PDF Physiologie PDF: Détermination du Débit de Filtration Glomérulaire
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Toulouse III - Paul Sabatier University
Ivan Tack, Rayan Zazoua, Tom Ribis
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Summary
Ce document de physiologie, rédigé par Pr. Ivan Tack, détaille la détermination du débit de filtration glomérulaire (DFG). Il explore les méthodes d'estimation du DFG, notamment l'utilisation de la créatinine comme traceur endogène, ainsi que les formules et les facteurs influençant la mesure de la fonction rénale. Le document aborde les limitations des différentes méthodes et les considérations cliniques associées.
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Pr. Ivan Tack Physiologie NUG - n°3 Rayan Zazoua 7/01 - 10h-11h Ronéo n°1 Tom Ribis DÉTERMINATION DU DÉBIT DE FILTRATION GLOMÉRULAIRE (SUITE) DFG = D...
Pr. Ivan Tack Physiologie NUG - n°3 Rayan Zazoua 7/01 - 10h-11h Ronéo n°1 Tom Ribis DÉTERMINATION DU DÉBIT DE FILTRATION GLOMÉRULAIRE (SUITE) DFG = Débit de filtration glomérulaire IRA = Insuffisance rénale aiguë IRC = Insuffisance rénale chronique MRC = Maladie rénale chronique I. Estimer le débit de filtration glomérulaire La mesure du DFG est techniquement contraignante en termes de temps et de coût. Elle ne fera pas partie de notre pratique clinique. En pratique, nous réaliserons des estimations du DFG avec pour objectifs d’éviter l’administration d’un traceur exogène, d’éviter un recueil urinaire (souvent peu fiable : dans les services spécialisés, comme la néphrologie, un tiers des recueils sont erronés) et d’éviter l’immobilisation prolongée du patient (afin de mobiliser moins de moyens médicaux qui pourraient coûter plusieurs centaines d’euros). 1) Mesures de la fonction rénale a) Un traceur endogène : la créatinine La créatine phosphate sert de substrat énergétique aux cellules musculaires. Elle est ensuite transformée en créatine déphosphorylée, puis libérée dans le milieu extracellulaire sous forme de créatinine. Cette dernière est utilisée comme « traceur endogène » pour estimer la fonction rénale, car elle est éliminée par le rein. Autrefois, le dosage de la créatinine reposait sur la méthode de Jaffé, une technique colorimétrique. Aujourd’hui, on privilégie une méthode biochimique plus simple, basée sur une réaction enzymatique (dégradation de substrat). Le coût unitaire du dosage est de 2,7€ ce qui représente un coût annuel total de 50 millions d’€ pour la sécurité sociale : la créatinine n’est pas le traceur parfait mais possède le meilleur rapport qualité (fiabilité)/prix. La fiabilité de la mesure est moyenne : on observe 20% de variations inter-essais et la reproductibilité inter-laboratoire a longtemps été catastrophique. Certains laboratoires étaient même réputés chez les patients pour fournir des valeurs systématiquement plus basses que d’autres. Ce problème a été corrigé grâce à l’introduction d’une calibration internationale (IDMS), qui a considérablement réduit ces écarts. Le dosage reste cependant sujet à certaines interférences. Par exemple, en cas d’ictère important, la couleur jaune de la bilirubine peut perturber la mesure. De plus, certaines céphalosporines peuvent artificiellement baisser la créatinine : ainsi, un adulte de 30 ans sous céphalosporine pourrait avoir des résultats comparables à ceux d’un nourrisson de 6 mois. Un marqueur parfait est librement filtré, ni sécrété ni réabsorbé, ni métabolisé ni produit par le tubule rénal et est sans effet sur la fonction rénale. La créatinine n’en est pas un : bien qu’elle soit librement filtrée et non réabsorbée, elle est sécrétée à hauteur d’environ 20 % de la quantité filtrée. Cela signifie que la quantité de créatinine mesurée dans les urines représente 120 % de la quantité réellement filtrée. Cette sécrétion tubulaire (proximale) est assurée par des transporteurs spécifiques. Elle peut donc être perturbée par la présence d’autres molécules, comme certains médicaments, qui utilisent les mêmes transporteurs pour leur excrétion. La créatinine est un estimateur globalement efficace de la fonction rénale, mais il ne faut pas utiliser directement sa valeur brute (en mmol/L) pour qualifier la fonction rénale. Par le passé, cette pratique était courante, mais l’analyse de la relation entre la créatininémie et la mesure exacte de la fonction rénale (clairance de l’inuline) révèle une hyperbole. Ainsi, de faibles variations de la créatininémie peuvent passer inaperçues malgré une altération de la fonction rénale : par exemple, une créatininémie de 9 peut correspondre à un DFG de 140, tandis qu’une créatininémie à 11 peut indiquer un DFG de 100 (valeurs données à titre d’exemple). Inversement quand la créatininémie augmente on peut avoir une mesure à 40 mmol/L le lundi et de 50 mmol/L le lendemain alors que le DFG a seulement baissé de 5mmol/L (ce qui est insignifiant). À cause de cette relation non linéaire il est très compliqué d’avoir une idée exacte du DFG à partir d’un simple chiffre de créatininémie. C’est pourquoi il a été nécessaire de trouver un paramètre mathématique tenant compte de l’hyperbole. b) Mesure de la clairance urinaire Des gens ont proposé de mesurer la clairance urinaire de la créatinine en réalisant un recueil sur 24 heures, accompagné d’une mesure sanguine à la mi-journée, afin d’estimer le DFG. Or la créatinine est aussi sécrétée (environ 20mL/min). Cette méthode conduit à une valeur erronée par rapport au DFG réel (mesuré par la clairance de l’inuline). Ainsi, pour un DFG réel de 50 mL/min, l'estimation obtenue par cette méthode serait de 70 mL/min, soit une erreur d’un facteur de 1,4. Page 2 sur 18 La clairance urinaire tend donc à surestimer la fonction rénale d’autant plus qu’elle se dégrade (car le tubule sécrète toujours la même quantité de créatinine tandis que la filtration diminue). C’est un réel problème car pour un sujet en bonne santé l’erreur n’est pas grave mais quand un patient est en moins bonne santé c’est différent : cette méthode donnerait un DFG estimé à 60 à un patient ayant un DFG réel à 40 or le pronostic associé à ces deux valeurs est différent. On utilise néanmoins cette mesure dans certaines circonstances. c) Estimations calculées à partir de la créatininémie Dans les années 80 la formule de Cockcroft-Gault a permis de quantifier numériquement la courbe hyperbolique afin d’obtenir une estimation du DFG en tenant compte de l’âge, du poids et de la valeur de la créatinine. Elle a été déterminée à partir d’une population de patients hospitalisés ayant fourni des recueils urinaires fiables. Cependant c’étaient tous des hommes et il a fallu inclure un facteur de correction pour adapter la formule aux femmes. Cette formule n’est cependant pas très représentative car elle ne correspond en réalité pas à une hyperbole. De plus, elle surestime la diminution du DFG avec l'âge, ce qui la rend peu fiable après 60 ans. Elle devient également moins précise lorsque le poids du patient est trop élevé. Elle prédit donc mal le DFG si le sujet n’est pas jeune et en bonne santé or on veut l’utiliser chez des patients qui ne le sont pas forcément. En 