Notes de cours - Droit des obligations (Université Laval)

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Summary

Ces notes de cours d'introduction au droit des obligations au Québec, couvrent le Code civil du Québec (CCQ), les sources des obligations (contrats, obligations légales, extracontractuelles), et les définitions de base. Le cours est structuré autour des concepts de droit commun, des liens de droit entre les personnes, et les différentes sources d'obligations.

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Thème 1 : Introduction générale Notes de cours par Julie McCann DROBLIG/1 - 04/2020 TABLE DES MATIÈRES...

Thème 1 : Introduction générale Notes de cours par Julie McCann DROBLIG/1 - 04/2020 TABLE DES MATIÈRES Page OBJECTIFS SPÉCIFIQUES DU THÈME 1............................................................................................................ 2 1 LE CODE CIVIL DU QUÉBEC....................................................................................................................... 3 1.1 LE DROIT DES OBLIGATIONS.......................................................................................................................... 3 1.2 QUELQUES DÉFINITIONS ET NOTIONS DE BASE............................................................................................. 4 1.3 CARACTÉRISTIQUES PRINCIPALES DES OBLIGATIONS CIVILES........................................................................ 7 2 LES SOURCES DES OBLIGATIONS............................................................................................................ 10 2.1 LE CONTRAT................................................................................................................................................ 11 2.2 LES OBLIGATIONS LÉGALES......................................................................................................................... 11 2.3 LES OBLIGATIONS EXTRACONTRACTUELLES................................................................................................ 11 2.4 LES AUTRES SOURCES D’OBLIGATIONS......................................................................................................... 12 3 LE DROIT COMMUN DES CONTRATS.................................................................................................... 14 4 SYNTHÈSE....................................................................................................................................................... 18 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 INTRODUCTION GÉNÉRALE AU DROIT DES OBLIGATIONS Objectifs spécifiques du thème 1 Au terme de l’apprentissage de ce thème, vous pourrez : 1. Expliquer en quoi consiste le « droit commun »; 2. Repérer les articles du CCQ pertinents au droit des obligations, la table des matières, l’index ainsi que la Loi sur la protection du consommateur; 3. Distinguer l’obligation civile de l’obligation morale ou naturelle en expliquant en quoi elles se distinguent; 4. Énumérer les sources des obligations et décrire leurs fondements; 5. Expliquer pourquoi les obligations sont créatrices de droits personnels (et non de droits réels). © Université Laval 2020 2 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 1 Le Code civil du Québec Le Code civil du Québec (qui sera ci-après nommé « CCQ ») contient les principales règles applicables en matière de droit des obligations. Aux fins de ce cours, vous devrez donc fréquemment consulter le CCQ. Il est donc très important de vous familiariser dès à présent avec son contenu: table des matières, index, livres, etc. En le feuilletant, répondez au questionnaire Q1.1. 1.1 Le droit des obligations On a écrit que le droit est « un principe d’organisation de la vie en société ». Là où un groupe de personnes s’organise pour vivre ensemble, il existe du droit. Le droit public s’intéresse aux rapports entre les États ou entre un État et la collectivité des individus qui le composent. Ainsi, le droit international, le droit administratif et le droit constitutionnel relèvent du droit public. Le droit privé, dont le droit civil est l’une des branches principales, vise à réglementer les rapports entre les personnes (physiques ou morales) ainsi que les biens. Par exemple, les successions, les relations matrimoniales et la filiation constituent des matières de droit privé. Le CCQ comprend les règles de droit commun, c’est-à-dire les règles générales et les principes applicables en l’absence de règles spéciales ou d’exception. La lecture de la Disposition préliminaire du CCQ confirme cette réalité : Le Code civil du Québec régit, en harmonie avec la Charte des droits et libertés de la personne et les principes généraux du droit, les personnes, les rapports entre les personnes, ainsi que les biens. Le Code est constitué d'un ensemble de règles qui, en toutes matières auxquelles se rapportent la lettre, l'esprit ou l'objet de ses dispositions, établit, en termes exprès ou de façon implicite, le droit commun. En ces matières, il constitue le fondement des autres lois qui peuvent elles-mêmes ajouter au Code ou y déroger. (Nous soulignons) Le droit des obligations est donc une des branches du droit privé; ses principales règles, soit le droit commun du droit des obligations, ont été codifiées au Livre V du CCQ. D’autres lois (autres que le CCQ) pourront donc aussi parfois s’appliquer au droit des obligations. À titre d’exemple, la Loi sur la protection du consommateur s’applique à certains types de contrats. Elle complète le droit commun ou parfois y déroge. © Université Laval 2020 3 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 1.2 Quelques définitions et notions de base Le Dictionnaire de droit québécois et canadien définit ainsi le mot obligation : Lien de droit en vertu duquel une ou plusieurs personnes, le ou les débiteurs, peuvent être contraintes par une ou plusieurs autres, le ou les créanciers, de donner, de faire ou de ne pas faire quelque chose. Suivant cette définition, l’obligation est un lien de droit. Ce lien de droit pourra prendre diverses formes selon que les parties aient « voulu » créer ce lien entre elles – il s’agira alors d’une relation contractuelle (Première partie) – ou que ce lien soit le résultat de leurs actes, dans le cas d’une relation extracontractuelle impliquant la responsabilité civile (Deuxième partie). Nous verrons aussi que d’autres situations peuvent être source d’obligations. Le droit des obligations est constitué d’un ensemble de règles qui régissent les rapports économiques entre des personnes. Il réglemente les rapports entre des personnes. Il peut s’agir de rapports impliquant des personnes physiques (individus) ou des personnes morales de droit privé (compagnie, par exemple). Il s’applique également à l’État, à ses organismes (ex. : Société des alcools) ainsi qu’à toute personne morale de droit public (ex. : une municipalité) dans leurs rapports économiques avec une autre personne. 1376. Les règles du présent livre s'appliquent à l'État, ainsi qu'à ses organismes et à toute autre personne morale de droit public, sous réserve des autres règles de droit qui leur sont applicables. Cet article indique cependant que le recours aux dispositions du CCQ doit être fait « sous réserve des autres règles de droit qui leur sont applicables ». Cela implique que toute loi particulière aura préséance sur les dispositions de droit commun du CCQ. Par exemple, la loi constitutive de la Société des alcools du Québec prévoit des formalités spéciales visant l’octroi de contrats à ses fournisseurs; elle a préséance sur les dispositions de droit commun du CCQ. Le droit des obligations crée certains liens entre le Livre premier du CCQ, Des personnes et le Livre Quatrième Des biens. Les obligations se créent lorsqu'une personne engage, volontairement ou non, son patrimoine dans ses contacts de la vie courante avec d'autres personnes. Ce faisant, elle se soumet inconsciemment aux règles touchant sa personne et ses biens et le résultat concerne alors le droit des © Université Laval 2020 4 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 obligations. C'est pourquoi le droit des obligations est souvent présenté comme constituant le cœur de tout Code civil. ** On s’interroge! ** Comment une personne peut-elle, engager involontairement son patrimoine? Réponse : Si votre enfant joue au hockey dans la rue et avec un lancer frappé foudroyant rate le but et la balle brise la vitre de la maison du voisin, votre patrimoine servira à dédommager votre voisin. Bien qu’il n’y ait pas de contrat entre vous et votre voisin concernant la réparation de la vitre, à titre de parent, vous devrez quand même verser une somme d’argent à votre voisin pour l’acte involontaire de votre enfant. Vous êtes civilement responsable et votre patrimoine sera donc engagé. Il s’agit d’une obligation : celle de réparer les préjudices causés à autrui. Le droit des obligations fait intervenir des parties, que l’obligation soit née d’un contrat ou non. Il s’agit du débiteur et du créancier. Le débiteur est celui qui est tenu et éventuellement pourra être forcé d’exécuter l’obligation ou de réparer un préjudice causé