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PARTIE 2 – L'INSTANCE ﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏ Le CPC ne donne pas de définition de l'instance. En réalité, c'est un terme polysémique : ✱ D'abord, instance = procédure pendante devant une juridiction. Deux sens : ✱ Sens formaliste : instance = succession d’actes de p...

PARTIE 2 – L'INSTANCE ﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏ Le CPC ne donne pas de définition de l'instance. En réalité, c'est un terme polysémique : ✱ D'abord, instance = procédure pendante devant une juridiction. Deux sens : ✱ Sens formaliste : instance = succession d’actes de procédure, d'étapes, qui jalonnent l'instance. ✱ L'instance implique enfin le respect de principes fondamentaux applicables aux parties et au juge qui sont tous partie au lien juridique d'instance. Du fait qu'une partie a engagé un procès, et que l'autre y a été attraite, elles sont dans un rapport juridique : elles sont soumises à des droits et obligations procéduraux. Le juge est lui aussi partie à ce lien juridique. Ce n'est pas parce qu'elles sont appelées des parties que le lien d'instance est un lien de nature contractuelle. Le lien d'instance est un lien de nature légale. C'est la loi qui met à la charge des parties et du juge des obligations entre l'introduction de l'instance et le jugement. ﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏ TITRE 1 – LES PRINCIPES DIRECTEURS DE L'INSTANCE ﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏﹏ Principes directeurs : ensemble de principes essentiels qui commandent un système de procédure. Ils existaient déjà avant le CPC, sous la forme d'adages, de dispositions éparses, etc.. Mais le CPC de 1806 ne les énonçait pas de façon explicite et claire. Ce Code était une compilation de règles propres aux juridictions. Il n'y avait pas d'esprit de synthèse. Le nouveau CPC (70’) se veut insuffler cet esprit. Ainsi, le Code s'ouvre par 24 articles « principes directeurs du procès » qui donnent la conception du procès civil en France. Ces principes sont les suivants : De l'art. 1 à l'art. 13 : définition de la répartition des rôles parties / juge ; Tous les autres principes affirment des garanties procédurales de bonne justice : Articles 14 à 17 : principe de la contradiction ; Articles 18 et 19 : liberté de la défense, c'est-à-dire la liberté de se défendre soi-même sauf exception (obligation de prendre un avocat) et la liberté de choisir son défenseur ; Articles 20 et 21 : pouvoirs du juge d'entendre les parties et de les concilier ; Article 22 : principe de la publicité des débats, avec des exceptions ; Articles 23 et 23-1 : langue du procès + hypothèse d’1 partie sourde ; Article 24 : respect dû à la justice = devoir de réserves : les parties ne peuvent pas s'insulter, insulter le juge, se calomnier. Elles doivent rester dignes Ces principes expriment la conception française du procès civil, en particulier : Les principes qui gouvernent les rôles respectifs des parties et du juge ; Le principe de la contradiction ; Les principes implicitement contenus dans 4 mots de l'article 9, « conformément à la loi », qui gouvernent la licéité de la preuve ; La loyauté procédurale, qui n'est pas dans les articles 1 à 24 CHAPITRE 1 – LES RÔLES RESPECTIFS DU JUGE ET DES PARTIES Distinction traditionnelle entre la procédure accusatoire et la procédure inquisitoire. ✱ Procédure accusatoire : procédure dans le cadre de laquelle les parties initient le procès, le juge ne s'auto-saisit pas. Les parties déterminent tous les éléments de l'instance, conduisent le procès : rassemblent éléments de preuve de nature à justifier prétentions respectives, décident quand l'affaire est en état d'être jugée. Pd l'instance, le juge est neutre : ne prend aucune initiative, ne cherche pas à établir une vérité objective, mais à ce que le conflit soit apaisé par sa décision. Il est donc seulement là pour départager entre les thèses des parties. Le procès est alors la chose des parties. ✱ Procédure inquisitoire : Le juge conduit + dirige l'instruction en vue de découvrir la vérité. Il peut ordonner mesures d'instruction qui lui paraissent utiles, prendre initiatives qui s'imposent, requalifier faits mal qualifiés, appliquer la règle de droit qui s'applique même si non-invoquée, apprécier le moment où l'affaire est prête à être jugée. Il n'est pas à la disposition des parties : modèle traditionnel du procès pénal. Ce qui importe, c'est la vérité. Le seul point commun avec la procédure accusatoire, c'est que le juge ne se saisit pas non plus de lui-même : c'est le ministère public qui le saisit : exigence d'impartialité d’où la distinction entre autorités de poursuite et autorités de jugement dans la procédure pénale. Le CPC de 1806 avait un parti pris accusatoire. Contrairement au procès pénal qui met en cause l'intérêt général, ce qui explique qu'il faille établir la vérité, le procès civil met en cause des intérêts privés, et donc l'intérêt de la société n'est pas en cause. Le juge était donc passif. Il n'avait connaissance du procès que le jour où la partie la plus diligente faisait venir l'affaire à l'audience pour qu'elle soit enfin plaidée et jugée. Il ne pouvait donc que vérifier le bien-fondé des prétentions, mais telles qu'elles lui étaient soumises en fait et en droit. Cela a créé de grands inconvénients : ✱ Ralentissait le cours de la justice : attendre l'accord des parties sur moment de plaider. ✱ Cela exposait une partie à toutes les manœuvres dilatoires de l'autre. Nv CPC EV 1er jnv 1976 : rééquilibre rapport parties / juge. Renforce pouvoirs du juge, sans évincer volonté des parties. Le CPC recherche équilibre adapté aux besoins de la procédure civile. En effet, il y a deux aspects dans le procès civil : Intérêts privés : les parties doivent conserver la maîtrise de certains aspects de leur litige, et le juge doit apaiser le conflit sans chercher à tout prix à connaître la vérité ; Impératifs de la justice : la célérité, l'exactitude de la solution... C'est un service public, donc l’IG~ est aussi concerné. Le juge ne doit donc pas rester totalement neutre et passif. Procès civil = chose des parties + chose du juge. On considère ajd que la distinction accusatoire/inquisitoire est trop tranchée. Le procès civil est désormais gouverné par un principe de coopération efficiente du juge et des parties dans l'élaboration du jugement. L'instance est donc dominée par un principe de coopération des parties et du juge. Le CPC a ainsi consacré une sorte d'entre-deux, ce qui crée des difficultés. Le juge peut désormais intervenir activement dans le procès civil, mais seulement sur certains aspects. Trois aspects du procès requièrent une définition des rôles respectifs du juge et des parties : L'existence même de l'instance : l'initiative du procès et la possibilité d'y mettre fin avant le jugement (article 1er CPC) ; La conduite de l'instance : son rythme (articles 2 et 3 CPC) ; La matière litigieuse : les éléments du litige (articles 4 à 13 CPC) SECTION 1 – LES RÔLES RESPECTIFS DU JUGE ET DES PARTIES À L'ÉGARD DE L'EXISTENCE DE L'INSTANCE Art. 1er CPC : « seules les parties introduisent l'instance, hors