CM - Anthropologie - Lecture Notes PDF
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These lecture notes cover various topics in anthropology, starting with African religions in Brazil and the concept of 'Spirit possession'. It discusses ethnography, cultural differences, sorcery, psychopathology, and the social construction of mental illness, including trauma and schizophrenia.
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CM – Anthropologie Cours du 11/03 : Introduction Les religions d’origine africaine au Brésil 80 millions d’Africains qui ont été réduit en esclavage. Cette famille de religion au Brésil on les appelle les Candomblé, une famille cousine de Santeria à Cuba qui elle-même est une famille cousine de Vaud...
CM – Anthropologie Cours du 11/03 : Introduction Les religions d’origine africaine au Brésil 80 millions d’Africains qui ont été réduit en esclavage. Cette famille de religion au Brésil on les appelle les Candomblé, une famille cousine de Santeria à Cuba qui elle-même est une famille cousine de Vaudou en Haïti. Ce sont des religions initiatiques c’est-à-dire très hiérarchiques, il faut être initialisé durant 3 mois à travers des rituels : culte de possession exorciste, sacrifice animal, oracle. Dans cette religion, on cherche la possession. D’ailleurs, on ne parle pas de possession mais de manifestation. Ces populations s’expriment à travers le corps. L’anthologie fait référence à la nature des choses qui peuplent un monde : notre monde est fait d’humains, d’animaux et de plantes (en grande partie). Les gens avec cette culture brésilienne vont interagir quotidiennement avec des esprits, des divinités, des ancêtres. Le sacrifice montre que chacun a le même parcours vital. La force vitale circule entre les corps. Si on est malade on va puiser la force vitale ailleurs, et le vecteur principal de la force vitale est le sang. Les individus entretiennent des relations très étroites avec les esprits pour tenir l’ordre des maladies, du malheur, etc. L’objet de recherche : l’apprentissage de la transe de possession religieuse (Spirit possession) Thèse de la thèse : toute transe de possession repose sur une forme d’apprentissage émotionnel Que doit-on apprendre pour revêtir la peau des esprits, des divinités et des ancêtres ? Méthodologie : ֎ immersion ethnographique (18 mois) : vivre avec les gens ֎ observation des épisodes de possession et de son apprentissage ; prise de notes, croquis, photos, vidéos ֎ entretien approfondis avec les experts religieux et des “apprentis” possédés ֎ participation (en tant qu’initié et “possédé”) 2e terrain Les savoirs expérientiels de personnes atteintes de psoriasis : trajectoires thérapeutiques vécu → savoirs sur la vie avec la maladie maladie et réinvention de soi Associations de patients Objet de recherche : les savoirs expérientiels de personnes atteintes de psoriasis Savoirs expérientiels : connaissances développées à partir du vécu des gens Méthodologie : ethnographie (associations de patients) entretiens approfondis avec des patients et des professionnels de santé entretiens semi-directifs entretiens d'explicitation/micro-phénoménologiques Résultats : On a pu documenter la vie avec la maladie et en libérer 3 concepts : les étiologies vernaculaires les trois corps du psoriasis les logiques du soin Aujourd’hui, on a de nouvelles recherches en santé mentale : phénoménologie comparative et épidémiologie culturelle du trouble dissociatif de l’identité et de ses dispositifs thérapeutiques. Anthropologie Une tripartition classique : L’anthropologie : l’être humain en tant qu’espèce, physique/biologique, culturelle, sociale, cognitive. Objet : dans quoi vivent les gens ? On peut dire milieu, niche, dispositif, rituels afin d'organiser collectivement le monde dans lequel on vit. Ethnologie : sociétés traditionnelles, petits groupes humains (ethnies). Ethnographie : l’ethnographie dessine des méthodes → immersion (observation participante) – long terme. ֎ entretiens (directifs, semi-directifs, explication). ֎ photographie, vidéo ֎ protocoles expérimentaux in situ Il a y a deux grandes missions en anthropologie : ҂ penser la différence culturelle (comparaisons entre les psychologues et les acteurs selon les pays) ҂ Au- delà de ces différences, qu’est-ce qui nous rassemble ? Historiquement, l’anthropologie s’est construite avec l’étude de populations lointaines et fortement différentes de la nôtre. Aujourd’hui ce n’est plus exclusivement l’étude de populations lointaines mais l’étude de tous les petits groupes d’êtres humains à partir du moment où il y a une culture. Qu’est-ce qui fait culture ? La culture est l’ensemble des manières partagées de faire, de penser, d’agir, de bouger, de sentir, ressentir etc. au sein d’un groupe d’individus. Mais pour qu’il y ait culture il faut trois conditions : 1. Transmission de représentations : savoir-faire et savoir-être au sein d’une population 2. Distribution de représentations : savoir-faire et savoir-être au sein d’une population 3. Stabilisation de représentation : savoir-faire et savoir-être au sein d’une population Rappel Nous n’avons pas accès au monde tel qu’il est : souvent on confond le monde et ses représentations. Ex : les couleurs. On a entre 8 et 11 couleurs (de base) hors on sait que certaines sociétés en ont 3. Lorsqu'on voit un arc-en-ciel on voit 7 à 8 bandes de couleurs. Mais un individu d’une autre société va toujours voir 3 couleurs en regardant un arc-en-ciel. Notre cerveau a appris à catégoriser une longueur d’onde sous la catégorie rouge, orange etc. Notre cerveau reconstruit des bandes car il a appris à intégrer culturellement les couleurs. Nous n’avons accès qu’aux interprétations du monde de notre esprit-cerveau. Hors notre cerveau est caméléon et est lui-même le produit de notre culture. Notre cerveau est une éponge à apprendre. C’est le reflet de notre monde. Ces domaines d’apprentissages sont tous des produits de notre culture. Et donc une des questions de l’anthropologie est de savoir à quel point nous sommes le produit de notre culture et de notre environnement social ? Les sciences n’échappent pas à ce présupposé fondamental : nos représentations du monde (et des êtres qui le peuplent) est elle aussi une construction culturelle… savante, rigoureuse… mais construction tout de même ! Les entendeurs de voix sont des gens qui ont des hallucinations auditives mais qui refusent le diagnostic de schizophrénie et donc ils sont devenus un groupe d’influence qui collectivement refuse certains diagnostics et ils affirment qu’il était possible d’avoir des hallucinations sans pour autant être forcément schizophrène et qu’il était possible de contrôler ces voix. Trois constructions contribuent à nos représentations du monde : ֎ l’histoire individuelle avec sa trajectoire au sein d’une histoire familiale ֎ l’histoire culturelle avec sa trajectoire historique ֎ l’histoire phylogénétique Qu’est-ce que l’anthropologie ? Qu’est-ce qui fait culture ? Qu’est-ce qui fait que les individus partagent des représentations et des émotions ? L’anthropologie : l’étude des manières dont les humains construisent leur monde : un monde avec d’autres (humains et non humains) et doté de sens L’anthropologie c’est la science des natures humaines : il est dans la nature humaine que d’être culturel (J. Candau). Nous sommes des machines à apprendre des uns et des autres et donc il est dans notre nature que d’apprendre des uns et des autres, de devenir comme les autres. Définitions plus officieuses : l’anthropologie c’est l’art de la rencontre (avec l’altérité). Les anthropologues doivent porter une curiosité sur les gens qui sont différents d’eux. C’est la science du lien aux autres, humains et non humains (les liens qui libèrent). C’est l’art du déplacement perspective (J.