ABUS DE BIENS SOCIAUX ABS PDF
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ESLSCA University
2024
Moundir Akasbi
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This document is a course on financial misconduct (ABS) for MBA students at ESLSCA in 2024-2025. It covers topics like the abuse of corporate assets, conflicts of interest, and the responsibility of directors and managers.
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ABUS DE BIENS SOCIAUX ABS Cours de Moundir AKASBI ESLSCA - 2024-2025 ABS L'infraction ne peut être commise dans les sociétés de personnes, en raison du statut spécial des membres qui sont tenus d'une responsabilité personnelle et indé...
ABUS DE BIENS SOCIAUX ABS Cours de Moundir AKASBI ESLSCA - 2024-2025 ABS L'infraction ne peut être commise dans les sociétés de personnes, en raison du statut spécial des membres qui sont tenus d'une responsabilité personnelle et indéfinie. Elle concerne essentiellement : SA ; SAS ; SARL ; SCA ; SCPI… La jurisp. a exclu d’appliquer l’infraction alors que la victime était une société ayant son siège dans un pays étranger (Cass. Crim 3 juin 2004). Une société étrangère ne peut être victime que d’un abus de confiance. Présidents, administrateurs, membres du directoire et du CA, le liquidateur, directeurs de fait (anciens directeurs qui ont concervés des fonctions). Art. L. 241-9, L. 246-2 C. com. : Le dirigeant de fait est défini par la jurisprudence comme celui qui effectue des actes de gestion en toute indépendance et ainsi exerce la réalité de la direction de l'entreprise à la place des dirigeants de droit. Biens, abus de pouvoirs, de voix et de crédit… ABS S1. Les éléments constitutifs usage des biens de la un usage contraire à société, du crédit, des l'intérêt social pouvoirs ou des voix un usage dans un but la mauvaise foi du personnel dirigeant ABS S1. Les éléments constitutifs 1- Usage des biens… Ces actes portent sur : ① les biens entendus comme les actifs de la société constituant son patrimoine : biens meubles corporels ou incorporels, immeubles, créances ; ② le crédit : Il ne faut pas entendre le terme crédit au sens financier ; cela correspond à la réputation,la confiance que la société inspire à l'égard des tiers. Ex., Cautionnement des dettes personnelles du dirigeant ; signature comme endosseur ou avaliseur d'une lettre de change émise pour une cause étrangère aux affaires sociales. ③ les pouvoirs : ce sont les prérogatives conférées aux dirigeants en considération de leur qualité par la loi ou les statuts ; Ex., il a été jugé que constitue un abus de pouvoirs, mais également de biens, le fait pour un dirigeant d'organiser une fusion-absorption désavantageuse et sans utilité économique pour la société, mais avantageuse pour lui-même (Cass. crim., 10 juillet 1995). Le dirigeant qui évince des membres du comité des rémunérations et les remplace par d'autres acquis à sa cause, afin d'obtenir le déplafonnement de sa rémunération et de son indemnité de départ à la retraite commet un abus de pouvoirs sociaux (Cass. crim., 16 mai 2012). ④ les voix : possibilité de voter dans les assemblées reconnue aux associés ou actionnaires. ABS S1. Les éléments constitutifs 1- Usage des biens… Remarque 1 : La jurisprudence qui englobe sous ce terme tant les actes de disposition (aliénation, transfert de propriété...) que les actes d'administration : prêts, avances d'argent, ou des omissions : le dirigeant omet intentionnellement de réclamer une créance que la société détient sur une autre entreprise dans laquelle il a des intérêts (Cass. crim., 15 mars 1972). La Cour de cassation dans un arrêt du 21 août 1991 précise : un usage même temporaire suffit à caractériser le caractère abusif de l'acte car la consommation de l'infraction est réalisée au jour de la commission de l'acte de détournement quelles qu'en soient les suites. Remarque 2 : Dans un arrêt (Cass. crim., 28 janvier 2004), la Cour de cassation a précisé clairement que l'acte d'usage peut résulter non seulement d'une action, mais également d'une omission volontaire qui a la nature d'un acte contraire à l'intérêt social. Dès lors que l'abstention volontaire du dirigeant est contraire à l'intérêt social, l'infraction peut être caractérisée. Remarque 3 : Ces distinctions relatives à l'objet de l'acte d'usage