Syllabus 2024-2025 Droit - Haute Ecole Bruxelles Brabant

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Haute École Bruxelles-Brabant

2024

Christiaens Valérie, Kaiser Martine, Penelle Mélanie

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law constitutional law Belgian law political science

Summary

This syllabus outlines a course on law for specialized educators at the Haute Ecole Bruxelles Brabant, focusing on Belgian constitutional law and the organization of government. The course material covers the fundamental principles of law, history of Belgium, and the three branches of government, explaining their roles and relationships.

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HAUTE ECOLE BRUXELLES BRABANT Département pédagogique DEFRÉ Section Educateur spécialisé en accompagnement psychoéducatif BAC 1 Notions d’introduction au droit Christiaens Valérie...

HAUTE ECOLE BRUXELLES BRABANT Département pédagogique DEFRÉ Section Educateur spécialisé en accompagnement psychoéducatif BAC 1 Notions d’introduction au droit Christiaens Valérie Kaiser Martine Penelle Mélanie 2024-2025 ___________________________________________________________________________ 1 Table des matières INTRODUCTION CHAPITRE I : LE DROIT SECTION 1 : LA RAISON D’ÊTRE DU DROIT SECTION 2 : LE DROIT, LA MORALE ET LA JUSTICE CHAPITRE II : BREF HISTORIQUE : LA “NAISSANCE” DE LA BELGIQUE CHAPITRE III : LA CONSTITUTION BELGE SECTION 1 : LA NOTION DE CONSTITUTION SECTION 2 : LES PILIERS DE L’ETAT BELGE 1. La séparation des pouvoirs 2. La monarchie constitutionnelle 3. La démocratie représentative et parlementaire 4. L’Etat de droit SECTION 3 : LES DROITS ET LIBERTÉS FONDAMENTALES PARTIE I - L’ORGANISATION DES 3 POUVOIRS CHAPITRE I : LE POUVOIR LÉGISLATIF SECTION 1 : LE RÉGIME PARLEMENTAIRE AU NIVEAU FÉDÉRAL SECTION 2 : COMMENT DEVIENT-ON DÉPUTÉ ? SECTION 3 : LES MISSIONS DU POUVOIR LÉGISLATIF 1. La fonction législative : la création de la règle de droit 2. La fonction politique : le contrôle du gouvernement SECTION 4 : PROCESSUS DÉCISIONNEL SECTION 5 : MODE DE CONTRÔLE DES PARLEMENTAIRES CHAPITRE II : LE POUVOIR EXÉCUTIF SECTION 1 : LA FORMATION DU GOUVERNEMENT FÉDÉRAL : COMMENT DEVIENT-ON MINISTRE ? SECTION 2 : LES MISSIONS DU GOUVERNEMENT SECTION 3 : PROCESSUS DÉCISIONNEL SECTION 4 : MODE DE CONTRÔLE DES MINISTRES 2 CHAPITRE III : LE POUVOIR JUDICIAIRE SECTION 1 : LES JURIDICTIONS QUI COMPOSENT L’ORDRE JUDICIAIRE BELGE 1. La spécialisation des Cours et Tribunaux 2. Le principe de hiérarchisation SECTION 2 : LA PROCÉDURE CIVILE ET PÉNALE 1. Les juridictions civiles (et ses acteurs) 2. Les juridictions pénales (et ses acteurs) SECTION 3 : LES RECOURS CONTRE UNE DÉCISION DE JUSTICE SECTION 4 : L’AIDE JURIDIQUE SECTION 5 : LES MODES ALTERNATIFS DE RÈGLEMENT DES CONFLITS PARTIE II - LE FÉDÉRALISME À LA BELGE CHAPITRE I - LA BELGIQUE, UN ÉTAT FÉDÉRAL SECTION 1 : UN ETAT UNITAIRE PENDANT 140 ANS SECTION 2 : LA CRÉATION DE L’ETAT FÉDÉRAL 1. La définition de l'État fédéral 2. Les divisions du territoire belge 3. Les composantes de l'État fédéral belge SECTION 3 : LES COMPÉTENCES TERRITORIALES 1. L’Autorité fédérale 2. Les Communautés 3. Les Régions SECTION 4 : LES COMPÉTENCES MATÉRIELLES 1. Le principe de l’exercice exclusif des compétences par chaque entité 2. Les compétences matérielles de l’Autorité fédérale 3. Les compétences matérielles des Communautés 4. Les compétences matérielles des Régions 5. L’exercice des compétences communautaires à Bruxelles 6. Le double transfert des compétences de la Communauté française vers la Région Wallonne et la COCOF CHAPITRE II – LA SÉPARATION DES POUVOIRS DANS NOTRE ETAT FÉDÉRAL SECTION 1 : LA NOTION DE SÉPARATION DES POUVOIRS (RAPPEL) SECTION 2 : LE POUVOIR LÉGISLATIF AU NIVEAU DES COMMUNAUTÉS ET DES RÉGIONS SECTION 3 : LE POUVOIR EXÉCUTIF AU NIVEAU DES COMMUNAUTÉS ET DES RÉGIONS SECTION 4 : LE POUVOIR JUDICIAIRE AU NIVEAU DES COMMUNAUTÉS ET DES RÉGIONS CHAPITRE III – LES ÉLECTIONS COMMUNALES ET PROVINCIALES DU 13 OCTOBRE 2024 3 INTRODUCTION CHAPITRE I – LE DROIT SECTION 1 : RAISON D’ÊTRE DU DROIT Nous savons que l'homme « animal social » ne vit pas seul, mais bien dans des communautés de taille plus ou moins grande. Ces communautés sont appelées selon les cas : tribus, familles, communautés religieuses ou sportives, associations ou sociétés diverses, villages et villes, nations fédérées ou non fédérées, communauté internationale, union européenne... Si au sein de ces diverses communautés, de la plus petite à la plus grande, chaque individu pouvait vivre sans tenir compte des autres membres du groupe, des conflits mettant en péril la vie même de la communauté toute entière surviendraient rapidement. A partir du moment où l'homme vivant en communauté prend conscience du fait que celle-ci ne peut vivre de manière stable sans un minimum de règles imposées à ses membres, il prend conscience de la nécessité du droit. Le droit est nécessaire à la vie en société à laquelle tout homme appartient. SECTION 2 : LE DROIT, LA MORALE ET LA JUSTICE Le droit au sens large est un ensemble de règles imposées et sanctionnées par la collectivité pour régir les rapports des hommes entre eux et leurs rapports avec la société. Ces règles sont destinées à faire régner l’ordre. Une des caractéristiques essentielles du droit est la possibilité d'imposer le respect des règles. En cas de non-respect, une autorité extérieure - la justice - intervient pour 4 sanctionner la violation de la loi. On peut dire que la justice c’est l’application de l’ensemble des règles de droit établies par les hommes pour trancher pacifiquement leurs conflits. Ces sanctions pour violation de la loi sont infligées par le pouvoir judiciaire, composé de l’ensemble des cours et tribunaux. Ce sont donc les juges qui détiennent le pouvoir de sanctionner un individu. Une règle non obligatoire, mais dépendant uniquement de la conscience, de la volonté de chacun n'est pas une règle de droit : c'est une règle de morale. Il importe donc de ne pas confondre le droit et la morale. Voici ce qui les distingue principalement : 1. le droit a pour but de maintenir l'ordre social, d’éviter l’anarchie dans la société. La morale, par contre, a pour but le perfectionnement intérieur de l'individu. 2. une caractéristique essentielle des règles de droit est d'être sanctionnée par une autorité extérieure à l'individu. Par contre, la sanction des règles de morale se trouve dans la conscience de chaque individu. Aucune autorité extérieure n’intervient pour sanctionner leur non-respect. Seul l’individu peut s’auto-punir, à l’occasion d’un examen de conscience. Toutefois, si le droit et la morale sont distincts, il existe une interaction entre les deux : 🡺 Le droit suit l'évolution morale d'un pays à un moment donné ; la règle de droit s'adapte à l'évolution morale. En effet, la loi ne peut que très difficilement sanctionner une conduite approuvée par l'opinion publique et inversement. 🡺 Le droit se réfère parfois expressément à la morale ; de nombreuses obligations juridiques correspondent à des obligations morales. 5 CHAPITRE II – BREF HISTORIQUE : LA “NAISSANCE” DE LA BELGIQUE En 1814, suite à la première défaite de Napoléon Bonaparte à Paris, les grandes puissances européennes de l’époque (la France, la Prusse, l’Autriche, la Russie et l’Angleterre) décident du sort de l’Europe lors du Congrès de Vienne. Le territoire belge est en grande partie cédé aux Pays-Bas, composé en 1815 de 17 provinces (le territoire belge composait les « provinces du sud »). Mais, la façon autoritaire dont le Roi Guillaume Ier gouvernait, les conditions sociales et économiques difficiles ainsi que la montée des sentiments nationalistes en Europe expliquent qu'en septembre 1830, une armée de volontaires se forme et affronte les troupes des Pays-Bas. Le 4 octobre 1830 (après plusieurs journées de combats extrêmes dans les rues du centre de Bruxelles)1, les troupes militaires des Pays-Bas évacuent le territoire et un gouvernement provisoire de 9 membres est créé. Celui-ci proclame l’indépendance des provinces belges. Le Gouvernement provisoire qui s'est constitué décide d'organiser des élections ayant pour but de créer un organe appelé à élaborer la Constitution belge. Ce pouvoir constituant originaire fut appelé le « Congrès National » et était composé d’élus exclusivement masculins issus de la noblesse et de la bourgeoisie2. Le premier acte du Congrès National fut de prononcer l’indépendance du peuple belge le 18 novembre 1830. Le Congrès National rédigea ensuite une Constitution qui fut promulguée le 7 février 1831. Le Congrès National décide que la Belgique sera une monarchie et choisit comme premier roi des Belges Léopold de Saxe Cobourg Gotha, qui prête serment le 21 juillet 1831 (cette date constitue depuis lors le jour de la fête nationale belge). 1 Le 27 septembre, jour de la fête de la Fédération Wallonie- Bruxelles, a été choisi en mémoire de ces jours de combat et de la fuite des hollandais de Bruxelles ce jour-là 2 résultat du vote censitaire masculin appliqué à cette époque 6 7 CHAPITRE III - LA CONSTITUTION BELGE SECTION 1 : LA NOTION DE CONSTITUTION Pour fixer les règles fondamentales de l'organisation de la Belgique, une Constitution a été élaborée par le Congrès National en 1831. La Constitution est l’assise juridique de l’Etat, elle en fixe le statut. Au sein même d’un Etat, la Constitution a valeur de règle suprême et se trouve tout en haut de la hiérarchie des normes, ce qui veut dire que toutes les autres règles de droit (les lois, décrets, ordonnances, arrêtés ou règlements) doivent toujours respecter les principes qui se trouvent inscrits dans la Constitution. La Constitution est la charte fondamentale qui contient l’ensemble des règles juridiques fondamentales qui : 1) détermine la forme de gouvernement d’un Etat (Monarchie ou République, état unitaire ou état fédéral, …) 2) précise l’organisation des pouvoirs et l’attribution des compétences aux différents pouvoirs (qui détient quel pouvoir ?, compétences de chaque pouvoir et autorité,...) 3) proclame les droits et libertés fondamentales des citoyens ( ex : droit de circuler librement, liberté d’expression…) Elle contient donc les « grandes lignes » de la structure de l'Etat. La Constitution peut être modifiée, mais uniquement en respectant des procédures particulières très strictes, définies dans la Constitution elle-même. 8 SECTION 2 : LES PILIERS DE L’ETAT BELGE La Constitution belge de 1831 est une synthèse équilibrée des constitutions françaises de 1791, 1814 et 1830, de la constitution néerlandaise de 1814 et du droit constitutionnel anglais. Il s’agit d’une construction tout à fait originale dont les principes élémentaires sont toujours en vigueur aujourd’hui. Pour garantir la démocratie3 mise en place lors de l’indépendance de la Belgique, la Constitution a consacré quatre principes fondamentaux considérés comme les piliers de l’Etat belge : la “séparation des pouvoirs”, la “monarchie constitutionnelle”, “la démocratie représentative et parlementaire” et “l’Etat de droit”. 