-M. Benattar). C’est donc apprendre avec les gens et non pas travailler sur les gens. Il faut relativiser notre propre savoir et notre point de vue, il faut s’extraire de notre centrisme. Cela demande aussi de faire de sa propre culture une culture parmi d’autres. Aller voir ailleurs apporte des opportunités pour apprendre à passer du sens commun (notre compréhension ordinaire du monde) au regard scientifique… Comment ? ֎ La rigueur des concepts/théories = lunettes sur le monde, apprendre à voir et penser autrement ֎ La rigueur des méthodes 4 thématiques : 1. La sorcellerie et la psychothérapie la sorcellerie dans le Bocage Le désorcellement 2. La construction sociale de la maladie mentale TDI TSPT 3. La construction sociale de la guérison Bouddhisme et TSPT 4. La maladie mentale et la diversité culturelle la schizophrénie Sorcellerie et psychothérapie La sorcellerie dans le Bocage Normand La sorcellerie selon Jeanne-Favret-Saada Les mots, la mort, les sorts Dans les 2 ans de publication qui ont suivis en France, il a été publié à l'Université d’Oxford sous le nom de Deadly Words Terrain : Bocage Normand (France), fermiers, prêtres Thèse principale : la sorcellerie c’est de la parole mais une parole qui est pouvoir et non savoir ou information. Certaines paroles ont un pouvoir sur nous. On sait que dans le cancer et dans le rétablissement, la confiance dans les paroles du médecin joue énormément sur la qualité de vie du patient. La sorcellerie c’est une parole qui circule mais c’est une parole qui fait du tort : victime d’un mauvais œil, d’un sort etc. Méthode : prise et reprise. La distinction entre sorcery, magie instrumentale (qui requiert des actions le plus souvent ritualisées) et witchcraft, magie opérant sans l’aide de support matériel (= acte psychique résultant de la nature particulière du sorcier). Ex : le mauvais œil. →inopérant sur son terrain Le système sorcellaire Il y a deux présupposés sans lesquels le système (ou le discours) tout entier serait inintelligible : ҂ Force : les corps et les esprits sont pour eux. C’est ce qui fait circuler et ce qui circule dans une crise de sorcellerie = le principe dynamique du système ҂ Domaine : le champ d’investissement de cette force : tout chef de ménage est pourvu d’un domaine marqué à son nom et ce domaine est investi par la force de son possesseur. L’attaque de la sorcellerie (sur le long terme) : La sorcellerie c’est une manière de faire sens du malheur à répétition. Ils vont commencer à s’interroger sur la possibilité que ce soit un sort. C’est la répétition des atteintes qui autorise l’ensorcelé à se dire tel. Dans le village, quand la rumeur d’un sorcier présent circule, tout le monde évite tout le monde. Pourquoi ? Car le sorcier est celui qui est le plus proche de nous (famille, voisins…). Les individus cherchent continuellement à identifier la stratégie de leur interlocuteur (ethnographe y compris !). Acteurs impliqués Sorciers et désorceleurs : ils sont caractérisés par une force excédentaire. Ils sont soit victime de la sorcellerie de quelqu’un ou soit vous êtes le potentiel sorcier. Le sorcier est un être tel qu’il manque perpétuellement d’espace vital où investir sa force. C’est parce que le désorceleur possède aussi cette force magique qu’il est capable d’inverser le processus d’appel par le vide engagé par le sorcier. L’annonciateur : rôle fondamental dans le mécanisme interprétatif du diagnostic de la sorcellerie : la fonction de cet individu est précisément de permettre le lien, sur base de sa propre expérience entre une série de symptômes décelés chez un individu et l’éventualité d’une attaque de sorcellerie. La victime : celui qui est visé par le sorcier, c’est le chef d’une exploitation, qui est aussi le chef d’une famille : ses animaux, ses enfants etc. La notion de domaine propre englobe la survie (santé personnelle), la reproduction et la production (force de travail, moyens de production, animaux et terres). Cours du 11/03 : Jeanne Favret-Saada (1977) Terrain : Bocage Normand (France) Thèse principale : « La sorcellerie, c’est de la parole, mais une parole qui est pouvoir, et non savoir ou information » Méthode : prise et reprise La distinction entre « sorcery », magie instrumentale (=qui requiert des actions le plus souvent ritualisées) et « witchcraft », magie opérant sans l’aide de support matériel (≈ acte psychique résultant de la nature particulière du sorcier) → inopérante sur son terrain Le système sorcellaire 2 présupposés sans lesquels le système (ou le discours) tout entier serait inintelligible : « Force » désigne « ce qui fait circuler et ce qui circule, dans une crise de sorcellerie » ≈ le principe dynamique du système Le domaine ≈ le champ d’investissement de cette force : tout chef de ménage est pourvu d’un domaine marqué à son nom, et ce domaine est investi par la « force » de son possesseur La « force » et sa circulation Ce qui agit sur les individus, ce que le sorcier et le désorceleur ont en surplus : → ce qui les rend ontologiquement différents => La force magique : force excédentaire qui ne peut se satisfaire de son propre domaine : élargir son domaine au détriment d’autrui, sans passer par les médiations symboliques ordinaires tels que le travail, l’échange, le vol, etc Ce qui compose tout individu, et ce qui vient à manquer aux victimes, ce qui lui a été dérobé ≈ la force vitale L’attaque de sorcellerie (dans le long terme) « Guerre de l’usure. Seule la répétition des atteintes autorise l’ensorcelé à se dire tel » L’évaluation de l’attaque, tout comme celle du travail du désorceleur, est recherchée dans le potentiel bioéconomique des deux magiciens. Dans un tel système, les individus cherchent continuellement à identifier la stratégie de leur interlocuteur (ethnographe compris !), à « mesurer sa force, à deviner s’il est ami ou ennemi, s’il faut l’acheter ou le détruire. Comme n’importe quel locuteur, c’est un sujet supposé pouvoir (un sorcier, un désenvoûteur) ou ne pas pouvoir (une victime, un ensorcelé) » Le discours de la sorcellerie : Jeanne Favret-Saada s’intéresse directement à ce par quoi la sorcellerie agit effectivement, à savoir le « pouvoir réel du discours de la sorcellerie » (1999 : 299) Favret-Saada : Nullement impressionnée par la force supposée des sorciers, mais elle a eu l’occasion d’observer, dans diverses situations dramatiques, la force du discours de la sorcellerie Pour l’entr’apercevoir dans son propre corps, nécessité d’être « prise ». C’est à partir du moment où elle a elle-même commencé à être malade qu’elle a pu pénétré ce discours : elle s’est vue attribuer le rôle d’ensorcelée et, au fil des mois passés sur place, celui de désorceleuse. CM-2 : Déssorceler Quels enjeux de la parole sorcellaire ? « Enjeux mortel que comporte la conquête de tout position unique » = place sociale occupé par les différents protagonistes Conditions : Discours de la sorcellerie prend généralement place à la suite de la répétition du malheur biologique. Quelle est l’attitude des personnes ( paysans face à ce système d’accusations ? JFS distingue 3 attitudes ou positionnement face au discours de la sorcellerie : Ils sont convaincus de l’efficacité magique des désorceleurs et se conduisent désormais comme des condamnés à mort. Ironie et sarcasme S’ils peuvent tenir cette position, ils tiennent en échec la sorcellerie : des « conneries d’arriérés », « fous pour y croire ». Or, comme le montre JFS, la moindre faille dans leurs scepticisme transforme leur discours en système de défense; ils basculent alors généralement. ( suite + expliquer Affirment tout haut ne pas y croire mais leur comportement dément en permanence leurs paroles. → s’engagent dans « un processus de réinterprétation de leur histoire, jusqu’à ce qu’ils aient réussi à la présenter comme celle d’un ensorcelé ordinaire » [dégagé de toute « prise »]. → nécessité d’un recours à un désorceleur pour les en convaincre ou pour attester de l’authenticité de cette histoire remaniée. « La plupart de ceux qui sont accusés d’être sorciers parviennent, un jour où l’autre, à transformer leur histoire en celle d’un ensorcelé ordinaire ». Si l’on considère : 1. que les accusés sont innocents 2. qu’il est si difficile d’échapper au discours de la sorcellerie - les sceptiques ne parvenant à maintenir leurs certitudes que pour autant que la répétition du malheur les épargne => on est conduit à supposer qu’une proportion non négligeable des ensorcelés est constituée par d’anciens sorciers présumés. Point d’étape : Qu’est-ce que la sorcellerie ? D’après JFS, le sorcier est un support logique pour penser (compréhension) et manier (agir sur) le malheur biologique/l’infortune. Les conditions de son efficacité réside dans ce que l’on dit, ce que l’on ne dit pas, ce que l’on cache, dans les non-dit, etc. La croyance en la sorcellerie est-elle une histoire de « paysans arriérés » ? « On y croit toujours plus qu’on ne croit… » D’où vient cette idée de la poupée vaudou satirique? 1997 : Apparition aux EU (objets nés de l’imagination de deux écrivains: Lou Harry & Ngaire Genge): The VOODOO KIT: Inludes Voodoo Soll and the voodoo Handbook. 