1999, une formule mathématiquement plus pertinente a été développée : le MDRD simplifié. Celui-ci s’affranchit du poids, ce qui résout un problème du Cockcroft-Gault, car peser chaque patient était trop chronophage et l'utilisation de données déclaratives augmentait l’erreur. Cette formule a été conçue pour les États-Unis, où 15 % de la population est noir. Les Afro-Américains ayant une masse musculaire plus élevée pour une masse corporelle identique, ils présentent une créatininémie plus élevée. C'est pourquoi un facteur de correction a été introduit pour cette les afro-américains. Cependant, cette approche est problématique : d’une part, il n’existe pas de définition précise d’ « Afro-Américain », et d’autre part, lorsqu'on l’applique à des africains ça ne marche pas (car les gabarits sont différents). Ce facteur de correction induit donc un biais. De plus, en France, il est illégal de mentionner l'ethnie d’un patient, ce qui empêche l’utilisation de cette correction. Page 3 sur 18 Cette formule était cependant assez fiable hormis chez les gens maigres avec un IMC 60 alors le DFG était sous-estimé) pour qui la formule dérivait. En 2009 est arrivé le CKD-Epi qui est encore utilisé aujourd'hui : la formule garde l’ethnie, la créatininémie et l’âge et donne une estimation fiable du DFG pour des valeurs jusqu’à 120-140. C’est la seule formule que les laboratoires ont le droit d’utiliser. Il est illégal de rendre un résultat calculé avec un MDRD ou un Cockcroft-Gault. En 2021 est sortie une version corrigée du CKD-Epi qui s’affranchit de l’ethnie pour prendre en compte le monde entier au dépend d’une plus grande variance et d’une moindre fiabilité de l’estimation (en France le CKD-Epi de 2009 est plus fiable est toujours celui recommandé par la HAS). Ces formules ont des limites terribles : - La principale est que le précurseur de la créatinine est généré dans le rein puis modifié dans le foie pour donner de la créatine avant sa transformation finale dans le muscle. Ce qui signifie que si le sujet a une masse musculaire anormale ou une fonction hépatique anormale sa créatininémie sera anormalement basse ce qui conduira à une surestimation du DFG en utilisant les formules. On a l’impression que les reins filtrent moins mais la réalité est qu’ils ont juste moins à filtrer. - L’alimentation est aussi une source de créatinine : la consommation de viande (terrestre ou marine) représente un apport de créatine qui sera transformée en créatinine par notre corps ce qui augmente la créatininémie indépendamment de notre masse musculaire. On ne devrait ainsi pas la mesurer dans les 2 à 3 heures suivant un repas contenant de la viande. Or cette précaution n’est pas prise dans les laboratoires. Une équipe anglaise a démontré que la prise d’un repas hospitalier conduit à une erreur de 15 à 20% sur les valeurs de créatininémie et du DFG quand la mesure est effectuée 2 heures après le repas : quelqu’un à 80 de DFG aura un résultat à 60. - C’est pareil pour les sportifs consommant de la créatine : leurs créatininémies augmentent artificiellement ce qui fait artificiellement baisser le DFG. Mais c’est une erreur de dire que la créatine rend insuffisant rénal comme certains articles avaient pu le dire par le passé. Page 4 sur 18 - L’ethnie joue aussi : il faut augmenter de 12% la valeur de la fonction rénale si le patient est noir par exemple. En revanche pour les asiatiques la marge d’erreur est de moins de 10% donc on n’ajuste pas la formule. - Il faut se méfier des gens qui prennent des anabolisants car ils ont une masse musculaire anormale. Il faut aussi se méfier des danseuses professionnelles qui sont très minces mais très musclées et qui ont donc une créatininémie haute. - Les patients amputés ont une masse musculaire abaissée ce qui conduira à surestimer le DFG si on ne corrige pas les formules. On peut ainsi avoir des DFG faussement rassurants chez un diabétique amputé par exemple. C’est pareil en cas de myopathie, d’amyotrophie, de dénutrition (kwashiorkor) ou de perte musculaire liée à l’âge. - Il faut enfin faire attention aux médicaments supprimant la sécrétion tubulaire de créatinine car 20% de l’élimination est supprimée ce qui fera baisser le DFG artificiellement. On retrouve parmi eux : le Bactrim : il est utilisé pour traiter les infections urinaires mais a un effet néphrotoxique. Il faut donc se demander si la baisse du DFG est liée à cet effet ou à la suppression de la sécrétion uniquement; la cimétidine : anti-H2 autrefois utilisé pour les ulcères gastriques (diminution de la sécrétion acide gastrique) mais éliminé par la même transporteur que la créatinine; le cobicistat : booster des antirétroviraux. Or ces derniers sont néphrotoxiques ce qui mène là aussi à se demander si la baisse du DFG est liée à cet effet ou à la suppression de la sécrétion uniquement. En résumé, le Cockcroft et le MDRD ne sont pas recommandés contrairement au CKD-Epi qui utilise le genre, l’âge, l’ethnie et la créatininémie. Cette dernière formule est cependant mal adaptée après 70 ans et chez les sujets maigres ou obèses. Il est nécessaire de se rappeler que la précision est moyenne et que différents facteurs (que l’on recherche à l’anamnèse) peuvent faire varier la créatininémie. Page 5 sur 18 Il est aussi très important de savoir qu’on n’a pas le droit d’utiliser ces formules dans l’IRA car la créatinine s’accumule et diminue dans le sang avec une certaine inertie : lors de la phase d’attaque de l’IRA la créatininémie va mettre du temps à augmenter induisant une sous-estimation de l’intensité de l’insuffisance alors qu’elle diminuera ensuite lentement après le traitement induisant une sous-estimation de la récupération. L’IRA indique donc de mesurer la fonction rénale avec une méthode de référence (mais c’est coûteux et chronophage donc on le fait peu) ou de l’estimer via la clairance urinaire (en prenant garde à corriger la surestimation de 20mL/min liée à la sécrétion). - Question d’un étudiant : peut-on se servir du CKD-Epi pour statuer sur le statut d’une IRA ? - Réponse du professeur : Si ton CKD-Epi te montre un DFG à 30 tu peux dire qu’il y a une insuffisance rénale. Mais si tu dois prendre une décision en fonction de l’aggravation ou de l’amélioration de l’IRA tu ne peux pas te servir de la formule. Ainsi un DFG de 30 avec un CKD-Epi à 24 ans permet de dire qu’il y a une insuffisance rénale et c’est l’anamnèse qui nous dit si elle est aiguë ou chronique. Si elle est aiguë on ne pourra pas l’utiliser pour qualifier son évolution. Est-ce que ces formules ont une bonne valeur prédictive individuelle ? Les premières formules avaient un ordre d’erreur de 30mL/min quand on estimait 90 de DFG ce qui n’était pas très satisfaisant. Le CKD-Epi moderne a une valeur prédictive nettement meilleure : 90% des patients ont une prédiction juste à plus ou moins 30% ce qui n’est toujours pas parfait mais quand même mieux. Dans quelles situations l’estimation par la clairance mesurée de la créatinine doit-elle être préférée au CKD-Epi ? Lorsque la production de créatinine est anormale : une personne musclée produit plus de créatinine et en excrète