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2002
Chen Jun
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This document is an e-book about Tuina, a type of traditional Chinese massage. It provides a comprehensive introduction to the theoretical principles and practical techniques of Tuina. The author, Chen Jun, is a translator, interpreter, and professor of Chinese medical studies. The content discusses the differences between Tuina and other massage techniques.
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TUINA LE MASSAGE CHINOIS 中医推拿学 Chen Jun Presses Universitaires Guang Ming 3 L’auteur Chen Jun est traductrice interprète et professeur, licenciée de l’Université de l’Union, Faculté des Langues Étrangères de Pékin (RPC). Ancienne interprète médicale de l’Académie de Médecine Chinoise à...
TUINA LE MASSAGE CHINOIS 中医推拿学 Chen Jun Presses Universitaires Guang Ming 3 L’auteur Chen Jun est traductrice interprète et professeur, licenciée de l’Université de l’Union, Faculté des Langues Étrangères de Pékin (RPC). Ancienne interprète médicale de l’Académie de Médecine Chinoise à Pékin, formation en tuina et en diététique médicale à l’Académie de Médecine Chinoise de Pékin, vice-présidente et professeur principal à Guang Ming ISMC - Institut Supérieur de Médecine Chinoise (Suisse) en chinois médical, tuina et diététique médicale, membre du conseil de la Fondation Guang Ming (Suisse), co-directrice des Presses Universitaires Guang Ming (Suisse), auteur de nombreux ouvrages spécialisés en médecine chinoise. . © Copyright 20/08/2002 Chen Jun, Pierre Sterckx et Presses Universitaires Guang Ming Graphisme de la couverture : Studio Alain Robert Presses Universitaires Guang Ming, Rue Centrale 19, CH-1110 Morges, Suisse Tél. : 41.(0)21.802.60.51 – Fax. 41.(0)21.802.60.52, E-mail : [email protected] Les Presses Universitaires Guang Ming sont une division de Guang Ming s.a. (Suisse) Toute reproduction d’un ensemble ou d’un extrait quelconque de ce livre par quelque procédé que ce soit et notamment par photocopie, microfilm, scanning, etc. est strictement interdite sans autorisation écrite des auteurs et/ou de l’éditeur 4 Préface L’Art du Toucher connaît la faveur d’un large public, tout autant parmi les professionnels que le public. J’en ai compris la raison en voyant systématiquement les patients sortir radieux, après une séance de tuina complet que mon épouse leur avait fait « subir ». Pourtant j’en ai vu des soulagements, des relaxations, etc. dans mon cabinet d’acupuncture. Je dois avouer qu’il y a une différence, que j’ai d’ailleurs appris à apprécier comme « victime » de ce massage chinois. A la base, tout massage bien fait semble avoir cet heureux effet. Mais souvent on pose la question de savoir quelle est finalement la différence entre le tuina, le shiatsu, l’acupressure, pour citer d’abord ce qui semble le plus proche et puis, la physiothérapie, le massage occidental (avec ses nombreuses variantes), l’ostéopathie, la chiropraxie, etc. Je ne m’aventurerai pas à traiter de toutes ces techniques qui se pratiquent des mains (bien que je n’oublie pas l’implication du cerveau), car je risque d’être ou trop long et plus sûrement encore, incomplet. Je préfère mettre en lumière les spécificités du tuina, auquel est consacré cet ouvrage. Branche importante de la médecine chinoise, le tuina est une façon d’agir sur l’énergie d’une personne en traitant certaines parties de son corps avec les mains. Le concept central dans cette approche est évidemment l’énergie. Son parcours ne se limite pas aux méridiens principaux, qui sont les plus connus et elle peut être prise en mains de nombreuses autres façons qu’à travers les points d’acupuncture (par exemple par l’acupressure ou l’acupuncture). L’énergie a en effet des trajets, des lieux de fonctionnements électifs, qui sont attachés à de nombreux autres parcours externes et internes et notamment les territoires de la peau et les méridiens tendino-musculaires, qui se projettent des muscles vers tous les systèmes ligamentaires et osseux en direction de la surface et vers les organes, les entrailles et tous les tissus plus intimes, vers l’interne. Voilà donc une notion spécifique du tuina : à travers le traitement de « la surface », il permet de traiter et d’influencer toutes les parties du corps, toutes les fonctions … puisqu’il offre une prise directe avec le « Qi » (énergie). Cette action ne s’orchestre pas n’importe comment. En Chine le praticien de tuina est médecin, ce qui signifie que son action thérapeutique est basée sur un diagnostic, qui appartient à la théorie médicale générale de la médecine chinoise ou orthodoxe. Puis les moyens mis en œuvre sont étendus et complexes. Le tuina, dans sa généralité, ne comprend pas que le massage : il y a aussi la manipulation, séculaire elle aussi. Mais dans cet ouvrage nous n’aborderons que le premier aspect, gardant le second pour un ouvrage séparé, encore bien plus spécialisé. Le tuina, en tant que discipline thérapeutique de la médecine chinoise, présente deux aspects remarquables. Le premier est qu’il est basé sur un diagnostic de la 5 médecine chinoise, qui guide son action. Au point de vue de la dialectique, cela va bien plus loin que de « défaire des blocages ou relaxer des tensions ». Suivant le diagnostic, qui s’énonce dans sa généralité suivant les huit principes, le praticien saura s’il doit tonifier ou disperser, réchauffer ou rafraîchir, traiter la surface ou l’interne, finalement mettre en action le yin ou le yang. Dans le détail, les principes thérapeutiques sont innombrables. Tout aussi nombreux sont les types de massages et leurs variantes. Dans ce petit ouvrage Chen Jun présente toutes les formes fondamentales du tuina. Cela a été une gageure de trouver la terminologie adaptée en langue française, car bon nombre de mouvements n’existent pas dans nos contrées ou ne sont pas décrits de façon aussi détaillée. Les termes utilisés peuvent parfois paraître étranges, mais si le lecteur et le praticien fait appel à son imagination, il constatera qu’ils favorisent aussi la mémorisation, ce qui est d’ailleurs le cas dans la langue originale, qui est le chinois. Ce petit ouvrage a certainement sa place dans la littérature scientifique de langue française consacrée au tuina. , car il a le triple avantage d’avoir été écrit par une praticienne de tuina chinois, maîtrisant la langue française et ayant une expérience pratique en la matière. Sans doute certains lecteurs ayant suivi de stages dans des services de tuina en Chine ou ayant lu d’autres ouvrages traduits du chinois (le plus souvent en anglais) s’étonneront des différences qu’ils peuvent rencontrer au point de vue de la terminologie (encore faudrait-ils qu’ils parlent et lisent le chinois) et au point de vue de la forme précise des mouvements. Cela s’explique historiquement. En tant que discipline médicale académique, le tuina est encore relativement récent en Chine. Auparavant il existait de nombreuses écoles et styles régionaux, qui différaient principalement par l’aspect externe (noms et nuances des mouvements), alors qu’à la base, ils exercent le même art, énergétique en essence. Bien dans la tradition Guang Ming, Chen Jun a choisi de suivre le standard officiel enseigné aux universités de la Chine et retenu par le Ministère de l’enseignement et le Secrétariat d’Etat à la Médecine Chinoise. Cela n’implique pas une quelconque supériorité par rapport à d’autres formes plus régionales. C’est un choix d’enseignant et d’auteur. Dans le texte, il y a encore une particularité importante : c’est que tous les mouvements sont expliqués de façon détaillée en langue commune. Certains manuels chinois font appel à un langage très médical, ayant force recours aux termes anatomiques. S’il est vrai que cela confère une forme plus savante aux textes, ceux-ci n’y gagnent pas en clarté. Et de toute façon, les manuels universitaires utilisés comme référence pour cet ouvrage, font eux aussi appel à la langue commune et, bien sûr, au vocabulaire spécialisé de la médecine chinoise. 