Culture et art des compétences 3ème Semestre (PDF)

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Université Sidi Mohamed Ben Abdellah

Pr. Mounir CHAFYQ, Pr. Kaoutar IBRAHIMI

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art pictural marocain histoire de l'art culture marocaine art

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Les notes de cours de Semestre 3 sur la culture et les compétences artistiques, qui abordent les origines de l'art pictural marocain, les premiers pas vers la modernité et le dialogue pictural entre le Maroc et le monde. Les auteurs sont Pr. Mounir CHAFYQ et Pr. Kaoutar IBRAHIMI. Les notes contiennent aussi des informations détaillées sur les gravures rupestres, les techniques et bien plus.

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Semestre 3: Culture and art skills Pr. Mounir CHAFYQ Pr. Kaoutar IBRAHIMI Contenu du cours I. Origines de l’art pictural marocain Influences traditionnelles Peinture précoloniale II. Premiers pas vers la modernité L’art pictural contemporain au Maroc Les principales figure...

Semestre 3: Culture and art skills Pr. Mounir CHAFYQ Pr. Kaoutar IBRAHIMI Contenu du cours I. Origines de l’art pictural marocain Influences traditionnelles Peinture précoloniale II. Premiers pas vers la modernité L’art pictural contemporain au Maroc Les principales figures de l’art contemporain III. Dialogue pictural entre le Maroc et le monde les œuvres emblématiques des peintres marocains dans le contexte de leur époque. l’impact du Maroc dans l’imaginaire artistique occidental. L ’art pictural marocain L’art pictural marocain est un domaine riche et varié qui reflète la diversité culturelle du pays. Il s’appuie sur des racines historiques profondes et s’ouvre à des expressions contemporaines, combinant influences locales et mondiales. Le Maroc, par sa position géographique et son histoire, a toujours été un carrefour de civilisations : amazighe, arabo-islamique, andalouse, et occidentale. Cette diversité se reflète dans ses formes artistiques, notamment dans la peinture. QU’EST CE QUE LA PEINTURE ? La peinture est une forme d'art consistant à dessiner une surface en y appliquant esthétiquement des fluides colorés. Les artistes peintres représentent une expression personnelle sur des supports tels que le papier, la toile, le bois, le verre, le béton et sur bien d'autres subjectiles. La peinture peut être naturaliste et figurative ou abstraite. Elle peut avoir un contenu narratif, descriptif, symbolique, spirituel ou philosophique. LES RACINES DE L’ART PICTURAL AU MAROC 1- Les gravures rupestres: Les gravures rupestres sont des représentations artistiques réalisées par l’humain au cours de la préhistoire. Cet art a été un moyen d’exprimer sa pensée, sa culture et ses croyances avant qu’il n’invente l’écriture. Des tableaux de scènes de chasse, de guerre et des cérémonies religieuses sont autant de messages racontant la vie quotidienne préhistorique. Ces gravures renseignent aussi sur le milieu dans lequel vivaient ces communautés humaines. Les racines de l’art pictural au Maroc Localisation et Contexte Historique Période : Datées principalement du Néolithique (5 000 - 2 000 avant notre ère). Elles sont le reflet d’une époque de transition vers la sédentarisation avec l’apparition de l’agriculture et de l’élevage. Régions principales : Anti-Atlas, Haut-Atlas, Tafilalet, Tafraout, et Tazina. Thèmes représentés Faune locale : Animaux sauvages (antilopes, lions, éléphants) et domestiques (bovins). Ces animaux témoignent de la biodiversité de l'époque. Scènes de chasse : Les représentations montrent des chasseurs avec des arcs et des flèches, accompagnés parfois de chiens, illustrant l'organisation sociale. Symboles abstraits ou mystiques : Spirales, cercles, ou figures géométriques. Ces motifs pourraient avoir des significations rituelles ou spirituelles. Techniques de Réalisation Outils : En pierre ou en métal, utilisés pour graver la surface rocheuse. Méthodes : Piquetage (creuser la