par sa faute ou par une personne ou un bien qu’il a sous sa garde. Le créancier est celui à qui est reconnu le droit d’exiger et éventuellement de forcer le débiteur à exécuter l’obligation. Ce droit qui est reconnu au créancier de « forcer » le débiteur à exécuter son obligation consiste en la possibilité de s’adresser aux tribunaux pour faire reconnaître ce droit; même si ce droit est clair et que l’obligation est valable, il ne peut être question de se faire justice soi-même! Parmi les sources d'obligation reconnues par le droit, ce cours s'intéresse notamment au contrat, qui peut être défini comme une « convention par laquelle deux ou plusieurs personnes font naître entre elles des obligations ou transfèrent un droit réel » (d'où l’expression « obligations conventionnelles » que l’on retrouve encore parfois en littérature). Lorsqu'on parle de transfert d'un droit réel, on vise généralement le droit de propriété sur un bien, qui passera alors d'une personne à une autre (vente d'une automobile, d’une maison, etc.). Même lorsque le contrat a pour but de transférer un droit réel sur un bien (c’est-à-dire en transférer la propriété), il ne crée généralement qu'un lien de droit personnel entre les individus. Cela signifie © Université Laval 2020 5 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 que la partie qui veut forcer son cocontractant à exécuter son obligation — par exemple, livrer le bien faisant l’objet de la vente — ne dispose d'aucun droit prioritaire ou particulier sur ce bien. Le lien de droit personnel implique que le patrimoine entier du débiteur est mis à la disposition de ses créanciers : ces derniers ne pourront qu’exiger un dédommagement en argent, puisé à même le patrimoine du débiteur – c’est ce que l’on appelle les dommages-intérêts. Cependant, dans certaines situations (comme lors d’un prêt rattaché à la vente d’un immeuble – appelé « prêt hypothécaire » dans le langage courant) le contractant désireux de se protéger adéquatement réclame la constitution d'un droit réel accessoire telle une hypothèque1. Dans ce cas, en cas de défaut de l'autre partie, le droit réel accessoire permettra au créancier de demander la saisie du bien hypothéqué; il aura priorité sur le prix de vente de ce bien et pourra être dédommagé avant les autres créanciers. Bien que ces questions soient bien de droit civil, ce type de situation n’est pas étudié dans le cadre de notre cours de droit des obligations; il s’agit plutôt de questions relatives au droit des Priorités et des hypothèques (Livre 6 du CCQ). La question de l’étudiant Pourriez-vous clarifier la différence entre la notion de droit personnel et de droit réel? Le droit réel (du latin res=chose) s’oppose à droit personnel : j’ai un droit sur votre bien et ce droit suit le bien en quelque main qu’il passe; par exemple si vous vendez votre maison ou votre condo, l’acheteur devient responsable de l’hypothèque et l’institution prêteuse ira se faire payer par l’un ou l’autre des acheteurs (sauf bien entendu si la dette est remboursée). Ce droit réel est différent d’un droit personnel; vous me prêtez 1 000$, vous avez un droit de créance (personnel) contre moi mais pas sur ma maison en particulier. Il est vrai que l’ensemble de mes biens garantit mes obligations nous dit l’article 2644 CCQ : « Les biens du débiteur sont affectés à l'exécution de ses obligations et constituent le gage commun de ses créanciers. » Mais on ne parle pas ici du cas particulier de l’hypothèque. 1 Voir la définition de l'hypothèque à l'article 2660 CCQ. © Université Laval 2020 6 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 Les termes du CCQ ont toujours le même sens à moins d’une exception ou d’une clarification explicite. Exemple : le mot « meuble » dans les aa. 2651 et 2648 CCQ, sous l’art. 2651 CCQ, ce sont des meubles au sens ordinaire : art. 905 CCQ « Sont meubles les biens qui peuvent se transporter »; art. 2648 CCQ ce sont des « meubles du débiteur qui garnissent sa résidence principale, servent à l'usage du ménage et sont nécessaires à la vie de celui-ci » donc leur sens est plus restrictif. 