutatifs et contrats aléatoires Art.1108. al.1Cciv : « Le contrat est commutatif lorsque chacune des parties s'engage à procurer à l'autre un avantage qui est regardé comme l'équivalent de celui qu'elle reçoit. » Le contrat est commutatif cad qu’il engendre une commutation. Le terme mutation signe « transfert d’un patrimoine à un autre ». La chose mute, elle se déplace d’un patrimoine à un autre. Une commutation signifie qu’une chose mute dans une direction en échange de la mutation d’une chose dans l’autre direction. Le contrat commutatif est le reflet d’un échange économique. → il y a des recoupements entre les définitions : le contrat synallagmatique est commutatif et aussi onéreux. Apport propre de la définition du contrat commutatif : « qui est regardé comme l’équivalent de celui qu’elle reçoit » : le contrat commutatif est le contrat juste à la lumière de la justice commutative. C’est la justice des échanges. Lorsqu’il y a un flux, le rapport est juste lorsqu’il y a un contre-flux commutatif. Alors, justice est faite. C’est une conception naturelle de ce qui est juste. Qui apprécie ce qui est l’égal/l’équivalent ? Il y a 2 conceptions possibles : Quelqu’un d’extérieur à la relation = un tiers Les représentations subjectives des parties qui fixent ce qui constitue un équivalent satisfaisant → Les deux procédés existent mais pas dans les mêmes circonstances. Un contrat est juste lorsque le Code civil renvoie à une conception objective de l’égalité. Le juste est ce qu’une partie regarde comme l’équivalent de ce qu’elle a donné, de ce qu’elle s’est engagée à faire Art.1108.al.2Cciv : « Il est aléatoire lorsque les parties acceptent de faire dépendre les effets du contrat, quant aux avantages et aux pertes qui en résulteront, d'un événement incertain.» Définition très large et sans régime : pas de régime commun à tous les contrats aléatoires Ex : le contra d’assurance de responsabilité ou de dommage → l’individu paie des primes que l’assureur encaisse mais il ne sait pas si il sera indemnisé (c’est tout ou rien) C. Les distinctions fondées sur la durée du contrat Art.1111-1Cciv : le contrat instantané et contrat à exécution successive : Al.1 : Le contrat à exécution instantanée est celui dont les obligations peuvent s'exécuter en une prestation unique. 10 sur 108 Al.2 : Le contrat à exécution successive est celui dont les obligations d'au moins une partie s'exécutent en plusieurs prestations échelonnées dans le temps. → il serait plus pertinent de distinguer trois catégories en fonction de leur rapport à la durée : Contrat à exécution instantanée : - chacune des obligations qui en résultent peut s’exécuter en une prestation unique ou en un instant (vente comptant = achat de la baguette chez le boulanger). L’idée d’une seule fois peut avoir un rapport au temps plus distendu. Il faut que la prestation reste unique. - Ce contrat peut s’inclure dans une longue durée si les obligations réciproques ne sont pas synchronisées (ex : le boulanger peut faire crédit sur l’achat de la baguette : le contrat s’étale dans le temps mais l’ensemble des prestations s’exécute en une seule fois). - Intérêt : suite à une inexécution on peut choisir de détruire le rapport juridique. Alors, comme le contrat formait un bloc il est entièrement détruit. La résolution (= destruction) est rétroactive. Contrat à exécution échelonnée : - La prestation à fournir par chaque partie est unique mais divisée en plusieurs sous prestations distinctes. La prestation unique est accomplie de manière échelonnée, au fur et à mesure que les prestations s’accomplissent - Ex : rénovation d’un appartement : ‣ Le contrat est conclu entre le propriétaire et une entreprise tous corps de métier. ‣ Le propriétaire n’a qu’un seul débiteur, l’entrepreneur. ‣ Celui-ci a une prestation à faire : la rénovation de l’appartement selon les plans définis. ‣ En revanche, la rénovation ne s’exécute pas selon une prestation homogène. ‣ Elle suppose plusieurs prestations : destruction et construction de murs, pose d’un parquet, peinture… ‣ Ce sont des prestations distinctes qui requièrent des compétences distinctes. ‣ Elles se succèdent dans le temps les unes aux autres. - Il y a une prestation globale convenue formée de plusieurs prestations distinctes qui s’échelonnent dans le temps. - Ex : un contrat pour valider une formation. ‣ Il faut suivre 12 modules ‣ Les modules sont différents mais pour que la prestation convenue soit réalisée il faut effectuer les 12 modules. - Le rapport au temps distendu. Il est souvent mis dans les contrats à exécution instantanée. - Si il y a résolution du contrat : elle est rétroactive et vaut pour toutes les prestations Contrat à exécution successive : - Ce sont des prestations qui se succèdent et qui sont identiques les unes aux autres - Chacune de ces prestations doit porter une utilité qui lui est propre et qui justifie une contre-partie en soi (une rémunération) - Ex : le contrat de bail : ‣ La prestation du bailleur consiste à conférer la jouissance paisible d’un appartement = utilité qui lui est propre ‣ Chaque période justifie le paiement d’une contre-partie = le loyer. - Il y a une subdivision : ‣ Les CDD : ils ont un terme extinctif fixé d’avance. Le terme est certain, il a une date. ‣ Les CDI : aucun terme extinctif n’a été convenu. Il est incertain = un évènement futur va arriver nécessairement mais on ne sait pas quand est-ce qu’il va arriver ‣ Intérêt de la distinction : 11 sur 108 Art.1211Cciv : le CDI peut faire l’objet d’une résiliation unilatérale par toute partie à tout moment pour des raisons de libertés fondamentales. Une partie ne peut pas être engagée éternellement. La loi donne la faculté de sortir unilatéralement du contrat. Le CDD doit en principe aller jusqu’à l’échéance de leur terme. Une partie ne peut pas en sortir librement avant. Il peut tout de même y avoir une rupture du contrat mais celle-ci doit être motivée par l’une des raisons prévues par la loi. Les CDD peuvent se renouveler tacitement. Il est fréquent que les entreprises signent des contrats et les oublient. Quand l’échéance arrive, les parties continuent à exécuter. Cette relation juridique résultant de la poursuite de facto du contrat pourtant éteint. Pour la loi, le contrat s’est renouvelé tacitement dans toutes ses dispositions sauf dans ses dispositions relatives à la durée. Un CDD dont l’exécution se poursuit après l’échéance de son terme emporte la formation d’un nouveau contrat identique en tout point sauf qu’il sera CDI. - Si une partie cesse d’exécuter une partie de ses prestations, le contrat s’arrête. La partie de temps où les prestations auront été réalisées correctement seront conservées. La résolution ne vaut que pour l’avenir. Elle ne produit pas d’effets rétroactifs. → Le CDD : en principe il faut aller jusqu’à son terme. En partant de ce postulat, on pourrait faire un contrat 120 ans ce qui porte atteinte aux libertés individuelles. Pour régler cette situation, on estime plutôt que le CDI porte sur les termes trop lointains. L’article 1210Cciv prohibe les engagements perpétuels : ils tendent à durer perpétuellement et cette perpétuité s’apprécie en fonction de ce que le respect de la liberté individuelle commande. La justification se comprend à l’égard des personnes physiques (moins des personnes morales). On apprécie le seuil de ce qui est perpétuel selon que le débiteur est une personne physique ou morale. Le contrat qui tendent à durer trop longtemps sont par l’effet de l’article 1210 du Code civil traités comme des CDI (donc rupture unilatérale possible). Ex : contrat de fournitures de service électronique qui est prévu pour une durée de 5 ans. Si un client demande une modification du matériel, chaque demande, si elle est acceptée refaire courir le contrat pour une durée de 5 ans. C’est un contrat qui nécessite une actualisation régulière des prestations fournies : la réinitialisation est nécessaire. Ce mécanisme de renouvellement indéfini fait que le contrat tend à la perpétuité. 