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Thème 1 : Le droit à un procès équitable SECTION 1 – LES GARANTIES RELATIVES AU TRIBUNAL Les garanties relatives au tribunal comprennent le droit d’accès à un tribunal (I), indépendant (II) et impartial I. Le droit d’accès au tribunal Le droit d’accès au tribunal comprend le droit d’accès à...
Thème 1 : Le droit à un procès équitable SECTION 1 – LES GARANTIES RELATIVES AU TRIBUNAL Les garanties relatives au tribunal comprennent le droit d’accès à un tribunal (I), indépendant (II) et impartial I. Le droit d’accès au tribunal Le droit d’accès au tribunal comprend le droit d’accès à un premier juge (1) et celui d’exercer une voie de recours (2). Il faut dès à présent préciser que le terme « tribunal » doit être entendu au sens large comme toute juridiction appelée à statuer, que la formation soit collégiale ou unique (ex : juge d’instruction, juge des libertés et de la détention, chambre de l’instruction ou tribunal correctionnel...). 1. Droit d’accès à un premier juge. Si l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (« ConvEDH ») n’évoque pas explicitement le droit d’accès au juge, la Cour européenne des droits de l’Homme (« CourEDH ») a estimé que ce droit s’induit nécessairement du droit à un procès équitable, car « on ne comprendrait pas que l’article 6. § 1 décrive en détail les garanties de procédure accordées aux parties à une action civile en cours et qu’il ne protège pas d’abord ce qui seul permet d’en bénéficier en réalité : l’accès au juge » (CourEDH, Golder c. Royaume-Uni, 21 février 1975, n° 4451/70). Limite. Le droit d’accès à un tribunal n’impose pas aux États d’octroyer le droit à l’assistance judiciaire. Illustrations. Le droit d’accès au tribunal doit être concret et effectif. Sont contraires au droit d’accès à un tribunal : o La mise en place d’un coût de procédure trop élevé (CourEDH, Airey c. Irlande, 9 octobre 1979, n° 6289/73) ; o La demande d’une somme de consignation excessive (CourEDH, Aït-Mouhoub c. France, 28 octobre 1998, n° 22924/93) ; o La prise en compte des chances de succès des prétentions d’un individu dans le cadre de l’octroi ou du refus du bénéfice de l’aide juridictionnelle (CourEDH, Aerts c. Belgique, 30 juillet 1998, n° 25357/94). Application en matière pénale. Le droit d’accès au juge est particulièrement important lorsqu’un individu est sous le coup d’une mesure de contrainte : Article 5 de la ConvEDH Article 66 de la Constitution Article préliminaire, III, du CPP Le droit d’une personne arrêtée ou détenue : §3. « d’ être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires ». §4. « d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale ». « Nul ne peut être arbitrairement détenu ». « L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ». « Les mesures de contrainte dont la personne suspectée ou poursuivie peut faire l’objet sont prises sur décision ou sous le contrôle effectif de l’autorité judiciaire ». 2. Droit au recours effectif. Le « droit des personnes intéressées d’exercer un recours effectif devant une juridiction » a été consacré par le Conseil constitutionnel (Cons. const., 9 avril 1996, n° 96-373). Limite. Le droit d’accès à un tribunal ne crée pas d’obligations à l’égard des États de créer des cours d’appel ou de cassation (CourEDH, Brualla Gomez de la Torre c. Espagne, 19 décembre 1997, n° 26737/95). Toutefois, quand une voie de recours existe et que les conditions juridiques d’exercice sont remplies, les États ne peuvent pas entraver l’exercice de ce recours. Par exemple, le droit à un recours effectif est méconnu lorsque le greffe d’un centre de détention ne transmet pas la demande d’exercice d’une voie de recours d’un détenu à la juridiction compétente en temps utile (CourEDH, Barbier c. France, 17 janvier 2006, n° 76093/01). 3. Droit à un double degré de juridiction. Le droit à un double degré de juridiction découle du droit au recours effectif et est protégé par les normes suivantes : Article 2 du Protocole additionnel n°7 à la ConvEDH Article préliminaire, III, du CPP Consacre et limite le droit à un double degré de juridiction : «Toute personne condamnée a le droit de faire examiner sa condamnation par une autre juridiction ». 