les cas où la loi en dispose autrement. Elles ont la liberté d'y mettre fin avant qu'elle ne s'éteigne par l'effet du jugement ou en vertu de la loi ». L'article 1er donne solution pour le début et solution pour la fin de l'instance. I. Le début de l'instance Seules les parties introduisent l'instance : principe d'initiative (ou d’impulsion) processuelle. Le juge ne peut pas se saisir d'office, parce que les intérêts sont privés. Dans des domaines particuliers dans lesquels l'intérêt général est particulièrement concerné, le juge peut toutefois se saisir d'office. Avant, il y avait un certain nombre d'exceptions en matière de procédure collective : le juge pouvait s'auto-saisir par exemple d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. On le justifiait par l'intérêt général. Mais on se heurtait alors à l'inconvénient de la saisine d'office, qui a conduit en procédure pénale à dissocier les fonctions de poursuite et de jugement : la question de l'impartialité du juge. Si le juge s'est auto-saisi, c'est qu'il a envie de prononcer un jugement d'ouverture d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire. C'est pourquoi le CC a fini par décider dans une décision du 7 décembre 2012 que l'un des cas de saisine d'office en matière de procédure collective était inconstitutionnelle comme contraire au principe d'impartialité. Par la suite, d'autres décisions du CC ont jugé la même chose à propos d'autres cas de saisine d'office prévus en matière de procédure collective, si bien que le législateur a fini par réformer tout cela, et il n'en existe presque plus. Il y avait également, avant 2007, un cas de saisine d'office en matière de majeurs protégés. Le juge des tutelles pouvait s'auto-saisir lorsqu'il recevait un signalement d'un proche du majeur ou des services sociaux indiquant qu'il fallait sans doute ouvrir une tutelle. La loi du 5 mars 2007 a supprimé cette possibilité. Il reste principalement deux exemples : ✱ En matière d'assistance éducative, en vertu de l'article 375 du Code civil, « le juge peut toujours se saisir d'office à titre exceptionnel pour ordonner des mesures d'assistance éducative si la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises ». ✱ En matière de protection des mineurs, le juge des tutelles, en cas d'administration légale, par les parents, peut à tout moment et pour cause grave décider d'office d'ouvrir la tutelle (article 391 Code civil). Finalement, les seules matières dans lesquelles subsiste le pouvoir du juge de se saisir d'office concerne les mineurs en danger. Dans ce cas, le juge est appelé à jouer un rôle protecteur qui prime sur le strict respect de l'exigence d'impartialité. II. La fin de l'instance En principe, l'instance est finie quand le juge prononce son jugement. Le jugement met donc fin à l'instance. Mais il existe aussi des causes légales, où la loi met fin à l'instance. Les parties ont le pouvoir de mettre fin à l'instance de leur propre volonté, avant qu'un jugement soit rendu, ou que la loi ait éteint l'instance. Ces actes qui mettent fin au procès de façon anticipée sont : ✱ Si c'est le demandeur qui veut mettre fin à l'instance : un acte de désistement ✱ Si c'est le défendeur : acte d'acquiescement à la demande dans lequel il reconnaît les prétentions de l'adversaire ✱ Lorsque les deux parties décident ensemble de mettre fin à l'instance, elles le font dans un contrat appelé transaction judiciaire lorsque les parties montrent leur accord de transaction au juge, lui demandent de constater qu'il n'y a plus de litige et de se dessaisir. Le constat du juge va conférer force exécutoire à la transaction. Lorsque l'un de ces actes (= incident d'instance) survient, cela met fin à l'instance. Pourquoi ce monopole des parties sur le début et la fin de l'instance ? Parce que le début et la fin de l'instance soulèvent la question de savoir si le litige va recevoir une solution judiciaire ou non. En procédure civile, seules les parties peuvent répondre à cette question. Les intérêts sont privés, elles sont maîtresses de leur litige, et donc de la façon dont elles veulent le régler. La logique n'est pas la même pour le rythme de l'instance une fois qu'elle a été introduite. SECTION 2 – LES RÔLES RESPECTIFS DU JUGE ET DES PARTIES À L'ÉGARD DE LA CONDUITE DE L'INSTANCE Déterminer les rôles respectifs du juge et des parties à l'égard de la conduite de l'instance, c'est se demander qui du juge ou des parties décide du rythme auquel progresse l'instance, de l'avancée de la procédure. Dès lors que les parties ont saisi une juridiction étatique, c'est-à-dire qu'elles ont choisi une solution judiciaire, elles doivent accepter les contraintes liées à l'organisation et au fonctionnement du service public de la justice. Les articles 2 et 3 précisent qui décide du rythme de l'instance. Ils donnent l'impression d'une coopération du juge et des parties. L'article 2 dispose que « les parties conduisent l'instance sous les charges qui leur incombent. Il leur appartient d'accomplir les actes de la procédure dans les formes et délais requis ». L'article 3 dispose que « le juge veille au bon déroulement de l'instance. Il a le pouvoir d'impartir les délais et d'ordonner les mesures nécessaires ». En réalité, les parties ont un rôle très faible dans la conduite de l'instance. C'est le juge principalement qui dirige l'instance, parce que c'est lui qui impose des délais, qui sanctionne le non-respect de ces délais, le non-respect des formes. Tout ce que les parties ont la liberté de faire s'agissant du rythme de l'instance, c'est de faire valoir qu'elles ont encore des choses à dire et veulent encore déposer un jeu de conclusion, ce que le juge doit accepter. La direction de l'instance revient ainsi largement au juge, dans un objectif d'efficacité du service public de la justice, ce que Loïc Cadiet appelle « le management judiciaire », qui revient au juge en tant que l'agent de la fonction publique chargé du bon déroulement, du bon fonctionnement de ce service public. C'est ce qui lui donne le pouvoir d'impartir les délais et d'ordonner les mesures nécessaires. Il peut s'agir d'injonction de conclure si la partie n'a toujours pas respecté le délai qui lui a été conféré, d'injonction de communiquer des pièces si une partie cite une pièce dans ses conclusions mais ne l'a pas communiquée à l'autre partie, etc.. Ces injonctions peuvent être assorties d'astreintes. Le juge peut décider de clôturer l'instance si ces astreintes ne sont pas respectées. Si elles sont déposées la veille de la clôture, le juge peut décider d'écarter les conclusions ou les pièces qui ne sont pas déposées en temps utiles. SECTION 3 – LES RÔLES RESPECTIFS DU JUGE ET DES PARTIES À L'ÉGARD DE LA MATIÈRE LITIGIEUSE La matière litigieuse, ce sont les éléments du litige sur le terrain du fond, du droit substantiel : qu'est-ce qu'il s'est passé, qu'est-ce qui oppose les parties, qu'est-ce qu'elles demandent, prétentions du défendeur et du requérant, contestation des visas par le défendeur, etc... On peut ainsi distinguer d'abord ce que demandent les parties, les prétentions au sens strict du terme (dommages-intérêts, nullité d'un contrat, établissement d'un