Kératites - Notes de cours (PDF)

Summary

Ce document contient des notes de cours sur les différentes kératites, incluant leur anatomie, leur physiologie, les signes cliniques, les diagnostics et les traitements. Ces notes sont destinées aux étudiants en médecine ou en ophtalmologie.

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Prérequis : Connaître l'anatomie et la physiologie de la cornée. Avoir des notions générales de microbiologie. Objectifs : Après l'étude de ce mini module, l'étudiant doit être capable de : Reconnaître une kératite en distinguant la forme superficielle de la forme profonde. Reconnaître les...

Prérequis : Connaître l'anatomie et la physiologie de la cornée. Avoir des notions générales de microbiologie. Objectifs : Après l'étude de ce mini module, l'étudiant doit être capable de : Reconnaître une kératite en distinguant la forme superficielle de la forme profonde. Reconnaître les complications des kératites. Identifier les différentes étiologies des kératites. Savoir distinguer, devant un œil rouge, une kératite des autres affections pouvant entraîner une rougeur oculaire. Citer les médicaments contre-indiqués en cas de kératite. Citer les principaux antiviraux utilisés en ophtalmologie. 1. ANATOMIE MACROSCOPIQUE : La cornée est la structure la plus antérieure du globe oculaire. Elle se présente comme une calotte de sphère transparente, enchâssée dans l'ouverture antérieure de la sclère. Son épaisseur est de 0,5 mm au centre et 1 mm en périphérie. Elle est richement innervée à partir des nerfs ciliaires (issus de la branche ophtalmique du N. trijumeau) qui forment des plexus sous l'épithelium. Elle est avasculaire, son apport nutritif est fait à partir de la vascularisation limbique, de l'humeur aqueuse et du film lacrymal. Elle joue un rôle de lentille convergente de 43 dioptries (2/3 de la puissance du globe). Elle est en rapport : - en avant avec le film lacrymal. - en arrière avec l'humeur aqueuse. - en périphérie avec le limbe sclérocornéen. 2. ANATOMIE MICROSCOPIQUE : LA CORNÉE EST CONSTITUÉE D'AVANT EN ARRIÈRE PAR : 5 couches : L'épithélium cornéen : épithélium malpighien non kératinisé, constitué de 3 couches cellulaires. Le renouvellement de l'épithélium est assuré à partir des cellules basales. La membrane de Bowman. Le stroma cornéen : représente les 9/10 de l'épaisseur cornéenne totale. La membrane de Descemet. L'endothélium : C'est une couche unicellulaire formée d'environ 3000-4000 cellules/mm², hexagonales, plates, étroitement liées. Elles sont dépourvues de pouvoir mitotique. Leur nombre diminue avec l'âge et en cas d'agression. Principale fonction : maintenir un état d'hydratation constant du stroma par son pouvoir de déturgescence qui empêche la pénétration du liquide de l'humeur aqueuse et donc assurer un état d'hypohydratation pour la cornée compatible avec le rôle principal physiologique de cette dernière : la transmission de la lumière. 3. DÉFINITION / INTRODUCTION : Les kératites sont des atteintes cornéennes d'origines diverses : infectieuses, traumatiques, par syndrome sec... La kératite herpétique représente l'étiologie la plus grave. Elles constituent un des principaux motifs de consultation en urgence. On distingue deux formes de kératite : La kératite superficielle ou épithéliale : se définit par une atteinte de l'épithélium cornéen : on parle d'ulcère cornéen. La kératite profonde ou stromale : se définit par une infiltration non suppurative affectant le stroma cornéen. 7. ÉTUDE CLINIQUE : 7.1. Les kératites superficielles : 7.1.1. Signes fonctionnels : Deux types de troubles conduisent le malade à consulter : La baisse brutale de l'acuité visuelle : c'est un signe fréquent, son intensité dépend essentiellement du siège de la lésion par rapport à l'axe visuel et de l'étendue de la lésion. Des signes irritatifs : au nombre de 4 : Des douleurs oculaires souvent intenses accompagnées d'un larmoiement, d'une photophobie et d'un blépharospasme. Le blépharospasme est la fermeture involontaire des paupières. Cela se produit par des contractions involontaires du muscle orbiculaire (le muscle chargé de fermer les paupières). 