roche point par point). Incision (tracés précis pour les détails). Antilope (Oryx), période des chasseurs (Site Tamdayresst, Province d’Assa Zag). L’influence islamique et amazighe L’Islam et l’art pictural : L’islam interdit généralement la représentation figurative dans les contextes religieux, favorisant ainsi l’émergence de l’abstraction et des motifs géométriques dans l’art pictural. La calligraphie arabe devient une forme majeure d’expression picturale, avec des versets coraniques ou des mots symboliques intégrés dans des œuvres artistiques. Les couleurs privilégiées : le bleu, le vert, et l’or, souvent associées à des significations spirituelles et célestes. Arabesques et motifs géométriques : Les motifs géométriques complexes et les arabesques sont omniprésents, représentant l’ordre et l’infini. Ces éléments se retrouvent dans des fresques murales et des décorations peintes, souvent dans des palais ou des mosquées. Miniatures et enluminures : Bien que plus rares au Maroc, des styles de peinture miniature, influencés par le monde islamique plus large (notamment perse), se retrouvent dans des manuscrits historiques et religieux. L’influence amazighe sur l’art pictural Symbolisme ancestral : Les Amazighs privilégient les motifs symboliques liés à la nature, aux cycles de la vie et aux croyances spirituelles. Les peintures et décorations incluent des formes géométriques simples (triangles, losanges, zigzags) et des représentations stylisées d’éléments naturels (soleil, lune, montagnes). Le "Yaz" (ⵣ) : Symbole de liberté, utilisé dans l’alphabet Tifinagh. Le triangle : Associé à la féminité et à la fertilité. Le cercle : Représentation du cycle de la vie et de l’éternité. Couleurs vibrantes et naturelles : La palette de couleurs amazighe privilégie des tons naturels : rouge ocre, jaune et noir, issus de pigments minéraux. Le Rouge : Symbolise la force, l'énergie vitale, et parfois le sacrifice. Utilisé pour rappeler le lien avec la terre et le sang, il peut aussi représenter la résistance et la protection. Le Vert : Évoque la nature, la fertilité, et l’espoir. Représentation : Souvent associé à l’agriculture et à la prospérité, ce qui est essentiel pour les Amazighs vivant en milieu rural. Le Bleu : Représente le ciel, la spiritualité, et la liberté. Représentation : Associé à l’immensité et à l’harmonie, rappelant l’importance du ciel dans leur environnement. Le Jaune :Représente le soleil, la lumière et l’éternité. Représentation : Rappel du désert et de l’énergie solaire, qui sont cruciaux dans la vie quotidienne. Le Noir : Symbolise le mystère, la protection et parfois la rigueur. Représentation : Associé à la profondeur et à la stabilité. DJO MPUTU, LA FEMME BERBÈRE DE MPUTU, 2022. Avec l’arrivée des Français et des Espagnols au début du XXᵉ siècle, marquée par le protectorat (1912-1956), l’art marocain a connu une importante transformation, influencée par l’introduction de nouvelles techniques et styles. Plusieurs éléments ont marqué cette période : La peinture de chevalet : Ce style, jusque-là peu répandu, a progressivement gagné en popularité parmi les artistes locaux, influençant la manière dont ils abordaient la peinture. Il a permis une approche plus personnelle et plus libre de l'art, distincte des traditions artistiques locales. Les écoles des Beaux-Arts : Fondées à Tétouan et à Casablanca, ces écoles ont été des lieux essentiels pour la formation des premières générations d'artistes marocains modernes. Elles ont introduit des méthodes académiques européennes tout en préservant certaines spécificités culturelles locales, créant ainsi une dynamique d’échanges artistiques enrichissante. Le contact avec les orientalistes européens : Des peintres tels que Jacques Majorelle, ainsi que d’autres artistes orientalistes, ont joué un rôle crucial dans la représentation du Maroc et de ses paysages. Bien que leur vision soit parfois marquée par une approche exotique, elle a ouvert la voie à une réflexion plus profonde sur la manière dont