lien de filiation, rejet des prétentions adverses...), bref, l'objet du litige. Et d'autre part, la catégorie qui se compose des raisons pour lesquelles les parties estiment qu'elles ont droit à ce qu'elle demande, et que la partie adverse n'a pas droit à ce qu'elle demande. Ces raisons sont factuelles, mais aussi juridiques. Elles constituent les moyens des parties au soutien des demandes ou des défenses. Cette seconde catégorie peut être décomposée : Ensemble de faits ; Éléments juridiques : Qualifications ; Détermination des règles de droit qui se déduisent de la qualification Le défendeur va essayer de contester ces qualifications, pour écarter l'application des règles de droit déterminées en application de ces qualifications. Le CPC distingue les divers éléments de la structure de la matière litigieuse. Dans les articles qui constituent les principes directeurs sont évoqués successivement : L'objet du litige ; Les faits ; Le droit Pour déterminer les rôles respectifs du juge et des parties à l'égard de la matière litigieuse, il faut étudier deux questions successives, car il y a deux étapes : Quel est le domaine d'action du juge ? Corrélativement, quel est le domaine réservé des parties ? Quelle est l'intensité des pouvoirs du juge ? Est-il obligé de les exercer ou est-ce une faculté pour lui ? I. Les domaines respectifs d'intervention du juge et des parties Pour déterminer ces domaines respectifs, il faut mettre en œuvre un principe classique de procédure civile, appelé le principe dispositif. Le principe dispositif est le principe selon lequel les parties disposent de certains aspects du litige. Corrélativement, à propos de ces aspects, le litige est indisponible pour le juge. Il faut donc préciser quels sont les aspects indisponibles pour le juge, et les aspects disponibles pour le juge. A) Le domaine réservé des parties : le principe dispositif Ce domaine contient deux aspects : l'objet du litige, puis, parmi les éléments invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions ou pour contester les prétentions adverses, les éléments factuels. 1) L'objet du litige L'article 4 définit l'objet du litige. Dans son alinéa 1er, il dispose : « L'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ». Puis, à l'alinéa 2 : « Ces prétentions sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense. Toutefois, l'objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant ». L'alinéa 2 en réalité n'est pas très clair. L'important est l'alinéa 1er. L'objet du litige est l'addition des objets de toutes les demandes. Autrement dit, l'objet du litige est la somme de toutes les prétentions invoquées au cours du procès. Par prétention, on entend ce qu'il est demandé au juge d'accorder. Concrètement, c'est ce qui est demandé dans le dispositif de l'assignation ou de conclusion. L'objet du litige relève du domaine réservé des parties. L'article 5 énonce que « Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ». Cet article implique trois interdictions pour le juge : Le juge ne doit pas statuer ultra petita, c'est-à-dire qu'il ne peut pas accorder plus que ce qui lui est demandé ; Le juge ne doit pas statuer extra petita, c'est-à-dire qu'il ne peut pas accorder autre chose que ce qui lui est demandé ; Le juge ne doit pas statuer infra petita, c'est-à-dire omettre de statuer sur une des demandes Le juge ne doit donc pas statuer sur quelque chose qui n'a pas été demandé. Il y a des exceptions légales ponctuelles pour venir en aide à des parties qui ne songeraient pas à demander tout ce à quoi elles ont droit. Le juge peut notamment décider d'office à propos d'une clause pénale d'en modérer le montant ou de l'augmenter lorsqu'il est dérisoire. Lorsqu'il fait cela, le juge accorde un avantage que l'on ne lui a pas demandé d'apporter, c'est donc une dérogation au principe dispositif. Ces dérogations sont très rares. 2) Les éléments factuels apportés au débat par les parties Ce sont les faits. On distingue l'allégation des faits et la preuve des faits. a) L'allégation des faits Selon l'article 6, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder. Alléguer ne doit pas être confondu avec prouver. Alléguer, c'est affirmer. Apporter la preuve, c'est apporter un élément de preuve. D'après l'article 6, ce sont les parties qui doivent alléguer les faits. Cette charge est aussi un monopole, c'est-à-dire que le juge n'a pas de rôle dans cette affaire. C'est ce qu'énonce l'article 7 alinéa 1er : « Le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat ». Mais il existe deux catégories de fait dans le débat, cités à l'alinéa 2 : « Parmi les éléments du débat, le juge peut prendre en considération même les faits que les parties n'auraient pas spécialement invoqués au soutien de leurs prétentions ». Ces faits sont tous les faits allégués d'une manière ou d'une autre par les parties. Parmi ceux-ci, on distingue deux catégories : Les faits allégués spécialement par les parties : ce sont des faits que les parties ont utilisé au soutien de leur thèse, donc auxquelles elles sont conféré une qualification, ce dont elles ont déduit l'application d'une règle de droit ; Les faits adventices : ce sont tous les autres faits, énoncés de façon incidente (date, lieu, etc) qui ne sont pas utilisés spécialement au soutien de la thèse, mais qui se retrouvent dans le débat et résultent des pièces produites Le juge peut se fonder non seulement sur les faits spécialement allégués par les parties, mais aussi sur tous les autres faits pourvus qu'ils ont été apportés par elles au débat, même de façon purement incidente. Il n'a simplement pas le droit de se fonder sur des faits dont il n'a qu'une connaissance personnelle. Le très léger tempérament à cette maîtrise des parties sur les faits est l'article 8 : « Le juge peut inviter les parties à fournir les explications de faits qu'il estime nécessaires à la solution du litige ». C'est-à-dire provoquer l'introduction par les parties elles-mêmes de nouveaux faits qu'elles vont éventuellement apporter en réponse aux demandes d'explication. b) La preuve des faits L'article 9 dispose : « Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ». C'est aussi aux parties de prouver les faits. Donc elles doivent apporter des témoignages, des procès-verbaux, des photos, etc.. Le juge ne peut pas directement introduire des éléments de preuve dans le débat. Mais, indirectement, le juge peut quand même jouer un rôle important, puisque l'article 10 dispose : « Le juge a le pouvoir d'ordonner d'office toutes les mesures d'instruction légalement admissibles ». Même si aucune partie ne demande une expertise ou une autre mesure d'instruction, le juge peut d'office estimer que cette mesure d'instruction est nécessaire et l'ordonner d'office. Il peut donc prendre l'initiative d'apporter au débat des éléments de preuve que les parties n'auront pas apportées elles-mêmes. Indirectement, s'il est ordonné une expertise, les éléments de preuve seront apportés par l'expert, mais sur la provocation du juge. Enfin, l'article 11 évoque également les rôles des parties et du juge à l'égard de la preuve. L'article 11 alinéa 1er évoque les mesures d'instruction : « Les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction sauf au juge à tirer toutes conséquences d'une abstention ou d'un refus ». Cela signifie que les parties doivent participer de bonne foi aux mesures d'instruction, et le juge, de son côté, pourra déduire de leur attitude réticente un élément de preuve. L'alinéa 2 concerne les pièces : « Si une partie détient un élément de preuve, le juge peut, à la requête de l'autre partie, lui enjoindre de le produire, au besoin à peine d'astreinte. Il peut, à la requête de l'une des parties, demande ou ordonner, au besoin sous la même peine, la production de tout document détenu par des tiers s'il n'existe pas d'empêchement légitime ». Si une partie détient une pièce qui est mauvaise pour elle, qui ne va pas dans son sens, et que l'autre sait qu'elle la détient ou le soupçonne fortement, cette partie peut être forcée à produire la pièce (loi de 1972). Avant cette loi, l'adage nemo contra se edere tenetur, « on ne peut pas être contraint de prouver contre soi » posait le principe contraire. Les mentalités ont changé avec le CPC : on s'est mis à considérer que dans le procès civil aussi, la vérité était importante. Il fallait que la solution se rapproche autant que possible de la vérité. Donc il faut produire toute pièce essentielle, même qui va à l'encontre de sa propre position. Dans les pays anglo-saxons, la procédure de discovery oblige chaque partie à produire spontanément toutes les pièces qui ont un rapport de près ou de loin avec l'affaire, qu'elles soient bonnes ou mauvais pour elle, avec la sanction du contempt of court si elles n'ont pas produit une pièce qu'elles détenaient. En France, on ne peut pas reprocher à une des parties de ne pas avoir produit spontanément une pièce. Mais si une des parties se doute qu'une pièce importante est détenue par l'autre, alors elle peut demander au juge de forcer cette partie à produire la pièce. Il y a là une espèce de coopération entre le juge et les parties à l'égard de la preuve. L'objet du litige est donc totalement indisponible pour le juge, sauf rares exceptions légales. En ce qui concerne l'allégation des faits dans le débat, c'est un monopole des parties, à l'exception de l'article 8 qui permet au juge de solliciter des explications de fait. En ce qui concerne la preuve, en principe, les parties apportent les éléments de preuve, mais le juge peut ordonner d'office une mesure d'instruction contribuant à introduire des nouveaux éléments de preuve dans le débat, et peut ordonner à une des parties de produire une preuve qui serait utile dans le débat. B) Le domaine disponible pour le juge Il s'agit du droit, des éléments juridiques qui permettent d'accueillir la demande selon celui qui la forme, ou au contraire qui conduisent à la rejeter, selon le défendeur. Il s'agit donc de la qualification des faits et des règles de droit applicables. Le droit est au pouvoir du juge. Cela ne signifie pas que le domaine du droit est réservé au juge comme le domaine de l'objet et du fait est réservé aux parties. Autant il est vrai qu'en ce qui concerne le domaine réservé des parties, le juge ne peut pas prendre d'initiative, sauf exceptions prévues par la loi, autant il n'est pas vrai que dans le domaine du juge les parties n'auraient pas le droit de suggérer des éléments juridiques, au contraire. Les parties peuvent toujours suggérer un fondement juridique à leurs prétentions. En général, elles le font spontanément. Parfois, c'est le juge qui peut les inviter à fournir des explications de droit, c'est ce qu'énonce l'article 13 du CPC : « Le juge peut inviter les parties à fournir les explications de droit qu'il estime nécessaires à la solution du litige ». Très souvent, la loi leur fait obligation de suggérer un fondement juridique, ce que l'on appelle des écritures qualificatives. Les écritures qualificatives sont celles qui sont obligées de suggérer une qualification juridique, dont implicitement il sera déduit l'application d'une règle de droit. Il s'agit : De l'assignation, qui, en vertu de l'article 56 du CPC doit, entre autres mentions obligatoires, préciser l'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit ; Et des conclusions : il est prévu à l'article 753 du CPC pour le TJ et à l'article 954 du CPC pour la Cour d'appel que lorsqu'une demande est formée, elle doit aussi contenir un exposé des moyens en fait et en droit. Donc le juge n'est pas lié par les indications relatives au droit données par les parties. Ce pouvoir du juge sur le droit est exposé par l'article 12 du CPC. ✱ L'alinéa premier dispose que « Le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ». C'est la prohibition du jugement en équité, qui est le jugement dans lequel le juge ferait valoir un pouvoir modérateur pour adoucir ce que la loi pourrait avoir d'injuste dans telle ou telle circonstance. L'équité n'est pas une source de droit. ✱ Alinéa 2 : Le juge « doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ». Le juge doit donc requalifier quand les parties ont déjà proposé une qualification. Le juge doit donner leur exacte qualification quand les parties n'ont pas qualifié les faits, soit parce qu'elles en avaient le droit, soit parce qu'il s'agissait d'un fait adventice. ✱ L'alinéa 3 a été annulé par le CE. Il disposait : le juge « peut relever d'office les moyens de pur droit ». Cela signifiait qu'il pouvait relever d'office le bon fondement juridique. Même si l'article 12 ne le précise plus, la requalification par le juge est toujours suivie du relevé d'office de la règle de droit qui s'applique. La qualification sert à faire entrer des faits dans le présupposé d'une règle de droit. Les alinéas 3 et 4 prévoient tous deux des exceptions au pouvoir du juge qui résultent des alinéas 1 et 2. Ils ne sont jamais utilisés : ✱ Alinéa 3 : « Toutefois, il ne peut changer la dénomination ou le fondement juridique lorsque les parties en vertu d'un accord exprès et pour les droits dont elles ont la libre disposition l'ont lié par les qualifications et points de droit auxquels elles entendent limiter le débat ». Cela signifie que les parties peuvent s'accorder expressément pour que le juge n'exerce pas le pouvoir qu'il détient du fait des alinéas 1 et 2 de l'article 12. ✱ Alinéa 4 : « Le litige né, les parties peuvent aussi, dans les mêmes matières et sous la même condition, conférer au juge mission de statuer comme amiable compositeur sous réserve d'appel si elles n'y ont pas spécialement renoncé ». C'est ce que l'on appelle l'amiable composition judiciaire. C'est le fait d'avoir la mission de trancher le litige en équité. Pour récapituler, le juge a tout pouvoir sur le droit. Il peut qualifier, requalifier, changer de fondement juridique. Mais uniquement dans la mesure où ce faisant, il n'est pas conduit à ajouter des faits dans le débat ou à modifier l'objet du litige. Il arrive que les juges du fond pensent qu'ils n'ont pas le pouvoir de modifier le fondement juridique de la demande. On voit certains arrêts cassés par la Cour de cassation dans lesquels les juges du fond ont estimé qu'ils étaient liés par les moyens juridiques présentés par les parties, et donc qui ont rejeté la demande au motif qu'elle