Fiche Révision Droit Pénal PDF

Summary

This document provides an introduction to criminal law and criminal sciences. It explores the nature and dimensions of criminal law, including its expressive and repressive aspects. It also examines the relationship between criminal law and various criminal sciences, like criminology, and touches on the influence of criminal sciences on the judicial system, particularly on legislators and judges.

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Fiche révision droit Pénal **INTRODUCTION :** Le **droit pénal** est une branche essentielle du droit qui a pour objet de **prévenir** et, le cas échéant, de **réprimer** les comportements jugés nuisibles et susceptibles de troubler l\'ordre public. Il définit l\'exercice par la société du pouvoir...

Fiche révision droit Pénal **INTRODUCTION :** Le **droit pénal** est une branche essentielle du droit qui a pour objet de **prévenir** et, le cas échéant, de **réprimer** les comportements jugés nuisibles et susceptibles de troubler l\'ordre public. Il définit l\'exercice par la société du pouvoir de punir, établissant ainsi les règles et les sanctions applicables à certaines infractions pénales. A. **Nature du Droit Pénal** Le droit pénal a deux dimensions fondamentales : - **Droit Expressif** : Cette dimension définit clairement les comportements interdits, établissant ainsi les valeurs et les intérêts qui doivent être protégés pour maintenir l\'ordre social. Les infractions pénales reflètent les valeurs d\'une société à un moment donné. Par exemple, l'article L.465-1 du Code monétaire et financier traite du délit d'initié, illustrant la manière dont certaines actions sont interdites pour préserver l\'intégrité du marché financier. - **Droit Répressif** : Le droit pénal agit en punissant les auteurs d\'actes portant atteinte aux valeurs qu\'il protège. Cette dimension est souvent perçue comme austère et complexe, puisque le droit pénal impose des peines pouvant aller jusqu\'à de lourdes sanctions pour des infractions considérées comme sérieuses. I. **Sciences Criminelles** Les **sciences criminelles** constituent une **science auxiliaire** du droit pénal, englobant plusieurs disciplines qui se concentrent sur l\'observation de la délinquance et des phénomènes criminels. Elles incluent notamment : - **Criminologie** - **Sociologie pénale** - **Criminalistique** - **Médecine légale** Ces disciplines sont essentielles pour comprendre les causes et les conséquences du phénomène criminel dans sa globalité, dépassant ainsi le strict cadre du droit pénal. **A) Distinction et Lien avec le Droit Pénal** Bien que le droit pénal et les sciences criminelles soient deux disciplines distinctes, elles demeurent profondément liées. Voici comment : - **Droit pénal** : C\'est une discipline **normative,** établissant des règles sur ce qui doit être, en punissant les comportements qui ne se conforment pas à la loi. Il se concentre sur l\'infraction et la sanction, déterminant ainsi les comportements à proscrire. - **Sciences criminelles** : Ces sciences sont **empiriques** et analysent le phénomène criminel tel qu\'il est dans la réalité. Les méthodes utilisées incluent l'analyse de données, les enquêtes sociologiques et les études de comportement. Les deux disciplines se nourrissent mutuellement : le droit pénal définit les objets d'études des sciences criminelles, alors que les découvertes en sciences criminelles enrichissent le droit pénal en offrant une meilleure compréhension des comportements criminels. II. **L\'Interdépendance entre Droit Pénal et Sciences Criminelles** Le droit pénal encadre les excessifs que pourraient entraîner certaines découvertes des sciences criminelles, et vice versa. Par exemple : - **Progrès Techniques** : Certaines techniques évoquées par des criminologues, comme la lobotomie pour neutraliser des comportements criminels, sont perçues par les juristes comme une atteinte à la dignité humaine, illustrant ainsi les valeurs éthiques du droit pénal. - **Hypnose** : Des études utilisant l\'hypnose pour récolter des preuves peuvent potentiellement remettre en question les droits légaux et la dignité des individus si elles étaient appliquées sans régulation. A. **Influence des Sciences Criminelles** Les sciences criminelles exercent des influences importantes sur différents acteurs du système judiciaire : 1. **Sur le Législateur** : Les découvertes en sciences criminelles conduisent les législateurs à envisager des peines ou des mesures de sûreté basées sur la personnalité de l'auteur plutôt qu'exclusivement sur l'acte commis. Cela a mené à des réformes telles que l'ordonnance du 2 février 1945 sur la justice des mineurs, qui tient compte de la vulnérabilité des jeunes délinquants. 2. **Sur le Juge** : L'utilisation d'enquêtes de personnalité permet aux juges d'acquérir des éléments essentiels concernant l'auteur de l'infraction, les guidant ainsi dans le choix de la sanction appropriée. 3. **Sur les Modalités d'Exécution des Peines** : Les services chargés de l\'application des peines s\'appuient sur des écrits en sciences criminelles pour éviter des pratiques considérées comme criminogènes, comme la dépersonnalisation des individus, et favoriser celles qui soutiennent la réinsertion sociale, contribuant ainsi à une réhabilitation réussie. **TITRE 1 : Le crime** I. **La Relativité du Crime** Le **phénomène criminel** est un aspect social inhérent à chaque groupe humain, existant dans toutes les sociétés et à toutes les époques. Ce phénomène fascine les individus, à travers la **littérature,** le **cinéma**, la **peinture**, et divers médias traitant des grandes affaires criminelles. Classiquement, le phénomène criminel peut être appréhendé sous deux angles : - **Point de vue individuel (micro)** : cela renvoie à l\'étude du **crime** en tant qu\'acte isolé. - **Point de vue global (macro)** : cela concerne la **criminalité** en tant que phénomène sociétal. **A) La Perception Juridique du Crime** La perception du crime est multiple et variable. Elle dépend de plusieurs éléments, notamment de la législation en vigueur. I. **La Relativité de la Conception Législative du Crime** - La conception qu'a le législateur du crime est fluctuante. Il n\'existe pas de liste universelle des comportements qualifiés de crimes, leur définition changeant selon les époques, les contextes sociaux et les circonstances. - Par exemple, certaines actions ont été pénalisées par le législateur, comme le **viol conjugal** ou le **cyberharcèlement,** qui étaient absentes des textes législatifs précédents. En revanche, des comportements autrefois punis, comme l\'homosexualité, ont connu une dépénalisation. - Cette variabilité existe également à l'échelle internationale. Par exemple, l'avortement est légal dans certains pays mais considéré comme un crime dans d'autres. II. **La Relativité de la Conception du Crime par le Juge** - Le rôle du juge est de respecter la loi, mais en pratique, il interprète également cette dernière, ce qui peut mener à une conception variée du crime. Le **principe de légalité criminelle** stipule qu\'il ne peut y avoir d\'infraction sans texte clair. - Toutefois, des cas existent où les juges étendent l\'interprétation légale pour inclure des comportements qu\'ils estiment blâmables. Par exemple, dans le cadre du vol de l\'électricité, le juge peut considérer que cet acte entre dans le cadre du vol de manière plus large. - Parfois, les juges choisissent de sanctionner moins sévèrement des actes qui, selon la loi, devraient être qualifiés de crime, ce qui démontre également la relativité de leur conception juridique. **B) La Perception Populaire du Crime** La perception populaire des crimes varie avec les époques et est souvent influencée par des mouvements sociaux. Cela se manifeste souvent par des variations dans le jugement des comportements : - Ce qui était considéré comme un crime par l\'opinion publique peut évoluer. Par exemple, des atteintes à l\'environnement sont aujourd\'hui vues comme des infractions graves. - Cependant, dans certaines situations, des actes sont considérés répressibles sous l\'impulsion des sentiments collectifs. Parfois, il existe des discordances entre les critères juridiques et les critères populaires, comme le **délit de solidarité** qui concerne l'aide aux migrants. II. **La Définition du Crime** **A) La Définition Négative du Crime** Il est essentiel de distinguer le **crime** d\'autres notions proches, notamment le péché et la **déviance**. 