2007 : élection présidentielle: poupées représentant Bush et Clinton: aucune réaction de leur part; peu de succès des poupées. Le manuel vaudou d’un président (Favret-Saada 2009) 9 octobre 2008 : parution de deux coffrets satiriques sur les candidats de l’élection présidentielle : Nicolas Sarkozy. Le manuel vaudou et Ségolène Royale. Le Manuel Vaudou Description du coffret : « VOUS DÉTESTEZ NICOLAS SARKOZY PARCE QU’IL EST TROP DE DROITE ? Vous méprisez Nicolas Sarkozy parce qu’il n’est pas assez de droite ? VOUS VOUS DEMANDEZ S’IL RÉFLÉCHIT PARFOIS AVANT DE PARLER ? Vous pensez à prendre un second job pour sortir le tête de l’eau ? » Bien joué ! Vous pensiez élire un homme d’État qui réformerait le pays et ferait rayonner la France de par le monde ? Et pourtant, vous avez toujours autant de mal à boucler vos fins de mois et rêvez d’envoyer balader cette société qui ne profite qu’aux riches pour aller vendre des frites au bord de la mer. Respirez. Car c’est là que le manuel vaudou Nicolas Sarkozy entre en jeu. Grâce aux sortilèges concoctés par le spécialiste en sorcellerie Yaël Rolognese, vous pouvez conjurer le mauvais œil et empêcher Nicolas Sarkozy de causer davantage de dommages. Alors qu’attendez-vous ? Quand vous prendrez votre retraite à 87 ans, il sera trop tard. Agissez au plus vite et commencez à reconstruire le paysage politique français grâce au manuel vaudou Nicolas Sarkozy ». => Première réaction de NS: demande de cessation de diffusion adressée à l’éditeur. Argument: « droit exclusif et absolu du Président sur son image ». Refus de l’éditeur. Argument: « droit à la liberté d’expression » + demande de retrait totalement disproportionné. NS assigne l’éditeur en référé devant le tribunal de Grande instance de Paris La presse (toujours hésitante sur l’attitude à avoir) commence à s’intéresser à cette affaire…Ventes boostées: les 20.000 coffrets sont très vendus. 2 alternative juridiques s’offrent à NS pour le premier procès : « Offense au chef de l’état » « Outrage à une personne chargée d’une mission de service public » Ligne de défense de l’éditeur : « [d’une part,] nul ne peut prendre au sérieux ce procédé et croire qu’il prônerait un culte vaudou tel que pratiqué dans les Antilles; [d’autre part,] le manuel explique de façon volontairement fantaisiste et burlesque pourquoi et comment planter ces aiguilles, celles-ci n’étant jamais dirigées contre la personne même dont les traits sont reconnaissables sur la figurine, mais visant à bro- carder ses idées et prises de positions politiques, comme ses propos et comportements publics, en guise de protestation ludique et d’exutoire humoristique » Résultat du premier procès : Poupée vaudou NS ≠ atteinte à la dignité humaine Poupée vaudou NS ≠ attaque personnelle contre NS La représentation non-autorisée de son image s’inscrit dans les limites autorisées de la liberté d’expression et du droit à l’humour (même de mauvais goût!). Rmq ! : C’est la première fois qu’un président de la 5ème République perd un procès! Commentaire de la presse anglaise : « Panne du sens de l’humour chez le président français. Il menace d’un procès les fabricants d’une poupée vaudou qui lui ressemble. Qui, en tout cas, est à peu près de la même taille que lui » (The Observer, 26 octobre 2008) « Piquez Sarkozy et vous le retrouverez au tribunal. – S’il est une chose que Nicolas Sarkozy préfère au port de Rolex rutilantes ou au sauvetage de l’Europe de l’abîme financier avec une seule main, c’est une bonne bataille judiciaire à l’ancienne [...]. Les Français se sont accoutumés, non sans lassitude, à voir leur minuscule chef d’État balancer ses jouets par-dessus les bords de son berceau élyséen incrusté d’or [...]. Certains attribuent la manie judiciaire de “Sarko” à son goût pour l’affichage de sa vie personnelle, d’autres incriminent chez lui la rencontre d’un tempérament colérique avec un ego aussi haut que le mont Blanc » (The Guardian, 27 octobre 2008). Procès en appel Ligne d’attaque de NS : la poupée litigieuse dépasserait les limites autorisées de la caricature Or, pour que l’argument soit juridiquement recevable, l’avocat de NS doit démontrer que « les acheteurs du Manuel Vaudou…quand ils utilisent les épingles, blessent le corps, la personne de NS ». Dans le cas du Manuel, l’atteinte ne serait que psychologique. L’avocat de va chercher à démontrer que « l’atteinte à la dignité humaine constitue une limite légale à la liberté d’expression » : Résultat du jugement : => Faire apposer sur tous les coffrets, par les Éditions K&B, un bandeau rouge portant en titre, imprimé en caractères gras de 5 mm : INJONCTION JUDICIAIRE : « Il a été jugé que l’incitation du lecteur à piquer la poupée jointe à l’ouvrage avec les aiguilles fournies dans le coffret, action que sous-tend l’idée d’un mal physique, serait- il symbolique, constitue une atteinte à la dignité de la personne de M. Sarkozy ». Résultat des courses : « La croyance du tribunal dans la force magique ( ou son incapacité à distinguer un corps de son effigie ) sera désormais affichée sur des centaines de lieux de vente et des dizaines de sites internet ». Point d’étape n°2 : Morale de l’histoire du petit Sarkozy et de sa « méchante » poupée Vaudou : Approche cognitive de la sorcellerie : 2 approches : Selon l’approche cognitive préconisée par Fabrice Clément, la réponse à ces questions devrait être recherchée dans la manière dont fonctionne notre esprit cerveau. Il emboite alors le pas à une théorie modularise de l’esprit pour expliquer le phénomène sorcellaire : « Les différentes adaptations que le cerveau a connues peuvent être conçues comme autant de mécanismes formatés par la sélection naturelle pour résoudre les problèmes spécifiques posés par les régularités de l’environnement physique, écologique ou social » ( c’est moi qui souligne ) c’est pourquoi certains « modules » ont été sélectionnés au cours de l’évolution ( domaine propre ) vont pouvoir, dans des environnements culturels différents, être mobilisés pour d’autres tâches ( domaine actuel ). Sperber, 1996. Exemple : reconnaissance des vissages ( maquillage, masques, mime ) Usages culturels du module de reconnaissance de visage : Fabrice Clément va distinguer trois « modules » qui seraient préférentiellement mobilisés dans la sorcellerie : Module spécialisé dans la détection de probabilités Module spécialisé dans la détection d’évènements intentionnel Module spécialisé dans la détection de « tricheurs ». Les modules ou « outils mentaux » identifiés par Clément consistent en des pentes inférentielles. Pentes inférentielles = des « penchants naturel, propres au fonctionnement normal et généralement inconscient de notre esprit », = processus par lequel on tire une conclusion à partir de prémisses ou d’informations disponibles. => Ce serait l’activation simultanée de ces pentes inférentielles qui « tend à produire une interprétation en termes de sorcellerie ». 3 types d’interférences ֎ Interférence déductives : Principes généraux => conclusion spécifique Exemple : Il existe des personnes spéciales dotées de pouvoirs spéciaux => la personne devant moi est peut-être une d’entre elles. ֎ Interférences inductives : Observation spécifique => principe général Exemple : J’ai ressenti une sensation étrange et désagréable lorsque cette personne s’est approchée de moi => peut-être m’a-t-elle jeté un sort ? ֎ Interférence arbustive : Formulation de la meilleure hypothèse possible à partir d’observations Exemple : ma voisine se comporte bizarrement => elle est certainement celle qui m’a envoyé le sort. Les 3 modules ou pentes interférentielles de la sorcellerie Détection de probabilités : « Nous sommes spontanément sensibles, dans notre manière de catégoriser et de regrouper les évènements, à leur caractère répétitif ou, au contraire, à la nouveauté qui les caractérise. (Gigenzer 1997) ». La répétition (inhabituelle) d’évènements malheureux sera considéré comme « anormal » ou, du moins, engagera l’individu et son entourage dans une quête de sens: importance de la fréquence du malheur ( JFS et Evans-Pritchard sur la sorcellerie comme réponse au pourquoi de l’infortune ). Détection d’évènements intentionnels et d’êtres malveillantes : De nombreuses études en psychologie cognitive et psychologie du développement montrent une aptitude très précoce chez les bébés à distinguer dans leur environnement les actions intentionnelles des actions non-intentionnelles ou mécaniques. Les bébés accordent davantage d’attention et d’intérêt aux actions ayant pour source présumée un être intentionnel : ҂ Les bébés se montrent attentifs aux agents intentionnels clairement identifiés (regard, gestes, expression du visage), ҂ Les bébés attribuent spontanément une intentionnalité à des êtres nonintentionnels (interaction entre figures géométriques catégorisées comme des interactions entre êtres intentionnels ( Remack & Premack 2003 ). Les êtres humains seraient ainsi dotés d’un « outil mental » ou module particulièrement sensible à la détection d’actions intentionnelles. Justin Barrett (2000, 2004) appelle cet « outil mental » le Hypersensitive Agent Detection Device (HADD) : Le nombre d’évènements ( inhabituels, malheureux, répétitifs ) sont (spontanément ou facilement) interprétés comme étant provoqués par un être intentionnel ( Favret-Saada 1977 ). Le sorcier; selon cette perspective serait identifié à : L’être intentionnel à la source de certains malheurs Cet être intentionnel malveillant s’apparente, la plupart du temps, à un « prédateur » invisible (Bonhomme 2005) susceptible de nous atteindre et de nous faire du tort. Détection des « tricheurs/ (profiteurs ) » : Hypothèse évolutionniste