DFGSP2 Biochimie - Référentiel 1 (14 janvier 2025) PDF
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This document provides an introduction to cellular energetic metabolisms, focusing on catabolic and anabolic processes. It covers the extraction of energy and reducing power from the environment, synthesis of macromolecules, and the organization of metabolic pathways. The role of key molecules like ATP and NAD(P)H and their interconnectivity are discussed.
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DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Introduction sur les métabolismes énergétiques cellulaires La biochimie, ou chimie biologique, est une science expérimentale qui vise l'étude des processus chimiques à l...
DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Introduction sur les métabolismes énergétiques cellulaires La biochimie, ou chimie biologique, est une science expérimentale qui vise l'étude des processus chimiques à la base de la vie. Elle a pour but d'étudier et de comprendre les fonctions biologiques et les propriétés chimiques et physiques des substances qui forment les organismes vivants et interagissent avec eux. Dans le domaine de la santé, elle s’intéresse aux métabolismes des cellules/tissus/organes et organismes eucaryotes, et principalement au niveau humain et dans un contexte physiologique et pathologique. Le métabolisme énergétique représente une grande partie des métabolismes cellulaires. Il a pour finalité la vie cellulaire, faite de synthèses (anabolismes) de molécules endogènes et de dégradations (catabolismes) de molécules exogènes, qui apportent donc leur énergie intrinsèque, ou endogènes, pour transformer et sans perdre (ou le moins possible) le potentiel chimique ou énergétique des molécules (principe de biotransformation). Pour atteindre ses objectifs, la biochimie doit répondre à des questions fondamentales, parmi lesquelles : - Comment la cellule extrait-elle l’énergie et le pouvoir réducteur de son environnement ? - Comment la cellule construit-elle les macromolécules dont elle a besoin ? - Comment la cellule organise-t-elle ses synthèses et catabolismes ? - Quels sont les régulateurs, les « chefs d’orchestre » des métabolismes intracellulaires, mais aussi des organes et de l’organisme entier. Une organisation métabolique très complexe s’est mise en place au cours de l’évolution, qui pourtant possède des éléments de simplification, faisant de l’ensemble du métabolisme un système plutôt efficace et avec peu de déperdition énergétique ou métabolique. Le métabolisme a une architecture cohérente, faisant appel à un nombre limité d’intervenants : - Il existe de nombreux motifs communs aux molécules essentielles. Par exemple, l’ATP, molécule énergétique sans potentiel redox a une structure extrêmement proche de celle du NAD(P)H,H+, molécule à potentiel redox majeur mais sans énergie intrinsèque directement utilisable. - Environ 100 molécules, mais pas plus, ont un rôle central dans toutes les formes de vie. - Les mécanismes réactionnels chimiques, catalysés par des enzymes dans la grande majorité des cas, sont simples et répétitifs (Tableau 1) : décarboxylation, hydratation, phosphorylation… : Tableau 1. Types de réactions biochimiques et leurs caractéristiques - Les mécanismes régulateurs des voies métaboliques sont peu nombreux et répétés pour l’ensemble des voies métaboliques : allostérie, régulation covalente, compartimentation subcellulaire…, 1 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 - Il existe des carrefours métaboliques majeurs, pouvant faire passer d’une voie métabolique intéressant un type de molécules (les glucides, par exemple) à un autre type (les lipides, par exemple et assurant donc, les liaisons entre les différents catabolismes et les différents anabolismes, comme peuvent le faire les échangeurs d’autoroutes pour le réseau routier. De ce fait, lorsqu’on s’intéresse au métabolisme énergétique cellulaire, on peut constater qu’il existe un nombre limité d’acteurs des transferts énergétiques intermoléculaires (Cf. Tableau 2 ci-dessous), qui diffèrent soit par leur structure chimique (adaptée à un type de métabolisme et pas à un autre) soit par la valeur de la charge énergétique transférée, assurant ainsi une optimisation de l’échange (et donc une limitation de la déperdition énergétique liée au transfert). Tableau 2. Molécules transporteurs, groupes transportés et leurs précurseurs vitaminiques Quant à l’ensemble des métabolismes cellulaires, ils peuvent être catégorisés de plusieurs façons : - La finalité énergétique ou non énergétique : les métabolismes énergétiques (des molécules dont la dégradation fournit de l’énergie et dont la synthèse emmagasine de l’énergie) et les métabolismes non énergétiques (de molécules à propriétés structurales ou fonctionnelles, par exemple le cholestérol ou les nucléotides). La frontière entre ces deux catégories est assez floue, puisque des métabolismes non énergétiques restent consommateurs d’énergie ou peuvent fournir un peu d’énergie, même si celle-ci n’est pas suffisante pour assurer l’exécution d’une voie de synthèse. - La finalité dégradative ou biosynthétique : les catabolismes (qui dégradent des molécules pour en extraire l’énergie) et les anabolismes (qui transforment des éléments unitaires du métabolisme intermédiaire en molécules à des fins de mise en réserve énergétique, de structuration cellulaire ou d’exécution de fonctions cellulaires). La frontière entre ces deux catégories est assez floue, puisque des voies cataboliques assurent la formation de molécules plus petites, par exemple le pyruvate à partir de glucose. Il y a par ailleurs une très forte imbrication des voies métaboliques les unes par rapport aux autres, avec des interconnexions au niveau des carrefours (Cf. supra), faisant du métabolisme cellulaire global un pseudo- enchevêtrement de réactions métaboliques successives pouvant – presque – emprunter toutes les voies pour aller d’une molécule à une autre (Figure 1) : 2 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Figure 1. Carte globale avec une vue de l'ensemble des voies métaboliques. Ce schéma représente les principales voies métaboliques interconnectées, incluant le métabolisme des glucides, lipides, acides aminés, nucléotides, vitamines et autres substances. Les différentes couleurs correspondent aux types de métabolisme spécifiques. En fait, il n’en est rien car, même si cette possibilité théorique existe, la régulation des flux (quantité, vitesse) des réactions et voies métaboliques par les différents moyens de régulation (présence de substrat et/ou de produit, compartimentation des métaboliques, régulations allostérique et covalente…) assure une homogénéité de fonctionnement pour dégrader/produire la bonne molécule au bon moment pour le bon usage. Ainsi, l’organisation générale des métabolismes consiste à assurer la dégradation de molécules d’origine exogène ou préalablement mises en réserve (catabolismes) pour fournir à la cellule l’énergie nécessaire et les éléments moléculaires unitaires (acétylCoA principalement) pour permettre les biosynthèses de molécules indispensables à la vie et les fonctions de la cellule (anabolismes). Les deux schémas suivants 3 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 illustrent, avec des prismes et des zooms différents, cette séquence de voies cataboliques puis anaboliques, en positionnant entre les deux le métabolisme intermédiaire mitochondrial, véritable plaque tournante énergétique (ATP), redox (NAD+/NADH,H+, FAD/FADH2, NADP+/NADPH,H+), métabolique (pyruvate, acétylCoA…) alimentée par les catabolismes et alimentant les anabolismes (Figure 2 et 3): Figure 2. Relation entre anabolisme, catabolisme et flux d'énergie. Ce schéma illustre les interactions entre l'anabolisme et le catabolisme. L'anabolisme utilise des composés simples pour former des macromolécules cellulaires, tandis que le catabolisme dégrade les aliments en composés simples en libérant de l'énergie, essentielle pour les mouvements, les contractions musculaires et les transports actifs. Les déchets métaboliques sont éliminés sous forme de CO₂, H₂O et NH₃. Figure 3. Schéma du métabolisme énergétique : voies et produits. Ce schéma montre les étapes principales du métabolisme énergétique. Les aliments (protéines, glucides, lipides) sont dégradés en composés simples (acides aminés, glucose, acides gras, glycérol), entrant dans des voies métaboliques comme la glycolyse, le cycle de KREBS et la chaîne respiratoire mitochondriale (CRM). L'énergie produite sous forme d'ATP et du pouvoir réducteur (NADH,H+, FADH2), sont utilisée pour les processus cellulaires, tandis que les déchets (CO₂, H₂O, NH₃) sont éliminés. Ces vues générales du métabolisme énergétique cellulaire expliquent notamment pourquoi : - L’alimentation est indispensable à aux êtres vivants pour assurer leur vie cellulaire et donc la survie de l’organisme entier. 4 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 -Les mises en réserve de l’organisme, de glucose sous forme de glycogène ou d’acides gras sous forme de triglycérides, permettent une certaine autonomie de fonctionnement complémentaire des apports exogènes. - L’oxygène est indispensable à la vie car le métabolisme énergétique exige d’être en aérobiose. - La respiration est indispensable, outre pour apporter l’oxygène aux cellules, et pour éliminer le dioxyde de carbone CO2 formé par les catabolismes. - Certaines molécules sont indispensables à la vie cellulaire : il s’agit des molécules ne pouvant pas être synthétisées par les métabolismes cellulaires, par exemple les vitamines ou les acides aminés essentiels (mais aussi les oligo-éléments indispensables au fonctionnement de certaines enzymes), rendant l’organisme dépendant des apports extérieurs pour son fonctionnement. ATTENTION : les rubriques suivantes sont en cours de construction. Une version définitive vous sera transmise ultérieurement. Pré-requis indispensables à l’enseignement Structure et organisation de la cellule et ses organites Structure de la membrane cytoplasmique et sa dynamique fluidique Structure des macromolécules et leurs composants : - protéines, peptides, acides aminés - glucides simples et polymères - lipides : triglycérides et acides gras, cholestérol et dérivés, phospholipides (incluant la nomenclature de classification au sein de ces familles) Physiologie cellulaire, tissulaire et d’organismes (eucaryotes, humain) Formules chimiques développées indispensables à connaître Acétoacétate Acétone AcétylCoA Acide urique Alanine Aspartate ATP (structure semi-développpée) Bêta-hydroxybutyrate Cholestérol Citrate Dihydroxyacétone-phosphate (DHAP) Fructose Fumarate Galactose Glucose Glutamate Glycéraldéhyde 3-phosphate (G3P) Lactate NAD(P) (structure semi-développpée) Oxaloacétate (OA) Pyruvate Ribose Taurine Urée 5 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 1. Le cœur du métabolisme énergétique : la dégradation mitochondriale de l’acétylCoA Plan 1. Le cycle des acides tricarboxyliques 2. La chaîne respiratoire mitochondriale (CRM) 3. Le métabolisme des corps cétoniques 3.1. La cétogenèse 3.2. La cétolyse L’acétylCoA (CH3-CO-S~CoA) est le cœur du moteur énergétique moléculaire de la cellule. Ce métabolite peut servir de « brique » élémentaire pour la synthèse de biomolécules endogènes nécessaires à la vie cellulaire (lorsqu’elles ne sont pas apportées par l’alimentation). Il peut également alimenter le métabolisme intermédiaire mitochondrial pour, in fine, aboutir à la production d’ATP. L’ATP constitue la monnaie d’échange énergétique universelle des métabolismes. La dégradation oxydative de l’acétylCoA débute par le voie métabolique cyclique des acides tricarboxyliques (cycle de Krebs ou cycle du citrate) qui fournit à la cellule des équivalents réduits de type NADH,H+ (nicotinamide adénine dinucléotide réduit) et FADH2 (flavine adénine dinucléotide réduit) : ces derniers serviront de substrats pour alimenter la chaîne respiratoire mitochondriale (CRM), qui convertit ce potentiel réducteur en ATP au niveau de la chaine respiratoire mitochondriale. 