2.1 « Toute personne déclarée coupable d'une infraction pénale par un tribunal a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la condamnation. » 2.2 « Ce droit peut faire l'objet d'exceptions », il peut notamment être exclu pour les infractions mineures. Le Conseil constitutionnel a déclaré que les restrictions à la possibilité pour la partie civile de se pourvoir en cassation contre les arrêts de non-lieu ne sont pas conformes à la Constitution (Cons. const., 23 juillet 2010, n° 2010- 15/23 QPC). Limite. Le droit à un double degré de juridiction n’est pas absolu et connaît des exceptions. La loi prévoit notamment des cas dans lesquels il n'est pas possible de faire appel. Par exemple, depuis le 1er janvier 2020, lorsque le tribunal judiciaire est appelé à connaître, en matière civile, d’une action personnelle ou mobilière portant sur une demande dont le montant est inférieur ou égal à la somme de 5.000 euros, ses décisions sont rendues en premier et « dernier ressort » (art. R211-3-24 COJ). II. Le droit à un tribunal indépendant L’indépendance du tribunal est garantie sur le plan international et interne par les articles suivants : Article 6 de la ConvEDH Article 64 de la Constitution Article 16 de la DDHC Consacre le droit à ce que sa cause soit entendue par « un tribunal indépendant établi par la loi ». « Le président est garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire ». « Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n’est pas assurée ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». Le tribunal doit notamment être indépendant à l’égard du pouvoir exécutif (1), du pouvoir législatif (2), des parties (3). Cette indépendance est organique, fonctionnelle et/ou psychologique. 1. Indépendance par rapport au pouvoir exécutif. La CourEDH a dégagé des critères d’appréciation de l’indépendance d’une juridiction (CourEDH, Campbell et Fell c. Royaume-Uni, 28 juin 1984, n° 7819/77; 7878/77) : o Le mode de désignation : le pouvoir exécutif ne doit pas nommer discrétionnairement les juges d’une juridiction ; o La durée du mandat : la brièveté du mandat doit s’accompagner de garanties telles que l’inamovibilité ; o L’existence de garanties contre des pressions extérieures : le pouvoir exécutif ne doit pas donner des instructions dans l’exercice de l’activité juridictionnelle. 2. Indépendance par rapport au pouvoir législatif. Le Parlement ne doit pas pouvoir modifier les données d’un procès ou influer sur sa solution. Cette protection est assurée par le Conseil constitutionnel selon lequel « il n'appartient ni au législateur ni au Gouvernement de censurer les décisions des juridictions, d'adresser à celles-ci des injonctions et de se substituer à elles dans le jugement des litiges relevant de leur compétence. » (Cons. const., 22 juillet 1980, n° 80-119). 3. Indépendance par rapport aux parties. Les magistrats du siège et les magistrats du parquet doivent être indépendants des parties au procès. C’est la raison pour laquelle un principe d’irresponsabilité civile des magistrats existe. Il s'agit d'éviter que les justiciables mécontents d'une décision de justice rendue à leur égard ne multiplient les actions contre les juges qui l'ont rendue. Toutefois, la responsabilité pénale des magistrats pourra être engagée pour certaines infractions spécifiques du Code pénal, telles que l'abus d'autorité (art. 432-4 CP), la corruption active (art. 433- 1 CP) ou passive (art 432-11 CP), ou le déni de justice (art. 434-7-1 CP). III. Le droit à un tribunal impartial A. Les types d’impartialité Dans l’arrêt Piersack contre Belgique du 1er octobre 1982 n°8692/79, la Cour européenne des droits de l’homme expose que « si l’impartialité se définit d’ordinaire par l’absence de préjugé ou de parti pris, elle peut, notamment sous l’angle de l’article 6 § 1 de la Convention, s’apprécier de diverses manières. On peut distinguer sous ce rapport entre une démarche subjective, essayant de déterminer ce que le juge pensait dans son for intérieur en telle circonstance, et une démarche objective, amenant à rechercher s’il offrait des garanties suffisantes pour exclure tout doute légitime ». Ainsi la CourEDH adopte une conception mixte de la notion d’impartialité, laquelle doit être à la foi subjective (1) et objective (2). 