Chapitre 1 - La place de l’outil statistique - PDF

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The document presents an overview of research methods in social sciences, highlighting the role of statistical tools and emphasizing the construction of research objects and the use of quantitative methods.

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Chapitre 1 La place de l’outil statistique dans la démarche de recherche en sciences sociales S 1 Plan du chapitre Partie 1 : La démarche de recherche en scien...

Chapitre 1 La place de l’outil statistique dans la démarche de recherche en sciences sociales S 1 Plan du chapitre Partie 1 : La démarche de recherche en sciences sociales I. Etape 1 et 2 : La construction de l’objet d’étude II. Etape 3 : Approfondir le sujet : la recherche documentaire et la constitution d’une bibliographie III. Etape 4 : Construire la problématique IV. Etape 5 : Construire les outils d’enquête V. Etape 6 : Recueillir les informations VI. Etape 7 : Interpréter les données et restituer Partie 2 : Les méthodes quantitatives I. Définitions II. Objectifs III. L’enquête par questionnaire IV. De la question à la variable 2 1 Partie 1 La démarche de recherche en sciences sociales S 3 Introduction 1. Les méthodes de recherche : des outils pour comprendre le fonctionnement et le comportement social S Le métier de sociologue : décrire, expliquer, comprendre, dévoiler, les faits sociaux c’est-à-dire la manière dont fonctionne la société S Suppose une démarche spécifique : processus de recherche scientifique : S Observer la réalité sociale S Définir un objet S Elaborer des hypothèses S Recueillir des données, des résultats S Interpréter, analyser ces résultats S La méthodologie consiste à formaliser comment se construit et se réalise une démarche de recherche, qui débouche sur la production de résultats empiriques et théoriques. 4 2 2) Les 7 étapes d’enquête 5 I. Etape 1 & 2 : La construction de 8 l’objet 1. Déconstruire et reconstruire l’objet S Démarche scientifique : S Observation d’un phénomène S Hypothèses S Récolte de données S Interprétation, explication raisons, mécanismes, causes 6 3 Le don S Marcel Mauss (1873-1950) S « Essai sur le don : forme et raison de l'échange dans les sociétés archaïques », L’Année sociologique, 1923 7 Le choix du prénom Filles Garçons 1. Louise 6. Léa 1. Gabriel 6. Adam 2. Emma 7. Lina 2. Raphaël 7. Louis 3. Jade 8. Mila 3. Jules 8. Liam 4. Chloé 9. Manon 4. Léo 9. Ethan 5. Alice 10. Inès 5. Lucas 10. Hugo https://www.laurencepernoud.com/grossesse/prenoms/top-prenoms-2018.html 8 4 Emma https://dataaddict.fr/prenoms/#emma-f 9 Raymond https://dataaddict.fr/prenoms/#emma-f 10 5 Jennifer https://dataaddict.fr/prenoms/#emma-f 11 L’école S On pourrait penser que l’école permet à tous de réussir S Valeur promue par l’école = mérite S Mais dans les faits, les élèves n’ont pas les mêmes chances de réussite selon leur milieu social d’origine 12 6 Type de baccalauréat obtenu parmi les bacheliers d’une catégorie sociale données (en %) Bac Bac Bac général technologique professionnel Artisans, commerçants, chefs 48 20 31 d’entreprise Agriculteurs 54 19 27 Cadres supérieurs 76 14 10 Professions intermédiaires 58 23 20 Employés 49 26 24 Ouvriers 31 23 46 Retraités 38 21 41 Ensemble 48 21 31 Lecture : parmi les enfants d'ouvriers bacheliers, 31 % ont obtenu un bac général en 2012, contre 76 % pour les enfants de cadres supérieurs bacheliers. Source : Ministère de l'Éducation nationale - Données 2012 - © Observatoire des inégalités (http://www.inegalites.fr/spip.php?page=article&id_article=272 ) 13 Type de baccalauréat obtenu parmi les bacheliers d’une catégorie sociale données (en %) Bac Bac Bac général technologique professionnel Artisans, commerçants, chefs 48 20 31 d’entreprise Agriculteurs 54 19 27 Cadres supérieurs 76 14 10 Professions intermédiaires 58 23 20 Employés 49 26 24 Ouvriers 31 23 46 Retraités 38 21 41 Ensemble 48 21 31 Lecture : parmi les enfants d'ouvriers bacheliers, 31 % ont obtenu