était mal formulée juridiquement, qu'elle ne s'appuyait pas sur le bon fondement juridique, et donc qu'ils avaient l'interdiction de modifier le fondement juridique. Ces arrêts sont cassés, car le juge a parfaitement le pouvoir de le faire en vertu de l'article 12 alinéas 1 et 2 du CPC. Mais le fait que l'on trouve des décisions du fond en ce sens est révélateur de ce que les magistrats sont parfois réticents à l'idée d'exercer ce pouvoir, car fatalement, s'ils constatent que le fondement juridique est mauvais, mais qu'il y en a un autre, et qu'ils le relèvent d'office, cela va venir aider l'une des parties, celle qui va profiter du fondement juridique. Cette idée leur donne l'impression qu'ils « descendent dans l'arène », qu'ils deviennent partiaux, prennent parti. Ce sentiment est-il justifié ? Être impartial ne signifie pas ne pas prendre parti, puisqu'en réalité c'est bien ce que l'on attend du juge, à un moment, c'est qu'il prenne parti en fonction de l'une des parties. Être impartial, c'est prendre parti mais sans avoir de préjugé. Autrement dit, être partial, c'est prendre parti en raison d'un préjugé qu'on aurait, c'est-à-dire en raison d'un motif qui ne devrait pas entrer en ligne de compte et qui conduit le juge à décider de favoriser une partie ou de défavoriser une partie. Autrement dit, c'est aider une partie parce qu'on veut l'aider et pas l'autre. Lorsque le juge relève d'office la bonne règle de droit, il n'a pas l'intention d'aider particulièrement cette partie. Il relève d'office la règle de droit dont il constate qu'elle s'applique, puis il constate que cela vient en aide à la partie. Mais ce faisant, il ne prend pas en compte une raison extérieure au litige. C'est simplement une déduction de la règle de droit applicable pour tout le monde. Donc en réalité, il n'y a aucune partialité dans le fait de relever d'office la règle de droit applicable, même si, ce faisant, cela vient en aide à l'une des parties. En revanche, il est vrai qu'il y a un problème, car on peut estimer que le juge va parfois relever d'office le bon fondement juridique, mais qu'un autre juge préférera rejeter la demande. Autrement dit, selon que le juge est plus ou moins désireux d'appliquer la bonne règle de droit ou de gagner du temps, le justiciable ne sera pas traité de la même façon. Il y a donc un réel problème d'égalité des justiciables devant la justice. Il faudrait que le juge soit obligé de relever d'office la règle de droit. II. L'intensité de l'office du juge au sein de son domaine d'intervention À l'article 12 alinéa 1, le CPC énonce « le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ». Cela vaut impératif. Le juge doit appliquer la bonne règle de droit. À l'alinéa 2, « le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux », c'est une obligation. Ces obligations reflètent la conception de Motulsky, selon lequel il était de la mission du juge de dire le droit, même si les parties ne suggéraient pas le bon fondement. C'était son devoir d'appliquer le droit. Selon lui, et donc selon le CPC, même si la vérité n'est pas un objectif aussi prégnant que dans le procès pénal, dans le procès civil aussi on s'efforce de s'approcher autant que possible de la vérité, donc de la solution juridiquement exacte. Auparavant, il existait un alinéa 3, qui a été annulé par erreur par le CE : « le juge peut relever d'office les moyens de pur droit », c'est-à-dire qu'il peut relever d'office le fondement juridique adéquat, la règle de droit applicable. C'était une faculté. Ce n'est pas Motulsky qui a écrit cet alinéa 3, mais Gérard Cornu, qui était moins extrême et qui pensait qu'il fallait ménager au juge une certaine liberté d'apprécier s'il y a lieu de relever ou non d'office une règle de droit. Le problème, c'est qu'obliger le juge en toutes circonstances à relever d'office la règle de droit qui s'applique présente un certain nombre d'inconvénients : le temps passé sur chaque dossier notamment, puisqu'il va devoir étudier la qualification des faits attentivement, et rechercher tous les faits adventices même s'ils n'ont pas été spécialement utilisés par les parties, de peur qu'un puisse donner lieu à l'application d'une règle de droit qui permettrait d'accorder la prétention. Autre inconvénient, cela entraîne une multiplication des risques de pourvoi en cassation. C'est pourquoi la jurisprudence n'a jamais adopté cette thèse de l'obligation de façon claire et univoque. Avant 2007, la jurisprudence était totalement divergente parmi les juges du fond et parmi les chambres de la Cour de cassation. La seule solution qui était adoptée par toutes les chambres et qui l'est encore aujourd'hui, c'est dans l'hypothèse dans laquelle les parties n'ont suggéré aucun fondement juridique à leur prétention, ce qu'elles peuvent faire si elles ne saisissent pas le juge par assignation, si elles ne sont pas devant le TJ ou la Cour d'appel lorsque la représentation est obligatoire, trois cas où la partie est obligée de suggérer un fondement juridique. En dehors de ces cas, la partie peut se contenter d'exposer des faits et une demande. Dans ce cas-là, la jurisprudence décide que le juge a l'obligation de relever la règle de droit applicable. Le problème se pose lorsque les parties ont suggéré un fondement juridique. Il peut modifier, mais le doit-il ? Un arrêt de l'assemblée plénière du 21 décembre 2007 est intervenu. A) La jurisprudence depuis 2007 1) L'arrêt du 21 décembre 2007 Il s'agissait d'une affaire de vente d'un véhicule d'occasion. Un acheteur achète une voiture d'occasion, celle-ci tombe en panne. L'acheteur assigne en justice le vendeur en demandant notamment au juge de réduire le montant du prix de vente. Il est débouté en première instance. Devant la Cour d'appel, il réitère sa demande et invoque un fondement juridique pour justifier qu'il a droit à la réduction du prix de vente : la garantie des vices cachés. La Cour d'appel le déboute de sa demande sur le fondement de la garantie des vices cachés au motif qu'il ne démontre pas que cette voiture était affectée d'un vice caché antérieur à la vente. L'acheteur forme alors un pourvoi en cassation. L'acheteur dispose notamment de deux actions si la chose vendue ne correspond pas à ce qu'il attendait : La garantie des vices cachées, ouverte si la chose est affectée d'un vice caché antérieur à la vente (article 1641 Code civil) : elle vise à obtenir une réduction du prix ; L'action en manquement à l'obligation de délivrance, ou action en défaut de conformité : action en responsabilité contractuelle, qui consiste à invoquer l'inexécution de l'obligation du vendeur de délivrer une chose conforme à ce qui était convenu (obligation de délivrance, article 1603 Code civil). Elle vise à obtenir des dommages-intérêts Quand faut-il agir en garantie des vices cachés ou en responsabilité contractuelle ? La jurisprudence précise des critères : c'est un vice caché si la voiture est affectée d'un défaut de fabrication ; c'est un défaut de conformité si le vendeur délivre une chose qui ne présente pas les caractères convenus. L'acheteur n'a pas le choix : il doit choisir la bonne action. Mais comme le critère est obscur, il se trompe souvent