1. Le cycle des acides tricarboxyliques Le cycle des acides tricarboxyliques comporte huit étapes successives, débutant par la condensation d’une molécule d’oxaloacétate, intermédiaire de la voie cyclique, et d’une molécule d’acétylCoA, qui entre ainsi dans le cycle. La réaction de condensation produit une molécule à quatre carbone, le citrate (qui est la forme ionisée de l’acide citrique à l’état physiologique). Le citrate va subir deux réactions de décarboxylation et quatre réactions d’oxydation, dont l'une est couplée à la formation de GTP (guanosine triphosphate) à partir de GDP (guanosine diphosphate), permettant ainsi une restitution d’énergie (Figure 4). 6 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Figure 4. Le cycle des acides tricarboxyliques ou cycle de Krebs. Sont figurés l’entrée et les sorties, les métabolites intermédiaires ainsi que les types de réactions. Ce cycle présente plusieurs caractéristiques intéressantes : - La molécule initiale d’oxaloacétate, qui est condensé avec un AcétylCoA entrant dans le cycle, est restituée en fin de voie métabolique. il s’agit donc d’un véritable cycle métabolique. Toutefois, l’oxaloacétate peut également servir comme substrat d’une autre voie métabolique, la néoglucogenèse (c’est-à-dire la synthèse de novo du glucose) ; - La dégradation de l’acétylCoA, en tant qu’unité à deux carbones, est totale puisqu’elle aboutit à la production de deux molécules de CO2 au cours du cycle ; - Le maximum de potentiel réducteur de l’acétylCoA est récupéré sous forme d’équivalents réduits NADH,H+ et FADH2. Ces équivalent réduits, produits dans la mitochondrie où se déroule le cycle de Krebs, sont générés à proximité immédiate de leur site d’utilisation ultérieure : la chaîne respiratoire ; - Au cours du cycle, une liaison riche en énergie est récupérée et greffée sur une molécule de GDP conduisant à la formation du GTP (dont le pouvoir énergétique est équivalent à celui de l’ATP) ; - L’ensemble des réactions du cycle est catalysé par des enzymes spécifiques, parmi lesquelles l’- cétoglutarate déshydrogénases se distingue par sa structure. Il s’agit d’un complexe multienzymatiques, similaire à la pyruvate déshydrogénase (PDH), composé de trois activités enzymatiques (E’1, E’2 et E’3), et nécessitant l’intervention de cinq coenzymes. Parmi celle-ci, trois sont liés au complexe : le TPP (pyrophosphate de thiamine), l’acide lipoïque et le FAD+, tandis que deux sont libres dans le cytosol : le NAD+ et le coenzyme A libre (CoA-SH) ; - Parmi les intermédiaires formés au cours du cycle de Krebs figure le fumarate, molécule particulière, également produite au décours d’un autre cycle métabolique, le cycle de l’uréogenèse. Ce lien métabolique connecte les deux cycles par des intermédiaires communs mais avec des finalités métaboliques distinctes. Le fumarate et l’oxaloacétate, en tant que molécules communes, assure cette interconnexion. Le fumarate peut alimenter le cycle de l’urée lorsqu’il est généré par le cycle de Krebs, et inversement, l'oxaloacétate peut être converti en aspartate (via une transamination) pour participer au cycle de l’urée. Ces interconnexions mettent en évidence la complémentarité métabolique entre les deux cycles, appelés la « bicyclette de Krebs » ou les deux roues (Krebs et uréogenèse) sont reliées par une chaîne commune constituée deux intermédiaires (fumarate et oxaloacétate) (Cf. voie de l’uréogenèse). 7 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Le bilan énergétique du cycle de Krebs est au total de : 1 GTP, 3 NADH,H+ et 1 FADH2 pour la réalisation complète d’un cycle, c’est-à-dire pour l’oxydation totale d’un acétylCoA. L’utilisation immédiate des équivalents réduits dans la chaîne respiratoire mitochondriale permet, selon les données expérimentales, de produire environ 2,5 ATP par molécule de NADH,H+ et environ 1,5 ATP par molécule de FADH2. En incluant le GTP formé au cours de cycle, un total de 10 ATP sont générés par molécule d’acétylCoA entrant dans le cycle de Krebs. Comme la grande majorité des voies métaboliques, le cycle des acides tricarboxyliques est soumis à une régulation précise du flux métabolique qu’il génère. La vitesse d’oxydation de l’acétylCoA dans le cycle dépend de : La concentration en acétylCoA dans la mitochondrie issue de la dégradation de molécules énergétiques endogènes ou exogènes (glucose, acides gras, acides aminés), jouant un rôle clé dans la régulation de cycle (régulation positive par disponibilité du substrat) ; La concentration d’équivalents réduits présents dans la matrice mitochondriale, tels que le NADH,H⁺ et l’ATP (produit final de la chaîne respiratoire), exercent une régulation négative sur le cycle en cas d’accumulation excessive, freinant ainsi le flux métabolique ; L’accumulation de produits intermédiaires du cycle qui peut influencer l'équilibre des réactions (Keq) et le flux métabolique global ; L’état d’oxygénation de la cellule est crucial : il doit être suffisant pour le fonctionnement de la chaîne respiratoire mitochondriale, en termes de synthèse d’ATP et d’utilisation des équivalents réduits formés lors des processus dégradatifs ; Régulateurs allostériques, énergétiques et métaboliques, agissant exclusivement sur les trois premières réactions du cycle, par des : - activateurs allostériques : ADP et acétylCoA, qui activent le cycle, - inhibiteurs allostériques : NADH,H+, citrate, succinylCoA, qui freinent le cycle. 2. La chaîne respiratoire mitochondriale (CRM) 2.1. Principes généraux La chaîne respiratoire est un ensemble physique et fonctionnel localisé au niveau de la membrane interne des mitochondries, dans laquelle sont enchâssés les transporteurs d’électrons constitutifs de la chaîne. La chaîne respiratoire permet la production d’ATP et de l’eau grâce à l’oxydation d’équivalents réduits et d’oxygène, selon un processus couplé impliquant deux voies distinctes qui ont leur propre fonction : - La chaîne d’oxydoréduction, qui assure le transfert des hydrogènes (H+ et e-) issus des coenzymes réduits, constitue le cœur du processus de la respiration cellulaire ; - La phosphorylation de l’ADP en ATP, réalisée grâce à l’énergie mécanique générée par les déplacements des protons de part et d’autre de la membrane interne mitochondriale lors des réactions successives d’oxydoréduction (la chaîne d’oxydoréduction). La chaîne respiratoire est le moteur dans la phosphorylation oxydative (PHOSOX), son objectif ultime étant la phosphorylation de l’ADP en ATP. Toutefois, ce processus repose sur une oxydation phosphorylante, puisque c’est l’oxydation des équivalents réduits au sein dans la chaîne d’oxydoréduction qui permet la phosphorylation de l’ADP en ATP. Les atomes d’hydrogène nécessaires proviennent des équivalents réduits (NADH,H+ et FADH2) formés dans le cycle des acides tricarboxyliques. L’oxygène moléculaire (O2) indispensable à cette réaction, est acheminé vers les tissus par la respiration pulmonaire et distribué à l’ensemble des tissus et aux cellules via la circulation sanguine. Les coenzymes réduits sont majoritairement formés dans la matrice mitochondriale. Ceux provenant du cytosol doivent franchir la membrane interne mitochondriale avant leur entrée dans la chaîne respiratoire. Cette membrane étant imperméable aux équivalents réduits, le transfert 8 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 des atomes d’hydrogène, constituant le potentiel réducteur, repose sur un système des navettes spécifiques. A cet effet, deux mécanismes principaux assurent ce transfert : la navette malate-aspartate et la navette glycérophosphate (Cf. détaillées dans le chapitre 2). 2.2. Description de la chaîne respiratoire mitochondriale - Principes généraux Dans la chaîne respiratoire mitochondriale (CRM), l’utilisation des équivalents réduits est réalisée après la dissociation des protons (H+) et des électrons (e-). Ces deux éléments suivent des voies distinctes : les protons participent au gradient électrochimique, tandis que les électrons traversent les complexes enzymatiques, (un processus précédemment appelé chaînes d’oxydoréduction et de phosphorylation, en raison de leur fonctionnalité). Ces voies finissent par converger pour aboutir à la formation de molécules d’eau. La chaîne respiratoire est constituée de différentes unités fonctionnelles, appelées complexes (complexes I à IV, et l’ATP synthase constituant le complexe V), dont les caractéristiques structurales sont décrites succinctement dans le schéma suivant (Figure 5). Figure 5. Organisation fonctionnelle des complexes de la chaîne respiratoire mitochondriale. Schéma illustrant les complexes enzymatiques (I à IV), leurs composants structuraux majeurs, ainsi que les transferts de protons, d'électrons et la formation d'eau. - Principes de fonctionnement Le NADH,H+ entre dans la chaîne respiratoire au niveau du complexe I, tandis que le FADH2 au niveau de l’ubiquinone, qui se situe après le complexe I sur le plan structurel et fonctionnel. Cette différence est cruciale, car cela explique le rendement énergétique inférieur du FADH2. En effet, cette entrée « plus tardive » dans la chaîne shunte un premier transfert de proton à l’ATP synthase, sur les trois que va subir chaque électron libéré par équivalent réduit. Le schéma fonctionnel suivant illustre les trajectoires empruntées par les électrons (en pointillés) et celle empruntée par les protons au sein de la chaîne. Le positionnement « stratégique » des complexes au niveau de la membrane interne mitochondriale joue un rôle clé dans la destinée des électrons et surtout dans le mouvement des