un bac général en 2012, contre 76 % pour les enfants de cadres supérieurs bacheliers. Source : Ministère de l'Éducation nationale - Données 2012 - © Observatoire des inégalités (http://www.inegalites.fr/spip.php?page=article&id_article=272 ) 14 7 S En 2020, 78 % des jeunes âgés de 20 à 24 ans possèdent un baccalauréat 15 S En 2020, 65 % des jeunes âgés de 20 à 24 ans étudient ou ont étudié dans le supérieur https://publication.enseignementsup- recherche.gouv.fr/eesr/FR/T448/le_niveau_d_etudes_selon_le_milieu_social/ 16 8 Diplômes de l’ES selon le milieu social https://publication.enseignementsup-recherche.gouv.fr/eesr/FR/T448/le_niveau_d_etudes_selon_le_milieu_social/ 17 Le couple S On pourrait penser que la rencontre amoureuse = hasard, « coup de foudre » S Dans les faits : la foudre ne tombe pas au hasard. Homogamie sociale à un choix contraint par l’appartenance sociale. 18 9 http://slideplayer.fr/slide/5498070/ 19 I. Etape 1 & 2 : La construction de l’objet S Dans ces exemples, le savoir sociologique remet en question les préjugés, les prénotions, les idées reçues sur le sujet considéré. S A chaque fois: S « On pourrait penser que… mais en fait, la sociologie montre que… » ⇒ la problématique Voir le livret méthodologique sur l’ENT (page 11) 20 10 2. Deux nécessités S Le travail de distanciation S « Je crois que la sociologie de la sociologie est une dimension fondamentale de l’épistémologie de la sociologie. Loin d’être une spécialité parmi d’autres, elle est le préalable nécessaire de toute pratique sociologique rigoureuse. A mon avis, une des principales sources d’erreur dans les sciences sociales réside dans une relation incontrôlée à l’objet qui conduit à projeter cette relation non analysée dans l’objet de l’analyse. Ce qui me désole lorsque je lis certains travaux de sociologie, c’est que ceux qui font profession d’objectiver le monde social se montrent si rarement capables de s’objectiver eux-mêmes et ignorent si souvent que leur discours apparemment scientifique parle moins de leur objet que de leur relation à l’objet. » S P. Bourdieu, Réponses, Seuil, 1992, p48. 21 2. Deux nécessités S S’affranchir des prénotions S « Il faut donc que le sociologue, soit au moment où il détermine l’objet de ses recherches, soit dans le cours de ses démonstrations, s’interdise résolument l’emploi de ces concepts qui se sont formés en dehors de la science et pour des besoins qui n’ont rien de scientifique. Il faut qu’il s’affranchisse de ces fausses évidences qui dominent l’esprit du vulgaire, qu’il secoue une fois pour toutes, le joug de ces catégories empiriques qu’une longue accoutumance finit souvent par rendre tyranniques. Tout au moins, si parfois la nécessité l’oblige à y recourir, qu’il le fasse en ayant conscience de leur peu de valeur, afin de ne pas les appeler à jouer dans la doctrine un rôle dont elles ne sont pas dignes » S Emile Durkheim, Les règles de la méthode sociologique, première édition, 1895, Paris, PUF, 20ème éd. 1981, p32. S « Les prénotions sont comme un voile qui s'interpose entre les choses et nous et qui nous les masque d'autant mieux qu'on le croit plus transparent. » 22 11 II. Etape 3 : Approfondir le sujet 1. Se documenter en sciences sociales (LM p. 3) 2. Citer ses sources (LM p. 10) 3. Construire une bibliographie (LM p. 10) S Les trois règles d’or 23 III. Etape 4 : Construire la problématique 1. Sujet, objet, question de départ, problématique, hypothèses 24 12 L’exclusion sociale des SDF Le travail d’accompagnement social chez Emmaüs Travail de terrain Problème: Les intervenant·es sociales sont elleux aussi en difficulté Loison-Leruste Marie, « Au cœur de l’exclusion. Enquête auprès des salariés d’Emmaüs », Sociologie, N 4, vol. 6, p. 359-376, 2015. 