1. La séparation des pouvoirs La théorie de la séparation des pouvoirs est née d'une réaction à la monarchie absolue (où le Roi a tous les pouvoirs). C’est une théorie qui a été élaborée en 1748 par Montesquieu, un philosophe français, partant du postulat que « quiconque a du pouvoir est porté à en abuser ». Selon lui, il est donc préférable, afin d'éviter les abus, de répartir le pouvoir entre trois instances : le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire. Cette théorie de la séparation des pouvoirs est développée par Montesquieu dans son ouvrage théorique intitulé « De l'esprit des lois ». Dès lors, pour éviter tout retour à un régime totalitariste, le Congrès National a suivi cette théorie et a réparti le pouvoir entre : Le pouvoir législatif qui élabore les lois. Il est exercé par le Parlement (les députés) et le Roi. Le pouvoir exécutif qui veille à l’exécution des lois et qui gouverne le pays. Il est exercé par le Gouvernement (les ministres et secrétaires d'état) et le Roi. Le pouvoir judiciaire qui contrôle la bonne application des lois par les individus mais également par les autorités publiques et qui sanctionne 3 Démocratie = le pouvoir est détenu est exercé par le peuple et pour le peuple 9 en cas de non-respect. Ce pouvoir est exercé par les Cours et Tribunaux (les juges). A noter qu’en Belgique, nous n’appliquons pas de manière stricte le principe de séparation des pouvoirs. Si chaque pouvoir a ses propres compétences, cela n’exclut ni des chevauchements de compétences ni une collaboration entre les pouvoirs. Ces trois pouvoirs seront étudiés dans la première partie de ce cours. 2. La monarchie constitutionnelle C’est le Congrès National qui décide en 1831 que la Belgique sera une monarchie, c’est- à-dire que le chef de l’Etat belge sera un Roi. Le Congrès National choisit un prince allemand, Léopold de Saxe Cobourg Gotha pour devenir roi. Léopold Ier prête serment le 21 juillet 1831. Léopold Ier ne s’est donc pas emparé du pouvoir en Belgique (comme l’ont fait de nombreux rois dans le passé en menant des guerres) mais il a reçu ce pouvoir de la Constitution (autrement dit du peuple belge). Toutefois, le peuple belge, encore traumatisé par l’oppression et l’absolutisme de Guillaume Ier (le Roi des Pays-Bas) a pris ses dispositions pour que ce nouveau Roi, désigné chef de l’Etat, ne puisse pas abuser de son pouvoir et a dès lors opté pour une “monarchie constitutionnelle” c’est-à-dire que : Les pouvoirs du Roi sont définis par la Constitution mais aussi limités par la Constitution elle-même. Le Roi est tenu de respecter la Constitution belge qui lui a donné son pouvoir. C’est le serment que le Roi prête lorsqu’il accède au trône : « Je jure d’observer la Constitution et les lois du peuple belge, de maintenir l’indépendance nationale et l’intégrité du territoire ». Tous les rois des Belges, qui se sont succédés depuis 1831, ont dû prêter ce serment lors de leur accession au trône (la dernière prestation de serment s’est déroulée le 21 juillet 2013 par le Roi Philippe Ier)4. 4 C’est la première fois, depuis Léopold Ier, qu’une prestation de serment du nouveau Roi a eu lieu un 21 juillet. Ce n’est pas une obligation. 10 Les règles de succession au trône sont inscrites dans la Constitution : la fonction royale est héréditaire et se transmet par ordre de primogéniture (à l'aîné). Jusqu’en 1991, seuls les descendants masculins pouvaient accéder au trône de Belgique. Depuis, la succession a également été ouverte aux descendantes féminines. Le Roi cesse de régner à sa mort ou s’il décide de renoncer au trône (abdication). Le Congrès National a décidé en 1831 de n’accorder au Roi qu’un pouvoir très limité sur le plan politique : il est « incapable » d'agir seul : il ne peut prendre aucune décision politique seul et doit toujours agir avec l’assentiment de ses ministres. il est considéré comme étant politiquement « irresponsable » : le Roi ne peut pas voir sa responsabilité mise en cause pour des actes mis en place par le gouvernement. Seuls les ministres sont responsables et doivent éventuellement justifier leurs actions devant le Parlement et peuvent être poursuivis et sanctionnés par les Tribunaux. La personne du Roi est « inviolable » : il ne peut pas être assigné devant les Tribunaux et bénéficie donc d’une immunité complète sur le plan personnel aussi longtemps qu’il règne (par contre son patrimoine peut être engagé pour réparer les dommages causés). Aujourd’hui, le pouvoir du Roi est essentiellement un pouvoir d'écoute, de consultation et de stimulation du gouvernement et des citoyens. Le rôle du Roi est plus symbolique que décisif. La famille royale représente également la Belgique à l’étranger au plus haut niveau (visites d’Etat, missions économiques…). 3. La démocratie représentative et parlementaire La Belgique a opté en 1830 pour une « démocratie représentative et parlementaire ». La démocratie est « une forme de gouvernement dans lequel la souveraineté émane du 11 peuple »5, autrement dit : le pouvoir doit être exercé par et pour le peuple. 5 Définition donnée par le dictionnaire français LAROUSSE 12 L’idée sous-jacente au principe de la démocratie est que dès lors que les règles de droit doivent être observées par tous, il est préférable qu'elles soient établies par le peuple lui- même. Ce choix en Belgique, de la démocratie, est proclamé à l’article 33 de la Constitution : « Tous les pouvoirs émanent de la Nation ». Toutefois, dans le mesure où il est impossible, en pratique, de demander au peuple d’exercer directement et individuellement ce pouvoir lors de l’élaboration de chaque règle de droit, la Belgique a opté pour un système de représentation : le peuple va faire connaître sa voix à travers un certain nombre de représentants : les députés, les ministres, les juges. Ces différents mandataires représentent le peuple et exercent le pouvoir en son nom. C’est le principe de la démocratie représentative. Enfin, la Belgique a choisi un régime parlementaire ce qui veut dire que seuls les détenteurs du pouvoir législatif (les députés qui siègent au(x) Parlement(s)) sont directement élus par les citoyens (le peuple) tandis que les autres représentants du peuple exerçant le pouvoir exécutif (les ministres) et le pouvoir judiciaire (les juges) ne reçoivent pas directement leur mandat du peuple (grâce à des élections) mais grâce à d’autres mécanismes (nomination ou examen de compétence) qui seront explicités ci- après. 4. Un Etat de droit Le concept juridique d’ ”Etat de droit” vise, comme celui de séparation des pouvoirs, à éviter la tyrannie et l’absolutisme. C’est l’idée selon laquelle la règle de droit est supérieure à tous, et tous doivent la respecter : les citoyens mais également les pouvoirs publics qui ont contribué à l’élaboration et à la mise en œuvre de cette règle de droit (les députés, les ministres et les juges). L’État de droit se réalise par la soumission du pouvoir politique au droit. “L’Etat de droit” s’oppose à “l’Etat de police” dans lequel le pouvoir n’est pas soumis au droit et agit de manière arbitraire. 13 Un Etat de droit est un état qui : garantit la séparation des pouvoirs (législatif, exécutif, judiciaire) en permettant à chacun d’eux d’exercer leurs missions en toute indépendance ; organise des élections libres et respecte le résultat des élections ; assure l’égalité de tous les citoyens devant la loi ; met en place une hiérarchie entre les différentes règles de droit ainsi que des mécanismes de contrôles administratifs et judiciaires pour s’assurer du respect de cette hiérarchie des normes (Conseil d’Etat, Cour Constitutionnelle…) ; rend les gouvernants responsables de leurs actes ; respecte et garantit à tous les citoyens les libertés fondamentales, appelés aussi les droits humains. Afin de garantir l’ensemble de ces principes et de ces droits, ceux-ci ont directement été inscrits dans la Constitution. Cela leur confère un statut de normes supérieures et cela garantit également pour ces principes et pour ces droits une stabilité qu’ils n’auraient pas eue s’ils avaient été inscrits dans une simple loi. SECTION 3 : LES DROITS ET LIBERTÉS FONDAMENTALES En 1831, lors de la rédaction de la Constitution, le Congrès national a décidé d’inscrire dans la Constitution les libertés et droits fondamentaux des belges afin de donner à ceux- ci un statut particulier : → puisque ces droits et libertés sont inscrits dans la Constitution, les autorités publiques (Roi, députés, ministres et juges) doivent toujours les respecter sous peine de voir leur décisions (lois, arrêtés, règlements ou jugements) être annulées pour “inconstitutionnalité” → le seul moyen de remettre en cause ces droits et libertés est de procéder à une modification de la Constitution, ce qui nécessite une procédure particulière, stricte avec des votes à la majorité renforcée. La plupart des droits originaux sont des réactions à l'Ancien Régime et à la domination néerlandaise, de nouveaux sont venus s'ajouter au fur et à mesure de l'Histoire. 14 Aujourd’hui le Titre II de la Constitution intitulé “Des belges et de leurs droits” est composé de 29 articles énonçant chacun un droit humain, dont les principaux sont : Egalité devant la loi et égalité homme-femme (articles 10 et 11bis) Non discrimination (article 11) Liberté individuelle (article 12) Droit à un procès équitable (articles 13, 14, 14bis, 17,18) Inviolabilité du domicile (article 15) Droit de propriété (article 16) Liberté de cultes (articles 19, 20 et 21) Droit au respect de la vie privée et familiale (articles 22, 22bis et 22ter) Droit de mener une vie conforme à la dignité humaine (article 23) Liberté l’enseignement et gratuité d’accès à l’enseignement obligatoire (article 24) Liberté de la presse (article 25) Droit de s’assembler paisiblement et sans arme (manifester - article 26) Liberté d’emploi des langues (imposées uniquement dans la sphère administrative et judiciaire) Le secret de la correspondance (article 29) Ces droits fondamentaux sont reconnus aux citoyens belges mais également aux étrangers qui se trouvent sur le territoire (sauf restrictions prévues par la loi - article 191 de la Constitution). Si l’existence des droits fondamentaux est inscrite dans la Constitution, leur exercice se voit toutefois encadré par des limites. La principale étant celle d’éviter que l’usage de ces droits ne porte atteinte aux droits d’autrui : “ma liberté s’arrête là où commence celle des autres”. Ainsi, la Constitution prévoit que ces libertés fondamentales peuvent généralement faire l’objet de limitations par la loi, le décret ou l’ordonnance (pouvoir législatif) afin d’encadrer leur exercice mais elle peuvent également faire l’objet de sanctions (pouvoir judiciaire) en cas de violation de ces limites et d’atteintes portées aux droits d’autrui. A côté des libertés et droits fondamentaux inscrits dans la Constitution belge, des conventions européennes ou internationales consacrent également des droits humains et sont parfois directement applicables dans notre Etat, la plus connue étant la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) datant de 1950. 