PDF - Responsabilité Sans Faute de l'Administration

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Esther et Julien

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Saint-Philippe

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droit administratif responsabilité administrative dommage droit public

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Ce document examine la responsabilité sans faute de l'administration, un principe fondamental du droit administratif. Il explore les situations exceptionnelles, les dommages anormaux, et les fondements de cette responsabilité, en abordant la notion de risque. Le document présente également les faits générateurs de la responsabilité publique.

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CHAPITRE 2 LA RESPONSABILITÉ SANS FAUTE DE L’ADMINISTRATION Elle est la marque de l’originalité du droit administratif de la responsabilité. La responsabilité sans faute de l’administration se fonde toujours sur un souci d’équité et de solidarité de la collectivité envers la victime. Elle ne conc...

CHAPITRE 2 LA RESPONSABILITÉ SANS FAUTE DE L’ADMINISTRATION Elle est la marque de l’originalité du droit administratif de la responsabilité. La responsabilité sans faute de l’administration se fonde toujours sur un souci d’équité et de solidarité de la collectivité envers la victime. Elle ne concerne pas les rapports quotidiens entre l’administration et les particuliers. Elle vise des situations exceptionnelles où à un particulier subit du fait de l’action administrative un dommage anormal. Le juge va dès lors estimer inéquitable (même en l’absence de faute) de laisser ce dommage anormal à la charge de la seule victime. La responsabilité sans faute a ainsi une fonction re-distributrice Elle vise à répercuter sur la collectivité tout entière les charges provoquées par une action qui est censée profiter à la société tout entière La responsabilité sans faute de l’administration n’a pas pour fonction de couvrir l’ensemble des aléas auxquels expose la vie en collectivité, il est de la nature d’une responsabilité sans faute d’être limitée à des situations exceptionnelles. Seuls les dommages anormaux (qui dépassent les charges incombant normalement) sont pris en compte Ce qui conduit le juge à exiger que le préjudice invoqué par le requérant présente un certain nombre de caractéristiques : Le préjudice doit être grave (dépassé par ses conséquences les aléas normaux de la vie en société) Le préjudice doit être spécial (c’est à dire concerné un cercle limité de personne) Cependant chaque fois que le cercle des victimes potentiels d’un préjudice grave s’élargit au point de faire de la réparation du dommage anormal un intérêt national prioritaire, la loi a tendance à instituer des fonds d’indemnisation (et donc à sortir du droit de la responsabilité pour recourir aux mécanismes de l’assurance) Le fondement de la responsabilité sans faute est donc à rechercher du côté de la victime On ne retiendra pas la présentation doctrinale qui invoque le risque ou la rupture d’égalité devant les charges publiques comme fondement de la responsabilité sans faute En effet : o Il ne s’agit pas de fondement distinct : la réalisation du risque rompt l’égalité devant les charges publiques o La rupture d’égalité peut être assimilée à une illégalité (puisque le principe d’égalité est une norme) donc devrait relever de la responsabilité pour fauteLe fondement est constitué par l’anormalité du préjudice (c’est à dire que la victime doit se trouver placée dans une situation dommageable qui dépasse la mesure pour prétendre exercer une action en réparation En ce sens, la nouvelle jurisprudence fondée sur la garde (CE 2005 GIE Axa courtage) se situe sur un autre terrain juridique que les hypothèses de responsabilité sans faute classiques : n’exigeant pas a priori un préjudice anormal SECTION 1. LES FAITS GÉNÉRATEURS DE LA RESPONSABILITÉ PUBLIQUE SANS FAUTE Deux situations sont susceptibles d’entraîner la mise en oeuvre de cette responsabilité. Ce sont les faits générateurs de la responsabilité o soit le dommage est le résultat de la réalisation d’un risque anormal auquel l’activité administrative a exposé la victime (Sous section 1). o soit l’action administrative fait supporter par ces décisions à certains administrés au nom de l’intérêt général des charges anormales provoquant ainsi une rupture du principe d’égalité devant les charges publique (Sous section 2). On signalera aussi l’existence d’un régime autonome de responsabilité sans faute (autrefois fondé sur la loi du 28 pluviôse an VIII) Ce régime est d’une rare subtilité : Il conduit à distinguer les dommages accidentels et les dommages permanents de travaux publics (et notamment les inconvénients de voisinage liés à la présence d’un ouvrage public et non à son dysfonctionnement) Les dommages permanent sont indemnisées dès lors que le préjudice apparait anormal : CE 1931 Commune de Vic Fezensac à propos des dégâts causés à une toiture par la chute de feuilles provenant des arbres de la place publique où est situé l’immeuble. En l’espèce, absence d’indemnisation : les charges n’excédant pas les sujétions normales de voisinage. S’agissant d’un dommage accidentel, la réparation est due quelle que soit l’importance du dommage. Mais il faut distinguer alors la situation des tiers (responsabilité sans faute, CE 1951 Gruau, des usagers (présomption de faute) et des participants à l’opération de travaux publics(responsabilité pour faute) Sous-section 1 : L’exposition de la victime à un risque particulier du fait de l’administration Le risque constitue le fait générateur de la responsabilité administrative sans faute le plus souvent invoqué. Il est fréquent en effet que l’activité administrative expose certains administrés à des risques anormaux de dommage. Dès lors quand le risque se réalise en l’absence de toute faute de l’administration, il peut sembler injuste de laisser à la victime seule la charge du dommage causé par l’activité administrative. Ce type de responsabilité est accidentelle, il faut qu’à un moment donné l’activité administrative crée un risque de danger, ce danger se réalise et crée des dommages. Les victimes peuvent se tourner vers le juge administratif. L’équité commande en effet que l’administration garantisse les risques exceptionnels de dommage auxquels les interventions publiques exposent les particuliers. Cette exigence a conduit la jurisprudence administrative a développé dès l’arrêt Cames la théorie du risque qu’allaient admettre à leur tour mais plus tard les juridictions civiles. La théorie du risque qui trouvait à s’appliquer dans un certain nombre d’hypothèses traditionnelles connaît aujourd’hui de nouveaux développements qui en modifient la philosophie. On peut tenter de regrouper l’ensemble de ses situations autour de trois types d’hypothèses §1. LE RISQUE-PROFIT : LA RÉPARATION DES DOMMAGES CAUSÉS AUX COLLABORATEURS DE L’ADMINISTRATION Le droit à réparation de la victime trouve son explication dans ces cas de figure dans le fait que la collectivité publique tire profit de l’activité à laquelle se livrer la victime quand le dommage est intervenu. La victime a été atteinte dans le cadre d’une activité qu’elle met en oeuvre au profit de l’administration. ⚖ Cette jurisprudence a été inaugurée par l’arrêt Cames du 21 juin 1895 pour les risques auxquels sont exposés les employés de l’administration dans l’exécution de leurs activités professionnelles. Cette responsabilité de l’administration du fait des dommages causés à ses collaborateurs joue essentiellement pour les collaborateurs occasionnels du service public. En effet, la