25 III. Etape 4 : Construire la problématique 2. La problématique (LM page 12) S ”[Acte consistant] dans le fait de formuler une énigme ayant ceci de spécifique que sa réponse appelle nécessairement à la fois la construction d’un objet sociologique et une démarche d’enquête empirique.” Lemieux, Cyril, in Paugam, Serge (dir.), 2010, L’enquête sociologique, Paris, PUF, p. 30. Truc et astuce: « On pense souvent que… mais en réalité c’est un peu plus compliqué que ça… » 26 13 III. Etape 4 : Construire la problématique 3. Les hypothèses : proposer des explications S Se familiariser avec le phénomène (lectures, recherches d’information, discussions) S S’informer sur l’actualité S Faire une « pré-enquête » S Analyser les premières données 4. Les leçons du terrain → Formuler des hypothèses! 27 IV. Etape 5 : Construire les outils d’enquête S Des hypothèses à l’enquête S 2 grands types de méthodes, correspondant aux 2 types de données : S Méthodes quantitatives à Données chiffrées, quantitatives S Méthodes qualitatives à Autres types de données (textuelles, images) 28 14 Les données qualitatives S Des matériaux qualitatifs S Entretiens S Descriptions (d’un lieu, de différents groupes sociaux, de séquences d’activité; portraits…) S Plan, photos, vidéos, etc. 29 Les besoins de ressources à l’action sont souvent du ressort de l’assistance sociale : demande de domiciliation, de justificatifs de nationalité et/ou de titre de séjour, enregistrement sur des listes d’attente pour des logements et des emplois aidés, etc. Les Exemple : Le travail d’accompagnement des démarches administratives diffèrent selon l’âge, le type de violences subies, le parcours migratoire et la situation face à l’emploi et la santé. Mais surtout, elles prennent du temps. femmes sans domicile Car les femmes qui sont accueillies à l’Escale comme au Foyer des femmes ont souvent de nombreuses difficultés à les entreprendre. Barbara, animatrice au Foyer des femmes, explique en détail le rapport difficile que certaines femmes entretiennent à leurs « papiers » et le travail qu’elle réalise avec elles : « Le travail administratif au niveau des papiers il est quand même extrêmement complexe, rude et lourd (…) C’est tellement important pour les femmes de ne pas se faire avoir par les papiers. Tu sais moi je vois les entretiens au début, elles arrivent elles ont des sacs plastique partout, des papiers en trois, en huit, en machin qui sont mouillés, qui sont… t’en as… les S LOISON M., 2023a, Des autres qui sont dans la rue qui les ont pliés comme ça dans la ceinture, etc. Et quand, à la fin de l’entretien, t’as un dossier (…) bien rangé etc. Tu vois, même femmes sans domicile le tas a disparu, tout est dans un truc… faut y aller progressivement hein, tout le monde ne passe pas de ça à ça, tu lâches pas le sac comme ça forcément. invisibles ? Repenser le Mais tu vois (soupir), elles sont comme ça… elles sont, c’est la détente, ça y est, c’est regroupé, tu vois. Mais là sans en avoir l’air t’as fait un travail sans-domicilisme au phénoménal sur le plan psychologique. Mais tu travailles avec elles non pas prisme du genre, pour elles. Et tu leur dis, tu les impliques sans en voir l’air “tiens tu me passes ce papier, tiens-ci, tiens-ça”, voilà, tu vois ? Et elles rangent. C’est le travail Mémoire pour que je fais avec Sonia en ce moment. Et Sonia c’est très anxiogène pour elle, faut voir Sonia quand elle range les papiers avec moi. (...) Je lui ai pris un beau l’habilitation à diriger classeur avec des intercalaires, des pochettes plastiques de façon à ce que tout les recherches, son tas, on le range petit à petit dans le classeur. Et tu verrais comment elle est au début et comment elle est à la fin. Mais chaque entretien faut repartir, Conservatoire National faut recommencer à zéro. Elle lit un papier, sait pas le ranger, pour elle c’est ce qu’il y a dessus qui est très anxiogène pour elle. Donc il y a des papiers des Arts et Métiers. dont elle n’arrive pas à se séparer, des papiers qu’elle arrive à jeter, d’autres qu’elle n’arrive pas à jeter, des papiers qui lui font du mal, des papiers qui sont réconfortants… c’est fou ce qui peut se passer au niveau de ça, tu vois. Mettre de l’ordre dans sa vie… (…) Ça ça prend un temps fou. On n’a pas le temps de faire tout ça. Donc souvent on va faire à leur place et ça c’est pas bien. » (Barbara Oudot, 65 ans, Animatrice socio-éducative, EpF3, 29/04/2016, Enquête « Foyer des femmes ») Pour les femmes qui ne parlent pas bien français ou qui ne savent ni lire ni écrire, les 30 démarches sont évidemment plus complexes et obligent les intervenant·es sociales à faire « pour elles » et moins « avec elles » : « C’est à peu près 60% de notre public. 