Pédagogie adaptée aux élèves avec autisme (Manuel complémentaire TEACCH) PDF

Summary

Ce manuel détaille une pédagogie adaptée aux élèves avec autisme. Il aborde les besoins particuliers de ces élèves, ainsi que des stratégies de structuration du temps et de l’espace. Il propose également des outils de communication augmentatifs et des exemples pratiques. L'ouvrage convient aux équipes pédagogiques.

Full Transcript

à la fo rmation TEACCH m e n ta ire Manuel complé Pour une pédagogie adaptée aux élèves avec autisme Monique Deprez Table des matières Introduction...

à la fo rmation TEACCH m e n ta ire Manuel complé Pour une pédagogie adaptée aux élèves avec autisme Monique Deprez Table des matières Introduction 4 1. Les besoins des élèves présentant un trouble du spectre de l’autisme 7 1.1. Besoin d’individualisation......................................................................................................................... 7 1.2. Besoin de visualisation.............................................................................................................................. 8 1.3. Besoin de structure..................................................................................................................................... 9 1.4. Besoin de cohérence................................................................................................................................. 10 2. Le P.I.A. 22 2.1. Portrait de l’élève....................................................................................................13 2.2. Choix des priorités..................................................................................................15 2.3. Opérationnalisation des objectifs...........................................................................16 2.4. Evaluation................................................................................................................20 3. La structuration de l’espace 22 4. La structuration du temps 33 4.1. Horaires individualisés..........................................................................................33 4.2. Planification des activités.......................................................................................39 4.3. Gestion de la durée.................................................................................................41 5. La conception et la préparation des activités 43 5.1. Activités individuelles..............................................................................................43 5.2. Le système de travail..............................................................................................44 5.3. Activités collectives.................................................................................................49 6. Les principes d’apprentissage 51 6.1. Le modèle ABC........................................................................................................51 6.2. Amélioration des compétences..............................................................................52 SUSA 2 7. Les outils de communication augmentatifs ou alternatifs 59 7.1. Communication réceptive.......................................................................................59 7.2. Communication expressive.....................................................................................65 7.3. Utilisation des nouvelles technologies...................................................................68 8. Le développement de la socialisation 69 8.1. Valorisation des rôles sociaux.................................................................................69 8.2. Interactions avec les pairs...............................................................................................71 9. Les comportements-défis 73 9.1. Analyse fonctionnelle..............................................................................................73 9.2. Stratégies d’intervention................................................................................................74 10. La collaboration parents-équipe éducative 79 10.1. Contrat explicite....................................................................................................79 10.2. Différents modes de collaboration................................................................................80 11. La coordination de l’équipe 83 11.1. Les outils légaux...................................................................................................83 11.2. Réunions efficaces................................................................................................84 11.3. Définition des rôles et répartition des activités.............................................................87 12. L’inclusion dans l’enseignement ordinaire 91 13. L’autoévaluation des pratiques 95 14. Ressources complémentaires 101 15. Référérences bibliographiques 103 16. Annexes 105 3 SUSA SUSA 4 Introduction Depuis 1988, il existe en Belgique francophone des classes accueillant des élèves avec autisme dans l’enseignement spécialisé, se référant au programme TEACCH*. En 2009, la circulaire 2876 définit les règles d’organisation de la pédagogie adaptée pour élèves avec autisme. Elle recommande, entre autres, qu’au moins un membre du personnel des établissements organisant une telle pédagogie ait bénéficié d’une formation « TEACCH », préconisée par la pédagogie SCHOPLER ou d’une autre formation dans le domaine de l’autisme. Ces formations sont organisées chaque année par l’Institut de la Formation en cours de Carrière (IFC). Les assurant depuis de nombreuses années, ainsi que le suivi de classes à pédagogie adaptée sur le terrain, nous avons pu constater le besoin des intervenants de disposer d’outils pratiques, les soutenant dans la mise en œuvre des différentes dimensions du programme TEACCH. Ce manuel a pour but d’aider les équipes, souhaitant utiliser les pratiques pédagogiques adaptées aux élèves avec autisme, à répondre aux questions souvent posées en fin de formation : par quoi commencer ? Comment organiser tout cela ? Comment font les autres ? Il est donc principalement destiné aux intervenants souhaitant utiliser les principes de l’approche TEACCH et ayant déjà suivi cette formation. « Je veux aménager ma classe pour que mes élèves présentant un trouble du spectre autistique (TSA) s’y sentent bien et apprennent le mieux possible. Par quoi commencer ? » Cette question peut amener de multiples réponses, mais il nous semble important d’apprendre au plus tôt à connaître chacun des enfants ou adolescents qui fréquentent la classe, afin de répondre à ses besoins de manière optimale. Les chercheurs et les professionnels de terrain ont pu dégager un certain nombre de règles générales pour le quotidien, étayées par l’évolution des connaissances en neuropsychologie. Cet ouvrage ne se veut pas théorique (de nombreuses références portant sur l’autisme peuvent être consultées par ailleurs). Il ne reprend pas in extenso le contenu de la formation TEACCH, mais se veut un complément à celle-ci, en étant le plus concret possible, illustré par des photos provenant de classes utilisant au quotidien les stratégies proposées par l’approche TEACCH. Il s’adresse aussi bien aux équipes de l’enseignement spécialisé qu’à celles de l’enseignement ordinaire soucieuses de pratiques inclusives. Il se base sur notre expérience de près de 30 ans de supervision de classes et d’animation de formations et passe donc en revue les différents domaines considérés comme essentiels pour une action éducative adéquate auprès des jeunes avec autisme. Nous sommes bien conscients que d’autres approches sont possibles pour travailler avec des élèves présentant un TSA. Les intervenants désireux de s’en informer pourront se tourner vers d’autres sources, notamment avec l’aide des conseillers pédagogiques de leur réseau. *TEACCH = Treatment and Education of Autistic and related Communication handicapped CHildren - Traitement et éducation des enfants avec autisme ou présentant des troubles de la communication apparentés. Programme créé en Caroline du Nord au début des années 70. 5 SUSA Nous remercions les professionnels qui nous ont procuré les nombreuses photos qui enrichissent ce manuel, particulièrement les équipes des écoles suivantes : Ados Pilifs à Neder-Over-Hembeeck et Les Astrôn’autes à Ixelles, grâce à l’aide précieuse de Catherine Magerotte et Anne Caillaud du SUSA-Bruxelles ; Le Caillou à Anseremme ; Les Co’Kain à Kain ; La classe l’Envol de l’école Les Forges à Ciney ; L’institut Mariette Delahaut à Jambes ; L’IMP René Thône à Marcinelle. Merci à Marie-Françoise Blondiau pour sa lecture attentive et à Eric Willaye qui a rendu ce travail possible. Egalement un grand merci à Véronique Herman pour la mise en page de ce document et à son travail d’infographie. Enfin, nos remerciements vont aussi au Ministère de l’Education de la Fédération Wallonie-Bruxelles, qui a subventionné la rédaction de ce manuel. SUSA 6 1 Les besoins des élèves présentant un trouble du spectre de l’autisme Si nous parlons d’élèves, c’est parce que cet ouvrage s’adresse en priorité aux équipes éducatives des établissements scolaires. Mais les besoins que nous évoquons ci-dessous ne sont pas spécifiques au contexte de l’école. Ils se manifestent également en famille et dans les différents milieux que peut fréquenter tout un chacun. Ils apparaissent très tôt dans la vie du jeune enfant et sont encore présents lorsque celui-ci atteint l’âge adulte, même s’ils évoluent. 