6 Cet ouvrage reprend l’essentiel de l’enseignement du professeur Chen Jun à ses étudiants de première année. Si le livre est modeste, le travail pratique qu’il représente est, lui, énorme. Un mouvement de tuina ne s’apprend pas dans un livre, mais dans la pratique. Il faudra de nombreuses années de travail quotidien pour maîtriser les bases décrites ici. C’est pour cela qu’il faut relativiser son importance. Il n’est que le support d’un enseignement qui se donne « au corps à corps ». Le lecteur professionnel appréciera et pour le débutant, ce sera l’indispensable vade-mecum pour l’aider à mémoriser les différentes étapes des techniques de tuina de base. Cet ouvrage est conçu suivant la structure suivante : après une introduction indispensable concernant les fondements du tuina, l’auteur décrit une à une chaque technique, en approfondissant bien ses différents aspects : la description détaillée du mouvement, les exercices d’apprentissage généraux, les exercices spécifiques sur modèle humain, les points difficiles auxquels faire attention, l’application clinique. Ces aspects étant maîtrisés, l’étudiant pourra passer au niveau de connaissance suivant, qui fera lui aussi l’objet d’un ouvrage : le traitement des maladies au tuina, dans lequel seront repris les protocoles détaillés. Je souhait à cet ouvrage tout l’intérêt et le succès qu’il mérite. Il a tout pour devenir le manuel de base de l’étudiant et du praticien de tuina de l’occident francophone. Pierre Sterckx CMD La Saugiaz, 15 août 2002 7 8 1. La théorie du tuina – tuina lilun – 推拿理论 Introduction générale La définition du tuina Tuina, 推拿, est aussi appelé anmo, 按摩, ou tuian, 推按. Ce sont trois noms composés dont chaque partie indique une technique importante de cette discipline de la médecine chinoise : tui et na signifient respectivement « pousser » et « pincer ou saisir (les muscles) », an et mo « appuyer, presser » et « frotter » et tui et an « pousser » et « appuyer, presser .» Nous traduisons généralement par « le massage chinois » C’est une méthode de prévention et de traitement des maladies de la médecine chinoise, tout comme l’acupuncture, la moxibustion et la phytothérapie. La théorie de la médecine chinoise est la base théorique du massage chinois. Dans la pratique, le masseur utilise ses mains ou d’autres parties de son corps pour exercer des mouvements spécifiques sur des surfaces ou des points spécifiques du corps du patient, en vue de prévenir ou de traiter des maladies, et ce suivant la maladie, le diagnostic différentiel, la constitution physique, l’état du patient, etc., Le massage chinois est une méthode du traitement physique dont le terrain d’indications est très large : il appartient au domaine du traitement externe de la médecine chinoise et il est couramment utilisé dans beaucoup de spécialités, telles que la traumatologie, la médecine interne, la médecine externe, la gynécologie, la pédiatrie, les maladies des cinq sens, etc. Suivant ses différentes applications dans les différentes spécialités, il porte des noms différents : pour traiter les maladies osseuses, nous avons « le massage de la remise en place des os, zheng gu anmo, 正骨按摩 » ; Pour traiter les lésions des tissus mous, nous avons « le massage traumatologique, shangke anmo, 伤科按摩 », aussi appelé « le petit massage, xiao tuina, 小推拿» ; La combinaison du massage de la remise en place des os et du massage traumatologique est appelé « le grand massage, da tuina, 大推拿 »; Pour traiter les maladies des enfants, on a « le massage pédiatrique, xiaoer anmo ou xiaoertuina, 小儿按摩, 小儿推拿 ;» etc. En dehors de cette classification du massage chinois suivant les spécialités, il existe encore d’autres divisions. Par exemple, le massage basé sur la théorie du système des méridiens et des collatéraux est appelé : « le massage des méridiens et des collatéraux, jingluo anmo, 经 络按摩 », y compris « le massage des quatorze méridiens, shisi jing anmo, 十四 经按摩 », « le massage des points des méridiens extraordinaires, jing wai qi xue anmo, 经外奇穴按摩 », etc. ; Le massage basé sur la théorie des organes et des entrailles est appelé « le massage des organes et des entrailles, zangfu anmo, 脏 腑按摩 » ; Le massage dans le traitement d’urgence est appelé « le massage de 9 secours, jijiu anmo, 急救按摩 »; Le massage de l’entretien de la santé est appelé « le massage de l’entretien de la santé, baojian anmo, 保健按摩 ;» Le massage basé sur l’entraînement interne des arts martiaux, comprenant des mouvements propres aux arts martiaux est appelé « le massage des arts martiaux, wushu anmo, 武术按摩 » ; Le massage basé sur la transmission du qi externe soutenue par les techniques communes du massage est appelé « le massage par le qigong, qigong anmo, 气功按摩 »; etc. An, appuyer ou presser, est un mouvement simple dont la force est dirigée vers le bas ; mo, frotter, est un frottement circulaire sur la surface du corps. Ces deux techniques faisaient parti du massage primitif qui est à l’origine du massage actuel. Au début, le nombre de techniques et d’indications du massage chinois était très limité. Au fur et à mesure de son évolution, il s’est enrichi de nombreuses techniques, des simples pressions an et frottements mo à tui pousser et na saisir et puis à d’autres techniques simples et composées. Pendant de longues années de pratique, les gens ont découvert que les effets du traitement différaient suivant la direction dans laquelle la force des mouvements était dirigée. À partir de cela, les techniques ont été améliorées et les indications du massage se sont élargies. Plus tard dans l’histoire, on a commencé à appliquer régulièrement le massage dans la pratique médicale, en se basant sur la connaissance de la théorie de la médecine chinoise et des fonctions du massage. Au bout de beaucoup d’années de pratique, le système thérapeutique du massage a été créé. Ce système a été progressivement complété et amélioré pendant la pratique et finalement, l’étude du massage chinois, tuina xue ou anmo xue, 推拿学, 按摩学, a pris forme et est devenue une branche de l’ensemble de la médecine chinoise. Le massage chinois est une science thérapeutique médicale. En tant que praticien professionnel du massage, il faut avoir une connaissance approfondie de la théorie de la médecine chinoise et des règles de la formation et de l’évolution des maladies, savoir appliquer les techniques courantes et connaître les indications de ces techniques, ainsi que les méthodes de traitement. La pratique, y compris les exercices des techniques et la pratique