1. Impartialité subjective. Le tribunal doit être subjectivement impartial : aucun de ses membres ne doit avoir de parti pris ou de préjugé personnel (CourEDH, Piersack c. Belgique, 1er octobre 1982, n° 8692/79). C’est par exemple le cas lorsque l’un des jurés devant juger un accusé français d’origine algérienne a tenu des propos racistes, le tribunal n’est pas impartial (CourEDH, Remli c. France, 23 avril 1996, n° 16839/90). 2. Impartialité objective. Le tribunal doit être objectivement impartial : il doit offrir des garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute légitime (CourEDH, 26 février 1993, Padovani c. Italie, n° 13396/87 et CourEDH, 28 octobre 1998, Castillo Algar c. Espagne, n° 28194/95). Illustration – Cumul de fonctions dans une même affaire. En principe, le cumul, dans une même affaire, des fonctions de poursuite et de jugement est de nature à induire un doute légitime sur l’impartialité du tribunal. Le Code de procédure pénale prohibe donc, à peine de nullité, la succession de certaines fonctions dans une même affaire : o Le juge d’instruction et le juge des libertés et de la détention ne peuvent pas participer au jugement de l’affaire qu’ils ont connue (art. 49 CPP et art. 137-1 CPP) ; o Lemagistratd’unecourd’assisesnepeutpasparticiperaujugementdel’affairedèslorsqu’ilapréalablement fait un acte de poursuite ou d'instruction, participé à l'arrêt de mise en accusation ou à une décision sur le fond relative à la culpabilité de l'accusé (art. 253 CPP). À titre exceptionnel, un juge peut intervenir successivement dans une même affaire lorsque les circonstances le justifient (ConvEDH, Hauschildt c. Danemark, 24 mai 1989, n° 10486/83). Dans le cas particulier de la justice des mineurs, le juge d’instruction peut aussi être juge de jugement (ConvEDH, Nortier c. Pays-Bas, 24 août 1993, n° 13924/88). Toutefois, le Conseil constitutionnel a précisé que sont contraires au principe d’impartialité, garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, les dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 251-3 du Code de l’organisation judiciaire en ce qu’elles ne font pas interdiction au juge des enfants qui a instruit une affaire de présider le tribunal pour enfants devant lequel elle est renvoyée (Cons. const., n° 2021-893 QPC, 26 mars 2021). B. Les moyens de contrôle de l’impartialité Au-delà de l’interdiction des cumuls de fonctions susmentionnés, le respect du principe d’impartialité peut être assuré par la récusation (1), la suspicion légitime (2) et le dépaysement (3). 1. Récusation. Elle vise un seul membre de la juridiction (art. 668 CPP). C’est l'incident de procédure soulevé par une partie qui suspecte un juge de partialité envers l'un des plaideurs sans contester la compétence d'une juridiction. Les magistrats et tout juré peuvent être récusés. L'article 668 du Code de procédure pénale vise neuf cas de causes de récusation du juge. Toutefois, le ministère public ne peut jamais être récusé (art. 669 CPP). Procédure. La demande de récusation peut être introduite par le ministère public et par les parties au procès. Elle est déposée au greffe de la juridiction à laquelle appartient le magistrat mis en cause. Ce dépôt doit être fait avant le début des plaidoiries, à moins que la cause de la récusation ne soit apparue après cette phase. La requête en récusation ne dessaisit pas le magistrat dont la récusation est demandée. Elle ne produit pas d’effet automatique sur l’instance pénale. Le procès ou l’instruction se poursuit normalement, sans tenir compte de la procédure en récusation. La juridiction saisie peut, toutefois, procéder au renvoi de l’affaire afin d’attendre l’issue de la procédure de récusation. Le premier président de la cour d’appel (ou de la Cour de cassation si la demande de récusation vise le premier président de la cour d’appel) statue par ordonnance qui produit effet de plein droit (art. 671 CPP). Cette ordonnance n’est susceptible d’aucun recours. 