davantage dans ses urines qu’une personne moins musclée mais le calcul de la clairance (C = V/P) corrige cela. De même, on préfère utiliser la clairance quand l’excrétion rénale de créatinine change rapidement, par exemple dans l’IRA. Les recommandations américaines considèrent qu’une mesure et non pas une estimation est nécessaire dans ces cas là : - Âges et tailles extrêmes - Malnutrition et obésité - Paraplégie, tétraplégie, amputation - Régime végétarien et surtout végétalien (car si la complémentation en acides aminés est mauvaise il y aura une réduction de la masse musculaire) - Variations rapides du DFG - Avant un traitement par médicament néphrotoxique Page 6 sur 18 - Avant un don de rein (pour être sûr que la fonction rénale résultante sera viable) - Dans les projets de recherche clinique dont l’objectif principal est le devenir du DFG (sauf si on a de grandes populations car le CKD-Epi est très fiable à l’échelle populationnelle mais peu à l’échelle individuelle) 2) Maladie rénale chronique a) Définition L’objectif, en mesurant la fonction rénale, est bien souvent de dépister la maladie rénale chronique (MRC). La MRC, concept apparu dans les années 2000, est à différencier de l’IRC (DFG apport). Par conséquent, le VEC diminue car l’excrétion de sel est supérieure à son absorption par l’alimentation. Cette perte de sel est provisoire, elle dure le temps de s’ajuster. Le VEC (qui représente pour rappel 20% de la masse corporelle) va donc varier en fonction du changement de régime salé. Application clinique On demande aux patients atteints d’IC ou d’HTA de diminuer leur apport sodé. En passant de 5g à 2g d’apport quotidien en Na+, le bilan sodé ne reste pas éternellement négatif, sinon on mourrait d’hypovolémie. A chaque effort de restriction sodée, on obtient le bénéfice en quelques semaines. En cas de maintien du régime, il n’y a plus de bénéfice supplémentaire mais le VEC obtenu est bénéfique pour la santé cardiovasculaire du patient. Chaque entorse au régime (comme des huîtres bretonnes par exemple) induit une augmentation de la quantité de sodium dans le VEC. Un régime de restriction sodée doit donc être suivi par le patient pendant toute sa vie (en cas d’IC ou d’HTA) ou jusqu’à résolution du problème, sans interruption. C’est la même chose avec les diurétiques, qui créent un effet de natriurèse en agissant sur des transporteurs rénaux du Na+. A l’image du régime sans sel, ils vont induire une déplétion sodée durant quelques semaines en attendant que le SRAA se rééquilibre en produisant davantage d’aldostérone, permettant de compenser la perte de sel. En cas de maintien au long cours des diurétiques, il n’y aura plus de perte de sel, mais simplement un maintien du VEC à un niveau inférieur. En cas d’arrêt des diurétiques, le VEC va augmenter et on reviendra donc à l’état initial. A retenir ++ : Un régime sans sel et un diurétique ne fonctionnent donc que lorsqu’ils sont suivis à la perfection sans interruption. 4) Relation entre VEC et PSA Pas abordé cette année mais présent sur le diapo donc je vous mets l’explication d’une ancienne ronéo si jamais ça vous intéresse. Quand notre VEC augmente, notre PSA n’augmente pas dans les mêmes proportions, et heureusement pour nous. Sinon, à chaque fois qu’on perdrait un peu de sel, on aurait des chutes de tension, et inversement, en mangeant quelques huîtres à l’eau de mer, on aurait une tension au plafond. Lorsque le VEC varie, la PSA varie dans le même sens mais moins fortement. Sur le graphique, en passant de 2g à 4g de sel, le patient a pris 0,75L de VEC, celui-ci a augmenté de 18%. Sa PSA, elle, n’a augmenté que de 1%. Par exemple, pour la pression artérielle moyenne, celle-ci serait passée de 100 mmHg à 101 mmHg, ce qui est très faible. L’inverse est aussi vrai. Diminuer son apport en sel diminue dans un plus grand ordre de mesure le VEC que la PSA. Page 13 sur 18 On a 2 régulations : - La régulation d’eau et de sel par le rein - La régulation du diamètre des vaisseaux : elle intervient quand le stock d’eau et de sel varie en dehors des valeurs optimales. Quand on augmente beaucoup le volume plasmatique par une augmentation de la consommation de Na+, les vaisseaux vont se dilater (par le shear stress et le monoxyde d’azote) et vont augmenter leur capacité à contenir du volume plasmatique, et donc la PSA ne va pas beaucoup varier. Chez un hypertendu, quand on augmente de 18% sa VEC, sa PSA va augmenter de plusieurs pourcents : sa capacité vasculaire d’adaptation est moins bonne, la moindre augmentation de VEC va augmenter sa PSA. C’est pour cela qu’on verra plus tard que la première chose à faire pour réduire l’HTA est de réduire l’apport sodé si on estime qu’il est élevé, puisque l'adaptation vasculaire est moins efficace. 5) Détection du capital sodé Comment notre organisme détecte-t-il le stock de sel ? Le stock de sel est capté sous forme d’un volume et donc d’une pression générée par ce volume. En effet, le capital sodé détermine le VEC. Rappel : VEC = Volume plasmatique (VP) + Volume interstitiel (VI) On ne peut pas détecter les variations du volume interstitiel mais on détecte parfaitement les variations du volume plasmatique. Il est important de distinguer le VSE du volume sanguin. C’est le VSE qui est détecté par l’organisme. Le VSE correspond au volume de sang qui se déplace dans les vaisseaux pour les remplir complètement. Exemple pour mieux comprendre : lorsque le volume sanguin est important, le cœur bat très lentement. En effet, il n’y a pas besoin que le cœur batte très vite puisque les vaisseaux sont bien remplis. En cas d’augmentation brutale de l’activité cardiaque, la PA va augmenter et l’organisme va donc capter que le volume sanguin est augmenté. Le VSE n’est donc pas une grandeur mesurable mais un état d’équilibre entre 3 paramètres : le volume sanguin, le débit cardiaque et les résistances vasculaires périphériques. Le sang, en exerçant une force sur la paroi vasculaire, va générer des pressions et tensions. Ce sont ces dernières qui sont détectées par l’organisme. Page 14 sur 18 Application Un VSE optimal correspond au milieu du triangle représenté ci-contre. En cas de don de sang (ou d’hémorragie, exemple de la diapo), le volume sanguin est réduit. Ainsi, pour compenser, le débit cardiaque ainsi que les résistances vasculaires périphériques sont augmentés. Ces mécanismes permettent de maintenir la PA et le VSE stables, quand bien même la volémie réelle est diminuée. En cas d’IC, le débit cardiaque diminue. Les vaisseaux sont donc mal remplis (diminution du VSE), l’organisme va retenir de l’eau et du sel, et le volume sanguin va alors augmenter. Cela va compenser la perte de volémie efficace. Les résistances vasculaires périphériques vont également augmenter, mais cela est néfaste. En effet, plus elles augmentent, plus le cœur a du mal à pousser le sang, donc c’est un cercle vicieux. 