1. Les distinctions fondées sur la négociabilité des termes du contrat Art.1110Cciv : Al.1 : Le contrat de gré à gré est celui dont les stipulations sont négociables entre les parties. Al.2 : Le contrat d'adhésion est celui qui comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l'avance par l'une des parties. Le critère d’opposition : le caractère ou non négociable des termes de l’engagement. - La plupart des contrats sont des contrats d’adhésion. ‣ Tous les contrats passés par l’intermédiaire d’une machine ou les contrats passés via internet sont des contrats dont les termes ne sont pas négociables par les individus. Or, les contrats électroniques, passés par l’Internet, sont très très nombreux. 12 sur 108 ‣ De même, tous les contrats passés avec une personne physique qui ne disposent pas du pouvoir d’amender les termes du pouvoir sont des contrats d’adhésion (ex : employé dans des grands magasins). Il n’a aucun pouvoir de négociation sur les stipulations. Tous les contrats de masse, standardisés et destinés à des opérations économiques de masse sont des contrats d’adhésion. - Les contrats de gré à gré : ‣ c’est le contrat négocié. ‣ Il est statistiquement marginal. ‣ Ce sont les contrats les plus importants en terme d’enjeux et de valeur unitaire. ‣ Ce sont aussi les plus importants pour les juristes car ils interviennent dans la négociation des termes La force des volontés (voir doctrine) : - Comme dans un contrat d’adhésion le degré de volonté commune est assez peu élevée (puisqu’une des deux parties ne peut pas discutée des termes du contrat), la loi permet un regard extérieur sur le contenu du contrat - art.1171Cciv : « Dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite ». - Un regard a posteriori et extérieur corrige les termes du contrat en l’épurant de certaines stipulations jugées abusives ou excessives. L’interprétation du contrat : - Dans un contrat d’adhésion il n’y a pas de dialogue. Il est conclu très rapidement, sans discussions car elle n’a pas d’enjeu. - Les ambiguïtés du texte s’interprètent au détriment de celui qui les a proposé. 2. Les distinctions entre contrat échange et contrat alliance Elle n’apparait dans le Code civil car elle est élaborée sous une forme de distinction rationnelle de manière récente. La réforme de 2016 ne la prend pas en compte. Mais elle reste réelle dans le droit positif. Cette distinction reflète deux types d’opérations économiques fondamentales : les alliances et les échanges : Le contrat échange (prestation contre un prix) : - le contrat, qu’il dure ou non, fourni une utilité dans son exécution et les parties se quittent. - L’opération à vocation à s’épuiser dans une commutation (ex : la vente). Le contrat alliance (ou organisation/coopération) : - Il n’a pas vocation à s’épuiser dans un échange, - Les parties groupent des moyens en vue de développer une opération commune qui s’inscrit dans le temps. - L’archétype du contrat alliance est la société. - Inscription dans la durée par une convergence de moyens. - Parce que les parties créent une activité commune qui s’inscrit dans le temps, elles comportent : ‣ des mécanismes de décisions ‣ des règles d’organisation du pouvoir pour savoir quelle décision prendre face à des situations données. ‣ Elles instituent une hiérarchie entre les parties. 13 sur 108 Intérêt de cette distinction : Pas le même concept de justice suivant l’opération : Commutative : - elle est pertinente pour les contrats d’échange. - Quand le juge met en place le concept d’exigence de bonne foi (par exemple), il cherche à les conformer à ce qui lui parait être juste. - Dans une opération d’échange, si chacun reçoit ce qu’il considère comme l’équivalent de ce qu’il procure alors l’opération est juste. Distributive : - elle est pertinente pour les contrats d’alliance. - Elle invite à considérer les mérites des uns et des autres dans l’édification du bien commun, dans le développement de la fortune que l’organisation aura crée. - La relation, en cas de difficulté, trouvera sa solution si chacun est rétribué à hauteur de sa contribution. - La rétribution est proportionnée à la contribution. - C’est le modèle de la société. Quand une partie sort de l’organisation, il est normal qu’elle sorte avec une indemnité représentative de son contribution. → Le juge utilise les outils flous comme l’exigence de bonne foi de manière beaucoup plus intense dans les contrats d’alliance que dans les contrats d’échange. Dans ces contrats d’alliance, il y a un intérêt collectif qui se distingue des intérêts individuels de chacun des membres ce qui n’est pas le cas dans les contrats d’échange où les intérêts sont antagonistes (mais ont trouvé un terrain d’entente). (Voir doctrine) 3. Les autres distinctions Contrat cadre : - ensemble des conditions juridiques qui encadrent la relation entre les parties. - Toute l’armature juridique est fixée dans le contrat cadre Contrat d’application : - Mise en application des modalités du contrat cadre - contrat effectué tout au long de la relation comme des contrats de vente. - Tous les contrats de vente où on paie à la demande : contrat d’abonnement avec un fournisseur avec un ensemble de conditions mais l’individu ne s’engage à payer quelque chose qu’au coût par coût (ex : Amazon → contrat cadre = abonnement et contrat d’application = commande) Le droit commun du contrat varie selon le secteur économique : B to B : business to business : La valeur ajoutée du juriste se trouve dans les contrats B to B (fournitures de services…) B to C : Business to consumer C to C : Consumer to consumer : entre particuliers (ex : le bon coin) → très règlementé et surveillé par l’administration. Ils sont moins contentieux car la difficulté s’arrête plus vite. 14 sur 108 Partie 1 : la formation du contrat Un accord sur les éléments essentiels du contrat suffit à faire naître le contrat. Le consensualisme est le principe. Ce consentement se manifeste, en principe, par l’acceptation d’une offre. Pour que le contrat soit valablement formé il faut que les volontés qui s’expriment soient intègres. Pout favoriser cette intégrité il y a souvent une période précédant le consentement (dans le B to B et C to C): c’est la période pré-contractuelle. Chapitre 1. La période pré-contractuelle Elle consiste en une négociation du contrat : les pourparlers. Parfois, les termes possibles du contrat sont figés en laissant un temps de réflexion supplémentaire pour l’une des parties. Elle est alors bénéficiaire d’un droit d’option : promesses de contrat. 