Chapitre 13: Acrosyndromes vasculaires et syndrome du défilé PDF
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Université libre de Bruxelles
Van De Borne Philippe
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This chapter discusses vascular acrosyndromes and the thoraco-brachial syndrome. It covers introduction, pathologies, and vascular acrosyndromes including their physiopathology. Details of permanent and paroxysmal acrosyndromes are present.
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DE B E Philippe Pathologie Cardiovasculaire édicochirurgicale Chapitre 13 : Acrosyndromes vasculaires et syndrome du défilé thoraco-brachial 13.1 Introduction Le terme d’acrosyndrome vasculaire désigne toute c...
DE B E Philippe Pathologie Cardiovasculaire édicochirurgicale Chapitre 13 : Acrosyndromes vasculaires et syndrome du défilé thoraco-brachial 13.1 Introduction Le terme d’acrosyndrome vasculaire désigne toute condition, primitive ou secondaire, vasospastique ou obstructive, qui induit des perturbations dans le réseau microcirculatoire des extrémités Leur prévalence globale est d’au moins 10 %. Pathologies associées Engelures (Chilblains, pernio) Gelures (Frostbite) et pré-gelures (Non-freezing cold injuries) Hématome digital paroxystique En fonction des circonstances de survenue, on distingue classiquement les acrosyndromes paroxystiques des acrosyndromes permanents. En fonction de leur expression clinique, on opposera les acrosyndromes liés à une vasoconstriction à ceux résultant d’une hyperhémie. Acrosyndromes vasculaires Physiopathologie Permanents Paroxystiques Vasoconstriction (hypodébit) Acrorhigose Phénomène de Raynaud Acrocyanose Livedo Vasodilatation (hyperhémie) Acrocholose Erythermalgies Paumes rouges (Ou érythromélalgies) 13.2 Acrosyndromes permanents 13.2.1. Acrorhigose Symptomatologie fonctionnelle se manifestant par une sensation de froid permanente des extrémités, sans signe clinique objectif évident, prédominant chez la femme jeune, indolore. ED - -3405 E 173 P B Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 1 3 Pathologie Cardiovasculaire édicochirurgicale DE B E Philippe Liée à une hypertonie sympathique sans substrat éthiopathogénique particulier. Affection bénigne, qui n’est pas une pathologie en soi. Parfois associée à des pathologies comme l’hypothyroïdie. 13.2.2 Acrocyanose Définition : cyanose et froideur permanente des extrémités qui sont souvent associées à une hyperhidrose (paume des mains, sole plantaire). Les symptômes s’accentuent à l’exposition au froid. Non douloureux. Physiopathologie : terrain vasomoteur exacerbé avec hypertonie sympathique et stase capillaro-veinulaire. Dans la plupart des cas, il s’agit d’une acrocyanose essentielle (ou primitive), femme jeune < 30 ans, mince, débute à l’adolescence. Il existe des acrocyanoses secondaires associées à des pathologies telles qu’une cryoglobulinémie, une maladie des agglutinines froides ou un syndrome myéloprolifératif. Présentation clinique : les mains et parfois les pieds sont bleu-violets, froids, oedémateux et moites. Cette symptomatologie est indolore mais parfois socialement invalidante. Diagnostic : il se fait sur base de la clinique et de l’anamnèse ; aucun examen complémentaire n’est habituellement requis sauf éventuellement une capillaroscopie s’il y a un phénomène de Raynaud surajouté (cf. ce paragraphe). Traitement Il n’existe aucun traitement médicamenteux susceptible d’améliorer l’acrocyanose. Il faut insister sur l’arrêt du tabagisme et la prévention contre le froid. L’hyperhidrose peut parfois être traitée par ionophorèse ou injections sous-cutanées de toxine botulinique. La sympathectomie endoscopique transthoracique doit être réservée à l’hyperhidrose palmaire sévère et invalidante. 