1.1. Besoin d’individualisation Que vous ayez dans votre classe un seul enfant ou adolescent porteur d’un TSA (Trouble du Spectre Autistique) ou plusieurs, dites-vous que chacun d’eux est unique, bien qu’il ait le même diagnostic que des milliers d’autres jeunes ou adultes. Marianne, professeur de cours généraux, va enseigner pour la première fois dans une classe composée de jeunes adolescents présentant de l’autisme. Comme ses collègues lui ont dit que la plupart d’entre eux aiment la musique, elle a décidé de mettre de la musique douce pendant leur temps de travail individuel. Or, dès que le son commence à se diffuser dans le local, Pierre se bouche les oreilles en gémissant, Léon se lève et va coller son oreille contre l’enceinte tandis que Benoît se met à se balancer. Les 4 autres élèves continuent à travailler calmement. Comme l’illustre cet exemple, les réactions à une même situation peuvent être très diverses, en raison, notamment, de sensibilités sensorielles différentes. Dans d’autres cas, c’est peut-être le niveau de tolérance au changement, variable d’un individu à l’autre, qui expliquera des réactions contrastées. Il est donc très rare que l’on puisse être pertinent en proposant la même activité, présentée de la même manière, à l’ensemble des élèves d’une classe. Les intérêts, le niveau de compréhension, le traitement moteur, sensoriel et cognitif des informations propres à chacun nécessiteront des adaptations pour que tous atteignent les objectifs visés. Les deux activités page suivante proposent à deux élèves de reconstituer des images, mais l’un d’eux manipule et juxtapose les moitiés d’images d’objets de la vie quotidienne, tandis que l’autre reconstitue des papillons - ce qui exige une observation beaucoup plus fine - via une tâche papier/crayon. 7 SUSA Reconstituer des images d’objets Joindre les 2 parties d’un papillon Source : Les AsTrôn’autes Source : Récré Juniors – Ce besoin d’individualisation est à prendre en compte dans tous les domaines, y compris lorsque les intervenants veulent répondre aux autres besoins, dont nous allons parler ci- dessous : deux élèves de la même classe n’utiliseront pas les mêmes supports visuels ou n’auront pas un espace de travail structuré de manière identique. 1.2. Besoin de visualisation Le jour de la rentrée, Madame a expliqué aux enfants de la classe qu’en arrivant à sa place, chacun doit enlever de son cartable le matériel scolaire dont il a besoin pour la journée : sa trousse, son journal de classe, son classeur. Au bout de quelques jours, tous les enfants ont bien assimilé la consigne, sauf Jean, à qui l’on doit la rappeler chaque matin. Une des difficultés majeures des personnes ayant un TSA est d’intégrer l’information qui leur est donnée oralement et d’en tenir compte de manière durable. Il ne s’agit pas de distraction ou de mauvaise volonté comme on pourrait le penser, mais d’un dysfonctionnement, que l’on doit compenser. Lasse de répéter chaque jour la même chose à Jean, Madame a collé ceci sur son bureau : Les rappels ont dès lors été beaucoup moins fréquents. Beaucoup de situations problématiques peuvent être résolues ou du moins améliorées grâce à l’utilisation de supports visuels. SUSA 8 Pensez-y : « Mieux vaut voir une fois qu’entendre cent fois » (proverbe asiatique). Une question essentielle à se poser est la suivante : quel type de support va être compris par tel élève en particulier ? Les jeunes dont la déficience intellectuelle est importante, ou qui sont gravement malvoyants, ne comprendront pas les pictogrammes que leur voisin de bureau utilise peut-être sans problème. L’adaptation des outils utilisés aux caractéristiques individuelles va être constante dans la mise en place d’un environnement structuré. On tiendra compte également de l’évolution de chacun des jeunes, ce qui impliquera aussi des aménagements réguliers des aides proposées. 1.3. Besoin de structure Parmi les personnes présentant un TSA, certaines sont capables d’exprimer ce qu’elles ressentent. Elles expliquent qu’elles ont souvent l’impression de vivre dans un environnement chaotique, qui les bombarde de mille stimulations. Les rituels ou stéréotypies dans lesquels beaucoup d’entre elles semblent se complaire peuvent avoir pour fonction d’échapper à ce chaos. De passage dans une cour d’école à l’heure de la récréation, un visiteur a l’attention attirée par quelques enfants paraissant particulièrement perturbés, l’un courant en agitant les mains à hauteur des yeux, un autre se donnant des claques retentissantes et un troisième assis en boule sur le sol, complètement replié sur lui-même. Visitant ensuite leur classe, il a la surprise de retrouver ces mêmes élèves assis chacun à leur table de travail, occupés à leurs activités et enchaînant celles-ci de manière complètement autonome. La constitution d’un environnement structuré a pour but de mettre un peu d’ordre dans les stimuli que reçoit la personne vivant avec un TSA et de l’apaiser en clarifiant l’organisation de l’espace, du temps et des activités. Ce besoin de structure devrait être satisfait non seulement dans le local de classe, mais dans toute situation où il est souhaitable de procurer à la personne atteinte d’autisme un sentiment de mieux-être, qui lui permet de s’ouvrir à son environnement. La photo ci-dessous illustre comment, au cours de gymnastique, l’enseignant indique visuellement à chaque élève le nombre de culbutes à effectuer (un post-it rose par culbute). Il précise le point de départ par un cône vert et le point d’arrivée par un cône orange. 9 SUSA Aide visuelle au cours de gymnastique Source : Les Co’Kain - 1.4. Besoin de cohérence Il semble naturel à tous qu’une personne à mobilité réduite dispose d’un fauteuil roulant pour tous ses déplacements, ou qu’une personne souffrant de troubles visuels porte des lunettes chaque fois qu’elle en a besoin. De la même manière, les personnes présentant un TSA devraient disposer des outils qui les aident quels que soient les contextes et leurs interlocuteurs. C’est pourquoi il est important que la mise en place d’une pédagogie adaptée aux besoins des élèves avec autisme constitue une décision d’équipe, et que les parents y soient associés. Sans une cohérence entre les divers intervenants que côtoie chaque jeune, les probabilités d’évolution positive s’amenuisent. Mais il est également important que chaque intervenant soit constant dans ses attitudes et ses stratégies. Le matin, Hélène prépare l’horaire individualisé de ses élèves, et les incite à l’utiliser chaque fois qu’ils changent de lieu d’activité. L’après-midi, comme elle propose un fonctionnement plus relax, davantage centré sur les loisirs et la socialisation, elle donne simplement des indications orales sur ce qui va se passer. Elle constate que certains d’entre eux sont beaucoup plus agités, refusant les jeux proposés ou demandant sans cesse quand leur maman va arriver. Elle attribue ces réactions à la fatigue. En procurant aux personnes avec un TSA les outils qui les aident à se sentir mieux, on leur donne accès à un fonctionnement plus harmonieux et à davantage d’indépendance. Mais si l’accès à ces aides est irrégulier, instable, cela peut renforcer chez elles un sentiment d’insécurité. Chaque intervenant a donc à s’interroger sur la cohérence de SUSA 10 ses propres comportements. Le P.I.A. (Plan Individuel d’Apprentissage), l’un des outils permettant, entre autres, l’amélioration de la cohérence des actions éducatives, est développé dans les pages suivantes. 11 SUSA SUSA 12 2 Le Plan Individuel d’Apprentissage ou P.I.A. Bien que le Plan Individuel d’Apprentissage soit explicité dans de nombreux documents et formations, il ne semble pas inutile de rappeler pourquoi et comment il occupe une position centrale dans le travail avec les élèves présentant un TSA, comme pour les autres jeunes de l’enseignement spécialisé. (Décret Enseignement spécialisé du 03/03/2004 - Article 4 - 19°, Articles 32 et 80 - § 3, 5). Suivant les réseaux ou les écoles, la forme du PIA peut varier, les termes utilisés également. Les propositions développées dans ce chapitre ne sont pas à considérer comme des prescriptions. Elles visent avant tout à rappeler le sens, la philosophie de cet outil qu’est le PIA et à en faciliter l’utilisation au quotidien. Nous savons que les besoins de nos élèves sont multiples et que le champ des apprentissages à mettre en œuvre pour développer au mieux leurs potentialités est très vaste. Le rôle du P.I.A. est de nous aider à répondre à la question suivante : « A ce moment de la vie de tel enfant, de tel adolescent, qu’est-ce qui pourrait contribuer le plus à améliorer sa qualité de vie et celle de son entourage ? » Pour que la réponse soit satisfaisante et débouche sur des actions efficaces, quelques étapes sont à respecter. 2.1. Portrait de l’élève Que l’élève soit arrivé récemment dans une classe, ou qu’il la fréquente depuis une ou plusieurs années, il est utile de réaliser une synthèse de ce que nous savons de lui. Ce portrait peut prendre différentes formes, l’essentiel étant qu’y figurent ses intérêts, ses points forts et ses besoins, tels qu’ils sont perçus par les principales personnes concernées par son évolution : lui-même, ses parents et les autres acteurs de son éducation, enseignants, éducateurs ou paramédicaux. Cette étape de l’élaboration du P.I.A., comme les suivantes, peut être réalisée de manière à apporter des informations utiles sans pour autant être (trop) mangeuse de temps et de papier ! Trois questions, auxquelles répondra chacun des acteurs du P.I.A., peuvent suffire pour récolter les informations nécessaires : Qu’est-ce qui va bien, de quoi suis-je content (points forts) ? Qu’est-ce qui pose problème ou pourrait être amélioré (besoins) ? Quels seraient les apprentissages les plus utiles (besoins) ? 