15 sur 108 Section 1. Les pour-parlers Pourparlers : discussion entre personnes explorant la possibilité de conclure un accord → Définir les stipulations des contrats gré à gré. L’essentiel des discussions porte sur des notions économiques. La négociation est avant tout économique. Elle peut aussi porter, dès que le contrat est sophistiqué c’est inévitable, sur les termes de la réalisation de l’engagement et sur des termes juridiques. Cette phase est visée à l’article 1112Cciv : Al.1 : « L'initiative, le déroulement et la rupture des négociations pré-contractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi.» Al.2 : « En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d'obtenir ces avantages. » §1 La nature des pourparlers C’est une discussion. Elle est le plus souvent inorganisée juridiquement : il n’y a pas de conclusion d’accord de pour-parlers. La responsabilité qui peut résulter d’une mauvaise foi dans le déroulé des pourparlers est donc extra-contractuelle. Il se peut que les pourparlers soient organisés par une convention, dans les organisations les plus importantes. Deux instruments interviennent : Les accords de principe (L.O.I : letter of intent) : - formalisent l’intention des parties de s'engager dans un processus de négociation en vue de conclure un contrat définitif - document qui énonce les grandes lignes des engagements futurs, sans pour autant engager juridiquement les parties à conclure un contrat final. - Bien que les accords de principe ne lient pas juridiquement quant à la conclusion d'un contrat, ils peuvent engager la responsabilité des parties si l'une d'elles se retire de mauvaise foi (par exemple, en rompant brusquement les pourparlers sans raison valable). Les accords de négociation : - Dans un accord de négociation on retrouve des clauses organisant les négociations (ex : clauses de confidentialité ou d’exclusivité ou de durée). - Fixer les modalités des négociations à venir sans que cela ne débouche sur un contrat final - Les parties conservent une grande liberté de se retirer ou de poursuivre les négociations - Le consentement se forme étape par étape. §2 la responsabilité pour rupture des pourparlers Il se peut que la négociation tourne mal et qu’une partie estime qu’une faute a été commise et cherche à engager la responsabilité de l’autre. Le principe de départ : les pourparlers peuvent être librement rompus sous réserve des règles de la bonne foi dans les relations économiques. La rupture est libre. Si une partie n’est pas libre de dire non à une proposition elle n’est pas dans un contexte de négociation. La rupture en soit n’est pas fautive = on peut toujours dire non. Si une partie a laissé croire certaines choses à l’autre durant le processus de négociation et que celle-ci a pris des décisions d’investissement ou de désinvestissement sur la base de cette 16 sur 108 croyance alors il y a un problème : laisser avoir prospérer une confiance légitime chez l’autre partie et de la décevoir. A. La faute dans la conduite des pourparlers Faute : susciter une confiance légitime dans la bonne fin du processus et à ne pas l’avoir détromper en temps utile, à l’avoir déçu in fine. Cette faute peut s’aggraver. On peut inviter quelqu’un à entrer en négociation en vue qu’il n’aille pas négocier avec quelqu’un d’autre dans le fait de lui faire perdre une opportunité ou de lui soutirer des informations. Ce sont autant d’exemples de contentieux où la négociation a été engagée sans aucune volonté de conclure le contrat. Si l’attitude tenue a entrainé une croyance légitime dans le chef de l’autre partie, le fait de la décevoir est considéré comme un manquement à la bonne foi : c’est la figure de l’incohérence (fait croire et décevoir). Même si les pourparlers sont très avancés, ils peuvent être rompus mais il faut un justificatif qui l’exempte de la faute grave. D’où art.1112Cciv al 1 : exigence de bonne foi B. Le préjudice réparable En cas de rupture abusive, on pouvait obtenir l’équivalent de ce que le contrat manqué aurait pu engendrer comme profit. Cette possibilité laisse place à la tentative de provoquer un contentieux. En 2003, l’arrêt Manoukian ferme cette possibilité. La réforme de 2016 consacre cette jurisprudence ce qui fait perdre l’intérêt de la rupture des pourparlers. Cet arrêt rappelle que ce n’est pas le fait de ne pas conclure qui est la faute mais d’avoir laisser croire à la conclusion. La perte d’une chance de bénéficier du contrat manqué résulte de la rupture. Elle n’est pas causé par ce qui est fautif dans le comportement du défendeur. L’article 1112.al.2 le précise : « En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d'obtenir ces avantages.» Le contentieux de la rupture des pourparlers ne permet plus d’obtenir l’équivalent de ce qu’aurait été le contrat projeté. Aujourd'hui, seuls les coûts de la négociation avancés par la partie lésée sont remboursées par la partie fautive. Si une partie souhaite se réserver plus de sécurité, tout en se réservant du temps pour conclure, elle peut faire appelle à une autre figure. Section 2 Les promesses de contrat La promesse de contrat est une figure contractuelle bien connue en matière de vente. Il y a une jurisprudence importante sur les promesses de vente unilatérales immobilières. La réforme de 2016 consacre et généralise cette figure de promesse de contrat : art.1124Cciv : «La promesse unilatérale est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l'autre, le bénéficiaire, le droit d'opter pour la conclusion d'un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire.» 17 sur 108 §1 la nature de la promesse unilatérale de contrat (PUC) Promesse unilatérale : c’est un contrat et non un acte unilatéral. La promesse unilatérale suppose un consentement des deux parties → le promettant et le bénéficiaire. Il en résulte un engagement juridiquement contraignant et des obligations. L’engagement essentiel consiste à s’engager pour le contrat futur (« et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire »). Le consentement du promettant est déjà donné. Le bénéficiaire peut s’obliger à quelque chose en retour. En matière de vente immobilière, il est bien connu que le bénéficiaire est obligé de payer une indemnité d’immobilisation. Cette indemnité est le prix du temps que s’offre le bénéficiaire pour pouvoir opter (= faire un choix) et être le seul à pouvoir le faire. La PUC immobilise un actif au profit du bénéficiaire. Le promettant ne va pas pouvoir promettre (dans l’exemple) de vendre à un tiers. Le bénéficiaire sait qu’il bénéficie d’une exclusivité → cette position favorable peut être payante. Dans la mesure où seul le consentement du bénéficiaire manque, il faut que tous les éléments du contrat final soit déterminés ou déterminables dans la promesse. Au travers de la PUC, un promettant ne s’oblige pas à former le contrat futur. Il y a déjà consenti. Il ne manque, à la formation du contrat futur, que le consentement du bénéficiaire qu’il exerce par le droit d’option que le contrat lui confère. Cela explique le régime de la PUC. Le droit d’option peut être payant. Si l’indemnité d’immobilisation est élevée, la liberté d’opter peut être ramenée à rien. Auquel cas, la promesse peut être disqualifiée en disant qu’il s’agit déjà d’une vente. L’indemnité d’immobilisation reste la rémunération de l’exclusivité et de la liberté que s’est réservé le bénéficiaire. Le droit d’option est un droit original. C’est un droit potestatif (manifeste ses effets par la simple volonté de son titulaire). C’est un droit qui peut être cédé. Du point de vue du promettant, l’identité du bénéficiaire importe peu (elle peut mais à ce moment là, il faut une clause spéciale). L’exercice du droit d’option est réglé par les stipulations du contrat. Il faut démontrer la volonté de l’exercer et que cette volonté a atteint le destinataire. Cela peut crée des contentieux lors de la levée du droit d’option. Il est prudent de formaliser la levée d’option. Le délai : une PUC prévoit un délai avec un terme certain cad une échéance avec une date précise. Sécurité du bénéficiaire : renforcée par la réforme de 2016 : Al.2 : « La révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat promis » Al.3 : « Le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en connaissait l'existence est nul. » → la rétractation ne produit pas effet. Avant 2016, la rétractation (rétraction = retrait de la part du promettant) avant terme permettait la non conclusion du contrat. La réforme de 2016 instaure le fait que le droit d’option du 18 sur 108 bénéficiaire sera opéré efficacement dans le délai et les conditions convenues même si il y a la rétractation de la promesse. Le promettant peut tout de même se rétracter et par exemple vendre le bien à un autre acquéreur. Il y a donc un conflits de droits entre l’acquéreur et le bénéficiaire. Si le tiers acquéreur connaissait l’existence de la promesse, alors il n’est pas de bonne foi donc le contrat entre le tiers acquéreur et le promettant peut être annulé à la demande du bénéficiaire évincé. Section 3 le Pacte de préférence Art.1123Cciv : Al 1. « Le pacte de préférence est le contrat par lequel une partie s'engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de contracter.» → elle ne s’engage pas à contracter mais à proposer : définition - C’est un contrat par lequel une personne, si jamais elle envisage de conclure le contrat contemplé par le pacte, elle s’oblige à en proposer la conclusion au bénéficiaire en priorité - C’est une figure contractuelle très utilisée en matière de vente immobilière ou de cession de titre de capital dans une société Al.2 : « Lorsqu'un contrat est conclu avec un tiers en violation d'un pacte de préférence, le bénéficiaire peut obtenir la réparation du préjudice subi. Lorsque le tiers connaissait l'existence du pacte et l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir, ce dernier peut également agir en nullité ou demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat conclu.» Al.3 : « Le tiers peut demander par écrit au bénéficiaire de confirmer dans un délai qu'il fixe et qui doit être raisonnable, l'existence d'un pacte de préférence et s'il entend s'en prévaloir.» Al;4 : « L'écrit mentionne qu'à défaut de réponse dans ce délai, le bénéficiaire du pacte ne pourra plus solliciter sa substitution au contrat conclu avec le tiers ou la nullité du contrat.» Consécration textuelle issue de la réforme de 2016. §1 La nature de ce pacte C’est un contrat entre un promettant et un bénéficiaire mais le promettant ne s’engage pas à conclure le contrat (≠ PUC où promettant y a déjà consenti) même si le bénéficiaire accepte le contrat. Il offre un droit de priorité si jamais un jour il prend la décision de conclure le contrat contemplé par le pacte. Le droit de priorité peut avoir un réel intérêt économique. Cette position prioritaire a un prix : c’est un avantage que le bénéficiaire s’octroie par rapport aux reste des bénéficiaires qui pourraient en profiter. Le pacte peut s’appeler aussi pacte de premier reçu : le bénéficiaire a le droit d’être premier destinataire et d’être le premier à refuser cette offre. Contrairement à une promesse de contrat, parce que le promettant ne consent pas à contracter, il n’y a pas besoin que les termes du contrat soient déjà définis. Décision Cass Commune de Saint Pée sur Nivelle (2009) : Le maire veut éviter qu’un foncier soit utilisé à des fins spéculatives. Il est d’accord pour céder à l’acquéreur le terrain à un prix faible (donc avantageux pour l’acquéreur) car son projet correspond à la politique de développement de la mairie. Il ne veut pas que cette acquisition serve à des fins de promotions immobilières. Il conclut un pacte par lequel l’acquéreur s’engage, si jamais un jour il veut céder, à en faire prioritairement la proposition à la mairie et pour un prix qui sera déjà déterminé par 19 sur 108 rapport au prix de vente actuel (donc non spéculatif). Le pacte est conclu pour 20 ans. Il permet d’empêcher que le bien aille sur le marché de la spéculation pendant les deux décennies suivant la vente. L’acquéreur cherche à s’extraire de ce pacte (moyen : restriction de la liberté de vente). Il cherche à vendre le bien à un prometteur mais la mairie s’y oppose. La mairie, ici le bénéficiaire, voit sa demande acceptée. §2 Le régime des pactes Ces pactes constituent une entrave à la liberté de disposer de ses biens. Parce qu’ils peuvent déroger à une liberté fondamentale, ils sont d’une interprétation étroite → issu du principe « odiosa sunt restringenda » (les choses odieuses sont d’interprétation restreinte) les règles dérogeant à une règle fondamentale sont d’interprétation étroite. Si il n’est pas nécessaire de fixer tous les éléments du contrat projeté, il est important de prévoir que le pacte ait une durée. Si jamais il devient un contrat, c’est un engagement qui s’inscrit dans le temps. Sans limitation dans le temps, il deviendrait un CDI ce qui permettrait la rupture unilatérale du contrat. Ne pas fixer de durée au pacte revient à prendre le risque de ruiner son efficacité. Si la conclusion du contrat projetée est proposée à un tiers sans faire la même offre au préalable au bénéficiaire alors les droits du bénéficiaire sont violés. Cela n’interdit pas au promettant de rentrer en négociation avec des tiers. Il faut d’abord faire l’offre de manière prioritaire au bénéficiaire → il faut purger le droit de priorité en faisant d’abord l’offre au bénéficiaire. Si il la refuse, le pacte est purgé et le promettant peut négocier dans les mêmes termes avec le tiers acquéreurs. Cela peut entraîner des risques de fraude : faire des propositions au bénéficiaire de manière à ce qu’il ne pourra pas les accepter. Le pacte est tout de même purgé. Néanmoins, la purge n’opère que pour une offre aux conditions analogues. L’offre faite à des tiers ne doit pas être dans des termes plus intéressants que l’offre fait prioritairement au bénéficiaire. La sanction de l’omission de l’offre prioritaire au bénéficiaire = dommages et intérêts. Mais ce qui intéresse le bénéficiaire est de pouvoir se substituer dans le contrat effectué avec le tiers. Il y a aussi l’option de la nullité du contrat conclu avec le tiers. Réforme de 2016 : Une sanction en nature telle que la nullité du contrat conclu avec le tiers voire la substitution du bénéficiaire au tiers dans le contrat conclu suppose la mauvaise foi aggravée du tiers : Il connaissait l’existence des droits du bénéficiaire qu’il était en train de violer Le tiers doit avoir été conscient de la volonté du bénéficiaire de faire valoir son droit La substitution en nature est très peu fréquente. Elle est aléatoire (dépend de l’interprétation du juge) Art.1123Cciv met à la disposition du tiers une action interrogatoire → provoquer une purge du droit de préférence : cela consiste pour le tiers à écrire au bénéficiaire de préférence de leur intention d’acquérir le bien et la volonté de ne pas violer leurs droits de bénéficiaire. Il demande à indiquer l’existence du pacte et si le bénéficiaire entend s’en prévaloir. Si celui-ci ne répond pas dans un délai défini alors il ne pourra plus s’en prévaloir. 20 sur 108 Bien que placé dans le droit commun des contrats, il peut tout aussi bien être placé dans le domaine des contrats spéciaux. Chapitre 2 la formation du contrat : l’offre et d’une acceptation Art.1113Cciv : Al.1 : Le contrat est formé par la rencontre d'une offre et d'une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s'engager. Ce correspond à une grande partie de la réalité mais cela reste une vision simple de ce que la réalité présente à voir. Pour la plupart du temps, pour les contrats les plus simples (comme la vente au comptant) c’est ce qui s’applique. En revanche pour les contrats d’affaire sophistiqués notamment, cela ne se passe pas comme ça. Il y a de la négociation et le contrat se forme au fur et à mesure de l’avancée des négociations. 