1.3 Caractéristiques principales des obligations civiles L’essence de l’obligation se retrouve à l’article 1371 CCQ : 1371. Il est de l'essence de l'obligation qu'il y ait des personnes entre qui elle existe, une prestation qui en soit l'objet et, s'agissant d'une obligation découlant d'un acte juridique, une cause qui en justifie l'existence. On peut donc résumer les caractéristiques des obligations civiles selon trois axes soit les parties, la prestation et la cause lorsqu’il s’agit d’un contrat. Les parties : Les obligations naissent entre deux ou plusieurs personnes. Il s’agit des parties, qui doivent nécessairement être au nombre de deux ou plus. Un acte purement unilatéral (un testament, par exemple) n'est pas une obligation puisqu'il ne fait intervenir qu'une seule personne au stade de sa formation. C'est donc un acte juridique « à sens unique » que son auteur peut révoquer à tout moment, chose qu'il ne pourrait pas faire s'il avait contracté une obligation. En matière d’obligations, on retrouve donc minimalement deux parties, le débiteur et le créancier. La prestation : Les obligations ont un objet, c'est-à-dire qu'il y a quelque chose que le débiteur doit faire ou ne pas faire dans l'intérêt du créancier : c’est ce que l'on appelle en droit une prestation. © Université Laval 2020 7 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 La cause : Lorsque l’obligation découle d’un contrat, elle naît d'une cause qui en justifie l’existence, c'est-à-dire d’une raison objective et impersonnelle qui a amené une partie à s'engager. À titre d’exemple, dans un contrat de vente, l'obligation du vendeur de livrer le bien a pour cause l'obligation pour l'acheteur de payer le prix, et vice-versa. ** On s’interroge! ** Quelle est la distinction entre la cause et la prestation? Réponse : En matière de location, la cause pour le locataire repose sur le fait qu’il a besoin d’un endroit pour vivre et la cause, pour le locateur (propriétaire), est d’obtenir de l’argent (loyer) en échange de la mise à la disposition d’un appartement. Pour ce qui est de la prestation, le locataire doit payer le loyer et le locateur doit fournir le logement au locataire. En matière de vente, lors de l’achat d’un véhicule, la cause pour l’acheteur est le besoin d’un véhicule, tandis que pour le vendeur, c’est de réaliser un profit. En ce qui a trait à la prestation, le vendeur doit livrer le véhicule et l’acheteur doit payer le prix demandé. Une autre des caractéristiques essentielles de l’obligation civile est qu’elle a un caractère « obligatoire ». Elle reconnaît le droit du créancier de forcer le débiteur à exécuter l’obligation ou encore à être compensé monétairement lorsque le débiteur est en défaut d’exécuter son obligation. Il s’agit de la force obligatoire. © Université Laval 2020 8 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 1590. L'obligation confère au créancier le droit d'exiger qu'elle soit exécutée entièrement, correctement et sans retard. Lorsque le débiteur, sans justification, n'exécute pas son obligation et qu'il est en demeure, le créancier peut, sans préjudice de son droit à l'exécution par équivalent de tout ou partie de l'obligation : 1° Forcer l'exécution en nature de l'obligation; 2° Obtenir, si l'obligation est contractuelle, la résolution ou la résiliation du contrat ou la réduction de sa propre obligation corrélative; 3° Prendre tout autre moyen que la loi prévoit pour la mise en œuvre de son droit à l'exécution de l'obligation. Cette « force obligatoire » distingue l’obligation civile d’autres types d’obligations telles l’obligation morale ou l’obligation naturelle. On peut penser à l'obligation d’être poli, à l’obligation alimentaire entre un frère et sa soeur moins aisée (qui découle d'un simple devoir moral et non pas d’une obligation légale) ou encore aux dettes éteintes à la suite de la faillite du débiteur (où le failli n'est tenu qu'en conscience d'en acquitter le solde à ses anciens créanciers). Il s’agit dans ces cas, d’obligations dont on ne peut forcer l’exécution. Leur sanction ne sera que morale ou sociale et non pas juridique. ** On s’interroge! ** Pouvez-vous donner un exemple de réduction des obligations corrélatives? Réponse : Un vendeur doit livrer deux cordes de bois de chauffage. Le prix demandé est de 300 $ (150 $ par corde de bois). Si le vendeur ne livre qu’une corde de bois, les obligations de l’acheteur seront diminuées, car le vendeur n’a exécuté que la moitié de son obligation. Donc, l’acheteur sera en droit de ne payer que la moitié de son obligation corrélative, soit 150 $. Pouvez-vous donner un exemple d’exécution par équivalent? Réponse : L’exécution par équivalent est généralement une exécution en argent, pour compenser une obligation d’une autre nature, c’est pourquoi on dit « par équivalent ». Par exemple, dans le cas d’un contrat de travail les obligations sont (1) pour l’employé, de fournir la prestation de travail et © Université Laval 2020 9 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 (2) pour l’employeur, de permettre à l’employé de réaliser sa prestation de travail et de payer le salaire. Si un employé est injustement congédié, on considère qu’il s’agit d’une inexécution contractuelle : l’employeur manque à son obligation de permettre à l’employé de réaliser sa prestation de travail. L’exécution en nature serait la réintégration de l’employé dans ses fonctions. L’exécution par équivalent serait le paiement de dommages-intérêts ($$) pour compenser la perte subie par l’employé. 