clinique, est indispensable pour l’étude du massage chinois. Aujourd’hui le tuina fait l’objet d’un enseignement médical universitaire à temps plein d’un minimum de cinq ans, permettant d’obtenir de degré de médecin en tuina. L’introduction à l’histoire et à l’évolution du massage chinois Le massage est la méthode thérapeutique la plus ancienne. Il est très probable que le massage chinois trouve son origine dans les gestes instinctifs d’autoprotection de nos ancêtres. Dans la société primitive, les gens avaient souvent des douleurs par des causes internes ou par des blessures externes, liées à des travaux physiques dans des conditions difficiles. Quand ils ressentaient une douleur, ils massaient l’endroit de la douleur et les environs et ils constataient que ces gestes instinctifs les soulageaient. À travers la répétition de ce genre d’expériences, un certain savoir s’est accumulé et les gestes instinctifs sont devenus progressivement 10 des actes conscients, ce qui est l’origine du massage. Dans certains livres médicaux d’il y a plus de deux mille ans, nous trouvons déjà des textes assez complets consacrés à la prévention et au traitement des maladies par le massage. Suivant Han Shu, La Chronique de la Dynastie Han (de l’Ouest) (-206 à 24), il existait à cette période un livre consacré au massage : Huangdi Qibo Anmo, 黄帝岐伯按摩, Le massage de l’Empereur Jaune et de Qibo. Malheureusement, ce livre de dix volumes a disparu. Mais suivant les connaissances actuelles, c’était le premier livre consacré au massage. Le Huangdi Nei Jing, 黄帝内经, Le Classique Interne de l’Empereur Jaune, aussi connu sous le nom abrégé de Nei Jing, Le Classique Interne, qui a paru pendant la période de la Dynastie Qin (- 221 à - 207) est le plus ancien des livres médicaux classiques conservés jusqu’à présent. Il est aussi le premier classique qui explique de façon complète et systématique la théorie de base de la médecine chinoise. Ce livre est composé de deux parties : le Su Wen, 素问, Les Questions sur l’Origine (du Monde), consacré principalement à la théorie de base de la médecine chinoise, et le Ling Shu, 灵枢, Le Pivot Spirituel, consacré principalement à l’acupuncture. Dans ce livre de cent soixante-deux chapitres, il y a beaucoup de textes consacrés au massage. Il est dit dans Su Wen au chapitre Yi Fa Fang Yi Lun, 异法方宜论, Le Traité de la différentiation des méthodes (thérapeutiques) pour répondre aux différents besoins (des personnes de différentes régions), que “la transmission du qi, le massage et les exercices physiques trouvent leur origine au centre”. “Le centre” correspond en cette période de l’histoire de la Chine, à la région de Luoyang de la province de Henan actuelle. Il est donc très probable que le massage chinois a été créé dans cette région. Dans le Nei Jing, il y a aussi quelques chapitres qui donnent un aperçu de l’étendue des indications et des contre-indications du massage. Des célèbres neuf aiguilles anciennes de la même époque, il y en avait deux qui étaient en fait des outils de massage : l’aiguille à pointe arrondie qui permet de “masser les muscles sans les blesser”, et l’aiguille à pointe de graine de millet, qui permet de “masser les méridiens sans enfoncer”. Dans les temps anciens, le massage était beaucoup appliqué pour les secours d’urgence. Ce qui est particulièrement remarquable, c’est que pendant la période de la Dynastie Qin et des deux Dynasties Han (- 221 à 220), la technique du massage cardiaque externe était déjà couramment appliqué, notamment pour sauver des personnes qui avaient tenté de se suicider par pendaison. Zhang Zhongjing, le célèbre médecin de la Dynastie Han de l’Est et auteur du Shang Han Lun, 伤寒 论, Le Traité de l’Atteinte du Froid, avait décrit la méthode suivante dans son ouvrage : « Il faut descendre doucement (la personne qui s’est pendue) et défaire la corde progressivement – il ne faut absolument pas couper la corde brutalement - et coucher le patient au calme ; une personne appuie les deux pieds sur les épaules du suicidé pour les immobiliser, prend ses cheveux des deux mains et les tire régulièrement dans le sens longitudinal, sans soulever le suicidé ; une deuxième personne pose les deux mains sur la poitrine du suicidé et appuie sur le 11 cœur suivant un rythme régulier ; une troisième personne fait des mouvements d’extension et de flexion des bras et des jambes du suicidé . » Dans les livres d’histoire de cette période, il y a beaucoup d’histoires de traitements de secours par le massage. Pendant cette même période, on a commencé à combiner le massage avec d’autres méthodes de traitement, comme le qigong, les exercices physiques, l’acupuncture, la médecine aux herbes, etc., pour renforcer l’effet du traitement. Un autre point important à citer concernant l’évolution du massage pendant cette période, est que plusieurs méthodes d’auto-massage étaient déjà fort répandues parmi le peuple, pour prévenir et traiter certaines maladies courantes. Pendant la période de la Dynastie Sui (580 à 618) et la Dynastie Tang (618 à 907), le massage était devenu une discipline indépendante. Au Bureau des Médecins Impériaux, qui était un service d’enseignement de la médecine de la Dynastie Sui, il y avait déjà les professeurs de massage ; pendant la Dynastie Tang, le département de massage était un des départements officiels de l’hôpital impérial. En tant que discipline indépendante, l’évolution du massage pendant cette période est caractérisée par les quatre aspects suivants : Le massage était devenu la méthode thérapeutique commune pour les maladies d’origine traumatique - il était non seulement utilisé pour traiter des lésions des tissus mous, mais aussi pour rétablir la position des os en cas de fracture et de dislocation; Il était largement utilisé dans plusieurs disciplines de la médecine chinoise, telle que la médecine interne, la médecine externe, la pédiatrie, etc. – Sun Simiao de la Dynastie Tang, l’auteur du célèbre Qian Jin Fang, 千金方, Les Formules Valant Mille Pièces d’Or, qui était d’ailleurs appelé “le roi des herbes”, considérait que le massage était une des méthodes les plus efficaces et les plus rapides pour les maladies de l’enfant ; Le massage était largement appliqué par le peuple dans le but de la prévention des maladies et de l’entretien de la vie et ainsi l’automassage a été remarquablement développé pendant cette période ; Différentes sortes d’onguents étaient régulièrement utilisées pendant le massage et les gens choisissaient le type d’onguent suivant le cas à traiter. Pendant la Dynastie Tang, la Chine avait beaucoup d’échanges avec les pays environnants dans beaucoup de domaines. La plupart des chercheurs de l’histoire de la médecine chinoise considèrent que c’est pendant cette période que le massage chinois a été transmis au Japon et que le massage de l’Inde ancienne a été transmis en Chine. Après la Dynastie Tang, le massage a été progressivement développé en tant que discipline indépendante de la médecine chinoise et son système est devenu de 12 plus en plus complet, tant au niveau de la pratique qu’au niveau de la théorie. Au point de vue de la pratique, à partir de la Dynastie Tang et pendant les époques suivantes, le massage a été couramment utilisé dans presque toutes les disciplines de la médecine