6) Détection du VSE Le VSE est capté grâce à des mécanorécepteurs, situés dans les cavités cardiaques et les vaisseaux. Il en existe 2 principaux types : ceux à haute pression et ceux à basse pression. Les mécanorécepteurs à haute pression sont les plus puissants en termes d’efficacité du signal. Ce sont des barorécepteurs artériels situés par exemple au niveau de la crosse de l’aorte, du sinus carotidien, dans la paroi du VG ou encore au niveau de l’appareil juxta-glomérulaire (où le message sera intégré localement via la sécrétion de rénine et indirectement la mis en jeu du SRAA). Les informations captées au niveau du cœur et des vaisseaux périphériques sont ensuite transférées au SNC afin de l’informer sur le VSE. Les mécanorécepteurs à basse pression sont situés au niveau des atriums, des veines pulmonaires, de la paroi du VD, de l’interstitium pulmonaire, du foie (probablement) et même au niveau du SNC. En cas de signaux contradictoires, la priorité est donnée au réseau artériel de haute pression. Page 15 sur 18 Par exemple, une discordance pourra être observée lors d’insuffisance cardiaque globale (IC droite + IC gauche). En effet, le VSE est diminué car le DC est diminué, mais en utilisant le triangle du VSE, on sait que le volume sanguin et les résistances vasculaires périphériques seront augmentés pour tenter de compenser sans y parvenir totalement. Comme dans une insuffisance cardiaque globale, on a une IC droite, le ventricule droit n’est pas assez performant. Ainsi, le sang a tendance à stagner, et le réseau veineux va progressivement être surchargé. Comme on répond à la baisse de DC par une hausse du volume plasmatique, celui-ci va aller se stocker en grande partie dans le secteur veineux, ce dernier étant plus compliant, et moins dans le secteur artériel (qui captera alors une hypovolémie relative), ce qui crée des oedèmes. Donc à un moment donné, dans cette IC globale, on accumule du fluide dans les vaisseaux et on gonfle le secteur veineux, ce qui augmente la pression dans ces vaisseaux. Le signal dans le réseau de basse pression est donc une augmentation du VSE. Mais du côté de l’IC gauche, les mécanorécepteurs du secteur de haute pression détectent une diminution du VSE car ils ne sont pas assez stimulés. L’organisme continue alors de corriger la sous-charge/l’hypovolémie artérielle même si le côté veineux en pâtit, car c’est le secteur de haute pression qui est prioritaire sur le secteur de basse pression. Cela va avoir tendance à majorer les oedèmes. Si on ne traite pas cette IC globale, le patient va finir par décéder, car on est dans une situation de cercle vicieux. Les oedèmes vont s’amplifier, pouvant provoquer un OAP ou une anasarque. 7) Schéma intégré de la régulation du capital sodé Comme vu ci-dessus, le VSE est détecté par les mécanorécepteurs vasculaires, qui transmettent les informations au SNC via les nerfs IX et X (surtout le X). L’augmentation du VSE stimule le SN parasympathique et génère une cascade adaptative permettant d’éliminer l’excédent de Na+ grâce à des facteurs natriurétiques. Au contraire, une diminution du VSE entraîne une diminution de la décharge parasympathique, permettant de restaurer le VSE grâce à des facteurs antinatriurétiques (SN orthosympathique, SRAA, ADH). Page 16 sur 18 8) Système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA) Le professeur n’a pas détaillé cette diapo mais a quand même précisé que tout ce qui est important sur le SRAA y est résumé. IV. Régulation de la PSA : modèle de Guyton Le but de ce modèle est de rendre la régulation de la PSA compréhensible par le clinicien. Les acteurs de la PSA sont toujours les mêmes : le cœur, les vaisseaux et la volémie. On y rajoute cette fois-ci un régulateur de la volémie, le rein. La régulation peut se faire de différentes manières en fonction de l’échelle de temps utilisée (secondes, minutes, heures). En termes de secondes, lorsque la PA est modifiée, le SN neurovégétatif est mis en jeu. Par exemple, si l’on est allongé et que l’on se lève brutalement, le sang se stocke dans les vaisseaux des membres inférieurs. Le volume de sang revenant au cœur droit diminue, on a donc une hypovolémie efficace temporaire (même si le volume sanguin n’a pas varié). Le SN orthosympathique est instantanément activé, ce qui augmente la fréquence cardiaque et provoque une vasoconstriction, compensant l’hypovolémie efficace. Si ce phénomène n’a pas lieu, le diagnostic d’hypotension orthostatique est posé. A l’échelle de plusieurs minutes et/ou plusieurs heures (par exemple après un don de sang), le SN orthosympathique va recruter le SRAA. De plus, le rein va détecter l’hypovolémie et augmenter la sécrétion de rénine de lui-même. Il va progressivement y avoir rétention d’eau et de sel pour restaurer le volume circulant. Page 17 sur 18 Il existe un continuum entre le SN neuro-végétatif (recruté dans les secondes/minutes qui suivent l'événement), et le SRAA (recruté par le SN orthosympathique dans les minutes/heures qui suivent pour une régulation à moyen-long terme). Question du professeur : Où agissent les antihypertenseurs ? Réponse : Ils agissent à 2 endroits, au niveau des vaisseaux et surtout du SRAA pour l’essentiel des traitements. Le but est d’éviter une rétention inappropriée de Na+. Petit aparté : Les bêtabloquants sont présentés comme bloquant orthosympathique, mais en fait c’est une connerie. Leur principal effet à long terme est d’inhiber la stimulation adrénergique de la rénine, ce qui provoque une baisse d’activation du SRAA, tout comme les diurétiques, les IEC, les ARA2 et les antirénines. V. Petite histoire de l’hypertension artérielle 2600 av. J.-C. : Des médecins égyptiens décrivent la “maladie du pouls fort”. A l’époque, le traitement proposé était la saignée, ce qui était tout à fait pertinent puisqu’elle permet de réduire la volémie, et donc la volémie efficace. 1904 : Les médecins ont décrit le bénéfice de réduire la consommation de Na+ sur la PA. 1913 : Première description de la “maladie hypertensive vasculaire”. Les patients présentent une PA augmentée, font souvent des IDM ou des AVC et ont souvent une IC. Les médecins décrivent toute une série de signes sémiologiques associés à cette hypertension. 1925 : Des assureurs américains se rendent compte que la PSA est un facteur impactant l’espérance de vie et l’apparition de certaines maladies. 1957 : Un lien est démontré entre HTA et augmentation du risque cardiovasculaire. Les assureurs ont donc commencé à faire payer plus cher les clients hypertendus. 