7.1.2. Signes physiques : L'examen au biomicroscope montre : Un œil rouge avec un cercle périkératique : une rougeur oculaire qui domine autour du limbe sous forme d'un anneau encerclant la cornée. L'atteinte cornéenne : L'éclairage oblique en fente fine peut visualiser le défaut de l'épithélium cornéen. Le test à la fluorescéine : +++ on instille une goutte d'un collyre à la fluorescéine dans le cul de sac conjonctival inférieur. On lave ensuite au sérum physiologique pour éliminer l'excès de colorant. L'examen à la lumière bleue au biomicroscope met en évidence l'ulcère cornéen sous forme d'une image fluorescente verte dessinant la perte de substance épithéliale. Ceci permet de préciser le type de l'ulcération cornéenne et d'orienter vers son étiologie. 7.2. Les kératites stromales : Elles présentent à peu près les mêmes signes cliniques que la forme superficielle, mais la douleur oculaire est moins intense et la baisse de la vision est plus marquée. L'examen à la lampe à fente montre un cercle périkératique. La cornée est trouble avec présence d'un œdème profond. Le test à la fluorescéine est négatif, car l'épithélium de surface est sain. Devant toute kératite superficielle ou stromale, l'examen ophtalmologique doit être complet et doit rechercher des signes associés / une uvéite. 8. EXAMENS COMPLÉMENTAIRES : Ils ne sont pas systématiques. Ils permettent d'orienter le diagnostic étiologique en cas de kératite infectieuse : Prélèvement du tissu cornéen épithélial sur les bords de l'ulcération pour effectuer un examen direct et un examen après culture et immunofluorescence à la recherche de l'agent causal. Étude de l'humeur aqueuse après ponction de la chambre antérieure dans un but de diagnostic immunologique. 9. COMPLICATIONS : Toute kératite, essentiellement infectieuse, peut donner des complications : À la phase aiguë : Abcès cornéen Perforation cornéenne. Hypopion : niveau liquide purulent dans la chambre antérieure. Extension postérieure de l'infection aboutissant à un tableau d'endophtalmie. Par ailleurs, les kératites peuvent laisser des séquelles à distance sous forme d'opacités cornéennes d'intensités variables avec parfois une néovascularisation cornéenne à l'origine d'une malvoyance. Cécité cornéenne ~ Greffe de cornée. 10. ÉTIOLOGIES : 10.1. Kératites infectieuses : 10.1.1. Kératite herpétique +++ : C'est une affection du sujet jeune, le plus souvent unilatérale. Elle est secondaire à une infection par le virus herpès simplex. Elle réalise : Soit une kératite superficielle : Elle est due à l'atteinte cytotoxique directe du virus par réplication. Elle se présente sous forme essentiellement d'un ulcère dendritique typique de l'herpès ou dessinant une carte géographique. Les kératites herpétiques peuvent être aggravées de façon majeure par une corticothérapie locale qui peut au maximum entraîner une perforation cornéenne. Soit une kératite profonde : Elle est due à des mécanismes immunitaires. La lésion stromale caractéristique est la kératite disciforme (caractérisée par l'existence d'un œdème stromal localisé de forme ovale ou circulaire). Elle peut laisser une opacité séquellaire avec une baisse de l'acuité visuelle définitive. C'est une des indications fréquentes de la greffe de cornée du sujet jeune. Les kératites herpétiques s'accompagnent d'une diminution de la sensibilité cornéenne. Leur évolution est longue et les rechutes sont fréquentes. 10.1.2. Autres kératites virales : Le zona ophtalmique : les lésions sont semblables à l'atteinte herpétique. (VZV). Les autres virus : l'adénovirus, le virus de la mononucléose infectieuse, de la grippe, de la rougeole. 10.1.3. Kératites bactériennes : Les bactéries pouvant être en cause : staphylocoque, streptocoque, Syphilis, tuberculose, lèpre... 10.1.4. Kératites mycosiques : Il s'agit le plus souvent d'une surinfection d'une ulcération traumatique par un agent végétal. Elles sont habituellement unilatérales, traînantes et récidivantes. 10.1.5. Kératites parasitaires : Exemple : la kératite amibienne chez les porteurs de lentilles de contact. 10.2. Kératite dans le syndrome sec (kératite sèche) : Fréquente chez le sujet âgé, parfois associée à un syndrome de Gougerot-Sjögren. Généralement kératite superficielle. Suspectée par l'aspect de petits filaments d'épithélium visibles : kératite filamenteuse. Affirmée par le test de Schirmer (petite bande de papier buvard glissée dans le cul de sac conjonctival qui mesure en 5 minutes la quantité de larmes). 10.3. Kératite allergique. 