l'art occidental perçoit et représente le Maroc, et a incité les artistes marocains à repenser la question de la représentation picturale de leur propre culture. L’art marocain moderne a continué à se développer sous l'influence de courants internationaux tels que le cubisme, le surréalisme ou l'abstraction. Cette période a vu émerger des artistes tels que : Mohamed Melehi (1936-2020) était un peintre, graveur, designer et enseignant marocain, reconnu comme l'une des figures de proue de l'art abstrait arabe. Il a cofondé l'École de Casablanca avec Farid Belkahia et Mohamed Chabâa, un groupe avant- gardiste qui a radicalement remis en question l'abstraction cosmopolite et la pédagogie artistique dans le contexte des influences coloniales. Son travail intègre des motifs décoratifs du Moyen-Orient et des formes fluides qui génèrent des rythmes parallèles ondulants, établissant un dialogue entre l'art traditionnel marocain et l'abstraction des années 1960 s. Chaïbia Talal Chaïbia Talal, bien qu’autodidacte, est l'une des figures les plus marquantes de l'art pictural marocain moderne. Émergente dans les années 1950, elle incarne la transition vers une expression plus libre et spontanée de l'art. Influencée par le folklore marocain et par son propre vécu, Talal adopte une approche primitive et naïve, mais d'une grande puissance expressive. Son travail se caractérise par l'utilisation de couleurs vives et par un style direct, qui puise dans les traditions populaires et les symboles culturels du Maroc. QUI ÉTAIT CHAIIBIA TALAL ? « Rien ne me destinait à la peinture, si ce n’est ce rêve que je fis à l’âge de 25 ans et qui me disait : Lève-tôt et peint ». Surnommée La paysanne des arts , Chaïbia Talal est une figure majeure de l’art moderne au Maroc et à l’étranger. Cette autodidacte originaire d’El Jadida a marqué le paysage artistique marocain à travers ses œuvres humanistes et illuminées. Elle fait parti des précurseurs du style moderne né en Europe en 1945 grâce à Appel, Corneille et Constant, et fait partie de l’école de peinture brut. Veuve et mère de famille à l'âge de 15 ans seulement, Chaïbia a un parcours atypique. Encouragée par son fils Lhoucine pour se lancer dans la peinture, Chaïbia a vu ses œuvres exposées dans les plus grandes galeries du monde. « Au Maroc, ce style Art brut se fait encore trop rare. Seule ma mère Chaïbia faisait partie de cette école prestigieuse, qui a connu et connaît encore une grande audience internationale». Lhoucine Talal L’écrivaine et sociologue marocaine Fatema Mernissi a exprimé dans une lettre adressée à la peintre l’admiration qu’elle porte pour elle. En voici quelques extraits: (…) Je vous admire, parce que dans une société programmée pour humilier la femme, vous avez déjoué les plans et démonté les mécanismes: sans préméditation sans arme, la quête de la dignité devenant le réflexe le plus naturel de survie, de vie —avec ou sans diplômes. (…) Je vous aime, Chaïbia, parce que vous réveillez notre conscience, non pas.avec les grandes trompettes des militants, mais avec votre succès, votre authenticité. Vous aimez ce qui est différent : pour mieux refléter ce qui est intérieur. Vous êtes ouverte à l’Occident, vous aimez les Français, les Américains….) CHAIBIA TALAL, LA CÉRÉMONIE DE MARIAGE, 1983. Étude d’une œuvre Analyse collective d’une œuvre de Chaïbia Talal. Questions : Quels éléments marocains retrouvez-vous ? Quelle émotion ou message l’artiste cherche-t-il à transmettre ? Comment percevez-vous la modernité dans cette œuvre ? QU’EST CE QUE L’ART CONTEMPORAIN ?  L'art contemporain a une variété trop large pour être définie et un rythme trop rapide pour être cerné. Englobant tout, de la peinture à la photographie en passant par la sculpture et l'installation, il s'agit d'un terme générique désignant l'art d'aujourd'hui et de la période récente, plutôt que d'un style ou d'un genre. En termes simples, l'art contemporain désigne l'art d'aujourd'hui, créé aujourd'hui.  