de fondement. Le moyen du pourvoi invoqué par l'acheteur commençait par invoquer l'article 12 alinéa 2 du CPC (exacte qualification du juge). L'acheteur fondait son action en garantie des vices cachés sur plusieurs faits, notamment des faits qui, selon lui, étaient en réalité de nature à fonder une action en défaut de délivrance, c'est-à-dire des faits qui pouvaient aussi bien être qualifiés de défauts de conformité, puisqu'il voulait acheter une voiture qui fonctionne et se retrouve avec une voiture qui ne fonctionne pas. Donc la Cour d'appel aurait dû rechercher d'office si l'action de l'acheteur n'était pas plutôt fondée sur le manquement du vendeur à son obligation de délivrance, et donc la Cour d'appel n'aurait pas dû se contenter de dire qu'il n'y a pas de vices cachés pour débouter la demande, mais aurait dû qualifier les faits de manquement à l'obligation de délivrance. Selon le pourvoi, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 12 du CPC, et 1603 et 1604 du Code civil. En d'autres termes, le syllogisme du pourvoi est le suivant : l'article 12 alinéa 2 oblige le juge à requalifier les faits, or, en l'espèce, l'acheteur avait mal qualifié les faits, donc la cour d'appel aurait dû requalifier les faits et en déduire que cette action pouvait être fondée sur la responsabilité contractuelle du droit commun. La Cour de cassation rejette le pourvoi avec l'attendu suivant : « Mais attendu que si, parmi les principes directeurs du procès, l'article 12 du nouveau code de procédure civile oblige le juge à donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions, il ne lui fait pas obligation, sauf règles particulières, de changer la dénomination ou le fondement juridique de leurs demandes; qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, qu'elle était saisie d'une demande fondée sur l'existence d'un vice caché dont la preuve n'était pas rapportée, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de rechercher si cette action pouvait être fondée sur un manquement du vendeur à son obligation de délivrance d'un véhicule conforme aux stipulations contractuelles, a légalement justifié sa décision de ce chef ». Le pourvoi est rejeté. La Cour de cassation distingue deux opérations : l'une des opérations suscite une obligation pour le juge, l'autre une simple faculté. En effet, selon l'attendu, l'article 12 oblige le juge à donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux (obligation de qualifier ou requalifier), mais il ne lui fait pas obligation de changer la dénomination ou le fondement juridique de leur demande. Autrement dit, il ne lui fait pas obligation de relever d'office la règle de droit applicable et de la substituer à la mauvaise règle de droit. La Cour de cassation opère donc une distinction entre l'opération de qualification d'un côté, le juge est obligé de la faire, et l'opération de relever d'office la règle de droit de l'autre, ce que le juge n'est pas obligé de faire. Cela signifie que, en prenant à la lettre cet attendu, le juge est obligé de dire dans son jugement que ce n'est pas un dol mais une erreur, par exemple, mais il n'est pas obligé d'en déduire qu'il doit appliquer l'article 1137 du Code civil plutôt que l'article 1132 pour annuler ce contrat. Autrement dit, il doit dire la bonne qualification, mais peut ne pas changer le fondement juridique et donc débouter la demande. Cet illogisme est dénoncé par quasiment toute la doctrine. On ne peut pas traiter différemment deux opérations aussi logiquement liées l'une à l'autre, dès lors que la qualification ne sert qu'à indiquer quelle est la règle de droit applicable. Donc si on oblige à requalifier, on oblige aussi à relever d'office la règle de droit. L'intention de la Cour de cassation n'est donc de ne consacrer qu'une faculté. Le juge n'est pas obligé de relever d'office le bon fondement juridique, et donc il n'est pas obligé non plus de relever d'office la bonne règle de droit. Parfois, certaines règles particulières font toutefois obligation au juge de changer le fondement juridique. Deux types de règles prévoient que le juge a l'obligation de relever d'office une règle de droit : Des règles procédurales : par exemple en matière de nullité d'un acte de procédure pour vice de fond si la règle de fond est connue et d'ordre publique (article 120), de même pour les fins de non-recevoir d'ordre public (article 125 alinéa 1) ; Des règles de droit substantiel : par exemple, depuis la loi Hamon du 17 mars 2014, l'article R632-1 du Code de la consommation oblige le juge à relever d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle La question se posait de savoir si on devait considérer d'autres règles que celles qui le précisaient expressément. La jurisprudence postérieure à l'arrêt du 21 décembre 2007 a répondu à cette question. 2) La jurisprudence postérieure à 2007 Le principe a été réaffirmé, et les règles particulières qui y font exception ont été précisées. a) La réaffirmation du principe La Cour de cassation, de façon constante, a réaffirmé le principe selon lequel le juge n'a qu'une faculté de changer le fondement juridique de la demande, parfois avec le même attendu que l'arrêt de 2007, parfois avec un attendu légèrement modifié où on n'évoque plus la qualification. Un arrêt de la troisième chambre civile du 25 juin 2013 dit même franchement que si le juge du fond n'est pas obligé de changer le fondement juridique, il n'est pas non plus obligé, en amont, de requalifier la demande. Cet arrêt est contra legem, puisque contraire à la lettre de l'article 12 alinéa 2, mais il a le mérite d'exposer la réalité de la pratique. b) Les règles particulières Lorsqu'une loi de droit substantiel ne précise pas expressément qu'elle doit être relevée d'office par le juge, peut-on considérer qu'elle doit l'être lorsqu'elle est d'ordre public ? Autrement dit, le juge a-t-il l'obligation de relever d'office les règles de droit d'ordre public ? La doctrine pense que le juge a l'obligation de relever d'office les moyens d'ordre public. Au niveau de la jurisprudence, les arrêts sur la question sont rares. Longtemps, ceux-ci n'ont pas été explicites. Aujourd'hui, la situation est un peu plus claire depuis deux arrêts : ✱ Un arrêt de chambre mixte du 7 juillet 2017 : un litige opposait un agriculteur à la société Monsanto, qui avançait avoir été gravement intoxiqué par l'herbicide Monsanto utilisé. Il avait ouvert une cuve pour la nettoyer et avait inhalé les vapeurs de l'herbicide qui l'ont intoxiqué. Il reprochait à Monsanto de ne pas avoir spécifié dans la notice qu'il y a des risques d'inhalation de monochlorobenzène présent en quantité importante dans l'herbicide en question, et d'avoir préconisé d'utiliser un appareil de protection respiratoire au moment où on ouvre les cuves pour les nettoyer. Son action se fondait sur la responsabilité délictuelle. Les juges du fond ont condamné la société Monsanto sur ce fondement, qui forme un pourvoi en cassation. La Cour de cassation casse effectivement l'arrêt, mais pour un moyen relevé d'office auquel la société Monsanto ne s'attendait pas, pouvoir qu'elle a à condition que ce moyen soit de pur droit, et ne mène pas à apprécier