15 PARTIE I - L’ORGANISATION DES 3 POUVOIRS CHAPITRE I - LE POUVOIR LÉGISLATIF SECTION 1 : LE RÉGIME PARLEMENTAIRE AU NIVEAU FÉDÉRAL Le pouvoir législatif fédéral est exercé en Belgique par le Parlement et par le Roi. 1. Le Roi, branche du pouvoir législatif Le Roi n'est pas élu. La Constitution limite par ailleurs fortement son intervention dans l’exercice du pouvoir législatif et ce afin de garantir le principe de la séparation des pouvoirs, l’un des piliers de la démocratie. Le Roi est par ailleurs, en vertu de la Constitution, incapable d’agir seul. Tous ses actes doivent donc être également posés (contresigné) par un ministre du gouvernement pour être valables. Le rôle du Roi au sein du pouvoir législatif fédéral est essentiellement de signer les lois lorsque celles-ci ont été adoptées par les députés. La signature du Roi s’appelle « la sanction royale ». Cette sanction est accompagnée de la contre-signature d’un ministre. 2. La composition du Parlement fédéral Le Parlement fédéral est « bicaméral », c'est-à-dire composé de deux chambres : la Chambre des représentants et le Sénat. 2.1. La Chambre des représentants La Chambre des représentants est composée de 150 élus au suffrage universel direct par les citoyens belges. Ils sont appelés les DEPUTES. Ils sont les représentants des citoyens, autrement dit « la voix du peuple ». 16 C’est au sein de la Chambre des Représentants que s’exerce la majeure partie de la fonction législative fédérale (la discussion et l’adoption des lois). 2.2 Le Sénat (pour info, ne pas étudier) Depuis 2014, le Sénat n’est plus composé que de 60 membres appelés des SENATEURS. Aujourd’hui plus aucun sénateur n’est élu au suffrage universel. Ils sont issus des parlements des différentes entités fédérées (Communautés et Régions). Le Sénat s’occupe essentiellement des matières transversales (celles qui sont détenues en partie par l’Autorité fédérale et en partie par les Communautés et/ou les Régions). Il est également compétent dans les procédures de modification de la Constitution. SECTION 2 : COMMENT DEVIENT-ON DÉPUTÉ ? Les députés qui siègent dans un des parlements sont (sauf à quelques exceptions près) élus par les citoyens sur base d'élections qui ont lieu tous les 5 ans. Pour pouvoir être élu comme député, il faut : être belge avoir 18 ans accomplis être domicilié en Belgique ne pas avoir été privé de ses droits civils et politiques être inscrit sur les listes électorales d’un parti avoir obtenu suffisamment de voix pour se faire attribuer l’un des sièges Rem : Un député ne doit pas avoir suivi d’étude ou de formation particulière. Il lui suffit d’obtenir un nombre de voix suffisantes de la part de ses concitoyens pour être élu. 17 Pour pouvoir voter (= élire les représentants du peuple), il faut : être belge6 avoir 18 ans7 accomplis ne pas avoir été privé de ses droits civils et politiques par une décision judiciaire pas de condition de domiciliation en Belgique. Il est possible de voter par procuration ou de l’étranger (si des élections sont organisées par les ambassades ou consulats). En Belgique, on applique le principe du scrutin basé sur la représentation proportionnelle (en opposition au scrutin majoritaire selon lequel est élu uniquement le candidat ou le parti politique qui a obtenu le plus grand nombre de voix). Le scrutin proportionnel permet de faire en sorte que les élus reflètent le plus équitablement possible la diversité des opinions des électeurs. Le mode de scrutin proportionnel est plus juste et plus démocratique mais il lui est généralement reproché de générer une forme d’instabilité car il ne permet pas souvent de dégager une majorité et impose dès lors aux partis politiques de devoir mettre en œuvre des alliances ou des coalitions avec d'autres formations politiques afin d'obtenir une majorité au Parlement. Depuis l’adoption de la loi électorale du 13 décembre 2002, les partis politiques doivent présenter autant de femmes que d’hommes sur leurs listes électorales et les deux premiers candidats de la liste doivent être de sexes différents (ex : une liste de 21 candidats ne peut compter que maximum 11 personnes du même sexe et si le premier candidat présenté est une femme, le second devra obligatoirement être un homme ou inversement). Cette loi a été adoptée après que le principe d’égalité femme-homme ait été inscrit dans la Constitution en 2002. Pratiquement, le vote est organisé dans chaque commune. Il a un caractère obligatoire et 6 La nationalité belge n’est par contre pas une condition pour les élections communales qui sont également ouvertes aux ressortissants européens et aux étrangers non européens établis depuis au moins 5 ans en Belgique pour autant que ces personnes soient inscrites dans les registres de la commune concernée. 7 En 2022, la Belgique a adopté une loi permettant la participation aux élections européennes dès l’âge de 16 ans. Cette nouvelle mesure a été mise en application pour les élections européennes de 2024. 18 secret. L'électeur peut exprimer son vote de plusieurs façons : - soit il adhère à l'ordre des candidats (effectifs et suppléants) tel que présenté par la liste du parti politique choisi, il vote alors en « tête de liste », - soit il n'adhère pas à l'ordre de présentation du parti politique choisi et il marque un vote nominatif pour un (ou plusieurs) candidat(s) déterminé(s) (effectif, suppléant, ou les deux). Remarque : s'il vote en tête de liste et pour un candidat nominativement, son vote est valable mais seul le vote nominal est pris en compte. Lorsqu’ils sont élus et avant d’exercer leur compétence législative, les députés doivent prêter serment devant les autres élus : “Je jure d’observer la Constitution”. SECTION 3 : LES MISSIONS DU POUVOIR LÉGISLATIF Les Parlements ont deux fonctions principales : une fonction législative : proposer, discuter et adopter les lois. une fonction politique : contrôler les actions du gouvernement (= le pouvoir exécutif). 1. La fonction législative du Parlement : la création des lois Les règles de droit adoptées par le Parlement fédéral sont appelées « les lois » et ces textes sont applicables sur l’ensemble du territoire national. L’adoption d’une nouvelle loi ou la révision d’une loi déjà existante se fait en plusieurs étapes et prend un certain temps. Adopter une loi n’est pas l’affaire de quelques 19 semaines, voire quelques mois, mais plutôt et généralement de plusieurs années… 20 o Étapes 1&2 : le dépôt d’une proposition ou d’un projet de loi N’importe qui ne peut pas proposer au parlement d’examiner un texte en vue d’en faire une loi. Seules deux catégorie de personnes sont autorisées à le faire : les députés (membres du parlement) ou les ministres (membres du gouvernement). Lorsque le texte est proposé par un député, on appelle cette demande une PROPOSITION de loi. Par contre lorsque ce texte est déposé par un ministre, cette demande est alors appelée PROJET de loi. Les projets de loi doivent d’abord être approuvés par le Conseil d’état (= une juridiction administrative qui vérifie si le texte respecte les principes de la Constitution) avant d’accéder à l’étape suivante. 21 o Étape 3 : l’examen en Commission La proposition ou le projet de loi est d’abord discuté en COMMISSION. Une « Commission » est constituée d’un nombre restreint de parlementaires. Les partis qui ont le plus de sièges au Parlement auront évidemment le plus de sièges dans les Commissions. Qu’y fait-on concrètement ? La personne qui introduit sa proposition ou son projet expliquera d’abord le contenu de son texte. Ensuite il invitera des experts qui donneront de plus amples informations. Ainsi, les membres de la Commission peuvent en discuter en connaissance de cause. A l’issue de cette discussion, ils peuvent introduire des changements au texte, on appelle ces changements des AMENDEMENTS. Par exemple : La proposition de loi déposée par des députés visant à faire sortir l’avortement du Code pénal et à modifier les conditions actuelles de l’IVG a été examinée au sein de la « Commission justice » composée de 17 députés. Cette Commission a d’abord invité des experts (médecins, juristes, représentants d’asbl militant en faveur de l’IVG ou contraires à cette pratique …) à venir partager leur savoir sur ces questions. Les députés présents ont ensuite proposé des modifications (= amendements) dans le texte initial déposé par les députés (ex : la proposition initiale visait à supprimer toute peine pénale à l’égard du médecin et de la femme qui a recours à l’IVG même en dehors du respect des conditions, ce texte initial a finalement été modifié en Commission et des sanctions pénales ont encore été maintenues tant à l’égard de la femme que du médecin). A la fin des discussions, les parlementaires de la Commission votent sur la proposition ou le projet complété éventuellement d’amendements. Pour que le texte soit accepté, il faut obtenir une majorité simple (ex : si la Commission est composée de 17 députés, il faut obtenir au minimum 9 votes en faveur du texte pour que celui-ci soit adopté en Commission). Si la majorité est atteinte, le texte est accepté et envoyé en séance plénière afin d’être soumis à de nouvelles discussions. Si le vote n’atteint pas la majorité, le texte est rejeté, il atterrit dans la poubelle. o Etape 4 : l’examen et le vote en séance plénière 22 Le texte adopté en Commission doit encore être soumis à la séance plénière, c’est-à-dire la réunion de tous les parlementaires. Le projet ou la proposition y est présenté sous la forme décidée en Commission. L’ensemble des députés rediscute alors en séance plénière de ce texte. Des amendements peuvent encore être apportés au texte. Ensuite les députés passent au vote final. Le vote est soumis à deux règles strictes appelées « le quorum » : 1. Le quorum de présence : pour pouvoir procéder au vote, il faut qu’au minimum la moitié des parlementaires composant ce Parlement soit présente au sein du Parlement, cela afin d’empêcher qu’un nombre réduit de parlementaires aient le pouvoir d’approuver ou de rejeter des projets ou des propositions de loi. Exemple : à la Chambre des représentants (Parlement fédéral) il faut que le jour du vote, il y ait au minimum 76 parlementaires présents sur les 150 qui composent cette chambre pour pouvoir passer au vote. Si le quorum de présence n’est pas atteint, le vote est reporté à une date ultérieure. 