1. **La Distinction entre Crime et Péché** - Le **péché** est perçu comme une transgression à un ordre religieux, tandis que le crime représente une violation de l\'ordre social. - Néanmoins, il existe des recoupements. Par exemple, un acte tel que le meurtre est condamné par la loi et par des préceptes religieux, ce qui légitime l\'acceptation sociale de la sanction pénale. - Les **incriminations** doivent être en phase avec les valeurs morales de la société ; une loi qui perd ce fondement moral risque de ne pas être respectée, plaidant ainsi pour une évolution législative face aux évolutions sociales. 2. **La Distinction entre Crime et Déviance** - La **déviance** est une notion sociologique qui désigne des comportements allant à l'encontre des normes sociales acceptées. Elle engendre des sanctions sociales plutôt que pénales. - Les comportements déviants ne sont pas toujours synonymes de crime, bien qu'ils dénotent souvent une mentalité antisociale. Par exemple, un enfant négligent envers ses parents âgés peut être qualifié d'acte déviant sans constituer un acte criminel en vertu de la loi. **B) La Définition Positive du Crime** Dans un cadre juridique, le crime est un comportement défini et puni par la loi. Cette définition renferme la notion d'**infraction** : La peine est un élément essentiel qui permet d\'identifier le crime. D\'après le **Code pénal,** les peines sont classées en catégories selon la gravité des infractions commises : - **Les crimes** sont passibles de réclusion criminelle ou de détention criminelle. - **Les délits** peuvent entraîner des peines d\'emprisonnement ou des amendes. - **Les contraventions** sont punies d'amendes inférieures ou égales à 3000 euros. Cette classification des peines permet de souligner que les comportements criminels vont au-delà d\'une simple atteinte individuelle : ils portent atteinte à l\'ordre social. En ce sens, l\'interdiction d\'un acte est justifiée par sa capacité à nuire à l\'intérêt collectif. **TITRE 2 : La criminalité** I. **La Criminalité Réelle et Apparente** **A) Définitions** La **criminalité réelle** se réfère à l\'ensemble des infractions effectivement commises. En revanche, la **criminalité apparente** englobe uniquement celles qui sont connues des services de police. Elle inclut les infractions rapportées par les victimes, les dénonciations par des tiers, ainsi que celles constatées directement par la police. Il existe un écart significatif entre ces deux notions, connu sous le terme de **chiffre noir de la criminalité.** Ce chiffre noir représente les infractions qui, bien qu\'ayant été commises, ne sont pas enregistrées par les autorités. **B) Le Chiffre Noir de la Criminalité** Le chiffre noir de la criminalité se compose d'infractions qui échappent à la connaissance des services de police. Cela peut découler de plusieurs raisons : la victime peut craindre des représailles, éprouver de la honte, ignorer ses droits ou s\'avérer sceptique quant à l'efficacité de la justice. Ainsi, la police n\'est informée que d\'une partie de la délinquance. Pour estimer ce chiffre noir, deux méthodes sont couramment utilisées : 1. **Les enquêtes de confession** : Il s\'agit de sonder une population représentative pour recueillir des auto-rapports de délits commis. Cela permet de mieux appréhender le niveau de criminalité non enregistré par la police. 2. **Les enquêtes de victimisation** : Ces enquêtes se concentrent sur les témoignages des victimes et consistent à interroger une population sur les infractions dont elle a été victime. II. **Criminalité Apparente et Criminalité Légale** **A) Définition** La **criminalité légale** désigne l\'ensemble des infractions ayant abouti à des condamnations pénales. Elle est nécessairement inférieure à la criminalité apparente puisqu\'une fraction des infractions rapportées ne débouche pas sur une sanction judiciaire. Ce phénomène crée un écart entre la criminalité apparente et la criminalité légale, que l\'on appelle le **chiffre gris de la criminalité**. **B) Le Chiffre Gris** La différence entre la criminalité apparente et la criminalité légale peut s'expliquer par plusieurs facteurs : 1. **Classements sans suite** : Par exemple, en 2020, environ **200 000 affaires** ont été classées sans suite, un chiffre relativement stable depuis une dizaine d\'années. 2. **Alternatives aux poursuites** : En 2020, environ **500 000** alternatives aux poursuites ont été enregistrées, permettant d\'éviter une condamnation formelle. 3. **Poursuites engagées** : Environ **600 000** poursuites en 2020, augmentant à environ **650 000** en 2022, montrent que certaines affaires pénales mènent effectivement à une procédure judiciaire, soulignant ainsi la relation complexe entre la criminalité légale et les poursuites engagées. En 2023, le taux de poursuite était de **89 %**, illustrant un système répressif actif. Au stade de l\'instruction, le juge d\'instruction ou la chambre de l\'instruction peut prononcer un **non-lieu** pour insuffisance d\'indices, tandis que certaines affaires peuvent aboutir à des **relaxes** ou des **acquittements** au stade du jugement, déclarant ainsi le prévenu innocent. **C) L\'Analyse de la Criminalité Légale** Analyse des données criminelles sur plusieurs décennies indique une hausse de la criminalité grave depuis les années 60, tandis que la petite criminalité reste relativement stable. Par exemple, en 2023, il y avait **2 400 condamnations** pour crimes, **508 000**pour délits, et **6 102** contraventions. Les viols constituent une majorité des crimes, tandis que les délits sont dominés par les infractions liées à la circulation routière et aux atteintes aux personnes. Les atteintes aux biens témoignent d\'une majorité de vols et de recels. Il y a également un développement des alternatives aux poursuites, comme les **compositions pénales**, avec **50 000** cas en 2022, ce qui reflète une tendance à privilégier des solutions moins pénales pour certains délits. **TITRE 3 : Les causes du crime** I. **Les Facteurs du Crime** L\'étude des facteurs du crime, connue sous le nom d\'**étiologie criminelle,** se concentre sur l\'analyse des raisons qui poussent un individu à commettre un acte criminel. Cette science a identifié deux grands types de facteurs : **la personne du décliquant** et **la situation précriminelle**. **A) La Personne du Déclinant** Les criminologues ont mis en avant plusieurs facteurs qui prédisposent à la criminalité, en se concentrant principalement sur les dimensions anthropologiques, biologiques, socio-culturelles et psychiques. 1. **Les Facteurs Anthropologiques et Biologiques** a. **La Théorie du Criminel Né**\ Proposée par le criminologue **Cesare Lombroso**, cette théorie soutient que certaines caractéristiques physiques déterminent le comportement criminel. Lombroso, influencé par les travaux de Charles Darwin, a suggéré que le crime est une manifestation de bestialité, observable aussi dans le règne animal. Il a analysé les crânes et les caractéristiques physiques des criminels, identifiant des traits spécifiques, tels que : (Un crâne étroit et des pommettes saillantes pour les meurtriers. Des oreilles longues et un menton excessivement long pour ceux enclins au viol.) Bien que cette théorie ait été critiquée pour son réductionnisme, elle a ouvert la voie à des recherches scientifiques sur le crime. b. **Les Théories du Délinquant Constitutionnel**\ En réaction à la théorie de Lombroso, ces théories reconnaissent la complexité humaine au-delà des aspects physiques. Elles postulent qu\'il existe une perversion des instincts chez les délinquants (ex : instinct de conservation ou de reproduction) qui peut conduire à la criminalité. Par exemple, l\'**alcoolisme** peut être vu comme une déviation de l'instinct de conservation. c. **La Théorie de la Délinquance Pathologique**\ Contrairement aux deux précédentes, cette théorie se concentre sur des facteurs pathologiques **acquis au cours de la vie**. Des troubles psychologiques, tels que la manie ou la paranoïa, peuvent transformer une personne autrefois normale en un individu délinquant. Ces maladies jouent un rôle crucial dans la compréhension de la délinquance. 