13 SUSA SUSA 14 Amine Autres Parents Titulaire Logo (16 ans) professionnels Aime l’école Gentil, poli Souriant Intéressé par Collaborant avec beaucoup de les adultes Fort en gym, en Aime aider Motivé choses sport Très résistant phy- Débrouillard Se fait Fait des efforts siquement Adore comprendre avec pour s’exprimer la musique des mots isolés Se fait Aime comprendre Points forts Aime cuisiner Peut dire ce qu’il la musique aime/n’aime pas Réagit positivement aux félicitations Rester assis plus Être plus calme Etre plus calme Bouger Être plus calme longtemps Faire des choses Accepter les inte- Développer son Collaborer avec les Etre plus calme avec ses frères et ractions avec les langage autres élèves sœurs autres jeunes Besoins Apprentissages Cuisiner seul Un métier Finir un travail Faire des phrases Finir un travail à envisager dessous présente l’exemple de la synthèse concernant Amine, un adolescent de 16 ans. la charge de travail ne doit donc pas reposer sur les épaules du titulaire. Le tableau ci- une forme claire et pouvant être parcourue rapidement. Il nous semble important de souligner ici que tous les membres du conseil de classe sont concernés par le PIA. Toute Le titulaire ou directeur de classe aura ensuite la tâche de présenter les réponses sous On remarquera que dans ce tableau, il n’est pas fait mention de difficultés ou de problèmes. Cela ne signifie pas que cet élève n’en vit pas, mais le fait de les formuler en termes de besoins permet de se centrer plus facilement sur une démarche constructive. Toutes les difficultés mentionnées couramment dans les conseils de classe ou autres réunions formelles ou informelles peuvent être traduites en besoins : Difficultés Besoins possibles Il crie pour un rien S’exprimer adéquatement Gérer son alimentation Il chipe la nourriture Savoir ce qui lui appartient Elle ne veut pas entrer ou sortir de la Gérer les transitions classe Avoir d’autres activités que le papier/crayon Il déchire toutes ses feuilles d’exercices Respecter le matériel 2.2. Choix des priorités Il est difficilement envisageable de répondre simultanément à tous les besoins et de mener tous les apprentissages envisagés par chacun des partenaires du P.I.A. Cela risque de demander beaucoup d’efforts de la part de l’élève et s’avérer irréaliste pour les intervenants. Ceux-ci doivent en effet prendre en compte les besoins de tous leurs élèves et s’organiser de manière à « tenir sur la longueur ». Il est donc important de se fixer des priorités en revenant à la question initiale « qu’est- ce qui est le plus important pour ce jeune en vue d’améliorer sa qualité de vie actuelle ou future ? » Il est intéressant de voir si les besoins mentionnés par les divers acteurs se rejoignent ou peuvent être complémentaires. Dans l’exemple d’Amine (voir tableau de synthèse à la page précédente), le besoin d’être plus calme est mentionné par tout le monde, sauf la logopède qui évoque le besoin de bouger. En discutant, chacun arrive à admettre que, pour le bien-être d’Amine, il est important qu’il puisse avoir suffisamment d’exercice physique et être souvent en mouvement, mais que pour son acceptation sociale et ses apprentissages, il est nécessaire qu’il puisse rester en place et attentif durant de plus longues périodes. Le besoin prioritaire qui s’en dégage est la modulation de son activité physique. 15 SUSA Arriver à dégager un ou des besoins prioritaires constitue une étape à ne pas négliger, car elle permet d’envisager la situation de l’enfant ou de l’adolescent d’un point de vue plus large. Un besoin peut déboucher sur des objectifs multiples, s’enrichissant mutuellement. Alors que si nous nous fixons trop rapidement sur un objectif précis, nous risquons de laisser échapper les opportunités de développement de certaines dimensions. Continuons à examiner l’exemple d’Amine. En déterminant comme besoin prioritaire la modulation de son activité physique, on en arrive à fixer des objectifs complémentaires, tels que : Rester assis durant au moins 15 minutes lors des activités à sa table de travail Avoir 3 périodes de 15 minutes d’activité physique chaque jour (vélo d’appartement, trempoline, tours de cour ou de salle de gym en courant) Passer dans les classes pour faire le relevé des présences chaque matin 2.3. Opérationnalisation des objectifs Souvent, le P.I.A. est considéré par les équipes éducatives comme un outil peu intéressant parce que les objectifs n’ont pas été clairement rédigés. Pour que le travail puisse se faire concrètement, les objectifs doivent répondre à certaines caractéristiques, dont la première est qu’ils soient formulés de manière positive, observable et mesurable. Positive : on bannit donc toutes les formules utilisant les « ne pas », « ne plus », et autres formules négatives. Lorsqu’on se centre sur des objectifs visant à intervenir à propos de troubles du comportement, on cherchera à mettre en place l’apprentissage de conduites adaptées : A éviter Ecrivez plutôt Ne jettera plus son assiette s’il n’a plus Repoussera son assiette s’il n’a plus faim faim Ne poussera plus les autres enfants à la Enchaînera 3 jeux figurant dans son récréation carnet de loisirs durant les récréations SUSA 16 Observable : la compétence ou le comportement que l’élève doit acquérir est exprimé de manière concrète, pouvant être représentée visuellement : A éviter Ecrivez plutôt Il exprimera sa colère ou sa tristesse Il maîtrisera ses émotions verbalement ou avec un pictogramme Il sera plus autonome dans ses Il se déplacera seul à l’intérieur de l’école déplacements Mesurable : la formulation des objectifs telle qu’elle est proposée dans les exemples ci-dessus permet de compter le nombre de fois où le comportement ciblé est adopté par l’élève au cours d’une période donnée. Elle rend donc plus aisée et fiable l’évaluation que nous abordons ci-dessous. Pour être prête à travailler les objectifs ainsi définis, l’équipe éducative doit également préciser qui s’y impliquera, à quels moments, de quelle manière et avec quel critère de réussite. Celui-ci précise à partir de quel moment l’équipe va considérer que l’objectif est atteint. Généralement, cela implique que l’élève réussisse l’activité cible un certain nombre de jours successifs. Lorsque le critère de réussite est atteint, on peut fixer un nouvel objectif et ainsi optimiser l’évolution du jeune. 17 SUSA Le tableau suivant donne un exemple de synthèse de ces éléments. Besoins Objectifs Moments Moyens prioritaires Moduler son Rester assis durant au Travail individuel du Pictogramme « rester activité physique moins 15 minutes lors matin + assis » devant lui. de manière des activités à table Collation + repas + Au début : timer. autonome travail collectif après- Renforçateur : smiley midi avec cadeau en fin de semaine si 15 smileys obtenus Avoir 3 périodes de Après le travail Pictogramme à insérer 15 minutes d’activité individuel du matin, dans son horaire + timer physique chaque jour avant et après le travail (vélo d’appartement, collectif trempoline, tours de cour ou de salle de gym en courant) Passer dans les classes Avant le T.I. du matin Pictogramme à insérer pour faire le relevé des dans son horaire présences chaque matin SUSA 18 Critères de réussite Responsable Date début Date évaluation + Intervenants Ok tous les jours pendant 2 Titulaire + éducateur 02/10/2017 13/11/2017 semaines Horaire et timing respecté Titulaire 25/09/17 13/11/2017 durant 2 semaines Effectué correctement Secrétaire 25/09/17 16/10/2017 durant 2 semaines En guise de rappel, et aussi pour informer les intervenants occasionnels, les objectifs de chaque élève sont parfois affichés dans un endroit bien visible de la classe : Affichage des objectifs de chaque élève Source : Les AsTrôn’autes 19 SUSA 2.4. Evaluation Afin de vérifier si l’élève progresse dans la réalisation de ses objectifs, il est important d’évaluer régulièrement de manière formelle, c’est-à-dire en prenant des notes. Certains jeunes sont capables de s’autoévaluer si vous leur préparez une fiche attrayante. Amine : Rester assis durant au moins 15 minutes lors des activités à table – 2 au 5/10/2017 Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi T.I. matin - - - Collation Repas - - T.C. après-midi - - Total de la semaine 10 Dans cet exemple, Amine colle (ou dessine) un smiley chaque fois qu’il est resté assis au moins 15 minutes. Il fait un petit trait s’il n’y est pas arrivé, ce qui est un signe neutre, moins perturbant qu’un smiley mécontent ou une gommette rouge. Ce type de tableau constitue pour lui à la fois un rappel et une motivation à progresser. De plus, il apprend à s’autoévaluer, ce qui est une compétence importante à acquérir. Tous les élèves n’ont cependant pas la possibilité de s‘autoévaluer. C’est alors l’intervenant impliqué dans l’activité qui remplira la fiche d’observation. Le même type de fiche peut être utilisée, les smileys pouvant être remplacés par un « + » ou autre symbole manifestant la réussite, l’essentiel étant que la notation soit facile et rapide. SUSA 20 Lors des réunions d’évaluation, il suffira dès lors de calculer la proportion de réussites pour se rendre compte de l’évolution de l’élève. Dans l’exemple ci-dessus, Amine obtient 10 réussites/18. Il sera facile de vérifier s’il progresse au fur et à mesure des semaines. Si ce n’est pas le cas, quelques questions permettront de réajuster l’apprentissage : ➜ Le niveau de difficulté est-il adéquat ? ➜L  e renforçateur est-il suffisamment attractif ? (L’utilisation des renforçateurs est développée en page 57) ➜ Le renforçateur n’est-il pas trop éloigné dans le temps ? ➜ L’espace, le temps, l’activité