jurisprudence Cames a pratiquement cessé de s’appliquer aux agents permanents de l’administration même non titulaires qui sont couverts par des régimes spéciaux d’invalidité organisés par le code des pensions et la règle du forfait à pension. Le code de pension fait-il totalement disparaitre la jurisprudence Cames ? La code de pension ne couvre pas tous les types de dommage, il ne couvre que les dommage corporels. Il ne trouve pas les dommages esthétiques par exemple. Cependant le forfait ne couvre que les dommages corporels. Le recours à titre complémentaire à la jurisprudence Cames permet l’indemnisation d’autres titres de préjudices comme la douleur morale ou encore le préjudice esthétique. ⚖ CE du 4 juillet 2003 Moya-Caville à propos d’un fonctionnaire victime d’un accident de service qui peut cumuler la pension d’invalidité prévue par la loi et l’indemnisation du préjudice esthétique lié à l’accident. ⚖ CE 1er juillet 2005 Brugnot au bénéfice d’un militaire en activité ⚖ CE 28 juin 2019 Ministre des armées, conclusions Pelissier 422920 Les collaborateurs de l’administration couverts par la jurisprudence Cames sont aujourd’hui ceux qui apportent occasionnellement (et le plus souvent bénévolement) leur concours à l’exécution d’une mission de service public. Ceux qui ne sont couverts, ni par la législation des pensions (sous réserve de l’arrêt Mora-Caville, ni par celle des accidents du travail, ni par d’autres dispositions particulières (telles celles régissant les dommages causés aux élus locaux dans l’exercice de leur mandat). Ils ne bénéficient d’aucune protection particulière. La jurisprudence sur les collaborateurs occasionnels du service public a été inaugurée par l’arrêt du ⚖ Conseil d'Etat, Ass. 22 nov. 1946 Commune de Saint Priest la Plaine. > A l’origine de l’affaire les dommages corporels causés par l’explosion prématurée d’un engin pyrotechnique à deux habitants d’une petite localité qui avaient accepté lors de la fête locale et à la demande du Maire de participer bénévolement au tir du feu d’artifice. > La question qui s’est posée est de savoir si la commune peut être tenue responsable. > Le Conseil d'Etat va juger : « que la charge du dommage qu’ils ont subi, alors qu’ils assuraient l’exécution du service public dans l’intérêt de la collectivité locale et conformément à la mission qui leur avait été confiée par le maire, incombe à la commune » > Les victimes ont été blessés dans le cadre d’une activité qui incombe normalement à la commune. Les victimes ont agi dans l’intérêt de la collectivités locales, notamment car le maire leur a demandé d’y participer. A l’évidence la notion de risque ne suffit pas expliquer le déclenchement de la responsabilité sans faute (d’autres risques mériteraient alors une protection particulière). Si le collaborateur bénéficie du mécanisme de la responsabilité c’est précisément par ce qu’il a été atteint à raison de sa collaboration au service public. Ce qui le place dans une situation différente des autres administrés et qui explique qu’il mérite d’être protégée de manière différente à d’autres victimes atteintes en d’autres occasions. C’est une sorte de prime au civisme. Toutefois, la jurisprudence est sceptique, il faut prouver qu’il y a bien collaboration. En conséquence, la responsabilité sans faute de l’administration du fait des dommages causés à ses collaborateurs est subordonnée à trois exigences essentielles. 1) La collaboration au service public doit être effective Cette exigence se dédouble : 👉 La victime doit d’abord avoir collaborer à un véritable service public. Les illustrations de cette collaboration en jurisprudence sont nombreuses : - Habitants d’une commune qui participe à l’animation d’une fête locale traditionnelle ou qui aident le service de lutte contre l’incendie à combattre un sinistre. - Passants qui prêtent main forte à l’arrestation d’un malfaiteur ou qui portent secours à une personne en difficulté. De façon moins banale, le bénéfice de cette jurisprudence a été accordé => ⚖ Conseil d'Etat 1966 Lemaire Automobiliste victime d’un accident de la route alors qu’il reconduisait à la gare des agents des douanes qui venaient de procéder chez lui à une perquisition et à une saisie de marchandise. Le CE a considéré qu’il pouvait être un collaborateur. Le CE n’est pas très regardant. Et de manière plus générale La théorie des collaborateurs occasionnels bénéficie aux élus qui hors de l’exercice de leurs fonctions donne un coup de main à la réalisation de travaux au service de la commune = ⚖ Conseil d'Etat, Ass. 1970 Appert-Colin. 👉 Mais faut-il au moins que l’activité auquel ait participé la victime soit un véritable service public ce qui n’est pas le cas de toutes les activités d’intérêt général prises en charge par les collectivités publiques. L’organisation d’une animation locale dépourvue de tout caractère traditionnelle ne relève pas selon le juge des missions de service public qui incombe à une commune. ⚖ Conseil d’Etat, 1972 Chatelier > Un tournoi de foot est organisé et une personne se blesse gravement. > Le CE va considérer qu’il n’y a pas de collaboration au service public, il se fait dans le cadre de la fête locale, mais n’est pas lié à l’organisation et l’animation de la fête. > Ainsi le Conseil d’Etat a écarté la responsabilité sans faute dans une affaire où le requérant s’était blessé au cours d’une rencontre sportive prévue dans le programme d’une fête locale. ⚖ Conseil d'Etat, 5 juillet 1963 Dame veuve Ledoyen, Rec. p. 418 > Un habitant de la commune se propose de sonner les cloches et il n’avait pas anticiper la remonté de la corde, il tire et il remonte avec. Surpris, il lâche la corde donc il meurt. > De la même façon, ne collabore pas au service public, la personne qui fait une chute mortelle alors qu’elle sonne des cloches de l’église. La victime doit avoir collaborer réellement et utilement au service public. ⚖ Conseil d’Etat, 1980 Gambini, Rec. p. 355 > Il regardait la scène et s’est pris une balle qui ne lui était pas destiné. Ce n’est pas un cas de collaboration. > Ainsi une personne blessée alors qu’elle assistait à l’interpellation de deux individus sur la voie publique n’est pas considéré comme un collaborateur du service public. ⚖ Conseil d'Etat, 1957 Companie d’assurances l’Urbaine et la Seine). > L’intention de participer au service public ne suffit pas, il faut un début de commencement : ainsi ne bénéficie pas du régime de la responsabilité sans faute le particulier qui alerté par le Tocsin a été victime d’un accident alors qu’il se rendait sur les lieux d’un incendie. 