d’une capacité à la coopération de notre espèce : Avantage certain en termes adaptatifs Hypothèse évolutionniste d’une capacité à repérer les « tricheurs », ceux qui représentent un danger pour la coopération : Hypothèse selon laquelle la culpabilité présenterait un avantage adaptatif dans la mesure où elle encouragerait la collaboration et pousserait à éviter les pratiques de tricherie ( le non- respect des « contrats sociaux »), Boyer 2001, Les théories du jeu ont démontré par ailleurs qu’il est avantageux pour les individus appartenant à un groupe social de s’engager dans des collaborations à plus ou moins long terme, Axelrod 1992. Conséquences possibles de ce module de « détection des tricheurs/profiteurs »: Les individus sont particulièrement sensibles aux inégalités interindividuelles dans les interactions impliquant des « transferts de bien » au sein d’un même groupe social ou entre des individus de statut social similaire, Evans-Pritchard 1937. ֎ L’inégalité des transferts de biens/répartition des richesses va alors éveiller la suspicion quant aux moyens ( illicites ) employés pour les obtenir ֎ L’individu concerné est certainement un « tricheur », quelqu’un qui s’est enrichi au dépend d’autres individus. Les individus dépourvus de richesses ou qui ont vu leur « domaine » décroître sont susceptible d’éprouver de la jalousie ou de l’envie envers ceux dont la richesse s’est accrue, qui seront considérés comme des « tricheurs potentiels », Le sentiment du « juste », dans cette perspective, correspond à une forme d’égalitarisme et d’ordre sociale au sein du groupe social d’appartenance. Conclusion L’activation de tels modules reposerait sur la connaissance et l’implication des individus dans des réseaux d’interactions sociales ( ce que Pascal Boyer ( 2001 ) appelle « l’information stratégique » - la même qui alimente les rumeurs, qui remplit les magazines people… ). Le rôle du désenvoûteur consisterait alors à « recoudre, tant bien que mal, des relation distendues ( et potentiellement porteuses de violence ) par la jalousie et la haine. Point d’étape n°3 : Les représentations sorcellaire prennent appui sur trois processus mentaux (modules/ pentes inférentielles) ordinaires. Ce serait l’activation simultanée de ces pentes inférentielles qui « tend à produire une interprétation en termes de sorcellerie ». Cours du 25/03 : Toute maladie est une question de perspective, l’objet d’un regard construit historiquement. Et il existe beaucoup de controverses : qu’est-ce que c’est ? Comment soigner ? Etc. « Le véritable voyage de découverte ne consiste pas à rechercher de nouveaux paysages à changer de regard. » - Marcel Proust Une approche constructiviste de la maladie mentale Dire qu’un trouble est mental c’est qualifier l’expérience. Cette maladie mentale est construite socialement. « Mon problème, c’est de savoir comment les hommes se gouvernent (eux-mêmes et les autres) à travers la production des vérités. Par production de vérités, je n'entends pas la production d’énoncés vrais, mais l’aménagement de domaines où la pratique du vrai et du faux peut être à la fois réglée et pertinente. » - Foucault, 1994 Il ne s’agit pas pour l’anthropologue ou le sociologue de trancher sur la véracité ou la fausseté des énoncés à propos du traumatisme. Quel groupe d’individus se sont mobilisés pour produire des énoncés comme vrais sur le TDI et le symptôme du stress traumatique ? L’élaboration d’un régime de véridiction, c’est-à-dire des lieux de pratique du vrai et du faux, se joue le plus souvent pour la maladie mentale, sur deux scènes parallèlement : celle de la psychiatrie et de la psychologie (histoire des sciences et de la médecine) - classification scientifique celle de la société : l’espace moral des sociétés contemporaines (anthropologie des sensibilités et des valeurs) - sens commun. La société c’est des associations de patients, des mouvements (féministes, LGBTQ+...), des scandales sanitaires, les réseaux sociaux etc. Que veut dire « construction sociale de la maladie » ? Dire d’un trouble, d’une maladie ou d’un syndrome qu’il est « socialement construit » ne signifie pas qu’il n’existe pas, qu’il est dans la tête des gens plutôt que dans leur corps ou qu’il relève d’une illusion collective. Un trouble, une maladie ou un syndrome est une réalité tangible, tant sur le plan physiologique que psychologique. Looping effect : comment l’expérience d’une maladie est en partie déterminée par son organisme, sa physiologie mais que ces troubles sont eux-mêmes conditionnés par les pratiques et les représentations que nous avons. Dire qu’une maladie est construite socialement montre deux choses : ֎ Que celle-ci relève d’une mobilisation de différents acteurs (professionnels de santé, militants, victimes etc) dont chacun est susceptible de produire ses propres vérités/croyances à propos du trouble, de la maladie ou du syndrome. ֎ Que celle-ci represente une restriction collective des valeurs morales, ce qui est considéré bien ou mal, de nos sociétés à propos du malheur, de la responsabilité, du destin etc. Ces valeurs morales sont dictées par la philosophie, les religions et les idéologies propres à une période historique donnée. L’approche constructiviste s’oppose aux réductionnistes substantialistes, qu’ils soient de nature psychanalytique (traumatisme = donnée psychique inscrite dans l’inconscient) ou organiciste/matérialiste (traumatisme = trace inscrite dans le cerveau - corrélats neuronaux de traumatisme). Elle ne remet pas en cause le bien-fondé des interprétations psychanalytiques et des observations neuro-anatomiques, mais elle en souligne le caractère construit : elles sont produites par des acteurs en un lieu et une période donnés, à travers des pratiques médicales, de recherche, de soi etc. - des régimes de véridiction. Cette approche cherche à comprendre les changements dans les savoirs, les valeurs et le rapport à la vérité relatif (dans le cadre de cours) à un trouble ou un syndrome (physique ou mental). Elle se veut attentive aux influences réciproques entre les dimensions individuelles et collectives d’un trouble, une maladie ou un syndrome (physique ou mental). Etude de cas numéro 1 : De la personnalité multiple au trouble dissociatif de l’identité (TDI) Le terme personnalité multiple est apparu pour la première fois dans une publication scientifique en 1896. L’histoire de ce diagnostic est fortement liée à un psychiatre français : Jules Voisin, un proche collaborateur de Charcot, qui décrivit les symptômes d’un patient, Louis Vivet, qui lui avait été confié à l’asile pour les hommes de Paris entre 1883 et 1885. Louis Vivet fut d’abord présenté comme un cas de grande hystérie chez l’homme avec dédoublement de la personnalité. A l’époque, les cas dits de dédoublement ne présentait pas de grand intérêt pour la psychiatrie mais Louis Vivet fascinait Jules Voisin, notamment parce qu’il présentait – L’hystérie avant Charcot : livre : la possession de Loudun le livre : les convulsionnaires de Saint Médard L’hystérie est d’abord décrite comme une histoire de femmes, un maladie de femmes et une pathologie de la matrice (l’utérus). C’est Charcot qui découvre que l’hystérie est un trouble au niveau psychologique. Revenons à Louis Vivet et la personnalité multiple : il présentait pratiquement toutes les sortes de souffrances corporelles connues dans le langage de l’hystérie de la fin du 19e siècle. En 1885, il va s’échapper de l’asile pour les hommes de Paris. Il est très vite retrouvé et confié aux soins du Dr Hippolyte Bourru à l’hôpital militaire de Rochefort. Bourru va décrire un phénomène entièrement nouveau dans les annales de la psychiatrie : Vivet avait 8 états de personnalité distinctes. → le langage de la personnalité multiple venait d’être fixé. Dans l’âme réécrite, l’historien des sciences Ian Hacking va montrer que la maladie se comporte de manière épidémiologique. Le caractère épidémiologique de la maladie semble directement corrélé à l’émergence de nouvelles pratiques thérapeutiques. L’émergence de nouvelles pratiques thérapeutiques dépend étroitement de l’évolution des sciences et des théories de la mémoire et du trauma. Le looping effect est l’influence réciproque des pratiques, des représentations et des expériences de la maladie mentale/psychique qui varie aussi selon les lieux et les époques. Quelques exemples de thérapies : ֎ La métallothérapie : en cas d’anesthésies, contractures ou paralysies dites hystériques localisées d’un côté du corps, il était possible de déplacer les symptômes de l’autre côté du corps. ֎ La méthode de Luys : cette méthode consiste à transférer à l’aide d’aimants les symptômes d’une personne hystérique dans un autre corps ֎ Bourru mit au point une méthode qui consistait à envelopper des drogues dans du papier ou de l’alcool dans de petites flasques qui étaient mises en