1979 : Définition de la notion d’HTA comme étant une PA systolique > 160 mmHg et une PA diastolique > 95 mmHg. Depuis, ces valeurs ne cessent d’être revues à la baisse. D’autres diapos sur l’HTA étaient présentes à la suite mais le professeur n’en a pas parlé. Je vous laisse aller voir sur Moodle si vous êtes intéressés. Page 18 sur 18 Pr TACK Physiologie Rénale - Capsule 7 Les CM BILAN HYDRIQUE Dans cette première vidéo sur l’homéostasie hydrique nous allons nous concentrer sur le bilan hydrique et le principe de sa régulation. I. Zones et amplitude des échanges d’eau Sur cette image sont représentées les différentes zones d’échange de l’eau avec l'environnement : - On retrouve en haut les poumons qui est une zone d’échange via le flux d’air bronchique. - En rouge, la surface cutanée qui borde toute notre limite corporelle avec des glandes sudoripares capables d’un efflux relativement important d’eau. - A droite il y a le rein et à gauche le tube digestif avec l’entrée (cavité buccale, estomac et la zone d’absorption principale qui est l’intestin) et la sortie avec l’émission de selles. Si on considère maintenant les échanges d’eau : 1) Flux respiratoire Le premier échange qu’on prendra en compte c’est l’échange par le flux respiratoire. Nous perdons en permanence de la vapeur d’eau. Ça dépend bien sûr du niveau d’hygrométrie de l'environnement, de sa température et surtout de notre activité physique. Cette perte d’eau représente 300 à 700 mL/j. 2) Échanges cutanés La deuxième zone d'échange a lieu au niveau cutané. Bien que notre surface cutanée soit relativement hermétique, qu'elle nous protège d’un excédent d’échange trop rapide d’eau avec l'environnement, il y a une perte d’eau permanente par dessiccation progressive de la surface cutanée qui représente 300 à 400 mL / jour en fonction de l’environnement thermique et de notre surface corporelle (perspiration). Bien sûr, la surface cutanée est aussi une zone de thermolyse c'est-à-dire d’élimination des excédents thermique, dans ce cadre il y aura sudation puis vaporisation de la sueur : c’est le phénomène de transpiration. Et la perte d’eau peut osciller entre 200 mL pour une activité faible et un milieu tempéré jusqu’à plus de 5 L par 24 heures. Page 1 sur 7 3) Echanges digestifs A gauche, nous avons le tube digestif, c’est une source d’entrée de fluides mais aussi potentiellement une source de sortie (physiologiquement faible). La zone d’entrée par l’eau de boisson et par l’eau alimentaire représente un apport qui va de 600 mL à plus de 10 L par jour en fonction du comportement de consommation hydrique. La perte digestive basse (dans les selles) est comprise entre 100 et 200 mL / jour pouvant atteindre des valeurs beaucoup plus élevées, plus de 6 litres en situation pathologique comme la diarrhée cholériforme. 4) Excrétion urinaire A droite nous avons l'excrétion urinaire, on verra que c’est elle qui va ajuster le bilan hydrique. Elle représente un minimum de 400 mL / jour (parce que nous ne pouvons pas éliminer les déchets excrétés par le rein sous forme de poudre) et un volume de diurèse qui peut dépasser 12 Litres par jour en fonction des quantités de substances à excréter et des quantités de fluides à éliminer. II. Exemple de bilan hydrique normal 1) Equilibre gains-dépenses Considérons maintenant un bilan hydrique normal. Ici il s’agit du bilan hydrique d’une jeune femme sédentaire de 50 kg. Rappel : le bilan nutritionnel représente la différence entre les entrées et les sorties, ou les gains et les pertes dans notre cas: ⇒ Bilan = entrées - pertes = gains - pertes. Dans la colonne des gains il y a : - La production d’eau endogène par le cycle de Krebs qui représente ici environ 300 mL par jour - L’apport d’eau alimentaire est de 600 mL par jour. - L’eau de boisson environ 1,5 L par jour (en moyenne) Concernant les pertes, elles sont de 2 types : - Les pertes insensibles qui sont certes partiellement ajustables mais faiblement régulables. Il s’agit des pertes : Respiratoire : 0,3 L / jour La perspiration : 0,3 L/ jour La transpiration : 0,2 L / jour (sujet sédentaire en milieu tempéré) Les selles : 0,1 L / jour Page 2 sur 7 - Les pertes hautement régulables : L’excrétion urinaire d’eau : 1,5 L / jour Ainsi les gains et les pertes sont équivalents, le bilan d’eau est donc nul. 2) Déséquilibre gains - pertes Lorsque ce bilan d’eau n’est pas nul, qu’il y a une différence entre gains et pertes, ce déséquilibre va être perçu par le cerveau, en particulier le plancher du 3ème ventricule où il existe des osmorécepteurs. Cela aboutira à une réponse adaptative de l’organisme. 3) Excédent d’eau S’il s’agit, par exemple, d’un excédent d’eau, cela freinera la sécrétion d’hormone anti diurétique (ADH) produite par les noyaux supraoptique et paraventriculaire de l’hypothalamus et libérée au niveau de la post hypophyse. La diminution de la sécrétion d’ADH va aboutir à une diminution de la réabsorption rénale d’eau, une augmentation du volume d’urine et finalement l'élimination de l’excédent d’eau. 4) Défaut d’hydratation compensé par le rein Si une situation inverse survient avec un défaut d’hydratation, il y aura augmentation de la production d’ADH, augmentation de la réabsorption rénale d’eau avec diminution du volume d’urines. On a vu que le volume d'urine pouvait diminuer en fonction du volume de déchets jusqu’à 0,4 - 0,5 L / jour. 5) Défaut d’hydratation non compensé par le rein Si dans le cas de l’insuffisance d’hydratation, l’épargne hydrique rénale n’est plus suffisante, l’organisme va ajuster le bilan hydrique en modulant la soif. Dans le cas présent, le déficit d’apport hydrique entraîne un déséquilibre entre gains et pertes, le bilan tend à être négatif ce qui va susciter une augmentation sensible de la soif et donc de la consommation d’eau. C'est une perception très puissante qui va générer une modification du comportement du sujet, destinée à capter dans son environnement un fluide et à l’ingérer. ⇒ Finalement, ces deux phénomènes d’ajustement, sécrétion d’ADH et soif, permettront de maintenir autant que possible un équilibre entre gains et pertes de manière à ce que le bilan soit en général nul. Page 3 sur 7 III. Exemples d’ajustement du bilan hydrique 1) Exemple d’un sportif : journée d’entrainement classique Il y a une production d’eau endogène relativement importante car le sportif va augmenter son cycle de Krebs dans la mesure où il produit beaucoup d’énergie. Il mange (large hydratation par les aliments), et boit beaucoup d’eau. Parallèlement, ses pertes respiratoires ont augmenté parce que son activité physique est plus intense. Sa perspiration n’a pas sensiblement changé (mais sa surface corporelle est plus grande que la femme de toute à l’heure), de même pour les selles qui n’ont pas changé. Ce qui va changer c’est la transpiration et la sudation à cause de la thermolyse (rendue nécessaire par l’excédent de production thermique dans le cadre de l’activité physique d'entraînement). Ici, elle représente une perte d’eau de 3,2 L / jour. Si on fait la somme de tous ces éléments de pertes évoqués au-dessus, on obtient un total de 4,5 litres. Finalement, dans le cas d’un sportif, le rein est capable de réduire au minimum l’excrétion urinaire d’eau à 0,5 L d’urines. Et si on ajuste parallèlement la prise de boisson, à la fin de la journée on aura gardé l’équilibre entre les gains et les pertes c’est-à-dire 5 Litres, grâce à une boisson de 3,4 Litres et une réduction du volume urinaire qui compensent la perte par la sueur. 