chinoise et pour traiter des maladies très diverses. Grâce à cette pratique courante, la connaissance des praticiens sur le mécanisme des effets du massage s’est enrichie considérablement. Ainsi le système de la théorie du massage a été créé et a été progressivement complété. Pendant la Dynastie Ming (1368 à 1644), le massage était un des treize départements de l’hôpital impérial. Pendant cette période, il y a un événement particulièrement important à citer, à savoir la mise en place d’un système de massage particulier pour l’enfant : dès lors le massage de l’enfant n’était plus simplement une application des techniques du massage habituelles aux maladies de l’enfant, mais il est devenu une discipline spécialisée, qui se distinguait par des applications spécifiques, tant au niveau de la théorie qu’au niveau de la pratique. Par exemple, ce qu’on appelle « les points » dans le massage pédiatrique, sont parfois effectivement des points, mais aussi des lignes (comme « les trois portes » et « les points des six fu » sur l’avant-bras), ou même des surfaces (comme les « points » de la rate, du foie, du cœur, du poumon et du rein sur les doigts) ; les deux techniques principales du massage de l’enfant, sont tui pousser et na saisir (c’était aussi à partir de cette période qu’on a commencé à utiliser couramment le terme de tuina pour qualifier le massage chinois). Ce développement rapide du massage de l’enfant était directement lié à la découverte de l’effet miraculeux du massage pour traiter les convulsions infantiles. Il y avait pendant cette période beaucoup de livres consacrés au massage pédiatrique, dans lesquels le traitement des convulsions infantiles occupait toujours une grande place. Pendant la Dynastie Qing (1644 à 1911), ce développement du massage pédiatrique a continué et a pris progressivement sa forme actuelle. Pendant la période de la fin de la dynastie Qing jusqu’à 1949, la médecine chinoise a été négligée par le gouvernement – il y avait même un ministre qui disait qu’il fallait abandonner et interdire “la médecine nationale non scientifique”. La médecine chinoise était surtout appliquée et développée par le peuple. Dans une situation pareille, l’évolution du massage prenait la forme suivante : il était pratiqué et développé dans les différentes régions sans qu’il n’y ait beaucoup de communication entre elles ; cela a évidemment favorisé la formation de différents styles de massage – voilà d’ailleurs une des grandes caractéristiques du massage chinois par rapport aux autres disciplines de la médecine chinoise : c’est l’existence d’un grand nombre de styles différents liés à des régions différentes. C’était aussi pendant cette période que le massage chinois, comme toutes les autres disciplines de la médecine chinoise, a été confronté à l’influence croissante et forte de la médecine occidentale. Certains praticiens du massage ont ainsi incorporé la connaissance de l’anatomie et de la physiologie de la médecine occidentale pour enrichir la théorie du massage. Après la fondation de la République, l’étude, l’enseignement et la pratique de la 13 médecine chinoise ont été officiellement rétablis. En 1956 un institut de massage a été créé à Shanghai. À partir des années ‘70, l’enseignement du massage a été mis en place dans tous les instituts et universités de médecine chinoise de la Chine. Dès 1982, l’Institut de Médecine chinoise de Shanghai a commencé à former des masseurs au niveau de licence (5 ans) et dès 1985, les premiers candidats de maîtrise en massage (trois ans après la licence) ont commencé leur étude à Shanghai. Actuellement, la structure de l’enseignement, de l’étude et de la pratique du massage est une entité complète, comme toutes les autres disciplines de la médecine chinoise. Les effets du massage chinois Les effets essentiels du massage chinois Quand nous appliquons un massage au corps, ce massage agit sur certaines surfaces du corps et influence son état physiologique ou pathologique – c’est ce qu’on appelle : les effets du massage. Les effets essentiels du massage chinois se manifestent par les aspects suivants : dégager les méridiens et les collatéraux, favoriser et activer la circulation du qi et du sang, régulariser les fonctions des organes et des entrailles, lubrifier les articulations et favoriser leurs fonctions et renforcer la résistance du corps contre les maladies. Dégager les méridiens et les collatéraux Le système des méridiens et des collatéraux est l‘ensemble des voies de la circulation du qi et du sang. Dans l’interne, il s’attache aux organes et entrailles ; à l’externe, il se relie aux membres et aux articulations. Ainsi le système des méridiens et des collatéraux atteint tant la surface que l’interne et relie le haut et le bas. Il forme un réseau qui se répartit dans tout le corps et relie le corps en un ensemble organique uni, harmonieux et relativement stable. La circulation du qi et du sang dépend du système des méridiens et des collatéraux. C’est aussi grâce à lui qu’un équilibre dynamique est maintenu entre les organes, les entrailles, les quatre membres et les os du corps et qu’une harmonie est maintenue entre le corps humain et son environnement externe. Quand les fonctions physiologiques du système des méridiens et des collatéraux sont déréglées, le qi et le sang sont aussi déréglés et ne peuvent pas nourrir l’interne et défendre le corps contre l’attaque des pervers externe, ce qui est la source de beaucoup de maladies. Le massage a pour fonction de dégager et de libérer les méridiens et les collatéraux. Quand les mouvements du massage agissent sur la surface du corps, il y a d’abord une réaction locale du système des méridiens et des collatéraux. Mais par l’activation et la régularisation du qi des méridiens et des collatéraux, il peut en suivre une action sur les organes et les entrailles internes. Ainsi le massage peut régulariser les activités fonctionnelles des organes, des entrailles et des tissus. 14 Quand les méridiens et les collatéraux sont libres et les organes et les entrailles sont harmonieux, l’homme est en bonne santé. Cela est un des effets essentiels du massage. Favoriser et accélérer la circulation du qi et du sang Le qi et le sang sont deux substances essentielles de la structure du corps humain et sont aussi la base des activités physiologiques des organes et des entrailles, des méridiens et des collatéraux et des tissus – toutes les parties du corps ont besoin de la nutrition et de la régularisation du qi et du sang pour déployer leurs fonctions. Le qi et le sang circulent continuellement dans tout le corps, favorisent la croissance et le développement du corps et assurent les fonctions physiologiques du corps. La formation et l’évolution de toutes les maladies du corps humain sont sans exception liées au qi et au sang. Quand le qi et le sang sont harmonieux, le yangqi réchauffe et nourrit et le yinjing enrichit et nourrit. Quand le qi et le sang sont déréglés, la peau, les muscles, les ligaments, les os, les cinq organes et les six entrailles ne sont plus nourris comme il faut, de sorte que leurs activités fonctionnelles sont déréglées, ce qui peut causer beaucoup de changements pathologiques. Il est dit dans Su Wen au chapitre Tiao Jing Lun, 调经论, Le traité de la régularisation des