2 Les sources des obligations Quelles situations peuvent entraîner la création d’un lien d’obligation? 1372. L'obligation naît du contrat et de tout acte ou fait auquel la loi attache d'autorité les effets d'une obligation. Elle peut être pure et simple ou assortie de modalités. Le CCQ reconnaît donc plusieurs sources d’obligations : - Les obligations contractuelles : le contrat - Les obligations créées d’autorité par la loi - Les obligations extracontractuelles : la responsabilité civile - Les autres sources d’obligation : la gestion d’affaires, la réception de l’indu et l’enrichissement injustifié Une obligation peut naître d’un contrat, source d’obligation que nous étudierons dans la première partie de ce cours. L’obligation peut aussi naître « de tout acte ou fait auquel la loi attache d’autorité les effets d’une obligation », formule qui fait référence d’une part à des agissements illégitimes dont les conséquences n’ont pas été voulues, mais qui occasionnent des conséquences juridiques (les obligations extracontractuelles) ou encore à un acte posé légitimement qui entraîne les effets d’une obligation (les autres sources d’obligation). Chacune de ces sources repose sur une série de fondements. © Université Laval 2020 10 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 2.1 Le contrat Le contrat comme source d’obligation consiste en un acte volontairement consenti; les parties ont voulu les conséquences juridiques rattachées au contrat auquel elles sont parties. 2.2 Les obligations légales Il existe des situations où la loi crée une obligation (ou un devoir) pour une personne déterminée indépendamment de la volonté des personnes impliquées (par exemple, l'obligation de subvenir aux besoins de ses enfants, art. 599 CCQ). 2.3 Les obligations extracontractuelles À ces agissements légitimes susceptibles de créer un lien de droit entre deux personnes, le Code civil prévoit qu’un fait illégitime peut également être source d’obligation. Ce sera le cas lorsque quelqu'un cause un préjudice à une autre personne en raison de sa conduite négligente : les règles de la responsabilité civile l'obligeront à réparer le tort qu'il a causé. La question de l’étudiant Pouvez-vous clarifier la raison pour laquelle porter assistance est mis dans l'extracontractuelle? Pourquoi cela ne fait pas partie d'une obligation légale? Je croyais que nous étions obligés de porter assistance à quelqu'un. L'obligation de porter secours est une obligation légale prévue dans la Charte des droits et libertés de la personne: Tout être humain dont la vie est en péril a droit au secours. Toute personne doit porter secours à celui dont la vie est en péril, personnellement ou en obtenant du secours, en lui apportant l’aide physique nécessaire et immédiate, à moins d’un risque pour elle ou pour les tiers ou d’un autre motif raisonnable. Il s'agit effectivement d'une obligation légale. © Université Laval 2020 11 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 Pour les autres situations (lorsque les biens sont à risque de dépérir), il n'y a aucune obligation de prêter assistance. Se porter volontaire et engager des dépenses pour éviter l'inondation de la propriété de son voisin n'est pas une obligation légale: il s'agit de Gestion d'affaires (nous y reviendrons en détail au Thème 6). Elle crée une obligation corrélative pour le propriétaire de rembourser les dépenses utiles encourues par le voisin. 2.4 Les autres sources d’obligations Il peut arriver que les agissements d’une personne obligent une autre personne même si cette dernière n’avait aucune intention de créer un lien de droit entre elles. Cette situation est visée par les institutions appelées la gestion d'affaires, la réception de l'indu et l'enrichissement injustifié. Par exemple, la personne qui voit au remplacement d’une vitre brisée lors d’une tempête chez son voisin, alors qu’il était parti en voyage, pourra obliger ce dernier à lui rembourser les frais raisonnables encourus : c’est ce qu’on appelle la gestion d’affaires. La question de l’étudiant Pour l'enrichissement injustifié pourriez-vous donner un exemple et une vulgarisation