2. Suspicion légitime. Elle concerne l’ensemble de la juridiction (art. 662 CPP) : c’est une demande de renvoi soulevée par une partie qui fait valoir que les magistrats qui composent la juridiction (qu’elle soit collégiale ou unique) font collectivement preuve, ou risquent de faire preuve d'inimitié, ou d'animosité à son égard. Si le renvoi est ordonné, la juridiction est immédiatement et définitivement dessaisie. Les actes effectués avant l’arrêt de renvoi demeurent valables. Par exemple, en cas d’hostilité manifestée publiquement par un juge d’instruction à un inculpé (Crim., 21 août 1990, n° 90-84.352). Procédure. La demande de récusation peut être introduite par le ministère public, les parties au procès et le procureur général près la Cour de cassation. La requête doit être présentée au greffe de la chambre criminelle de la Cour de cassation. La présentation de la requête n’a pas d’effet suspensif, à moins que la Cour de cassation n’en décide autrement (art. 662 al. 4, du CPP). La voie de l’opposition contre un arrêt de la Cour de cassation rejetant une demande de suspicion légitime n’est pas ouverte à la partie qui a formé cette demande (Crim., 26 juin 1963, n° 63-90.998). Un rejet de la demande de renvoi n’interdit pas la présentation d’une nouvelle demande fondée sur des faits postérieurs (art. 667 CPP). 3. Dépaysement. Il consiste à transférer l'instruction d'une juridiction territorialement compétente à une autre juridiction qui serait, en temps normal, considérée comme incompétente en application des principes du Code de procédure civile ou pénale (art. 665, al. 2 CPP). Procédure. Le dépaysement peut être demandé « pour cause de suspicion légitime » à l'égard du tribunal, « pour sûreté publique » ou « dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice ». La demande de dépaysement peut être introduite par le ministère public, par une partie au procès et par le procureur général près la Cour de cassation. La requête doit être présentée au greffe de la chambre criminelle de la Cour de cassation. La Cour a 8 jours à compter de la requête pour se prononcer, car il s’agit très fréquemment de cas urgents (art. 665, al. 5 CPP). SECTION 2 – LES GARANTIES RELATIVES À LA PROCÉDURE I. La publicité Le principe de publicité des débats ainsi que ses exceptions (notamment s’agissant des mineurs) sont examinés plus largement dans la partie du fascicule relative au jugement (Cf. Thème V du fascicule). L’idée générale est que la justice est rendue au nom du peuple français et que celui-ci doit être mis en capacité d’assister à l’œuvre de justice. La publicité est conçue comme un moyen de contrôle de l’activité juridictionnelle. Selon le Conseil constitutionnel, « il résulte de la combinaison des articles 6, 8, 9 et 16 de la Déclaration de 1789 que le jugement d’une affaire pénale pouvant conduire à une privation de liberté doit, sauf circonstances particulières nécessitant le huis clos, faire l’objet d’une audience publique » (Cons. const., 2 mars 2004, n° 2004- 492). II. Le délai raisonnable 1. Droit protégé. Le droit d’être jugé dans un délai raisonnable est notamment consacré à : o L’article 6 §1, de la Convention européenne des droits de l’Homme ; et o L’article préliminaire du Code de procédure pénale. 2. Critères d’appréciation du caractère « raisonnable » du délai. De nombreux arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme (notamment CourEDH, Kemmache c. France, 27 novembre 1991, n° 12325/86 et n°14992/89) rappellent que le caractère raisonnable ou non du délai de la procédure s’apprécie en fonction des trois critères suivants : o La complexité de l’affaire ; o Le comportement du requérant ; o Celui des autorités compétentes. 3. Conséquences de la violation du droit d’être jugé dans un délai raisonnable. La violation de ce droit peut ouvrir droit à réparation, par l’engagement de la responsabilité de l’État pour fonctionnement défectueux du service de la justice. Néanmoins, la violation du droit d’être jugé dans un délai raisonnable ne peut pas entraîner la nullité de la procédure (Crim., 24 avril 2013, n° 12-82.863). L’atteinte excessive au droit à être jugé dans un délai raisonnable peut conduire à la nullité des poursuites lorsque cette atteinte a causé une violation irrémédiable des principes de fonctionnement de la justice pénale, notamment des droits de la défense et des règles d’administration de la preuve (CA Versailles, 15 sept. 2021, n° 21/3005). III. Les droits de la défense 1. Droits protégés par la Constitution. Le principe du respect des droits de la défense constitue un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (Cons. const., 2 décembre 1976, n° 76-70). La Cour de cassation estime que «la défense constitue pour toute personne un droit fondamental à caractère constitutionnel » (Ass. plén., 30 juin 1995, n° 94-20.302). Elle affirme également que le principe de libre défense « domine la procédure pénale » (Crim., 9 février 1988, n° 87-82.709). 