protons. Ces derniers, propulsés 9 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 par un gradient électrochimique favorable, et qui se régénère continuellement, migrent vers l’espace intermembranaire avant de revenir dans la matrice via le complexe V, l’ATP synthase, également positionnée dans la membrane interne (Figure 6). Figure 6. Trajets des électrons et des protons dans la chaîne respiratoire mitochondriale. Schéma montrant la séquence des complexes de la chaîne respiratoire (I à IV), l’ubiquinone (Q), le cytochrome c (C) et l’ATP synthase (V). Les trajectoires des électrons (lignes rouges) et des protons (flèches noires) à travers la membrane interne des mitochondries illustrent les étapes clés de la phosphorylation oxydative et la production d’ATP. Les électrons à haute énergie libérés par les équivalents réduits sont transportés successivement à travers les différents complexes de la chaîne (du complexe I ou II jusqu’au complexe IV, selon l’équivalent réduit impliqué). Ce transfert suit un itinéraire précis, allant du complexe I jusqu'à l'oxygène moléculaire, en passant par la coenzyme Q, le complexe III, le cytochrome c et enfin le complexe IV. L'oxygène moléculaire, 10 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 qui agit comme accepteur final des électrons, sera alors réduit pour former de l’eau (H2O) selon la réaction suivante : ½ O2 + 2 H+ + 2 e- H2O A chaque étape au niveau des complexes, une partie de l’énergie des électrons est dissipée, permettant de générer un gradient électrochimique de proton entre la matrice mitochondriale et l’espace intermembranaire. Ce système de transporteurs fonctionne comme une cascade de réactions d'oxydoréduction, guidant les électrons jusqu'à l'accepteur final, l'oxygène moléculaire. Au cours de ce transfert d’électrons, des protons sont expulsés de la matrice mitochondriale vers l'espace intermembranaire au niveau des complexes I, III et IV. Ce processus génère un gradient électrochimique de protons (H+), de part et d'autre de la membrane interne, qui emmagasine l'énergie d'oxydation. Ce gradient est constitué de deux composantes : d'un gradient de pH (où la matrice devient plus basique) et d'un gradient de charges (la face matricielle de la membrane interne est chargée négativement). Les protons reviennent dans la matrice via des passages spécifiques constitués par l'ATP synthase, où leur flux alimente la synthèse d’ATP. - L’ATP synthase L’ATP synthase fonctionne comme une pompe ionique inversée, qui au lieu de transporter les protons à contre-gradient de concentration, exploite leur passage dans le sens du gradient électrochimique pour catalyser la synthèse d’ATP. Cette enzyme est constituée de plusieurs sous-unités : une sous-unité F0 insérée dans la membranaire interne, qui agit comme canal protonique ; une sous-unité F1 baignant dans la matrice mitochondriale assure l’activité catalytique de l’ATP synthase ; et une structure statique stabilisant l’ensemble. De cette manière, le gradient de protons formé à travers la membrane interne mitochondriale alimente directement la synthèse d’ATP, qui sera ensuite libéré dans la matrice mitochondriale (Figure 7). Figure 7. Mécanisme de rotation et transport des protons dans l’ATP synthase. Schéma illustrant la structure des sous-unités de l’ATP synthase et le transport des protons à travers la sous-unité F0, entraînant la rotation de l’enzyme et la conversion de l’énergie du gradient protonique en énergie mécanique nécessaire à la synthèse d’ATP. 11 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 - Théorie chimio-osmotique de Mitchell La théorie chimio-osmotique de Mitchell apporte une explication mécanistique au fonctionnement de la chaîne respiratoire, en rapport avec la description précédente : le transfert d'électrons et la synthèse d'ATP sont couplés grâce à un gradient de protons établit à travers la membrane interne mitochondriale. Ce gradient résulte du pompage de protons de la matrice vers l'espace intermembranaire, effectué par les complexes I, III et IV lors de transfert des électrons dans la chaîne respiratoire mitochondriale. Cette activité de pompage des protons crée une différence significative de concentration des protons (H+), générant un gradient de concentration des protons. Ce gradient se manifeste par une différence de pH entre l'espace intermembranaire (plus acide) et la matrice (plus basique). A l’inverse, le complexe V (ATP synthase) permet le retour des protons vers la matrice et convertie l'énergie libérée par ce flux en énergie chimique, utilisée pour phosphoryler l'ADP en ATP. - Bilan énergétique de la chaine respiratoire mitochondriale La circulation des électrons entre les couples NADH,H+/NAD+ et FADH2/FAD, d’une part, et le couple ½ O2/O2- d’autre part, entraîne une variation de potentiel ΔE°’ qui se traduit par une variation d’énergie libre ΔG°’. Cette énergie constitue la source principale de la synthèse d’ATP en conditions aérobies. Les énergies libres issues de l’oxydation de ces composés réduits et utilisée par à la cellule pour la synthèse d’ATP via de le processus de la phosphorylation oxydative, selon les estimations théoriques suivantes : Oxydation d’un NADH,H+ : environs 3 ATP Oxydation d’un FADH2 : environs 2 ATP Cependant, il s’agit des valeurs approchées théoriques, car les valeurs expérimentales, plus précises, indiquent qu’un NADH,H+ produit en réalité 2,5 ATP et un FADH2 produit 1,5 ATP, respectivement (NB-valeurs à retenir). - Régulation de la CRM Le contrôle de la CRM dépend de la disponibilité en ADP. A l’état basal, la charge énergétique cellulaire favorise largement l’ATP. Cependant, une augmentation de la concentration d’ADP entraîne une activation rapide et marquée de la chaîne respiratoire. Pour cela, l’ADP, produit par déphosphorylation de l’ATP cytosolique, doit rejoindre la matrice mitochondriale, tout comme le phosphate inorganique (Pi). Ce transport est assuré par deux translocases spécifiques localisés dans la membrane interne mitochondriale : - L’ATP translocase ou ANT (adenine nucleotide translocator) : qui fonctionne comme un antiport, échangeant un ADP entrant dans la mitochondrie contre un ATP sortant vers le cytosol ; - La phosphate tranlocase : qui agit en symport, permettant l’entrée simultanée d’un Pi et d’un proton dans la matrice mitochondriale (Figure 8). Figure 8. Transport des nucléotides et phosphates à travers la membrane interne mitochondriale. Schéma montrant les mécanismes d’échange antiport ADP/ATP via l’ATP translocase et le transport symport Pi/H⁺ par la phosphate translocase, assurant l’approvisionnement en substrats nécessaires à la phosphorylation oxydative. 12 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 2.3 Anomalies de fonctionnement de la chaîne respiratoire mitochondriale - Molécules inhibitrices de la chaîne respiratoire Différentes molécules – qu’elles soient pharmacologiques, toxiques ou chimiques et utilisées en laboratoire à des fins expérimentales – peuvent perturber la CRM à plusieurs niveaux : - En amont de la chaîne respiratoire : en diminuant l’apport en oxygène au niveau cellulaire et mitochondrial ou en bloquant le cycle des acides tricarboxyliques ; - Au niveau-même de la chaîne respiratoire elle-même : par une action ciblée sur l’un des complexes enzymatiques. Le schéma suivant indique les différents agents bloquant les complexes de la CRM ou les translocases impliquées dans le transport des nucléotides et des protons (Figure 9). Figure 9. Inhibition des complexes et transporteurs de la chaîne respiratoire mitochondriale. Schéma représentant les sites d’action des inhibiteurs spécifiques de la chaîne, tels que la roténone, l’amytal, l’antimycine A, le cyanure (CN⁻), le monoxyde de carbone (CO), l’oligomycine et l’atractyloside, ciblant respectivement les complexes enzymatiques et les translocases. En bloquant un complexe de la chaîne respiratoire, ces agents empêchent à la fois la voie de transport des électrons et la voie des protons, empêchant ainsi la synthèse d’ATP. Cependant, certains agents agissent uniquement sur la formation d’ATP, tout en maintenant le transport des électrons actif, provoquant un découplage entre les deux voies. Les agents découplants : le CCCP (carbonyl cyanide m-chlorophenyl hydrazone), dinitrophénol, arséniate, hormones thyroïdiennes… permettent aux protons de retourner dans la matrice mitochondriale sans passer par l’ATP synthase. Cela empêche la synthèse d’ATP, entraînant une accélération de l’activité de la CRM et ainsi de la respiration cellulaire, pour tenter de compenser le déficit en ATP. NB 1 : l’oligomycine, un agent inhibiteur de l’ATP synthase (complexe V), n’est pas un agent découplant car elle bloque également le retour des protons vers la matrice mitochondriale. NB 2 : Le cyanure (CN⁻), un agent qui bloque le complexe IV (cytochrome c oxydase), empêchant le transfert des électrons vers l’oxygène. Cela arrête le transport des électrons, le pompage des protons et la synthèse d’ATP. - Anomalies génétiques Des anomalies génétiques peuvent entraîner un dysfonctionnement de la CRM. Ces maladies mitochondriales sont causées par des mutations de l’ADN mitochondrial ou de l’ADN génomique (nucléaire). Les premières manifestations cliniques de ces maladies sont généralement neurologiques, cardiaques ou 13 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 musculaires, en raison de la forte dépendance de ces tissus à la synthèse mitochondriale de l’ATP pour assurer leurs fonctions. Ces déficits sont nécessairement partiels, car une atteinte majeure ou totale serait incompatible avec la survie cellulaire et de l’organisme. 