sont assez difficiles à mettre en œuvre pour les juges du fond car souvent les cas sont mêlés (un abus de biens suppose un abus de pouvoir et souvent de voix). ABS S1. Les éléments constitutifs 2- Un usage contraire à l’intérêt social Notion d’intérêt social Intérêt social est distinct de celui de ses membres. Intérêt personnel : L'acte d'usage est contraire à l'intérêt social lorsque le dirigeant détourne des biens de l'entreprise dans son seul intérêt personnel. Ex., le dirigeant fait payer par la société des dettes personnelles : paiement par l’entreprise d'une amende à laquelle le dirigeant est personnellement condamné (Cass. crim., 3 fév. 1992). Risque de sanction : Une seconde catégorie d'actes d'usage soulève d'importantes difficultés : Doit-on considérer que l'acte d'usage est contraire à l'intérêt social lorsque le dirigeant détourne des biens sociaux du patrimoine de l'entreprise pour les utiliser, non pas dans un intérêt personnel, mais en faveur de la société ? La Cour de cassation a jugé qu'un acte est nécessairement abusif, donc contraire aux intérêts de la société, lorsqu'il poursuit un but illicite (affaire Carpaye, Cass. crim., 22 avril 1992). En l'espèce, les dirigeants d'une société avaient versé au maire d'une commune, une somme d'argent occulte prélevée dans la trésorerie de l'entreprise, pour obtenir l'exclusivité du marché de transport scolaire de la commune. Lors de l’affaire Carignon (Cass. crim., 27 octobre 1997), l'acte ne sera contraire à l'intérêt social que si, malgré l'avantage à court terme qu'il procure, il expose la société à un risque anormal de sanctions pénales ou fiscales. En l'espèce, une société avait versé pour l'acquisition d'un appartement au profit du maire de Grenoble, et pour la reprise d'une société en difficulté, la somme de 19 000 000 francs. En contrepartie cette société avait obtenu l'attribution de la concession du service des eaux de la ville. Enseignement : la violation de l'intérêt social qui est appréciée, non en terme de gains immédiats mais, à long terme, en considération du crédit de l'entreprise. La loi exige pour que l'infraction soit constituée, un usage des biens ou du crédit de la société contraire à son intérêt. L'abus de biens sociaux ainsi conçu s'apparente à une infraction de mise en danger de la société. ABS S1. Les éléments constitutifs 2- Un usage contraire à l’intérêt social Absence d’effet exonératoire : une ratification par un AG ou un CE n’enlève pas le caractère délictueux à l’acte. Cette absence de l’effet exonératoire se justifie parce que le consentement de la victime, en droit pénal, n’est pas un fait justificatif de l’auteur. Le quitus donné par l’AG ne peut pas arrêter les poursuites. Recel : Il faut signaler que celui qui bénéficie des sommes détournées, par la commission de l'infraction, peut être poursuivi sur le fondement de l'incrimination de recel du produit d'abus de biens sociaux (Cass. crim., 6 février 1997). Groupe de sociétés : Le patrimoine d'une société du groupe est l'objet d'un acte de détournement au profit d'une autre société appartenant au même groupe. Pour qualifier cet acte, faut-il apprécier sa conformité à l'intérêt social au regard de chaque société du groupe, ou au regard de l'ensemble considérant qu'il y a un intérêt social du groupe ? Les juridictions du fond ont pris position en faveur de la seconde solution, dans un jugement célèbre, rendu à l'occasion de l'affaire Willot (Trib. corr. Paris, 16 mai 1974). Le tribunal a considéré qu'il fallait prendre en considération l'intérêt du groupe qui pouvait alors, justifier les opérations financières réalisées, en opposition aux intérêts d'une société prise isolément. Cependant la jurisprudence a subordonné l'effet justificatif du groupe à trois conditions : il faut qu'existe un groupe économique réel fortement structuré ; des sacrifices doivent être supportés par une société du groupe ; ces sacrifices doivent être assortis d'une contrepartie et ne pas conduire à la disparition de cette société. Dans un arrêt de principe, Aff. Rozenblum (Cass. crim., 4 fév. 1985) la Cour de cassation a repris la solution affirmée par les juridictions du fond. ABS S1. Les éléments constitutifs 3- Un usage dans un but personnel Fins perso : La loi exige que « le dirigeant ait agi à des fins