21 sur 108 Al.2 : « cette volonté de contracter peut résulter d’une déclaration (verbale ou écrite) ou d’un comportement (tout l’univers du tacite) » : Leur validité comme leur preuve répondent aux conditions générales de validité et de preuve générale. Section 1 Une offre Art.1114Cciv : « L'offre, faite à personne déterminée ou indéterminée, comprend les éléments essentiels du contrat envisagé et exprime la volonté de son auteur d'être lié en cas d'acceptation. A défaut (de la réunion de ces deux conditions), il y a seulement invitation à entrer en négociation.» : toute manifestation unilatérale de volonté expresse ou tacite, verbalisée ou comportementale qui serait tournée vers la conclusion d’un contrat déterminé est une offre. Sinon il y a invitation à entrer en pourparlers. §1 La qualification d’offre Pour qu’une manifestation de volonté tournée vers la conclusion d’un contrat futur soit caractéristique d’une offre il faut 3 conditions : La complétude et la précision de l’offre : tous les éléments essentiels du contrat envisagé → dépend de l’espèce de contrat envisagé : - Contrat de vente : les éléments objectivement essentiels (considérés essentiels par la loi) sont limités à deux : la chose et le prix - Contrat de prestation de service : il n’ya pas besoin de s’entendre sur un prix mais le contenu du service envisagé, le contenu de la mission - Selon le type de contrat, il se pourrait que d’autres éléments essentiels soient nécessaires → si il y a les éléments essentiels, la catégorisation d‘offre peut être franchie La fermeté de l’offre : - Art.1113Cciv : il faut qu’il y ait volonté de se lier en cas d’acceptation - C’est une appréciation psychologique : il faut convaincre le juge. - Proposition de contracter précise, complète mais que le potentiel contractant indique qu’elle est faite sous les réserves habituelles → idée qu’il y a des points à discuter. Il n’entend pas être lié par cette seule manifestation de volonté Exemple : contrat vendu à distance : la commande ne sera effectuée que si elle est confirmée par le vendeur Le contractant répond par mail au vendeur en remplissant les informations nécessaires Il répond en confirmant la commande Dans ce scénario, la proposition de contracter détaillée faite par le professionnel ne le lie pas à celui qui a fait la commande. Il n’est donc pas offrant. Le destinataire de cette proposition de contacter, lorsqu’il envoie un mail pour commander, c’est lui qui fait une offre La confirmation de commande correspond à une acceptation Contre-intuitif : la proposition de contracter a tendance à être qualifiée d’offre mais ce n’est pas une offre au sens du Code civil → c’est une proposition de contracter car il n’y a pas la fermeté dans la volonté qui lui permettrait d’être qualifiée d’ordre La forme de l’offre : - Expresse : verbalisée par des paroles ou un écrit - Tacite : résulter d’un comportement : dans une brocante, celui qui met une étiquette avec un prix sur un objet posé sur la table, il ne dit rien mais cela reste une offre. Le vendeur n’a rien dit mais de la manière dont il a organisé les choses, il a exprimé tacitement sa volonté de mettre le bien à la vente → c’est une offre tacite. 22 sur 108 L’offre n’est valable qu’aussi longtemps que l’offrant le veut §2 l’extinction de l’offre Tant qu’une offre n’est pas éteinte, elle est valable : le contrat est susceptible de se former par la simple acceptation d’une manifestation. Le délai de l’engagement de l’offre est primordiale. Elle peut s’éteindre de 3 manières : Caducité Rétractation Épuisement de ses effets (conclusion du contrat) A. La caducité L’offre devient caduque : Par expiration du délai dans lequel elle était enfermée. Toutes les offres ne sont pas nécessairement enfermées dans un délai précis. - Parfois, l’offre énonce elle-même dans sa convention son délai de validité. - Il y a aussi un délai légal général propre aux offres faites par les pax physiques : l’offre de contracter devient caduque par l’incapacité déclarée de l’offrant ou par son décès (art.1117Cciv) → c’est important de le souligner car si l’offre survivait à l’offrant elle produirait des effets sur les héritiers via la succession. Par la prononciation de l’expiration du délai raisonnable par un juge : La loi prévoit que l’offre reste enfermée dans un délai raisonnable : cela permet de répondre à des cas compliqués où l’offre a été faite et où l’offrant l’a oublié. Le destinataire se souvient de cette offre qui ne l’intéressait pas au moment de sa création mais qui la découvre de nouveau un contexte qui lui est plus favorable. La loi permet aujourd'hui au juge de prononcer la caducité de l’offre par un délai raisonnable Par le refus de cette offre : si le destinataire de l’offre la refusait, l’offre tombe. Si le destinataire souhaite revenir sur son refus, il ne peut plus. Le refus de l’offre emporte immédiatement caducité de l’offre. Si il souhaite réitérer l’offre, il se retrouve en position d’offrant. Par une contre-offre : L’acceptation avec réserve n’est pas considérée comme une acceptation mais comme une contre-offre qui emporte caducité de l’offre initiale. B. La rétractation Une offre peut être avec délai ou sans délai. Si il n’ya pas de délai, la rétraction ne pose pas de problème. Si il est faite avec délai c’est plus compliqué vis-à-vis du retrait unilatéral d’une partie (la rétractation d’une partie) : Art.1116Cciv : - Al.1 : « Elle ne peut être rétractée avant l'expiration du délai fixé par son auteur ou, à défaut, l'issue d'un délai raisonnable.» - Al.2 : « La rétractation de l'offre en violation de cette interdiction empêche la conclusion du contrat.» - Al.3 : « Elle engage la responsabilité extra-contractuelle de son auteur dans les conditions du droit commun sans l'obliger à compenser la perte des avantages attendus du contrat.» L’offre ne peut pas être rétractée avant la fin du délai (al.1). Si il y a tout de même une rétraction, l’acceptation qui viendrait rencontrer l’offre rétractée n’opère pas (al.2). Le contrat projeté ne 23 sur 108 pourra donc pas être formé. Le retrait de l’offre fait qu’il n’y a pas, au moment où l’acception est faite, de rencontre de volontés : donc pas de contrat. C’est un contrat dans le vide. C’est la différence essentielle entre la PUC et l’offre : PUC : le promettant consent déjà et son consomment est irrévocable jusqu’à expiration du délai. Même si il se rétracte, la promesse emportera la conclusion du contrat projeté Offre : quand bien même l’offre était stipulée irrévocable jusqu’à une certaine date, la révocation emporte tout démêle des effets. L’acceptation post révocation même dans le délai ne pourra pas former de contrat Section 2 L’acceptation Art.1118 Cciv : Al.1 : L’acceptation est la manifestation de volonté de son auteur d'être lié dans les termes de l’offre. Al.2 : Tant que l'acceptation n'est pas parvenue à l'offrant, elle peut être librement rétractée, pourvu que la rétractation parvienne à l'offrant avant l’acceptation. Al.3 : L’acceptation non conforme à l'offre est dépourvue d'effet, sauf à constituer une offre nouvelle. §1 La forme de l’acceptation Le droit des contrats est en principe consensualiste : la volonté opère qu’importe la forme (sauf exceptions). Elle peut être expresse mais aussi tacite. A. L’acceptation expresse Écrit ou verbal → expresse désigne ce qui est exprimé par des mots qu’importe leur forme (cela posera simplement des problème de preuve selon la forme). Si le contrat en jeu porte sur un montant supérieur à 1500€ alors il faudra une preuve littérale et non juste orale. Cet écrit peut être papier, numérique sous réserve de prouver à qui est imputable cette manifestation de volonté. La signature permet de surmonter