les faits. Ce moyen consiste à faire valoir qu'en réalité les faits en question entraient dans le champ d'application de la responsabilité du fait des produits défectueux. Le produit défectueux est celui qui n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre (article 1245-3 Code civil). Pour apprécier cela, on doit tenir compte de toutes les circonstances, notamment de la présentation du produit et de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu. En l'espèce, le produit vendu par Monsanto pouvait être considéré comme défectueux. La Cour de cassation commence donc par viser la directive du 25 juillet 1985 qui a inspiré la réglementation sur la responsabilité du fait des produits défectueux. Les articles 1386-1 et suivants du Code civil devenus 1245 et suivants du Code civil qui constituent la transposition de cette directive du 25 juillet 1985, ensemble l'article 12 du CPC, et les principes de primauté et d'effectivité du droit de l'UE. Puis l'arrêt contient un attendu de principe : « attendu que, si le juge n'a pas, sauf règle particulière, l'obligation de changer le fondement juridique des demandes, il est tenu, lorsque les faits dont il est saisi le justifient, de faire application des règles d'ordre public issues du droit de l'UE, telle la responsabilité du fait des produits défectueux, même si le demandeur ne les a pas invoquées. » L'arrêt est donc cassé sur ce fondement. On apprend donc avec cet arrêt du 7 juillet 2017 que le domaine de l'obligation du juge de relever d'office les règles de droit dépasse effectivement le cadre où la loi le dirait expressément pour s'étendre au moins aux règles d'ordre public issues du droit de l'UE. ✱ Pour les autres règles, un nouvel arrêt a été rendu : un arrêt de la deuxième chambre civile du 5 juillet 2018. Il s'agissait d'un accident de la circulation. Un scooter était entré en collision avec une voiture. Le scooter était abîmé, son propriétaire demande réparation au propriétaire de la voiture pour les dommages causés au scooter, et se fonde sur l'article 1240 du Code civil. C'est la juridiction de proximité qui était compétente, et qui le déboute en lui disant que le fondement juridique était mauvais. Il a formé un pourvoi en cassation, et cet arrêt est cassé. « Qu'en statuant ainsi, alors que selon ses propres constatations les dommages avaient été causés par un accident de la circulation survenu entre deux véhicules à moteur, de sorte qu'il lui incombait pour trancher le litige de faire application, au besoin d'office, des dispositions d'ordre public de la loi du 5 juillet 1985. La juridiction de proximité a donc violé les textes susvisés ». Il résulte donc de la combinaison des arrêts de 2017 et de 2018 que les règles particulières qui font obligation au juge de relever d'office la règle de droit sont les règles d'ordre public en général. B) Les critiques doctrinales formulées contre la solution Finalement, à part le cas de la règle d'ordre public, le juge a désormais une simple faculté de relever d'office les moyens de droit, et donc en amont de les requalifier. Pourquoi la Cour de cassation a-t-elle pris ses décisions ? Ce sont des objectifs de politique judiciaire. Ils permettent d'évacuer un grand nombre de contentieux de la Cour de cassation, et favorisent l'objectif de célérité de la justice. Avec cette solution, le juge n'est plus obligé de dire le droit, donc corrélativement les parties sont responsabilisées. C'est à elles de chercher les diverses règles qui pourraient éventuellement justifier leurs prétentions en prévoyant des fondements subsidiaires. La sanction est très sévère depuis l'arrêt Cesareo : si une partie ne pense pas au bon fondement juridique, le juge n'est pas obligé de le relever d'office, le procès se termine sans qu'elle ait réussi à obtenir ce qu'elle voulait, si elle découvre une autre règle de droit applicable, c'est trop tard en raison de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt Cesareo. Dans le communiqué qui a suivi l'arrêt de 2007, la Cour de cassation déclare que « cette décision se situe dans le sillage d’une évolution marquée par le décret du 28 décembre 1998 » qui oblige les parties à suggérer un fondement juridique dans l'assignation, et dans les conclusions du TJ et de la Cour d'appel lorsque la représentation est obligatoire « et un précédent arrêt rendu par l’assemblée plénière le 7 juillet 2006 » l'arrêt Cesareo, « qui, redessinant les rôles respectifs des parties et du juge dans le procès civil, repose sur l’idée que si le juge doit jouer un rôle actif dans le déroulement du procès, il n’a pas à remplir tous les rôles, et qu’il revient aux parties elles-mêmes, représentées par des conseils professionnels, d’invoquer tous les moyens susceptibles de fonder leurs prétentions. ». La doctrine a été très critique. D'abord, il y a quelque chose d'illogique dans la combinaison de cette solution avec la solution selon laquelle si les parties ne suggèrent aucun fondement juridique, lorsqu'elles peuvent le faire, le juge a l'obligation de relever d'office la bonne règle de droit. Cela signifie que les parties ont plutôt intérêt à exposer seulement les faits et leur demande lorsqu'elles le peuvent, sans avancer de fondement. Autre critique, d'après les mots du recteur Serge Guinchard, « il faut substituer à l'adage « donne-moi le fait, je te donnerai le droit », l'adage « donne-moi le fait et le droit, et je te donnerai un jugement », comprendre « je trancherai entre les faits en présence, pour le reste, tant pis pour vous » ». Serge Guinchard veut dire que l'arrêt réintroduit une dose d'accusatoire dans le procès civil, puisque le juge peut se contenter, s'il le préfère, d'être un simple arbitre sportif et de donner raison à la meilleure des thèses, sans prendre aucune initiative. On consacre un « semi-retour en arrière », avant le nouveau CPC. Mais, a contrario, l'obligation du juge de relever la règle de droit qui s'applique en toutes circonstances est une solution qui fait peser sur le juge une charge très lourde. En général, la doctrine qui critique l'arrêt de 2007 ne va pas aussi loin, et propose une solution équilibrée : elle propose de procéder à une distinction : Parfois, le juge a l'obligation de relever d'office la règle applicable ; Parfois ce n'est qu'une faculté La doctrine a recours à une distinction entre deux types de moyens : Les moyens de pur droit ; Les moyens mélangés de fait et de droit Cette distinction est prévue par le CPC et existe techniquement, mais uniquement devant la Cour de cassation, où elle a un contenu précis. Lorsque la doctrine utilise ces deux expressions pour évoquer les pouvoirs du juge du fond à l'égard du relevé d'office de la règle de droit, elle change le sens de ces expressions. La notion de moyen a le même sens devant la Cour de cassation et devant le juge du fond. Un moyen est un raisonnement complet qui met en relation un fait et une règle de droit par le truchement d'une opération de qualification, et déduit de l'application de la règle de droit aux faits un résultat. Autrement dit, un moyen est un fait assorti d'une déduction juridique. Le moyen comprend donc l'allégation d'un fait, la preuve de ce