13.2.3 Livedo Définition : érythrocyanose en réseau d’origine vasculaire réalisant un réseau complet en mailles de filet (« livedo reticularis ») ou dessinant des ramifications (« livedo racemosa »). Physiopathologie : Désoxygénation et/ou stase sanguine des plexus dermiques sous- papillaires car diminution du flux artériolaire et/ou résistance augmentée au flux veineux (vasospasme, obstruction, hyperviscosité sanguine, …) Plusieurs types de livedo sont décrits : 1 4 174 P B Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles ED - -3405 E DE B E Philippe Pathologie Cardiovasculaire édicochirurgicale Livedo physiologique (cutis marmorata : peau marbrée) o Apparaît à l’exposition au froid et disparaît complètement au réchauffement o Très fréquent chez le nouveau-né et les femmes ou jeunes filles à la peau claire o Plus fréquents chez les prématurés, peut fluctuer selon l’âge chez les trisomiques ou d’autres anomalies génétiques Livedo idiopathique o Livedo persistant sans cause sous-jacente o Typiquement chez les femmes entre 20 et 60 ans Livedo primaire o Diagnostic d’exclusion : apparition et disparition indépendamment de la température ambiante – pas de pathologie sous-jacente Livedo secondaire d’étiologie variable : vascularites leucocytoclasiques, périartérite noueuse, cryoglobulinémie, syndromes myeloprolifératifs, emboles de cholestérol, artériopathies oblitérantes, infections, syndrome de Sneddon (si associé à accidents vasculaires cérébraux), anticorps antiphospholipides, amantadine, coagulation intravasculaire disséminée,… Diagnostic : Il se base sur la clinique et l’anamnèse avec les éventuels examens complémentaires en cas de suspicion de livedo secondaire. Traitement : il n’y a pas de traitement spécifique du livedo sauf traitement de la cause si livedo secondaire. 13.2.4 Acrocholose Manifestation subjective des extrémités à type de brûlure sans objectivation clinique et sans substratum évident. Affection bénigne. Parfois associée à des pathologies comme l’hyperthyroïdie Exclure une neuropathie périphérique sous-jacente 13.2.5 Syndrome des paumes rouges (syndrome de Lane) Anomalie microcirculatoire constitutionnelle où les capillaires sous-cutanés sont disposés parallèlement à la peau au niveau des mains, réalisant un tableau permanent d’érythème palmaire. ED - -3405 E 175 P B Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 1 5 Pathologie Cardiovasculaire édicochirurgicale DE B E Philippe A différencier de l’érythème palmaire acquis (cirrhose, grossesse). 13.3 Acrosyndromes paroxystiques 13.3.1. Phénomène de Raynaud C’est le plus fréquent des acrosyndromes vasculaires. Définition : le phénomène de Raynaud se caractérise par une suite de symptômes : une phase syncopale avec blanchissement distal des doigts (et/ou des orteils) qui deviennent insensibles, habituellement suivie d’une phase asphyxique où les doigts se cyanosent et d’une phase hyperhémique avec apparition d’une érythrose douloureuse. Physiopathologie : elle n’est pas totalement établie. Est, le fait d’une augmentation de la vasomotricité distale, d’origine orthosympathique. Diagnostic : Il est essentiellement basé sur l’anamnèse car le phénomène de Raynaud est rarement observé au cabinet de consultation. Le diagnostic différentiel doit être fait entre phénomène de Raynaud primaire (= maladie de Raynaud) et phénomène de Raynaud secondaire (= syndrome de Raynaud). La maladie de Raynaud est bénigne alors que le syndrome de Raynaud peut être le témoin d’une pathologie grave sous-jacente. Principales différences entre Maladie et Syndrome de Raynaud Maladie de Raynaud Syndrome de Raynaud Primaire Secondaire Sexe 4F/1M FM Age de début Souvent < 40 ans Tout âge Distribution des Tous les doigts (sauf pouces) Certains doigts symptômes Bilatérale Parfois bilatérale Anomalies artérielles Absentes Parfois présentes 1 6 176 P B Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles ED - -3405 E DE B E Philippe Pathologie Cardiovasculaire édicochirurgicale Troubles trophiques Rarissimes Fréquents Labo Normal Parfois anormal Capillaroscopie Normale Parfois anormale Pronostic Excellent Dépend de l’affection sous- jacente Etiologies principales du syndrome de Raynaud Connectivites : la sclérodermie (>90% - CREST) est fréquemment associée à un phénomène de Raynaud et particulièrement la forme CREST (calcifications sous- cutanées, Raynaud, troubles de la mobilité oesophagienne, sclérodactylie, télangiectasies). L’association au lupus (10-45 %), au syndrome de Sjögren (33 %), à la dermatomyosite (20 %) et à la polyarthrite rhumatoïde (10-20 %) est moins fréquente. Artériopathies : Maladie de Buerger (cf chapitre artériopathies non athéromateuses), syndrome du défilé thoraco-brachial, emboles. Compression neurologique : certaines affections neurologiques peuvent se manifester par un phénomène de Raynaud ou symptomatologie similaire. C’est par exemple le cas du syndrome du canal carpien. Traumatismes : Des microtraumatismes répétés peuvent engendrer un phénomène de Raynaud par divers mécanismes : maladie des vibrations (travailleurs utilisant des engins vibrants très régulièrement : marteau-pic…), anévrisme cubital emboligène lié à certaines activités professionnelles ou sportives dans lesquelles le poignet est régulièrement soumis à des chocs répétés (carrossiers, joueurs de volley-ball, …) Médicaments : les bêtabloquants sont les médicaments les plus souvent incriminés dans la genèse ou l’exacerbation du phénomène de Raynaud. Les dérivés de l’ergot et certains antimitotiques (bléiomycine e.a.) sont aussi source de Raynaud. Troubles de l’hémorrhéologie : agglutinines froides, cryofibrinogénémie, cryoglobulinémie… Traitement du phénomène de Raynaud En cas de maladie de Raynaud, il faut essentiellement rassurer le patient, recommander une protection optimale contre le froid (chaufferettes, …) et proscrire le tabac s’il y a lieu. Les médicaments ne doivent être proposés qu’en cas d’invalidité importante. Dans ce cas, les antagonistes calciques (nifédipine,…) sont les plus efficaces mais les effets secondaires sont parfois gênants (bouffées de chaleur, œdème des membres inférieurs, céphalées). Le traitement sera étiologique en cas de syndrome de Raynaud. ED - -3405 E 177 P B Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 1 Pathologie Cardiovasculaire édicochirurgicale DE B E Philippe 13.3.2 Erythermalgies Douleur à type de brûlure et érythème des extrémités provoquée par la chaleur (« inverse du Raynaud »), paroxystique, aggravée par la position déclive (au coucher) Amélioration des symptômes au froid (immersion dans eau froide) ou en surélevant la partie atteinte Probablement liées à des troubles du métabolisme des prostaglandines et de l’agrégation plaquettaire Affection peut être idiopathique mais peut révéler une affection sous-jacente, particulièrement un syndrome myéloprolifératif (maladie de Vaquez, thrombocytémie essentielle) 13.3.3. Le syndrome du défilé thoraco-brachial Ce syndrome est assez rare et la forme neurologique en est la plus fréquente. Il regroupe l’ensemble des manifestations cliniques liées à la compression intermittente ou permanente des troncs du plexus brachial, de l’artère ou de la veine sous-clavière. La compression s’exerce dans l’espace s’étendant du défilé interscalénique au tunnel sous- pectoral, notamment entre le muscle sous-clavier et la 1ère côte (pince costo-claviculaire). Etiologies principales Causes congénitales : côte cervicale, méga-apophyse transverse au niveau de C7, anomalie d’insertion du muscle petit pectoral Causes post-traumatiques : cal post-fracture de la clavicule Causes fonctionnelles : toutes celles occasionnant un déséquilibre de la région cervico-scapulaire (épaules tombantes, faiblesse musculaire loco-régionale, …) Clinique Les symptômes peuvent être schématisés en trois grands cadres dont le point commun est l’apparition ou l’aggravation des plaintes soit à l’effort, soit lors de la surélévation répétée ou prolongée du bras. Compression artérielle : il peut s’agir d’un phénomène de Raynaud unilatéral, de claudication intermittente du bras, d’une ischémie de la main ou des doigts liée à une thrombose ou un anévrisme emboligène de l’artère sous-clavière. Compression veineuse : il peut s’agir d’un œdème de la main suite à une activité physique mobilisant les bras, d’une fatigabilité ou faiblesse positionnelle voire d’une phlébite (voir phlébite d’effort). Compression neurologique : il peut s’agir de paresthésies (surtout dans les territoires C8-D1), d’hypoesthésie, d’une atrophie des muscles de la main. Relevons que la douleur est le signe le plus fréquent du syndrome du défilé thoraco-brachial quelle qu’en soit l’étiologie. 