10.4. Kératite d'exposition par lagophtalmie : Chez les malades qui présentent une anomalie de fermeture palpébrale, essentiellement en cas de paralysie faciale. 10.5. Kératite post-traumatique. 10.6. Kératite par projection de produit caustique (acide, base). 11. TRAITEMENT : 11.1. Les kératites infectieuses : Il faut dilater la pupille par des mydriatiques. 11.1.1. Les kératites superficielles : Les collyres corticoïdes sont contre-indiqués dans les kératites superficielles car il y a un risque d'aggravation (perforation oculaire, retard de cicatrisation). 11.1.2. Kératites virales : Le traitement de la kératite herpétique repose sur les antiviraux locaux / le ganciclovir (Virgan) en gel ou Aciclovir (Zovirax) pommade, 5 applications par jour pendant une semaine. On associe un antiseptique et un agent mouillant. L'instillation d'un collyre corticoïde peut être responsable de complications désastreuses (augmente la réplication virale et augmente la destruction des cellules épitheliales entraînant une aggravation de l'ulcère pouvant aboutir à la perforation cornéenne). Pour le Zona : Zelitrex ou Zovirax per os. Pour les autres kératites virales : pas de traitement spécifique, on prescrit des agents mouillants, des compresses froides et des antibiotiques en cas de surinfection. 11.1.3. Les kératites bactériennes : Traitement antibiotique par voie locale et éventuellement générale. 11.1.4. Les kératites mycosiques : Antifongique en collyre. 11.1.5. Les kératites stromales : Le traitement de l'agent causal et des corticoïdes locaux. (Après avoir vérifié l'absence de kératite épithéliale associée). 11.2. Kératites dans le syndrome sec : instillation de larmes artificielles ou de gels visqueux. 11.3. Kératites allergiques : antiallergiques. 11.4. Kératites par lagophtalmie : Collyre antiseptique et cicatrisant. Fermer les paupières / tarsorraphie. 11.5. Kératites post-traumatiques : L'examen doit rechercher un corps étranger cornéen ou palpébral et l'enlever. Instiller un collyre antibiotique + cicatrisant. 11.6. Kératites par brûlure chimique : Lavage abondant au sérum. Adresser en urgence à un centre hospitalier spécialisé. 11.7. Les séquelles : Les opacités cornéennes séquellaires centrales seront traitées par une greffe de cornée (kératoplastie transfixiante) avec des résultats très variables. 12. CONCLUSION : La kératite réalise un tableau d'œil rouge et douloureux avec baisse de l'acuité visuelle. L'étiologie la plus redoutable est la kératite herpétique (à ne pas méconnaître). Les corticoïdes en collyre sont contre-indiqués dans les kératites superficielles. La prescription d'un collyre corticoïde dans un œil rouge sans diagnostic précis est formellement interdite. Ne jamais prescrire un collyre corticoïde sans avoir éliminé une kératite herpétique et de façon générale toute ulcération cornéenne. ANNEXE : LA KÉRATOPLASTIE TRANSFIXIANTE : La kératoplastie transfixiante est l'une des plus fréquentes des greffes de tissus et transplantations d'organes. Elle consiste à remplacer un disque cornéen central de pleine épaisseur. Technique chirurgicale : consiste à prélever par trépanation circulaire une rondelle de la cornée pathologique du receveur, d'un diamètre variable (le plus souvent entre 7 et 8 mm) que l'on remplace par une rondelle de diamètre identique de cornée saine, provenant d'un donneur. Cette rondelle cornéenne est suturée à la cornée du receveur par un surjet ou des points séparés. Il est possible de combiner d'autres chirurgies si nécessaire, telles que l'extraction de la cataracte avec pose d'un implant intraoculaire ou une chirurgie du glaucome. Le traitement post-opératoire comporte une corticothérapie et une antibiothérapie locales. La première indication opératoire en est la kératopathie bulleuse de l'aphake et du pseudophake. Le rejet d'allogreffe de cornée est la première cause d'échec de cette intervention. Les principaux facteurs de risque de rejet sont la néovascularisation de la cornée réceptrice et les antécédents de rejet de greffe de cornée. L'astigmatisme postopératoire est le principal facteur limitant la récupération visuelle, lorsque le greffon est clair. En termes de survie du greffon, les résultats de la kératoplastie transfixiante sont bons, mais un suivi attentif, rapproché et régulier du patient est indispensable au succès de l'intervention à long terme.

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