personnelles”. Il faut prouver que l'auteur de l'acte qui a agi contre l'intérêt social poursuivait un but strictement personnel. La Cour de cassation censure souvent des décisions des juges du fond qui n'ont pas suffisamment caractérisé le but personnel, ce qui ne lui permet pas de contrôler la légalité de la solution (Cass. crim., 4 nov. 2004). Cependant la jurisprudence limite l'importance de cet élément constitutif. Extension : La première limitation découle du sens donné à la notion de but personnel. Elle en retient une interprétation extensive considérant que la fin poursuivie peut aussi bien être matérielle que morale. Fins matériel : Entrent ainsi dans le champ d'application de l'infraction les actes matériels commis dans l'intérêt du dirigeant : versement de sommes indues pour des prestations fictives, rémunérations excessives, paiement de dettes personnelles, d'amende prononcées à titre personnel (Cass. crim., 9 mai 1973). Fins moral : les actes commis pour en retirer un intérêt moral uniquement : préservation de la réputation familiale ou satisfactions électorales (Cass. crim., 15 sept. 1999). Commission de délit : Souvent la Cour de cassation écarte cet élément constitutif, lorsqu'elle admet la condamnation sur le fondement de l'abus de biens sociaux de tous les actes qui ont pour objet la commission d'un délit, sans rechercher si ce délit profite personnellement aux prévenus. L'usage contraire à l'intérêt social qui est considéré comme l'élément déterminant de l'infraction, et se montre peu exigeante quant à la preuve de l’intérêt personnel. ABS S1. Les éléments constitutifs 4- Un usage de mauvaise foi Fondement : L’ABS santionne les infrations intentionnelles. L'agent doit avoir agi de mauvaise foi, en sachant que l'usage qu'il faisait des biens de la société était contraire à l'intérêt social. Si la mauvaise foi ne peut pas être prouvée, le délit n’est pas constitué : Cass. crim., 22 sept. 2010. Preuve : la Cour de cassation considère que la preuve de l'intention de nuire n'a pas à être rapportée formellement (Cass. crim., 3 fév. 1970). Il suffit que le dirigeant ait conscience que l'acte accompli est contraire à l'intérêt social. Présomption de mauvaise foi : Cette conscience découle implicitement des faits matériels objets de la poursuite. Le dirigeant aura d'autant plus de difficultés à rapporter la preuve de sa bonne foi. Un dirigeant de par ses fonctions, doit savoir apprécier les conséquences de ses actes. La constitution d'une caisse noire par un dirigeant, par des prélèvements occultes de fonds sociaux, fait présumer de son intérêt personnel : Cass. crim., 20 juin 1996. ABS S2. La poursuite de l’infraction 1- La répression Sanctions principales : L'abus de biens sociaux est un délit sanctionné par cinq ans d'emprisonnement et 375 000 euros d'amende (9000 € si l’auteur est un liquidateur). Depuis 2013, il a été crée un cas d’ABS aggravé passible de sept ans de prison et 500.000 € d’amende lorsque le délit a été facilité ou réalisé au moyen de comptes ouverts ou de contrats souscrits auprès d'organismes étrangers. Peines complémentaires : interdiction de diriger, gérer, administrer des sociétés commerciales, ainsi que d'exercice d'une activité commerciale. Ces interdictions sont soit définitives, soit temporaires et dans ce cas elles ne peuvent excéder une durée de 10 ans. La peine complémentaire ne peut être que celle qui est expressément prévue par la loi (Cass. crim., 21 sept. 2011). La juridiction ne peut pas prononcer une interdiction de diriger toute personne morale, alors que le texte ne vise que les entreprises commerciales. La complicité est punissable dans les conditions du droit commun (art. 121-6 et 121-7 CP), sans qu'il soit exigé du complice une qualité particulière contrairement à l'auteur principal qui doit être un dirigeant de droit ou de fait. PM : Depuis le 31 décembre 2005 qui généralise la responsabilité pénale des personnes morales, elles peuvent être poursuivies et condamnées du chef de ce délit. ABS S1. La poursuite de l’infraction 2- L’action civile Action Ut Universi : L'action civile est, exercée au nom de la société par les représentants légaux. Mais, ce sont aussi les auteurs de l'infraction. Il faudra recourir à une procédure de substitution : soit désigner un mandataire ad hoc qui aura