sont-ils suffisamment structurés ? Les chapitres suivants vont illustrer l’importance de ces différents éléments. Rappel ! Au niveau secondaire, un Plan Individuel de Transition (PTI) doit être élaboré pour chaque adolescent ( Décret Enseignement spécialisé, article 4, 30°). Il vise à préparer avec lui son insertion dans le monde adulte. Le PTI s’intègrera dans le PIA. 21 SUSA SUSA 22 3 La structuration de l’espace Au début de ce manuel, nous avons mis en évidence les principaux besoins des personnes vivant avec un TSA : individualisation, visualisation, structure et cohérence. Ces besoins devront être pris en compte pour organiser l’espace de la classe, de même que les objectifs poursuivis pour chacun des élèves. Nous distinguons ci-dessous la situation des classes à pédagogie adaptée, accueillant une majorité d’élèves avec un TSA, de celle des classes, que fréquentent un ou deux élèves avec un TSA parmi des jeunes « tout venant ». Quels sont les grands domaines qui guident le choix des activités mises en place au sein de la classe ? Le développement de nouvelles compétences, l’acquisition de l’indépendance au travail, l’équilibre entre travail et loisirs, l’autonomie personnelle et résidentielle, l’apprentissage de la vie en collectivité et de comportements socialement adaptés, … L’aménagement de la classe vise à faire comprendre aux élèves, en tenant compte de leurs caractéristiques, ce qui est attendu d’eux dans chacun des espaces fréquentés. Il permet également que les élèves soient occupés, à un même moment, à des activités différentes. Le plan ci-dessous donne une illustration d’une telle organisation de l’espace. Il comprend au sein de la classe : ➜ Un espace d’apprentissage ; dans le plan ci-dessous, il se situe au bureau de l’enseignant (en bas à droite du plan), mais il peut s’agir d’une table consacrée uniquement aux moments où un intervenant et un élève travaillent ensemble à un apprentissage. Dans certaines classes, cet endroit est appelé le « Face à Face ». ➜ Des espaces de travail autonome ; comme leur nom l’indique, les élèves sont censés y travailler seuls, sans la présence d’un intervenant à leurs côtés. Cela signifie qu’on leur propose à cet endroit des tâches qu’ils maîtrisent et sont donc capables de réaliser sans aide. Suivant les caractéristiques de l’élève, cet espace sera dépourvu de toute stimulation susceptible de le distraire. Dans le cas ci-dessous, 3 de ces espaces sont disposés de telle manière que l’élève soit face au mur lorsqu’il travaille. Par contre, pour les élèves ayant de bonnes capacités de concentration, il n’est pas nécessaire de les isoler dans de telles conditions. Il est au contraire intéressant qu’ils puissent travailler dans un environnement le plus « ordinaire » possible. Comme le montre le plan, 4 élèves peuvent très bien travailler de manière autonome à la même table. 23 SUSA SUSA 24  Un espace dédié aux activités collectives, qu’elles soient cognitives, manuelles ➜ ou de socialisation. Il est intéressant d’y prévoir, plutôt qu’une seule grande table, plusieurs petites tables qui peuvent être séparées ou assemblées en fonction des activités. En effet, les activités collectives peuvent regrouper seulement une partie des élèves et il est alors souvent judicieux de séparer les sous-groupes. ➜ Un espace de loisirs, dans lequel les besoins et intérêts divers seront rencontrés : activités physiques, jeux calmes, musique, etc. Le matériel et le mobilier seront adaptés à l’âge des élèves. Dans le plan, les pointillés représentent un tapis sur lequel les jeunes enfants peuvent s’asseoir pour jouer. Il sera parfois nécessaire que cet espace soit plus nettement délimité, par exemple par une corde ou une barrière. Une table est également prévue pour des jeux qui demandent une surface plus ferme comme les puzzles. ➜ Plusieurs espaces de rangement ; l’ordre constitue un aspect important de la structure physique. Attribuer une place clairement identifiée à chaque objet, avoir un système de rangement clair favorise le calme et l’indépendance de chacun. Dans la plupart des classes à pédagogie adaptée aux élèves avec autisme, les armoires ou étagères servent également de séparation entre les différents espaces. Les espaces suivants peuvent se situer en dehors de la classe, en fonction des caractéristiques des élèves et/ou de l'espace disponible. ➜ Une table de collation ; selon les écoles, le moment de ces collations peut varier : soit en début de matinée pour un petit déjeuner lorsque les élèves ont eu un long trajet, soit avant ou après la récréation. Certains groupes y prennent même le repas de midi, le lieu étant plus propice aux apprentissages que le réfectoire de l’école, souvent très bruyant. ➜ Un espace cuisine ; il peut comprendre un évier, des plaques chauffantes, un four à micro-ondes, etc. Il permet de réaliser des apprentissages d’autonomie domestique. ➜ Un espace d’accueil ; il est le plus souvent utilisé pour les rituels du matin et l’évaluation de la journée avant le départ. Il peut aussi servir de lieu d’attente avant les sorties ou d’espace de transition, où seront affichés les horaires individualisés. ➜ Un espace hygiène ; il n’est pas nécessairement intégré dans la classe, mais il est intéressant qu’il soit situé à proximité de celle-ci pour les apprentissages tels que se laver les mains ou se brosser les dents et la propreté sphinctérienne. Certaines écoles ont même une douche à disposition. 25 SUSA Les photos ci-dessous illustrent ces aspects de la structuration de l’espace. Structure de l’espace de la classe Source : Les Co’Kain – Nous voyons sur cette photo comment l’aménagement de la classe facilite la différenciation : un élève a une séance d’apprentissage avec l’enseignante, trois autres ont un apprentissage collectif avec une autre intervenante, tandis que les trois derniers sont en travail autonome dans leur espace individuel. L’enseignante est placée de manière à garder un contrôle visuel sur les jeunes travaillant de manière autonome. Ci-dessous, l’espace de travail individuel est dépourvu de tout élément de distraction Espace de travail autonome Source : Les AsTrôn’autes La photo suivante illustre le fait qu’il est parfois nécessaire que l’espace d’apprentissage SUSA 26 (Face à Face) soit lui aussi situé dans un endroit pauvre en stimulation, afin de favoriser la concentration de l’élève. Espace de travail Face à Face Source : Institut Mariette Delahaut – L’espace cuisine où on apprend, notamment, à faire la vaisselle. Espace cuisine Source : Le Caillou 27 SUSA Ci-dessous, dans un local assez exigu, le même espace sert à l’accueil et aux loisirs : Espace de loisirs/ d’accueil Source : IMP René Thone L’espace loisirs suivant propose différents types d’activités sans pour autant être surchargé : encastrement mural géant, grande boîte où se cacher, ballons, petites voitures, etc. Espace loisirs Source : Les AsTrôn’autes SUSA 28 Sur la photo suivante, on peut voir que l’équipe a organisé un espace bibliothèque : chaque élève peut trouver, dans un bac portant son prénom et sa photo, des livres qui l’intéressent. Il s’installe sur le fauteuil pour lire durant un temps déterminé. Le même principe de personnalisation peut être adopté avec des jeux. Espace bibliothèque Source : Institut Mariette Delahaut L’ordinateur peut être utile aussi bien pour des activités d’apprentissage que comme loisir. Il est présent dans de nombreuses classes mais étant très (voire trop) attractif pour certains jeunes, il est parfois nécessaire de disposer un store ou une tenture qui le soustrait aux regards lorsqu’il ne peut être accessible. Espace ordinateurs Source : Le Caillou 29 SUSA Le rangement et l’étiquetage sont utilisés pour tous les types de matériel : ➜ scolaire Rangement et étiquetage matériel scolaire Rangement et étiquetage matériel scolaire Source : Institut Mariette Delahaut Source : Les Co’Kain Rangement et étiquetage collations et tenues de gymnastique Source : Institut Mariette Delahaut - SUSA 30 ➜ de loisirs Rangement espace loisirs Source : Le Caillou ➜ Même les petites voitures peuvent avoir leur espace de rangement ! Rangement petites voitures Source : Pinterest 31 SUSA Cette structuration de l’espace est appliquée dans d’autres locaux que la classe, par exemple dans la salle de gymnastique : prévisible Aménagement Structuration de la salle de gymnastique Source : Ados Pilifs Pensez-y : ✓L  es élèves changent, l’aménagement de l’espace doit pouvoir changer aussi ! ✓L  e besoin de structuration ne disparaît pas en dehors de la classe ; comment se passent les récréations, les repas au réfectoire, les transitions, les trajets en bus ? L’espace peut être repensé partout, conjointement à la structuration du temps. SUSA 32 4 La structuration du temps Pour beaucoup de personnes avec un TSA, la planification, l’anticipation et l’organisation de leurs activités constituent une difficulté importante en raison de leurs problèmes au niveau des fonctions exécutives. « Nous allons à la piscine tous les jeudis matin. Les élèves le savent bien, mais plusieurs fois par jour, Raphaëlla me demande quand nous y allons. C’est vraiment assommant ! » Ce genre de situation, souvent vécue par les adultes travaillant avec des enfants ou adolescents présentant de l’autisme, illustre bien le besoin de ceux-ci d’être rassurés concernant l’approche d’événements souhaités ou au contraire redoutés. Nous avons déjà souligné plus haut que l’information transmise visuellement est mieux comprise et surtout mieux intégrée que l’information communiquée oralement. C’est pourquoi il est recommandé de prévoir pour chaque élève avec un TSA un horaire qui lui présente visuellement l’enchaînement de ses activités. Cet outil permettra à chacun de se sentir mieux et de passer d’une activité à l’autre de manière plus autonome. 