1 8 178 P B Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles ED - -3405 E DE B E Philippe Pathologie Cardiovasculaire édicochirurgicale Diagnostic : se base sur l’anamnèse et l’examen clinique. Les manœuvres dynamiques peuvent aider au diagnostic. Lors de celles-ci, l’examinateur explore principalement l’axe artériel et recherche la disparition du pouls radial ou/et l’apparition d’un souffle sus-claviculaire : Position du garde-à-vous exagérée et inspiration profonde Manœuvre d’Adson : bras en position anatomique, rotation de la tête du côté homo- ou controlatéral à la lésion Manœuvre « mains en l’air » : bras en élévation-abduction coudes fléchis Manœuvre d’hyperabduction : bras en l’air ; exagérée, cette manœuvre est souvent positive physiologiquement. Traitement La prise en charge du syndrome du défilé thoraco-brachial n’est pas plus aisée que son diagnostic. Il faudra surtout corriger les facteurs favorisants (éviter le port de charges lourdes…) et prévoir une rééducation adaptée (musculation des releveurs des épaules avec ré-harmonisation du rachis cervical). La chirurgie reste un sujet de controverse : on proposera parfois une libération chirurgicale du défilé dans des cas bien sélectionnés. 13.4 Autres pathologies vasculaires assimilées aux acrosyndromes vasculaires. Trois pathologies vasculaires doivent être distinguées des acrosyndromes vasculaires. 13.4.1. Engelures Lésions cutanées inflammatoires chez des sujets exposés au froid et à l’humidité, sans qu’il gèle, pendant l’hiver ou le début du printemps C’est une pathologie bénigne, fréquente, souvent méconnue et confondue avec d’autres pathologies. Elles sont favorisées par un terrain familial, l’acrocyanose et le phénomène de Raynaud. Elles surviennent uniquement en hiver. L’engelure se caractérise par une plaque ou une papule oedémateuse, prurigineuse, algique, érythrocyanotique, siégeant aux orteils ou aux doigts ; elle peut parfois évoluer vers une ulcération évoquant un trouble trophique d’origine ischémique. L’évolution se fait par poussées de 2 à 4 semaines avec guérison spontanée progressive, au plus tard à la fin du printemps avec rechute possible les années suivantes. Plus fréquentes chez les femmes et associées avec un BMI bas Diagnostic clinique ED - -3405 E 179 P B Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 1 9 Pathologie Cardiovasculaire édicochirurgicale DE B E Philippe Il n’y a pas de traitement vraiment efficace. On recommande la protection contre le froid et l’humidité. Les vasoconstricteurs doivent être évités. Les antagonistes calciques (exemple : la nifédipine,…) peuvent être utiles. Excellent pronostic 13.4.2. Gelures et pré-gelures Gelures : vraie congélation tissulaire aigue ou progressive liée à une perte de chaleur suffisante pour causer la formation de cristaux de glace dans les tissus superficiels et profonds. Elles touchent essentiellement la partie distale des membres ou les zones exposées (nez, oreilles…) Rare en Belgique (personnes sans-abris, trekking en haute montagne, …) Sévérité variable Pré-gelures : s’observent quand les fluides tissulaires ne gèlent pas (souvent à env - 0,5 °C) mais quand la température reste basse pendant plusieurs heures ou jours Probablement souvent méconnues : histoire d’exposition prolongée au froid et à l’humidité sans possibilité de se sécher correctement ; au réchauffement, signes de neuropathie sensitive localisée au membre atteint Souvent peu de signes objectifs Cas sévères : hypersensibilité au froid empêchant les patients de travailler à l’extérieur avec parfois œdème, hyperhidrose et/ou douleurs chroniques Traitement : Gelures Réchauffement rapide (boissons chaudes, enlever les chaussures ainsi que les gants et chaussettes mouillés…) Aspirine 75 mg/j Ibuprofène 800 mg/j Iloprost, oxygénothérapie hyperbare, antibiotiques, chirurgie Lésions sans congélation Réchauffement lent Traitement conservateur comme pour les gelures 13.4.3 Apoplexie digitale ou hématome digital paroxystique: Hématome digital spontané lié à une rupture d’une veine de doigt. De début brutal, fort douloureux du fait de la survenue dans un territoire peu extensible, on voit apparaître un hématome qui disparaîtra spontanément en quelques jours. Il n’y a ni bilan ni traitement spécifique. 180 180 P B Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles ED - -3405 E