3. Le métabolisme des corps cétoniques Parmi les substrats énergétiques utilisables par une cellule figurent les corps cétoniques (acétoacétate, - hydroxybutyrate et acétone), produits directs du métabolisme intermédiaire. Le rôle des corps cétoniques est d’épargner le glucose, surtout lors de situations où les réserves en sucre sont insuffisantes : c’est ainsi qu’on note une forte augmentation physiologique au cours du jeûne ou de l’exercice musculaire prolongé, ou bien pathologique (diabète de type 1, ou 2 sévère). Rappel : les 4 substrats énergétiques pour la cellule Quatre types de molécules sont à valeur énergétique importante, avec des formes de mise en réserve et des caractéristiques métaboliques très différentes, donnant ainsi à la cellule une palette de possibilités en fonction de ses besoins : - Le glucose et les oses simples fournissant rapidement du glucose (fructose, galactose) : catabolisme assez simple, fait d’une dizaine de réactions pour intégrer le métabolisme intermédiaire ; valeur énergétique importante, avec la possibilité de fournir un peu d’énergie en anaérobiose ; mise en réserve sous forme de glycogène, seulement dans certains organes (foie, muscles) ; - Les acides aminés : catabolisme plus complexe, notamment par la nécessaire élimination du groupement aminé et par l’entrée dans le métabolisme intermédiaire spécifique pour chaque squelette carbonée de l’acide aminé, valeur énergétique modérée, chaque squelette carboné d’acide aminé fournissant un seul élément du métabolisme intermédiaire, mise en réserve sous forme de protéines à visée énergétique (muscles squelettiques), - Les acides gras : catabolisme lent, complexe et en aérobie stricte, valeur énergétique très importante mise en réserve sous forme de triglycérides principalement au niveau du tissu adipeux, - Les corps cétoniques : origine exclusivement endogène, synthèse et catabolisme très simple, donc apport énergétique très rapide et facile, valeur énergétique faible, pas de mise en réserve possible. Il s’agit de petites molécules à 3 ou 4 atomes de carbone : l’acétoacétate (à ne pas confondre avec l’oxaloacétate !) et sa forme réduite le 3-hydroxybutyrate, et l’acétone. Ces molécules ont deux caractéristiques métaboliques notables : - Leur synthèse, la cétogenèse, est aisée et rapide à partir de l’acétylCoA : elle a lieu exclusivement dans le foie (qui ne manque ni d’énergie, ni d’acétylCoA) et va donc synthétiser ces substrats 14 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 énergétiques pour les exporter (via la circulation sanguine) vers des tissus périphériques en attente d’énergie ; - Leur dégradation, la cétolyse, est rapide pour reformer l’acétylCoA au niveau des mitochondries tissus cibles extrahépatiques (myocarde, muscles squelettiques, cerveau, reins), en substitution ou en complément des autres substrats selon l’intensité de leur besoin énergétique. N.B.- Le foie, en revanche, ne peut pas les utiliser, car il manque l’enzyme clé nécessaire à leur dégradation (β- cétoacyl-CoA transférase), évitant ainsi un cycle futile dans lequel les corps cétoniques produits seraient immédiatement consommés, sans bénéfice pour l’organisme ; - Le métabolisme des corps cétoniques est localisé au niveau mitochondrial, c’est-à-dire au plus près de la présence du substrat de leur formation hépatique et de l’utilisation du produit de leur catabolisme extrahépatique (dans les deux cas, l’acétylCoA) ; - Leurs caractéristiques physicochimiques – petite taille et lipophilie (ainsi facilement diffusible) – leur permet de diffuser passivement à travers les barrières membranaires et subcellulaires : des hépatocytes pour rejoindre la circulation systémique après synthèse, et des cellules des tissus cibles pour leur dégradation mitochondriale. 3.1. La cétogenèse Le principe de synthèse des corps cétoniques est très simple et sa réalisation très rapide : - condensation de 2 molécules d’acétylCoA produit l’acétoacétylCoA ; - condendation de l’acétoacétylCoA avec une nouvelles molécule d’acétylCoA pour former le 3- hydroxyl 3-méthyl glutarylCoA (HMGCoA), sous l’action de l’hydroxyméthylglutaryl-coenzyme A synthase (HMGCoA synthase) ; - scission de la molécule (avec restitution d’un acétylCoA) pour former le premier des trois corps cétoniques : l’acétoacétate ; - formation des 2 autres corps cétoniques par réarrangement de l’acétoacétate : hydrogénation réversible pour former le 3-OH butyrate, décarboxylation irréversible car purement chimique (sans catalyse enzymatique, ce qui est rare en chimie biologique) pour former l’acétone. Les trois corps cétoniques passent librement de la mitochondrie dans le cytosol de la cellule hépatique, puis dans la circulation sanguine. Lors du passage sanguin dans les poumons, la volatilité importante de l’acétone lui permet de participer aux échanges gazeux pulmonaires et d’être éliminé dans l’air expiré, avec deux conséquences : - l’acétone ainsi éliminé n’est donc pas utilisé directement par l’organisme somme source énergétique ou comme intermédiaire métabolique. En conséquence, il y a une certaine « inefficacité » métabolique, par formation d’une molécule énergétique finalement non utilisée par l’organisme ; L’élimination pulmonaire de l’acétone confère à l’air expiré un odeur fruitée : cette haleine particulière est caractéristique des sujets en état de cétose, dont le métabolisme est orienté vers la production de corps cétoniques (par exemple, pendant un jeûne prolongé, un régime cétogène, ou une acidocétose diabétique). Cette situation est retrouvée particulièrement lorsque le métabolisme du glucose est défaillant et que la dégradation massive d’acides gras prend le relais, générant de grandes quantités d’acétylCoA au niveau hépatique. Ces acétylCoA sont alors orientés majoritairement vers la cétogenèse pour fournir une source d’énergie aux organes extrahépatiques. C’est la disponibilité en acétylCoA de façon très importante qui détermine, à elle seule, la mise en œuvre de la cétogenèse. En pratique, de grandes quantités d’acétylCoA sont produites par la cellule hépatique lorsqu’elle réalise une dégradation des acides gras. 15 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Diabète de type 1 et cétogenèse : Le sujet diabétique non équilibré, avec un excès de glucose dans le sang (hyperglycémie souvent majeure), le glucose ne pouvant pas pénétrer dans les cellules par défaut d’expression de transporteur. La cellule est donc en manque d’énergie et fait appel au foie, qui va dégrader des acides gras pour : - de façon très mineure, engager une néoglucogenèse en utilisant le glycérol libéré, - de façon majeure, engager une cétogenèse en utilisant l’actétylCoA libéré. Les sujets diabétiques de type 1 dont l’équilibre glycémique n’est pas assuré par un apport exogène d’insuline ont donc une hyperglycémie et une haleine à odeur d’acétone. Ces deux signes biologiques permettent de diagnostiquer un état diabétique, dont la forme la plus grave est le coma hyperglycémique. Le schéma suivant illustre la biosynthèse des corps cétoniques : 3.2. La cétolyse La cétolyse est exclusivement extrahépatique. Elle est très rapide car ne nécessite que deux réactions à partir de l’acétoacétate (lui-même pouvant être formé par oxydation du 3-hydroxybutyrate) : - Une activation en acétoacétylCoA par fixation d’un CoA provenant d’un succinylCoA, - Une scission en deux molécules d’acétylCoA, avec utilisation d’un CoA libre et action d’une thiolase. 16 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 L’acétylCoA formé est alors immédiatement pris en charge par le cycle des acides tricarboxyliques pour former des équivalents réduits et ultérieurement de l’ATP dans la chaîne respiratoire mitochondriale. 17 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 2. A l’origine de l’acétylCoA : le pyruvate Plan 1. Transformation du pyruvate en acétylCoA 2. En situation d’anaérobiose : formation du lactate par la LDH 3. Focus sur le pool cytosolique de NAD+/NADH,H+ : les navettes de transfert 1. Transformation du pyruvate en acétylCoA La glycolyse constitue la première partie de la dégradation oxydative du glucose. En conditions d’aérobies, le métabolisme intermédiaire mitochondrial (cycle des acides tricarboxyliques, dit cycle de Krebs, et chaîne respiratoire mitochondriale) est intrinsèquement actif. La dégradation oxydative est poursuivie pour extraire le maximum d’énergie de chaque molécule de pyruvate, sous forme d’ATP (ou d’équivalents tel que le GTP, par exemple) et d’équivalents réduits (comme le NADH,H+), qui contribuent eux-mêmes à la production d’ATP. Pour cela, le pyruvate doit être transféré du cytosol vers la matrice mitochondriale, ou il est ensuite transformé en acétylCoA. Le transfert intra-mitochondrial du pyruvate fait appel à une pyruvate translocase (Figure 10), une enzyme qui est enchâssée dans la membrane interne mitochondriale. Le pyruvate mitochondrial est ensuite immédiatement transformé en acétylCoA par l’action de la pyruvate deshydrogénase (PDH) : Figure 10. Entrée et transformation du pyruvate dans la mitochondrie. Schéma illustrant le transport du pyruvate du cytosol vers la matrice mitochondriale à travers la membrane interne grâce à la pyruvate translocase, en symport avec un proton (H+). Une fois dans la matrice, le pyruvate est converti en acétyl-CoA par l'action de la pyruvate déshydrogénase (PHD), avec production de CO₂ et liaison de la Coenzyme A (CoA-SH). L'acétyl-CoA ainsi formé alimente ensuite le cycle de Krebs pour la production d’équivalents réduits. La pyruvate deshydrogénase (PDH) est un complexe multienzymatique, constitué de trois activités enzymatiques distinctes (E1, E2, E3) qui vont intervenir séquentiellement. Les trois enzymes nécessitent des coenzymes, dont certains sont liés au complexe multienzymatique, telles que : - Le pyrophosphate de thiamine (TPP), indispensable à l’action de E1, - L’acide lipoïque, indispensable à l’action de E2, - Le FAD, indispensable à l’action de E3. Le complexe nécessite deux autres coenzymes, présents à l’état libre (c’est-à-dire hors du complexe mais à proximité) : le NAD+ et le Coenzyme A (CoA-SH). Le schéma suivant illustre l’organisation topographique des trois activités enzymatiques et leurs coenzymes liées, expliquant la nécessaire séquentialisation des activités enzymatiques : 18 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 L’ensemble de la réaction s’écrit comme suit : Elle se déroule en 5 étapes successives : Fixation du pyruvate et sa décarboxylation par la sous-unité E1-TPP : Transfert du groupement acétyl sur la sous-unité E2-acide lipoïque, avec la régénération de la sous-unité E1-TPP à son état basal. Il s’agit d’une réaction d’oxydo-réduction aboutissant à la création d’une liaison riche en énergie entre le groupement acétyl et le lipoate : Transfert du groupement acétyl de l’acétyl-lipoate sur la CoA-SH libre, libérant ainsi la molécule d’acétylCoA. Les groupements –SH de l’acide lipoïque sont réduits entraînant la formation de l’acide dihydrolipoïque. Oxydation de l’acide dihydrolipoïque en acide lipoïque (qui revient donc à son état basal) par transfert de protons vers la sous-unité E3-FAD : 19 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Régénération du FAD oxydé (état basal) par oxydation : transfert de protons sur le cofacteur NAD+: A la fin de la réaction catalysée par la PDH, le complexe multienzymatique est totalement régénéré, et prêt à assurer la décarboxylation d’une nouvelle molécule de pyruvate. L’actéylCoA et le NADH,H+ formés sont pris en charge par le cycle de Krebs et par la chaîne respiratoire respectivement. Le bilan de la décarboxylation oxydative du pyruvate se traduit par la formation d’une liaison thioesther riche en énergie sous forme d’acétylCoA, anisi que d’une molécule de NADH,H+, qui participera à la production d’ATP via la chaîne respiratoire. L’activité de la PDH est régulée de manière allostérique et constitue le troisième point de régulation du flux glycolytique (bien qu’elle ne fasse pas directement partie de la voie métabolique de la glycolyse). La PDH illustre un exemple de complexe multienzymatique permettant le réalisation séquentielle et immédiate de trois réactions enzymatiques qui doivent nécessairement avoir lieu ensemble. Il s’agit d’un modèle d’efficacité que l’on retrouve au niveau d’autres voies métaboliques, comme nous le verrons plus loin avec l’acide gras synthase, un complexe multienzymatique encore plus complexe (possédant 7 activités enzymatiques) impliqué dans la biosynthèse des acides gras (AG). 