pour mission de représenter la société en justice et d'agir en son nom ; soit nommer une personne habilitée expressément à se constituer partie civile au nom de la société victime (Cass. crim., 6 mai 1985). Dans le cas d'une opération de fusion-absorption, il a été jugé que l'action civile de la victime étant demeurée dans le patrimoine de la société absorbée, la société absorbante est recevable à se constituer partie civile en réparation du dommage résultant du délit d'abus de biens sociaux commis au préjudice de la société absorbée par ses dirigeants sociaux. Cette action est justifiée par les effets du TUP (Cass. crim., 7 avril 2004). Action Ut Singuli : Victime = société. Les actionnaires qui ne sont pas des victimes directes ne peuvent pas à titre personnel se constituer parties civiles (Cass. crim., 3 déc. 2014). La seule possibilité est l'action ut singuli. C’est une action en responsabilité contre les dirigeants qui a pour but d'obtenir réparation du préjudice subi par la société. Elle est exercée par les actionnaires qui remplissent les conditions de seuil fixées par la loi. La réparation accordée par le juge tombera dans le patrimoine de l'entreprise. Les actions Ut Universi et Ut Singuli peuvent se cumuler, si l’action engagée par les organes sociaux n’est pas suffisante. Action des créanciers : déclarée irrecevable car « le délit ne cause de préjudice direct qu'à la société » (Cass. crim., 27 juin 1995). Toute autre constitution de partie civile, qu'elle émane des salariés, des institutions représentatives du personnel, de syndicat... est irrecevable pour la même raison : ces personnes n'ont pas de qualité à agir. ABS S1. La poursuite de l’infraction 3- La prescription Infractions instantanées : Selon les dispositions de l'article 8 du CPP, le délai de prescription en matière délictuelle est de Six ans à compter du jour de commission de l'infraction. Cette disposition s'applique aux infractions instantanées. Infractions continues : Lorsque l'infraction est continue (Infraction dont les effets se prolongent dans le temps), le point de départ du délai de prescription, ne commence à courir qu'à partir du jour où l'infraction cesse de produire ses effets. Position jurisp. : la Cour de cassation considère que le point de départ du délai de prescription est « le jour de la présentation des comptes annuels par lesquels les dépenses litigieuses sont mises indûment à la charge de la société, aux associés, sauf dissimulation » (Cass. crim., 13 oct. 1999). La présentation des comptes marque le point de départ. S'il y a dissimulation des actes frauduleux, la prescription ne commence à courir qu'au jour de l'apparition du délit dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique. Il y a dissimulation lorsque le paiement de dettes personnelles est masqué par l'enregistrement en comptabilité d'écritures fictives (Cass. crim., 10 avril 2002). La Cour de Cassation juge qu'un acte est nécessairement abusif, donc contraire aux intérêts de la société, lorsqu'il poursuit un but illicite, pour quelles raisons ? Parce que l’acte expose la société à un risque de sanctions pénales et fiscales Parce que la commission d’une infraction est illégale Parce que la loi est la loi Parce que l’infraction expose la société à un risque de réputation Quelles sont les peines prévues à l’encontre des dirigeants de droit ou de fait pour le délit d’abus de biens sociaux ? Un an d’emprisonnement et 75000 euros d’amende Trois ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende Cinq ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende Selon les dispositions de l'article 8 du code de procédure pénale, le délai de prescription de l'action publique en matière délictuelle est de : 3ans 5ans 6ans La jurisprudence limite la portée de l’exigence légale d’un intérêt personnel : Par la suppression de cet élément constitutif Par l’affirmation d’une présomption d’intérêt personnel Par une interprétation souple de cet élément constitutif Par un renversement de la charge de la preuve L'abus de biens sociaux sanctionne : Un usage personnel Un usage indéterminé Un usage des biens Un usage des voix Un usage du crédit Un usage des pouvoirs Le dirigeant de fait est défini par la jurisprudence comme celui qui effectue des actes de gestion en toute indépendance et