4.1. Horaires individualisés L’expression « horaire individualisé » recouvre deux réalités : d’une part, les élèves ne réalisent pas tous la même activité au même moment ; nous avons vu comment la structuration de l’espace pouvait faciliter cet aspect de la différenciation. D’autre part, la forme que prend l’outil indiquant l’emploi du temps varie d’un jeune à l’autre, en fonction de son niveau de compréhension. L’horaire individualisé indique à chaque élève les différents endroits auxquels il doit se rendre au fur et à mesure de la journée, à l’intérieur de la classe et en dehors de celle- ci. Dans certains cas, c’est l’activité elle-même qui est mentionnée plutôt que le lieu de celle-ci. Lorsque vous mettez en place un horaire individualisé, vous devrez, dans un premier temps, accompagner l’élève pour lui montrer comment il doit l’utiliser. L’habitude de passer systématiquement voir son horaire entre chacune des activités convient bien aux personnes présentant aux TSA, qui apprécient généralement les rituels. Elle sera donc, dans la plupart des cas relativement vite acquise. Cependant, pour certains jeunes, l’accompagnement devra perdurer. Pour rappel, les différentes formes que peuvent prendre les supports visuels utilisés pour les horaires sont les suivantes : objets, photos, dessins, pictogrammes, mots écrits. Des formes « mixtes », associant plusieurs types de supports sont parfois également proposées. 33 SUSA Horaire par objets (seul le retour à la maison est représenté par un pictogramme) Source : Ecole Mont-Chevreuil – Horaire par pictogrammes à gauche, par objets à droite Source :Les AsTrôn’autes – Les principaux lieux/activités de la journée sont représentés par des objets, dans deux des exemples ci-dessus, par des pictogrammes pour un autre. Horaire « mixte » photos et pictogrammes Source : Les AsTrôn’autes – Cet horaire individualisé combine photos et pictogrammes. Il couvre une partie de la journée, de l’accueil à la récréation, de manière à ne pas donner trop d’informations à la fois. SUSA 34 Pour certains élèves, dont le niveau de fonctionnement est faible, l’horaire n’indiquera qu’une ou deux informations à la fois, et sera complété par les intervenants tout au long de la journée. Horaire par objets, avec 2 éléments d’information Il sera aussi souvent utile, dans les premiers temps, que l’élève emporte vers son endroit de destination le support visuel. Celui-ci lui servira alors de rappel pendant son trajet et un support identique lui montrera qu’il est bien arrivé : Pictogramme dans l’horaire et sur le lieu d’activité Source : Le Caillou 35 SUSA Cet emploi du temps composé de mots couvre toute la journée. L’élève déplace une pince à linge chaque fois qu’il entame une nouvelle activité, pour se repérer plus rapidement. Horaire par mots en majuscules Source : Institut Mariette Delahaut – Horaire « réversible » mots/pictogrammes Source : IMP René Thone – L’originalité de cet horaire individualisé est d’être à « double face ». Il comporte des mots d’un côté et un pictogramme de l’autre. Si le mot n’est pas compris, ou si l’enfant est dans un jour de méforme, il peut consulter le côté picto. Ce système est particulièrement indiqué lors du passage d’une forme visuelle à une autre. Lorsqu’on utilise des supports tels que des photos et des pictogrammes, il est important d’être bien organisés : certaines images se perdent, il faut avoir rapidement sous la main ce dont on a besoin en cas de changement de programme. SUSA 36 La photo ci-dessous donne un exemple d’agencement qui facilite l’emploi des supports utiles aux horaires individualisés : Panneau horaire, avec réserve de pictogrammes Source : Les AsTrôn’autes – Ce panneau rassemble les horaires de plusieurs élèves, chacun ayant une ligne à sa couleur.➊ ➊ Horaire par mots effaçables Source : Les Co’Kain – Le panneau est plastifié, et l’élève efface au fur et à mesure les mentions des activités déjà réalisées. On peut voir que, pour plusieurs jeunes, un point d’interrogation figure à la place de la dernière activité. Il s’agit d’une activité-surprise, qui vise à les familiariser avec l’inattendu, ce qui constitue un apprentissage important pour beaucoup de personnes avec un TSA. 37 SUSA Lorsque les élèves avancent dans leur scolarité, il est courant qu’une partie de leurs activités se déroulent en dehors de la classe, notamment pour tout ce qui concerne les apprentissages d’autonomie domestique et les travaux de type professionnel. Il est alors intéressant qu’ils puissent emmener leur horaire facilement. Un carnet, un agenda ou un album photo se glissera facilement dans leur poche ou dans une pochette à bandoulière : Horaires dans carnets Source : www.participate-autisme.be Horaire dans classeur source : Institut Mariette Delahaut Pensez-y ✓A  dapter l’horaire individualisé aux caractéristiques de l’élève, tant pour la forme que pour le nombre de supports visuels présentés simultanément ; un élève qui apprend à lire sera fier de voir les images remplacées progressivement par des mots ; ✓ Le disposer dans un endroit facilement accessible (notamment pour les élèves les plus petits) ; parfois le présenter sur un plan horizontal est plus confortable ; ✓ Inciter chacun à l’utiliser de manière régulière ; ✓ Viser son utilisation par le jeune, afin qu’il gére son temps de manière autonome, comme nous le faisons avec notre agenda. SUSA 38 4.2. Planification des activités Enzo est un jeune enseignant qui a effectué des remplacements dans l’enseignement ordinaire depuis sa sortie de la haute école, il y a deux ans. Il a maintenant un poste dans l’enseignement spécialisé et il débute son travail dans une classe à pédagogie adaptée pour élèves avec autisme, dont on lui a dit qu’elle était d’un bon niveau. Après avoir fait connaissance avec ses élèves, il leur propose une série de feuilles d’exercices écrits, afin de mieux se rendre compte de leurs acquis ; au bout d’¼ d’heure, certains commencent à s’agiter et après 40 minutes, c’est toute la classe qui est en effervescence et Enzo se demande bien ce qui lui arrive… Aller à l’école implique l’idée d’apprentissage. Ceci ne signifie pas pour autant être assis à son banc le plus souvent. Dans toutes les écoles sont prévus des temps de pause, récréations et repas, qui permettent aux élèves de souffler. Mais lorsqu’on travaille avec des élèves à besoins spécifiques, et plus particulièrement des jeunes présentant un TSA, la planification et l’organisation des activités doit prendre en compte plusieurs paramètres : ➜L  e temps de concentration est très variable d’un individu à l’autre et, chez un même enfant ou adolescent, d’un jour à l’autre, voire d’une activité à l’autre ; ➜L  es objectifs ne sont pas uniquement cognitifs, même pour des élèves ayant un bon niveau académique, mais peuvent relever de divers domaines : psychomotricité, socialisation, communication, autonomie personnelle, résidentielle ou communautaire ou encore loisirs ou (pré-)professionnel ; ➜A  l’intérieur d’un même domaine, différentes modalités sont à prévoir. Par exemple, au niveau des loisirs, le jeune doit pouvoir s’occuper seul, participer à des jeux dirigés, à des jeux collaboratifs, etc. La même variété se retrouvera au niveau du travail ou de l’autonomie ; ➜L  es objectifs du P.I.A. occupent une place centrale dans les apprentissages de même que le PIT pour les adolescents.. En composant son horaire, l’équipe est donc attentive : ➜à  ce qu’il y ait suffisamment de périodes dévolues au travail des objectifs du P.I.A. ➜à  alterner les domaines et les modalités de travail (individuel, collectif, petit ou grand groupe, face à face, …) ➜à  tenir compte du temps de concentration de chacun des élèves et de leur besoin de bouger, surtout chez les jeunes enfants. Des activités motrices/sportives sont nécessaires chaque jour, d’une part parce qu’elles sont importantes pour le développement des enfants, d’autre part parce qu’elles permettent d’évacuer les tensions, et ceci à tout âge. La checklist ci-dessous peut vous aider dans la planification des activités. 39 SUSA Checklist pour la planification des activités de la classe Temps de concentration des élèves : Durée minimum Durée maximum Prénom (activité) (activité) Alice 10 min. (calcul) 40 min (puzzle) Question Oui/Non A modifier La durée des activités tient-elle compte du temps de concentration de chaque élève ? Y-a-t-il suffisamment de temps prévu pour travailler les objectifs des P.I.A. de chacun ? Y-a-t-il une bonne alternance entre les divers types d’activités ? ➜ Travail/loisirs ➜ Statique/motrice ➜ Individuelle/collective ➜ Autonome/assistée ➜C  ognitive/socialisante/ de communication/d’autonomie/ ➜ etc. SUSA 40 4.3. La gestion de la durée Alex jouerait au ballon toute la journée. Je ne lui permets plus de l’utiliser, car chaque fois qu’il doit arrêter, il fait une crise ! Même s’il me promet au départ qu’il ne jouera qu’¼ d’heure, au moment de ranger le ballon, c’est la catastrophe ! Sandra adore cuisiner, elle travaille très bien et est très minutieuse. Si seulement elle était moins lente, je pourrais lui proposer un stage à la cuisine de la cantine. La durée est une notion abstraite pour beaucoup de personnes présentant une déficience. Il leur est difficile de se représenter a priori ce que signifie jouer ¼ d’heure, attendre 5 minutes ou dresser 6 assiettes en 6 minutes. Le time-timer permet de rendre concrète cette idée du temps qui passe, sans que l’élève maîtrise nécessairement la notion de l’heure, que ce soit pour limiter la durée d’une activité favorite ou pour réaliser une tâche dans un temps donné. Pour certains, cet objet sera trop stressant et il sera préférable de tester d’autres moyens, comme par exemple le sablier. On peut trouver des sabliers de durées diverses. Gestion de la durée des loisirs Source : Les AsTrôn’autes Le time-timer indique à l’élève qu’il lui reste 5 minutes de temps de jeu. Pensez-y : Certains élèves semblent ne pas avoir besoin de leur horaire et ne le consultent que sur injonction. Il est néanmoins important de continuer à le mettre à leur disposition, au moins pour 2 raisons : ✓ I l augmente le sentiment de sécurité, surtout dans des périodes plus perturbées (changements divers à l’école ou à la maison) ✓ I l constitue un outil majeur pour l’acquisition d’un fonctionnement indépendant, afin de pouvoir passer d’une activité à une autre sans accompagnement. 