2) La collaboration doit, sauf urgence, avoir été acceptée par l’administration. La jurisprudence a d’abord adopté une position restrictive : le bénéfice de la responsabilité pour risque n’était accordé qu’aux personnes obligées en vertu d’une réquisition de l’autorité publique d’apporter leur concours. Puis la théorie des collaborateurs occasionnels a été étendue aux particuliers dont l’aide avait été demandée par la personne publique. >La demande peut consister dans un appel individuel > mais aussi par un appel collectif tel par exemple que l’appel du tocsin. Mais ces restrictions n’ont plus cours aujourd’hui. La jurisprudence est désormais moins regardante à l’égard des actes de civisme et de dévouement spontané des particuliers. o Elle englobe les personnes dont le concours sans être demandé a été accepté par la collectivité publique. ⚖ Conseil d'Etat, Ass. 1970 Appert-Collin : collabore au service public le maire d’une petite commune qui avec l’accord du conseil municipal effectuait des travaux de nivellement sur un terrain communal destiné à l’aménagement d’un terrain de sport. Le CE considère que c’est un collaborateur, car c’est un élu. En 1970, la loi n’a rien prévu pour les élus locaux. Déjà un sort particulier était réservé aux personnes qui n’écoutant que leur courage et leur bravoure se portent spontanément au secours d’une victime d’une agression ou d’un accident. C’est pour les cas d’urgence. L’urgence de ces situations dramatiques (où des vies sont souvent en jeu) faisait obstacle en effet à ce que la jurisprudence administrative exige d’eux qu’avant d’intervenir ils sollicitent une autorisation de l’administration. ⚖ Conseil d'Etat sect. 1957 Commune de Grigny à propos d’un médecin blessé par une explosion alors qu’il était venu porter des soins à des personnes victimes d’une intoxication au gaz. > La situation d’urgence fait que le CE admet la réparation sans faute et l’idée de collaboration spontanée. La collaboration spontanée pose le problème délicat de l’identification de la personne publique tenue de réparer le préjudice subi. ⚖ Ainsi dans l’affaire Le Goff de 1988, le Conseil d'Etat a rejeté la demande d’indemnité d’une personne qui avait sauvé un malade mental échappait de l’hôpital de la noyade dans un étang au motif que son action était dirigée contre l’hôpital psychiatrique alors que s’étant comporter comme un collaborateur du service public de la police municipale qui a la responsabilité des secours aux personnes il aurait dû porter son action contre la commune. C’est un collaborateur de la police, donc c’est contre la commune qu’il fallait agir. ⚖ Conseil d'Etat, 30 avril 1990 Com. de Couéron, LPA 30 juillet 1990, p. 4 > Même solution à propos d’un automobiliste qui porte secours à la victime d’un accident ayant eu lieu sur une route nationale en dehors de l’agglomération et dont le seul tort est d’avoir poursuivi la commune du lieu de l’accident alors qu’il aurait dû réclamer réparation à l’Etat en tant que collaborateur du service de police relevant du préfet. > Il porte son action contre la commune, mais le CE refuse. C’est un accident de circulation en dehors de l’agglomération. Or, sur les routes nationales en dehors de l’agglomération, l’autorité compétente est le préfet. Il aurait fallu saisir le préfet d’une demande d’indemnisation. En dehors des cas d’urgence, la jurisprudence reste très méfiante à l’égard des collaborations spontanées. L’acceptation de la collectivité publique doit être au moins implicite. Celui à qui on n’a rien demandé et qui prend de lui-même des initiatives intempestives qui peuvent même gêner l’exécution du service public ne peut prétendre à la qualité de collaborateur du service public. ⚖ Ainsi l’arrêt Conseil d'Etat, 1989 Pantaloni : a dénié la qualité de collaborateur du service public au propriétaire d’un bateau qui lors de troubles au Vanuatu (ex-Nouvelles-Hébrides) avait mis son embarcation à la disposition des ressortissants français de l’île pour qu’ils puissent quitter le Vanuatu où leur sécurité semblait menacée. La communauté française panique. > Un de ses membres decide de mettre à la disposition des ressortissants français un bateau, pour permettre leur évacuation. Le propriétaire du bateau est arrêté par les autorités, qui lui saisissent son bateau. > Le requérant demandait à être indemnisé du fait que son bateau avait été saisi par les autorités du Vanuatu. > Le Conseil d’Etat rejette cette demande au motif que l’intéressé ne pouvait invoquer l’urgence de son intervention compte tenu du fait que la gouvernement francais disposait sur place d’une représentation diplomatique et des moyens appropriés pour intervenir le cas échéant dans un bref délai. Sa collaboration était inutile et non établie. ⚖ Même rejet dans l’affaire Guinard de 1981 : à propos d’un malade qui s’était blessé en aidant six infirmiers à faire monter un autre malade dans un véhicule. Mais dans le hall, un patient hospitalisé se promène, il decide de les aider et il demande ensuite à être considéré comme collaborateur occasionnel. > Le Conseil d'Etat relève que son intervention n’a été ni sollicitée, ni acceptée par le personnel et aucune nécessité ni aucune urgence ne le requéraient, le nombre d’infirmiers étant suffisant. 3) La situation de la victime ne doit pas être incompatible avec l’idée de collaboration. Cette exigence vise surtout les usagers du service public qui ne peuvent prétendre au statut de collaborateur alors même qu’ils prêtent leur concours à l’exécution du service public. ⚖ Ainsi dans l’affaire Kormann de 1961 : le Conseil d'Etat a exclu le droit à réparation d’un élève qui a été blessé au cours d’une épreuve d’éducation physique de lancé de poids alors qu’il ramassait à la demande de l’examinateur les poids lancés par les autres candidats. Il prend un poids sur la tête. > Est-ce que si on demande à un usager de ramasser quelque chose, est-il collaborateur ? > En l’espèce, le juge administratif a mis en avant que le concours apporté par l’élève au service public n’excédait la contribution qui peut normalement être attendue d’un usager en contrepartie des avantages que lui apporte le service. > Le CE dit que ce n’est pas un collaborateur occasionnel. Il aurait du attaqué sur la faute. De la même manière, la jurisprudence administrative refuse de manière constante la qualité de collaborateurs à ceux qui participent à des compétitions sportives alors même que ces manifestations ressortent de l’exécution d’un service public : celui du sport. La question de savoir si l’existence d’un lien familial entre la personne secourue et son sauveteur est de nature à exclure l’application de la théorie des collaborateurs occasionnels aurait pu se poser ? L’on pouvait penser en effet qu’en la circonstance la solidarité familiale l’avait emporté sur la solidarité collective. Mais la jurisprudence administrative se refuse à ce genre de distinction : ⚖ Conseil d'Etat, 22 juin 1984 Mme Nicolaï où il a été jugé qu’un père de famille qui avait traverser les flammes d’un incendie de forêt pour porter secours à son fils et à sa soeur pouvait être regardé comme un collaborateur du service public. ⚖ Conseil d'Etat, 13 janvier 1993 Mme Galtié : une mère d’élève, blessée à l’occasion d’une sortie pédagogique peut également à être indemnisé sur le fondement de la théorie des collaborateurs occasionnels. La jurisprudence sur les collaborateurs occasionnels atteint ici ses limites. En bonne logique, elle ne devrait pas s’étendre aux « accidents domestiques » (R. Chapus, DAG, I, p. 1214) ou aux « secours dépourvus de tout caractère public » (GAJA, p. 383) Est-ce que la rémunération dans le cadre d’une collaboration exclue l’engagement de la responsabilité sans faute de l’administration ? La rémunération n’exclut pas non plus le recours à la théorie des collaborateurs occasionnels. Même si le plus souvent la jurisprudence concerne des collaborateurs bénévoles. ⚖ Conseil d’Etat 1971 Aragon, Rec. p. 172. : Le Conseil d'Etat a jugé ainsi que les experts désignés par les tribunaux qui ne peuvent pas obtenir le paiement de leurs honoraires du fait de l’insolvabilité des parties au procès subissent pour avoir participer au fonctionnement du service public de la justice administrative un préjudice qui les atteint en leur qualité de collaborateurs de ce service public. ⚖ Cass. 1er Civ, 30 janvier 1996 Morand. > La Cour cassation a retenu une solution sensiblement identique à propos d’un mandataire judiciaire inscrit sur la liste des mandataires habilités à la liquidation des entreprises en difficultés qui durant deux années consécutives n’avait été désigné par aucun tribunal de commerce pour procéder à la liquidation judiciaire d’une entreprise. > La Cour relève d’une