2. **Les Facteurs Socio-Culturels** Des criminologues comme **Enrico Ferri**, disciple de Lombroso, ont reconnu l\'importance du milieu sociologique dans le comportement criminel. Il a démontré que les conditions extérieures influencent les actions criminelles des individus. La recherche a mis en évidence plusieurs environnements au sein desquels un individu évolue : - **Milieu Familial** : La famille d\'origine a un impact déterminant sur la personnalité d\'un enfant. Il a été observé que nombreux délinquants viennent de foyers dysfonctionnels. - **Milieu Physique** : Le type d\'environnement géographique joue un rôle. Les infractions sont souvent plus fréquentes dans les zones urbaines. **Adolphe Quételet** a formulé la \"loi thermique de la délinquance\", suggérant que les conditions climatiques influencent les types de crimes commis, avec une prévalence accrue de la violence lors des saisons chaudes. - **Milieu Économique et Social** : La situation économique générale impacte le taux de criminalité. Le chômage et la précarité peuvent pousser les individus à commettre des infractions. - **Milieu Répressif** : Les institutions judiciaires peuvent également contribuer à la récidive en stigmatisant les individus condamnés, créant ainsi un cercle vicieux qui pousse certains à se réidentifier comme délinquants. 3. **Les Facteurs Psychiques** L\'exploration de la personnalité du délinquant est essentielle pour comprendre la criminalité. Les individus normaux, exempts de maladies mentales, peuvent développer des comportements criminels en raison de : **Perturbations Psychiques** : Un processus de socialisation défaillant peut conduire à des anomalies dans les normes morales, rendant un individu insensible aux valeurs sociales, comme celle de ne pas nuire à autrui. **Déséquilibre des Fonctions Vitales** : Selon **Etienne De Greef**, tous les humains ont une propension potentielle à la criminalité. Cependant, la majorité résiste grâce à une structure morale solide. **B) La Situation Précriminelle** La situation précriminelle englobe l\'ensemble des circonstances extérieures à l\'individu qui précèdent et entourent l\'acte criminel. Elle peut être analysée sous deux aspects : objectifs et subjectifs. 1. **Les Aspects Objectifs de la Situation Précriminelle** Ces aspects renvoient à des événements tangibles qui déclenchent l\'intention criminelle : - **Événements Déclencheurs** : Une situation personnelle difficile, comme un besoin urgent d\'argent, peut inciter un individu à envisager le vol. - **Circonstances de Mise à Exécution** : La disponibilité de ressources ou d\'opportunités peut faciliter la réalisation du crime, comme une provocation soudaine qui pousse à agir impulsivement. **2. La Perception Subjective de la Situation Précriminelle** La perception que le délinquant a de la situation joue un rôle crucial. Elle est influencée par : - **Expériences Préalables** : Les souvenirs d\'incidents antérieurs similaires peuvent colorer la réaction de l\'individu face à une nouvelle situation. - **État Émotionnel** : L\'humeur au moment de l\'événement peut affecter la réaction, rendant le délinquant plus ou moins impulsif. **II. Le Passage à l\'Acte** Les théories du passage à l\'acte se sont développées principalement à partir des années 1960, cherchant à identifier ce qui distingue les délinquants des non-délinquants. Les criminologues ont principalement souligné les facteurs psychologiques dans ce processus. **A) Le Processus de Maturation Criminelle** **Sutherland** a décrit ce processus comme une phase préalable au crime, marquée par l\'acceptation de l\'idée criminelle. Ce développement peut varier considérablement d\'un individu à l\'autre. Par exemple, un caissier intégrant des comportements malhonnêtes peut débuter en pensant rembourser un vol, ce qui ouvre la porte à des comportements frauduleux récurrents. **B) Le Processus de l\'Acte Grave** **Etienne de Greef** a identifié quatre étapes clés dans le passage à l\'acte grave : 1. **L\'Assentiment Inefficace** : Un événement banal peut révéler des désirs latents chez l\'individu, l\'incitant à envisager le crime. 2. **L\'Assentiment Réfléchi** : À ce stade, le délinquant commence à envisager des moyens pour réaliser son projet criminel, balançant le potentiel de bénéfice contre les risques. 3. **La Crise** : Ce moment permet au délinquant de justifier son acte, souvent en prenant du recul par rapport aux normes sociales qui s\'opposent à ces actions. 4. **Le Dénouement** : C\'est le moment d\'exécution du crime, qui peut être suivi de sentiments variés chez le délinquant, allant de la culpabilité à l\'indifférence. **TITRE 4 : Les sciences criminelles** Les **sciences criminelles** abordent le phénomène criminel de manière scientifique, cherchant à décrire et à expliquer la criminalité sous tous ses aspects. Le pluriel souligne la diversité et la richesse des disciplines qui composent ce champ d\'étude. I. **La Pénologie** La **pénologie** est la branche des sciences criminelles qui étudie les **sanctions pénales**, leur **exécution**, ainsi que les méthodes employées pour leur application. Historiquement, jusqu\'à la fin du 19ème siècle, on parlait de **sciences pénitentiaires**, car ces disciplines se concentraient sur les peines privatives de liberté. Aujourd\'hui, le terme **pénologie** est préféré, et il est parfois remplacé par **carcérologie** lorsque l\'on se concentre sur les modalités d\'exécution des peines. Bien que cette discipline semble s\'apparenter principalement au droit pénal, elle ne se limite pas à l\'exposé du droit positif. En effet, la pénologie va au-delà de la simple description des règlements légaux ; elle implique également une **expérimentation** pour trouver de nouvelles formes d\'exécution des peines. Par ailleurs, la pénologie se consacre à une **évaluation** de l'efficacité des peines et des mesures de sécurité pour prévenir la délinquance et la récidive. Ainsi, elle se rapproche étroitement des autres domaines des sciences criminelles. II. **La Criminalistique** La **criminalistique**, également appelée **sciences forensiques**, est l\'application des sciences et des technologies à la justice dans le but de rechercher les infractions et leurs auteurs. Né à la fin du 19ème siècle grâce aux travaux de deux Français, **Alphonse Bertillon** et **Locarde**, ce domaine a révolutionné la manière dont les criminels sont identifiés. **A) Le Bertillonnage** **Alphonse Bertillon** est célèbre pour avoir développé une méthode appelée **bertillonnage**, qui consiste à prendre diverses mesures physiques des criminels pour les identifier. Cette technique visait particulièrement à reconnaitre les récidivistes, à une époque où les délinquants utilisaient des faux noms pour échapper à la justice. Les mesures prises incluent : L'envergure, la taille, la hauteur du buste, la longueur de la tête, la largeur de la tête, la longueur de l'oreille droite, la longueur du pied gauche, la longueur du coude gauche et la longueur du majeur gauche. Le bertillonnage a ouvert la voie à des méthodes modernes d\'identification, mais elle a depuis évolué pour inclure d\'autres disciplines scientifiques telles que la chimie, la biologie, et plus encore. **C) Police Technique et Scientifique** La **police technique et scientifique** englobe l\'ensemble des procédés, structures et méthodes utilisés pour documenter les scènes de crime. Elle se concentre sur la recherche de traces et indices laissés par les délinquants, tirant ainsi des conclusions probatoires à partir de preuves scientifiques. Son développement récent s'explique par l'importance croissante que revêt l'analyse scientifique dans les enquêtes judiciaires. Les types de preuves peuvent inclure des empreintes, de l'ADN, des balles, et même des traces de chaussures. **D) Le Profilage** Le **profilage criminel** constitue une méthode permettant de dresser le portrait psychologique d'un criminel inconnu. En analysant les actes criminels et les constatations des enquêteurs, cette technique vise à faciliter l\'identification de l\'auteur d'un crime. **Thomas Bond**, le premier profileur, est reconnu pour avoir établi le profil de **Jack l'Éventreur**. III. **La Criminologie** La **criminologie**, fondée par **Cesare Lombroso** et l\'école positiviste italienne, est l\'étude scientifique du phénomène criminel. Sa définition est cependant multidimensionnelle, et plusieurs approches coexistent. **A) Les Définitions de la Criminologie** Le débat autour des définitions de la criminologie est riche et varié : 1. **Définitions larges** - Selon **Francesco Ferri**, la criminologie est l\'ensemble de toutes les sciences criminelles, y compris le droit pénal. - **L'école autrichienne**, représentée par **Hans Gross**, propose également une définition large excluant toutefois le droit pénal. - L'**école américaine classique**, portée par **Sutherland**, considère la criminologie comme l\'étude des infractions dans leurs contextes sociaux. 