30% qui savent pratiquement, tu vois le nombre de femmes qui ne savent pas lire, écrire etc., comprendre le français, donc voilà. Donc tu es bien obligée de faire pour elles et non pas 299 15 Elle génère aussi chez certaines femmes comme Salma (Portrait 17) des angoisses qui ont un impact sur la santé mentale. Portrait 17. Salma Ayouch Salma est d’origine marocaine. Elle passe son enfance dans un petit village près d’Agadir et n’a pas une enfance heureuse. Sa mère décède alors qu’elle est encore très jeune, son père se remet en ménage et elle est battue par lui et par ses frères. « Depuis toute petite, je connais la galère ». Elle est mariée de force à l’âge de13 ans, subit de nombreux viols conjugaux, donne naissance à un fils alors qu’elle a 19 ans et finit par s’enfuir de chez elle à 22 ans. Salma n’a plus aucune nouvelle de son fils qui est élevé par la nouvelle épouse de son ex-mari. « Mon mari m’a dit : “ton enfant, tu l’as oublié” ». Elle cherche un emploi et travaille successivement dans une pâtisserie, dans la restauration puis dans une usine de poisson. Elle danse ensuite dans une troupe composée de quatre danseuses et de musiciens et fait plusieurs voyages en Europe. « Là, je travaillais, j’étais bien ». En 2001, elle arrive en France avec la troupe et décide d’y rester car ses frères continuent de la persécuter pour lui imposer un retour au sein du foyer conjugal. Elle loue une chambre de 10 mètres carré dans le 18ème arrondissement et travaille de façon non déclarée jusqu’en 2010. « J’ai travaillé dans le ménage et les personnes âgées. J’ai gardé les enfants aussi, pas beaucoup. Je travaillais, je payais [mon loyer], je mangeais, je me disais : “ça va”. Après je suis tombée malade et mon travail je l’ai perdu. (…) Après, pendant 2 mois j’ai pas payé [le loyer]. Après, j’avais plus rien à manger. Je suis tombée malade [parce que pendant] une semaine j’ai pas mangé. Mon voisin a appelé les pompiers et ils m’ont emmenée à Bichat. » A l’hôpital Bichat, elle rencontre une assistante sociale qui appelle le 115 et l’oriente vers la Halte femmes. Commence alors pour Salma une longue succession de mise à l’abri dans différents centres d’hébergement de courte durée. Le 115 lui propose un hébergement près de la Gare de l’est mais le centre, mixte et très bruyant fait fuir Salma qui préfère passer deux mois dans la rue plutôt que de rester hébergé dans cet endroit. Elle fréquente ensuite un autre centre d’hébergement entre avril et août 2016, puis un foyer de l’Armée du salut. « Il y avait des femmes là-bas. La chambre, j’étais toute seule. C’était tranquille. J’entendais rien. Après, je suis restée là-bas jusqu’en ethnographiques, du « paradoxe de l’observateur » (Labov, 1976) : « pour étudier un groupe, il faut mars. » La structure, non pérenne, ferme et elle est envoyée dans un nouveau foyer dans le 17ème puis dans un autre le 14ème. « Oui, j’ai tourné, […] j’ai fait le tour des foyers [rires] ». Entre 2012 et 2013, elle connaît un premier répit : on lui propose une colocation à Brétigny mais elle doit l’observer, mais l’observer c'est le perturber »(Schwartz, 1993, p. 342). C'est pourquoi les partir au bout de quelques mois : « les filles de la mosquée m’ont trouvé une fille pour vivre avec elle à Brétigny. [Karima] est infirmière. Sa mère est française et son père est marocain. [Puis elle s’est mariée et je pouvais pas rester avec elle et son mari. (…) ethnographes insistent sur l’inévitable « impureté » des matériaux ethnographiques. L’ethnographie Elle a trouvé un Algérien. Je pouvais pas rester. » Entre 2014 et 2015, elle connaît