ainsi exerce la réalité de la direction de l'entreprise à la place des dirigeants de droit: Vrai Faux Patrick G., souhaitant vendre des vêtements et autres accessoires de mode en soie dans des magasins de luxe, a créé en 1990 deux sociétés. La première, la SNC « les soies d’Asie », a son siège social au Vietnam, alors que la seconde, la SARL « l’Asiat’mode » a installé son siège social à Aix-en-Provence. La société du Vietnam n’a été créée que pour permettre des importations à moindre frais. En fait, les deux sociétés ont une politique de développement commune et une comptabilité commune. Par contre, les deux sociétés ont des dirigeants différents. En effet, Patrick G. est président de la SNC « les Soies d’Asie », et sa femme est gérante de la SARL. Cependant, il s’avère que toutes les décisions sont en réalité prises par Patrick, sa femme ne s’occupant pas du tout de la société. En janvier 2007, la SARL « l’Asiat’mode » est placée en redressement judiciaire, la date de cessation des paiements étant fixée au 1er octobre 2006. Dans les mois qui suivent l’ouverture de la procédure collective, diverses opérations douteuses apparaissent. Ainsi, il apparaît que de septembre à novembre 2002, des fonds prélevés dans la trésorerie de la SARL « l’Asiat’mode » ont servi à rémunérer Xavier H. salarié de la société « Au bonheur des Dames », célèbre chaîne française de magasins de luxe, afin d’obtenir de lui des actes ayant facilité la signature en janvier 2003 d’un contrat d’approvisionnement de la chaîne par « l’Asiat’mode » et « les soies d’Asie ». La chaîne « Au bonheur des Dames » a rapidement mis fin au contrat en raison du peu de succès des produits vendus. 1) Qui peut être poursuivi pour abus de biens sociaux ? Réponse 1 : La femme de Patrick en tant qu'auteur de l'abus de biens sociaux en raison de sa qualité de dirigeante de droit de la SARL. Réponse 2 : Patrick en tant qu'auteur de l'abus de biens sociaux en raison de sa qualité de dirigeant de fait de la SARL. Réponse 3 : Patrick en tant qu'auteur de l'abus de biens sociaux en raison de sa qualité de dirigeant de fait et sa femme en tant que complice en raison de sa qualité de gérante de la SARL. Les sommes versées à Xavier ont permis à la SARL d’obtenir des facilités dans la constitution de son réseau de distribution. Mais les modalités de versement sont constitutives du délit de corruption incriminé par le Code du travail. 2) Les versements effectués à Xavier sont-ils contraires à l’intérêt social de la SARL? Réponse 1 : Non puisqu'ils ont permis la signature d'un contrat même si celui-ci a été de courte durée. Réponse 2 : Oui puisque selon la Cour de cassation il y a nécessairement un acte contraire à l'intérêt de la société lorsque les fonds de celle-ci ont permis la réalisation d'une infraction. Réponse 3 : Oui, puisque malgré le bénéfice à court terme procuré à la société consistant dans l’obtention d’un contrat favorable à ses intérêts , un acte de corruption expose la société à un risque anormal de sanctions pénales ou fiscales. Ces sommes prélevées dans la trésorerie de la SARL figuraient dans les comptes annuels de la SARL approuvés par l’assemblée annuelle des associés. 3) Quelle est l’influence de cette approbation ? Réponse 1 : Elle neutralise la responsabilité pénale. Réponse 2 : Elle n'a aucune influence. Réponse 3 : Elle fait de l'assemblée des associés un complice. Ces versements effectués de septembre à novembre 2002 apparaissaient dans les comptes sous des rubriques d’apparence régulière, puisque les variations de l’exercice en cause par rapport aux autres exercices n’étaient pas significatives, et ce n’est que l’analyse des comptes lors de l’ouverture de la procédure collective (en janvier 2007) qui a révélé l’existence de factures comportant certes toutes les mentions légales obligatoires mais sans objet véritable et ne faisant en réalité que justifier la sortie de ces fonds de l’actif de la société. 