2. La majorité au vote : pour qu’un projet ou une proposition devienne une loi/un décret/une ordonnance, il faut qu’une majorité simple des parlementaires, présents le jour du vote final, vote en faveur du texte. Exemple : Si le jour du vote, 100 députés sont présents sur les 150 que compte le Chambre des Représentants (parlement fédéral), on peut procéder au vote (puisque le quorum de présence est atteint) et sur ces 100 députés présents, il faudra qu’au moins 51 d’entre eux votent en faveur du texte pour que celui-ci devienne une loi. S’il y a autant de voix pour que contre, le texte n’est pas accepté. Si le projet ou la proposition est approuvé, il ou elle devient une LOI (Parlement fédéral). 23 Il est rare qu’un projet ou une proposition adopté en Commission soit rejeté en séance plénière. En effet, les parlementaires suivent leurs collègues des partis qui, dans la Commission ont soit rejeté, soit approuvé le projet ou la proposition. Remarque : certaines lois doivent être votées à une majorité dite « spéciale ». Ceci s’applique principalement aux lois qui fixent les rapports entre l’État fédéral, les Communautés et les Régions. Dans ce cas, 3 conditions doivent être réunies : La majorité des votes émis dans chaque groupe linguistique doit être positive Il faut la présence de la majorité des membres de chaque groupe linguistique Le total des votes positifs doit atteindre les 2/3 des suffrages exprimés. o Etapes 5, 6 & 7 : la sanction (royale), la promulgation et la publication Pour devenir une règle de droit applicable aux citoyens, le texte adopté en séance plénière par les parlementaires doit encore être soumis à 3 formalités : la sanction, la promulgation et la publication. ▪ La sanction : c'est l'acte par lequel le chef de l’exécutif, comme branche du pouvoir législatif, marque son accord sur le texte voté par le Parlement. Il doit signer la loi/le décret/l’ordonnance. Au niveau fédéral, cette formalité est remplie par le Roi qui doit signer toutes les lois adoptées par le Parlement fédéral. Un ministre doit également contresigner le texte (vu l’irresponsabilité politique du Roi). Le Roi doit en principe sanctionner toutes les lois adoptées par le Parlement. La Constitution n’a en effet donné aucun pouvoir au Roi pour remettre en question le travail effectué par les Représentants élus par le peuple (les députés). Cas exceptionnel et unique en Belgique : le refus du Roi Baudouin de signer (sanctionner) la loi dépénalisant partiellement l’avortement. 24 ▪ La promulgation : c'est l'acte par lequel le pouvoir exécutif (le Roi au niveau fédéral ou le gouvernement au niveau des entités fédérées) confirme l'existence de la loi et ordonne son exécution et sa publication. ▪ La publication : c'est l'acte par lequel le pouvoir exécutif (le Roi au niveau fédéral ou le gouvernement au niveau des entités fédérées), publie la loi au Moniteur belge (la loi devient obligatoire et applicable à tous à partir du 10ème jour qui suit sa publication au moniteur belge, sauf si le législateur a prévu explicitement une autre date). Le Moniteur paraît sur Internet. La population doit alors respecter la nouvelle loi et sera sanctionnée en cas de non- respect. Adage : « Nul ne peut ignorer la loi ». 2. La fonction politique du Parlement : contrôler le pouvoir exécutif (le gouvernement) A côté de l’élaboration des règles de droit, les parlementaires (directement élus par le peuple) ont reçu comme seconde mission celle de contrôler les actions des gouvernements (= le pouvoir exécutif). Chaque Parlement contrôle les actions du gouvernement qui lui est rattaché. Ce contrôle s’effectue par différents moyens : Le vote initial sur la déclaration gouvernementale : Lorsqu’un nouveau gouvernement (pouvoir exécutif) est mis en place, il doit, avant toute action, présenter la politique générale (l’accord de gouvernement) qu’il entend mener pendant la législature à son Parlement qui, à la fin de la présentation, procède à un vote. Le gouvernement ne pourra commencer à travailler que s’il obtient la confiance d’au moins la majorité des députés. Les interpellations : sont des demandes d’explications adressées par un ou des 25 députés à un ou plusieurs ministres et tendant à ouvrir un débat sur la politique générale ou un acte déterminé. Il s'agit de soulever un problème important. Les interpellations mettent la responsabilité du ministre ou du gouvernement en cause. Le ministre est tenu de répondre aux critiques du/des parlementaire(s). Après l'interpellation, une motion peut être déposée (motion pure et simple, motion de confiance, motion de méfiance, de méfiance constructive, motion de recommandation) qui pourrait mener à la démission du ministre ou du gouvernement. De cette manière, le Parlement peut exercer une pression sur le gouvernement ou le ministre concerné. Les questions parlementaires : permettent aux parlementaires d'être informés de la politique du gouvernement et de ses ministres. Elles sont adressées à un ministre déterminé. La réponse à une question parlementaire ne peut pas donner lieu au dépôt d'une motion ou à un vote et ne peut donc pas entraîner la démission d’un ministre ni du gouvernement. Le vote de confiance : la confiance donnée au gouvernement au moment de son installation est conditionnelle et peut être révoquée. Durant la législature, le Parlement peut déposer une « motion de méfiance » ou rejeter « une motion de confiance » le Parlement indique ainsi qu'il ne fait plus confiance au gouvernement qui, la plupart du temps, démissionnera. Les commissions d'enquête : elles sont composées d'un nombre limité de parlementaires qui procède à un examen de fond des problèmes survenus dans la société et fait rapport au Parlement. Au cours de l’enquête, la commission peut entendre des témoins, des experts…Elle peut également constater des manquements, proposer des solutions, des réformes en vue d’améliorer la politique générale et la gestion du pays, essayer de comprendre ce qu’il s’est passé, essayer de pointer ce qui a dysfonctionné et envisager les réformes qui devraient être adoptées pour qu’à l’avenir cela ne se reproduise plus de la même manière. Ex : commission d’enquête sur les attentats de Bruxelles du 22 mars 2016 (voir article de presse dans le Classroom) 26 Le contrôle des finances publiques : ce contrôle s’effectue essentiellement par le vote annuel du budget élaboré par le gouvernement. Le « budget » est une estimation des recettes et des dépenses d’une année dont le gouvernement aura besoin pour mener à bien sa politique. Le gouvernement ne peut ni prélever des impôts, ni effectuer des dépenses s’il n’a pas reçu préalablement l’accord du Parlement sur le budget présenté. L'adoption du budget est donc l'une des missions la plus importante d'un Parlement en termes de contrôle du gouvernement. SECTION 4 : PROCESSUS DÉCISIONNEL Pour prendre ses décisions (adoption d’une loi, vote de confiance ou de méfiance, adoption du budget..), le parlement doit respecter les règles du quorum de présence et de la majorité au vote (voir supra page 20). SECTION 5 : MODE DE CONTRÔLE DES PARLEMENTAIRES Les parlementaires bénéficient, dans le cadre de leur fonction, d’un statut spécifique qui a été instauré non pas dans leur intérêt individuel, mais dans celui du fonctionnement du pouvoir législatif. C’est ce que l’on appelle les « immunités parlementaires ». On peut distinguer : L’irresponsabilité parlementaire, en vertu de laquelle un parlementaire ne pourra jamais être poursuivi du chef d’une opinion ou d’un vote émis dans l’exercice de ses fonctions. Cette immunité, qui ne connaît aucune exception, a pour objectif de garantir la liberté de parole des parlementaires. L’inviolabilité parlementaire, en vertu de laquelle un parlementaire ne pourra ni être arrêté, ni être traduit devant un tribunal pour une infraction qu’il a commise pendant la session parlementaire, sauf : Si la Chambre ou le Sénat lève l’inviolabilité parlementaire par un vote à la majorité qui autorise que le parlementaire soit arrêté ou traduit devant un tribunal. 27 En cas de flagrant délit (c’est-à-dire pendant qu’il commet l’infraction). Dans ce cas, il ne faut pas avoir l’autorisation de la Chambre ou du Sénat. L’inviolabilité parlementaire est temporaire, elle ne s’applique que durant le temps de la législature (5 ans). Un parlementaire qui a commis une infraction durant la législature pourra donc être arrêté ou traduit en justice après la législature. Par ailleurs, l’inviolabilité parlementaire permet que des auditions ou des perquisitions (en présence du président de la Chambre ou du Sénat) aient lieu durant la législature, afin de ne pas faire obstacle à l’enquête. Enfin, ne perdons pas de vue que le parlementaire qui aurait « déçu » son électorat risque tout simplement la sanction de celui-ci, qui pourrait mener à ce qu’il ne soit pas réélu. CHAPITRE II - LE POUVOIR EXÉCUTIF En vertu de l'article 37 de la Constitution « le pouvoir exécutif appartient au Roi ». Le pouvoir exécutif n'appartient cependant pas au Roi à titre personnel, mais au gouvernement, dont le Roi est le chef. Toutefois, vu l'incapacité du Roi à agir seul, il nomme des Ministres et des secrétaires d'Etat qui forment ensemble le gouvernement. Tout acte politique posé par le Roi doit être approuvé et contresigné par un Ministre. En contrepartie, la responsabilité politique du Roi ne peut jamais être engagée. Seuls les Ministres sont tenus pour responsables de la manière dont le pays est géré, ils sont « surveillés » et doivent rendre des comptes au Parlement (= les élus du peuple). Le pouvoir exécutif fédéral se compose donc de 2 branches : d’une part, le Roi, chef du pouvoir exécutif, d’autre part, le gouvernement comprenant des ministres et des secrétaires d’Etat. SECTION 1 : COMMENT DEVIENT-ON MINISTRE ? Contrairement aux députés siégeant au Parlement, les membres du gouvernement ne sont pas élus mais ils sont nommés par le Roi au terme d’un processus de négociation et 28 d’ententes entre les partis politiques (Rem : ce n’est pas le Roi qui choisit les ministres mais le Roi signe l’acte qui rend leur nomination effective). Les partis politiques qui feront partie du gouvernement sont ceux qui parviennent à se mettre d’accord pour former une « coalition », c’est-à-dire une alliance entre plusieurs partis politiques pour gouverner ensemble pendant 5 ans. Une coalition n’est envisageable qu’à deux conditions : - une entente suffisante entre les partis qui formeront le gouvernement pour s’accorder sur des réformes politiques, - un soutien suffisant (au moins 51%) des députés du Parlement qui seront sollicités par les ministres pour voter les réformes politiques et en faire des lois. Les partis politiques du gouvernement sont appelés « la majorité » tandis que les autres partis composent « l’opposition ». Les ministres sont choisis au sein d’un parti politique par leur président de parti. Ils ne doivent pas obligatoirement détenir un diplôme ou une formation dans le domaine qu’ils supervisent en tant que ministre, même si c’est préférable (ex : le ministre de la santé ne doit pas nécessairement avoir un diplôme ou une expérience dans le domaine médical ou de la santé pour devenir ministre). Pour mener à bien leur politique, les ministres s’entourent de collaborateurs expérimentés. SECTION 2 : LES MISSIONS DU GOUVERNEMENT 1. Exécuter les lois Art 108 de la Constitution : « le gouvernement fait les règlements et arrêtés nécessaires pour l’exécution des lois, sans pouvoir jamais ni suspendre les lois elles-mêmes, ni dispenser de leur exécution ». La compétence d'exécuter les lois est une des compétences les plus importantes que la Constitution attribue au pouvoir exécutif. 