un second répit grâce à une femme rencontrée à la Halte femme qui lui propose un emploi. « Je gardais une personne âgée. C’est une fille qui m’a laissé son travail. Elle avait trouvé un autre travail au consulat d’Arabie Saoudite, à l’ambassade. (…) C’est une fille que j’avais rencontrée ne peut être ni totale (car elle est renvoyée à la limite du savoir du chercheur, de sa participation, de à Halte femmes. C’est elle qui a trouvé ça. » Cet emploi lui permet de louer une petite chambre dans le quartier de Strasbourg-Saint-Denis. « [Et la chambre louée], c’est à une dame que je connaissais pas. C’est la fille qui m’a proposé le la place qui lui a été accordée dans le milieu d’enquête, de ce qu’il lui est possible de voir où travail [qui me l’a présentée]. (…) Il y avait une petite douche et un petit coin pour la cuisine. [La personne âgée] me donnait 600 € pour la garder ». Mais après le décès de cette dernière, Salma se retrouve à nouveau sans ressources Cette succession d’hébergement a raison de son moral et de sa santé psychologique. Entre juin 2018 et avril d’entendre) ni neutre (puisque l’observateur·trice ne peut laisser inchangé ce qui a été observé). 2019, elle est hébergée à Epinay sur Seine. « Le jour où ils m’ont envoyée, j’ai pleuré. Je suis partie là-bas, j’ai trouvé là- bas. C’est loin […]. J’étais triste, angoissée, toujours mal. Là-bas, je ne supportais pas le bruit. Là-bas, ils ont le droit de mettre Plusieurs de nos observations et interactions avec les acteur·trices (ObsRB.2019.04.23, la musique la nuit, la télé tout la nuit… La journée, j’arrivais pas à supporter. C’était pas un problème de foyer, c’était moi j’avais des migraines. […] Ici [à l’Escale], c’est pas comme à Épinay. Ici, tu as les magasins, tu peux sortir, tu peux tourner. Mais là- bas tu peux pas. Tu sors, tu angoisses, tu te retrouves tout de suite toute seule. Ici, je ressens pas ça. Là-bas, il n’y a personne. » ObsRB.2019.04.30, ObsRB.2019.05.13) montrent que le sociologue peut être pris dans des rapports Actuellement, Salma passe ses journées à l’Escale mais dort dans un foyer Porte d’Orléans. Elle a peur de perdre la tête et souhaite consulter une psychologue. « Ça fait 19 ans en France, sans le logement, sans les papiers, sans tensionnels qui accentuent encore davantage les effets de perturbation induits par sa présence, de le travail, sans l’argent à côté de moi, sans rien. Je suis encore fragile dans ma tête, ça, ça me fait peur. Vous avez peur de perdre la tête, c’est ça ? Oui maintenant, j’ai peur de perdre ma tête. C’est facile, pour perdre la tête c’est facile. » même qu’ils peuvent contrarier sa démarche d’enquête, l’obligeant du même coup à la justifier. [Salma Ayouch, 43 ans, marocaine, séparée, 1 enfant, danseuse puis agente d’entretien et garde d’enfants et de personnes âgées, sans ressource, sans emploi, sans logement personnel depuis 9 ans, accueillie à l’Escale en journée depuis 1 mois, EfE10, entretien réalisé en avril 2019, 1’55’34] Toujours est-il que ces perturbations ont une pertinence sociologique, « ne serait-ce que parce Paradoxalement cette volonté de mettre en mouvement et d’« activer » constamment les qu’[elles] disent quelque chose de l’ordre qu’[elles] a aussi dérangent pour effet de»les (Schwartz, inscrire dans1993, p. 348). sans finElles disent qui est 31 femmes générateur quelque chose des déséquilibres que traverse la d’isolement CdD durant et les cette empêche un cercle de sortir dede « période la dépendance de marginalité crise ». aux institutions : « Si tu sais où dormir tu vas suivre les démarches de tes papiers sans Quoi qu’il en soit, le lieu et l’accueil de la CdD continuent problème. d’être […] Mais si après améliorés on te : des dit encore “va fauteuils dans la sont rue”, c’est-à-dire installés la nuit dans la salle d’accueil, des travaux de câblage permettre 326 l’installation progressive d’ordinateurs connectés dans la petite salle, attenante à la salle polyvalente d’activité (ObsRB.2019.04.17) et le 30 avril 