L'une des caractéristiques synonymes, ou peut-être symptomatiques, de l'art contemporain est son approche avant-gardiste. S'inscrivant dans la continuité des grands mouvements artistiques modernes qui ont façonné le XXe siècle, du concept du cubisme au style du surréalisme, l'art contemporain s'inspire également des idées postmodernes en cherchant à remettre en question le discours de l'art traditionnel. L’ART PICTURAL CONTEMPORAIN AU MAROC L’art pictural contemporain au Maroc, qui s’est particulièrement développé à partir des années 1980, se caractérise par une grande diversité de styles, de techniques et de thématiques. Cette période fait suite à l’émergence de l’art moderne et à l’indépendance du pays, et elle se nourrit à la fois des héritages culturels locaux et des influences mondiales. Les artistes contemporains marocains abordent des questions variées, allant de l’identité et de la mémoire collective à la critique sociale et politique, en passant par des préoccupations esthétiques novatrices. 1. Les influences globales et locales L'art contemporain marocain s'inscrit dans un contexte mondial où les artistes sont influencés par les mouvements internationaux tout en restant profondément ancrés dans leurs réalités culturelles et sociales. L’émergence de la mondialisation, des nouvelles technologies et des réseaux sociaux a ouvert la voie à de nouvelles formes d'expression, notamment la vidéo, la photographie et l'art numérique. Cependant, les artistes marocains continuent d’explorer les racines de leur identité culturelle, parfois en confrontant des éléments traditionnels à des approches plus modernes. Les thèmes principaux Les artistes contemporains marocains traitent une multitude de thèmes, parmi lesquels : L'identité et la mémoire collective : De nombreux artistes se questionnent sur leur propre identité, en particulier face aux défis de la mondialisation, de l'immigration et du métissage culturel. L'art devient un moyen de revisiter l’histoire du pays, la période coloniale, l’indépendance, mais aussi les bouleversements sociaux contemporains. La critique sociale et politique : Des artistes comme Mahi Binebine, Oussama ait ouahi ou Youssef Waboun utilisent leur art pour aborder des questions sociales et politiques liées aux inégalités, à la condition féminine, à la liberté d’expression et aux tensions entre tradition et modernité. L’esthétique et les formes nouvelles : Les artistes contemporains explorent une grande variété de formes, de l’art figuratif à l’abstraction, en passant par des pratiques hybrides. L'utilisation de supports non traditionnels (installations, sculptures, vidéo, performance) devient de plus en plus courante. Mahi Binebine, La Roue, Cire et pigments sur bois 195 x 130 cm, 2015. Oussama ait ouahi, le vide, technique mixte sur toile, 210 x 135 cm, 2021 Dialogue pictural entre le Maroc et le monde les œuvres emblématiques des peintres marocains dans le contexte de leur époque. l’impact du Maroc dans l’imaginaire artistique occidental. les interactions entre traditions locales et modernité dans la peinture. Les Pionniers de la Peinture Marocaine Ahmed Cherkaoui Ahmed Cherkaoui (1934-1967) est une figure centrale de l’art moderne marocain, dont l'œuvre fusionne les influences de la culture traditionnelle marocaine avec les courants artistiques européens. Formé à Paris, il s'inspire des symboles berbères et de la calligraphie arabe pour créer une esthétique unique qui allie abstraction et motifs culturels. Ses œuvres, marquées par une intense palette de couleurs et des formes organiques, expriment un dialogue entre modernité et héritage. Bien qu’il soit décédé prématurément, Cherkaoui a profondément influencé l’art marocain et demeure une référence pour les artistes contemporains cherchant à intégrer l’identité culturelle dans un cadre global. Ahmed Cherkaoui, Composition,Huile sur toile, 45 x 26 cm,1962 Farid Belkahia Farid Belkahia (1934-2014) une figure emblématique de l'art moderne marocain et un pionnier de l'exploration artistique qui valorisait