contact avec la tête du patient pour qu’elle soit efficace sans l’intégrer. ֎ Autres comme presser les testicules ou caresser le crâne. L’académie de médecine s’en mêle et aucun des résultats escomptés de ces différents traitements n’a pu être produit. Ian Hacking qui se pencha sur un regard historien sur le cas de Louis Vivet arrive à la conclusion suivante : (diapo moodle) Malgré ces critiques, l’ouvrage sur Louis Vivet publié par Bourru et Burot en 1885 inaugura un nouveau langage pour qualifier la personnalité multiple. Les médecins de Vivet créèrent l’espace conceptuel nécessaire à l’idée de multiplicité. Dans les décennies qui suivirent, le langage psychiatrique de la personnalité multiple – TDI et DSM DSM V : 5 syndromes dans la classe des troubles dissociatifs dont le trouble dissociatif de l’identité. Il y a des précision sur ce qui distingue les différents troubles dissociatifs On y note des signes de perturbations de l’identité davantage spécifiés : l’amnésie peut être sélective ou généralisée à l’identité et à l’histoire du sujet. = souffrance ou altération de fonctionnement Quelle leçon tirer de ce premier exemple issu de l’histoire de la psychiatrie occidentale ? Le fait que ses médecins se livraient à des expérimentations douteuses d’un pdv scientifique ne signifie pas que ce dont a souffert Louis Stress Post-Traumatique Le traumatisme Qu’est-ce que c’est ? C’est l’origine et l'expression d’une souffrance et une catégorie sans cesse réinventée de la santé mentale Double généalogie C’est une entité psychologique de la psychiatrie nord-américaine. Elle fait moral ou clé d’interprétation du monde contemporain (à la lumière des économies morales et des subjectivités politiques). La double généalogie du traumatisme ֎ généalogie savante : la psychiatrie ֎ généalogie morale : jugements de la société Il y a beaucoup de débats théoriques autour des usages pratiques : expertise médico-légale et médecine coloniale On porte un regard sur le malheur et les malheureux (soldats, ouvriers, rescapés de camps, etc). Le travail collectif par lequel une société définit ses valeurs, ses normes et qui s’incarne dans des subjectivités particulières : histoire de mentalité La naissance du trauma Jean-Martin Charcot (fin 19e) - substantialisme organiciste Les premières pratiques sociales du traumatisme : accidents de train = troubles neurophysiologiques suite à des commotions, indemnisation des blessés. entrée en scène de l’expertise psychiatrique légale = hystéro traumatisés puis sinistrose (1907-1970) : catégorie clinique qui concentre les préjugés sociaux du moment, inspire le mépris et distille le soupçon : se soustraite au travail pour les ouvriers, ne pas retourner au front pour les soldats… Simple variante de la névrose traumatique elle-même assimilée à l’hystérie. Névroses de la revendication, mauvaise foi des personnes a Cours du 01/04 : CM4 - La naissance du trauma (récap) Construire socialement sa maladie La maladie du TDI se soigne selon les théories de mémoire Stress post traumatique Genèse Hystérie / Névrose Milieu ouvrier Contrairement au TDI, ce n'est pas l'évolution de connaissance scientifique qui fait évoluer les diagnostics mais plutôt les valeurs de la société. La conception du trauma repose sur l'évolution des valeurs de la société. Guerre 14/18 Chantiers de chemins de fer répétés mais sur les soldats cette fois-ci. Exaltation de l'idéal patriotique / héroïsme radical VS Réalité quotidienne : soldats dans la peur, noyés dans l'ivresse comme seul échappatoire. Solitude des soldats coupés du monde, peur de se battre, mourir au front. Certains sont trauma au front donc quand ils sont blessés on les soigne mais on les soigne pour les renvoyer au front. Dans un tel contexte, l'évacuation sanitaire est la seule alternative. Certains soldats se blessaient volontairement. Les médecins décident du sort immédiat des blessés. = chasse aux sorcières (qui méritent de retourner sur le front et qui est inadapté à combattre = décidé par les médecins). = simulation : désertion psychique (soldats qui pleurent pour ne pas aller au front, instrumentalisation de la souffrance donc d'être confronté à sacrifier sa vie pour la patrie). En 1914, le paradigme de la scène psychiatrique est celui de la médecine légale (du travail) = sinistrose Opprobre/rejet de l'institution militaire pour la catégorie de névrose traumatique. Après la 2nd GM, les théories psychanalytiques vont tenter d'expliquer l'attitude des soldats. = modèle des accidents de travail et expertise des névroses traumatiques par les services de l'armée = rendre compatible le modèle issu de la psychiatrie légale du monde de travail. Ces tournures inquisitoriales (plutôt que compassionnelles), chasse aux simulateurs, aux tâches, aux non patriotes... La guerre met à mal cette idée patriotique. On a un problème de valeur qu'il va falloir résoudre. La clinique psychiatrique dit qu'il faut soigner les gens. Des théories et pratiques vont être élaborées pour débusquer ces simulateurs pour en faire des héros de la guerre Le Dr Clovis Vincent va développer une théorie qui s'appelle le torpillage. Il dirige en 1933 le centre neurochirurgical de La Pitié-Salpêtrière à Paris. Il s'agit d'une rééducation émotionnelle des combattants traumatisés. En quoi consistent-ils ? Ce sont des chocs électriques qui feront la part de ces combattants et les soigneront. = On torture : menaces, injonctions de guérison, contraintes psychiques, électrothérapie. = aveu de faiblesse, renoncement ) tout ce qui ferait obstacles à l'idéal patriotique, exprimer sa joie et gratitude d'aller mieux = objectif est de transformer les soldats les plus faibles en authentiques combattants Il y a des protestations dans les troupes. Le Dr est envoyé à Tours. Des gens hurlaient depuis l'hôpital, ce pourquoi on demande pourquoi les poilus sont torturés. Vision de la société, des gens comme à la fois ignorants et victimes de sentimentalisme. Un événement va changer cela : soit des événements isolés qui amènent des changements radicaux. 27 Mai 1916 : un zouave, Baptiste Deschamps, gravement handicapé (plicaturé) depuis Septembre 1914, doit se présenter au Dr Clovis Vincent pour un torpillage. Deschamps a connu de multiples hôpitaux, il a été déjà mainte fois électrocuté, refuse le traitement du Dr. = bagarre entre 2 hommes Baptise Deschamps a été déféré en Conseil de guerre. Deschamps risque la peine de mort. Il sera condamné à six mois de prison avec sursis. = certains verront l'émergence d'un nouveau droit : droit du patient à disposer de son corps. Jusqu'en 1916 ce n'était pas un droit. Ce droit est une conquête sociale. = rappel l'affaire Dreyfus L'entre-deux guerres Plus un modèle mais trois : 1. Modèle psychanalytique : théories de Freud qui se diffusent dans la société. L'hystérie et la névrose de guerre ne sont plus des maladies honteuses. La cause des névroses doit être cherché dans l'inconscient des soldats, la souffrance qui s'exprime doit être cherchée là où ils n'ont pas accès (refoulement). A partir de 1930 les corpus freudien devient une des réfs principales 2. Médecine légale (reste totalement imperméable aux théories freudiennes) : disqualification des traumatisés et suspicion de leur personnalité, assimilation entre névroses traumatiques, sinistrose et hystérie. Deux groupe : les ouvrier victimes d'accidents de travail & les indigènes des colonies françaises (musulmans d'Afrique du Nord) et noirs 3. La psychiatrie coloniale naissante : l'importation de la médecine légale dans les colonies d'Outre-Mer. Médecins militaires reconvertis dans le civile & héritage militaire de la médecine légale. Culturalisme & Racisme des cercles médicaux : faiblesse de caractère, égoïste, tares débilitantes, défaut de sens civique etc... (préjugés suite à des accidents de travail). L'après Shoah En 1946, la souffrance des soldats psychologiquement détruits par la guerre n'évoquent plus l'idéal patriotique ou l'héroïsme de guerre, mais plutôt un pâle reflet de la réalité de la guerre, qu'il fallait impérativement dissimuler. On est plus sous l'idéal patriotisme, mais on est sur la honte de la destruction psychique qu'a induit la guerre. Faut-il alors indemniser les soldats ? Plutôt qu'indemniser, il est nécessaire de soigner : une indemnisation trop précoce au titre de victime de guerre interdirait toute amélioration clinique = aux yeux des psychanalytiques, les traumas de guerre n'ont pas encore acquit leur statut de victime La mise en mémoire n'est pas immédiate ni simultanée de la découverte des camps mais progressive, via les livres de rescapés, des études historiographies, recueils de témoignages, productions cinématographiques, dispositifs de commémoration (délai indispensable entre un drame fondateur et la manifestation des symptôme). Pas seulement la guerre mais extermination massive d'une population : 6 