2019, l’organisation de l’espace d’accueil est légèrement modifiée pour répondre aux difficultés posées par l’emplacement du bureau d’accueil, placé juste devant l’évier et l’espace collation (cf. Figures 8 et 9). Cette nouvelle configuration permet aux agent·es d’accueil de ne pas être gêné·es par la présence de personnes derrière elles et de faciliter la prise de collation des femmes accueillies. Figure 8. La réorganisation de l'espace accueil (mai 2019) Figure 9. La nouvelle disposition de la salle d'accueil Figure 9. La nouvelle disposition de la salle d'accueil Source : Loison-Leruste, Braud & Mahut, 2019, Étude sur la mise en œuvre de la Cité des Dames Des réflexions commencent également à être menées sur la place et le rôle des bénévoles au sein de la Cité. Début avril, une réunion est organisée pour réfléchir à la coordination des bénévoles et Avant Après des journées de permanence sont planifiées pour faciliter leur implication au sein de la CdD. Dès le mois de mars, les cadres sur site se plaignent de ne pas avoir suffisamment de temps pour Source : Loison-Leruste, Braud & Mahut, 2019, Étude sur la mise en œuvrese de transmettre les informations et coordonner leurs décisions la Cité des Dames (ObsRB.2019.03.06). Fin avril, l’équipe prend donc la décision de fermer la Cité des Dames tous les mardis après-midi pour organiser des Des réflexions commencent également à être menées sur la place et le rôle des bénévoles au sein réunions d’équipe (ObsRB.2019.04.30). Nous profitons de cette nouvelle organisation et de la de la Cité. Début avril, une réunion est organisée 74 pour réfléchir à la coordination des bénévoles et disponibilité des membres de l’équipe pour organiser, pendant ce créneau horaire, les deux séances des journées de permanence sont planifiées pour faciliter leur implication au sein de la CdD. 32 de MAG, les 5 mars et 9 avril (cf. Annexe 2). Ces deux réunions avec les acteur·trices Dès le mois de mars, les cadres sur site se plaignent de ne pas avoir suffisamment de temps pour opérationnel·les90 (cf. Figure 1) rendent compte des difficultés qui se posent avec certaines femmes se transmettre les informations et coordonner leurs décisions (ObsRB.2019.03.06). Fin avril, l’équipe accueillies. Les thématiques abordées dans les récits reflètent en effet la manière dont le travail est prend donc la décision de fermer la Cité des Dames tous les mardis après-midi pour organiser des souvent « empêché » (Clot, 2010) : les salarié·es s’inquiètent de la violence, de l’imprévisibilité et de réunions d’équipe (ObsRB.2019.04.30). Nous profitons de cette nouvelle organisation et de la l’insécurité généré par la présence de certaines femmes ; les troubles psychiatriques de certaines disponibilité des membres de l’équipe pour organiser, pendant ce créneau horaire, les deux séances d’entre elles viennent souvent gêner et freiner le travail d’accompagnement individuel et collectif ; de MAG, les 5 mars et 9 avril (cf. Annexe 2). Ces deux réunions avec les acteur·trices enfin, toutes et tous soulignent la difficulté de faire appliquer certaines règles ou d’adapter le cadre opérationnel·les90 (cf. Figure 1) rendent compte des difficultés qui se posent avec certaines femmes de l’accueil, ainsi que le manque de repères concernant les partenaires à contacter pour faciliter 16 accueillies. Les thématiques abordées dans les récits reflètent en effet la manière dont le travail est l’accompagnement social, psychologique et médical des femmes accueillies. souvent « empêché » (Clot, 2010) : les salarié·es s’inquiètent de la violence, de l’imprévisibilité et de Du côté décisionnel l’insécurité généré par la présence de certaines femmes ; les troubles psychiatriques de certaines(cf. Figure 2), deux problèmes se posent. Le premier est celui du profil des d’entre elles viennent souvent gêner et freiner le travail d’accompagnement individuel femmes et collectif accueillies dans ;la mesure où les acteur·trices font le constat d’un décalage entre le public Loison-Leruste M., « Au cœur de l’exclusion. Enquête auprès des salariés d’Emmaüs », Sociologie, N 4, vol. 6, p. 359-376, 2015. 