29 La loi a un caractère général, elle définit les « grandes lignes » d'un règlement, mais le pouvoir législatif ne l'élabore pas dans les moindres détails. Ce sont donc les arrêtés d'exécution pris par le pouvoir exécutif qui concrétisent ces « grandes lignes ». Le gouvernement exécute sa mission en adoptant des « arrêtés » royaux ou ministériels. 2. Déterminer et exécuter la politique nationale Le pouvoir exécutif définit la politique nationale et détermine les mesures à prendre afin de mener à bien cette politique (ex : comment stimuler l'économie, maintenir la sécurité, assurer les prestations sociales...) ainsi que la bonne administration du pays. Des projets de loi sont déposés au Parlement afin de concrétiser ces mesures. SECTION 3 : PROCESSUS DÉCISIONNEL Dès qu’une décision doit être prise au sein du gouvernement, celui-ci se réunit. On appelle cela le « conseil des ministres ». Le gouvernement prend ses décisions selon la procédure du consensus, c'est-à-dire qu'une décision ne peut être adoptée que si tous ses membres sont d'accord (>< au Parlement où les décisions sont prises à la majorité des députés). Et si le conseil des ministres n'arrive pas à un consensus ? Soit aucun compromis n’est possible et le gouvernement entier doit en principe démissionner (cela entraînera la dissolution du Parlement et l’organisation de nouvelles élections, les ministres essaient donc au maximum d’éviter cette situation). Soit le gouvernement arrive à un compromis acceptable pour une très large majorité de ses membres. Dans ce cas, les membres minoritaires doivent soit se rallier à cette décision et s’abstiennent de toute critique au nom de la solidarité gouvernementale, soit quitter (démissionner) le gouvernement s’ils n’approuvent plus l’orientation politique suivie. 30 31 SECTION 4 : MODE DE CONTRÔLE DES MINISTRES Comme nous l’avons vu supra, le premier contrôle sur le gouvernement (et donc les ministres) est effectué par la Chambre des représentants, par le vote de motions de confiance ou de méfiance (voir supra, pages 22, 23), mais aussi par l’approbation du budget (voir supra, page 23). Comme les parlementaires, les ministres bénéficient d’une immunité par rapport aux opinions et propos qu’ils ont exprimés dans l’exercice de leurs fonctions, et pour lesquels ils ne peuvent donc pas être poursuivis ni recherchés par la justice. Par rapport aux infractions qu’ils auraient commises, un règlement spécifique existe. C’est en effet la Cour d’appel qui juge les ministres après toutefois -sauf en cas de flagrant délit- que la Chambre des représentants a donné son accord (par un vote à la majorité). Par ailleurs, s’il est possible d’enquêter sur un ministre en fonction sans autorisation préalable, certaines mesures d’instruction (écoutes téléphoniques, perquisition,…) doivent être ordonnées par un collège de 3 conseillers de la Cour d’appel. CHAPITRE III - LE POUVOIR JUDICIAIRE Le pouvoir judiciaire est le troisième pouvoir qui a pour mission de contrôler la bonne application des règles de droits par les personnes et les pouvoirs publics et de sanctionner en cas de violation de ces règles de droit. Ce pouvoir est exercé au sein des « Cours et Tribunaux » et est détenu par les « juges ». Les juges ne sont pas élus par le peuple mais ils sont nommés à vie par le Roi après avoir présenté et réussi un examen (l’examen de la magistrature que seuls les détenteurs d’un Master en droit peuvent présenter) et pour autant qu’un poste soit vacant (libre) au sein d’une juridiction. Pour trancher le litige, les juges se basent, non pas sur leurs impressions ou sur leurs préférences personnelles, mais sur les règles de droit (adoptées par les députés au sein du Parlement, pouvoir législatif). 32 Mais les règles de droit sont souvent vagues ou très générales, le rôle du juge est donc d’appliquer ces règles à une situation concrète et de les interpréter en fonction de cette situation. SECTION 1 : LES JURIDICTIONS QUI FONT PARTIE DU POUVOIR JUDICIAIRE Le pouvoir judiciaire se compose de différentes juridictions (les Cours et Tribunaux), organisées de manière pyramidale, qui interviennent pour trancher, en application des règles de droit, les contestations (litiges) qui leur sont soumises. Cette organisation repose sur deux principes : 1. La spécialisation des cours et tribunaux Cette spécialisation s’observe à différents niveaux : 1.1. Juridictions civiles >< juridictions pénales On distingue les juridictions civiles des juridictions pénales. La finalité et la procédure y est différente (cf. infra section 2). Les juridictions civiles ont des compétences spécifiques, selon les matières (la nature du litige) tandis que les juridictions pénales sont spécialisées en fonction de la gravité des faits reprochés (contraventions, délits ou crimes). a) Les juridictions civiles Les juridictions civiles règlent les litiges qui portent sur les rapports entre particuliers entre personnes physiques mais aussi entre personnes physiques et des entités morales (ex : des autorités publiques, des sociétés, des ONG…). Elles ont pour finalité de trancher des litiges dans lesquels des intérêts particuliers et privés sont en jeu (>< protéger les intérêts de la collectivité). Les juridictions civiles sont : les justices de paix, les tribunaux de première instance (eux- mêmes composés d’une chambre civile, d’une chambre commerciale et du Tribunal de la famille), les tribunaux du travail, les Cours d’appel (chambres civiles, commerciales et familiales) et les Cours du travail. 33 b) Les juridictions pénales La fonction des juridictions pénales est différente : elles décident si une personne a commis une infraction pénale, et, si oui, elles condamnent cette personne à une peine. Une infraction pénale, c’est un comportement qui est interdit parce qu’il est contraire à des valeurs essentielles de notre société ou parce qu’il est contraire à des règles fondamentales du vivre-ensemble. C’est un comportement qui MET EN DANGER LA SOCIÉTÉ (l’ordre public) toute entière ou son équilibre. Par exemple : voler, tuer, porter des coups à autrui, conduire en état d’ivresse, cacher ses revenus au fisc… La liste des infractions pénales est donnée par la loi. La plupart de ces infractions se trouvent dans le Code pénal. En droit pénal, on distingue trois types d’infractions : les contraventions, les délits et les crimes. Infraction CONTRAVENTION DÉLIT CRIME Tribunal Tribunal de police Tribunal Cour d’Assise correctionnel Peine prononcée Emprisonnement de Emprisonnement de Emprisonnement de 1 à 7 jours 8 jours à 5 ans minimum 5 ans Amende de 1 à 25 € 8 Amende de 26 € ou Amende de 26 € ou plus* plus* Peine de travail de 20 Peine de travail de 46 à 45h à 300 h Exemples Destruction du bien Vol Homicide volontaire d’autrui Homicide Assassinat Tapage nocturne involontaire Coups et blessures Les juridictions pénales sont : les tribunaux de police, les tribunaux correctionnels, les 8 (*) à multiplier par les décimes additionnels actuellement de « 8 » 34 Cours d’assise et les Cours d’appel (chambre pénale). 1.2. Les différentes juridictions schéma interactif des juridictions (questions-justice.be) Les juridictions civiles (compétence en fonction de la nature du litige): le Tribunal de la famille et de la jeunesse est compétent pour tous les litiges relatifs à l’organisation familiale (filiation, adoption, divorce, hébergement des enfants, pension alimentaire, succession…) ainsi que pour assurer la protection des mineurs en danger (maltraitance, négligence,) et mettre en place des mesures éducatives pour les mineurs qui commettent des infractions. Le Tribunal du travail tranche les litiges qui surviennent dans la relation de travail entre un employeur et un travailleur (non-respect des conditions de travail prévues dans le contrat, licenciement, maladie ou accident professionnel, harcèlement sur le lieu du travail…). Le Juge de paix possède plusieurs compétences, dont les principales sont : - les « petits litiges civils inférieurs à 5.000 € » : factures d’hôpital impayées, factures d’eau, gaz, électricité impayées,… - les conflits de voisinage : entretien des parties mitoyennes,… - les litiges entre propriétaires et locataires : paiement des loyers, réalisation des travaux dans le bien loué, entretien du bien loué… - La protection des personnes vulnérables majeures (mise sous un régime de protection judiciaire) et la tutelle pour les mineurs d’âge. Le Tribunal de l’entreprise (autrefois appelé tribunal du commerce) 35 s’occupe de tous les litiges liés à la vie d’une entreprise (litiges entre actionnaires, non-respect des statuts de la société, faillite…) Enfin, le tribunal de première instance, chambre civile s’occupe de tous les autres litiges civils (ex : mise en cause de la responsabilité d’un entrepreneur pour des travaux mal réalisés, problème entre copropriétaires d’un bien immeuble, …) Les juridictions pénales (compétence en fonction de la gravité des faits) : le Tribunal de police est compétent pour statuer sur les contraventions (ex : infraction au Code de la route, tapage nocturne, destruction du bien d’autrui, ivresse publique). Ce tribunal est également compétent pour statuer sur tous les litiges (aspects pénaux et civils) survenus sur la route (ex : dégâts au véhicule en raison du mauvais entretien de la voirie, décès d’une personne après collision avec un véhicule…) Le Tribunal correctionnel est compétent pour statuer sur les délits (ex : vol, harcèlement, discrimination, abus de bien sociaux, trafics de stupéfiants, appartenance à un groupe lié au terrorisme, mariage forcé …) La Cour d’assises statue sur les crimes (meurtres, assassinat, viol, torture, génocide…) L’organisation de cette juridiction est particulière pour les raisons suivantes : 1/ Ce n’est pas un juge mais un jury populaire (composé de 12 citoyens tirés au sort) qui statue sur la culpabilité de l’inculpé et sur la peine (dans les limites de ce que la loi autorise) 2/ Il n’est pas possible de faire appel des décisions rendues par le jury populaire. Le seul recours qui existe est le « pourvoi en Cassation » pour vice de procédure ou mauvaise application de la règle de droit. 