l’imputabilité. La preuve littérale requière la démonstration d’un écrit signé. B. L’acceptation tacite Cas très fréquent : réception d’une offre d’un contrat à déterminer, ne répond pas mais commence à l’exécuter. L’autre partie qui a envoyé l’offre finit par regretter cet envoi et souhaite retirer l’offre en affirmant qu’il n’y a pas eu d’offre. L’autre partie lui oppose son commencement d’exécution. Art.1120Cciv : le silence ne vaut pas acceptation à moins qu’il en résulte autrement de la loi des usages, des relations d'affaires ou de circonstances particulières. → Le silence du destinataire ne vaut pas acceptation (pricnipe) mais le comportement qu’il a adopté peut renverser le principe sous certaines conditions (exception) : Contexte : il faut convaincre le juge que dans les circonstances de l’espèce le fait qu’il n’ait pas répondu expressément à l’offre n’empêche pas de caractériser une acceptation. C’est ce qu’on rencontre quand les parties sont dans un rapport d’affaire établi. Ou exemple de la brocante : les gestes du brocantier comme du client font qu’il n’y a pas besoin de parole pour conclure le contrat de vente. Usage : usages professionnels lié au secteur dans lequel il est d’usage de ne répondre aux offres que pour les refuser. Si il n’y a pas de réponse, au regard de l’usage cela vaut acceptation. 24 sur 108 §2 Les conditions d’efficacité L’acceptation vise à former le contrat. C’est un acte unilatéral. Il faut que l’acceptation corresponde exactement à l’offre (absence de réserver). Il faut que cet acte soit porté à la connaissance de l’offrant. A. L’absence de réserve Art.1118Cciv = principe Cas particulier qui résulte de l’usage, de la pratique : les conditions générales → plutôt dans le monde du commerce : un professionnel propose ses services ou des biens à la vente à un public indéterminé. Celui qui envoie l’offre est un employé de l’entreprise intéressée et non un avocat. L’offre est simple. Il renvoie son lecteur à consulter les conditions générales en usage dans son entreprise. Ces conditions générales ne sont pour la plupart du temps inconnues de l’employé de l’entreprise intéressée. Le destinataire, si c’est aussi une entreprise, a aussi des conditions générales contractuelles auxquelles elle entend être tenue. Il répond favorablement à l’offre avec également la mention de la consultation des conditions générales de l’entreprise. Si il y a un problème d’exécution, les juristes peuvent ressortir des clauses des conditions générales d’une entreprise ou de l’autre. Art.1119Cciv : → résulte de la réforme de 2016 - Al.1 : Les conditions générales invoquées par une partie n'ont effet à l'égard de l'autre que si elles ont été portées à la connaissance de celle-ci et si elle les a acceptées. - Al.2 : En cas de discordance entre des conditions générales invoquées par l'une et l'autre des parties, les clauses incompatibles sont sans effet. - Al.3 : En cas de discordance entre des conditions générales et des conditions particulières, les secondes l'emportent sur les premières. Avant 2016 : la JP estime que si il y a des conditions générales des deux côtés (vendeur et acheteur) elles seront tout de même étudiées et seules les conditions compatibles les unes avec les autres seront acceptées (prof : règle du tamis). Les autres ne feront pas la loi des parties. La jurisprudence était assez souple sur l’acceptation des conditions générales : le simple renvoi à l’existence des conditions générales faisait qu’elles étaient censées avoir été acceptées par celui qui ne les avait pas contesté si il avait la possibilité concrète de les consulter. Elles devaient donc être signalées et accessibles 2016 : les conditions générales doivent être portées à la connaissance du destinataire et celui- ci doit les avoir acceptées. Pour le prof, cela ne pose pas des exigences renforcées. Mais dans la réalité, personne ne lit les conditions générales. La preuve de l’acceptation est quasiment exclue B. Réception de l’acceptation par le destinataire Le contrat est conclu par la réception de l’acceptation. La preuve et la date de l’acceptation ont des enjeux considérables (l’offrant peut rétracter jusqu’à la réception de l’acceptation). Depuis la réforme de 2016, le contrat ne peut se former qu’à la réception de l’acceptation. Cette règle fait qu’un acceptant peut disposer d’un moment pour se rétracter : acceptation envoyée par lettre postale → tant que l’accusé de réception n’a pas été signé, il peut se rétracter. Le contrat est formé une fois l’acceptation reçue. Les rejets éventuels qu’une partie pourrait avoir quant à l’engagement ainsi fait pourront s’exprimer à travers une remise en cause radicale du contrat en attaquant sa validité. Le contrat est donc formé mais sa validité est attaqué en 25 sur 108 remettant en cause la qualité du consentement qui a précité sa formation ou sa licéité vis-à-vis de l’ordre public. Chapitre 3 la qualité du consentement Dans la tradition de force obligatoire du contrat, le droit tient quelqu’un à sa parole car il est considéré comme s’étant engagé librement et lucidement. La force obligatoire du contrat réside dans la volonté de celui qui s’engage. Il y a donc un fondement moral dans la force obligatoire du contrat. La force obligatoire du contrat peut aussi se fonder sur une idée plus pragmatique : besoin pour le commerce de se développer avec un minimum de mœurs Besoin pour les destinataires de volonté de pouvoir s’y fier → besoin de sécurité juridique : respect de la confiance du destinataire. La force obligatoire est fonction de la confiance légitime qu’a suscité l’expression de volonté dans le chef de son destinataire. 26 sur 108 Tout vice du consentement doit permettre de remettre en question l’acte dans le fondement moral de la qualité du consentement. Dans la conception pragmatique, ce qui est essentiel est de protéger la confiance du destinataire. Il s’agit d’établir un équilibre entre le respect de la volonté réelle de celui qui s’est engagé et le respect de la confiance qu’a pu avoir le destinataire de cette volonté. Pour qu’il y est un contrat il faut un consentement réel et intègre mais parfois le consentement perçu comme réel et intègre suffit. L’art.1128Cciv qui énumère les conditions de validité d’un contrat : Le consentement des parties Leur capacité de contracter Un contenu licite et certain → ne développe pas sur le consentement Section 1 La réalité du consentement Il faut un signe imputable à la personne contractuellement liée. Il y a donc un problème d’imputabilité de la volonté manifestée. Cette question de la réalité du consentement pose aussi la question du sérieux de la volonté manifestée. §1 L’imputabilité du consentement Le consentement doit être imputable à celui dont on dit qu’il s’est engagé. - Dans l’univers des personnes physiques cela ne pose pas de problème : le contractant est celui qui exprimé le consentement. - Dans l’univers des personnes morales, les choses sont moins simples → qui a vocation à exprimer valablement le consentement d’une société commerciale ? → Elle s’exprime par un organe défini par la loi. C’est au travers de cette personne physique organe que la société exprime sa volonté. Parfois, au delà de l’organe, une personne morale ou une personne physique peut être engagée sans expression concrète de volonté de la part de celui qui s’engage → contrat avec une machine : ni organe de la personne morale ni personne physique mais le propriétaire de la machine est engagée et le contractant personne physique aussi avec la machine. L’hypothèse simple où celui qui est engagé dans le contrat est aussi celui qui a exprimé le consentement n’est pas systématique. Très souvent, une personne est engagée dans un contrat par l’effet d’une manifestation de quelqu’un qui ne sera que son représentant. L’hypothèse de principe selon laquelle le consentement doit émaner de celui qui est engagé connait un tempérament important au travers de la représentation. A. La notion de représentation La représentation : Une personne peut confier à une autre le soin d’exprimer sa volonté. La volonté manifestée par le représentant sera la volonté du représenté. La représentation permet à une même personne de manifester sa volonté au travers d’autres : elle permet de contracter des milliers de fois à des milliers d’endroits différents au travers de ses milliers de représentations. Il y a l’idée du don d’ubiquité dans la notion de représentation. 