2) Patient potomane Ici on voit le bilan hydrique d’un patient atteint de potomanie, il s’agit d’un trouble du comportement sévère caractérisé par la prise compulsive d’eau qui peut être massive et aboutit à une sur-hydratation notable de l’organisme. Dans ce cas-là, la prise de boisson est augmentée à 4 litres par jour. Cette prise de boisson associée une production d’eau endogène de 0,4 L/jour et une prise alimentaire qui correspond à un apport d’eau de 0,6 L/jour correspondent à un total de gains de 5 Litres. Les pertes respiratoires, perspiratoires, la transpiration et les selles étant celles d’un sujet sédentaire (pertes insensibles = 1 L). Il y aura un excédent de 3,8 L d’eau que l’excrétion rénale va ajuster parfaitement en augmentant le volume des urines, de manière à ce que le total des pertes soit égal au total des gains et que le bilan hydrique soit nul. Page 4 sur 7 IV. Maintien du bilan hydrique et ses limites On est parfois aux limites des capacités d’ajustement. 1) Sujet dans le coma, occlusion intestinale, en réanimation Ici on a le cas d’un sujet dans le coma et en occlusion intestinale lors d’un séjour en réanimation. Ce sujet ne mange plus, il y a une production d’eau endogène de 0,4 L dûe à son métabolisme basal. Il y a les perfusions mises en place par les médecins réanimateurs avec des solutés éventuellement nutritionnels et des solutés médicamenteux. Tout cela va représenter, dans le cas choisi, des gains de 3 litres. Sachant que les pertes respiratoires, perspiratoires et transpiratoires sont à peu près inchangées, et qu’il n’y a pas de transit donc pas de selles, il faudra que le rein ajuste en excrétant de telle manière à ce que les pertes soient égales aux gains c’est-à-dire de 1,9 litres dans les 24 heures. 2) Même sujet, isolé chez lui, dans le coma depuis 48 heures Si maintenant on prend le même sujet mais qui est tombé dans le coma seul chez lui, isolé, sans assistance médicale, depuis 48 heures. Le sujet va continuer à avoir des pertes insensibles (respiratoires, perspiratoires, transpiratoires), il n’y a pas de selles car il est en occlusion intestinale et il produit un volume minimal d’urines de 0,5 litres. Ainsi, la somme de ses pertes est égale à 1,6 litres. De l’autre côté sa production endogène persiste car le métabolisme basal et le cycle de Krebs continuent de fonctionner. Ce qui représente seulement 0,4 L. Ainsi il nous reste un bilan négatif de 1,2 L. Ce qui veut dire que le patient va perdre 1,2 kg par 24 heures avec un risque de déshydratation intracellulaire majeur au bout de quelques jours. Page 5 sur 7 V. Causes de rupture de l’équilibre du bilan hydrique Le bilan hydrique peut être rompu dans les deux sens : soit par un excédent de fluides (bilan positif), soit par un défaut d’apport (bilan négatif). 1) Bilan positif 2 possibilités surviennent : soit un excès d’apport mais il faut qu’il soit massif pour dépasser les capacités d’élimination rénale, soit un défaut de capacité d’excrétion. a) Excès d’apport L’excès d’apport peut résulter d’une : ➔ Potomanie : trouble compulsif de la prise hydrique qui est caractérisé le plus souvent par un trouble psychiatrique sous-jacent, avec des prises d’eau massives et rapides qui peuvent être de l’ordre d’1 litre par heure et éventuellement des prises sur 24 heures qui peuvent dépasser des quantités de 6 à 10 litres. Dans ces conditions, l’excès d’apport peut devenir gênant. ➔ Polydipsie : situation plus fréquente, induite par les médicaments comme les neuroleptiques ou induite par le syndrome de Gougerot-Sjögren. Elle se caractérise par une sensation de soif, d'origine buccale le plus souvent, qui va générer une prise d’eau répétée, parfois relativement importante atteignant 6 à 8 litres par 24 heures qui la plupart du temps ne mettra pas en jeu le pronostic vital du sujet parce qu’elle va rester, dans la très grande majorité des cas, en dessous des capacités d’excrétion hydrique. b) Défaut d’excrétion Le défaut d’excrétion peut résulter d’une : ➔ Insuffisance rénale sévère voire même terminale avec perte de la capacité de dilution puisque le sujet n’émet plus une quantité suffisante d’urines. S’il n’y a pas la prise d’hydratation, le risque est une dilution progressive avec un risque d’accident hypo osmotique. ➔ Antidiurèse inappropriée : il s’agit d’une concentration d’ADH qui n’est pas adaptée aux circonstances osmotiques. En effet, l’hypo-osmolalité doit ralentir la sécrétion d’ADH mais dans ce cas, elle perdure. Cela peut être d'origine tumorale, médicamenteuse ou encore centrale. Elle se caractérise par un défaut de dilution des urines alors que l'osmolalité plasmatique diminue, avec un danger non négligeable pour la santé. Page 6 sur 7 2) Bilan négatif La survenue d’un bilan hydrique négatif est un événement plus fréquent. a) Défaut d’apport ➔ Séjour dans un milieu aride et sans boissons ou chez un sportif de haut niveau exposé à une course d’endurance très prolongée et qui s’hydrate insuffisamment. ➔ Adipsie : non perception de la sensation de soif. On la retrouve chez les personnes âgées, en cas de prise de certains médicaments ou en cas de lésions neurologiques. Elle se caractérise par une perte de la perception de l’hyperosmolalité et donc un défaut d’ajustement du comportement via la prise de boisson, malgré l’augmentation de la pression osmotique plasmatique. b) Pertes digestives, cutanées ou rénales ➔ Pertes digestives : vomissements incoercibles (très abondants), mais bien plus souvent il s’agit d’une diarrhée abondante (cholériforme) : jusqu’à 5-6 Litres d’eau par 24 heures. ➔ Pertes cutanées : relativement peu abondantes : ★ Dans des conditions d'exercice physique en haute température, on peut atteindre jusqu’à 4-5 Litres de pertes par sudation, qui ne sont pas toujours nécessairement compensées par une boisson. Si le sujet n’en a pas les moyens, pas le temps ou pas une perception suffisante de la pression osmotique, le bilan hydrique se négative. ★ Plus rarement l’hyperthermie prolongée peut provoquer une telle déshydratation. Si le sujet n’est pas en situation de prendre une quantité de fluide suffisante pour restaurer ce qui est perdu lors de la dissipation thermique due à l’hyperthermie ou parce qu’il est inconscient, ou parce que son état général est trop dégradé, le bilan hydrique tend à devenir négatif. ➔ Pertes rénales d’eau surviennent : ★ Lors de la prise de diurétiques. ★ Lorsque le système d’épargne hydrique est altéré (soit par défaut d’ADH, soit par défaut de réponse à l’ADH) c’est ce qu’on appelle les diabètes insipides. Situation où il y aura une fuite d’eau, parfois très abondante qui peut mettre en jeu le pronostic vital si le sujet ne peut plus accéder à l’eau. La diurèse peut atteindre à ce moment-là 6 à 18 litres par 24 heures. 