l'identité culturelle locale dans un contexte contemporain. Né à Marrakech, il a étudié à l'École des Beaux-Arts de Paris et à l'Académie des Beaux-Arts de Prague. C’est un alchimiste des matières, un conteur des formes et un passeur entre les âges. Imaginez un homme qui quitte les toiles conventionnelles pour dialoguer avec le cuir, ce matériau vivant, qui respire et porte en lui l’âme des artisans. « Mon matériau de travail, le cuir, n’est pas un choix anodin. Il porte une mémoire, celle de ma culture et celle des hommes qui l’ont façonné. » Farid, dans son atelier, ne peignait pas seulement : il conversait avec le passé tout en sculptant l’avenir. ses œuvres, sont une empreinte, une cartographie de l’imaginaire marocain mêlé à une quête universelle. Des spirales, des lignes, des motifs : autant de fragments d’histoires qu’il puisait dans les zelliges, les tatouages amazighs, les étoiles du désert. Mais au-delà de l’esthétique, c’est l’homme, Farid, qui questionne. « Qui sommes-nous dans cet entre-deux ? Entre tradition et modernité, entre terre et cosmos ? » Farid Belkahia n’écrivait pas, mais chaque œuvre est un poème. Comme lorsqu’il disait : « La mémoire n’est pas qu’un souvenir. C’est une énergie. Elle nous traverse, nous construit et nous dépasse. » Farid Belkahia, Aube, pigment sur peau, 30 x 36 cm,1983 Le Maroc comme muse dans la peinture européenne L’orientalisme et le Maroc Les artistes orientalistes ont souvent mis en avant un Maroc mystérieux, empreint de sensualité, de mysticisme et d'une beauté étrange. Cette vision, bien que captivante, a également contribué à l’objectification et à l'exotisation des cultures marocaines, réduisant la complexité de ces sociétés à des représentations figées et décoratives. Le Maroc est vu à travers le prisme d’une Europe en quête de l'« Autre », ce qui a permis de renforcer les perceptions de supériorité occidentale tout en captivant l'imaginaire collectif. L'orientalisme a ainsi joué un rôle important dans la façon dont le Maroc a été perçu par l'Europe, créant des images stéréotypées et parfois irréalistes. L’artiste et écrivain français Eugène Delacroix, par exemple, disait : « L'Orient est un autre monde, un monde qui échappe à la compréhension de l'Occident, mais qui nous attire par sa beauté et son mystère. » Cette vision, bien que riche et séduisante, a souvent réduit les cultures orientales à des objets d’exotisme, occultant leurs véritables complexités. Le Maroc, en particulier, a été un sujet privilégié pour de nombreux artistes orientalistes, qui ont représenté ses villes, ses marchés, et ses paysages comme des lieux de beauté et de sensualité, contribuant à forger une image idéalisée de la nation marocaine dans l’imaginaire occidental. Cependant, cette représentation artistique a aussi influencé les artistes marocains eux-mêmes, qui ont parfois intégré des éléments de cette esthétique tout en cherchant à affirmer leur propre identité. L'orientalisme demeure ainsi un phénomène complexe qui continue d’influencer la perception et la production artistique du Maroc, tant en Europe qu'au sein du pays. Eugène Delacroix (1798-1863) est l’un des plus grands peintres français du XIXe siècle et un des chefs de file du mouvement romantique. Son art se distingue par une exploration audacieuse des émotions, une utilisation innovante de la couleur et une rupture avec les conventions académiques de son époque. Delacroix cherche à exprimer l’intensité des sentiments humains et la liberté artistique, souvent à travers des scènes dramatiques et des compositions dynamiques Lors de son voyage au Maroc en 1832, Eugène Delacroix fait une rencontre importante avec le sultan Moulay Abderrahmane. Ce dernier, impressionné par la réputation de l'artiste, lui accorde une audience et lui offre un accès privilégié à la cour et aux scènes de la vie quotidienne. Delacroix est profondément marqué par l’hospitalité du sultan et par l’atmosphère mystérieuse et exotique de la cour impériale marocaine. Au cours de