33 Exemple de photographies (1) au service de la description ethnographique Wacquant Loïc J. D. « Corps et âme. Notes ethnographiques d'un apprenti-boxeur » Actes de la recherche en sciences sociales, Vol. 80, novembre 1989. L’espace des sports-2. pp. 33-67; (1960-) 34 17 35 Plan au service de la description ethnographique Wacquant Loïc J. D. « Corps et âme. Notes ethnographiques d'un apprenti-boxeur » Actes de la recherche en sciences sociales, Vol. 80, novembre 1989. L’espace des sports-2. p 39; 36 18 Notes d’observation 37 IV. Etape 5 : Construire les outils d’enquête Les outils méthodologiques Méthode déductive Méthode inductive Enquête statistique Enquête qualitative Questionnaire Entretien Entretien semi- Entretien non Observation directif directif directif Recherche documentaire et bibliographique S Objectivité / Représentativité S Choix du lieu d’enquête S Type d’effet (effet du chômage sur la consommation, sur la santé, etc.) S Choix du type de données à recueillir (questions ouvertes ou fermées ? dépend de ce qu’on veut : point de vue, opinions, expériences, etc.) S Avantages et limites de chaque type d’enquête. 38 19 VI. Etape 6 : recueillir les informations S Immersion sur le terrain ethnographique S Réalisation d’entretiens S Travail sur archives S Réalisation d’une enquête quantitative S Utilisation de données secondaires (qualitatives ou quantitatives) 39 VII. Etape 7 : Interpréter les données et les restituer S Cf. La pratique de la sociologie, Serge Paugam S Cf. LEMIEUX Cyril, « L’écriture sociologique », In Paugam Serge (dir.), 2010, L’enquête sociologique, Paris, PUF Quadrige, pp. 379- 402. S LM pages 15 et 38 40 20 Les 7 étapes d’enquête S Une démarche non linéaire S Exemple de l’enquête Emmaüs 41 8 Partie 2 Les méthodes quantitatives S 42 21 Introduction « La démarche quantitative consiste, en tant que telle, à créer une (ou des) base(s) de données répertoriant des faits sociaux observés sur le terrain, à l’exploiter à l’aide d’un logiciel de statistiques, puis à interpréter les résultats d’un point de vue sociologique. » Selz, M., 2010, « Le raisonnement statistique en sociologie », in Paugam, S. (dir.) L’enquête sociologique, Paris, PUF, p. 249 43 I. Définition et vocabulaire statistique S La statistique : ensemble des méthodes qui permette de décrire et dʼanalyser les phénomènes S Les statistiques : les résultats issus de lʼapplication de ces méthodes ou données S Analyse primaire et analyse secondaire 44 22 La production institutionnelle de statistiques S INSEE Institut National de la statistique et des études économiques (Eco et Stat, INSEE première) S INED Institut National dʼétudes démographiques (Population) S DARES Direction de l’animation de la recherche et des études statistiques (Travail et Emploi) S CEREQ Centre dʼétudes et de recherches sur les qualifications (formation-emploi, éducation) S INSERM Institut National de la santé et de la recherche médicale 45 II. Objectifs 2 objectifs principaux des méthodes quantitatives: S Dénombrement, fourniture dʼinformations chiffrées sur la société S Proposition dʼexplications des phénomènes sociaux à partir de la mise en relation de ces données chiffrées 46 23 Objectif 1 : Dénombrement, fourniture dʼinformations chiffrées sur la société/une population Catégories socioprofessionnelles 2015 Ex. : LʼEnquête Agriculteurs exploitants 2 Emploi de l’INSEE Artisans, commerçants, chefs d’entreprises 6 permet de connaître la structure de la Cadres et professions intellectuelles 18 population active en supérieures fonction des Professions intermédiaires 25 différentes catégories Employés 28 socioprofessionnelles. Ouvriers 21 Total 100 47 Tableau A7-7 Les caractéristiques sociales des riverains en fonction des types (en %) Absence de rejet Rejet distant Rejet engagé TOTAL P(khi²) Diplôme Aucun diplôme 25,6 5,5 9,7 10,2

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