2. En situation d’anaérobie : formation du lactate par la LDH En absence d'oxygène (ainsi en anaérobie), l'organisme peut transformer le pyruvate en lactate par l’action de la lactate déshydrogénase (LDH, ou déshydrogénase lactique), réaction également accompagnée d'une production d'ATP. Cette situation se produit également lors d’une hypoxie (c’est-à-dire d’un apport insuffisant en oxygène aux tissus). Dans cette situation, l’activité des mitochondries est réduite en raison du manque partiel d’oxygène. La glycolyse anaérobie prend alors le relais en agissant comme un système complémentaire pour combler l’augmentation de la demande accrue en ATP. La réaction de transformation du pyruvate en lactate est la suivante : CH3-CO-COO- + 2 NADH,H+ CH3-CHOH-COO- + 2 NAD+ Cette réduction du pyruvate en lactate, catalysée par la lactate déshydrogénase (LDH), assure la réoxydation du NADH,H+ en NAD+ (NADH,H+ initialement consommé lors de la glycolyse). Cette régénération du NAD+ permet à la glycolyse de se poursuivre en l’absence d'oxygène (alors qu’en conditions d’aérobie, le NAD+ est régénéré par la phosphorylation oxydative). 20 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 La LDH est une enzyme présente dans une grande diversité d'organismes. Elle catalyse la conversion réversible du pyruvate en lactate. La LDH est une enzyme tétramérique, dont chacune des 4 sous-unités constitutives est de type H (en anglais, Heart) ou M (Muscle). Suivant le type d'assemblage des sous-unités Il y a donc cinq isoformes de la LDH : LDH-1 (4H) - principalement dans le cœur et les globules rouges, LDH-2 (3H1M) - principalement dans le système réticulo-endothélial (rate, ganglions lymphatiques, moelle osseuse ; des organes impliqués dans la phagocytose et la réponse immunitaire), LDH-3 (2H2M) - principalement dans les poumons, LDH-4 (1H3M) - principalement dans les reins, LDH-5 (4M) - principalement dans le foie et les muscles squelettiques. Toutes les isoformes sont capables d’assurer la conversion réversible du pyruvate en lactate. En biologie médicale, le dosage de l’activité LDH dans le sang est un indicateur de lésion cellulaire ou tissulaire. La détermination de l’isoforme prédominante pourrait orienter le diagnostic vers un organe ou un autre. Il s’agit néanmoins d’un examen de biologie assez désuet, supplanté par des biomarqueurs plus spécifiques et donc plus pertinents. En toxicologie, le relargage de la LDH dans le milieu extracellulaire est un indicateur de mortalité cellulaire, notamment liés à une altération de la perméabilité membranaire (ex : nécrose cellulaire). En général, la LDH-2 est la forme prédominante dans le sérum en conditions physiologiques (reflétant l’activité métabolique de système réticulo-endothélial). Un taux de LDH-1 supérieur à celui de LDH-2 peut indiquer un infarctus du myocarde (en raison des lésions des tissus cardiaques qui libèrent la LDH cardiaque, qui est riche en LDH-1, dans la circulation sanguine). La LDH est souvent utilisée comme marqueur de dommage tissulaire. Comme la LDH est abondante dans les globules rouges, elle peut servir de marqueur de l'hémolyse. Un échantillon sanguin qui aurait été traité de façon incorrecte peut avoir des activités élevées faussement-positives de LDH à cause des dommages aux érythrocytes. Dans les érythrocytes, qui sont dépourvus de mitochondries, la formation de lactate à partir du pyruvate représente la seule voie métabolique post-glycolytique permettant l’utilisation du pyruvate et la formation d’ATP. Lorsque la consommation de glucose devient supérieure à l'apport en oxygène, une partie de l'acide lactique produit s'accumule dans la cellule : l'accumulation d'acide lactique dans les cellules musculaires est responsable de la raideur musculaire et des crampes (acidose) après un effort physique intense. Lorsque la réoxydation du lactate dans la cellule ne peut pas se réaliser (par exemple lorsque l’effort se prolonge), le lactate est externalisé hors de la cellule et rejoint la circulation sanguine. Il sera ensuite pris en charge par le foie pour réoxydation et réutilisation métabolique ; c’est le cycle de Cori, qui sera vu ultérieurement dans ce cours. Une production excessive de lactate entraîne son accumulation dans le sang, provoquant une situation pathologique nécessitant une prise en charge urgente : l’acidose lactique (Cf. cours de biochimie clinique en DFGSP3). 3. Focus sur le pool cytosolique de NAD+/NADH,H+ : les navettes de transfert Les équivalents réduits générés par des processus dégradatifs sont formés dans le cytosol, lorsque la voie catabolique est cytosolique (glycolyse par exemple), ou dans la mitochondrie (cycle de Krebs). De ce fait, il existe un pool cytosolique et un pool mitochondrial de ces équivalents réduits, séparés par la membrane mitochondriale interne. Pour que les équivalents réduits cytosoliques puissent alimenter la chaîne respiratoire mitochondriale, ils doivent être transférés à travers cette membrane. 21 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Pour ce faire, deux navettes de transferts des protons d’équivalents réduits cytosoliques peuvent être utilisées (Figure 11) : - la navette à glycérophosphate, essentiellement présente dans les muscles et le cerveau. Cette navette nécessite l’activité d’une glycérol-phosphate déshydrogénase (glycérol-P DH), et transfère le potentiel réducteur du NADH,H+ cytosolique sur un FAD pour former du FADH2 dans la matrice mitochondriale, avec un rendement de formation finale d’ATP de 1,5 ATP ; - la navette à malate-aspartate, essentiellement présente dans le foie, le cœur et les reins. Cette navette nécessite l’activité d’une malate déshydrogénase (malate DH), et transfère le potentiel réducteur du NADH,H+ cytosolique sur un NAD+ pour former du NADH,H+ dans la matrice mitochondriale, avec un rendement de formation finale d’ATP de 2,5 ATP : Figure 11. Les navettes métaboliques pour le transfert des équivalents réduits. Schéma illustrant les deux principales navettes métaboliques permettant le transfert des équivalents réduits du cytosol vers la mitochondrie, avec leur rendement en capacité de formation d’ATP. Pour chacune de ces deux navettes, les mécanismes de transfert des protons sont les suivants (Figure 12): Figure 12. Mécanismes des navettes glycérophosphate et malate-aspartate. La navette glycérophosphate transfère un équivalent réducteur NADH,H+ (coté cytosolique) en FADH2 (dans la mitochondrie) via le glycérol-3-phosphate, tandis que la navette malate-aspartate permet la régénération du NADH,H+ mitochondrial à partir des cycles du malate et de l'aspartate, en passant par l’oxaloacétate. 22 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Dans le cas de la navette à malate-aspartate, le reconditionnement cytosolique de l’oxaloacétate, qui agit comme accepteur d’équivalents réduits, nécessite une conversion supplémentaire par l’aspartate transaminase (AST, ASAT ou AspaT dans le schéma ci-dessus). Cette étape est indispensable, car l’oxaloacétate est incapable de franchir les membranes mitochondriales. Mécanismes de fonctionnement des navettes : La glycérol-3-phosphate déshydrogénase existe sous deux formes, chacune ayant une localisation spécifique : cytosolique et mitochondriale. Dans le cytosol, le NADH,H+ transfère ses électrons au dihydroxyacétone phosphate (DHAP), qui est réduit en glycérol-3-phosphate. Cette réaction est catalysée par la glycérol-3- phosphate déshydrogénase (face cytosolique). Le glycérol-3-phosphate diffuse jusqu'à la membrane mitochondriale interne, où il est réoxydé en DHAP par une glycérol-3-phosphate déshydrogénase (face mitochondriale), associée au FAD. Pendant cette étape, les électrons sont transférés au FAD, qui est réduit en FADH₂. Les électrons du FADH₂ sont ensuite acheminés vers la chaîne respiratoire mitochondriale (au niveau du complexe II). Le DHAP, régénéré dans la mitochondrie, retourne dans le cytosol pour un nouveau cycle. Dans la navette malate-aspartate, les mêmes enzymes (malate déshydrogénase et aspartate transaminase) et transporteurs (malate-α-cétoglutarate et glutamate-aspartate) sont présents de part et d'autre de la membrane mitochondriale, assurant un fonctionnement coordonné. Dans le cytosol, le NADH réduit l’oxaloacétate en malate, catalysé par la malate déshydrogénase cytosolique. Cette réaction régénère du NAD⁺ dans le cytosol. Le malate traverse la membrane mitochondriale interne via un transporteur spécifique (le transporteur malate-α-cétoglutarate). Une fois dans la matrice mitochondriale, le malate est réoxydé en oxaloacétate par la malate déshydrogénase mitochondriale (cycle Krebs), générant du NADH dans la mitochondrie. L’oxaloacétate, qui ne peut pas traverser la membrane mitochondriale interne, est converti en aspartate (Asp) par une transaminase (aspartate transaminase, AST ou ASAT, ou AspaT dans la Figure 12) dans la matrice mitochondriale. L’Asp traverse la membrane mitochondriale interne grâce à un transporteur spécifique (transporteur glutamate-aspartate). Dans le cytosol, l’Asp est reconverti en oxaloacétate par une transaminase (ASAT) pour boucler le cycle. Il faut donc retenir que, en dehors de la spécificité tissulaire de l’une ou l’autre des navettes, le passage mitochondrial d’équivalents réduits n’a pas la même valeur énergétique, in fine après sa consommation dans la chaîne respiratoire mitochondriale. Quand cela est possible, il est plus rentable d’utiliser la navette à malate-aspartate. 