ce séjour, Delacroix a eu l’occasion de rencontrer des figures de la cour, notamment des femmes, et de visiter des palais et des jardins, des scènes qui deviendront des sujets récurrents dans ses œuvres orientalististes. Le sultan Moulay Abderrahmane lui a permis de capter l'essence de la culture marocaine, influençant profondément des tableaux comme Les Femmes d'Alger dans leur appartement. Le séjour au Maroc et l’accueil du sultan ont ainsi renforcé l'influence de l’Orient dans l’œuvre de Delacroix et ont contribué à l'essor de l’orientalisme en Europe. Eugène Delacroix, Jeu de la poudre devant Meknes, aquarelle sur mine de plomb (15x27cm), 1832 Eugène Delacroix, Fantasia marocaine ou exercices militaires des marocains, huile sur toile (59x73cm), 1832 Eugène Delacroix, Charge de cavaliers arabes, huile sur toile (60,5x74,5cm), 1834 Eugène Delacroix, Cavaliers chargeant, aquarelle, 1832 Henri Matisse Henri Matisse (1869-1954), maître du fauvisme, a été profondément marqué par ses deux voyages au Maroc, en 1912 et 1913, qui ont transformé sa perception de la lumière et des couleurs. Fasciné par la clarté éclatante de Tanger et par la richesse des motifs marocains, il a puisé son inspiration dans les zelliges, les textiles traditionnels, l'architecture locale et la vie quotidienne. Des œuvres emblématiques comme "Vue de la baie de Tanger" capturent les paysages lumineux avec des aplats de couleur vibrants, tandis que "Zorah sur la terrasse" illustre son intérêt pour les figures féminines dans des décors riches en ornements. Ces voyages ont permis à Matisse de simplifier davantage ses compositions tout en intensifiant son usage des couleurs, insufflant une nouvelle vitalité à son art et marquant une étape clé dans son évolution artistique. Henri Matisse, Vue de la baie de Tanger, Huile sur toile, 46 x 55 cm,1912 Henri Matisse, Zorah sur la terrasse, Huile sur toile (1,15 x 1,00 m), Musée Pouchkine à Moscou, 1913 Jacques Majorelle Jacques Majorelle (1886-1962), peintre et décorateur français, est célèbre pour son lien intime avec le Maroc, où il s’est installé en 1917. Fasciné par les paysages, la lumière et la culture marocaine, il a développé un style unique mêlant orientalismes et modernité. Ses œuvres, comme ses vues du Haut Atlas ou ses scènes de vie quotidienne, se distinguent par des couleurs vibrantes et des compositions détaillées. Son chef-d’œuvre est le Jardin Majorelle à Marrakech, un espace luxuriant conçu comme une toile vivante où il a expérimenté le fameux "bleu Majorelle", une teinte intense et lumineuse. Ce jardin, devenu une icône de Marrakech, témoigne de son amour pour le Maroc et de l’influence qu’il a eue sur sa vision artistique et son héritage. Jacques Majorelle, Vue sur la Koutoubia, pastel sur papier, 37,5 x 46,5 cm, 1886 - 1962 HÉRITAGES CULTURELS ET MODERNITÉ, UNE PALETTE PARTAGÉE Les interactions entre traditions locales et modernité dans la peinture tissent un dialogue fascinant entre mémoire et renouveau, où les racines culturelles s’entrelacent avec les élans créatifs de leur temps. Sous le pinceau d’artistes comme Henri Matisse ou Jacques Majorelle, la lumière du Maroc, ses motifs géométriques, ses tissus chatoyants et ses paysages vibrants deviennent une matrice pour des explorations plastiques d’avant-garde. La rigueur des zelliges et l’ornementation des architectures traditionnelles se transforment en harmonies abstraites, tandis que les couleurs éclatantes résonnent avec une modernité universelle. De leur côté, des figures comme Chaïbia Talal ou Mohamed Melehi insufflent à ces traditions une vitalité contemporaine, réinventant les formes ancestrales à travers des compositions audacieuses. Ces œuvres, suspendues entre deux mondes, traduisent une quête d’équilibre entre l’héritage des origines et l’appel d’un futur à inventer, offrant à la peinture un territoire où les traditions se réinventent au fil des pigments et des visions. Merci de votre attention !

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