2. **Définitions étroites** Ces définitions excluent le droit pénal et se concentrent sur l'étiologie criminelle et la dynamique criminelle, mettant l'accent sur des aspects tels que la victimologie et la prophylaxie criminelle. B. **Les Typologies des Formes de Criminologies** Il existe trois grandes oppositions dans les formes de criminologie : 1. **Science du délinquant vs. Science du délit** - Lombroso, « père de la criminologie », met l\'accent sur le délinquant, arguant que le crime n\'est qu\'un indice de la personnalité de l\'individu. En parallèle, une approche objectiviste privilégie l\'étude du crime lui-même. 2. **Sciences des facteurs vs. Sciences des processus** - Les premières se concentrent sur les causes de la délinquance, intégrant des figures comme Lombroso et Ferri. Les secondes s\'interrogent sur les processus qui conduisent à l\'infraction, analysés par des chercheurs tels que **Etienne De Greef**. 3. **Criminologie explicative vs. Criminologie de la réaction sociale** - Alors que la criminologie traditionnelle tente d\'expliquer l\'action criminelle, la criminologie moderne s\'intéresse davantage à la réaction sociale face à la déviance, soutenant que ces réactions peuvent parfois engendrer davantage de délinquance. C. **Branches de la Criminologie** 1. **Criminologie Interactionniste** Cette approche examine comment une étiquette sociale, telle que celle de délinquant, peut influencer le comportement des individus. 2. **Criminologie Organisationnelle** Elle se penche sur le processus d'application et d'administration de la loi pénale, en s\'intéressant aux institutions impliquées telles que le parlement et la police. 3. **Criminologie Critique** Affirmant que la criminalisation est un outil de contrôle social au service des groupes dominants, elle appelle à une décriminalisation de certaines infractions tout en incriminant d\'autres comportements. 4. **Criminologie Victimologie** Analysant la relation entre victimes et système judiciaire, cette branche vise à améliorer la prise en charge des victimes au sein du système pénal. 5. **Contenu de la Criminologie** - Elle s\'appuie sur diverses disciplines, notamment : - **Biologie criminelle** : Lombroso l\'a utilisée pour établir des traits distinctifs des criminels. - **Sociologie criminelle** : Analyse les facteurs sociaux influençant la criminalité, à l\'image des enseignements d'**Émile Durkheim**. - **Psychologie criminelle** : Étudie les aspects psychologiques des délinquants, en utilisant des tests psychologiques pour mieux comprendre leur comportement. **TITRE 5 : Le droit pénal** I. **Le droit Pénal comme Démarche normative** Le **droit pénal** poursuit une démarche normative qui cherche à établir un **idéal à atteindre** dans la société. Contrairement à une réalité, il est une **science juridique** qui se distingue par ses objectifs et ses principes, régissant les comportements et les conséquences des infractions. II. **Classification du Droit** **A. Droit Privé et Droit Public** Le droit pénal s\'inscrit dans ces deux grandes catégories : 1. **Droit Privé** : Regroupe l\'ensemble des règles qui régissent les relations entre **particuliers** ou **collectivités privées**. Cela peut inclure des domaines comme le droit de la famille, du travail, ou de la propriété. 2. **Droit Public** : Comprend les règles qui organisent l'**État** et les relations entre l\'État et les particuliers. Des domaines tels que le droit administratif, le droit fiscal, et le droit public de la santé en font partie. Traditionnellement, le droit pénal est perçu comme relevant du droit privé, mais ce rattachement fait l'objet de débats. **B. Rattachement Traditionnel du Droit Pénal au Droit Privé** Actuellement, le droit pénal est majoritairement considéré comme une branche du **droit privé**. Cela repose sur plusieurs arguments significatifs : - **Compétence Judiciaire** : Les infractions pénales relèvent des juridictions judiciaires. Les enseignants en droit pénal ont souvent une formation axée sur le droit privé et les sciences criminelles. - **Protection de l\'Intérêt Général** : Le droit pénal sanctionne des comportements considérés comme nuisibles. Par exemple, le vol ne viole pas seulement le droit à la propriété, mais également le droit subjectif du propriétaire. - **Rôle de la Victime** : La victime joue un rôle crucial dans le procès pénal, pouvant déclencher l'action publique pour obtenir réparation. Son implication contribue à la manifestation de la vérité et à l\'établissement des preuves. - **Garant des Libertés** : Le droit pénal organise la sanction des comportements déviants, protégeant ainsi les libertés individuelles. Toute atteinte aux libertés individuelles est soumise au contrôle de l'autorité judiciaire, comme stipulé par l\'article 66 de la Constitution française. **C. Rattachement Contesté** Le débat autour du rattachement du droit pénal est loin d'être unanime. Certains juristes soutiennent qu\'il devrait être rattaché au droit public, alors que d\'autres plaident pour son autonomie en tant que troisième branche. 1. **Rattachement au Droit Public** - **Relations État-Particuliers** : Beaucoup affirment que le droit pénal régule les relations entre l'État et les particuliers en punissant les comportements qui troublent l'ordre public, faisant ainsi primer l\'intérêt collectif sur l\'intérêt privé. - **Monopole de la Répression** : L\'État détient le monopole pour infliger des peines, ce que certains considèrent comme une caractéristique fondamentale d'un droit régalien, exprimant ainsi la souveraineté nationale. - **Droit Territorial** : Comme le droit public, le droit pénal est territorial. Une jurisprudence pénale ne peut s\'appliquer qu'à l'intérieur des frontières françaises, excluant l\'application des lois étrangères. 2. **Singularité par rapport aux Droits Public et Privé** - Certains avancent que le droit pénal est un droit **mixte**, empruntant des éléments tant au droit privé qu\'au droit public. Cela lui permet de garantir le respect des règles de droit tout en développant ses propres techniques spécifiques. - **Obligations Édictées** : Le droit pénal impose ses propres obligations, parfois négligées par d\'autres branches du droit, comme l'obligation de respecter la vie d\'autrui ou de porter secours. III. **Le Contenu du Droit Pénal** **A. Composantes Traditionnelles** Le droit pénal englobe l\'ensemble des règles juridiques fixant la réaction de l\'État face aux infractions et aux délinquants, organisant ainsi l\'application de la sanction pénale. 1. **Droit Pénal de Fond** Se concentre sur l\'identification des actes antisociaux, les personnes susceptibles d'être tenues responsables, et les peines applicables. Il se divise en deux sous-catégories : - **Droit Pénal Général** : Étudie les principes de la responsabilité pénale. Il définit l'infraction, les participants (comme le complice ou l'auteur) et les sanctions. Ce cadre général s'oppose au droit pénal spécial. - **Droit Pénal Spécial** : Examine en détail les éléments constitutifs et le régime juridique des infractions spécifiques. Cette branche est dispersée, avec des modalités de répression souvent fournies dans le Code pénal ainsi que dans d\'autres législations. 2. **Procédure Pénale** Rassemble toutes les règles encadrant la recherche, la poursuite et le jugement des auteurs d'infractions, ainsi que l'exécution des peines. Sa structure comprend : - La phase d'enquête menée par la police judiciaire. - La phase d'instruction régulée par le juge d\'instruction. - Le jugement par le tribunal compétent (tribunal de police ou correctionnel, par exemple). - La phase d'exécution de la peine. L'objectif de la procédure pénale est de maintenir un équilibre entre la recherche de la vérité et la protection des libertés individuelles tout en assurant l'efficacité des sanctions. **B. Composantes Nouvelles du Droit Pénal** Avec l\'évolution de la société, de nouvelles disciplines émergent au sein du droit pénal, affichant une autonomie croissante : 1. **Droit de la Peine** Se concentre sur l'étude des différentes sanctions pénales, incluant à la fois des règles de fond et de procédure. Toutefois, il ne couvre pas le droit pénitentiaire, qui concerne les conditions d'emprisonnement des détenus. 