23 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 3. Métabolisme cellulaire des glucides (partie 1) Plan 1. Digestion et absorption des glucides alimentaires 2. Internalisation cellulaire du glucose 3. Phosphorylation immédiate du glucose intracellulaire 4. Le carrefour métabolique glucose 6-phosphate 5. La glycolyse 5.1. Généralités 5.2. Etapes 5.3. Entrée du fructose dans la glycolyse 5.4. Entrée du galactose dans la glycolyse 6. La voie des pentoses-phosphates 6.1. Phase oxydative 6.2. Phase non oxydative 6.3. Mise en œuvre et régulation de la voie 1. Digestion et absorption des glucides alimentaires Les molécules osidiques qui constituent une source alimentaire de glucose sont essentiellement : le fructose, le saccharose, le maltose, le lactose, l’amidon et le glycogène. Seuls les oses simples passent facilement à travers les membranes et notamment la membrane intestinale. Ladégradation préalable des diholosides (lactose, saccharose) est nécessaire pour former des oses simples : glucose, fructose, galactose. Par la suite, ces monosaccharides peuvent être transformés aisément en glucose. À titre d’exemple, une des voies (mineure) d’interconversion du D-fructose en D-glucose passe par la transformation préalable du D-fructose en sorbitol puis du sorbitol en D-glucose. Ces deux réactions réversibles sont catalysées par des déshydrogénases. Le sorbitol a la caractéristique structurale de ne renfermer ni groupement aldéhydique ni groupement cétonique. Son pouvoir sucrant faible. Il est utilisé : Dans l’industrie alimentaire, comme édulcorant en substitution du saccharose, 24 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Dans l’industrie pharmaceutique, comme excipent (séquestrant, humectant ou stabilisant) et comme principe actif : laxatif osmotique : après ingestion, il induit une hyperhydratation intestinale, par appel d’eau du tissu vers la lumière intestinale. Il a également un effet cholagogue (facilitant l’évacuation de la bile vers l’intestin) par la stimulation de la sécrétion de la cholécystokinine-pancréozymine (CCK), hormone agissant sur la contraction de la vésicule biliaire et sur la sécrétion des enzymes pancréatiques. La digestion des diholosides permet donc la formation très rapide et directe de glucose, qui sera utilisé par l’organisme comme constituant des structures glycosidiques de molécules protéiques (glycoprotéines) ou lipidiques (glycolipides), pour mettre en réserve le glucose sous forme de glycogène ou encore pour initier des voies cataboliques à visée énergétique ou métabolique. Des polyholosides sont également présents dans l’alimentation. Parmi ceux-ci, on trouve, la cellulose et l’amidon, d’origine végétale, ainsi que le glycogène, d’origine animale. La cellulose n’est pas assimilable par l’organisme humain puisque la liaison entre deux molécules unitaires de glucose est de type bêta 1-4, que notre organisme n’est pas capable de cliver car nous ne possédons pas l’équipement enzymatique nécessaire, la bêta 1-4 glycosidase. Par contre, l’amidon et le glycogène sont deux polyosides assimilables par l’organisme : leur dégradation fournit des oses simples de type glucose et des diholosides, maltose et isomaltose, qui sont eux-mêmes facilement dégradés en glucose, fournissant ainsi en intégralité des molécules de glucose utile aux cellules de l’organisme. Au niveau du tractus digestif (muqueuse intestinale), l’absorption des oses simples est assurée par un transport actif sodium-dépendant. Le transport est spécifique du glucose et des autres oses : il existe donc des transporteurs spécifiques pour le glucose (transporteur SGLT1, symporteur glucose-Na+) et pour les autres oses (par exemple, GLUT5 pour le fructose), tels que le fructose et le galactose. Après assimilation intestinale au niveau du pôle apical des cellules intestinales, les oses simples (essentiellement le glucose) passent dans la circulation sanguine en franchissant le pôle basal des mêmes cellules intestinales. Les oses sont véhiculés dans le sang à l’état libre en utilisant le système porte. Les premières cellules irriguées sont donc les cellules hépatiques, avant que l’ensemble des cellules des tissus périphériques puissent les capter : il est donc important que le foie puisse capter le glucose pour ses propres besoins, notamment métaboliques, tout en maintenant une glycémie suffisante pour fournir aux tissu périphériques le glucose dont ils ont besoin. 2. Internalisation cellulaire du glucose Pour pénétrer à l’intérieur des autres cellules, un transport actif similaire à celui présent au niveau des cellules intestinales est nécessaire. L’internalisation est spécifique d’un ose donné : il existe donc des transporteurs du glucose et des transporteurs des autres oses. L’expression membranaire des transporteurs du glucose (GLUT) est à la fois tissu-spécifique (hormis deux transporteurs GLUT ubiquitaires) et pour certains régulé par la voie hormonale de l’insuline. Leur affinité pour le glucose est par ailleurs différente. Le tableau suivant indique les 12 principaux transporteurs de glucose décrits à ce jour (Tableau 3). 25 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Nom Localisation KM GLUT1 Tous les tissus des mammifères 1mM Capture de base du glucose GLUT2 Foie et cellules pancréatiques 15-20mM Dans le pancréas, joue un rôle dans la régulation de l’insuline Dans le foie, élimine l’excès de glucose dans le sang GLUT3 Tous les tissus des mammifères 1 mM Capture de base du glucose GLUT4 Cellules du muscle et du tissu 5 mM Dans la membrane adipeux plasmique du muscle, augmente avec l’entraînement GLUT5 Intestin grêle Essentiellement transporteur du fructose GLUT6, 7, 8, 9… Tableau 3. Transporteurs de glucose GLUT : localisation, affinité et fonctions. Les transporteurs GLUT 1 à GLUT5 sont les plus importants et leurs caractéristiques doivent être connues. GLUT1 et GLUT4 sont localisés sur la membrane de toutes les cellules de l’organisme : leur valeur de KM pour le glucose étant très faible, traduise une affinité assez élevée pour la molécule qu’ils vont transporter. Ces deux GLUT assurent donc la capture de base du glucose par la majorité des cellules. A l’inverse GLUT2 n’est exprimé qu’au niveau hépatique et des cellules bêta du pancréas. Son KM étant élevé (15 à 20 mM, peu d’affinité pour le glucose) : son rôle est donc au niveau hépatique de prendre en charge uniquement l’excès de glucose sanguin. Au niveau pancréatique, GLUT2 internalisera également le glucose lorsque celui-ci sera en grande quantité dans le sang : cette internalisation constituera un signal pour la cellule bêta pancréatique, qui libérera alors l’insuline dans la circulation sanguine pour favoriser une baisse de la glycémie (stimulant l'absorption du glucose par les cellules, notamment musculaires et adipocytaires). GLUT4 (insulino- dépendant) a également une spécificité tissulaire : il est exprimé par les cellules musculaires et les cellules du tissu adipeux. Ayant un KM intermédiaire, il permet la captation de glucose circulant au niveau de ces deux types cellulaires. Autre particularité de ce transporteur GLUT4 : en conditions basales, il est stocké dans des vésicules intra cytoplasmiques et il se déplace vers la membrane plasmique, en présence d’insuline, afin de permettre l’entrée du glucose dans les cellules qui l’exprime. Enfin, GLUT5, exprimé dans l’intestin grêle, est essentiellement responsable du transport du fructose, permettant ainsi son assimilation par l’organisme. Le schéma général d’action d’un transporteur GLUT est représenté dans le schéma suivant. Il s’agit d’une molécule polypeptidique qui possède 12 domaines transmembranaires positionnés pour former un « canal » au travers duquel l’ose peut être transféré du niveau extracellulaire au niveau cytosolique. 26 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 3. Phosphorylation immédiate du glucose intracellulaire - Après internalisation, le glucose cytosolique subit aussitôt une transphosphorylation : un groupement phosphate issu d’une molécule d’ATP est transféré en position 6 du glucose. Cette modification conféré à la molécule deux caractéristiques principales : la charge négative du groupement phosphate ajouté empêche la molécule de franchir la membrane cytoplasmique en sens inverse : le glucose est donc piégé à l’intérieur de la cellule. La liaison phosphodiester est une liaison à haut potentiel d'hydrolyse, ce qui permet au glucose d'être engagé dans des métabolismes ultérieurs. Deux enzymes sont capables d’assurer la phosphorylation immédiate du glucose au niveau cytosolique : l’hexokinase (HK1, HK2, HK3) et la glucokinase (GK). Ces deux enzymes, malgré la même activité de phosphorylation du glucose (GK est d’ailleurs en fait une isoenzyme de HK, également nommée HK4), ont un rôle fonctionnel tout à fait différent (Figure 13) : - l’hexokinase possède un KM très faible (0,1 mM) pour son substrat. Elle permet ainsi la phosphorylation immédiate, même à de faibles concentrations de glucose au niveau intracellulaire, - la glucokinase possède à un KM élevé (10mM) et est présente essentiellement au niveau des cellules hépatiques. Elle permet la phosphorylation de glucose uniquement lorsque celui-ci est en grande quantité dans la cellule hépatique, donc uniquement lorsque la glycémie est élevée. Figure 13. Cinétique de la phosphorylation du glucose par l'hexokinase et la glucokinase. Ce graphique illustre les courbes de vitesse relative de la réaction catalysée par l'hexokinase (KM=0,1 mM) et la glucokinase (KM=10 mM) en fonction de la concentration en glucose. L'hexokinase atteint sa vitesse maximale à de très faibles concentrations de glucose, tandis que la glucokinase (hépatique) présente une affinité plus faible pour le glucose et s'active dans un contexte de glycemie élevée. Cette différence fonctionnelle liée à une différence de cinétique de phosphorylation de chaque enzyme, est très importante : l’hexokinase ubiquitaire agit même lorsque le glucose est en faible quantité dans le sang, alors que la glucokinase (essentiellement hépatique) intervient de façon beaucoup plus progressive. En effet, l’activité de la glucokinase, variant en fonction de la concentration du glucose hépatique, possède une relevance physiologique essentiellement dans des conditions d’hyperglycémies (physiologique postprandiale ou pathologique, lors de diabète par exemple). Ce point sera re-abordé plus loin (cf. spécificité d’organes) : le foie doit être considéré comme un « serveur » énergétique pour les tissus périphériques : il doit donc pouvoir capter le glucose notamment celui excédentaire dans la circulation sanguine, tout en permettant la captation du glucose par les cellules périphériques. Par contre, lorsque le glucose est en grande quantité ou en excédant au niveau sanguin, le foie a pour mission de capter ce glucose excédentaire pour le transformer par différentes voies métaboliques, synthétiser des molécules énergétiques à destination des tissus périphériques, créer des réserves énergétiques de différentes natures (glycogène, AG- TG…). 