méridiens, que “quand le sang et le qi sont déréglés, toutes les maladies sont produites et se transforment mutuellement”. Le massage a pour fonction de régulariser et harmoniser le qi et le sang et favoriser la circulation du qi et du sang. Cela se réalise par les deux voies suivantes : Le massage peut fortifier la rate et l’estomac et favoriser leur transport et leur transformation. La rate et l’estomac mûrissent et transforment les boissons et les aliments et transportent la quintessence de l’eau et des céréales ; La quintessence de l’eau et des aliments est la base matérielle essentielle de la formation du qi et du sang. C’est pour cela qu’il est dit que « la rate et l’estomac sont la racine du qi postnatal du corps humain » et que « la rate et l’estomac sont la source de la production du qi et du sang ». Quand la rate et l’estomac fonctionnent comme il faut et surtout quand ils peuvent bien transporter la quintessence de l’eau et des céréales, la nutrition du corps est assurée. Le massage peut dégager les méridiens et les collatéraux et renforcer la fonction du drainage du foie : la circulation du qi et du sang dépend du transport des méridiens et des collatéraux. Quand la voie des méridiens et des collatéraux est libre, le qi et le sang peuvent atteindre harmonieusement tout le corps et déployer leur fonction de nutrition vers toutes les parties du corps, ainsi que sa défense contre les pervers externes. La fonction du drainage du foie assure la libre circulation du mécanisme du qi du corps humain. Quand le mécanisme du qi est libre et harmonieux, le qi et le sang circulent librement et harmonieusement et il n’y a pas de stagnation du qi et de stase du sang. 15 Régulariser les fonctions des organes et des entrailles Les organes et les entrailles jouent le rôle principal dans la production et la transformation du qi et du sang, la régularisation des méridiens et des collatéraux et les activités vitales du corps humain. Le massage peut régulariser les fonctions des organes et des entrailles. Par exemple, le massage des point Pishu BL20 et Weishu BL21 (les points shu du dos de la rate et de l’estomac) peut soulager les contractions de l’estomac et de l’intestin et arrêter la douleur abdominale ; le massage du point Feishu BL11 (le point shu du dos du poumon) et du point Qianzhongshu (Extra) peut calmer l’asthme ; etc. L’art est de choisir des techniques suivant les cas différents. Le massage permet de régulariser les organes et les entrailles dans des états différents : par exemple, le massage du point Zusanli ST36 permet de diminuer la sécrétion des sucs gastriques quand celle-ci est trop importante, mais aussi de l’augmenter quand elle est insuffisante ; le massage du point Neiguan PC6 permet de diminuer la tension sanguine en cas d’hypertension mais aussi de faire monter la tension quand elle est trop basse. Ces fonctions du massage se réalisent grâce à l’influence directe des mouvements de massage sur les organes et les entrailles à travers la stimulation de la surface du corps et ce, grâce aux liens entre le système des méridiens et des collatéraux et des organes et entrailles. Lubrifier les articulations et favoriser leurs fonctions Les articulations appartiennent au système des ligaments et des os qui ont aussi besoin de la nutrition, du réchauffement et de l’humidification du qi et du sang. La lésion des ligaments et des os affecte certainement le qi et le sang, les méridiens et les collatéraux, ce qui peut causer la stagnation du qi et la stase du sang, ce qui se manifeste par le gonflement et la douleur qui, à leur tour, influencent directement les mouvements du corps. L’effet du massage pour lubrifier les articulations et favoriser leurs fonctions se réalise par les trois voies suivantes : Le massage local peut favoriser la circulation du qi et du sang, ce qui permet de dissiper le gonflement, éliminer la stase sanguine, améliorer la nutrition des tissus locaux et accélérer le métabolisme ; Certaines techniques permettent de corriger l’adhérence des articulations Les techniques “du rétablissement” permettent de corriger la position des ligaments, des os et des articulations. Renforcer la capacité de la résistance du corps aux maladies Le processus de la formation et de l’évolution des maladies est en fait le processus de la lutte entre le qi véritable et le qi pervers, de la croissance et la décroissance de l’un ou de l’autre. Il est dit que « quand le qi véritable est prospère dans l’interne, les pervers ne peuvent pas atteindre (le corps) » et que « l’endroit que le qi pervers peut atteindre, son qi est certainement vide » Cela veut dire que quand la résistance du corps aux pervers est suffisamment forte, les facteurs pa16 thogènes ne peuvent pas causer des maladies et que si la maladie peut se former et évoluer, c’est certainement parce que la résistance du corps contre les maladies est dans un état relativement faible. La pratique clinique prouve que le massage peut renforcer la résistance du corps aux maladies – il a pour fonction de soutenir le qi véritable et d’éliminer les pervers. Par exemple, le massage est très efficace pour la prévention du rhume. Cette fonction du massage pour renforcer la résistance du corps contre les maladies se réalise par les trois voies suivantes : A travers la stimulation du système des méridiens et des collatéraux, le massage active et renforce directement la résistance du corps aux maladies ; Le massage dégage les méridiens et les collatéraux et régularise et harmonise le qi et le sang, ce qui permet au qi véritable de mieux déployer ses fonctions ; Le massage régularise et harmonise les fonctions des organes et des entrailles, ce qui permet à l’organisme d’atteindre son meilleur état fonctionnel et d’activer tous les éléments positifs du corps pour qu’ils participent à la résistance contre les maladies. La tonification et la dispersion dans le massage chinois « Tonifier en cas de vide et disperser (ou purger) en cas de plénitude » est le principe thérapeutique fondamental de la médecine chinoise. Ici, « tonifier » signifie « tonifier le qi véritable qui est insuffisant » ; « disperser » signifie « disperser le qi pervers qui est excessif ». Pendant de longues années de pratique, les anciens ont accumulé beaucoup d’expérience au niveau de la tonification et de la dispersion par le massage. Dans le massage pédiatrique, la tonification et la dispersion sont particulièrement importantes. On peut résumer les méthodes de tonification et de dispersion par les aspects suivants : Par rapport au parcours des méridiens et des collatéraux : les mouvements dans le sens du parcours des méridiens appartiennent à la tonification ; les mouvements contre le sens du parcours des méridiens appartiennent à la dispersion. Par rapport à la direction de la circulation du sang : les mouvements vers le cœur appartiennent à la tonification ; Les mouvements dans le sens contraire du cœur appartiennent à la dispersion. Par rapport à la direction des mouvements : les mouvements dans le sens de l’aiguille d’horloge appartiennent à la tonification ; les mouvements contre le sens de l’aiguille d’horloge appartiennent à la dispersion. Par rapport à la force de la stimulation : les mouvements donnant une stimulation légère