2. **Droit Pénal des Mineurs** Cette branche gagne en importance en tenant compte de la vulnérabilité des mineurs. Les règles pénales doivent s\'adapter aux circonstances, que l\'individu soit victime ou auteur d\'une infraction. Cela comprend : - L'intégration de circonstances aggravantes pour les victimes mineures. - La création d'infractions spécifiques protégeant les mineurs. - Le principe fondamental de la primauté de l\'éducatif sur le répressif, constitutionnalisé en tant que **PFRLR** (principe fondamental reconnu par les lois de la République française). 3. **Droit Pénal International** Avec l'émergence du droit pénal européen, le droit pénal international prend de plus en plus d\'importance. Il peut être défini comme l\'ensemble des règles régissant les éléments d'extranéité en matière pénale, englobe : - **Aspects Internationaux** : Organisation des règles de répression lorsqu\'une infraction a des liens avec l\'étranger, ainsi que toutes les règles de coopération et d\'extradition. - **Aspects Pénaux du Droit International** : Prévoit des sanctions pour des violations spécifiques des obligations prévues par le droit international, comme les génocides et autres crimes de masse, souvent jugés par des tribunaux pénaux internationaux (TPI, TPIY, TPIR). **TITRE 6 : Le droit pénal avant la Révolution française** I. **La Vengeance Privée** La **vengeance privée**, également connue sous le nom de **guerre privée**, était un aspect fondamental de la loi dans des sociétés où l\'individu agissait au nom de sa communauté. Celle-ci repose sur un instinct de survie et un besoin de maintenir l\'ordre social. Ainsi, toute agression perçue comme une menace contre le groupe était considérée comme un trouble d\'ordre social. **A) Concept et Responsabilité** Dans cette approche, le délit était pensé en termes de **préjudice subi par l\'individu ou sa famille**. Tous les délits étaient considérés comme des affaires privées, seuls quelques crimes (comme la trahison ou la désertion) touchant à la communauté. La réaction à ces infractions était alors caractérisée par une réponse **objective** : la gravité de l'acte motivait une réponse violente, sans évaluation de l\'intention (qu\'elle soit délibérée ou accidentelle). L'exercice de la vengeance était perçu comme un **droit** et même un devoir moral pour la victime et son clan. Cette forme de justice pouvait entraîner des **sanctions collectives**, frappant non seulement l\'auteur du délit mais également ses proches, conduisant parfois à l'élimination de l'un des clans par extermination ou exil. La responsabilité pénale était donc initialement **collective**. Ainsi, les conflits étaient souvent résolus par le biais de compromis, où la famille de la victime acceptait une compensation contre le renoncement de son droit à la vengeance. Ce modèle de justice est largement visible dans l\'ancienne Rome. II. **La Justice Privée** L\'évolution vers la **justice** **privée** a pour origine les inconvénients de la vengeance personnelle, qui mettait en péril la stabilité du groupe. Le fait d\'éliminer des membres du groupe fragilisait l\'ensemble de la communauté. De plus, ce modèle de justice devenait de plus en plus difficile à concilier avec les principes religieux qui commençaient à imprégner les sociétés. **A) Limitations de la Vengeance** Pour atténuer ces effets néfastes, plusieurs restrictions ont été introduites : - **Interdictions selon le lieu** : La vengeance était interdite dans des lieux sacrés, comme les temples, où **l\'asile** était offert. Un individu se réfugiant dans ces espaces devait être protégé par les autorités religieuses, ce qui interdit la vengeance. - **Interdictions selon le temps** : La vengeance ne pouvait être exercée durant certaines périodes de festivités religieuses, par exemple lors de célébrations, telles que la naissance d\'un héritier dans un clan. - **Responsabilité individuelle** : La responsabilité pénale commença à changer grâce à la notion **d'abandon** **noxal**, qui permettait de rendre responsable la famille de l'agresseur pour le délit commis, avec la possibilité de remettre le coupable à la victime pour une sanction. La justice privée se manifesta par l\'application de **la loi du talion**, édictant \"œil pour œil, dent pour dent\", ce qui marqua un progrès vers une justice proportionnelle à l\'infraction. Cette idée fut déjà formulée dans le célèbre **Code** **d'Hammurabi**, où la peine, quoique sévère, devait également être vue comme un moyen d\'expiation et d\'intimidation. III. **La Justice Publique** L\'avènement de la **justice** **publique** marque une transformation majeure dans le système pénal. C\'est l\'État qui commence à s\'organiser pour administrer la sanction pénale, remplaçant ainsi la vengeance personnelle par une réponse collective et institutionnelle. **A) Centralisation de la Réaction Pénale** L\'État impose un système de **composition**, et les victimes ne peuvent plus se faire justice elles-mêmes. Elles doivent se tourner vers l\'autorité de l\'État pour demander réparation, engendrant ainsi un processus judiciaire formel. Cette évolution génère deux méthodes de justice criminelle : le modèle **accusatoire** et le modèle **inquisitoire**. 1. **Le Système Accusatoire** Le modèle **accusatoire** est le plus ancien, jouant un rôle fondamental à Rome. Dans ce système, l\'accusateur---souvent la victime ou sa famille---initiait l\'action en justice. L\'accusation devait déclencher la procédure pénale, et sans cette initiative, aucun jugement ne pouvait avoir lieu. Les caractéristiques de ce système incluent : - **Publicité** : Le procès est ouvert au public pour que la communauté puisse observer. - **Oralité** : Les échanges se font oralement, rendant le procès accessible à tous, bien que peu savaient lire. - **Contradiction** : Les parties peuvent présenter leurs arguments, et le juge joue un rôle d\'arbitre. Cependant, ce modèle comprend également des faiblesses critiques, notamment : - La dépendance des poursuites à l\'initiative privée, ce qui peut conduire à des abus, chantages ou intimidations ; certains délits risquaient donc de rester impunis. - L\'implication de juges non professionnels limitait l\'équité des décisions rendues, pouvant mener à des jugements biaisés. 2. **Le Système Inquisitoire** Le modèle **inquisitoire** est apparu pour surmonter les insuffisances du système accusatoire. Pratiqué dans les juridictions ecclésiastiques et plus tard dans les monarchies européennes, ce système se concentrait principalement sur l'enquête préliminaire. Les caractéristiques de ce modèle incluent : - **Secret** : Le procès est mené en secret afin d'éviter des pressions extérieures, rendant l'accusé souvent inconscient des chefs d'accusation. - **Écriture** : Un dossier de procédure est constitué, résumant les enquêtes menées par le juge. - **Non-contradictoire** : Le juge a un rôle actif pour rechercher la vérité, tandis que l'accusé a une position passive. Le juge, dans ce système, a le pouvoir de déclencher les poursuites, limitant ainsi le rôle de l\'accusateur individuel. Ce modèle s\'accompagne d\'une inflexibilité des décisions en termes de preuves, soulevant souvent des inquiétudes concernant les droits et libertés des individus. IV. **Le Droit Pénal de l'Ancien Régime** Sous l\'Ancien Régime, le droit pénal était caractérisé par son **arbitraire**, sa **sévérité**, et une **inégalité** marquée dans l\'application des peines. **A) L\'Arbitrage de la Répression** Le juge pénal à cette époque n\'était pas contraint par des textes précis, ce qui lui permettait de définir librement les peines appliquées. Par conséquent, les décisions pouvaient être influencées par des critères moraux ou personnels, sans faire référence à un corpus légal précis, créant une absence de **principes d\'égalité criminelle**. Le juge déterminait la modalité de la sanction, souvent sévère, selon sa conception de ce qui était juste. **B) La Cruauté de la Répression Pénale** Les méthodes d\'interrogatoire et de torture étaient d\'une cruauté sans précédent. La **question préparatoire** était pratiquée pour obtenir des aveux sous des conditions inhumaines, et les peines étaient souvent dégradantes et violentes. Un exemple emblématique est le châtiment infligé à Ravaillac, le meurtrier d\'Henri IV, condamné à une exécution barbare. **C) L'Inégalité de la Répression Pénale** Le statut social du condamné influençait souvent le type de punition, créant des disparités importantes dans le traitement judiciaire. Un noble pourrait être miraculeusement