part que l’intéressé a été atteint en « sa qualité de collaborateur du service public » et d’autre part que « la victime d’un dommage subi en sa qualité de collaborateur du service public peut, même en l’absence de faute, en demander réparation à l’Etat dès lors que son préjudice est anormal, spécial et d’une certaine gravité. » Ce nouveau glissement sémantique (de la notion de collaborateurs occasionnels la Cour passe à celle de collaborateur occasionnellement atteint) s’il semble s’éloigner de la jurisprudence Commune de Saint Priest la Plaine reste néanmoins conforme à l’esprit de la jurisprudence Cames qui visait les collaborateurs professionnels de l’administration. §2 LE RISQUE-DANGER : LA RÉPARATION DES RISQUES EXCEPTIONNELS LIÉS À L’ACTIVITÉ ADMINISTRATIVE L’action de l’administration peut exposer les particuliers au danger. En cas de réalisation de ces risques, il importe de protéger les victimes. La protection contre ces risques exceptionnels concerne l’usage par l’administration des choses dangereuses, l’utilisation de méthodes dangereuses ainsi que l’exposition des tiers à des situations dangereuses. Les solutions jurisprudentielles peuvent être rapprochées de certaines solutions légales Notamment de la responsabilité sans faute instituée par la 📕 loi du 1er juillet 1964 en matière de vaccinations obligatoires et qui peut être justifiée par le fait que l’Etat expose les usagers du service public de la santé à un risque d’accident vaccinatoire. A. L’USAGE PAR L’ADMINISTRATION DE CHOSES DANGEREUSES. Trois types de choses (armes, ouvrages et produits). 1) Les armes et engins dangereux La jurisprudence sur les choses dangereuses a été inaugurée par l’arrêt ⚖ Conseil d’Etat, 28 mars 1919 Regnault-Desroziers. > Au cours de la Première guerre mondiale, un dépôt de munitions installé dans un fort militaire à la Courneuve a explosé. L’explosion fut si considérable que l’on dénombra une centaine de victimes et que les immeubles environnants subirent d’importants dégâts. > Les victimes saisissent le CE d’une action en indemnité, le Conseil d'Etat devait accorder l’indemnisation du préjudice subi sans rechercher la faute du service gestionnaire au nom du risque anormal de voisinage crée par l’accumulation d’explosifs et leur manipulation constante à proximité d’une agglomération. > « ces opérations effectuées dans des conditions d’organisation sommaire sous l’empire de nécessités militaires comportaient des risques excédant les limites de ceux qui résultent normalement du voisinage et que ces risques étaient de nature (...) à engager indépendamment de toute faute , la responsabilité de l’Etat. » ⚖ Arrêt Conseil d'Etat, Ass. 24 juin 1949 Lecomte et Daramy (2 arrêts). > Des explosifs, la notion de choses dangereuses devait être bientôt étendue à l’usage par les services de police ou de gendarmerie d’armes et d’engins dangereux. Deux affaires donc : o Lecomte : l’une concernant un patron de café mortellement blessée alors qu’il était assis en terrasse par un coup de feu tiré par un gardien de la paix au cours d’une opération destinée à arrêter un véhicule suspect. o Daramy : l’autre concernant une passante mortellement blessée par un coup de feu tiré par un agent de police en vue d’arrêter la fuite de l’auteur d’une agression. Mais une même motivation de principe, les deux arrêts relèvent : > Bien que la responsabilité des services de police ne peut être engagée que pour faute lourde, la responsabilité de l’administration peut être engagée même en l’absence de faute dans le cas où le personnel de police fait usage de son arme. De plus les dommages sont très graves comparés aux charges normalement supportées par les particuliers. o « si en principe le service de police ne peut être tenu pour responsable que des dommages imputables à une faute lourde commises par ses agents dans l’exercice de leurs fonctions, la responsabilité de la puissance publique se trouve engagée même en l’absence d’une telle faute dans le cas où le personnel de police fait usage d’armes ou d’engins comportant des risques exceptionnels pour les personnes et les biens et où les dommages subis excèdent par leur gravité, les charges qui doivent normalement être supportées par les particuliers en contre partie des avantages résultant de l’existence de ce service public ». La jurisprudence devait par la suite préciser les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité de l’Etat du fait de l’usage d’armes et engins dangereux. L’une des questions qui se pose c’est qu’est-ce qu’on entend par arme ou engins ? La notion d’armes ou engins comportants des risques exceptionnels a été assez largement entendue : o Toutes les armes à feux sont concernées. o Non seulement l’usage des mitraillettes armes imprécises s’il en est mais aussi des pistolets et des revolvers sont d’engager la responsabilité sans faute de l’Etat. o En revanche aucun engin n’a été jugé comme comportant des risques exceptionnels : ni les grenades lacrymogènes, ni les matraques, ni même les fusées utilisées pour un feu d’artifice. ⚖ Arrêt 31 mai 2024, manifestation de l’épisode gilet jaune > L'engagement de la responsabilité de l'Etat pour faute lourde, par une personne ayant été blessée par les forces de l'ordre lors d'une manifestation, n'est possible qu'à condition de prouver un usage irrégulier et disproportionné de l’arme. > Le CE dit que la grenade de défense n’est pas une arme suffisamment dangereuse. Il met en avant la faute de cette victime. En second lieu, ce régime de responsabilité sans faute ne bénéficie pas à toutes les victimes. o C’est seulement si les coups de feu ont atteint des personnes non visées par l’opération de police que la responsabilité sans faute de l’Etat sera engagée. o Au contraire, si ce sont les personnes visées par l’opération de police qui ont été blessées, la responsabilité de l’Etat est engagée sur le terrain de la faute mais alors une faute simple des services de police suffit « en raison des dangers inhérents à l’usage des armes ». ⚖ Conseil d'Etat, sect. 1951, Dame Aubergé et Dumont : à propos d’un automobiliste blessé par balle alors qu’il tentait de forcer un barrage de police. En l’espèce la faute de l’administration fut établie : le barrage étant insuffisamment signalé. > Il ne va pas exiger la faute lourde, il se contente de la faute simple. ⚖ Civ. 10 juin 1986 consorts Pourcel > Dans une affaire intéressant une opération de police judiciaire, la Cour de cassation a fait application de cette jurisprudence à une hypothèse particulière celle où le coup de feu dommageable pour les tiers a été tiré non par un agent de police mais par la personne que les service de police cherchaient à appréhender. > La Cour refuse de distinguer selon l’origine du coup de feu : elle considère à juste titre c’est que l’opération de police (une interpellation sur la voie publique) qui dans son ensemble créatrice de risque parce qu’elle comprend le risque d’une riposte armée des malfaiteurs. C’est donc un régime favorable mais qui n’est pas sans limite. Aujourd’hui, les forces de police n’utilise plus de force létale. 