3) Les oedèmes C’est une anomalie de distribution de fluides entre différents secteurs, en particulier entre le secteur plasmatique et le secteur interstitiel. Cette circonstance n’aboutit pas à un bilan positif ou négatif en valeur absolue mais simplement à une modification du stockage de l’eau sans variation osmotique puisque c’est généralement des variations de pressions oncotique ou hydraulique qui vont générer ce flux d’eau. Elle ne rentre donc pas dans les situations qui nous intéressent dans le cas présent. Page 7 sur 7 Pr Ivan TACK Physiologie Rénale - Capsule 8 Les CM HOMÉOSTASIE HYDRIQUE : RÉGULATION PAR L’HORMONE ANTIDIURÉTIQUE (ADH) I. Caractéristiques de l’ADH L’hormone antidiurétique est un nonapeptide comprenant deux cystines et un pont disulfure entre elles. L’ADH est très proche structurellement de l'ocytocine qui est une neurohormone hypothalamique, sécrétée dans l’hypophyse postérieure. Chez les primates : l’ADH est essentiellement représentée par une arginine en position 8 (du côté N-terminal) : il s’agit d’une Arginine Vasopressine (AVP). Chez les bovidés : cette arginine est remplacée par une lysine, d’où le terme de Lysine Vasopressine (LVP). AVP et LVP désignent donc la même hormone, mais avec une spécificité zoologique. Il existe deux grands types de récepteurs à l’ADH (ou plutôt 3 si l’on veut être exact). Tous les 3 sont des RCPG : Le récepteur V1 (RV1) : deux sous-types qui mettent en jeu la voie PLC/PKC - RV1a de type vasculaire - RV1b au niveau de l’hypophyse antérieure Le récepteur V2 (RV2) : présent au niveau du rein (essentiellement dans le canal collecteur du rein), responsable de l’activation de l' adénylate cyclase membranaire. L’affinité de l’ADH pour le récepteur V2 est supérieure à celle pour le récepteur V1, ce qui est responsable d’une mise en jeu décalée de ces récepteurs. La demi-vie de l’ADH est brève : 10-15 mins environ, avec une dégradation qui peut avoir lieu dans le sang, au niveau du foie et des reins. La synthèse de l’ADH a lieu essentiellement dans le noyau supra-optique de l’hypothalamus et plus faiblement dans le noyau paraventriculaire. Son stockage se fait lors du processus sécrétoire vers la post-hypophyse dans des granules. Ce stockage est sous forme mature avec la neurophysine II et la copeptine qui sont des fragments N-terminaux de la pré-prohormone en cours de maturation. Le schéma représente un neurone magnocellulaire du noyau supraoptique qui produit la pré-prohormone de l’ADH qui va maturer, libérant un peptide N-terminal initial qui est la copeptine et un peptide N-terminal intermédiaire qui est la neurophysine II. Page 1 sur 5 Comme le montre ce graphique, il existe un strict parallèle, puisque la sécrétion doit être équimolaire, entre la concentration circulante d’ADH et la concentration circulante de copeptine. Le problème est que le dosage de l’ADH est extrêmement difficile (basé sur des radio-immuno-essais) avec une fiabilité très mauvaise car la quantité est très faible, qu’il faut l’extraire et que la protéine n’est pas stable. Par conséquent, la copeptine, qui est un produit de dégradation, qui n’est pas connue pour avoir une activité biologique et qui a une durée de vie de 8 à 12h, est beaucoup plus stable, plus concentrée et plus facile à doser. Aujourd’hui, la copeptine tend à s’imposer dans de nombreuses circonstances en remplacement du dosage de l’ADH qui pose un problème majeur de fiabilité. II. ADH ou AVP ? Dualité de l’ADH L’ADH est une hormone surprenante et ambivalente. En effet, elle possède 2 noms : ADH (Hormone antidiurétique), ou AVP (Arginine Vasopressine) qui correspond à une description historiquement différente, c’est-à-dire que dans le premier cadre elle a été décrite comme une hormone vasopressive et dans l’autre cadre comme une hormone d’épargne hydrique. En fait, il s’agit d’une hormone de dualité, avec 2 types de niveau d’activité en fonction de sa concentration circulante et en fonction de l'activation d’un type de récepteur différent. A faible concentration, (entre 0 et 10 pg/mL), l’ADH est avant tout l’hormone de la concentration des urines (comme le représente la courbe verte, qui est croissante au fur et à mesure que l’osmolalité urinaire augmente et que la concentration d’ADH augmente). Lorsque l’on se rapproche de la concentration urinaire maximale, (entre 5 et 10 pg/mL) le niveau de concentration circulante d’ADH va commencer à activer le récepteur V1a, et dans ce cas va déclencher une réponse vasoconstrictrice. Page 2 sur 5 L’ADH aura un peu avant déjà activé le récepteur V1b générant une réponse hypophysaire antérieure, en particulier une stimulation de l’axe corticotrope. Dans ce cadre, à concentration élevée, l’AVP est donc une hormone de stress vasoconstrictrice. Nous pouvons regrouper cette dualité : le but étant visiblement de maintenir la pression artérielle, soit par le remplissage liquidien avec bien sûr une priorité physiologique qui est l’homéostasie hydrique, soit par la vasoconstriction lors d’une situation de stress. III. Contrôle osmotique de la sécrétion d’ADH On s'intéresse maintenant à la régulation de la sécrétion d’ADH. Physiologiquement, celle-ci est essentiellement régulée par la pression osmotique plasmatique. Celle-ci détermine la pression osmotique interstitielle perçue par les neurones magnocellulaires, qui régulent la sécrétion d’ADH. Dès l’osmolalité plasmatique la plus basse (environ 280 mOsm/kg d’eau), la sécrétion d’ADH va augmenter progressivement (jusqu’à 300 voir 310 mOsm/kg d’eau) pour rester comprise entre 0 et 5-6 pg/mL dans les concentrations physiologiques d’osmolalité plasmatique (c’est-à-dire entre 280 et 300 mOsm/kg d’eau). L’induction d’une soif, venant se surajouter à la fonction d’épargne hydrique, survient bien longtemps avant que les capacités maximales de sécrétions d’ADH soient atteintes : lorsque l’osmolalité plasmatique atteint 292-293 mOsm/kg d’eau en règle générale. IV. Contrôle volémique de la sécrétion d’ADH L’hypovolémie est un second stimulus, peu sensible mais extrêmement puissant, de la sécrétion d’ADH. On peut voir sur le schéma ci-dessous que plus l’on avance sur l’axe des abscisses, plus cela correspond à une diminution du volume sanguin. Nous pourrions presque le lire à l’envers. Lorsqu’on induit une hypovolémie, l’augmentation de la sécrétion d’ADH est initialement lente puis extrêmement rapide, ample et intense, atteignant des valeurs bien supérieures à celles de l’image antérieure. En effet, pour une osmolalité plasmatique très élevée (300-310 mOsm/kg d’eau), l’ADH est aux alentours de 10-12 pg/mL, alors pour une perte de 15-20% du volume sanguin circulant, la concentration plasmatique d’ADH est entre 15 et 45 pg/mL et active fortement le récepteur V1a et V1b. Page 3 sur 5 V. Interaction entre contrôle osmotique et contrôle volémique Si l’on considère les deux stimulus susceptibles de réguler la sécrétion d’ADH, à savoir l’augmentation de la pression osmotique et la diminution du volume sanguin circulant (volémie), il se pose la question des interactions entre ces deux déterminants. Ce graphique représente l’impact de l’hypo ou de l’hypervolémie sur la sécrétion d'ADH telle qu’elle est physiologiquement régulée par l’osmolalité plasmatique (c'est-à-dire la relation entre osmolalité plasmatique en abscisse et sécrétion d’ADH en ordonnée). L’hypovolémie va générer un décalage vers le haut et vers la gauche de cette courbe de régulation : en hypovolémie pour une pression osmotique donnée, la sécrétion d’ADH sera plus importante et donc la tendance à la rétention d’eau sera plus importante. L’organisme sacrifie donc la pression osmotique, qui va progressivement diminuer, au profit d’une tentative de restauration volémique via la rétention hydrique, dont une partie restera dans le secteur extra-cellulaire. En cas d’hypervolémie, le phénomène inverse survient avec un aplatissement progressif vers la droite de la courbe : la sécrétion d’ADH sera un peu plus faible pour un niveau de pression osmotique donné