exempté de tortures alors qu'un roturier subissait des châtiments cruels. L'affaire de **Jean Calas**, un protestant injustement accusé et condamné pour le meurtre de son fils, illustre cette injustice. Cet événement a conduit Voltaire à dénoncer l\'inégalité et à militer pour une réforme de la justice, dévoilant ainsi les abus de l\'époque. **TITRE 7 : Le droit pénal après la Révolution** De nombreux philosophes tels que **Montesquieu**, **Voltaire** et **Diderot** ont critiqué la justice pénale, considérant qu\'elle était souvent empreinte d\'arbitraire et d\'injustice. Ces critiques ont contribué à façonner le paysage juridique et pénal moderne, en posant les bases de réformes importantes. I. **La Critique de la Justice Pénale** **A) L'Affaire du Chevalier de la Barre** Un exemple marquant de ces critiques est **l\'affaire du chevalier de la Barre**, un jeune homme condamné à mort pour blasphème en 1766. Né le 12 septembre 1745 à Férolles-en-Brie, il est exécuté de manière cruelle pour des accusations considérées comme absurdes. **Voltaire** s\'en fait l\'écho dans son pamphlet, symbolisant ainsi la cruauté et l\'injustice de la justice pénale. Devenu un emblème de la lutte pour la laïcité, le chevalier de la Barre incarne les excès d'un système judiciaire défaillant, où l'obscurantisme prévaut sur la raison. **B) Cesare Beccaria et ses Propositions** **Cesare Beccaria**, par son ouvrage [Des délits et des peines] publiées en 1764, s\'inscrit dans la lignée des critiques des abus du système pénal. Il ne se contente pas de critiquer, mais offre des propositions concrètes, impulsant une réflexion sur le principe de **légalité des délits et des peines**. Ce principe, qui se résume par la formule « *nullum crimen, nulla poena sine lege* » (pas de crime, pas de peine sans loi), stipule que seules des lois existantes peuvent justifier une poursuite ou une sanction. Beccaria insiste sur le fait que la légitimité et les garanties d\'incrimination doivent émaner de la loi, énonçant que seule la loi représente une protection contre l\'arbitraire. Ce texte suscite un vif intérêt, y compris auprès du pouvoir royal, bien que des réformes ne puissent être mises en œuvre en raison de l\'instabilité politique de l\'époque. II. **Le Droit Intermédiaire** Le **droit** **intermédiaire** émerge comme un cadre légal post-révolutionnaire, visant à corriger les abus du passé. C\'est un mouvement d\'élimination des vices dénoncés par les penseurs du siècle des Lumières. **A) Principes de la Légalité** Des réformes d\'envergure sont instaurées : - **La légalité remplace l'arbitraire judiciaire** : La Déclaration des Droits de l\'Homme et du Citoyen (DDHC) consacre le principe de légalité en son article 8. **Le code pénal de 1791** établit des peines fixes pour chaque infraction, limitant ainsi l\'appréciation subjective du juge. - **L'indulgence remplace la rigueur** : L\'article 5 de la DDHC introduit un **principe de nécessité des incriminations**, focalisant l'attention sur les actes gravement nuisibles à l\'ordre public. Les châtiments corporels sont abolis, remplaçant ceux-ci par des **peines** **privatives de liberté**. - **L'égalité remplace l'ancienne inégalité** : L\'article 6 de la DDHC établit une pénalité uniforme, indépendamment de la région ou du statut social de l\'individu. - **La procédure accusatoire remplace celle inquisitoire** : Les jugements se veulent plus transparents, impliquant la participation de jurés populaires et donnant naissance aux **cours d'assises.** La procédure devient publique, orale et contradictoire. **B) Les Défis de l'Application** Cependant, ces réformes sont confrontées à des défis : - **L'essor de la grande criminalité** : Les campagnes et les villes connaissent une hausse des actes criminels, avec l\'apparition de bandes de malfaiteurs, rendant la répression difficile. - **La paralysie de la répression pénale** : Les troubles post-révolutionnaires amènent les citoyens à hésiter à poursuivre des accusateurs ou à remplir leurs fonctions de jurés, résultant en une vague d'impunité. Ces phénomènes laissent penser que les réformes ont été trop hâtives, ce qui conduit à des reculs dans la codification napoléonienne. III. **La Codification Napoléonienne** Sous le règne de **Napoléon**, deux codes majeurs sont élaborés : 1. **Le Code d\'instruction criminelle** (achevé en 1808) 2. **Le Code pénal** (achevé en 1810) **A) Le Code d'Instruction Criminelle** Ce code s\'intéresse à la procédure pénale et cherche à concilier les systèmes procéduraux en vigueur. La séparation entre l\'instruction et le jugement est accentuée. 1. **Phase d\'instruction** : Cette étape prépare le procès et vise à rassembler les preuves essentielles. C\'est dans cette phase que la question de la culpabilité est posée, avec la possibilité de renvoyer le cas devant une juridiction de jugement ou de prononcer un non-lieu. 2. **Phase de jugement** : Cette phase se concentre sur la déclaration de culpabilité ou d\'innocence. Les garanties procédurales sont cruciales, et la procédure adopte un caractère oral, public et contradictoire, protégeant les droits de l\'accusé. **B) Le Code Pénal de 1810** Ce **Code pénal** est souvent désigné comme l\'ancien code pénal. Il intègre le principe de légalité des délits et des peines, stipulant qu\'aucune infraction ne peut être sanctionnée sans une loi préexistante. Cependant, le système rigide des peines fixes évolue vers une approche qui permet au juge de déterminer une peine entre un minimum et un maximum, rendant le système plus adaptable aux circonstances d'un délit. Ainsi, par exemple, le vol était puni d'une peine d\'emprisonnement allant de 1 à 5 ans. Malgré le souci d\'égalité prôné, le code pénal de 1810 ramène des pénalités plus sévères, réintroduisant des formes de souffrances corporelles et intégrant la possibilité de la peine de mort. Durant une longue période, ce code pénal restera en vigueur, jusqu\'à ce qu\'un nouveau code soit créé par la suite, notamment en 1992, marquant une nouvelle ère d'adaptation législative. **TITRE 8 : Les grands courants de pensées du droit pénal et des sciences criminels** I. **Introduction aux Doctrines Pénales** Les **institutions pénales** et leurs modalités sont le résultat de réflexions de juristes et de penseurs sur la nature de la peine et les raisons qui poussent à punir. Deux courants majeurs s'opposent dans la pensée pénale : ceux qui soutiennent l'idée du **libre arbitre** et ceux qui se basent sur le **déterminisme**. II. **Les Doctrines Fondées sur le Libre Arbitre** Pour les doctrines basées sur le libre arbitre, le crime est considéré comme un abus de la liberté individuelle. Cette vision postule que chaque individu dispose du libre arbitre, ce qui implique que c\'est en toute connaissance de cause qu\'il décide de commettre une infraction, et donc qu\'il doit être puni. **A) La Répression Rétributive** Ce concept est une évolution de l\'idée primitive de la vengeance, où la punition est considérée comme une forme de **rétribution**. Dans ce sens, la peine infligée à l\'auteur d\'un crime sert à compenser le mal causé par celui-ci à la société. Les philosophes comme **Aristote** voient la peine comme un moyen de rétablir l\'équilibre perturbé par l\'infraction. Il s\'agit d\'une sorte de justice réparatrice où le droit pénal devient la juste expiation d\'une faute. Au 18ème siècle, **Kant** établit la théorie de la justice absolue en soutenant que la peine doit être appliquée indépendamment de son utilité sociale. Son apologue de l\'île abandonnée illustre cette idée : même si un condamné n\'est plus dangereux pour la société, la loi doit être respectée et l'exécution maintenue, soulignant l'exigence morale au-delà de toute considération utilitaire. **B) L\'Utilitarisme** Ce courant se concentre sur **l'utilité** de la peine, visant à dissuader les individus et la société par le droit pénal. Platon et Hobbes, parmi d\'autres, soutiennent que la peine doit être suffisamment sévère pour intimider. Le criminologue **Beccaria** insiste sur l\'importance de la certitude du châtiment, tandis que **Bentham** souligne que la peine doit être conçue pour être plus dissuasive que le gain du crime. Ce courant oriente ainsi le droit pénal vers un outil de **dissuasion**. **C) L\'École Néo-Classique** Les néo-classiques combinent les idées de **justice** et **d'utilité**, affirmant qu'il faut punir, mais \"jamais plus qu'il n'est juste, jamais plus qu'il n'est utile\". Des juristes comme **Rossi** et **Ortolan** argumentent en faveur de **l'individualisation** de la peine, considérant que chaque délinquant est unique à cause de son passé et de ses circonstances personnelles. Cette approche nécessite que le juge ait un pouvoir d'adaptation de la peine, ce qui a conduit à la généralisation des **circonstances** **atténuantes** au 19ème siècle. Pour ces doctrines, le délinquant n\'est ni un monstre ni malade, mais une personne qui a mal utilisé sa liberté, et donc, il en résulte une responsabilité morale dans ses actes. III. **Les Doctrines Fondées sur le Déterminisme** Ces doctrines reposent sur une approche scientifique, affirmant que les comportements criminels sont influencés par des facteurs internes et externes. **A) Le Positivisme** Le positivisme, impulsé par des penseurs comme **Lombroso**, **Ferry**, et **Garofalo**, se distingue fondamentalement du droit pénal classique. Ce système affirme que les criminels ne sont pas vraiment libres, mais déterminés par des éléments externes et biologiques qui les guident à agir. 1. **La Conception Positiviste du Crime** Lombroso, par exemple, propose l\'idée de **criminels** **nés**, identifiables par des caractéristiques biologiques et psychologiques qui prédisposent à la délinquance. Ferry, quant à lui, met l'accent sur le déterminisme sociologique, arguant que des facteurs environnementaux, comme le milieu familial et économique, influencent le comportement criminel. 2. **La Conception Positiviste de la Réaction Sociale** Puisque le criminel est considéré comme un individu dangereux, la société a le droit de se protéger contre lui. Ainsi, la protection de la collectivité prend le pas sur d'autres considérations. Lombroso préconise des méthodes d\'élimination des criminels, qu\'elles soient définitives ou en les isolant. Les **mesures préventives** et **correctives** deviennent alors une priorité, visant à supprimer les opportunités de crime. **B) La Défense Sociale** Apparue au 20ème siècle, la défense sociale glisse vers une approche plus nuancée après la Seconde Guerre mondiale. 1. **Les Doctrines Éclectiques de la Première Moitié du 20ème Siècle** Cette période voit des tentatives de synthèse entre les doctrines classique et positiviste. Par exemple, l\'école pragmatique espagnole cherche à expérimenter des approches des positivistes sans adhérer à tous leurs principes, tandis que l\'union internationale de droit pénal se positionne sur un terrain neutre. 2. **Les Doctrines de Défense Sociale de la Seconde Moitié du 20ème Siècle** - **La Défense Sociale de Gramatica** : Cette théorie vise à protéger les délinquants de la société qui ne les comprend pas. La personnalisation de la réponse pénale devient capitale, mettant de côté l\'idée de culpabilité. - **La Défense Sociale Nouvelle de Marc Ancel** : En 1954, Ancel souligne que le problème criminel est individuel et doit être résolu selon la personnalité du délinquant. Contrairement à Gramatica, Ancel ne remet pas en cause l\'existence du droit pénal mais prône un humanisme juridique. L\'idée est d\'examiner chaque délinquant de manière unique et d\'adapter les mesures aux spécificités des individus, en mobilisant des experts de divers horizons pour mieux comprendre la personnalité des délinquants. **TITRE 9 : Le droit pénal contemporain** 1. **Présentation des Codes en Vigueur** **A) Le Code de Procédure Pénale (CPP)** Le **Code de procédure pénale** a été réformé en 1958 et est entré en vigueur le 2 mars 1959. Cela a marqué un tournant après 150 ans de modifications et d\'évolutions en réponse aux changements politiques au sein de la société française. 1. **Les Justifications de la Réforme** Après la **Seconde Guerre mondiale**, la France a connu une période tumultueuse. En 1945, le défi était de restaurer **l'ordre** et **la** **République** tout en dépassant l'héritage pesant du régime de Vichy. Les excès de ce régime ont été abrogés, mais il était utopique de penser qu\'une nouvelle législation pouvait être construite rapidement. La mémoire des méthodes répressives (telles que la torture) utilisées pendant le conflit imposait aux nouvelles autorités une vigilance renforcée. Cela a conduit à la création d\'une **commission** **de** **réforme**, présidée par le professeur **Donnedieu de Vabres**, spécialiste en droit pénal international. Bien que ses propositions n'aient pas obtenu un consensus, une nouvelle commission a été mise en place en 1953, dirigée par **M.Besson**, procureur général de la Cour de cassation. Leur travail a conduit à la publication de l\'ordonnance de 1958, qui a établi le Code de procédure pénale, remplaçant ainsi le code d'instruction criminel. 2. **Les Principaux Traits du Code de Procédure Pénale** Le CPP vise à trouver un équilibre entre l'efficacité de la réponse pénale et la protection des droits individuels et des libertés. Cette dualité se manifeste dans sa structure : - Il repose sur un **courant d'inspiration libérale**, garantissant les droits individuels, en encadrant la garde à vue et la détention préventive. - Parallèlement, un **courant de sécurité** représente une tendance où l\'avocat est absent à la phase d'enquête policière, renforçant les prérogatives des préfets. Le CPP adopte un modèle mixte : une procédure **inquisitoire** pendant la phase préliminaire et une procédure **accusatoire** lors du jugement. Cette législation actuelle reflète l'influence du mouvement de **défense** **sociale** **nouvelle**, initié par **Marc Ancel**, qui a proposé l\'introduction d'enquêtes sociales et d'examens médicaux psychologiques au cours des procédures. Actuellement, de nombreuses réformes sculptent l\'évolution continue de la procédure pénale, illustrant une réelle **inflation** **législative**. B. **Le Code Pénal** 1. **Les Justifications de la Réforme** Le précédent **Code pénal**, datant de 1810, a révélé de nombreuses lacunes : manque de cohérence, absence de dispositions générales et d\'une théorie générale de responsabilité pénale. Chaque infraction est régie par des articles spécifiques, rendant le code difficile à naviguer, particulièrement à cause des nombreuses modifications du XIXe et XXe siècle. Dès lors, une **commission de réforme** a été instruite en 1974, présidée par **Robert Badinter**, ministre de la Justice en 1981. Cette réforme a été adoptée en 1992, permettant d\'introduire un nouveau code pénal, qui est entré en vigueur le 1er mars 1994. 2. **Les Principaux Traits du Code Pénal** Tout comme le CPP, le Code pénal se présente comme un code de compromis. Bien qu\'il n\'ait pas un caractère plus sévère que son prédécesseur, il a mis l\'accent sur la cohérence des textes légaux et défini plus clairement les comportements interdits. a. **Quant à la Forme** La structure du Code pénal est mieux organisée, divisée en deux parties : **Partie législative** (qui inclut les crimes et délits), et **partie règlementaire** (pour les contraventions). Le code comprend plusieurs livres détaillant diverse infractions, tels que : - **Livre 1** : Dispositions générales (ex : les crimes et délits sont dans le domaine de la loi). - **Livre 2** : Crimes et délits contre les personnes (ex : meurtre, viol). - **Livre 3** : Crimes et délits contre les biens (ex : vol, vandalisme). - **Livre 4** : Crimes et délits contre la nation, l'État et la paix publique (ex : complot, corruption, terrorisme). La numérotation de ce code, bien qu\'introduisant une certaine complexité, vise à clarifier l\'application de la loi (par exemple, en 1992, il y avait 764 articles contre plus de 1200 aujourd\'hui). b. **Quant au Fond** Le nouveau Code pénal reprend de nombreux principes de l'ancien, tout en consacrant des innovations significatives : - **Principe de légalité** : Aucun acte ne peut être puni s\'il n\'est pas prévu par la loi. - **Principe de culpabilité** : La responsabilité pénale n\'est engagée qu'en cas de faute, qu'elle soit volontaire ou involontaire, et si l'individu est discernant. - **Principe de personnalité** : On est responsable de ses propres actes, non de ceux d\'autrui. Innovations importantes présentes dans le Code pénal incluent : L'introduction de la responsabilité pénale des **personnes morales.** La suppression des **minimas** **légaux** pour certaines infractions. La première incrimination véritable des **crimes contre l'humanité.