appartiennent à la tonification : les mouvements donnant une stimulation forte appartiennent à la dispersion. Par rapport au rythme des mouvements : les mouvements au rythme lent ap 17 partiennent à la tonification : les mouvements au rythme rapide appartiennent à la dispersion. Par rapport à la durée du massage : le massage de longue durée appartient à la tonification ; le massage de durée courte appartient à la dispersion. L’application des quatre méthodes d’examen dans le diagnostic du massage chinois Le massage chinois est largement appliqué dans la pratique. Ses indications couvrent la plupart des disciplines de la médecine chinoise : les traumatismes, la médecine externe, la médecine interne, la gynécologie, la pédiatrie, etc. En tant que discipline de la médecine chinoise, son examen et son traitement sont guidés par la théorie fondamentale de la médecine chinoise. En près d’un siècle, cette discipline thérapeutique ancienne a assimilé un certain nombre de méthodes de la médecine moderne, de sorte que dans la pratique actuelle, l’examen physique, l’imagerie, les analyses biochimiques, etc., sont couramment utilisés comme moyens nécessaires de l’examen. Avant un traitement de massage, on rassemble tous les renseignements acquis des méthodes d’examen anciennes et modernes et on différencie ces renseignements pour déterminer la nature de la maladie. Au dé part de cela, on choisit des endroits et des techniques qui conviennent pour le cas et pour la personne. La médecine chinoise possède son système de diagnostic propre qui comprend quatre méthodes : observer, écouter et sentir par le nez, interroger, palper. De ces quatre méthodes, l’observation, l’interrogatoire (notamment les questions sur la douleur) et la palpation sont les trois méthodes les plus courantes du diagnostic du massage. La palpation comprend la palpation du corps et la palpation du pouls : la palpation du pouls est une méthode d’examen extrêmement importante de la médecine chinoise dont on fait une étude approfondie dans les fondements ; les examens particuliers de chaque partie du corps seront présentés dans le cours du massage thérapeutique. Dans ce cours, nous mettons l’accent sur l’observation générale, l’interrogatoire de la douleur et la palpation générale du corps. Observer, wang, 望 L’observation est une des quatre méthodes d’examen du diagnostic de la médecine chinoise. Cette méthode est couramment appliquée dans le diagnostic du massage. L’observation du shen, du teint, de l’apparence physique générale de la personne est très importante dans le diagnostic du massage. L’observation de la tête et du visage La méthode d’observation de la tête et du visage dans le diagnostic du massage consiste principalement à observer les changements de la couleur du visage. La 18 tête est lieu de réunion de tous les yang du corps ; la moelle y est stockée ; tous les organes et les entrailles internes ont leurs manifestations à la tête et au visage. L’observation de la tête et du visage permet donc de connaître l’état de l’intérieur du corps. L’observation de la tête et du visage comprend principalement les deux aspects suivants : L’observation du shen Le shen est la manifestation générale externe des activités vitales du corps. Il représente également la conscience et la réflexion. Il est dit que « le shen est stocké dans le cœur et sa manifestation externe est dans les yeux ». L’observation des yeux est donc un aspect très important dans l’observation du shen. Quand les yeux sont pleins d’éclat et les regards sont vivaces et suivent bien ce qui se passe dans l’environnement, on dit que le shen est présent dans les yeux. Chez une personne normale, cela signifie que le qi et le sang sont en bon état ; chez une personne malade, cela signifie que le qi véritable n’est pas grièvement atteint et que les fonctions des organes internes ne sont pas beaucoup affaiblies – dans ce cas, même si la maladie est grave, le pronostic est en général bon. Quand les yeux sont ternes, manquent d’éclat et que les regards ne sont pas souples et ne réagissent pas rapidement aux stimuli de l’environnement, on dit que les yeux manquent de shen. Chez une personne normale, cela signifie que son qi et son sang ne sont pas prospères et que les organes internes ne fonctionnent pas comme il faut ; chez une personne malade, cela signifie en général que le qi véritable est sérieusement atteint et que les fonctions des organes internes sont affaiblies. L’observation du teint Il s’agit de l’observation du teint et de l’éclat du visage. Il est dit dans le Ling Shu, Le Pivot Spirituel, (l’une des deux parties du célèbre Classique Interne) au chapitre Xie Qi Zang Fu Bing Xing, Les manifestations des pervers et des maladies des organes et des entrailles, que « le qi et le sang des douze méridiens et des 365 collatéraux montent au visage. ». Le méridien de l'estomac yangming, qui est plein de qi et de sang, passe par le visage. Voilà pourquoi le visage est bien pourvu de vaisseaux sanguins. Pour ces raisons, la médecine chinoise considère que les couleurs et l'éclat du visage sont les manifestations externes de l'état du qi et du sang des organes et des entrailles internes. De plus, la peau du visage est relativement mince et fine ; donc les changements de couleurs sont faciles à observer. Un mélange de rose et de jaune indistinct et luisant est considéré comme l’état normal du visage. C’est la manifestation de la prospérité du qi et du sang. Évidemment, suite à des différences de race, de constitution physique, de région, de climat, de saison et de conditions de travail, les couleurs normales des visages 19 peuvent être très différentes. La couleur congénitale qui ne change jamais pendant toute une vie est appelée par les anciens : « la couleur primaire ou la couleur hôtesse ». Les changements de couleur qui peuvent s'opérer, suite aux saisons et aux climats, on entend donc la couleur qui change, est ce que les anciens appellent « la couleur secondaire ou visiteuse ». Retenons au départ que tous les changements de couleur qui sont le résultat de conditions de travail ou de changements émotionnels, sont en principe normaux. Quand on parle des changements anormaux de la couleur et de l'éclat du visage, il s'agit de manifestations pathologiques qui reflètent la nature des maladies. Ainsi il est dit dans le Ling Shu au chapitre Wu Se, Les cinq couleurs que « le teint vert bleu et noir indique la douleur ; le teint pâle indique le froid ». C'est assez facile à expliquer. L'obstruction cause la douleur. Quand le qi et le sang se congestionnent, cela se manifeste par la couleur vert bleu sur le visage ou bien, quand la congestion dure longtemps, la couleur devient noire : il y a donc une nette relation entre ces couleurs et la douleur. Aussi, quand il y a chaleur, les vaisseaux sanguins sont bien remplis et le visage devient rouge. Quand il y a l’humidité chaleur, on constate la couleur jaune et rouge. Le froid a la particularité de fermer et de contracter. Donc, quand il y a du froid, les vaisseaux se contractent, la circulation du sang est quelque peu désactivée et le visage devient pâle. C'est pour cela qu'on dit que la couleur pâle indique le froid. Au même chapitre du Ling Shu, on continue d'ailleurs : « si on cherche une relation entre