36 1.3. Contrôle des juridictions par la Cour de Cassation La juridiction située au sommet de la pyramide s’appelle la Cour de Cassation. La Cour de cassation a un rôle tout à fait particulier car elle ne s’intéresse pas au contenu du litige mais uniquement à la correcte application par les juges de la règle de droit (ex : la peine infligée par le juge était-elle bien celle prévue dans la loi pour ce type d’infraction ?) et des règles de procédure (ex : toutes les parties ont-elles pu s’exprimer lors du procès ? Le juge a-t-il répondu à tous les arguments des parties dans sa décision finale ?). Si la Cour de Cassation constate un vice de procédure ou une mauvaise interprétation de la loi, elle casse la décision rendue et renvoie le litige devant une autre juridiction pour que l’affaire puisse être rejugée dans le respect des règles de procédure et/ou avec une bonne interprétation de la règle de droit. 2. Le principe de hiérarchisation Il existe des juridictions dites « inférieures » (justice de paix, tribunal de police, tribunal du travail, tribunal correctionnel et tribunal de première instance lorsqu’il intervient comme première juridiction) et des juridictions dites « supérieures » (la Cour d’appel, la Cour du travail, la Cour d’assises et le Tribunal de première instance lorsqu’il intervient comme juridiction d’appel). La Cour de Cassation est, quant à elle, considérée comme une Cour « suprême ». Cour de Cassation 🡺 Juridictions supérieures 🡺 Juridictions inférieures Tout litige est d’abord traité par une juridiction inférieure => il n’est pas possible d’accéder 37 directement à une juridiction supérieure, à la seule exception de la Cour d’assises (qui traite des crimes). L’accès à une juridiction supérieure ne s’envisage que dans le cadre de la contestation d’une décision rendue par une juridiction inférieure (cf. infra, section 3). La décision rendue par une juridiction du degré supérieur annule et remplace celle qui a été rendue, dans le même litige, préalablement par une juridiction de degré inférieur. L’accès à la Cour de Cassation est beaucoup plus exceptionnel et ne s’envisage que lorsque qu’une règle de procédure semble avoir été bafouée et qu’une règle de droit ne semble pas avoir été correctement appliquée par les autres juridictions. Le « pourvoi en Cassation » ne peut se faire que sur une décision rendue par une juridiction supérieure. SECTION 2 : LA PROCÉDURE CIVILE ET LA PROCÉDURE PÉNALE9 Une procédure, c’est un mode d’emploi, ce sont les règles du jeu pour mener un procès. Pour introduire une demande en justice et obtenir un jugement, il faut suivre une procédure précise. 1. La procédure civile (et ses acteurs) schéma de la procédure civile (questions-justice.be) La procédure civile se décompose en plusieurs étapes : 1ère étape : l’introduction de la demande 9 www.questions-jutice.be 38 !!! Les juridictions civiles n’interviennent jamais de leur propre initiative. Il faut qu’une personne concernée par le litige s’adresse à elles et formule une demande (= la requête ou la citation). Dans le procès, on appellera « partie demanderesse » celle qui s’est adressée au juge en premier pour formuler une demande de condamner la partie adverse (appelée « partie défenderesse ») , soit : à payer une somme d’argent (ex : des arriérés de loyer), à faire quelque chose (ex : faire des travaux de réparation), à ne pas faire quelque chose (ex : s’abstenir de publier des données personnelles sur un site internet). Une fois que la demande est arrivée au tribunal, le greffe ouvre un dossier et convoque les deux parties. 2ème étape : la mise en état Lors d’une première audience – dite d’introduction - le juge va décider comment le procès se déroulera. Dans la majorité des cas, il faudra un temps pour la mise en état, c’est-à-dire la préparation du dossier pour le soumettre au juge. Chaque partie devra rédiger des “conclusions” avec ses arguments. 3ème étape : les plaidoiries Le juge entend les parties ou leurs avocats. Chacun explique son point de vue sur le procès, développe pourquoi il estime qu’il a raison et répond aux questions du juge. En principe, ce débat est public. 4ème étape : la prise en délibéré À la fin des plaidoiries, le juge clôt les débats et prend l’affaire en délibéré, c’est-à-dire qu’il va reprendre le dossier pour en examiner les pièces et les conclusions et réfléchir à la solution qu’il va donner au procès. 39 En principe, le juge dispose d’un mois pour rendre sa décision mais parfois, certaines décisions doivent être rendues dans l’urgence. 5eme étape : le jugement Lorsqu’il a fini son délibéré, le juge prononce un jugement c’est-à-dire qu’il donne la décision qu’il a prise. Il s’agit d’un document écrit. Dans les huit jours qui suivent le prononcé du jugement, le greffier doit envoyer une copie du jugement aux parties ou à leur avocat. 2. La procédure pénale (et ses acteurs) schéma de la procédure pénale (questions-justice.be) !!! Comme au civil, les juridictions pénales ne peuvent jamais intervenir de leur propre initiative. C’est le ministère public (= le procureur du Roi, le procureur fédéral, etc.), qui est à l’initiative de la procédure pénale. Son rôle est de garantir le respect de l’ordre public. Il est un personnage clé de la procédure pénale La procédure pénale se décompose en plusieurs étapes : 1ère étape : l’information judiciaire (et parfois l’instruction) Une infraction est portée à la connaissance du procureur du Roi (plainte à la police, constat de la police, constitution de partie civile…). Il commence alors son enquête pour déterminer si une infraction a été commise et trouver le coupable 40 Le parquet (procureur du Roi) recherche toutes les informations utiles avec l’aide des différentes polices (fédérale ou locale). Cette phase d’information se passe dans le secret. Quand certaines mesures particulièrement graves doivent être prises (comme une arrestation, une perquisition ou une écoute téléphonique par exemple), le procureur peut appeler un juge d’instruction. Ce juge d’instruction dirige alors l’enquête, qu’on appelle alors l’instruction. → Il peut décider de mettre un suspect en prison avant le jugement en lui décernant un mandat d’arrêt. Ce suspect est alors en détention préventive. → Autres pouvoirs du juge d’instruction : il peut perquisitionner, autrement dit rentrer de force chez quelqu’un, ou encore faire écouter des conversations téléphoniques. Il mène l’instruction qui doit rester secrète. On dit aussi qu’il instruit à charge et à décharge, ce qui veut dire qu’il doit rechercher toutes les informations favorables et défavorables au suspect. 2ème étape : poursuites ou non? - Si le dossier était à l’information : Au terme de l’enquête, en fonction des résultats obtenus, c’est le Procureur du Roi qui endosse un premier rôle. Il décide soit : de poursuivre le suspect et de le renvoyer devant une juridiction pénale (qui sera choisie en fonction de la gravité de l’infraction commise). Dans ce cas, cite le suspect à comparaître en lui envoyant une citation. Celle-ci lui est remise par un huissier de justice. de lui proposer une peine alternative : transaction ou médiation pénale. de classer le dossier sans suite : lorsque les preuves sont insuffisantes pour renvoyer le dossier devant un juge. 41 - Si le dossier était à l’instruction : Lorsque l’information est terminée, le dossier est envoyé devant la chambre du conseil. Celle-ci l’examine et tranche : oui ou non, y a-t-il assez de charges, c’est-à-dire d’éléments contre le suspect, pour qu’il soit jugé ? → Si oui, le procureur du Roi cite, c’est-à-dire convoque ce suspect devant un juge qui dira s’il est ou non coupable et, si oui, quelle sera sa peine. → S’il n’y a pas assez de charges contre le suspect, la chambre du conseil estimera qu’il ne doit pas être jugé. Dans ce cas, il bénéficiera de ce qu’on appelle un non-lieu. Selon l’infraction commise et la peine risquée, le suspect qui doit être jugé sera renvoyé devant le tribunal de police (pour une contravention), le tribunal correctionnel (pour un délit) ou la cour d’assises (pour un crime). 3ème étape : l’audience Si le Procureur décide de renvoyer le suspect devant une juridiction pénale, il endosse alors son second rôle : celui de représentant de la société : il accuse un suspect (sur base des preuves récoltées pendant l’enquête) et demande au juge de prononcer une peine pénale. Lorsque le Procureur du Roi renvoie un dossier devant la juridiction pénale, le premier rôle du juge pénal est de se prononcer sur la culpabilité de l’inculpé 🖳 est-ce bien lui qui a adopté le comportement infractionnel qui lui est reproché ? Si le juge estime que la personne accusée est coupable de l’infraction, son second rôle est de prononcer une ou plusieurs des peines suivantes dans les limites de ce que la loi autorise : une peine de prison une amende une peine de travail d’intérêt général 42 La peine est prononcée au nom de la société (pour protéger la société) parce que le coupable n’a pas respecté une règle fondamentale de la vie en commun. Elle n’a pas pour objectif de dédommager le préjudice subi par la victime (quand il y a en a une). Dans le cadre du procès pénal, la victime peut quant à elle, demander la réparation du dommage qu’elle a subi à cause de l’infraction pénale (exemple : si elle a été blessée, elle réclamera les frais médicaux qu’elle a dû payer, la rémunération qu’elle a perdue si elle n’a pas pu travailler durant une certaine période et un dommage moral pour les souffrances qu’elle a subies, etc.). La victime sera alors appelé « la partie civile ». Ce n’est jamais la victime qui réclame une peine pénale (prison, amende au travail d’intérêt général), seul le Procureur du Roi peut le faire, au nom de la société. L’audience se déroule selon un ordre bien précis. Le procureur du Roi (ou le procureur général devant la cour d’assises) (ou un de leurs substituts) demande au juge d’appliquer la loi et de punir la personne qu’il désigne coupable : on dit qu’il prend des réquisitions. La victime (la partie civile) plaide sa cause et l’accusé en dernier lieu présente sa défense. En fait, victime et accusé laissent généralement parler leur avocat. Les débats seront publics et toute personne de plus de dix-huit ans peut y assister, sauf décision contraire du juge (il y a alors huis clos, par exemple parce que les faits jugés sont trop horribles…). Les droits de la défense doivent être respectés : tant la victime que le suspect et le procureur peuvent chaque fois discuter des arguments et des preuves de l’autre partie. Le procureur du Roi doit amener la preuve que le suspect est coupable. En l’absence de cette preuve, le suspect reste présumé, c’est-à-dire supposé, innocent. En cas de doute, celui-ci profite au suspect. 