millions de Juifs, entre 2000 et 500 000 roms, 200 et 300 000 personnes handicapés, les Slaves, les opposants, les témoins de Jénovah etc.. Point le plus extrême de la violence (drame fondateur) = personnes habitées d'une mémoire à la fois douloureuse et destructrice, ce qui résonne avec les théories Freudienne. La Shoah va amener sur scène l'inconscient, le refoulement comme modèle pour expliquer les traumas. Les théories sont présentent depuis 1920. Figures influentes : - Bruno Bettelheim (théories sur l'autisme) - Primo Levi & Robert Antelme (influencer et modifier le rapport au trauma) Syndrome du survivant : remplace le terme névrose traumatique pour décrire la symptomatique des victimes civiles Base pour une nouvelle conception de la notion du trauma : expérience traumatique vers le témoignage de l'indicible, expérience individuelle et subjective vers une représentation universelle de l'être humain. = traumatisme comme lieu d'un savoir spécifique du sujet sur lui-même et ses limites, de l'être humain et sur les limites de l'humanité = trauma comme constituant d'une mémoire de l'inacceptable, dont les survivants sont des gardiens Le trauma est à la fois le produit d'une expérience de l'inhumain & la preuve (d'une tentative) de résistance d'une humanité face à l'horreur. C'est à partir de cette conception que va pouvoir se généraliser la condition de victime (= condition pour la reconnaissance du SSPT). La fin du soupçon En 1980, paraît le DSM III Nouvelle entité clinique : le PTSD - Posttraumatic Stress Disorder Critères : - évênement stressant - Symptôme évidents de détresse (souvenirs envahissants, hypervigilance, évitement, plus de six mois, emoussement affectif avec implications sociales) Nouveauté par-rapport aux conceptions antérieures : 1er critère = événement stressant : - vrai pour n'importe quel individu - Événement déclencheur suffisant à lui seul - Plus de doutes sur la sincérité du traumatisé - On ne s'interroge plus sur les motivations éventuelles Deux scènes : - scène militaire américaine dominé par les vétérans Américains - Scène sexuel dominé par les féministes américaines Scène féministe : - début des années 1960 : modèle idéal de la famille américaine - Nouvelle utopie du bonheur : résidence privée, voiture, électroménager, centres commerciaux, télévisions, etc - Nouvelle espace où les femmes jouent un rôle central : épouses aimantes et mères dévouées = les féministe américaines (Betty Friedan : prendre ce modèle comme cible et Florence Rush dénoncent le silence de la doxa psychanalytique & lève le voile sur les abus sexuels des enfants) Freud y aurait participé en privilégiant la théorie du fantasme sous la pression de la bourgeoisie viennoise : alors qu'il fut un des premiers à reconnaître l'étiologie traumatique de l'hystérie (notamment dans les abus sexuels). L'abus sexuel de l'enfant devient la marque de la domination masculine. = on parle alors de survivantes de l'inceste = glissement entre l'expérience traumatique et le témoignage de l'indicible = Affronter un déni massif (des autres, des témoins et des victimes). Les féministes malgré leur attaque contre le silence des psychiatres et psychanalystes (s'adressant à eux pour qu'ils deviennent les porte-paroles écoutés et influents des femmes abusées). Peu de support : - pas de preuves nécessaires - Attachés à l'étiologie psychologique du trauma (fantasme du désir incestueux) - Attachés à l'épreuve de la narration traumatique (moyen thérapeutique = réticence des psys à attester à la réalité sur la place des abus sexuels Il s'ensuit dans les années 1970 une vague anti-psychanalytique : les psychiatres lui reprochent un défaut intrinsèque de scientificité. = l'opinion voit dans la psychanalyse un instrument de contrôle social. En réponse, l'APA (EU) entreprend de rénover sa classification de troubles mentaux - Robert Spitzer : débarrasser la psychiatrie des hypothèses classiques non scientifiquement prouvées - Démarche purement descriptive du DSM III Trans cognitive auto induite : se mettre en état de trans sur commande (aujourd'hui c'est une thérapie). Volonté d'exhaustivité : assurer une meilleure couverture sociale des maladies mentales (auprès des assurances) Redéfinir la maladie mentale en dehors de tout jugement moral. 1ère victoire importante en 1973 : élimination de l'homosexualité dans le DSM Apparition du SSPT: - abandon de la dénomination névrotique - Abandon du soupçon - Événement traumatique devient le facteur étiologique unique : = rencontre les attentes des associations de victimes Trauma = réponse normale à une situation anormale : retrouver l'événement déclencheur et diagnostiquer une symptomatologie typique RMQ: Au moment d'établir cette définition, aucune donnée d'ordre scientifique ne permet d'accorder à l'événement traumatique le statut d'agent étiologique unique. Réticences de l'Administration des vétérans du Vietnam : tous les vétérans ne souffrent pas de SSPT (ou Post Vietnam Syndrome) & le remboursement de tous les anciens combattants s'avéraient trop onereux. Les activistes, par contre, y trouvèrent un double bénéfice : - compensation financière S'agit-il de monstres assoiffés de sang ou d'hommes ordinaires placés dans une situation exceptionnelle? = quotidien avec violences extrêmes et peur de la mort - Hyper vigilance Découvertes de cadavres Isolement du reste du monde Groupe = compagnons inséparables Individus capables des pires brutalités envers l'ennemi (déshumanisé) Le trauma comme trace d'une humanité Hommes ordinaires dans des situations exceptionnelles que l'on doit soigner. Bénéfice du doute en les créditant du reste de l'humanité. Soldats responsables de leurs actes (= coupables) + Victimes de guerre + Témoins de ce que la guerre peut produire = SSPT est indépendant de toute réprobation morale Il en irait de même du traumatisme (objectivation de la souffrance). Les expressions atrocity producing situation ou self traumatized perpetrator ou encore blessé psychique. Figure de la victime : coïncidence de la mémoire sociale traumatique (les horreurs de la guerre) avec le témoignage individuel de cette horreur. Rencontre entre les modèles théoriques & les usages sociaux du traumatisme : modèle théorique (caractère ordinaire de la victime et exceptionnelle) Usages Sociaux Cours du 08/04 La construction sociale de la guérison : Bouddhisme et TSPT Introduction : Culture et résilience "Si tu ne peux pas changer la situation, pourquoi t'en faire ? Si tu peux changer la situation, pourquoi t'en faire ?" — Dalaï-Lama Dans une perspective transculturelle, ce cours explore les liens entre croyances culturelles, pratiques religieuses et processus de résilience. Plutôt que de considérer la résilience comme un trait psychologique individuel, il s'agit ici d'en comprendre les dimensions sociales, culturelles et spirituelles, en particulier à travers l'exemple des réfugiés tibétains à Dharamsala (Inde). I. Dharamsala et l’exil tibétain 1. Contexte historique En 1949, la Chine envahit le Tibet. Cette occupation provoque l'exil massif de milliers de Tibétains. Le Dalaï-Lama fuit en 1959, suivis par plus de 85 000 Tibétains, principalement vers Dharamsala (nord de l'Inde). Cette migration donne naissance à une diaspora tibétaine active et organisée, avec un gouvernement en exil créé au début des années 60. 2. Violences et persécutions Destruction massive de temples bouddhistes, déportations, emprisonnements pour motifs religieux ou politiques. Les tortures vont de la violence physique à la violence psychologique (humiliations, profanations religieuses). Rapport du Haut Commissariat aux droits de l’homme : pratique systématique de la torture sur les moines et nonnes bouddhistes. 3. Répercussions Détachement de leur territoire, perte culturelle, séparation familiale : les Tibétains ont vécu des traumatismes collectifs majeurs. II. L’étude de Sara Lewis : comprendre la résilience 1. Hypothèse de départ De nombreuses études attestent d’une faible prévalence de troubles post- traumatiques chez les Tibétains en exil (TSPT, dépression, anxiété). Or, cette population a connu des événements hautement traumatisants. 2. Objectifs de l’étude Comprendre ce qui permet la résilience de cette communauté. Identifier les mécanismes culturels et religieux qui influencent leur rapport à la souffrance. 3. Dispositif méthodologique Recherche ethnographique sur 14 mois 80 entretiens (réfugiés, moines, médecins, aidants) Observations dans hôpitaux, monastères, lieux communautaires et politiques Diversité de profils : âges, genres, statuts sociaux, ancienneté dans l’exil III. Principes fondamentaux de la résilience tibétaine 1. Le lâcher-prise émotionnel Inspiré du bouddhisme tibétain : les émotions ne sont pas permanentes et ne doivent pas être entretenues. Émotions négatives = obstacles spirituels, perturbateurs mentaux qui alimentent le samsara. La parole sur le trauma (récit, mémorisation) peut fixer ces émotions et nuire à la paix intérieure. Importance de laisser passer ces émotions ("letting go") sans les nier pour autant. 