de la définition? Prenons l'exemple d'un couple dont l'épouse est dentiste à son compte et dont l'époux s'occupe de la résidence, des enfants et de la comptabilité de l'entreprise, sans salaire. À leur séparation, un juge pourrait déterminer que l'épouse s'est enrichie aux dépens de son époux, appauvri. Cet enrichissement crée une obligation pour l'épouse de compenser financièrement l'appauvrissement de l'époux, même sans contrat. C'est une "autre source" d'obligation. Nous y reviendrons plus en détail au thème 6 - Les autres sources d’obligations. © Université Laval 2020 12 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 La question de l’étudiant Pouvez-vous svp expliquer la réception de l’indu? Je reprends ici les Commentaires du ministre de la Justice à ce sujet. « Celui qui, non pas par erreur, mais bien volontairement, paie quelque chose qu'il sait ne pas devoir, simplement pour s'éviter un préjudice qu'il subirait autrement. Ce serait, par exemple, le cas d'une personne qui, menacée d'un procès, paierait sous protêt la somme réclamée en attendant la décision du tribunal; cette personne éviterait alors qu'on puisse considérer son paiement comme une reconnaissance tacite ou expresse de l'existence de la dette. Une telle extension fait écho à la doctrine et à la jurisprudence qui reconnaissent qu'une telle situation, dans la mesure où elle s'accompagne de protestations de la part de celui qui paie, appelle l'application des règles sur la réception de l'indu, bien qu'il n'y ait pas eu d'erreur de la part du solvens (celui qui paie) » En vous appuyant sur des dispositions pertinentes du CCQ, répondez au questionnaire Q1.2. © Université Laval 2020 13 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 3 LE DROIT COMMUN DES CONTRATS Le droit commun des contrats est caractérisé, dans les systèmes de droit civil (Québec, France, etc.) par l'importance que l'on accorde à la volonté individuelle. On comprend mieux l'existence de tels principes juridiques si l'on considère qu'ils se sont beaucoup développés au XVIIIe siècle, en réaction à l'absolutisme des États monarchiques d'alors. En se fondant sur l'idée que tous les hommes sont égaux, on a voulu à tout prix promouvoir la liberté et la volonté individuelles et les codes rédigés au XIXe siècle ont naturellement suivi ce courant. Ces codes étant encore en vigueur de nos jours (en France) ou ayant fortement inspiré les rédacteurs du nouveau Code (au Québec), il s'ensuit que la conception individualiste du droit des contrats entraîne dans notre système des conséquences très importantes : principe du consensualisme, liberté contractuelle quant à la forme et au contenu du contrat. Sur un plan philosophique et ensuite juridique, la théorie de l’autonomie de la volonté sert de cadre théorique à toute cette organisation. On peut encore dire de nos jours que la liberté contractuelle est le principe qui régit le droit des contrats. Mais il ne faut pas oublier que les restrictions que le législateur apporte à cette liberté sont de plus en plus nombreuses et variées. Pour ne donner qu'un exemple de cette évolution, signalons que la plupart des contrats conclus entre un consommateur et un commerçant sont couverts par la Loi sur la protection du consommateur (LPC), qui leur laisse beaucoup moins de liberté sur le contenu et les conditions de formation de cet accord. Évidemment, la primauté de la volonté n'a jamais été absolue. La notion d’ordre public a de tout temps existé pour venir tempérer l’absolutisme du principe de la liberté contractuelle : la loi et les tribunaux peuvent intervenir lorsque le contrat ou l’une de ses clauses dépasse les normes jugées socialement acceptables. Ce qui est nouveau depuis un demi-siècle, c’est la compréhension de plus en plus large de cette notion d’ordre public. Cela tient en partie aux modifications importantes qu'ont connues les structures économiques et sociales du Québec, mais également à l'émergence de l'« État providence », soucieux d'éviter les abus résultant de rapports de forces inégaux. Une comparaison des dispositions du Code civil du Québec et de la Loi sur la protection du consommateur illustre bien cette évolution. Nous reviendrons sur cette notion d’ordre public lors de l’étude de l’objet et de la cause du contrat. © Université Laval 2020 14 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 Sens de l’expression « droit commun » On doit d'abord se demander ce que signifie l'expression « droit commun ». Il s'agit de la règle générale applicable à moins qu'une disposition particulière ne la complète ou n’y apporte une