27 sur 108 Elle est donc très utile pour le développement des contrats mais elle est très dangereuse pour le représenté : ce que dit le représentant est censé être ce que le représenté dit. Le représentant engage donc la responsabilité du représenté. La réforme de 2016 précise les sources de la représentation et fixer les grands traits de la représentation. 1. Les sources de la représentation Elle peut être légale, judiciaire ou conventionnelle : Légale : c’est la loi qui établi le lien de représentation entre le représentant et le représenté et qui fixe l’étendue et les limites de la représentation - Pour les personnes physiques : le titulaire de l’autorité parental détient le pouvoir de représentant du mineur représenté. - Dans l’univers des personnes morales, cela renvoie aux textes organisant les différents types de personnes morales. La loi précise à chaque fois qui sont les représentants légaux de la personne morale, cad quelles sont les personnes qui ont légalement le pouvoir d’exprimer la volonté de la personne morale. L’organe d’une personne morale sera nécessairement une personne physique. Ce sera celle mentionnée comme dirigeant social. Judiciaire : un juge peut désigner une personne pour en représenter une autre. C’est un mandataire ad hoc. C’est assez marginal. Conventionnelle : C’est la plus fréquente. - Une personne convient avec une autre que celle-ci représentera celle-la pour la passation de tel acte ou tel catégorie d’acte. - Par contrat, il est convenu que B sera le mandataire de A pour tel acte précis. - Le mandat est l’un des contrats spéciaux les plus importants. C’est dans son régime que se retrouvent les éléments fixant le régime de la représentation en général. La réforme de 2016 recueille une partie de cette construction juridique en fixant les grands traits du régime général de la représentation. 2. Le régime général de la représentation Il s’articule sur l’idée que le représentant exprime une volonté imputée au représenté. Sa manifestation de volonté est considérée comme une volonté manifestée par le représenté. Si le représentant accepte une offre c’est le représenté qui se trouve est lié. Si le consentement du représentant est vicié par une erreur ou une violence, c’est la volonté du représenté qui est viciée aussi. Le représentant est transparent. Il n’est pas personnellement engagé par les actes qu’il passe en sa qualité de représentant. Cela peut consister un danger pour le représenté. La loi cherche à cantonner les pouvoirs du représentant. Art.1153Cciv : « Le représentant légal, judiciaire ou conventionnel n'est fondé à agir que dans la limite des pouvoirs qui lui ont été conférés.» Ces limites valent essentiellement dans les rapports internes entre le représentant et le représenté. Elles ne sont pas nécessairement opposables aux tiers. Le tiers ne connait pas ces limites. Il n’a souvent pas le temps de vérifier l’étendue réelle des pouvoirs du représentants. 28 sur 108 En effet, si le représentant excède ses pouvoirs, cela relève du lien entre le représentant et le représenté mais n’implique pas le tiers. Celui-ci peut croire légitimement que les pouvoirs du représentants vont lui permettre de conclure l’acte projeté mais non souhaité par le représenté. Pour respecter cette croyance, si elle est légitime, la loi donne effets à cette croyance quand bien même l’acte conclu excédait les pouvoirs du représentant. → ex : je demande à un agent immobilier de mettre ma maison à louer. Celui-ci la met sciemment en vente. L’acheteur qui a cru légitimement que l’agent immobilier avait le pouvoir de vendre cette maison pourra garder ma maison même si je lui apprends que je ne souhaitais pas la vendre. B. L’apparence de la représentation Art.1156Cciv : Al.1 : « L'acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs est inopposable au représenté (principe), sauf si le tiers contractant a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations du représenté (exception).» En principe l’acte passé par le représentant au delà de ses pouvoirs est inopposable au représenté mais il y a une exception considérable : le tiers contractant a légitimement cru en la capacité du représentant à conclure un tel contrat. Si l’acte ainsi conclu et engageant pour le représenté tourne à son détriment, il peut demander une action en réparation. L’acte sera néanmoins un contrat valable. Le fondement de la force obligatoire ne repose donc pas entièrement sur le consentement mais aussi sur la confiance qu’a montré un des contractants. → La réalité du consentement est parfois artificielle. §2 Le sérieux du consentement Pour consentir il faut comprendre. Le consentement n’est sérieux que si la personne qui consent a la faculté intellectuelle d’exprimer une volonté. A. La faculté intellectuelle de consentir C’est le problème général de la capacité qui est globalement propre aux personnes physiques (principe de spécialité pour les personnes morales). Cas de la personne qui a un trouble momentané de l’esprit : Art.414-1Cciv : « Pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit. C'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l’acte.» Celui qui se prévaut d'un trouble de l’esprit qui doit prouver ce trouble de l’esprit pour voir sa demande en nullité acceptée Preuve psychologique = en persuadant le juge avec des indices contemporains de l’acte → dans la philosophie française du consentement cela peut suffire à faire tomber le contrat. Ce n’est le cas aux US car ils privilégient la sécurité de l’acte. Dans le système français il suffit de prouver le trouble de l’esprit. Si l'autre partie ne pouvait pas se douter du trouble de l’esprit, sa preuve va être très difficile à rapporter B. Le consentement donné à la légère C’est une situation très fréquente : 29 sur 108 Signer sans lire : très fréquent pour les petits contrats et contrats pressés qui ne peuvent rationnellement se conclure que dans un laps de temps très court. Signer sans comprendre : cela a longtemps été le problème de l’engagement de l’illettré ou d’une personne qui signe un contrat dans une langue qu’il ne parle pas et sans traducteur. Face à cela, la jurisprudence cherche un équilibre entre l’absence de volonté réelle de la part à celui à qui on oppose sa signature et la confiance qu’a pu avoir l’autre partie dans le sérieux de l’engagement Aujourd'hui c’est plutôt le problème des clauses incompréhensibles (souvent fait exprès). Dans ce genre de circonstances, il faut trouver un équilibre dans l’interprétation des clauses peu claires : ramener la clause dans un sens raisonnable. Dans une interprétation raisonnable, c’est à celui qui signe qui doit essayer de comprendre ces clauses incompréhensibles. Là aussi il y a des possibilités de rattrapage : une clause inintelligible va facilement pouvoir être écartée. §3 le problème de