2. La souffrance comme opportunité Le samsara est un cycle où la souffrance est inévitable. Chercher à l'éviter est futile. La souffrance est perçue comme un outil de purification karmique : elle peut servir de levier spirituel. La douleur devient porte d’accès à la sagesse et à la transformation. Cette vision dédramatise le malheur : il n’est pas absurde ou injuste, il a un sens. 3. La compassion comme technique La compassion n'est pas un sentiment, mais une pratique structurée : un outil de régulation émotionnelle. "Thinking broadly" : penser à ceux qui souffrent davantage permet de relativiser sa propre douleur. La compassion est aussi une manière d'élargir la conscience, de sortir de soi. Chez les adultes, le partage de la souffrance personnelle n'est pas valorisé : ça peut renforcer l'attachement au moi souffrant. 4. Le Lojong : entraînement de l’esprit Pratique centrale pour les Tibétains : un cheminement spirituel actif Objectifs du lojong : o Créer un esprit plus souple, adaptable (flexibilité mentale) o Déconstruire l’utilité des émotions négatives o Développer l’altruisme (faire passer les autres avant soi) Pratiqué d'abord dans les monastères, il s’est diffusé à l’ensemble de la population exilée IV. Maîtrise de l’intériorité : au-delà de l'expression des émotions Contrairement à la vision occidentale qui valorise l'expression émotionnelle, les Tibétains considèrent qu'elle peut entretenir la souffrance. Il s’agit ici de canaliser l’expérience émotionnelle et non de la réprimer ou la nier. Le malheur est déplacé du champ extérieur vers le champ de l’esprit : c’est notre manière d’interpréter qui détermine notre souffrance. Importance du contrôle mental pour préserver sa liberté intérieure, même dans les pires conditions (prison, torture). V. Perspectives croisées : bouddhisme et psychothérapies occidentales Psychothérapie occidentale : mise sur le "self-care", c'est-à-dire la prise en charge active de son propre bien-être. En contraste, la culture tibétaine valorise la décentration du soi : le bonheur vient de l’attention à l’autre. Citation-clé : "If you want to be miserable, think about yourself. If you want to be happy, think about others." Revisiter le trauma (comme dans certaines approches psychothérapeutiques) peut solidifier une identité souffrante et figer le récit. Conclusion : Résilience culturelle et interprétation Le lojong est un outil de transformation spirituelle qui replace la résilience dans une logique culturelle et dynamique. La souffrance n'est pas niée, mais intégrée dans une cosmologie du karma et une pratique de l'esprit. La résilience tibétaine repose sur trois piliers : 1. Esprit vaste (broad-minded) 2. Grande flexibilité mentale 3. Capacité à se décentrer La manière dont on interprète la souffrance peut être plus déterminante que la souffrance elle-même. « We are Buddhist, so unlike many others around the world, we were equipped to deal with suffering. » — Dolma, réfugiée tibétaine de 80 ans Cours du 15/04 La folie à l’épreuve des cultures L’exemple de la schizophrénie Difficulté à définir la schizophrénie : aujourd’hui il n’y a pas de marqueurs génétiques spécifiques. Il n’y a pas non plus de marqueurs neurobio (on ne peut pas regarder un cerveau et dire que l’individu est atteint de schizophrénie). Pas de symptômes uniques et spécifiques mais plutôt une combinaison de symptômes que l’on trouve dans d’autres conditions mentales. Selon Emil Kraepelin, la principale différence avec la bipolarité serait son évolution dégénérative. La schizophrénie empire. Mais il existe des formes de schizophrénie qui s'améliorent vers la quarantaine et la cinquantaine. On devrait parler des schizophrénies car il existe une multitude de sous-catégories de ce syndrome général. Il n’y a pas de trajectoire propre : pas de retour à la situation avant la maladie. Les hallucinations ne figurent pas parmi les traits identificatoires d’Eugen Bleuler, aujourd’hui considéré comme un des symptômes les plus importants. Présente depuis toujours ou qui aurait surgi au 19e siècle ? Est-ce une construction sociale ? Principaux symptômes reconnus (aujourd’hui) : symptômes positifs : décalage avec la réalité qui se manifeste par des délires (delusions), des hallucinations et un discours incohérent symptômes négatifs : retrait affectif manifesté par un visage et un ton de voix inexpressifs, décalage entre la cognition et les émotions, dysfonctions cognitives qui se manifestent dans la désagrégation de la vie de couple, de la vie professionnelle et sociale. = cause/décalage sévère et persistant avec la réalité. C’est une maladie présente partout dans le monde, et ça fait débat quand les gens s'interrogent sur la folie. Le taux d’incidence est de 1% de la population. 1,4 hommes pour 1 femme. Les anthropologues qui ont mené ces recherches sont des femmes. La schizophrénie serait plus présente en occident et plus caustique càd les formes occidentales de la schizophrénie sont les pires : les plus agressives, les plus violentes, les plus désespérantes. Objectifs : Comment la schizophrénie est-elle façonnée par son contexte social et culturel ? Qu’est-ce qui, dans ces contextes, modifie le cours de la maladie, ses conséquences, voire la structure même de ces symptômes ? Background culturel (18e - 20e) 18e - Benjamin Franklin, Jean-Jacques Rousseau : ce qui devrait être incriminé est l’idée du monde corrompu et décadent. 19e siècle : inégalités et sens d’une fragilité sociale, urbanisation rapide, conscience accrue d’autres manières de vivre à travers la colonisation (mythe du bon sauvage) 19e siècle - Emile Durkheim - Suicide : effritement du lien sociale et anomie, peuples premiers marqués par la cohésion et la solidarité, aliénation de la civilisation moderne, liberté des peuples premiers = conception romantique du contraste entre Eux et Nous. 20e siècle - colonisation : abandon du mythe du bon sauvage, persiste toutefois l’idée d’une fragilité psychique intrinsèque à la civilisation moderne. Premières ethnographies en santé mentale : CG Seligman (1929) - Tempérament - Nouvelle- Guinée : troubles psychiatriques sévères absents sauf chez les personnes profondément occidentalisées. MJ Field (1960) - Search for security - Ghana : reconnaissance de troubles psychiques sévères mais pas toujours connues comme tels localement. Interprétation sorcellaires. Années 30 : Margaret Mead : ils vont s'intéresser à la psychanalyse. Elle va étudier avec son conjoint à Bali les traits de personnalités à Bali qui est une ethnographie. Donc il y a une page avec des clichés et l’autre avec la réalité. C’est un phénomène de schizogenèse, la double contrainte : on nous place dans une situation où on a 2 choix, et quel que soit le choix il sera mauvais. L’enfant développe alors des troubles psychiatriques. Dans le social, on retrouve ce phénomène tout le temps, ce qui amène à une impossibilité émotionnelle. Le culturalisme dit que l’être humain est une page blanche sur laquelle les cultures vont pouvoir tout écrire, on écrit des choses différentes selon nos cultures. Ce qui fabrique les individus c’est la culture et le social. La culture va moduler comme un brouillon. Il y a quelque chose néanmoins quelque chose d’unique à chaque individu. La schizophrénie est une réaction au monde social et non une maladie. Reconnaissance de la réalité biologique mais critique l’existence de critères absolus pour considérer la personne malade et définir ce qu’est la normalité : relativisme culturel. Vision romantique selon laquelle nos schizophrènes seraient leurs chamanes. Georges Devereux, le père de l’ethnopsychiatrie était opposé à cette vision et soutenait au contraire que le chamane est une personne psychologiquement dérangée. Années 1950-1960 : Age d’or de l’approche psychanalytique Schizophrénie : résultat d’un conflit émotionnel : désir intense d’intimité et peur du rapprochement, peur du rejet, perte de confiance en l’autre, anxiété profonde… Résultat d’une relation pathologique : les mères sont pointées du doigt par les psychiatres comme responsables, elles délivreront à l’enfant un message contradictoire d’espoir L’enfant va alors avoir des maux de communication. Mouvement de l’antipsychiatrie : The divided self (Laing 1960) : les symptômes psychiatriques sont des tentatives raisonnables de communiquer son angoisse The myth of mental illness (Szasz, 1961) : il n’existe pas de maladie mentale dans le même sens qu’il existe des maladies telles que le cancer Histoire de la folie (Foucault, 1972) : psychiatrie moderne comme tentative de contrôler la vie subjective des individus. Rejet progressif de la psychanalyse par la psychiatrie : une étude, le plus gros