2) Les ouvrages exceptionnellement dangereux La jurisprudence concerne également les accidents liés à l’effondrement d’ouvrages publics « exceptionnellement » dangereux. C’est une jurisprudence qui n’existe plus. ⚖ Elle a été inaugurée par l’arrêt Dalleau du 6 juillet 1973 à propos de « la route du littoral » dans le département de la Réunion qui longe une falaise et qui donnait lieu à des éboulements constants. > Cette falaise s’éboule régulièrement alors même que l’administration multipliait les mesures de protection. On ne peut pas mettre en avant le manque de contrôle. > Le CE a considéré que c’était un ouvrage public exceptionnellement dangereux et a donc admis la réparation en écartant le régime des travaux publics. Ils ont finalement fait des travaux. > A raison du risque exceptionnel que présentait cette route pour les usagers de la voie publique, le Conseil d'Etat avait conclu à la responsabilité sans faute de l’administration. > Mais cette jurisprudence n’a jamais été re appliqué. L’intérêt de cette jurisprudence consistait à écarter en l’espèce la loi du 28 pluviôse an VIII qui régit la responsabilité de l’administration du fait des ouvrages et travaux publics. Si ce texte organise une responsabilité de plein droit à l’égard des tiers à l’ouvrage public, il prévoit pour les usagers un régime moins favorable fondée sur la faute présumée. o Pour cette raison, l’arrêt a fait l’objet de vives discussions doctrinales dans la mesure où il opérait un déplacement de frontière au détriment de la théorie des dommages de travaux publics et en faveur de la théorie du risque. o Mais depuis lors l’arrêt Dalleau « est resté unique en son genre » (Rougevin-Baville). ⚖ Conseil d'Etat, 1982 Payet Saisi de requêtes identiques à propos de la même route, le Conseil d'Etat les a rejeté au motif que la « route du littoral » a cessé d’être exceptionnellement dangereuse depuis que des travaux ont été exécutés pour assurer la sécurité des usagers. Mais surtout le Conseil d'Etat a refusé de l’étendre à d’autres ouvrages : Conseil d'Etat 5 juin 1992 époux Cala dans une affaire où le Conseil d'Etat casse l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon qui aurait selon la Haute juridiction qualifié à tort d’exceptionnellement dangereuse une route située au pied d’une falaise très élevée et très fissurée et exposée à des risques élevés de chutes de bloc de pierre en dépit de mesures d’entretien constante. o C’est dire implicitement que la jurisprudence Dalleau d’application déjà exceptionnelle n’a plus vocation à s’appliquer. 3) Les produits dangereux L’indemnisation des risques liés à l’utilisation de produits pouvant s’avérer dangereux concerne les activités de santé. Ce type de raisonnement va conduire le juge à protéger les particuliers exposés aux risques liés à l’utilisation de produits sanguins (alors qu’en soit la transfusion sanguine n’est pas en l’absence de faute une activité médicale dangereuse). ⚖ Le Conseil d'Etat, Ass. 26 mai 1995 Cons. N’Guyen, Jouan, et Cons Pavan a ainsi jugé que les hôpitaux publics en charge des centres de transfusion sanguine avaient exposés les transfusés à un risque exceptionnel de contamination en raison de la mauvaise qualité des produits sanguins qu’ils fournissent. (Conclusions Daël, RFDA 1995, p. 748) Cette solution est tout à fait remarquable dans la mesure où la responsabilité sans faute profite ici non aux tiers ni même aux collaborateurs de l’administration comme c’est le plus souvent le cas mais à des usagers du service public qui sinon aurait dû démontrer la faute de l’administration hospitalière La solution admise en 1995 par le Conseil d'Etat traduit une nouvelle inflexion en ce sens que le fait générateur de la responsabilité de l’administration est ici autant les risques liés à la transfusion sanguine que la défectuosité (non maîtrisable avant les test de dépistage) de certains lots de sang contaminé L’émotion suscitée par le scandale du sang contaminé peut expliquer que le Conseil d'Etat est accepté de faire bouger les repères traditionnels du droit de la responsabilité et de ne plus se fonder exclusivement sur la notion de risque Il ne s’agit pas toutefois d’une solution isolée. ⚖ Elle se rapproche d’une autre solution consacrée par l’arrêt Conseil d'Etat 9 juillet 2003 Assistance Publique de Paris c/ Marzouk à propos de la défectuosité d’un respirateur artificiel En l’espèce, le Conseil d'Etat va faire prévaloir un régime de responsabilité sans faute extérieur au droit public car tiré d’une directive communautaire du 25 juillet 1985 et d’une loi du 19 mai 1998 qui ouvre de plein droit une indemnisation aux victimes d’accidents liés à l’utilisation de produits et d’appareils défectueux La responsabilité est une responsabilité de plein droit tiré exclusivement de la défectuosité de l’appareil / l’idée de risque est absente.La reconnaissance de la responsabilité sans faute pour ce type d’accident permet d’écarter l’argument du cas fortuit qui dans le cas d’un régime de responsabilité pour faute aurait pu être opposé aux victimes. B. LES SITUATIONS DANGEREUSES La jurisprudence admet également que l’administration soit amenée à indemniser les préjudices subis par certaines personnes exposées à un risque spécial de dommage en raison des obligations que l’administration leur impose. La jurisprudence sur les situations dangereuses a été inaugurée par un arrêt Perruche du 19 octobre 1962 et confirmée par un arrêt Martin du 16 octobre 1970. Elle concerne des situations très exceptionnelles. ⚖ Conseil d'Etat, sect. 29 octobre 1962 Perruche : L’Etat a été condamné à réparer les dommages causés au consul de France à Séoul (ses biens furent pillés) lors de l’occupation de la ville par les troupes nord-corréennes en 1950. Le Conseil d'Etat juge en effet qu’en prescrivant au Consul de rester en poste malgré les hostilités, le gouvernement français sans avoir commis de faute l’a placé dans une situation qui comportait des risques exceptionnels pour sa personnes comme pour ses biens. ⚖ Conseil d'Etat, Ass. 16 oct. 1970 époux Martin : à propos des dommages subis par des fonctionnaires français tenus de rester en poste au Laos. Elle a trouvé aussi à s’appliquer à des personnes exposés du fait de l’administration à des risques anormaux de contagion virale ⚖ Conseil d'Etat, Ass. 6 nov. 1968 Dame Saulze : l’Etat est tenu de réparer le risque spécial de dommage (lié à la naissance d’un enfant anormal) auquel a été exposé en raison de ses obligations professionnelles une institutrice en état de grossesse alors que sévissait dans l’école où elle enseignait une épidémie de rubéole. ⚖ TA Paris 20 décembre 1990 Epoux B. Le mari d’une infirmière elle même contaminée par le virus du Sida à l’occasion de ses fonctions hospitalières doit être considérée comme ayant été exposé à un risque spécial et anormal de contagion du fait que la maladie se transmet à l’occasion de relations sexuelles. C. L’UTILISATION PAR L’ADMINISTRATION DE METHODES DANGEREUSES. L’application de la notion de « méthodes dangereuses » concerne essentiellement les dommages causés aux tiers par des individus qui en raison du danger qu’il présente pour la société ont été placés en détention par l’administration. Les méthodes sont réputés dangereuses au sens où, misant sur l’éducation et la réinsertion des individus, elles rompent avec une approche carcérale de la détention et présentent de ce fait un risque pour les tiers susceptibles d’être victimes d’agression. Cela concerne d’abord les jeunes délinquants. Il y a eu l’idée que les mineurs, même délinquant, méritent de bénéficier de mesures éducatives. Ils sont isolaient du reste de la société mais ils disposent de mesures éducative. Mais la théorie du risque trouve ici ses limites. Parce ces méthodes libérales d’incarcération sont devenues aujourd’hui la règle générale et qu’on ne voit en quoi elles seraient plus dangereuses au final que les méthodes restrictives. En ce sens, la notion de risque spécial tend à être concurrencée par un nouveau de responsabilité fondé sur la notion de garde. 