dérogation, tel que l’indique le second alinéa de la Disposition préliminaire du Code civil du Québec. Par exemple, la règle générale prévoit qu’un contrat est régi par les articles 1377 et suivants du CCQ. Cependant, s’il s’agit d'un contrat conclu entre un consommateur et un commerçant, les dispositions particulières de la Loi sur la protection du consommateur (LPC) seront applicables et, si elles entrent en contradiction avec celles du droit commun (du CCQ), elles auront préséance. Ainsi, l’existence d’une loi particulière (droit statutaire) ne signifie pas nécessairement que le droit commun est totalement écarté. Les règles de droit commun du CCQ viennent compléter les règles particulières de la LPC; le contrat est donc soumis à l’ensemble de ces règles. Toutefois, en cas de divergence entre les dispositions du Code civil et celles prévues dans la LPC, ces dernières l’emporteront. La question de l’étudiant Il est écrit à l'article 1e de la Loi sur la protection du consommateur : ''une personne physique, sauf un commerçant qui se procure un bien ou un service pour les fins de son commerce''. Alors si je comprends bien, un commerçant qui achète pour son entreprise n'est pas considéré comme un consommateur? Bien vu. L'intention derrière la LPC est de protéger le "petit" consommateur contre les abus potentiels des "grands" commerçants. Le commerçant ne peut donc pas être un consommateur, si ses achats sont pour son entreprise. © Université Laval 2020 15 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 Droit commun des contrats et contrats nommés Tel que vous avez pu le constater, le Livre V (Des obligations) est subdivisé en deux titres. Le premier contient les règles générales applicables aux obligations et le deuxième prévoit des règles particulières applicables à certains contrats déterminés. Ainsi, à l'intérieur du Code civil lui-même, le jeu de la règle générale et de la règle particulière s'applique : 1377. Les règles générales du présent chapitre s'appliquent à tout contrat, quelle qu'en soit la nature. Des règles particulières à certains contrats, qui complètent ces règles générales ou y dérogent, sont établies au titre deuxième du présent livre. Ainsi, un contrat de vente (contrat nommé) est régi par les dispositions générales du Code, qui sont complétées par les règles particulières des articles 1708 et suivants du CCQ. © Université Laval 2020 16 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 *** Repérez la Lois sur la protection du consommateur dans votre ouvrage Code civil du Québec, Éditions Yvon Blais *** Des dispositions particulières : L’application de la Loi sur la protection du consommateur (LPC) Alors que les dispositions générales du Code civil s’appliquent a priori à n’importe quel type de contrat, la personne qui veut se prévaloir des dispositions de la LPC doit être dans une situation qui entre dans son champ d’application. La lecture des articles 1 à 6 LPC, en insistant particulièrement sur les définitions de « bien » et de « consommateur » ainsi que sur les articles 2, 5 et 6, est nécessaire pour bien cerner le domaine d’application de cette loi. On notera que le terme « commerçant » n'est pas défini dans la loi. La doctrine mentionne deux éléments qui permettent principalement de définir une personne (physique ou morale) comme un commerçant : l'exercice d'une activité dans un but de profit et d'une manière habituelle. Cette lecture pourra être complétée par celle de l’article 1384 CCQ, qui définit le contrat de consommation dans le cadre d’application du Code civil. De façon surprenante, le contrat de consommation est régi par deux corpus de règles différentes : celles de la LPC et celles des articles 1432, 1435, 1436 et 1437 CCQ. FAITES L’EXERCICE SYNTHÈSE 1 © Université Laval 2020 17 DRT-1700 Droit des obligations Thème 1 4 Synthèse a) Schéma 1 — L’obligation civile : définition Contrainte Entre 2 juridique Lien de droit Consistant en personnes ou contrat une prestation Recours aux plus tribunaux fait juridique Faire débiteur Forcer exécution ne pas faire créancier Dommages- intérêts b) Schéma 2 – Les fondements des obligations Obligations Obligations Autres sources contractuelles extracontractuelles d'obligations Respect de la parole donnée Devoir de ne pas nuire à autrui Autonomie de la volonté Réparation du Restitution de préjudice causé à l'enrichissement Recherche de autrui injustifié l'intention des parties Responsabilité des biens ou personnes Échanges économiques sous notre contrôle © Université Laval 2020 18

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