4ème étape : la prise en délibéré Ensuite, le ou les juges vont réfléchir au dossier puis, un mois plus tard au maximum, ils rendront leur jugement, en public. Pour établir la peine, la loi précise une « fourchette », c’est-à-dire un minimum et un maximum, et le juge choisit à l’intérieur de celle-ci, notamment en fonction de la gravité 43 des faits commis ou de la personnalité de l’auteur des faits. Par contre le juge ne peut pas infliger une peine plus importante que ce que la loi prévoit. SECTION 3 : LES RECOURS CONTRE UNE DÉCISION DE JUSTICE Lorsqu’une affaire a été tranchée, la décision rendue par le premier juge s’appelle « un jugement ». 1. Si une des parties au procès n’est pas d’accord avec la décision qui a été rendue par le juge, elle a la possibilité de « faire appel » contre cette décision. Le litige sera alors transféré devant une autre juridiction et il sera réexaminé entièrement par un autre juge d’une juridiction supérieure. A l’issue de ce nouvel examen, le second juge rendra sa décision qui est alors appelée « arrêt ». Cette nouvelle décision remplacera et annulera éventuellement le jugement rendu par le premier juge (mais il est également possible que le second juge confirme la décision prise par le premier juge). Lorsqu’un arrêt est prononcé dans un litige, il n’est plus possible de faire appel. Un même litige ne peut donc, en principe, faire l’objet que de maximum deux décisions judiciaires. La seconde décision devient définitive, même si l’une des parties n’est pas satisfaite de celle-ci. Il existe cependant certains cas dans lesquels il n’est pas possible de faire appel de la décision du premier juge : les décisions rendues par le jury populaire de la Cour d’assises les décisions civiles rendues par le Juge de paix ou par le Tribunal de police si elles portent sur un montant inférieur à 2.000 €. Dans ces deux hypothèses, le pourvoi en Cassation reste toutefois possible. 44 2. Le « pourvoi en Cassation » ne peut s’envisager que lorsqu’un vice de procédure ou une interprétation non conforme de la règle de droit peut être reproché à la décision rendue en dernier recours. Il ne s’agit donc en aucun cas de faire juger une troisième fois le litige mais de demander à la juridiction suprême (la Cour de Cassation) si les juges ont effectué correctement leur travail. Si la Cour reconnaît l’existence d’un vice de procédure, elle « casse » l’arrêt (qui est donc annulé) et renvoie le dossier devant un nouveau juge (du même rang que celui qui avait rendu la décision cassée) pour que l’affaire soit à nouveau jugée. SECTION 4 : L’AIDE JURIDIQUE Une personne qui souhaite bénéficier d’un avocat peut s’adresser à n’importe quel avocat de son choix ou demander l’aide juridique de deuxième ligne (ex pro deo), c’est-à-dire un avocat dont les honoraires seront payés par l’Etat. Dans ce cas, cette personne doit répondre à certaines conditions : - soit, elle doit appartenir à une catégorie particulière (bénéficiaire du CPAS, mineur, étranger, …), - soit, bénéficier de revenus inférieurs à certains montants. 45 SECTION 5 : LES MODES ALTERNATIFS DE RÉSOLUTION DES CONFLITS Aujourd’hui, on recourt de plus en plus aux tribunaux. Et pourtant… la procédure judiciaire n’est pas gratuite, elle dure longtemps, elle peut laisser des traces irrémédiables. C’est pourquoi des alternatives au procès se sont développées. On peut par exemple citer la médiation, qui se fait sur base volontaire. Le principe de la médiation est que les parties en conflit s’engagent en toute liberté à trouver elles-mêmes une solution à leur différend, avec l’aide d’un médiateur qui est présent pour faciliter la communication entre les parties. Le médiateur doit être neutre (indépendant et impartial) et respecter la confidentialité de la médiation. C’est un professionnel formé aux techniques de la communication (formation qui peut d’ailleurs être très utile aux éducateurs spécialisés qui sont souvent amenés à jouer le rôle de « médiateur » sur le terrain). 46 A l’issue de la médiation, si les parties sont parvenues à trouver un accord, elles peuvent le faire homologuer par le Tribunal afin que cet accord ait la même valeur qu’un jugement. L’avantage essentiel de ces modes alternatifs de règlement des conflits est que les parties redeviennent ACTEURS des décisions qui sont prises (au lieu de les subir et de se les voir imposer par le juge) et sont amenées à essayer de trouver des solutions négociées avec la partie adverse. Il existe d’autres modes alternatifs de règlement des conflits : la conciliation, l’arbitrage, le droit collaboratif, la chambre des règlements à l’amiable. 47 PARTIE II : LE FÉDÉRALISME À LA BELGE CHAPITRE I - LA BELGIQUE, UN ÉTAT FÉDÉRAL SECTION 1 : UN État UNITAIRE PENDANT 140 ANS En 1831, le Congrès National met en place un État unitaire. Cette forme de l'État a perduré pendant plus de 140 ans. L’État unitaire est un État dans lequel toutes les compétences sont gérées à un seul niveau et toutes les mesures prises par le pouvoir législatif ou par le pouvoir exécutif s’appliquent à l’ensemble du territoire et à tous les citoyens. La seule exception qui existait en Belgique à cette concentration des compétences à un seul niveau de pouvoir était l’existence des Provinces et des Communes. Ces entités de proximité s’étaient vues attribuer quelques compétences qu’elles mettaient en œuvre uniquement sur le territoire de la commune ou de la province concernée. Le schéma de l’État unitaire est celui-ci : l’Etat les Provinces ↓ les Communes Dans un Etat unitaire il n’y a qu’un seul Parlement (qui exerce le pouvoir législatif) et un seul Gouvernement (qui exerce le pouvoir exécutif). 48 SECTION 2 : LA CRÉATION DE l'État FÉDÉRAL 1. La définition de l'État fédéral Après être resté un État unitaire pendant près de 140 ans, l’ État belge va évoluer. Cette évolution va prendre 23 ans, de 1970 à 1993. En 1993, la Belgique devient officiellement un État fédéral. Définition de l'État fédéral : « État dans lequel les compétences étatiques sont réparties entre un niveau fédéral (en Belgique, l’Autorité fédérale) et des collectivités politiques autonomes que l’on appelle des entités fédérées (en Belgique, ce sont les Régions et les Communautés) qui forment cet État et qui ont leurs propres compétences qu’elles exercent sur un territoire déterminé »10 Dans le cas de la Belgique, c'est un État unitaire qui a décidé à un moment donné de créer en son sein une pluralité d'entités autonomes afin d'introduire une plus grande diversité. La Belgique est donc une « construction inversée du fédéralisme » contrairement à d’autres États fédéraux qui se sont créés par l’unification de plusieurs entités autonomes qui ont vu, à un moment donné de l’Histoire, un intérêt à s’unir pour former un État plus puissant (ex : les Etats-Unis, la Suisse). De nombreux États dans le monde sont organisés sur la base du fédéralisme comme les États-Unis (1776), la Suisse (1848), l’Argentine (1853), le Venezuela (1863), le Canada (1867), l’Australie (1901), l’Autriche (1920), l’Allemagne (1949), l’Inde (1950), les Emirats arabes unis (1971), la Russie (1992) … Le Royaume-Uni par contre est un état unitaire avec quelques caractéristiques d’un état fédéral (l’Irlande, le pays de Galle et l’Ecosse sont des entités décentralisées mais non des entités fédérées. Elles ont donc moins d’autonomie que des entités fédérées). 10 http://www.vocabulairepolitique.be/etat-federal/ 49 2. Les divisions du territoire belge Jusqu’en 1970, la Belgique n’était délimitée que par ses frontières internationales (les pays limitrophes sont la France, le Grand-Duché du Luxembourg, l’Allemagne et les Pays-Bas) ainsi que par ses eaux territoriales (ce sont les lois belges qui réglementent la pêche dans nos eaux territoriales, en principe jusqu’à 12 miles de la côte c.à.d. 19,3121 km) et son espace aérien (ce sont les lois belges qui règlent tout ce qui se passe dans l’espace aérien se trouvant au-dessus de son territoire). Pour créer un État fédéral, il a fallu procéder à une division du territoire belge. Il a été décidé à cette époque de morceler le territoire belge en fonction des langues parlées dans les différentes parties du pays. Quatre régions linguistiques ont ainsi été créées. Depuis 1970, l’article 4 de la Constitution énonce que : « la Belgique comprend quatre régions linguistiques : la région de langue française, la région de langue néerlandaise, la région bilingue de Bruxelles-Capitale et la région de langue allemande. Chaque commune du Royaume fait partie d’une de ces régions linguistiques. » https://www.agestrad.com/la-belgique-et- ses-trois-langues-officielles/ 50 La région de langue française est composée des provinces du Brabant wallon, du Hainaut, de Namur, du Luxembourg et de Liège à l'exception des neuf cantons (communes) germanophones. La région de langue néerlandaise est composée des provinces du Brabant flamand, de Flandre occidentale, de Flandre orientale, d’Anvers et du Limbourg. La région bilingue de Bruxelles-Capitale est composée des 19 communes bruxelloises, c’est-à-dire : Bruxelles (ville), Anderlecht, Auderghem, Berchem- Sainte-Agathe, Etterbeek, Evere, Forest, Ganshoren, Jette, Ixelles, Koekelberg, Molenbeek-Saint-Jean, Saint-Gilles, Saint-Josse-Ten-Noode, Schaerbeek, Uccle, Watermael-Boitsfort, Woluwe-Saint-Lambert, Woluwe-Saint-Pierre. La région de langue allemande est composée des 9 communes situées dans la province de Liège : Eupen, la Calamine, Lontzen, Raeren, Saint-Vith, Amblève, Bullange, Burg-Reuland, Butgenbach. Dans les 3 régions unilingues, la langue administrative des autorités doit être la langue de la région linguistique (respectivement le français, le néerlandais et l'allemand). Ce n'est qu'au sein de la région bilingue de Bruxelles-Capitale qu’on emploie le français et le néerlandais sur pied d'égalité. Remarque : dans certaines communes, il se peut qu’une partie importante de la population parle une autre langue que la langue officielle de cette commune (déterminée en raison de la région linguistique dans laquelle se trouve cette commune). Pour ces communes, le législateur a créé la notion de communes « à facilités »11. Au sein de ces communes à facilités, les avis, les communications et les formulaires doivent être établis dans la langue de la région linguistique dans laquelle se trouve ces communes, mais les citoyens ont la possibilité de demander que ces documents leur soient adressés dans une autre langue officielle du pays (il faut donc que ce soit le citoyen qui fasse la démarche auprès de son administration communale). Ces facilités s’appliquent uniquement aux citoyens et non à l’administration. 