1) Le risque comme explication de la responsabilité de l’administration du fait des personnes placées sous son autorité Cette notion a été mise en œuvre pour la première fois en raison de l’utilisation par le Ministère de la justice de méthodes libérales d’éducation surveillée destinées aux mineures délinquants. 👉 Explications : L’éducation surveillée introduit par l’ordonnance de 1945 sur les mineurs rompt avec l’organisation carcérale qui prévalait dans les anciennes maisons de corrections. Par une plus large ouverture sur l’extérieur, elle vise en à favoriser la réinsertion des jeunes délinquants mais elles offrent à ces derniers de larges possibilités d’évasion. Or il est fréquent que les jeunes délinquants « en cavale » profite de leur liberté retrouvée pour se livrer à de nouvelles activités délictueuses (vols de voiture, cambriolage, agressions). ⚖ L’arrêt Thouzelier du 3 février 1956 va admettre la responsabilité sans faute de l’Etat au motif que les méthodes d’éducation surveillée créaient un risque spécial pour les tiers résidant dans le voisinage de l’institution. La jurisprudence Thouzelier a été par la suite étendue à d’autres cas analogues où l’administration met en oeuvre des méthodes libérales d’internement d’individus dangereux : > à propos du traitement des malades mentaux hébergés dans les hôpitaux psychiatriques et qui bénéficient en vue d’assurer leur réadaptation progressive soit de sorties d’essai => ⚖ Conseil d'Etat, 1967 Département de la Moselle. > à propos d’un malade placé dans une ferme et qui y avait allumé un incendie) soit leur état s’étant amélioré d’un placement familial surveillé =>⚖ Conseil d'Etat, 1987 Mme Piollet. à propos encore des détenus des établissements de l’administration pénitentiaire qui bénéficient : o soit d’un régime des permissions de sortie => ⚖ Conseil d'Etat 1981 Theys et Conseil d'Etat 1985 Mme Henry o mais également de mesure de libération conditionnelle => ⚖ Conseil d'Etat 1987 Garde des sceaux, Ministre de la justice contre Banque populaire de la région économique de Strasbourg. Cette solution est particulièrement généreuse dans la mesure où la libération conditionnelle n’impliquant normalement un retour en prison, l’ancien détenu n’est plus en fait sous la responsabilité de l’administration. Cependant les libérations conditionnelles restent des mesures prononcées à titre tout à fait exceptionnel en pratique. o Cependant confirmé par CAA Paris 20 décembre 2013 Ministre c/ Fonds de garanties des victimes d’actes de terrorisme et autres infractions o Mais non à l’égard de détenus ayant fait l’objet d’une mesure libération anticipée à la suite d’une confusion de peines => ⚖ CE 15 février 2006 Ministre de la justice c/ consorts A. Initialement, la jurisprudence exige donc un lien de causalité direct : la victime doit résider dans le voisinage de l’institution. La notion va toutefois s’avérer d’un maniement délicat. On pouvait hésiter entre un critère spatial (risque spécial encouru par les voisins du centre) ou un critère temporel (dommage subi dans un délai plus ou moins bref après l’évasion) Après avoir semblé opter pour le critère spatial dans l’arrêt Thouzelier, la jurisprudence administrative retient aujourd’hui le critère temporel. La rapidité des moyens de transport (en stop ou en voiture volée) explique ce choix. Ainsi un vol commis trois jours après l’évasion ouvre droit à une indemnité pour le propriétaire => ⚖ Conseil d'Etat, 1966 Trouillet. A l’inverse, un délit commis au bout de 19 jours n’ouvre droit à aucune indemnité sur la base de la responsabilité sans faute de l’Etat => ⚖ Conseil d'Etat 1965 Caisse de sécurité sociale de la région parisienne. ⚖ L’arrêt Banque Populaire comporte d’ailleurs un autre élément : le hold-up commis par trois anciens détenus s’était produit trois mois après leur libération. Ce délai de 3 mois excédait largement le délai admis par la jurisprudence pour faire jouer la responsabilité pour risque. Le juge a toutefois qu’en l’espèce il existait un lien de causalité entre le préjudice subi par la banque et la libération des détenus dans la mesure où depuis leur libération, ceux-ci avaient procédé à une série de d’attaque à main armée à raison d’une tous les 15 jours. La justification de cette jurisprudence est l’origine fondée sur le caractère expérimental et le danger qui en résulte de ce type de méthode a cependant vieillie. Les méthodes ouvertes axées sur l’objectif de réinsertion sont aujourd’hui généralisées car elles se sont avérées au total plus efficace que les méthodes d’enfermement pur et simple. 2) La garde, de la couverture du risque spécial de dommage au risque social L’hypothèse concerne les enfants non délinquants faisant l’objet d’assistance éducative ou de mesures de placement en institution ou en famille d’accueil => ⚖ CE 11 février 2005 Axa Courtage. La promotion de la notion de garde tient à ce que la notion de risque spécial n’est pas extensible à l’ensemble des hypothèses où des mineurs sont placés sous la protection de l’Etat (assistance éducative, ou a fortiori, de pupilles de l'État). C’est ce que rappelait le commissaire du Gouvernement D. LABETOULLE à l'occasion de l'affaire Nemoz : « Il est artificiel et abusif de considérer que l'on crée un risque en appliquant des méthodes de rééducation libérale en milieu semi-ouvert à des mineurs qui ne sont pas privés de leur liberté » (RDSS 1997. 437) – et ceci vaut, a plus forte raison pour ceux des mineurs qui sont placés parce qu'ils sont en danger. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la responsabilité (en l'occurrence, d'un département) n'était alors engagée qu'en cas de faute (⚖ CE 18 nov. 1988, Mlle Coirier, Lebon T. 1000), les mineurs ne relevant pas de l'ordonnance de 1945 n'étant pas réputés faire courir de risque spécial aux tiers. ⚖ En 2005, par l’arrêt Axa Courtage le Conseil d'État engage de plein droit la responsabilité de l'État à raison de dommages causés par un mineur faisant l'objet d'une mesure d'assistance éducative, mais sans recourir à la notion de risque spécial encouru par les tiers. Au contraire, il expliquait que « la décision par laquelle le juge des enfants confie la garde d'un mineur […] transfère à la personne qui en est chargée la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie du mineur ; qu'en raison des pouvoir dont l'État se trouve ainsi investi lorsque le mineur a été confié à un service ou un établissement qui relève de son autorité, sa responsabilité est engagée, même sans faute, pour les dommages causés aux tiers par ce mineur ». L’arrêt retient une construction déjà admise en droit privé sur le terrain de la responsabilité du fait d’autrui. Le CE définit la garde comme « la responsabilité d’organiser, diriger et contrôler la vie du mineur » C’est la notion de garde qui justifie ici l’imputabilité de la responsabilité et non le risque. Pour autant L’administration n’est gardienne au sens de la jurisprudence administrative que dans la mesure où elle dispose d’un pouvoir juridique, d’un pouvoir d’autorité sur l’organisation, la direction et le contrôle du mineur protégé. Ce qui conduit à opposer la garde juridique à la seule garde matérielle consistant dans la surveillance quotidienne des activités d’autrui. La garde est la responsabilité d’organiser, de diriger et de contrôler la vie du mineur. Le juge administratif fait une application limitée de cette notion : elle ne concerne que quelques catégories de mineurs confiés à l’administration (pupilles de l’Etat, mineurs protégés, mineurs placés sur décision de justice) et non l’ensemble des personnes relevant de l’administration au sens de la jurisprudence Thouzelier (mineurs détenus ou mineurs faisant l’objet d’un accueil de jour en hôpital psychiatrique). Il n’en reste pas moins que la notion de garde a été