** 2. **L\'Évolution de la Législation Contemporaine** Le droit pénal est intrinsèquement lié à la politique ; ainsi, selon la majorité au pouvoir, des lois peuvent être plus ou moins répressives. On observe des mouvements systématiquement alternés de **dépénalisation** et de **répénalisation**, illustrés par des sujets tels que l\'avortement ou l\'abolition de la peine de mort. Entre 2000 et 2014, un impressionnant mouvement sécuritaire a émergé, surtout en matière de **lutte contre le terrorisme**. Aujourd'hui, on fait face à une **inflation pénale**, où des lois sont créées en abondance. Dans le cadre de la procédure pénale, on observe une multiplication de **régimes dérogatoires** qui cohabitent avec les normes de droit commun, ce qui renforce les spécialisations dans le domaine pénal. Du côté du fond, il est devenu impossible de dresser une liste exhaustive des infractions pénales, particulièrement en réponse aux évolutions technologiques liées à **l'internet**. Enfin, cette prolifération d\'infractions, souvent inutiles, conduit à des situations où un même fait peut-être qualifié par plusieurs textes, rendant la définition de l\'infraction et les peines associées parfois incompatibles, ce qui met en lumière une perte de cohérence dans le système juridique. **TITRE 10 : Aspects fondamentaux** I. **La Classification Tripartite des Infractions** Les infractions sont classées en trois catégories principales selon leur gravité, selon les dispositions de l'article 1**11-1** du Code pénal. Cette classification essentielle permet d\'identifier et d\'organiser les différentes infractions qui peuvent être commises. **A) La Présentation** Cette distinction repose sur la gravité des infractions, laquelle se traduit par différentes peines encourues. Les infractions sont donc divisées en trois catégories majeures : 1. **Les Crimes** Les crimes sont les infractions les plus graves et sont punis par des peines criminelles. Parmi celles-ci, on trouve principalement la **réclusion criminelle et la détention criminelle **: - **Réclusion criminelle** : C'est une peine privative de liberté dont la durée varie de dix ans jusqu\'à la perpétuité. La loi fixe des seuils spécifiques pour le choix de la peine (15, 20, 30 ans, ou la perpétuité) selon la nature et la gravité du crime commis. - **Détention criminelle** : Bien que souvent confondue avec la réclusion criminelle, elle est généralement réservée aux crimes politiques et s'applique à des cas spécifiques. En pratique, pour l'individu, cela revient souvent à purger une peine en prison. 2. **Les Délits** - Les délits entraînent des peines dites délictuelles, qui se traduisent par des travaux d\'intérêt général, de l'emprisonnement ou des amendes. Les peines d'emprisonnement pour délits varient, avec des seuils de 6 mois, 1 an, 3 ans jusqu'à 10 ans au maximum. - En ce qui concerne les amendes, elles sont obligatoirement supérieures à 3750€. Les délits sont très hétérogènes, allant de **l'homicide involontaire**, qui peut subir une peine d'emprisonnement de 3 ans, jusqu\'à des infractions telles que le harcèlement moral ou sexuel. 3. **Les Contraventions** Les contraventions sont les infractions les moins graves et sont généralement punies par une amende dont le montant peut atteindre 3000 €. Il existe cinq classes de contraventions, chacune avec une peine pécuniaire spécifique : - **1ère classe** : 38 € d'amende (exemple : passage piéton). - **2ème classe** : 250 € d'amende (exemple : stationnement interdit). - **4ème classe** : 750 € d'amende (exemple : téléphone au volant). - **5ème classe** : 1500 € d'amende (exemple : conduite sans assurance). **NB** : Dans certains cas de récidive, une contravention de la 5ème classe peut être requalifiée en délit. **B) Les Intérêts** 1. **Les Intérêts en Droit Pénal de Fond** La classification des infractions est cruciale pour déterminer leur nature. Les sanctions prévues dans le Code pénal permettent de classifier les infractions en crime, délit ou contravention. Les peines énoncées constituent un maximum que le juge ne peut dépasser, bien qu\'il puisse infliger une peine inférieure. - En matière de tentative, il est important de noter que la **tentative de crime** est toujours punissable, alors que la **tentative de délit** ne l\'est que si une loi le précise spécifiquement. - La complicité pour les contraventions est largement exclue sauf si elle concerne spécifiquement des crimes ou des délits. - Les crimes et les délits sont généralement caractérisés par une intention, sauf disposition contraire strictement définie par la loi, comme l\'homicide involontaire qui peut être non intentionnel. **2. Les Intérêts en Procédure Pénale** La gravité de l\'infraction est déterminante pour la **compétence des juridictions pénales** : - **Le tribunal de police** est désigné pour juger les contraventions. - **Le tribunal correctionnel** est compétent pour les délits. - **Le tribunal pénal** est chargé du jugement des crimes. - Les **cours criminelles départementales** et **les cours d'assises** sont responsables des crimes plus graves, en fonction des peines encourues. La nature de l'infraction influence également le nombre de phases du **procès pénal** : - Pour les crimes, une **instruction** est obligatoire. - Pour les délits, l'instruction est **facultative**. - Enfin, pour les contraventions, elle est **exceptionnelle**. Cette classification a également des implications sur le **délai de prescription de l'action publique**, qui est de 20 ans pour les crimes, 6 ans pour les délits, et 1 an pour les contraventions. Le délai de prescription des peines suit également cette classification ; les délais sont respectivement de 20 ans pour les crimes, 6 ans pour les délits, et 3 ans pour les contraventions. II. **Les Composants de l\'Infraction** Chaque infraction est composée de deux éléments fondamentaux : **l'incrimination** et la **sanction**. **A) L\'Incrimination** L'infraction inclut plusieurs éléments constitutifs, qui sont essentiels pour établir la punissabilité de l'infraction : - **Élément légal** : Il doit exister un **texte d'incrimination** stipulant la prohibition d'un acte, garantissant ainsi le principe d'égalité criminelle. - **Élément matériel** : C'est la réalisation concrète de l\'infraction, nécessitant que le délinquant ait effectivement commis un acte. Le droit pénal ne sanctionne pas la pensée. L\'acte peut être positif (agir) ou négatif (omission, comme dans le cas de la non-dénonciation d'un crime). 1. **L'Élément Matériel** Pour qu\'une infraction soit punissable, il est crucial que l'individu passe à l'acte, par conséquent : - **L'acte** : Peut-être un acte positif (faire quelque chose) ou une infraction d'omission (ne rien faire intentionnellement). - **Le résultat** : C'est le trouble engendré par l\'infraction. Les comportements qui entraînent un résultat sont généralement incriminés, même si parfois, on incrimine des comportements de prévention, c\'est-à-dire des actes à risque qui n\'ont pas encore causé de dommages mais qui pourraient entraîner de graves conséquences. 2. **L\'Élément Moral** Cet élément requiert la présence d'une faute prouvée pour établir la responsabilité pénale. Selon l'article **121-1** du Code pénal, « nul n'est responsable pénalement que de son propre fait ». - La faute peut être **intentionnelle**, ce qui est le cas la plupart du temps avec les crimes et délits. - Cependant, certains délits peuvent être considérés comme non intentionnels, comme dans le cas de l'homicide involontaire. **B) La Sanction** La sanction en droit pénal se divise principalement en deux catégories : **les peines** et **les mesures de sûreté**. 1. **Les Peines** La peine est l'aspect déterminant du droit pénal, infligée comme châtiment pour le délinquant en raison de l'infraction commise. Elle est à la fois allictive (inflige une souffrance à la personne) et infamante (atteint l'honneur). Les peines peuvent avoir plusieurs fonctions, notamment : - **Fonction rétributive** : Punir la commission d'une faute. - **Fonction préventive** : Dissuader l'auteur de commettre à nouveau l'infraction. 2. **Les Mesures de Sûreté** - Contrairement aux peines, les mesures de sûreté visent non pas à punir, mais à protéger la société en surveillant ou en traitant les individus jugés dangereux. - Ces mesures n'entrent pas forcément sous le coup du droit pénal, mais relèvent souvent de la compétence administrative (comme l'hospitalisation forcée). - Dans le domaine pénal, cela comprend des mesures comme l'injonction de soins ou des interdictions d'approche, notamment pour des délinquants sexuels.

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