41 SUSA SUSA 42 5 La conception et la préparation des activités Lorsque votre planning est établi, chacune des activités prévues doit être pensée pour être « autism friendly ». Cette expression signifie qu’une action est organisée de telle manière qu’elle soit clairement comprise par les personnes avec un TSA, afin que celles-ci puissent la mener avec autant d’indépendance que possible. Comme dans les chapitres précédents, nous allons parler structure et supports visuels. 5.1. Activités individuelles Dans l’idéal, chaque activité devrait être préparée de telle manière que l’élève comprenne immédiatement ce qu’il doit faire. Les exemples ci-dessous illustrent bien ce principe : Feuille de calcul à réaliser de manière autonome Source : Les Co’Kain Enfilage de perles avec modèle dessiné Source : Institut Mariette Delahaut Construction d’une tour en lego avec modèle concret Source : Mont-Chevreuil - 43 SUSA Tri d’objets avec repère concret Source : Les AsTrôn’autes Dans ces différents exemples de tâches individuelles, le matériel est présenté dans des contenants bien structurés et un modèle est chaque fois présenté à l’élève. Chez certains jeunes, le travail « papier/crayon » suscite des résistances, voire des blocages. Cela n’empêche pas de proposer des activités de calcul, d’écriture ou de lecture, comme le montrent les photos ci-dessous. Tâches de calcul et d’écriture avec amorce (la première étape est déjà réalisée) – sans « papier/crayon » Source : Institut Mariette Delahaut SUSA 44 Tâche de dénombrement sans « papier/crayon » Source : Les AsTrôn’autes Tâche de lecture : appariement mot/image Source : Institut Mariette Delahaut La structuration des activités ne concerne pas que les tâches de travail « à table ». Elle est tout aussi importante, si pas plus, dans des environnements moins formels. La piscine est un endroit susceptible d’être source de perturbations pour certains jeunes, en raison du bruit ambiant et de l’espace très ouvert. Une organisation très claire des séances à la piscine peut les aider à les vivre plus confortablement. Le nombre d’élastiques indique à chaque élève le nombre de longueurs qu’il doit réaliser, les photos illustrant le type de nage ou d’exercice à pratiquer. Supports visuels pour activités à la piscine Source : Les Co’Kain 45 SUSA Répartition des élèves par couloir à la piscine Source : Les Co’Kain La répartition des élèves par couloir est déterminée à l’avance, afin de clarifier l’organisation et de manière à éviter qu’ils ne se gênent mutuellement. Parfois, un simple détail, comme le réglage de la hauteur d’un panier de basket, ou un indice lui indiquant où il doit se placer, va donner la possibilité à l’élève de réaliser plus facilement l’activité et donc, d’y prendre du plaisir : Indice au sol pour les pied et hauteur ajustable au basket Source : Les AsTrôn’autes 5.2. Le système de travail Jean a appris à travailler seul. Il est capable d’effectuer une dizaine de tâches différentes à son bureau, mais lorsqu’il en a terminé une, il attend chaque fois l’intervention de son enseignante pour entamer la suivante. Il lui arrive parfois de défaire un travail qu’il vient de réaliser parfaitement et de le recommencer. SUSA 46 Ce témoignage illustre bien les particularités de certains élèves relatives aux caractéristiques de l’autisme : une difficulté à prendre l’initiative et à donner du sens, une cohérence à leurs actions. Le système de travail est un outil qui va aider chacun d’eux à comprendre quel est le début et la fin d’une séquence de travail, combien d’activités différentes sont à enchaîner et ce qui se passe quand le tout est terminé. Le principe général est que les activités à réaliser sont disposées à la gauche de l’élève. Celui-ci prend la première, la réalise, et la range ensuite à sa droite. Il enchaîne ensuite avec la suivante. Différents systèmes visuels peuvent être utilisés pour lui indiquer l’ordre à suivre dans l’enchaînement des tâches. Système de travail par photos Source : Le Caillou Dans cet exemple, deux boîtes sont superposées et l’élève a devant lui leurs photos. L’élève a appris à pairer la première photo avec la boîte du dessus (un morceau de velcro sur la boîte lui permet de l’y fixer), à réaliser la tâche qui lui est présentée, à la ranger sur l’étagère se situant à sa droite, puis procéder de la même manière pour la deuxième boîte. Une dernière photo lui indique qu’il doit ensuite aller consulter son horaire. Dans l’illustration suivante, des zones ont été délimitées sur le bureau pour indiquer l’espace de rangement des activités terminées, à droite de la ligne rouge. Organisation de l’espace du bureau Source : Les Co’Kain 47 SUSA Ci-dessous, ce sont des pastilles de couleur qui indiquent dans quel ordre les tâches doivent être réalisées. Celles-ci se trouvent sur une étagère à côté du bureau de l’enfant (ce qui lui donne l’occasion de bouger pour les prendre) et, une fois terminées, sont rangées dans un bac qui se trouve au sol, à droite de l’élève. Système de travail par couleur Source : Institut Mariette Delahaut Souvent, il est important d’indiquer à l’élève ce qu’il fera après sa séance de travail. Ci-dessous, un choix d’activités de loisirs lui est proposé sous la forme de trois photos. Système de travail incluant le choix d’un renforçateur Source : Les Co’Kain Dans cette classe, l’espace ne permet pas que chacun dispose d’un endroit de travail individualisé. Deux élèves occupent donc alternativement le même banc. Le système de travail de l’un est présenté horizontalement, l’autre verticalement, avec la photo de chacun comme repère. SUSA 48 Espace de travail partagé avec 2 systèmes de travail Source : Les Co’Kain Une fois la séance de travail terminée, l’élève retourne consulter son horaire : Système de travail par chiffres avec picto de retour à l’horaire Source : Le Caillou 5.3. Activités collectives L’organisation et la planification ne concernent pas uniquement les tâches individuelles proposées dans l’espace de travail autonome, mais aussi les autres activités, comme les activités collectives. Structuration du jeu de palet Source : Les Co’Kain Pour ce jeu de palet, le plan de jeu est conçu de manière très visuelle, et chaque enfant joue un rôle pour contribuer à la bonne organisation : l’un d’eux ramasse les balles, un autre les redistribue, un troisième note les scores tandis que le quatrième joue. 49 SUSA Toute activité collective n’implique pas nécessairement la participation de tous les élèves de la classe, au contraire. On vise plutôt à ce que le jeu ou le travail rencontre les intérêts des participants et n’engendre pas de trop longues périodes d’attente. Si les jeunes passent plus de temps à attendre qu’à réaliser l’activité, cela risque d’engendrer des problèmes de comportement et il vaut donc mieux repenser l’organisation. Parfois, une activité collective comprend plusieurs étapes, ce qui peut sembler compliqué pour certains élèves. Des supports visuels, tels que ceux présentés ci- dessous contribuent au bon déroulement de l’activité. Repères visuels pour étapes du jeu de société Source : Le caillou Repère visuel pour le tour de rôle Source : Le caillou Le repas est un moment de perturbation pour certains jeunes. Prévoir et annoncer son organisation peut aider ceux-ci à l’aborder de manière plus détendue : Repère visuel pour le placement à table Source : Les Co’Kain Grâce à cette affiche, les élèves savent où ils doivent aller et avec qui. Pensez-y : ✓L  es stratégies du programme TEACCH ne s’appliquent pas uniquement à la table de travail autonome ! ✓D  ans chaque endroit que fréquente chacun de vos élèves, pour chaque activité que vous lui proposez, demandez-vous si les indices sont suffisants pour qu’il s’y sente bien et puisse y être performant… sans aide de votre part. SUSA 50 6 Les principes d’apprentissage Lors de la réunion P.I.A. de Charles, ses parents, tout comme l’équipe éducative, ont considéré qu’un objectif essentiel pour son acceptation sociale était qu’il puisse se moucher de sa propre initiative, chaque fois que c’est nécessaire. En effet, à 10 ans, Charles est capable « techniquement » de se moucher, mais il ne le fait que sur incitation, alors que, souvent enrhumé, il a le nez qui coule très fréquemment. Une fois cet objectif fixé, quelqu’un demande : « Et comment va-t-on faire pour qu’il apprenne? Ça fait des années qu’on lui répète qu’il doit se moucher… » Et là, c’est le grand silence… Il ne suffit pas en effet de décider d’un objectif pour que l’élève acquière cette compétence. L’utilisation de quelques principes d’apprentissage facilitera celui-ci. Nous ne voulons pas ici passer en revue tous les procédés possibles. Il existe de nombreux écrits à ce sujet. Les deux ouvrages qui nous servent de référence sont les suivants : Nous nous limitons ci-dessous à rappeler quelques fondamentaux. 