appliqué à des hypothèses couvertes jusqu’alors par la jurisprudence Thouzelier et notamment aux mineurs délinquants régis par l'ordonnance de 1945 => ⚖ CE, sect., 1er févr. 2006, Garde des Sceaux c/ MAIF, req. no 268147, le CE applique la notion de garde à un dommage crée par un jeune délinquant. La doctrine a insisté dans ces cas sur le risque de concurrence entre deux fondements de la responsabilités. On trouve en effet dans les conclusions des commissaires du gouvernement l’idée que notion de risque spécial est sinon évacuée, du moins reléguée au titre de fondement possible, mais non nécessaire de la responsabilité encourue à raison des dommages causés par des mineurs faisant l'objet de placement. Comment le risque spécial s’articule avec la notion de garde. ⚖ Ainsi C. DEVYS concluant sur l'arrêt GIE Axa Courtage avait cherché à lier les deux concepts de risque et de garde (insistant sur la dimension « commune » du risque entendu comme potentiellement indépendant des idées de dangerosité et de spécificité) ; ce qui pourrait conduire prévenait--il à vider de son contenu la jurisprudence Thouzelier. ⚖ Mieux M. GUYOMAR, concluant sur l'arrêt Garde des Sceaux c/ MAIF (CE, sect., 1er févr. 2006), proposait une substitution de la garde au risque spécial et donc la disparition de la jurisprudence Thouzelier. ⚖ Dans ce dernier arrêt CE 1 févr. 2006 Garde des sceaux / MAIF, le CE a toutefois préféré opter pour un mécanisme de cumul de responsabilités et donc pour une coexistence plus qu’une concurrence. Le CE y souligne que la responsabilité liée à la garde d'un mineur (ici, relevant de l'ordonnance de 1945) « ne fait pas obstacle à ce que soit également recherchée […] la responsabilité de l'État en raison du risque spécial créé pour les tiers du fait de la mise en œuvre d'une des mesures de liberté surveillée prévues par l'ordonnance du 2 février 1945 ». Cette solution du cumul de responsabilités tient compte du fait que le gardien du mineur n’est pas nécessairement l’Etat. Il peut s’agir par exemple d’une institution privée à qui l’Etat a confié la garde du mineur. En ce sens, elle est favorable aux victimes qui peuvent toujours préférer faire jouer le risque spécial, fondement de la responsabilité de l'État, afin de ne pas se heurter à l’insolvabilité du gardien privé. Elle est aussi favorable aux gardiens (Département, Institution de droit privé) (et leurs assureurs) qui peuvent, après avoir été condamnés sur le fondement de la garde d'autrui, se retourner contre l'État sur celui du risque spécial. ⚖ Pour une illustration : CE 16 juin 2008, Garde des Sceaux c/ Montjoie et MAIF : à propos d’un mineur délinquant placés par le juge des enfants auprès d’une institution de droit privé. A la suite d’un incendie provoqué par le mineur, l’association en cause a été condamné par le juge civil à réparer les dommages subis. L’arrêt du 16 juin 2008 reconnait à l’association de la possibilité se retourner contre l’Etat dès lors que la responsabilité de l’Etat sur le fondement de la jurisprudence Thouzelier était engagée. 2) Interrogations soulevées par le recours à la notion de garde quant aux fondements de la responsabilité sans faute La jurisprudence GIE Axa courtage a suscité un fort débat doctrinal au regard de son fondement, ses conditions d’application et son champ d’application. L’utilisation d’un concept de droit privé s’avère plus perturbateur qu’autre chose La question est de savoir comment ce nouveau fondement s'insère parmi les différents mécanismes de responsabilité sans faute. Est-ce le prolongement du risque ou l’annonce d’autre chose ? D’abord, on peut soutenir que la garde et le risque entretiennent des rapports étroits, de sorte que la première ne serait en réalité qu'une évolution de la seconde. En ce sens, on notera que la notion de garde tend à jouer un rôle explicite dans d’autres domaines de la responsabilité 👉 Ainsi pour la responsabilité sans faute du fait des ouvrages publics ⚖ Par exemple, CE 3 mai 2006, Min. Écologie et développement durable : inondations aggravées par la présence d’ouvrages publics et qui tient le maître d’ouvrage responsable des ouvrages dont il a la garde) Mais cette explication n’est pas totalement convaincante. Elle n’explique pas la différence de régimes entre les deux responsabilités. En effet, le CE admet la réparation intégrale d'éventuels dommages, en cas de garde. Au contraire, la responsabilité pour risque s'accompagne au contraire d’une condition de gravité des préjudices. Ensuite, à l’inverse, cette référence à la garde déjà présente dans la jurisprudence sur les travaux publics dès 1989 => CE 10 Mai 1989 Commune de Saint Amand Montrond, n’a pas transformé le régime traditionnel de la responsabilité sans faute pour dommages permanents de travaux publics => CE 24 juillet 1931 Commune de Vic Fezensac. On pourrait encore considérer qu'il s'agit ici d'un nouveau régime de responsabilité objective de plein droit, fondée sur l'idée de « garantie » (V. en ce sens : C. BROYELLE, JCP A 2007. 2083) applicable à différents types de situation. En ce sens, cette évolution peut se réclamer d’une tendance générale qui voit l’Etat couvrir des risques sociaux (auxquels expose la vie sociale) qui ne sont pas de son fait. §.3. LE RISQUE-SOCIAL La responsabilité pour risque connaît depuis quelques années un élargissement dans des hypothèses nouvelles où il s’agit moins de réparer un risque généré par l’administration que de protéger les particuliers contre certains risques sociaux. Cette idée n’est pas absente on l’a vu de la jurisprudence sur la notion de garde. On est ici à la limite du droit de la responsabilité tant ces différents régimes sont animés par une logique d’ordre assurantiel. C’est une responsabilité du non fait de l’administration (D. Truchet). L’objectif est que la collectivité assure l’indemnisation. Au demeurant, cette logique conduit à préférer de nouvelles techniques juridiques et à substituer à la responsabilité sans faute le système des fonds d’indemnisation institués par la loi. A. LA DIVERSITE DES RISQUES SOCIAUX COUVERTS PAR L’ADMINISTRATION L’administration peut être amenée à couvrir des risques qui ne découle pas directement (ou qui découlent seulement partiellement) de son activité. Ce type de contentieux est traditionnellement illustré par la responsabilité du fait des rassemblements et des attroupements. Mais cette problématique tend à se développer en matière de santé publique et en matière de dommages causés par des mineurs placés sous la protection (la garde) de l’administration 1. La responsabilité de l’Etat du fait des rassemblements et attroupement. Selon 📕 l'article 431-3 du code pénal, « constitue un attroupement tout rassemblement de personnes sur la voie publique ou dans un lieu public susceptible de troubler l'ordre public » Historiquement cette responsabilité pesait sur les communes et son contentieux relevait de la compétence judiciaire. C’était la communauté des habitants qui étaient visés. Désormais, la responsabilité de l’administration du fait des rassemblements et attroupements pèse sur l’Etat (loi du 7 janvier 1983) et relèvent de la compétence du Juge administratif (loi du 9 janvier 1986). 