11 Il en existe 27 au total, les plus connues étant celles de la périphérie bruxelloise : Wemmel, Kraainem, Wezembeek- Oppem, Rhode-Saint-Genèse, Drogenbos et Linkebeek 51 3. Les composantes de l'État fédéral belge 3.1. L’Autorité fédérale, les 3 Communautés et les 3 Régions L'article 1er de la Constitution énonce que « la Belgique est un État fédéral qui se compose des communautés et des régions ». Dans l'État fédéral belge, les compétences sont partagées entre l'Autorité fédérale (l'état qui existait depuis 1831), les 3 Communautés et les 3 Régions. Il existe donc une Autorité fédérale à côté de laquelle les entités fédérées, c'est-à-dire les Communautés et les Régions, possèdent chacune leurs propres compétences et exercent ces compétences de manière totalement autonome (sans devoir rendre de compte à l’Autorité fédérale). Désormais, le pouvoir de décision n'appartient plus exclusivement au Gouvernement de l’autorité fédérale et au Parlement de l’autorité fédérale mais il est réparti (en fonction du territoire et de la matière concernée) entre les différentes composantes de cet État qui auront chacune leur propre Parlement et leur propre Gouvernement pour pouvoir exercer ces compétences. L’article 2 de la Constitution précise « La Belgique comprend trois communautés : la Communauté française, la Communauté flamande et la Communauté germanophone ». L’article 3 de la Constitution prévoit quant à lui que « La Belgique comprend trois régions : la Région wallonne, la Région flamande et la Région bruxelloise » Pourquoi avoir créé deux composantes (les Communautés et les Régions) à côté de l’Autorité fédérale ? La création de deux entités fédérées distinctes s’explique par les demandes de l’époque qui n’étaient pas identiques au nord et au sud du pays. Pour essayer de contenter tout le monde, il fut décidé de créé deux sortes d’entités fédérées (un exemple de « compromis à la belge »). La répartition des compétences entre ces différentes composantes de l'État fédéral a évolué à travers les réformes successives selon deux axes principaux : 52 Le premier axe se rattache à la langue et à la culture. Il y a en Belgique trois langues officielles : le néerlandais, le français et l'allemand. Pour répondre, dans les années ’70 à une exigence qui venait essentiellement des flamands, qui estimaient que la langue et la culture néerlandaises n’étaient plus suffisamment soutenues et représentées, on a créé le concept de « Communauté » qui renvoie aux personnes qui la composent et aux liens qui les réunissent, à savoir la culture et la langue. Les trois communautés ainsi créées ont principalement pour objectif de protéger l'identité culturelle de la population francophone, néerlandophone et germanophone. A l'origine, les compétences des communautés portaient uniquement sur la culture, mais elles évoluèrent par la suite. Le second axe de la réforme de l'Etat trouve ses fondements dans l'histoire et l'aspiration de certains à plus d'autonomie économique. Les « Régions » sont le fruit de ces aspirations qui émanaient essentiellement, à l’époque, des wallons. Les régions sont destinées à mieux rencontrer les particularités économiques de certains territoires. Les compétences des régions se rapportent par conséquent essentiellement aux matières économiques ou liées au territoire. En résumé : la Belgique est un État fédéral, c'est-à-dire que dans notre pays, le pouvoir décisionnel est partagé entre l'Autorité fédérale et les entités fédérées (Communautés et Régions). Ces trois types d’entités (Autorité fédérale, Communautés et Régions) agissent sur un pied d’égalité, chacune sur le territoire qui lui est attribué et dans les matières (compétences) qui lui sont attribuées. 3.2. Les entités décentralisées (ou entités subordonnées) Pour être tout à fait complet, il est important de préciser que la création de l’État fédéral (et donc des communautés et des régions à côté de l’autorité centrale) n’a pas fait disparaître les provinces et les communes. Celles-ci existent toujours à l’heure actuelle même si des réformes ont modifié leur nombre et leurs compétences. Ces provinces et ces communes sont des autorités décentralisées (subordonnées) qui doivent respecter les décisions prises par l’Autorité fédérale, les Communautés et les Régions qui leur sont supérieures. 53 3.2.1. Les provinces L'article 5 de la Constitution énonce que : « La Région wallonne comprend les provinces suivantes : le Brabant wallon, le Hainaut, Liège, le Luxembourg et Namur. La Région flamande comprend les provinces suivantes : Anvers, le Brabant flamand, la Flandre occidentale, la Flandre orientale et le Limbourg ». Jusqu’en 1994, la Belgique comptait 9 provinces. Depuis lors, le Brabant a été scindé en un Brabant flamand et un Brabant wallon. Il existe donc aujourd’hui 10 provinces. Quant aux 19 communes bruxelloises, elles n’appartiennent plus à aucune province. Le constituant a estimé qu’un tel niveau intermédiaire de pouvoir n’y était plus nécessaire, vu le caractère réduit du territoire bruxellois et la création de la Région bruxelloise (en tant qu’entité fédérée) qui exerce sa compétence sur le même territoire. 3.2.2. Les communes Aujourd’hui la Belgique est composée de 589 communes. Avant les réformes de 1977 et de 1983, elle en comptait 2.359. Chaque commune, à l’exception des 19 communes de Bruxelles-Capitale, fait partie d’une province. Chaque commune du Royaume fait partie d’une des 4 régions linguistiques. Le schéma de l'État fédéral est celui-ci : 3 Communautés - l’autorité fédérale - 3 Régions les Provinces ↓ les Communes 54 SECTION 3 : LES COMPÉTENCES TERRITORIALES (voir schémas page suivante) 1. L’Autorité fédérale L'autorité centrale exerce ses compétences sur l'ensemble du territoire de la Belgique. 2. Les Communautés C'est à partir de la langue qu'on a fixé les compétences territoriales des trois Communautés. La Communauté flamande est compétente pour la région de langue néerlandaise et les 19 communes bruxelloises pour ce qui concerne les institutions néerlandophones (ex : écoles, ASBL, etc.). La Communauté française (appelée désormais Fédération Wallonie-Bruxelles) est compétente pour la région de langue française et les 19 communes bruxelloises pour ce qui concerne les institutions francophones (ex : école, ASBL, etc.). La Communauté germanophone est compétente pour la région de langue allemande. 3. Les Régions Les trois Régions sont délimitées d'après le territoire. Le territoire de la Région flamande comprend les provinces de Flandre orientale, Flandre occidentale, Anvers, Limbourg, Brabant flamand. Elle correspond au territoire de la région de langue néerlandaise. Le territoire de la Région wallonne comprend les provinces de Liège, Namur, Hainaut, Luxembourg et Brabant wallon. Elle couvre les régions de langue française et de langue allemande. Le territoire de la Région bruxelloise comprend les 19 communes bruxelloises : Bruxelles (ville), Anderlecht, Auderghem, Berchem-Sainte-Agathe, Etterbeek, Evere, Forest, Ganshoren, Jette, Ixelles, Koekelberg, Molenbeek-Saint-Jean, Saint-Gilles, Saint-Josse-Ten- Noode, Schaerbeek, Uccle, Watermael-Boitsfort, Woluwe-Saint-Lambert, Woluwe-Saint- Pierre. 55 Le territoire de la Région bruxelloise comprend les 19 communes bruxelloises 56 SECTION 4 : LES COMPÉTENCES MATÉRIELLES 1. Le principe de l’exercice exclusif des compétences par chaque entité Lorsqu’une compétence est attribuée à une entité (l’état fédéral, les régions ou les communautés), elle l’est de manière EXCLUSIVE, ce qui veut dire que seule cette entité sera compétente pour légiférer (voter des lois, des décrets ou des ordonnances) dans cette matière qui lui est attribuée, à l’EXCLUSION des autres entités. Exemple : l’enseignement est une compétence qui a été attribuée aux Communautés. Seuls les parlements des Communautés peuvent donc adopter des décrets organisant la manière dont l’enseignement sera dispensé sur le territoire de chacune des trois Communautés. 1ère conséquence : l’Autorité fédérale et les Régions ne peuvent pas adopter de lois ni de décrets en matière d’enseignement. 2ème conséquence : la compétence de l’enseignement ayant été attribuée aux Communautés, les règles en matière d’enseignement ne sont pas identiques sur tout le territoire de la Belgique : les écoles se trouvant en région de langue néerlandaise sont soumises aux décrets du Parlement flamand, les écoles se trouvant en région de langue française sont soumises aux décrets du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles et les écoles se trouvant sur la région de langue allemande sont soumises aux décrets du Parlement de la Communauté germanophone. Depuis la création de l’État fédéral en 1970, dès lors que l’Autorité fédérale possédait toutes les compétences entre ses mains, c’est elle qui a, au fil des réformes institutionnelles (= modifications de la Constitution), transféré certaines de ses compétences au profit des Communautés et des Régions qui sont désormais les seules à pouvoir décider dans ces matières (= principe de l’exercice exclusif des compétences). Actuellement, il revient encore à l’Autorité fédérale de prendre en charge toutes les compétences qu’elle n’a pas transférées aux communautés et aux régions. On appelle ces compétences les « compétences résiduelles » (c’est-à-dire celles qui n’ont pas été 57 désignées expressément dans la Constitution12 comme étant attribuées aux Communautés, aux Régions ou à l’Autorité fédérale). L’article 35 de la Constitution prévoit toutefois qu’il faudra, à terme, que le système soit inversé. A ce moment-là, l’autorité fédérale ne pourra plus exercer d’autres compétences que celles qui seront expressément désignées dans la Constitution 13 et toutes les autres compétences (les compétences résiduelles) seront exercées soit par les Communautés, soit par les Régions. 2. Les compétences de l’Autorité fédérale L'autorité fédérale exerce actuellement les « compétences résiduelles », c’est-à-dire qu’elle est compétente dans toutes les matières non attribuées aux communautés et régions, comme : les matières dites « d'autorité » : la justice, la défense nationale (l’armée), la police fédérale, la politique étrangère, les règles qui régissent l'état civil et la nationalité, l'accès au territoire, le séjour et l'établissement des étrangers. Dans ces matières, il est plus cohérent que l’ensemble du territoire belge (et donc tous les citoyens) soit soumis aux mêmes règles. certaines matières du domaine social : la sécurité sociale, les allocations de chômage, les pensions, la santé publique… certaines matières économiques : les communications (le marché des télécommunications et le marché postal), les lo

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