6.1. Le modèle ABC Revenons à Charles, qui doit apprendre à se moucher spontanément. Après avoir discuté, l’équipe éducative et les parents ont décidé d’adopter la stratégie suivante : Charles aura toujours devant lui (ou sur lui quand il se déplace) un paquet de mouchoirs et cette image : Chaque fois qu’il se mouchera spontanément, il recevra la photo d’un joueur de football, pour sa collection. 51 SUSA Les 3 étapes du modèle ABC sont bien mises en œuvre : A : les antécédents consistent ici à mettre un rappel concret et constant devant Charles, c’est-à-dire le paquet de mouchoirs et le pictogramme « se moucher ». B : le comportement à acquérir (behavior en anglais) est clairement exprimé « se moucher spontanément » C : la conséquence qui va contribuer à renforcer ce comportement, donc augmenter la probabilité qu’il se reproduise, est choisie en tenant compte des intérêts de l’élève : les photos de joueurs de foot. Tous les domaines de la structuration dont nous avons parlé plus haut (espace, temps, activités) participent à la mise en place des antécédents. Ils favorisent l’apprentissage en clarifiant l’environnement et en apportant plus de confort aux personnes présentant un TSA. Voyons maintenant quelques aspects liés directement aux apprentissages eux-mêmes. 6.2. Amélioration des compétences Lorsque nous envisageons un apprentissage pour un élève, quelques questions peuvent nous aider : C  omment accrocher son attention ? Quelles sont les étapes de cet apprentissage ? Comment lui donner envie de poursuivre ses efforts ? ➜ Comment accrocher son attention : prise en compte des intérêts du jeune Si l’on passe en revue tout ce que les enfants et les adolescents tout venant doivent apprendre à l’école, il n’est pas si facile de pouvoir toujours leur expliquer en quoi cela peut leur être utile. Beaucoup d’entre nous avons subi, au cours de notre scolarité, des moments d’ennui et n’avons étudié certaines matières que parce que nous y étions obligés, pour « réussir » notre année. Il est probable que nous n’en ayons pas retenu grand-chose. Mais si, l’année suivante, cette même branche était présentée par un enseignant passionné et passionnant, il se peut que, tout à coup, nous ayons trouvé du sens à ce qui nous paraissait assommant l’année précédente et nous soyons dès lors engagés dans le travail. Nos élèves avec un TSA ont souvent encore plus de difficultés que les autres à comprendre l’intérêt des apprentissages que nous leur proposons. Nous pouvons tenter de le leur expliquer si leur niveau de compréhension verbale est relativement bon. Mais si celui-ci est faible, il sera plus adéquat d’utiliser, au cœur même de l’activité, ce qui peut accrocher l’attention de l’élève. SUSA 52 Par exemple, les activités exerçant le dénombrement peuvent être déclinées à l’infini, en choisissant du matériel attractif pour chacun : Activités de dénombrement avec images Source : Institut Mariette Delahaut Un élève sera ravi de compter les Minions, tandis qu’un autre retrouvera avec plaisir le personnage du loup de ses histoires préférées. Avec un élève qui apprécie les photos de personnes connues, on peut les utiliser pour divers objectifs : ➊R  econstituer l’ordre chronologique d’événements ➋ Compter ➊ Remettre les photos dans l’ordre des événements Source : Les AsTrôn’autes ➋ dénombrer avec photos des copains de classe Source : Les Co’Kain 53 SUSA On peut donc utiliser les intérêts de l’élève pour favoriser son implication dans les apprentissages mais parfois, ce sont ses stéréotypies elles-mêmes qui seront sources de compétences valorisées. Par exemple, un jeune « maniaque » du rangement apprendra à ranger la classe à la fin de chaque demi-journée (et uniquement à ce moment-là). Un autre qui aime déchirer et démonter aplatira cartons et bouteilles en plastique pour le recyclage, etc. Il s’agit d’imaginer comment les particularités des personnes avec autisme peuvent être mises à profit pour les faire évoluer positivement. ➜ Quelles sont les étapes de l’apprentissage : analyse de tâche Certaines activités cibles d’apprentissage sont complexes et nécessitent un enchaînement de plusieurs étapes. L’illustration de chacune de ces étapes va aider l’élève à les réaliser dans le bon ordre et à devenir plus rapidement autonome. Les exemples les plus courants d’apprentissages ainsi décomposés concernent les actions de se brosser les dents et de se laver les mains. Analyses de tâche : se laver les mains + se brosser les dents Source : Institut Mariette Delahaut Mais l’analyse de tâche peut être utilisée pour des activités diverses, par exemple : Aller aux toilettes : Analyse de tâche : aller aux toilettes Source : Le Relais SUSA 54 La préparation du café : Analyse de tâche : préparer du café Source : L’Envol La préparation de sa tartine : Les activités culinaires : Analyse de tâche : réaliser une recette Source : Le Relais Analyse de tâche : préparer sa tartine Source : L’Envol Le déroulement d’une séance de soin : Analyse de tâche : séance de soin Source : L’envol 55 SUSA Dans chacun des exemples ci-dessus, les différentes étapes sont représentées soit par des photos, soit par des images et pictogrammes. Pour des élèves qui n’ont pas accès à la signification des représentations imagées quelles qu’elles soient, il est possible de proposer des analyses de tâches en plaçant le matériel dans l’ordre d’utilisation. Par exemple : Pour s’habiller : Pour préparer un jus d’orange : Analyse de tâche par objets : Analyse de tâche par objets : s’habiller préparer un jus d’orange Au-delà de la décomposition en étapes, il est aussi important de bien cibler un niveau d’exigence réaliste : toutes les étapes ne seront pas nécessairement travaillées simultanément. On procèdera généralement de manière progressive, après avoir observé ce que l’élève maîtrise déjà et ce qui est en émergence. La technique de l’enchaînement stimule l’apprenant à réaliser graduellement l’ensemble de la tâche et à passer de manière autonome d’une étape à l’autre : Jérôme va apprendre à faire le ménage dans la cuisine. Son enseignante a pris des photos de chacune des étapes et les a affichées sur la porte (ranger la vaisselle sale dans le lave- vaisselle, nettoyer le plan de travail et la cuisinière, mettre les chaises renversées sur la table, passer l’aspirateur, nettoyer à l’eau savonneuse, sécher avec le torchon). Après un premier essai, elle a observé qu’il maîtrise et enchaîne une bonne partie des étapes en se référant aux photos, mais qu’il a tendance à oublier certains endroits de la cuisine lorsqu’il passe l’aspirateur ou nettoie à l’eau. Elle le laisse donc réaliser seul les étapes précédentes, le félicite, puis l’aide en lui donnant des indications plus précises pour passer l’aspirateur partout. Le lendemain, elle le laissera à nouveau travailler seul et ne le félicitera que s’il passe l’aspirateur partout. Une fois cette étape acquise, elle ne le renforcera qu’après l’assimilation de l’étape suivante. SUSA 56 Le principe de l’enchaînement consiste donc à renforcer l’élève pour chaque nouvelle étape acquise. Penchons-nous maintenant de manière un peu plus précise sur l’utilisation des renforçateurs. ➜ Comment donner à l’élève l’envie de poursuivre ses efforts : les renforçateurs Chacun de nous adopte chaque jour certaines attitudes et réalise un grand nombre d’actions, les unes par plaisir, d’autres parce qu’elles sont nécessaires à notre survie ou à notre acceptation par le milieu social dans lequel nous vivons, ou encore parce que nous nous y sentons obligés. Selon les personnes, la même activité, par exemple, faire les courses, peut être vécue comme une corvée ou comme un moment agréable. S’il nous est facile de faire jour après jour ce qui nous plaît, nous ne continuons à accomplir ce qui nous plaît moins que parce que nous en tirons une forme ou l’autre de bénéfice : l’estime de soi ou d’autrui, le sentiment d’être utile, le respect de nos valeurs, … ou plus prosaïquement, des gains matériels. Autrement dit, ces actes ont pour nous une conséquence positive plus ou moins directe. De la même manière, les élèves tout venant, dans beaucoup de cas, apprennent à se comporter de manière socialement acceptable ou « travaillent bien » à l’école pour faire plaisir à leurs parents, aux enseignants, être valorisés par leurs pairs, etc. Si nous nous référons aux caractéristiques des élèves avec un TSA, nous savons qu’il leur est souvent très difficile de comprendre le point de vue d’autrui et que la pression sociale a généralement peu d’influence sur eux. Les bénéfices qu’ils peuvent retirer de leurs actions ou attitudes sont donc la plupart du temps différents des nôtres. Lorsque nous visons pour l’un d’eux un objectif qui, a priori, ne suscite pas son intérêt, ou qui ne passe pas par des activités qui lui procurent du plaisir, il est essentiel de prévoir quelle conséquence positive il percevra. Les renforçateurs visent à maintenir ou augmenter des comportements désirables qui ne sont pas suffisamment auto- renforçants pour l’élève. Ils sont réservés aux objectifs prioritaires, requérant de la part de l’élève un effort particulier. Pour rappel, on distingue 4 catégories de renforçateurs : Source : Pratique de de l’intervention individualisée. Magerotte, Deprez & Montreuil 57 SUSA Lorsqu’il est difficile de percevoir les intérêts d’un élève et donc de choisir un renforçateur vraiment actif, il peut être utile de s’aider de répertoires, par exemple, celui-ci, qui se centre sur des objets et activités : http://aba-sd.info/documents/Renforcateurs_potentiels_eo_inc.pdf Attention, pour être efficace, le