fait, la qualification du fait, l'invocation d'une règle de droit et la déduction de l'effet juridique de cette règle de droit en l'espèce. Le moyen peut émaner du demandeur, mais aussi du défendeur (moyen à l'appui du rejet de la demande), ou encore du juge lorsqu'il relève un moyen d'office. On parle de moyen de droit ou de moyen de fait. ✱ Moyen de fait : moyen qui ajoute un élément de fait par rapport à ce qui avait déjà été invoqué, mais toujours à l'appui de la même qualification entraînant l'implication de la même règle de droit. ✱ Moyen de droit, on conserve les faits tels qu'ils ont déjà été allégués et prouvés, simplement, on ajoute une qualification à ces faits, et donc l'application d'une autre règle de droit. Dans le CPC, c'est-à-dire devant la Cour de cassation, la distinction des moyens de pur droit et des moyens mélangés de fait et de droit est en lien avec le rôle particulier de la Cour de cassation qui statue uniquement en droit. Cela signifie que, devant elle, si une partie veut soulever un moyen nouveau, c'est-à-dire auquel elle n'avait pas pensé devant les juges du fond, ou si la Cour de cassation veut relever d'office un moyen, il faut que ce moyen soit de pur droit. Cela veut dire qu'il faut que ce moyen consiste dans le fait d'appliquer une règle de droit qui n'avait été invoquée par personne, mais de l'appliquer à des faits tels qu'ils sont constatés dans la décision attaquée et sans les remettre en cause. Donc si à partir de ces faits auxquels la Cour de cassation ne touche pas, la Cour de cassation déduit l'application d'une autre règle de droit, c'est un moyen de pur droit, qui peut donc être présenté par une partie de manière nouvelle, ou par la Cour de cassation qui le relève d'office. Le moyen mélangé de fait et de droit est au contraire celui qu'une partie cherchera peut-être à invoquer devant la Cour de cassation comme un moyen nouveau, mais qu'elle déclarera comme irrecevable car il se fonde sur des faits qui ne sont pas évoqués par la décision attaquée, ou pas de la façon dont ils ont été constatés par le juge du fond, bref, qui amèneraient la Cour de cassation à apprécier les faits. Quand la doctrine utilise ces expressions pour le juge du fond, le sens est nécessairement différent, puisque le juge du fond peut statuer sur les faits et sur le droit. ✱ Le moyen de pur droit au sens doctrinal du terme devant le juge du fond est ainsi le moyen qui repose sur un fait qui a été spécialement invoqué par une partie au soutien de sa prétention. ✱ Le moyen mélangé de fait et de droit devant le juge du fond est le moyen de droit qui repose sur des faits qui ne sont pas spécialement invoqués par les parties au moyen de ses prétentions, c'est-à-dire sur des faits adventices, incidents, qui se trouvent dans le dossier. Cela implique de la part du juge qu'il invoque un nouvel élément juridique en se fondant sur des faits qui étaient simplement adventices, dans le dossier. La doctrine estime que le juge a l'obligation de relever d'office le moyen de pur droit au sens de la doctrine. La doctrine considère que le juge est impardonnable de ne pas prendre le temps de constater que le fait qui est spécialement porté à son attention, puisqu'une qualification en est proposée, non seulement ne permet pas de recevoir cette qualification, mais pourrait également recevoir une autre qualification. Cela ne lui ferait pas perdre tant de temps que cela. Il paraît équilibré que de l'obliger à requalifier un fait si c'est possible. En revanche, on ne peut pas l'obliger à parcourir tout le dossier à la recherche du fait adventice qui pourrait être qualifié d'une certaine autre façon donnant lieu à l'application d'une autre règle de droit pouvant aboutir à accepter la demande. Ce ne serait donc qu'une faculté. Avant 2007, cette distinction était consacrée par peu d'arrêts. En toute hypothèse, le juge doit respecter le principe de la contradiction. CHAPITRE 2 – LE PRINCIPE DE LA CONTRADICTION Le principe de la contradiction, parfois appelé principe du contradictoire, qui impose que chaque partie soit mise en mesure de s'exprimer sur les arguments invoqués contre elle est un principe fondamental, pour plusieurs raisons : il garantit la loyauté du procès, et il a une grande incidence sur la recherche de la vérité. En effet, le juge va avoir les points de vue, les thèses, de toutes les parties, et c'est en les confrontant qu'il va pouvoir percevoir où se situe la vérité. Le principe de la contradiction fait partie des droits de la défense. C'est une notion qui ne se trouve pas dans le CPC, mais qui est souvent utilisée. Les droits de la défense sont les droits impliqués par la défense des intérêts de chacune des parties (défendeur et demandeur). Outre le principe de la contradiction, on y trouve l'impartialité du tribunal, la liberté de la défense, la motivation des jugements, la publicité des débats, etc.. Les droits de la défense ont été qualifiés par le CC de « droit fondamental à un caractère constitutionnel ». Le CC en a fait un principe général du droit. Donc le principe du contradictoire qui fait partie des droits de la défense revêt la même valeur constitutionnelle et de PGD. La notion est trop vague pour rentrer dans le CPC toutefois, et rappelait trop le procès pénal. Le principe de la contradiction est évoqué dans le CPC aux articles 14 à 17. Il a deux visages : Il est exigé dans les rapports entre les parties : les parties doivent s'informer mutuellement de l'existence d'un procès et des éléments qui sont invoqués l'une contre l'autre ; Il est exigé dans les rapports entre les parties d'une part et le juge d'autre part : le juge doit soumettre ses initiatives à la discussion des parties SECTION 1 – LA CONTRADICTION DANS LES RAPPORTS ENTRE LES PARTIES Elle implique une double obligation chronologique : D'appeler le défendeur au procès ; De communiquer ses pièces et ses moyens à la partie adverse 1) L'information du défendeur L'article 14 dispose : « Nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée ». Cet article est inspiré d'un adage latin classique, « audiatur et altera pars », « que l'autre partie soit aussi entendue ». Cela a été consacré par un arrêt de 1828 notamment. Ce principe explique certaines des règles de procédure : les règles de notification des actes de procédure, notamment de l'assignation. Il existe une exception au principe de l'article 14, l'article 17, selon lequel « lorsque la loi permet ou la nécessité commande qu'une mesure soit ordonnée à l'insu d'une partie, celle-ci dispose d'un recours approprié contre la décision qui lui fait grief ». Il y a donc des cas dans lesquels le contradictoire n'est pas respecté au moment où le juge statue, mais alors l'autre partie doit avoir un recours approprié. Cela est le cas « lorsque la loi le permet ou que la nécessité le commande ». C'est l'exemple de la saisie conservatoire, ou du constat d'adultère. Pour que l'huissier puisse pénétrer au domicile d'une personne pour éventuellement constater que cette personne commet un adultère, il faut l'autorisation du juge. Mais si l'époux est convoqué devant le juge avant tout, alors i

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