2. Énumération des droits de la défense. L’article 6, § 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme et l’article préliminaire, III, alinéa 2, du Code de procédure pénale démontrent la diversité des droits de la défense : Le droit d’être informé de la nature et de la cause de l’accusation ; Le droit de disposer du temps et des facilités nécessaires à sa défense ; Le droit de se défendre soi-même ; Le droit d’être assisté d’un défenseur ; Le droit d’interroger ou de faire interroger les témoins à charge ; Le droit d’obtenir l’interrogatoire des témoins à décharge ; et Le droit de se faire assister gratuitement d’un interprète. La Cour européenne a également déduit du droit à un procès équitable « le droit de se taire et de ne pas contribuer à sa propre incrimination » (CourEDH, Funke c. France, 25 février 1993, n° 10828/84). IV. L’égalité des armes 1. Notion. L’égalité des armes implique, pour toute partie, d’avoir « une possibilité raisonnable d’exposer sa cause au tribunal dans des conditions qui ne la désavantage pas d’une manière appréciable par rapport à la partie adverse » (Com. Eur., Szwabowicz c. Suède, 30 juin 1959, n° 434/58). Ce principe constitue une composante du droit à un procès équitable (CourEDH, Neumeister c. Autriche, 27 juin 1968, n° 1936/63). 2. Conséquences pratiques. L’égalité des armes implique que les parties disposent des mêmes droits concernant : o Les délais d’exercice des voies de recours (venant condamner le droit d'appel étendu des procureurs généraux : Crim., 17 septembre 2008, n° 08-80.598 ; Crim., 10 février 2009, n° 08-83.837) ; o Le droit de l’avocat d’une partie d’assister à l’audition d’un expert effectuée par le juge d'instruction sur réquisitions du procureur de la République en présence de celui-ci (Crim., 11 mai 2010, n° 10-80.953) ; et o L’accès à une procédure contradictoire : c’est-à-dire la possibilité « pour une partie, de prendre connaissance des observations ou pièces produites par l’autre, ainsi que d’en discuter » (CourEDH, Lobo et Machado c. Portugal, 20 février 1996, n° 15764/89). Le principe du contradictoire a été introduit en matière d’enquête préliminaire en ce que l’article 77-2 du Code de procédure pénale permet, à l’issue d’un délai d’un an, tant à la personne qui a fait l’objet d’une garde à vue ou d’une audition libre qu’à la victime de consulter le dossier de la procédure afin de formuler des observations au ministère public. V. Le respect de la vie privée 1. Droit au respect de la vie privée. L’article 8 de la ConvEDH proclame le droit de toute personne au respect « de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance » tout en organisant un régime de restrictions si celles-ci sont « prévues par la loi » et « nécessaires, dans une société démocratique ». 2. Admission d’une atteinte nécessaire et proportionnée. Certaines mesures pénales sont, par principe, attentatoires au respect de la vie privée (ex : géolocalisation, interception téléphonique, sonorisation et fixation d’image, infiltration...). L’article préliminaire du Code de procédure pénale précise qu’«au cours de la procédure pénale, les mesures portant atteinte à la vie privée d’une personne ne peuvent être prises, sur décision ou sous le contrôle effectif de l’autorité judiciaire, que si elles sont, au regard des circonstances de l’espèce, nécessaires à la manifestation de la vérité et proportionnées à la gravité de l’infraction ». L’absence de législation spécifique en matière d’écoutes téléphoniques a été considérée comme une violation du droit à la vie privée et familiale par la Cour européenne des droits de l’Homme (CourEDH, Kruslin c. France et Huvig c. France, 24 avril 1990, n° 11105/84). Plus récemment, la Cour de cassation a estimé, au visa de l’article 8 de la ConvEDH, que la géolocalisation constitue « une ingérence dans la vie privée dont la gravité nécessite qu’elle soit exécutée sous le contrôle d’un juge » (Crim., 22 octobre 2013, n° 13-81.949). Une loi du 28 mars 2014 est venue par la suite encadrer ce type d’investigation. Le Conseil constitutionnel a jugé satisfaisant l’équilibre ainsi défini entre les nécessités de la manifestation de la vérité et le droit au respect de la vie privée et à l’inviolabilité du domicile (Cons. const., 25 mars 2014, n° 2014-693).