27 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Le schéma suivant synthétise les différentes étapes de l’internalisation du glucose, sur la base de l’action du transporteur GLUT4 (Figure 14). Figure 14. Étapes de la captation et de la phosphorylation du glucose dans les cellules. Les principales étapes de l'utilisation du glucose par les cellules : 1) Livraison : Le glucose arrive dans le compartiment extracellulaire depuis le sang. Transport : GLUT4, un transporteur de glucose insulino-dépendant, facilite l'entrée du glucose dans la cellule. Phosphorylation : Une fois à l'intérieur, le glucose est phosphorylé par l'hexokinase II (HK II), formant du glucose-6-phosphate, étape essentielle pour son métabolisme intracellulaire. Notons dès à présent que, dans cet exemple de GLUT4, l’internalisation du glucose est à la conséquence de l’action de l’insuline sur la cellule, adipeuse par exemple. En se liant à son récepteur membranaire, l’insuline induit différentes actions intracellulaires (que nous reverrons plus tard), dont l’augmentation de l’expression membranaire de GLUT4, favorisant donc l’internalisation du glucose, et conduisant à différents devenirs métaboliques, notamment la glycogénogenèse et la biosynthèse des acides gras (AG) après glycolyse (Figure 15). Figure 15. Régulation de la captation du glucose et son métabolisme par l'insuline. Ce schéma illustre les étapes clés de l'action de l'insuline sur la captation et le métabolisme du glucose dans une cellule. 1) L'insuline se lie à son récepteur spécifique à la surface cellulaire, déclenchant une cascade de signalisation intracellulaire. 2) Cette signalisation entraîne le recrutement du transporteur de glucose GLUT4 à la membrane plasmique. 3) GLUT4 permet l'entrée du glucose dans la cellule. 4) Une partie du glucose est stockée sous forme de glycogène par le processus de glycogénogenèse. 5) Une autre partie est convertie en pyruvate par la glycolyse. 6) Le pyruvate peut être utilisé pour produire des acides gras par la lipogenèse. 28 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 4. Le carrefour métabolique glucose 6-phosphate Le glucose 6-phosphate ainsi présent au niveau intra cellulaire aura ensuite différentes destinées : ces différentes possibilités constituent le carrefour métabolique « glucose 6-phosphate » : cette molécule pourra en effet s’engager dans des voies métaboliques tels que : - la mise en réserve de l’énergie par synthèse de glycogène - l’entrée dans le métabolisme intermédiaire par la voie de dégradation oxydative de la glycolyse, - la synthèse de molécules particulières par la voie des pentoses phosphates - la déphosphorylation, par une glucose 6 phosphatase hépatique, permettant la sortie du glucose de la cellule hépatique et donc son retour au niveau circulant pour pallier une hypoglycémie, par exemple. Il faut noter que la glucose 6-phospatase est également exprimée, plus faiblement dans le tissu rénal et le tissu intestinal, permettant la sortie de glucose dans l’urine et la lumière digestive, respectivement. Inversement, différentes voies métaboliques sont capables de former le glucose 6-phosphate : - la phosphorylation cellulaire du glucose exogène - la dégradation du glycogène préexistant dans la cellule (glycogénolyse), - la synthèse de novo de glucose à partir du pyruvate (néoglucogenèse), Glycogène glucokinase hexokinase Glucose pentoses – phosphate Glucose 6 ℗ NADPH, H+ glucose 6 phosphatase pyruvate acétyl CoA Le glucose 6-phophate est donc véritablement une plaque tournante métabolique, en étant le produit terminal de métabolismes (anabolismes ou catabolismes) le synthétisant, et le substrat de voies métaboliques (également anaboliques ou cataboliques) à l’origine de produits utiles ou nécessaires pour la vie cellulaire. 5. La glycolyse 5.1. Généralités La glycolyse désigne la dégradation du glucose pour former du pyruvate. Le pyruvate pourra ensuite alimenter le métabolisme intermédiaire de la cellule. Il s’agit d’une voie catabolique de dégradation oxydative, transformant une molécule de glucose (6 atomes de carbone) en deux molécules de pyruvate en (2 molécules de 3 atomes de carbone), avec formation de 2 ATP. En fonction des auteurs, la voie métabolique de la glycolyse débute au niveau du glucose ou du carrefour Glucose 6-P. Dans tous les cas, le glucose 6-P est présent dans cette voie, pour rappel ces origines sont : - glucose exogène (d’origine alimentaire, par exemple) provenant de la circulation sanguine et internalisé par la cellule ; 29 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 - glycogène stocké par la cellule (hépatique, musculaire) ; - interconversion d’oses non-glucose (fructose, mannose, galactose). La glycolyse est une voie anaérobie (c’est-à-dire ne nécessitant pas d’oxygène) cytosolique, formée par une succession de 10 réactions enzymatiques (à partir du glucose), regroupées en 2 phases distinctes : - la phase préparatoire de la molécule de glucose pour sa dégradation, constituée des 5 premières réactions. Cette phase est consommatrice d’énergie (2 ATP) ; - la phase de restitution d’énergie (4 ATP), constituée des 5 dernières réactions. Au total, le bilan métabolique et énergétique de la glycolyse (allant du glucose au pyruvate) est l’obtention de deux cofacteurs réduits NADH,H+, de deux molécules de pyruvate et 2 ATP. Toutes les étapes de la glycolyse sont réversibles, sauf 3 étapes pour lesquelles les sauts énergétiques sont trop importants (ΔG°’ très négatifs). Ces 3 étapes irréversibles : (1) constituent les étapes de régulation de la voie métabolique, (2) font l’objet de voies dites de contournement pour que la réaction inverse ait lieu (par conséquence avec des enzymes différentes). Ces voies de contournement vont permettre la formation de novo par la cellule de glucose à partir de pyruvate : il s’agit de la néoglucogenèse, voie inverse de la glycolyse, qui en utilise les réactions réversibles et trois réactions spécifiques pour les étapes irréversibles (que nous verrons plus loin). Le pyruvate formé a deux destinées selon que la cellule dispose ou non d’oxygène : - en condition d’aérobie (c’est-à-dire en aérobiose), le pyruvate peut alimenter le métabolisme intermédiaire de la cellule, en franchissant la membrane mitochondriale interne, puis en étant transformé en acétylcoenzyme A (acétylCoA), - en condition anaérobie (en anaérobiose), le pyruvate est réduit en lactate, qui peut quitter la cellule, rejoindre la circulation sanguine et sera alors capté par le foie pour réutilisation métabolique (cycle de Cori). 5.2. Les étapes de la glycolyse 5.2.1. Les 5 étapes de préparation Etape 1 Comme dans l’initiation de nombreuses voies métaboliques, la première étape de la glycolyse est un « conditionnement » du substrat Glucose par l’apport d’une énergie intrinsèque, sous forme d’un groupement phosphate, pour former du glucose 6-P (Cf. chapitre 3), selon la réaction suivante : Cette étape, fortement exergonique et irréversible, nécessite la consommation d’un ATP, et est, catalysé par l’hexokinase ou la glucokinase. Etape 2 Il s’agit d’une étape de transformation par isomérisation du glucose 6-P en fructose 6-P, réaction réversible : Etape 3 30 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Le fructose 6-P subit une deuxième phosphorylation par l’ajout d’un second groupement phosphate pour former fructose 1,6 biphosphate (F1,6-biP), en prévision de la scission ultérieure de la molécule, garantissant que chacune des deux molécules en 3 carbones (C3) à venir possède un groupement phosphate : Cette étape fortement exergonique, consommatrice d’un ATP, et irréversible est catalysé par la phosphofructokinase 1 (PFK1). Cette enzyme est une enzyme-clé car : - sa vitesse est la plus faible de toutes les étapes de la glycolyse, - elle catalyse donc l’étape limitante de la glycolyse, - elle est régulée par voie allostérique et par voie covalente et constitue le premier point de régulation du flux glycolytique. Etapes 4 et 5 La quatrième étape correspond au clivage du fructose 1,6 biphosphate (C6) en deux molécules à trois carbone (C3), chacune porteuse d’un groupement phosphate : le dihydroxyacétone phosphate (DHAP) et le glycéraldéhyde 3-phosphate (GA3-P) : Cette réaction catalysée par l’aldolase, est endergonique en conditions standard, mais néanmoins possible et réversible en conditions réelles cellulaires (le rapport des concentrations réelles dans la cellule favorise la réaction). Par la suite, seul le GA3-P va poursuivre tel quel la glycolyse. Le DHAP sera transformé par isomérisation en GA3-P, l’équilibre DHAP-GA3-P est constamment orienté vers la formation de GA3-P grâce à l’action réversible de la triose phopshate isomérase (TPI) (étape 5). A l’issue de la phase préparatoire, la dégradation d’une molécule de glucose fournit deux molécules de GA3- P, avec consommation de 2 ATP. 5.2.2. Les 5 étapes de restitution Etapes 6 et 7 Le GA3-P subit une oxydation phosphorylante catalysée par la GA3-P déshydrogénase. Cette réaction consiste en l’oxydation de la fonction aldéhyde (-CHO) en fonction acide (-COOH), accompagnée de la formation d’un équivalent réduit NADH,H+. Ensuite, un groupement phosphate inorganique H3PO4 est ajouté 31 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 à l’acide formé, conduisant à la formation d’un intermédiaire acyl-phosphate (acyl-P). Le produit formé est le 1,3-biphosphoglycérate : L’étape 6 est indispensable pour la mise en œuvre de l’étape 7. : Le groupement phosphate récemment ajouté est transféré à une molécule d'ADP, permettant la formation d'une molécule d'ATP et de 3- phosphoglycérate (3-PG) : Cette réaction est très exergonique, mais peut être réversible si elle est couplée à une réaction endergonique. Etape 8 Il s’agit d’une simple isomérisation du 3-PG en 2-PG, préparatoire à l’étape suivante. La réaction est catalysée par une isomérase (phosphoglycérate mutase). La réaction est donc faiblement endergonique et réversible : Etape 9 Par déshydratation, le 2-PG est transformé en phosphoénolpyruvate (PEP). La réaction crée une liaison énol- P riche en énergie (à haut potentiel d’hydrolyse) : elle est faiblement endergonique, catalysée par une énolase et réversible : A noter : l’énolase est inhibée par la présence d’ions fluor (F-). Cette caractéristique est utilisée en biologie clinique pour bloquer la glycolyse qui peut se produire ex vivo dans un échantillon sanguin après prélèvement d’un patient, garantissant ainsi l’absence de consommation du glucose entre le prélèvement et le dosage au laboratoire permettant que la mesure de la glycémie soit identique à celle présente in vivo chez le patient. 32 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Etape 10 Cette dernière étape permet la formation du pyruvate, produit final de la glycolyse, en restituant l’énergie apportée par la liaison riche créée précédemment pour former 1 ATP : La réaction étant très exergonique, elle est irréversible. L’enzyme assurant la formation du pyruvate est la pyruvate kinase (PK) : elle est très importante dans la régulation de la glycolyse (Cf. infra). L’activité de la PK est régulée par voie allostérique et par voie covalente et constitue le deuxième point de régulation du flux glycolytique. 