les couleurs et les organes, il faut savoir que le vert bleu appartient au foie, le rouge au coeur, le blanc au poumon, le jaune à la rate, le noir au rein". Donc les cinq couleurs n'indiquent pas seulement la nature de la maladie, mais peuvent aussi référer aux organes et entrailles concernés. L'éclat de la peau du visage est également une manifestation du qi et du sang des organes et des entrailles internes. Dans un cas pathologique, si le visage du patient est luisant, la lésion est encore légère et superficielle et le qi et le sang ne sont pas encore affaiblis. La maladie est facile à traiter et le pronostic est favorable. Mais si le visage est terne et fané, il s'agit d'un cas grave et d'une maladie profonde et le pronostic est défavorable. Les teints pathologiques sont : pâle, jaune, rouge, vert bleu, noir. Leurs manifestations précises et leurs indications sont les suivantes : Le teint pâle Le teint pâle indique en général le syndrome de froid ou la perte de sang. La couleur pâle signifie que le qi et le sang ne peuvent pas lustrer le visage. Quand le yangqi est faible, le qi et le sang ne circulent pas librement ou quand le qi est consommé ou le sang perdu et qu'il y a insuffisance de qi et de sang, le vi20 sage peut devenir pâle. Comme il peut y avoir beaucoup de variations dans les pathogénies, on différencie généralement comme suit : pâle et gonflé : le yangqi est insuffisant, il ne peut pas guider le sang vers le haut pour lustrer le visage et il y a éventuellement rétention d'eau humidité. pâle, terne et maigre : vide de sang ou perte de sang abondante. Les tissus ne sont pas nourris et le sang insuffisant ne peut pas lustrer. pâle et vert bleu : si le visage devient brutalement pâle et vert bleu dans une maladie aiguë, c'est un signe de l'épuisement brutal du yangqi - le sang stagne ou est ralenti et le visage manque de nutrition. C'est donc également un symptôme de la congestion du sang. le visage pâle combiné avec la douleur abdominale violente ou des frissons : c'est un signe de la congélation et de la stagnation de froid yin qui cause la contraction des méridiens et des collatéraux. Le teint jaune Le teint jaune indique en général le syndrome de vide ou le syndrome d'humidité. La couleur jaune est un signe du vide de la rate et de rétention d'humidité. Quand la rate perd sa fonction de transport, le qi et le sang perdent leur source de production et de transformation, ce qui cause l'insuffisance de qi et de sang, allant souvent de pair avec la transformation insuffisante de l'eau humidité. Le jaune est la couleur de la rate. On différencie de la façon suivante : Jaune pâle et fané : ou jaune fané (wei huang). Cela est causé par le vide de la rate et de l'estomac, la dysfonction du transport et de la transformation, de sorte que le jing des boissons et des aliments ne peut pas monter pour lustrer le visage. visage jaune et gonflé du type vide : on l'appelle aussi jaune enflé, ce qui est causé par le vide et l'affaiblissement du qi de la rate et le blocage de l'humidité perverse dans l'interne. visage, yeux et corps jaunes : ici il s'agit simplement de la jaunisse. Si le visage et les yeux ont une couleur jaune brillante comme une pelure d'orange, c'est la jaunisse yang (yang huang), ce qui est causé principalement par a rétention interne de l'humidité chaleur qui pénètre la vésicule biliaire et fait déborder la bile vers la peau. Si le visage et les yeux ont une couleur jaune terne, comme jaunis par la fumée de moxa, c'est la jaunisse yin (yin huang), qui est causée par la rétention interne de froid humidité qui bloque le yang de la rate, de sorte qu'à son tour l'humidité harasse la vésicule biliaire dont la bile, ne pouvant pas être déchargée normalement, déborde vers la peau. Donc la couleur jaune se rapporte au vide de la rate et à l'estomac où à l'humidité qui harasse la rate ou bien à l'humidité chaleur du foie et de la vésicule biliaire, 21 etc. Le teint rouge Le teint rouge indique en général le syndrome de chaleur. Le rouge indique que les vaisseaux sanguins du visage sont abondamment remplis suite à la prospérité de la chaleur. On différencie de la façon suivante : Rouge de tout le visage : c'est le syndrome de plénitude chaleur causé par l'attaque externe ou l'excès de yang des organes et des entrailles, la prospérité de la chaleur interne qui accélère la circulation du sang et fait monter le sang au visage. Rouge sur les joues : c'est un signe de chaleur vide causé par la consomption du yin suite à des maladies chroniques. Quand le yin est vide, le yang est relativement excessif, il se transforme en sécheresse et produit de la chaleur, de sorte que le feu vide monte et brûle dans le haut. Rouge comme peint sur les joues : quand sur un visage pâle survient cette espèce de couleur rouge sur les joues, comme si on y avait appliqué du maquillage, et cela dans le cas d'une maladie sérieuse et chronique, cela veut dire que le yang flotte (syndrome du yang flottant). Cela arrive quand le jing (quintessence) est consommé et que le yin ne retient plus le yang, de sorte que le yang flotte dans le haut. C'est un signe défavorable qui suggère le début de la séparation du yin et du yang et il suggère un pronostic défavorable. Le teint vert bleu Le teint vert bleu indique en général le syndrome de plénitude de froid, le syndrome de douleur, le syndrome de stase du sang et le syndrome de convulsions infantiles. La couleur vert bleu est une manifestation de la congélation du froid, de la stagnation de qi et le blocage des méridiens. Le froid provoque la fermeture et la contraction. Si le froid yin est prospère dans l'interne et stagne dans les méridiens, ceux-ci se contractent, de sorte que la circulation du qi et du sang est retardée : soit le qi stagne et congèle, soit le sang se bloque et se congestionne. Dans les deux cas, le teint peut devenir vert bleu et même vert bleu et pourpre dans les cas sérieux. On différencie de la façon suivante : Pâle et vert bleu : ceci est surtout causé par la prospérité du froid yin ou par la douleur cardiaque ou abdominale. Dans les deux cas, les vaisseaux se contractent et le qi et le sang congèlent et stagnent. Visage vert bleu et gris, lèvres vert bleu et pourpre : cela correspond le plus 22 souvent au vide et à l'affaiblissement du yang ou du qi du cœur qui font que la circulation du sang n’est plus activée par le qi et que le sang se congestionne. Vert bleu chez les enfants, surtout sur le nez, entre les sourcils et autour des lèvres et ce pendant une fièvre élevée : c'est le présage de l'attaque des convulsions infantiles dues à la prospérité de la chaleur qui fait que le vent s'agite. Le teint noir Le teint noir indique en général le syndrome de vide du rein, le syndrome de liquides pathologiques et le syndrome de congestion du sang Le teint noir est une manifestation du vide et de l'affaiblissement du yang du rein, de la congélation et de la stagnation du qi et du sang et de la prospérité du yin, du froid et de l'eau, le vide du yang étant la cause première. Le rein est l’organe de l'eau et du feu et la racine du yangqi de tout le corps. Si le yang est vide et le feu s'affaiblit, l'eau et le froid peuvent croître dans l'interne, de sorte que le sang n'est pas réchauffé et nourri, que les