l’erreur obstacle Cela correspond à une situation où les contractants ne se sont pas compris : ils ne parlaient pas de la même chose. Ils ont signé un engagement qui repose sur un malentendu (question du service ou de la chose, action du contrat : je pense acheter cette maison alors que l’agent immobilier pensait me la louer). Ce genre d’erreur ne vicie pas le consentement, cela montre qu’il n’y a en fait pas eu de consentement. Cette erreur est invocable par toutes les parties. On pourrait dire qu’il n’y a même pas de contrat puisque le consentement ne s’est même pas formé sur le même sujet. Selon PSM (Philippe Stoffel-Muck), l’action ne devrait pas être enfermée dans les mêmes délais que ceux compris dans le régime des vices de consentement. Pourtant, la jurisprudence aligne le régime des actions en erreur obstacle sur celui des vices de consentement. Elle n’admet pas la théorie de l’inexistence du contrat. Section 2 L’intégrité du consentement Le système français de formation du contrat repose sur la recherche d’un équilibre entre des intérêts antagonistes. C’es sous cette réserve que qu’on peut être d’accord avec l’adage : qui dit contractuel dit juste (A.Fouillé). Cette conception de la réalisation de la justice par un accord lucide et libre reflète l’idée que du point de vue du législateur chacun doit être laissé juge de ses propres intérêts. De l’extérieur et rétrospectivement on peut considérer que le consentement donné était imbécile et qu’une personne a fait quelque chose de contraire à ses intérêts. C’est une question philosophique : on part du principe que chacun doit être libre d’apprécier ce qui convient à son intérêt. Chacun doit être libre de se tromper sur le sujet et d’apprendre de ses erreurs. L’autre raison est une raison de sécurité juridique : le destinataire de cette manifestation de volonté doit pouvoir compter sur le contrat qui en résulte. Il y a le double fondement à la force obligatoire du contrat 30 sur 108 Respect de la volonté libre et lucide quand bien même il se révèle désastreux : autonomie individuelle. Chacun est libre et bon juge de ses propres intérêts. Besoin de sécurité juridique → Si on conclut librement et lucidement un contrat on laisse l’autre partie se fier à notre parole, l’intérêt social lié à la stabilité des contrats commande de lui accorder force obligatoire. Si la volonté n’est pas libre ou qu’elle n’est pas lucide, l‘acte peut tomber. Il faut tout de même faire une part au respect des anticipations légitimes de l’autre partie. Le régime des vices du consentement manifeste cette recherche de l’équilibre Nullité du contrat par vice de la volonté Respect de la croyance qu’a pu avoir l’autre partie dans l’intégrité de cette volonté 3 vices du consentement que reconnait le droit français (et tous les droits d’inspiration libérale) : L’erreur spontanée L’erreur provoquée : le dol La violence §1 L’erreur spontanée Article 1132 du Code civil : « L'erreur de droit ou de fait, à moins qu'elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu'elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant. » → Pour opérer l’erreur doit donc avoir été déterminante et excusable. L’erreur est une représentation inexacte de la réalité : elle peut être de fait et de droit : Droit : - représentation inexacte de ce que le droit commande. - Une compréhension inexacte de l’application des règles de droit à la situation de fait analysée par une partie. - Par exemple : en matière de bail immobilier il y a un ensemble de législations qui investissent le locataire d’un droit de préférence légal si jamais le propriétaire décide de vendre la chose louée. Quelqu’un peut faire une erreur sur l’existence ou la satisfaction des conditions à réunir pour que ce droit de préférence s’applique. Le propriétaire peut faire la proposition au locataire alors que les conditions ne sont pas réunies Fait : - Tenir pour existant une donnée de fait qui n’existe pas ou - Inversement : tenir pour inexistant un élément de fait qui existe ou on se trouve sur son importance. Il ne suffit pas qu’il y est erreur pour que le contrat risque la nullité. Il y a différentes restrictions dans un but de sécurité juridique. L’erreur doit porter sur des qualités objectivement essentielles Elle doit être déterminante du consentement Erreur spontanée : elle doit être excusable A. Les conditions d’efficacité de l’erreur L’erreur est une représentation inexacte d’un aspect de la réalité. Il faut que l’erreur porte sur la qualité essentielle de la prestation cad de la chose ou du service à rendre par exemple. 31 sur 108 1. Le caractère essentiel du point concerné Il faut que pour le type de contrat en cause, la qualité en question soit objectivement jugée essentielle à la conclusion du contrat. C’est une qualité de la chose ou du service qu’il s’agit d’accomplir. Qualité objectivement essentielle : Essentielle : une qualité qui participe de l’essence mais aussi qui est très importante → inhérente à la chose ou à la prestation Objectivement : - une appréciation objective est une appréciation faite en se mettant dans la peau d’une personne raisonnable cad la personne ordinaire plus. Elle est rationnelle. - Si en étant dans la peau de cette personne raisonnable on estime que dans les circonstances de l’espèce cette qualité est une qualité essentielle alors le test est satisfait. - C’est une appréciation in abstracto → réfléchir par le modèle abstrait de la personne raisonnable. Qualité subjectivement essentielle : Il y a des qualités qui ne sont pas objectivement essentielles et qui dépendent des goûts, des projets ou de l’usage particuliers que la personne veut faire de la chose. Une erreur sur l’aptitude de la chose à remplir une certaine fonction n’est pas considérée comme essentielle sauf si elle a été entrée dans le champ contractuel par un mention particulière. Si la qualité est subjectivement essentielle elle ne sera considérée que si elle est entrée expressément ou tacitement dans le champ contractuel défini entre les parties. 2. Caractère déterminant de l’erreur Savoir, si connaissance prise de la réalité, la personne aurait ou non contracté. Cela concerne la psychologie de la personne qui demande la nullité pour erreur. À ce moment là le caractère déterminant de l’erreur est établie. C’est une preuve d’ordre psychologique. Elle est donc libre. Il s’agit de convaincre le juge de cette réalité psychologique. Elle est souvent estimée remplie quand la qualité sur laquelle la personne s’est trompée est essentielle. Il y a des cas où il y a l’originalité du caractère déterminant. Exemple de l’acheteur d’une vieille voiture : - une personne qui achète une voiture ancienne. Il se trouve qu’un problème de moteur fait que la voiture ne peut pas rouler → Objectivement rapporter à une voiture c’est une qualité essentielle. - Si le défenseur à l’action arrive à prouver que l’acheteur ne s’intéressait à la voiture que pour ses pièces et qu’il n’avait aucune intention de la faire rouler alors la qualité est effectivement essentielle mais cette erreur n’est pas déterminante car l’acheteur n’avait acquis le véhicule que pour s’en servir de réservoir de pièce de rechange. Même déterminante, l’erreur ne suffit pas à entrainer la nullité du contrat. La sécurité juridique impose de tenir certaines erreurs pour inopérantes quand bien même elles sont réelles. B. Les erreurs inopérantes 3 erreurs sont inopérantes malgré leur réalité. Erreur sur les motifs 32 sur 108 Erreur sur la valeur Erreur dite inexcusable 1. L’erreur sur les motifs On ne contracte jamais par hasard. Tout contrat est un moyen au service d’une fin seconde. L’