5.2.3. Bilan général de la glycolyse Les deux figures suivantes présentent la glycolyse de façon synthétique : - étape de préparation - étape de restitution Au total, la dégradation oxydative d’une molécule de glucose (C6) fournit : - 2 molécules de pyruvate (C3) 33 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 - 2 molécules d’ATP (2 sont consommées mais 4 sont formées) - 2 molécules de NADH,H+. En anaérobiose, le bilan énergétique se limite donc à la formation de 2 ATP par molécule de glucose dégradée. Les deux molécules de pyruvate peuvent être chacune transformées par réduction en lactate (CH3- CHOH-COOH) avec consommation d’une molécule de NADH,H+. Le lactate peut sortir de la cellule, rejoindre la circulation sanguine et être captée par les cellules du foie (hépatocytes). Les cellules hépatiques étant toujours oxygénées (en conditions physiologiques), le lactate sera re-oxydé en pyruvate qui pourra alors être utilisé comme substrat métabolique (néoglucogenèse, transformation en AcétylCoA…). 5.3. Entrée du fructose dans la glycolyse Le fructose est présent dans l’alimentation, à des degrés divers selon les habitudes/pratiques alimentaires et les aliments eux-mêmes : les plus riches en fructose sont le miel (40 %) et les fruits secs (10 à 30 %) ou frais (2 à 10 %). L’assimilation intestinale et le transport sanguin du fructose amène cet ose au niveau du foie et des tissus périphériques, en particulier le tissu adipeux, où il peut alors être internalisé, selon les besoins cellulaires. - L’utilisation métabolique du fructose implique son intégration dans la voie de la glycolyse, selon deux modalités différentes en fonction du type de tissu (Figure 16) : Au niveau adipocytaire, le fructose internalisé est immédiatement phosphorylé en position C6 par l’hexokinase, pour former le fructose 6-P, intermédiaire de la glycolyse, - Au niveau hépatocytaire, l’hexokinase étant mobilisée pour assurer la phosphorylation du glucose lui aussi assimilé lors d’un repas, le fructose sera plutôt phosphorylé par une fructokinase, exprimée principalement dans le foie, pour former le fructose 1-P. Celui-ci sera ensuite directement clivé, par l’aldolase hépatique, en : Dihydroxyacétone phosphate (DHAP), intermédiaire de la glycolyse, et Glycéraldéhyde, immédiatement phosphorylé en 3 par la glycéraldéhyde kinase, en glycéraldéhyde 3-phosphate (GA3-P), également intermédiaire de la glycolyse. Figure 16. Métabolisme du fructose dans le tissu adipeux et le foie. a) Dans le tissu adipeux : Le fructose est phosphorylé en fructose-6-P par l'hexokinase, en consommant une molécule d'ATP. Le fructose-6-P entre directement dans la voie glycolytique. b) Dans le foie : Le fructose est initialement phosphorylé en fructose-1-P par la fructokinase, en consommant une molécule d'ATP. L'aldolase hépatique scinde ensuite le fructose-1-P en dihydroxyacétone-phosphate (DHAP) et glycéraldéhyde. Le DHAP entre dans la glycolyse après une isomérisation, tandis que le glycéraldéhyde est phosphorylé en glycéraldéhyde-3-phosphate, 34 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 consommant une molécule supplémentaire d'ATP, pour intégrer la voie glycolytique. Ces mécanismes permettent au fructose d'être utilisé comme source d'énergie ou comme substrat métaboliques dans ces tissus. 5.4. Entrée du galactose dans la glycolyse Le galactose est l’un des deux oses constituant le lactose, lui-même présent (exclusivement) dans le lait et dans les produits laitiers des mammifères (par exemple : lait de vache, de brebis, de chèvre… et lait maternel humain). Son utilisation à des fins énergétiques nécessite sa transformation préalable en glucose, qui se fait en trois étapes successives : - Activation du galactose en galactose 1-phosphate, par action de la galactokinase, - Transfert du groupement galactose sur une molécule d’uridyldiphosphate (UDP) par échange avec un groupement glucose (qui, libéré, est phosphorylé en position C6 et rejoint la glycolyse). La molécule formée est l’uridyldiphosphate-galactose (UDP-Gal) - Epimérisation en glucose du groupement galactose de l’UDP-Gal pour former l’UDP-glucose (UDP- Glc dans le schéma suivant), par action de l’UDP-Gal 4-épimérase. L’UDP-Glc formé remplace la même molécule utilisée dans la réaction précédente. Au total, la transformation d’un galactose en glucose consomme donc un ATP (tout comme l’entrée de fructose ou de glucose dans la glycolyse qui consomme également une molécule d’ATP). 6. La voie des pentoses-phosphates La voie des pentoses phosphates n’est pas directement une voie du métabolisme énergétique cellulaire, mais elle en est très proche par : - Sa connexion étroite avec la glycolyse, grâce à l’utilisation d’un substrat commun, le glucose 6- phosphate, et la capacité de la voie des pentoses phosphates, dans l’un de ses modes d’action, à réintégrer la glycolyse pour recycler des structures osidiques non utilisées. - Sa finalité de production : soit d’oses non glucose (en particulier non hexoses), le plus souvent le ribose 5-phosphate (C5), précurseur des nucléotides, mais également d’autres oses pouvant avoir entre 3 et 7 atomes de carbone. Ces oses, plus atypiques, sont produits par la cellule en réponse à ses besoins spécifiques pour la production de structures glucidiques complexes, soit de NADPH,H+, c’est-à dire du pouvoir réducteur, indispensables aux voies de biosynthèse de biomolécules endogènes (anabolisme). NAD+ et NADP+ sont des molécules identiques à l’exception d’un groupement phosphate supplémentaire sur le noyau osidique. Cette simple différence est fonctionnellement essentielle, puisque le NAD+ est le cofacteur redox des voies cataboliques et de transformation, alors que le NADP+ est le cofacteur exclusif des voies de biosynthèse. Cela illustre une forme « d’optimisation » du fonctionnement de la cellule, où la cellule synthétise deux molécules très similaires, presque par le même processus, tout en leur attribuant des fonctions aux finalités totalement distinctes. 35 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 La voie des pentoses phosphates peut être divisée en deux branches : - la phase oxydative : il s’agit d’une série de réactions irréversibles d’oxydation du glucose 6-phosphate avec réduction de NADP+ en NADPH,H+ et production de pentoses, - la phase non oxydative : il s’agit de réactions réversibles de transformation des pentoses précédemment créés, par isomérisation et transfert d’une, deux ou trois unités carbone, formant des oses ayant de 3 à 7 carbones. 6.1. La phase oxydative Constitué de trois réactions, elle permet de d’oxyder le glucose 6-phosphate et de réduire deux NADP+ en NADPH,H+ : 36 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 La première réaction d’oxydation est catalysée par la glucose 6-phosphate deshydrogénase (G6PD). Le déficit en glucose-6-phosphate déshydrogénase (G6PD) est un déficit enzymatique lié à l'X, fréquent chez les sujets d'ascendance africaine, et qui peut favoriser une hémolyse (destruction des globules rouges) en cas de maladies aiguës ou après absorption de certains médicaments (salicylates, sulfamides…) ou de fèves (d’où le nom de favisme de cette maladie, car historiquement associée à une consommation de fèves (principalement de la variété Vicia faba). Le diagnostic repose sur le dosage de l’activité de la G6PD érythrocytaire. La deuxième réaction est un réarrangement moléculaire, mais néanmoins irréversible car le produit de la réaction est immédiatement utilisé comme substrat de la troisième réaction. La troisième réaction est une décarboxylation oxydative, permettant la formation d’une nouvelle molécule de NADPH,H+ et d’un ribose (C5) : le ribulose 5-phosphate. Le NADPH,H+ est utilisé par la cellule comme équivalent réduit pour ses réactions de biosynthèses. Le ribulose 5-phosphate entre dans la branche non oxydative de la voie des pentoses phosphates. 6.2. La phase non oxydative Le ribulose 5-phosphate peut être isomérisé en ribose 5-phosphate, élément indispensable à la biosynthèse des nucélotides. Il peut également être épimérisé en xylulose 5-phosphate. Par des réactions de trans- aldolisation et trans-cétolisation, la combinaison de ribose 5-phosphate (C5) et xylulose 5-phosphate (C5) peut aboutir à la formation d’oses ayant 3 à 7 atomes de carbone, selon le schéma général suivant : Il est important de noter que ces réactions, et donc la phase non oxydative de la voie, aboutit à la formation de fructose 6-phosphate ou de GA3-P, tous les deux intermédiaires de la glycolyse. 37 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 6.3. Misse en œuvre et régulation de la voie des pentoses phosphates La voie des pentoses phosphates est mise en œuvre lors d’un besoin de cofacteur réduit NADPH,H+ : le déterminant d’engagement du glucose 6-phosphate dans cette voie est donc la disponibilité importante de NADP+. La forme réduite du cofacteur exerce à la fois une inhibition par excès de produit et une inhibition compétitive de la G6PD, car elle entre en compétition avec la forme oxydée pour la liaison à l’enzyme. La réaction catalysée par la G6PD étant irréversible, l’engagement dans la voie est définitif, quelle que soit l’issue de cette voie, qui peut être multiple. En effet, selon les besoins de la cellule, 4 modes de fonctionnement de la voie des pentoses phosphates peuvent être utilisés : Mode 1 : la cellule a besoin de plus de ribose 5-phosphate et peu de NADPH,H+ La phase oxydative n’étant pas nécessaire, seule la phase non oxydative est mise en œuvre, à partir de substrat issus de la glycolyse : fructose 6-phosphate et GA3-P. Ces deux molécules subissent les réactions de trans-aldolisation et trans-cétolisation conduisant à la formation du ribose 5-phosphate : Ce mode est notamment utilisé par les cellules en division rapide (cellules embryonnaires, cellules de tissu en régénération, cellules cancéreuses…), qui ont besoin de synthétiser du ribose 5-phosphate pour les acides nucléiques (ADN, ARN). Mode 2 : les besoins cellulaires de ribose 5-phosphate et de NADPH,H+ sont équilibrés La phase oxydative a lieu, pour produire le NADPH,H+, et le ribulose 5-phosphate formé est intégralement transformé en ribose 5-phosphate. 38 DFGSP2 UE 8 – Biochimie 14 janvier 2025 Ce mode est notamment utilisé par les cellules en division rapide, qui ont besoin de synthétiser à la fois de l’ADN/ARN et des molécules de novo alors qu’elles sont en déficit de forme réduite, NADPH, H+. Mode 3 : la cellule a plus besoin de NADPH,H+ que de ribose 5-phosphate… mais pas nécessairement d’ATP La phase oxydative a lieu, pour produire le NADPH,H+ et le ribulose 5-phosphate. Ce dernier forme le ribose 5-phosphate, qui transformé en fructose 6-phopshate ou GA3-P pour rejoindre la voie de la glycolyse. Le besoin de NADPH,H+ étant important, cependant c’est la voie inverse de la glycolyse, la néoglucogenèse, qui est alors mise en œuvre, afin de former du glucose 6-phosphate, qui alimente alors la voie des pentoses phosphates : Ce mode est notamment utilisé par les cellules adipeuses, qui ont besoin de beaucoup de NADPH,H+ pour la synthèse des AG. Mode 4 : la cellule a