lien entre le comportement adéquat et le renforçateur doit être perçu par l’élève. Vous devez donc être explicite en donnant le renforçateur « Bravo, tu es resté assis tout le repas, tu peux aller rouler 10 minutes à vélo dans la cour. » Annoncer le renforçateur peut aider les élèves à maintenir leur effort : Système de travail avec annonce du renforçateur Source : Les Co’Kain Le renforçateur doit suivre directement le comportement approprié, surtout pour les élèves avec un faible niveau de compréhension verbale. Enfin, il doit être attribué systématiquement au début de l’apprentissage mais il sera peu à peu moins fréquent, pour devenir occasionnel lorsque le comportement sera acquis. Rappelons qu’un comportement est considéré comme acquis lorsque l’élève a atteint le critère de réussite défini dans l’objectif (voir chapitre sur le P.I.A.). Deux des objections souvent entendues lorsque l’on évoque l’utilisation des renforçateurs est qu’elle constitue une forme de chantage, ou que l’élève risque d’en devenir dépendant et de ne plus travailler que pour gagner une récompense. Si telle est votre opinion, ou celle de vos collègues, voici quelques pistes de réflexion : La contrainte ou l’obligation sont-elles des moteurs stimulants ? Lorsque vous fournissez un effort et réussissez quelque chose de difficile, n’avez-vous pas besoin d’être valorisé ? Les élèves avec un TSA sont-ils sensibles au fait d’avoir un « beau bulletin » ? De quel autre levier d’apprentissage disposez-vous ? Pensez-y : ✓L  ’apprentissage est un processus qui peut prendre du temps. Les changements peuvent ne pas se produire tout de suite. Soyez patients et persévérants ! SUSA 58 7 Les outils de communication augmentatifs ou alternatifs La communication est au cœur des défis posés aux personnes présentant un TSA, qu’il s’agisse de comprendre les messages d’autrui ou d’arriver à s’exprimer dans diverses situations. Procurer à chacun des élèves les moyens de comprendre et d’être compris constitue une des missions essentielles de leurs intervenants. On parlera d’outils augmentatifs lorsque la personne utilise le langage oral, mais celui- ci ne lui permet pas de communiquer suffisamment. Les outils sont alternatifs lorsque le langage oral n’est pas utilisé par la personne. 7.1. Communication réceptive Notre manière la plus spontanée de communiquer avec quelqu’un qui se trouve à proximité de nous est de parler. Mais si nous voulons adresser un message à quelqu’un qui se trouve à 50 mètres, et que la situation ne nous permet pas de crier, nous allons faire de grands gestes. Lorsque nous nous trouvons dans un lieu inconnu, gare ou grand magasin, et que nous cherchons la sortie, nous nous dirigeons en repérant le pictogramme. Ces différents exemples nous montrent que, suivant les circonstances, chacun de nous utilise différentes formes de communication. Imaginons à présent les éventualités suivantes : ➜ vous faites la conversation avec un enfant de 2 ans ; ➜ v ous donnez un renseignement en rue à un visiteur qui ne comprend que très peu le français ; ➜ vous racontez une blague à votre meilleur ami ; ➜ vous parlez à une personne âgée qui n’entend plus très bien. Dans chacun de ces cas, vous allez adapter votre manière de parler à votre interlocuteur : vocabulaire, rythme de parole, intonation, puissance de la voix, … Instinctivement, vous vous ajustez afin d’augmenter les chances d’être compris et de pouvoir établir un dialogue. Lorsque vous êtes en présence de vos élèves présentant un TSA, ce travail d’ajustement est capital pour que votre communication soit efficace. Vous devez donc tenir compte du niveau de communication réceptive de chacun de vos élèves (ce qu’il comprend et comment) pour adapter votre communication expressive (ce que vous voulez faire passer comme message et comment). 59 SUSA Tous les vendredis après-midi, Maria fait une sortie avec ses élèves, avec des objectifs de socialisation et de loisirs. Katia, grande jeune fille de 13 ans, a dans son horaire une photo de la rue pour lui indiquer cette activité. Habituellement, le groupe tourne à gauche en sortant de l’école pour aller à la plaine de jeux. Mais aujourd’hui, il ne fait pas très beau et Maria a annoncé qu’on allait boire un verre à la cafétéria du supermarché. On tourne donc à droite en sortant de l’école et, après avoir marché quelques mètres, Katia se laisse tomber à terre et refuse d’avancer. Maria vient près d’elle et essaie de la convaincre de se relever, en lui disant « On va boire un verre, Katia, tu pourras choisir ce que tu aimes, viens, tu seras contente… » Mais rien à faire, Katia refuse de se lever ! Jusqu’à ce que Carine, la logopède qui accompagne la classe, prenne la photo d’un verre de jus de fruit dans le système de communication d’un autre élève. Elle la montre à Katia en disant : « On va boire un verre, debout ! » Et Katia se relève en souriant et se met en route ! Nous avons souvent tendance à surestimer les capacités de compréhension du langage oral des personnes avec un TSA, parce qu’elles répondent adéquatement à un certain nombre de nos consignes. Nous oublions qu’elles sont plus sensibles aux routines ou aux indices visuels présents dans l’environnement qu’aux mots que nous prononçons. En dehors du contexte habituel, elles vont être démunies et ne plus comprendre des messages qui nous paraissent simples. Notre communication sera donc beaucoup plus efficace si nous utilisons nous aussi des supports visuels pour nous faire comprendre des jeunes avec un TSA. Ainsi, un élève auquel son enseignant présente cette bandelette non seulement saisira mieux ce qui est attendu de lui, mais aura un rappel sous les yeux durant tout le temps nécessaire : SUSA 60 Consigne de travail avec support visuel Source : Le Caillou – Le fait que les adultes autour de lui utilisent ce système de communication incitera l’élève à l’utiliser lui-même lorsqu’il aura besoin de s’exprimer. Dans certaines écoles, les intervenants portent un « collier de communication », de manière à pouvoir accompagner leurs mots d’un support visuel : Collier de consignes Source : SUSA Bruxelles – Nous devons également nous souvenir que toute la structuration de la classe et des activités, tous les supports visuels, ont pour but de clarifier l’environnement pour nos élèves et donc, d’améliorer leur compréhension, aussi bien en classe que hors de celle-ci : lorsqu’on présente à l’élève une de ces images à la piscine, il comprend immédiatement quel est l’exercice proposé. Support visuel pour exercices à la piscine Source : Le Caillou 61 SUSA Afficher la photo des élèves là où ils doivent accrocher leur manteau simplifie le passage au vestiaire : chacun d’eux comprend où il doit se rendre pour pendre son manteau. Repères visuels au vestiaire Source : Le Caillou De tels exemples sont nombreux dans les classes. Un enfant qui a l’habitude de sucer ses doigts lorsqu’il est inoccupé sera davantage aidé par le support présenté ci-dessous que par des consignes verbales répétées : Support visuel pour garder les mains sur la table Source : Le Caillou Ces supports de communication aident les élèves dans les situations de la vie quotidienne. Il est également important de penser à les utiliser lors d’événements plus particuliers. Ainsi, la séquence suivante a été présentée pour expliquer à des élèves qu’ils n’auraient plus leur séance de logopédie pendant quelque temps parce que la logopède était enceinte : Prévenir de l’absence d’une intervenante Source : Les AsTrôn’autes - SUSA 62 Un élément capital à prendre en compte est la ou les formes de communication que comprend le jeune avec un TSA : gestes naturels, objets, images, photos, pictogrammes, signes, mots isolés, phrases simples ou complexes. Julie joue très souvent avec un élastique, y compris à sa table de travail. Chaque fois qu’il lui demandait de déposer son élastique sur le bureau, son enseignant était attentif à lui présenter simultanément le pictogramme correspondant, mais ça ne marchait pas ! Il a déposé ceci sur le bord du bureau de Julie : Cette manière de communiquer a beaucoup mieux fonctionné. Il n’est pas très utile de présenter des pictogrammes à un élève qui a une déficience intellectuelle importante ; il est en effet très peu probable qu’il les comprendra. Si une personne avec un TSA semble ne pas comprendre la forme de communication que vous utilisez, essayez donc une forme plus simple. Il existe un outil qui peut vous aider à mieux situer la forme de communication qui convient à chaque personne vivant avec un TSA. Il s’agit du COMVOOR, présenté dans l’ouvrage suivant : 63 SUSA Les logopèdes sont particulièrement habilitées à réaliser l’évaluation du niveau de compréhension, ainsi que les psychologues ou orthopédagogues. Même si nous utilisons des supports visuels pour communiquer avec nos élèves, nous ne bannissons pas pour autant le langage oral. Nous souhaitons en effet améliorer leur compréhension de celui-ci et donc associons les mots aux autres formes de communication. Cependant, pour atteindre son but, ce langage oral doit répondre à certaines règles : ➜ Simplifier les énoncés verbaux Ex : p  référez « Lola, viens manger » à « Lola, ma Consignes courtes chérie, on t’a préparé ton repas préféré » Ex : p  référez « Enlève le couvercle » à « Enlève en Mot concret, familier tirant la languette avec ton pouce et ton index » Ex : p  référez « Il pleut, mets ton capuchon » à « Il Eviter le langage imagé tombe des cordes, couvre toi la tête » Ex : p  référez « Tu te laves les mains, puis tu vas à table » Utiliser la bonne chronologie à « Tu vas à table après t’être lavé les mains » Ex : p

Use Quizgecko on...
Browser
Browser