4) L’action publique peut-elle être encore exercée en septembre 2009 ? Réponse 1 : Non puisque l'abus de biens sociaux étant un délit instantané, les faits sont prescrits depuis novembre 2008. Réponse 2 : Oui puisque l'abus de biens sociaux étant une infraction clandestine, le délai de prescription ne court qu'à compter de la découverte des faits soit en l'espèce après l'ouverture de la procédure collective en janvier 2007. Réponse 3 : Oui puisque les faits en l'espèce étaient dissimulés. En septembre 2009 le procureur de la République d’Aix-en-Provence ayant demandé l’ouverture d’une instruction, les associés souhaitent se constituer partie civile en raison de la perte de bénéfices liée aux détournements. De même, les salariés qui bénéficiaient d’une prime sur les bénéfices veulent se joindre à cette action civile. 5) Ces actions civiles sont-elles recevables ? Réponse 1 : Oui ces actions civiles sont recevables puisque les actionnaires et les salariés ont subi un préjudice en raison de la diminution des bénéfices de la société. Réponse 2 : L'action civile des associés exercée en leur nom propre est recevable mais pas celle des salariés. Réponse 3 : L'action civile ut singuli des associés est recevable mais pas celle des salariés. Question 1 Réponse 1 Peuvent être auteurs ou coauteurs d’un abus de biens sociaux les dirigeants de droit des sociétés de capitaux. En l’espèce, la femme de Patrick est bien la dirigeante de droit de la SARL, société de capitaux. Les sommes ayant été prélevées dans la trésorerie de la société qu’elle dirige, même si elle se désintéresse de sa gestion, sa responsabilité pourra être engagée en tant que gérante. Réponse 2 Peuvent également être déclarés coupables d'abus de biens sociaux les dirigeants de fait des sociétés de capitaux. Une SARL est bien une société de capitaux, contrairement à la SNC. De plus, Patrick prend dans les faits toutes les décisions relatives à la gestion de la société, sans même que sa femme n'en soit informée. Il semble donc pouvoir être considéré comme le dirigeant de fait de la SARL, puisque la Cour de cassation définit le dirigeant de fait comme étant « l'individu qui n'étant pas gérant d'une société à responsabilité limité, traite personnellement avec les fournisseurs et les clients, oriente son activité et décide de son sort » (Cass. crim., 25 novembre 1969, Bull. n° 314). Question 2 Réponse 3 Dernière étape de l'évolution jurisprudentielle, l'arrêt Carignon du 27 octobre 1997 confirme le rejet de l'automaticité de la qualification d'abus de biens sociaux et précise que « quel que soit l'avantage à court terme qu'elle peut procurer, l'utilisation des fonds sociaux ayant pour seul objet de commettre un délit tel que la corruption est contraire à l'intérêt social, en ce qu'elle expose la personne morale au risque anormal de sanctions pénales ou fiscales contre elle-même et ses dirigeants et porte atteinte à son crédit et à sa réputation ». Question 3 Réponse 2 Le quitus de l’assemblée annuelle des associés constitue en réalité le consentement de la victime puisque la victime d’un abus de biens sociaux est la société que cette assemblée représente. Or, le consentement de la victime en droit pénal est indifférent. Question 4 Réponse 3 Par un arrêt du 13 oct. 1999, la Cour de cassation considère que le point de départ du délai de prescription est « le jour de la présentation des comptes annuels par lesquels les dépenses litigieuses sont mises indûment à la charge de la société, aux associés, sauf dissimulation ». La question est donc ici de savoir s’il y a eu ou non dissimulation. Certes, les rémunérations apparaissaient dans les comptes annuels. Cependant, vraisemblablement les comptes étaient peu clairs et Patrick a utilisé des factures sans réel objet (fausses factures ou factures fictives …). Une apparence de légalité cachait donc les détournements. Il apparaît ainsi possible de considérer qu’il y a dissimulation (cf. Cass. crim., 28 janvier 2004, pour la définition de la dissimulation et 22 septembre 2004 pour des faits similaires). NB : en l’espèce les infractions de comptabilité irrégulière, de faux et usage de faux pour les factures sont constituées… Par conséquent, le délai de prescription ne courra qu’à partir du jour où l’infraction a pu être constatée dans des conditions permettant l’exercice de l’action publique, soit en l’espèce au cours de la procédure collective (après janvier 2007). Il n’y a donc pas prescription. Question 5 Réponse 3 L’action ut singuli est exercée collectivement par les associés au nom de la société. La société étant la victime directe de l’abus de biens sociaux seule cette action civile est recevable.