méridiens se contractent et que la circulation sanguine est retardée. Pour cela le visage devient terne. On différencie de la façon suivante : Noir et terne : le yang du rein est vide et le feu de mingmen (la porte de la vie) est faible, les vaisseaux sanguins ne sont pas réchauffés et nourris, le qi et le sang se congèlent et stagnent. Noir et sec : le jing (essence, quintessence) du rein est grièvement consommé et ne peut plus monter pour lustrer le visage. Noir autour des yeux : vide du yang de la rate et du rein, l'eau humidité est retenue dans l'interne et provoque le syndrome de liquides pathologique ou la descente du froid humidité qui cause la leucorrhée. En ce qui concerne l'observation du visage, les anciens soulignaient toujours que l'idéal est un visage lustré, où les couleurs se cachent dans la profondeur sans trop se manifester à l'externe. Évidemment, il faut combiner l'observation des couleurs avec celle du shen. Des couleurs qui ont du shen sont plus favorables que celles qui n'en ont pas. On peut donc voir les différentes nuances : une couleur dans la profondeur qui a du shen, une couleur à la surface qui a du shen, une couleur dans la profondeur sans shen, une couleur à la surface sans shen. L’observation de l’apparence physique générale 23 Dans la pratique du massage thérapeutique, on rencontre souvent des patients qui souffrent de douleurs dues à la lésion des tissus mous. Dans ce cas, il faut faire attention aux deux points suivants : Quand le patient souffre des conséquences d’un accident traumatique (dans la pratique, la plainte principale est principalement la douleur) depuis une période relativement longue et qu’il présente des signes suivants : une expression de souffrance sur le visage, le teint terne et fané, le shen faible et le corps affaibli, il faut penser à la possibilité de l’atteinte d’organes internes. Quand le patient présente les signes suivants dans un cas aigu : le teint pâle, les lèvres pourpres, la transpiration importante, la chute de la tension sanguine, etc., il peut aussi y avoir une atteinte d’organes internes. Dans ces deux cas, malgré la douleur forte et la demande du patient, il faut d’abord faire un examen plus complet (de préférence avec des techniques modernes) pour déterminer la meilleure méthode de traitement. Écouter et sentir, wén, 闻 Il y a deux aspects : d'une part écouter et d'autre part sentir. Quand on dit « écouter », on s'adresse à la voix et à la respiration des patients : sont-elles d'un ton haut ou bas, fortes ou faibles, lentes ou rapides, etc. On écoute aussi le hoquet, la respiration asthmatique, les soupirs, les éructations pour distinguer le froid et la chaleur, le vide et la plénitude. Quand on dit « sentir », on s'adresse aux odeurs de l'haleine, des excrétions, des sécrétions. Tout cela peut donner des renseignements très importants pour le diagnostic. Interroger, wèn, 问 Le médecin interroge le patient et éventuellement la personne qui l'accompagne et écoute ce qu'ils disent afin de rassembler un maximum d'informations sur l'historique de la maladie et les symptômes actuels – c’est la signification de l’interrogatoire qui est une des quatre méthodes d’examen de la médecine chinoise. Cette méthode d'examen est très importante, puisqu'elle permet de collecter des renseignements sur l'historique et les caractéristiques particulières de la maladie que personne ne connaît mieux que le patient lui-même. Cette méthode aide à mieux analyser les différents aspects de la maladie, de mieux cerner la localisation, de mieux distinguer la nature de la maladie, de mieux la différencier et finalement de mieux la traiter. Cette méthode est surtout importante pour les maladies qui manifestent peu de signes objectifs et visibles et qui permettent uniquement 24 de faire le diagnostic d'après les dires du patient, comme dans le cas de certaines maladies d'origine émotionnelle. L'interrogatoire permet de connaître le début de la maladie, les symptômes actuels du patient, l'évolution de la maladie, les changements consécutifs au traitement. Il est certain que la plupart des informations ainsi collectées sont des sensations subjectives du patient, alors que les informations collectées par les autres méthodes sont plus objectives. Cela veut dire qu'il ne faut pas dépendre uniquement de l'interrogatoire non plus. C'est pour cela que les anciens disaient : "Il faut interroger le patient avec précision, mais il faut aussi combiner ces informations avec les données provenant des autres méthodes d'examen". Les différents aspects couverts par l'interrogatoire sont nombreux. En général, on les résume en quatre points suivants : Les informations générales : elles comprennent le nom, l'âge, le sexe, la situation maritale, le pays, la profession, l'adresse du patient. C'est le premier contact du médecin avec le patient. Celui-ci est important pour établir dès le départ une relation de confiance. De plus, certains de ces éléments peuvent déjà fournir des renseignements qui peuvent être utiles pour le diagnostic. Par exemple, l'âge parle déjà de la condition physique du patient. Les jeunes ont le qi et le sang prospère, leur maladie appartient plus souvent à la plénitude. Les vieilles personnes ont le qi et le sang plus faibles et leur maladie appartient plus souvent au vide, etc. L'histoire du patient : c'est ce que le patient raconte sur sa maladie. Il s'agit le plus souvent des sensations les plus marquantes et la raison première qui le font venir en consultation. C'est là qu'on récolte en fait les premiers signes de la maladie et qu'on peut envisager les premières orientations diagnostiques. Par exemple si le patient dit qu'il a mal dans la région lombaire et que cette douleur est accompagnée du froid et de la lourdeur de la même région, on pensera directement à un blocage par le froid humidité. L'anamnèse : il s'agit de l'histoire de la maladie, l'état de santé personnel et celui de la famille. Ainsi nous pouvons faire connaissance avec l'environnement du patient, ses habitudes particulières, ses déplacements, etc. Chez les femmes on demande l’historique et les circonstances des règles, l'état marital, les grossesses, etc. Pour un enfant il faut avoir des renseignements sur son développement, sur les maladies d'enfant, etc. L'interrogatoire sur la famille permet de savoir s'il y a des maladies héréditaires ou infectieuses. Les symptômes actuels : c'est la partie la plus importante de l'interrogatoire. Cela comprend les symptômes principaux, leur début, leur localisation, leur nature, leur évolution, les traitements que le patient a déjà eus, etc. Comme la douleur est un des symptômes les plus courants dans la pratique clinique du massage, l’interrogatoire de la douleur est un des aspects les plus importants pour les masseurs. En cas de lésions des tissus mous, l’interrogatoire de l’historique (par exemple, comment l’accident est-il arrivé, s’il s’agit d’un trau25 matisme, etc.) est aussi très important. L’interrogatoire sur la douleur La douleur est un des symptômes les plus courants que le patient ne ressent que par lui-même. Elle peut se présenter dans toutes les parties du corps. Elle peut être causée par la plénitude, comme dans le cas d'une attaque d'un pervers ou la stagnation du qi et la stase du sang, l