pavé de l’histoire de la psychiatrie moderne de Rosenhan où il va présenter 12 patients et le patient aura les 12 symptômes. Donc ça va amener à une méfiance à l’égard de la psychanalyse. Il y a aussi un refus des assurances de rembourser des soins pour des conditions psychiques non ou mal identifiées. Le DSM-III : abandon du langage psychanalytique + de diagnostics référencés listes de symptômes : critères et non interprétations. Plus d’histoires personnelles des patients/contexte de l’apparition de la maladie Retour sur schizophrénie et chamanisme : Richard Noll va venir avec des propos plus nuancés entre schizophrénie et chamanerie. Depuis les années 30, les schizophrènes en occident sont des chamanes ailleurs. L’expérience chamanique est recherchée, le plus souvent prosociale (sauver des âmes, guérir) et en accord avec les attentes locales en termes de comportement. L’expérience de la schizophrénie est subie, induit de la souffrance pour celui qu’elle touche et son entourage et est en désaccord avec les normes comportementales attendues. L’exp du chamane est comprise comme un processus dissociatif et une pratique de transe non-pathologique Rmq : même si la relation entre dissociation et psychose reste complexe et ambiguë. Certains patients contemporains peuvent avoir recours à cette identité alternative. Labeling theories : théories de l’étiquetage maladie mentale comme déviation de la norme les normes diffèrent d’un groupe culturel à l’autre les personnes identifiées comme déviantes internalisent la désapprobation et le rejet des autres ils perpétuent ainsi le comportement stigmatisé (stigmate). → C’est la société et non le cerveau qui produit la maladie ! La maladie mentale n’est pas une simple violation d’une norme sociale d’un groupe particulier. La maladie mentale est un type d’affliction/souffrance psychique (donc souffrance organique). Années 1990 : la décennie du cerveau On observe les modèles bio-bio-bio de la maladie mentale : la schizophrénie est un cerveau qui est cassé, dysfonctionnelle vulnérabilité génétique = altération du cerveau = traitement pharmacologique plus de culpabilité de la mère mais fatalité biologique (bad luck) et modèle de la foudre plus d’influence du monde social Ce modèle ne donne aucun outil aux patients pour aller mieux. Années 2000 : la nouvelle épidémiologie sociale épigénétique : interaction entre les gènes et l’environnement quelque chose du social s’immisce en nous (under the skin) : ils transforment en profondeur l’expérience de la maladie psychique la schizophrénie et son rétablissement sont inégalement distribués au sein de la population Pourquoi ? Comment ? Background culturel (2000 et suivant) : Connaissances actuelles : la pauvreté, le racisme et certaines périodes de vie stressantes comme le mariage augmentent les risques de maladie mentale (psychose). Les maladies mentales sont attestées un peu partout dans le monde et surtout les changements induits par la modernisation / urbanisation semblent accentuer l’incidence et la sévérité de ces maladies. Existence de crises psychotiques temporaires avec rétablissement total - non-affective acute remitting psychosis. Beaucoup de cultures traditionnelles mettent l’accent sur le comportement des malades et non sur leur expérience subjective (ex : courir nu dans la rue VS hallucinations). Vers une ethnographie clinique Quelles conditions (sociales et culturelles) rendent les personnes plus vulnérables à la maladie ? Développer une ethnographie clinique : compétences ethnographiques bonne connaissance des méthodes cliniques Etudes de cas Diagnostic et identité I : I’m Schizophrenic ! How Diagnosis Can Change Identity in the United States (Tanya Luhrmann) John TL revient sur l’histoire de John (Sans Diego, EU) pour illustrer l’importance du diagnostic de schizophrénie ainsi que ses effets/conséquences dans un pays comme EU. Le diagnostic est important dans la mesure où : Il ouvre l’accès à des soins appropriés Il facilite la négociation de la place de la personne malade dans la société (malgré sa différence). Diagnostiqué très tôt, John va être suivi par différents psychiatres et va faire plusieurs séjours en hôpital psychiatrique : Le modèle médicale est une insulte envers ma personne. Dire que j’ai un cerveau malade ne me valide pas (en tant que personne). Un effet ou conséquence du diagnostic de schizophrénie est la stigmatisation et la réduction/appauvrissement de l’identité de la personne à celle de schizophrène. Dans l’ensemble, John va bien s’en tirer et il va devenir un porte parole du mouvement de rétablissement aux E.U : ce mouvement vise à dire que oui, il est possible d’avoir une vie sociale, une vie familiale malgré la maladie, ce que la psychiatrie contredit. John reçoit le prix de Mental Health Person of the Year. Mais son état se dégrade et il retourne en HP. Recovery Movement - Mouvement du rétablissement À l'initiative des usagers et survivants de la psychiatrie, le mouvement s’est développé à la fin du XXe siècle, particulièrement aux E.U. A partir du témoignage des patients, le mouvement met en lumière l’importance de l’autonomisation, du soutien par les pairs et de la lutte contre la stigmatisation. Des études longitudinales menées par l’OMS dans les années 1970 et 1990 ont également montré des taux de rétablissement + élevés que prévu au sein du mouvement chez les personnes atteintes de troubles psychiques sévères, renforçant ainsi là sa crédibilité Le mouvement vise à influencer les politiques de santé mentale et les pratiques cliniques en mettant l’accent sur l’expérience des usagers, le soutien communautaire et la promotion de l’autonomie. Veena et Anisha 2 soeurs dans la vingtaine issues d’une classe moyenne indienne AS montre comment en Inde les psychiatres dés-accentuent le diagnostic, càd qu’ils ne le communiquent pas nécessairement à la personne malade et aux familles. Le diagnostic le + fréquent est le problème mental. AS soutient que cette neutralité diagnostic permet de laisser les champs des possibles ouverts en n’enfermant pas la personne dans un label psychiatrique. En Inde, les familles cherchent à maintenir la personne malade à la maison et aménagent leur quotidien en fonction. Veena ferait partie (selon son psychiatre) des 50% de patients qui ne peuvent aller mieux. Mutisme, stupeur sévère, comportement répétitif, phase d’hyperactivité extrême, manie délirante. Veena a une sœur, Anisha, qui a aussi été diagnostiquée schizophrène. sa maladie s’est déclarée lorsqu’elle a déménagé dans la maison de ses beaux-parents et qu’elle et sa famille ont appris que son autre soeur a été brûlée vive dans l’incendie de la cuisine de ses beaux-parents Anisha est vue comme folle par sa belle-famille, elle est victime de violences domestiques Elle rentrera vivre chez ses parents = ses symptômes semblent être exacerbés par des facteurs psychosociaux. D’après AS, un enjeu important du diagnostic pour Anisha est que son diagnostic ne soit pas associé à celui de sa sœur. Le rétablissement est un enjeu non seulement médical mais également normatif : contrôler les symptômes les plus handicapants et remplir les fonctions et devoirs qui incombent à la position de chacun en société. Pour Anisha, il est attendu d’elle soit un membre actif de sa belle famille et une mère dédiée à sa famille. Elle a trouvé dans sa famille le rôle alternatif de celle qui prend soin de sa petite sœur au quotidien. En Inde, l’accent des familles est mis sur le comportement des personnages malades, et non sur la terminologie diagnostique (ni d’ailleurs sur la vie subjective des personnes malades). La neutralité diagnostique permet que la psychiatrie (son savoir, ses catégories) n'interfère pas avec les représentations locales et les moyens mis en œuvre pour faire face à la maladie. Violet Mère célibataire d’origine jamaïcaine, petite cinquantaine Plusieurs séjours en HP au Nord Londres, première hospitalisation il y a 20 ans La schizophrénie – 1. Le stress lié au racisme : discrimination à l’emploi, brutalité policières, politiques discriminatoires dans l’accès au logement, racisme ordinaire 2. Les inégalités sociales : désavantages soioéconomiques significatifs dans l’accès à la santé et à l’éducation de qualité, bataille perpétuelle pour une égalité de traitement et des opportunités auprès des institutions, sentiment de désillusion exacerbé des nouvelles générations (les plus touchées par le suicide et la schizophrénie). 3. La fragmentation sociale : communauté d’origine décrite comme cassée et perdue fragmentée. Désintégration des familles nucléaires et des réseaux de famille étendue : de plus en plus d’individus isolés → 4. L'expression émotionnelle propre à la communauté d’appartenance (community expressed emotion) – Violet interprète sa maladie ; comme une conséquence son parcours traversé par la perte, l’abus et l’exclusion