📕 Article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure : « L'État est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens. Il peut exercer une action récursoire contre la commune lorsque la responsabilité de celle-ci se trouve engagée ». Cette responsabilité est une responsabilité sans faute encourue de plein droit à raison du risque social inhérents aux attroupements et aux rassemblements. Elle peut être activée : - par les particuliers victimes de violences physique ou de dégradation de biens (par exemple les commerçants dont les vitrines sont endommagées) - mais aussi les communes en cas de dégradation de bâtiments publics, de mobiliers urbains ou de la voie publique ; voire également par les manifestants eux-mêmes. Ce régime était très favorable aux victimes. Mais peut être un peu moins depuis que le contentieux appartient au juge administratif. A mesure que ce multiplie les manifestation, cela donne lieu à la recrudescence de violence en marge des mouvements sociaux. Le juge administratif va relever son niveau d’exigence. a) Un régime conditionné Plusieurs conditions déterminent la mise en jeu de ce régime : 👉 Les dommages doivent être imputables à un fait collectif notamment une manifestation. Toutefois l'origine des dommages ne doit pas résulter d'une action préméditée mais spontanée. Ainsi, les dommages qui sont le fait de casseurs agissant en marge de la manifestation, ou résultent d'actions délibérées et organisées des manifestants, ne peuvent entrer dans le champ de ce régime de responsabilité. => ⚖ TC, 15 janvier 1990, Chamboulive et autre c/Commune de Vallecalle, n° 02607. Dès lors un tel régime de sans faute pour attroupement ne peut s'appliquer que si le dommage trouve sa source dans « des agissements plus ou moins spontanés et inorganisés issus de mouvements de foule. » Il ne concerne aucunement des actions froidement préméditées et soigneusement mises au point par un petit groupe de personnes, qui constituent en réalité des opérations de « commando », de même nature que ces actions criminelles de droit commun couramment désignées sous le nom de « hold up » => ⚖ Concl. L. Charbonnier, sur TC, 15 janvier 1990, Chamboulive et autre c/Commune de Vallecalle, n° 02607, Rev. Fr. Droit adm. 7 (4), juillet-août 1991 p. 551. Ainsi ne sont pas compris les dommages causés par des groupes de quelques unités constituées en commandos avec l’intention de nuire (par exemple le saccage d’un supermarché par une bande de jeunes des banlieues : - ⚖ Conseil d'Etat 12 nov. 1997 AGF ou l'interception d'un camion transportant de la viande par un groupe d'une soixantaine de personnes, et le déversement du chargement du camion sur un parking, arrosé de carburant et rendu impropre à la consommation, « eu égard notamment au caractère prémédité de ces actions ». C’est une bande de jeune qui saccage un supermarché. Le CE refuse de faire jouer la responsabilité du fait des attroupements. ⚖ Conseil d'État, 26 mars 2004, Sté BV Exportslachterij Apeldoorn ESA, n° 248623, une soixantaine d’agriculteur qui bloque les routes, et intercepter des camions de viande au motif que ce sont des viandes importées. Ils vides le camion. Le CE dispose qu’on est pas dans un attroupement. Cette distinction entre les actes spontanés et les actes prémédités donne lieu traditionnellement à des hésitations : ⚖ Ainsi Conseil d'Etat 29 déc. 2000 AGF : des violences urbaines entrent dans le champ de la loi. Par contre (Conseil d'Etat 13 déc. 2002 Assurances Les Lloyds de Londres) les dégâts causé par des groupes de jeunes à la suite d’une bagarre dans une discothèque n’engage pas la responsabilité de l’Etat. ⚖ Une affaire récente illustre ces difficultés CE 28 oct. 2022, Ministre de l’Intérieur c/ SANEF, n° 451659. > En l’espèce, une vingtaine de personnes de la communauté des gens du voyage s’est rassemblée devant la gendarmerie de Roye, dans la Somme, pour tenter d’obtenir l’extraction d’un membre de leur communauté, détenu à la maison d’arrêt d’Amiens, afin qu’il puisse assister aux obsèques de son père décédé quelques jours auparavant, lors d’une fusillade qui a fait quatre morts. > Une série d’actes délictuels est commis, un vol de pneumatiques route, une opération escargot et barricade de pneus en feu sur l’A1, entraînant un bouchon sur une longueur de 7 kilomètres. > Deux camions de gens du voyage forcent la porte de service de l’autoroute, et un camion est dérobé pour faire barrage. Au total, plusieurs dizaines de milliers d’euros de vol et de dégradations seront comptabilisées au préjudice de la la société d’autoroute. > En l’espèce, en appel, la CAA Douai avait admis la responsabilité de l’Etat jugeant que les dommages sont directement liés à un attroupement ou à un rassemblement au sens de l’article L.211-10 CSI. Elle juge que « les dégradations et dommages causés à la société SANEF, bien que prémédités, ont été commis à l’occasion d’une manifestation sur une autoroute organisée par une partie de la communauté des gens du voyage qui s’était réunie en vue d’obtenir la libération temporaire d’un membre de cette communauté afin qu’il puisse assister aux funérailles de son père et auxquelles ont participé quelques dizaines de membres, et non par un groupe identifié qui se serait constitué et organisé à seule fin de commettre des délits sans lien avec cette manifestation ». La Cour estime que les dommages ont été le fait d’un groupe qui s’était constitué dans un autre but que d’occasionner des dommages. Le Conseil d’État ne retient pas la lecture proposée par la cour administrative d’appel. Il considère que les dégradations et dommages subis par la société s’inscrivent bien « dans un ensemble d’actions délictuelles, concertées et préméditées, notamment des dégradations, vols de matériels et de véhicules commis en ville, en dehors de l’autoroute, et sur l’autoroute, et la menace d’autres actions violentes », et ne « procédaient pas d’une action spontanée dans le cadre ou le prolongement d’un attroupement ou rassemblement mais d’une action préméditée, organisée par un groupe structuré à seule fin de les commettre ». En l’espèce, il écarte la responsabilité de l’Etat considérant que les actions délictuelles qui se sont déroulés lors du rassemblement étaient sont préméditées. Cet arrêt s’éloigne d’une tendance plus accommodante que l’on avait pu percevoir dans la jurisprudence la plus récente et dont pouvait se réclamer l’arrêt de la CAA de Douai. ⚖ Ainsi, la responsabilité de l’Etat a été appliqué à propos des émeutes de Villiers-le-Bel, Conseil d'État, 30 décembre 2016, Société Covea risks, n° 386536. > A la suite du décès de deux adolescents, victimes d’une collision entre leur moto et un véhicule de police. > Une foule de jeunes s’est rassemblée spontanément puis s’est pour partie mise à déclencher incendies et dégradations. > Les auteurs des dégradations avaient utilisé des moyens de communication pour attirer la foule, lancé des cocktails Molotov, utilisé des battes de base-ball et formé des groupes mobiles, conférant ainsi à leur action un caractère organisé. > Mais le Conseil d’Etat va juger que l’incendie avait été provoqué par des personnes qui étaient au nombre de celles qui s'étaient spontanément rassemblées, peu de temps auparavant, pour manifester leur émotion après le décès des deux adolescents. ⚖ Plus récemment encore, dans l'affaire de la commune de Saint-Lô, Conseil d'État, 7 décembre 2017, Commune de Saint-Lô, n° 400801 ; Conseil d'État, 3 octobre 2018, Commune de Saint- Lô, n° 416352. > Le CE a constaté pour engager la responsabilité de l'État pour attroupement 4 que les dégradations sur la voie publique commises à l'occasion d'une manifestation présentaient un caractère organisé et prémédité mais qu'elles avaient été commises dans le cadre d'une manifestation sur la voie publique convoquée par plusieurs organisations syndicales à laquelle avaient participé plusieurs centaines d'agriculteurs. > Dès lors les dégradations n'ont pas été commises « par un groupe qui se serait constitué et organisé à seule fin de commettre des délits »,

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