et la capacité de rétention d’eau un petit peu moindre. VI. Epargne hydrique et ADH Nous allons maintenant aborder la séquence d'événement générant l’épargne hydrique, ainsi que la place de l’ADH dans celle-ci. Tout d’abord, la perception de l’augmentation de la pression osmotique a lieu dans les noyaux supra-optiques (NSO) et para-ventriculaires (NPV) hypothalamiques au niveau du plancher du 3ème ventricule. Cette perception d’augmentation de pression osmotique peut être renforcée par une hypovolémie (au-delà de 5-10% de perte de volémie). Ceci stimule donc la sécrétion d’ADH libérée par la post-hypophyse. L’ADH ira ensuite via la grande circulation agir sur le rein, au niveau des cellules principales du canal collecteur, où elles susciteront via les récepteurs baso-latéraux RV2 l’expression apicale d’aquaporines 2 (AQP2). L’augmentation d’expression des AQP2 aboutira à une augmentation de la réabsorption hydrique au niveau du canal collecteur, une concentration progressive des urines (augmentation de leur osmolalité) et une diminution de leur volume (diminution de la diurèse). Dans un même temps, l’ADH sera responsable d’un effet de soif (effet dipsogène) médié par le récepteur V2 au niveau des noyaux hypothalamiques. Page 4 sur 5 VII. Action de l’ADH sur le canal collecteur Si l’on se place à l’échelle des cellules principales du canal collecteur du rein, l’ADH agit via son RCPG de type V2 localisé au pôle baso-latéral des cellules (côté interstitium tubulaire). Ce couplage va générer la translocation membranaire de vésicules sous-apicales contenant déjà des homo-tétramères d’aquaporines 2, qui vont fusionner à la membrane plasmique au pole apical (pôle urinaire) et rendre cette membrane perméable. L’interstitium au pôle basolatéral des cellules étant franchement hypertonique et perméabilisé à l’eau par l’expression spontanée d’aquaporines 3 et 4, le flot d’eau du pôle urinaire vers le pôle basolatéral aura lieu dès que les aquaporines 2 auront été exprimées à l’apex des cellules. Le passage d’eau intercellulaire est très faible puisque les jonctions serrées (ou tight junction) sont extrêmement hermétiques ne permettant un passage d’eau qu’au travers la paroi cellulaire. Parallèlement à l’induction de la translocation membranaire des vésicules contenant les aquaporines 2, l’AMPc génère une signalisation intra-cellulaire puis intra-nucléaire via l’activation du cAMP responsive element sur le gène codant l’aquaporine 2. Il y aura donc aussi une synthèse de novo d’aquaporine 2 et une formation de nouvelles vésicules qui seront prêtes à fusionner avec la membrane plasmique apical. Page 5 sur 5 Pr TACK Physiologie Rénale - Capsule 9 Les CM TRANSFERTS NÉPHRONIQUES D’EAU ET MÉCANISMES DE CONCENTRATION ET DILUTION D’EAU TCP = Tubule Contourné Proximal TCD = Tubule Contourné Distal BAFH = Branche Ascendante Fine de Henlé BALH = Branche Ascendante Large de Henlé I. Transferts néphroniques d’eau La filtration glomérulaire représente 100 à 140 mL/min (env 144 L d’eau/24h) chez un individu adulte jeune. La réabsorption tubulaire aura des caractéristiques plus ou moins obligatoires selon les segments néphroniques, dont certains sont quasiment imperméables à l’eau. 1) DFG du Tubule proximal La réabsorption tubulaire proximale est obligatoire et massive, elle représente environ 70 mL/min. Le gradient osmotique est responsable d’une réabsorption passive de NaCl, permettant de former un liquide tubulaire proximal isotonique, c'est-à-dire que la quantité filtrée d’eau et de sodium est identique à celle de réabsorption. 2) DFG de l’Anse de Henlé Le principe de réabsorption au niveau de l’anse de Henlé concerne surtout les néphrons profonds mais le mécanisme reste assez similaire pour les néphrons courts. Branche descendante fine Branche ascendante fine et large Tubules collecteurs Perméable Imperméable (Im)perméable à l’eau (~ 10 mL absorbé) à l’eau à l’eau selon ADH Peu perméable BAFH BALH Perméable au Na et à l’urée Réabsorption passive Réabsorption ++ au Na et à l’urée Na+ via symport Na+/K+/2Cl- Lors du passage dans la Branche ascendante large, le Na+ est réabsorbé de façon importante (20-25% Na+ filtré) A la fin de l’Anse de Henlé, les urines sont légèrement hypotoniques (moins de Na+/plasma, environ 100 mOsm/kg d’eau) et le resteront jusqu’au TCD. L’équilibre osmotique sera de nouveau atteint lorsque les urines passeront au niveau du tubule collecteur cortical ou médullaire. Page 1 sur 6 3) Canal collecteur La réabsorption facultative d’eau se fera au niveau du canal collecteur, car sensible à la présence d’ADH. a) Absence ADH En l’absence d’ADH, le canal collecteur notamment cortical est très peu perméable à l‘eau environ 4 mL est réabsorbé et 16mL vont être excrétés vers le milieu extérieur sur les 20 mL filtrés par le rein. Quant au Na+: moins de Na+ sera réabsorbé donc moins d’eau sera réabsorbée aussi. Ainsi, les urines seront plus diluées et la pression osmotique va diminuer à la hauteur de 50 mOsm/kg d’eau avec un débit d’urine très abondant (16 mL/min). b) Présence ADH Lors de la présence d’ADH, le canal collecteur médullaire va se rendre très perméable à l’eau, il va réabsorber 19,7 mL d’eau. Le débit d’urine sera à minima de 0,3 mL, soit de 400 à 500 mL/24h. L’ADH aura un effet majeur sur les néphrons profonds, l’osmolalité maximale des urines peut atteindre la valeur de 1200 mOsm/kg d’eau avec un débit urinaire de 0,3 mL/min. II. Concentration des urines 1) Mécanisme à contre courant L’un des challenges auxquels est confronté le rein concernant la réabsorption d’eau est la nécessité de concentrer les urines au-delà de la concentration du plasma alors que le rein ne peut pas transporter activement l’eau. a) Modèle de Kuhn L’anse de Henlé et le canal collecteur (contre courant de la branche de Henlé) drainent l’urine vers la papille. La concentration des urines repose essentiellement sur le mécanisme à contre-courant décrit par Bernard Kuhn (principe développé pour concentrer des effluents dans les fumées de cheminée). Selon le modèle de Kuhn et Hargitay, le fluide à concentrer va traverser le premier tube puis passer dans une zone sous contrainte (plus forte pression) et arriver dans le deuxième tube passant sous le premier. Les 2 tubes sont séparés par une Page 2 sur 6 membrane semi perméable permettant le passage d’eau mais pas des molécules en solution. Comme le liquide est sous pression, l'eau va progressivement fuir à travers la membrane semi perméable. Lors de la circulation du liquide dans les tubes, un gradient de concentration va se former. Le bas fond du tube va se charger en osmole tandis que la partie d’entrée du fluide va être plus diluée. Ainsi, de par sa position anatomique et par la succession des néphrons courts ou longs, le rein peut permettre de créer un gradient de concentration important en accumulant les osmoles du cortex vers la papille de façon totalement passive grâce à la perméabilité différentielle. L’urine est isotonique (ou légèrement hypotonique) dans le cortex puis devient peu à peu hypertonique au niveau de la papille. b) Gradient cortico papillaire Le gradient cortico papillaire est essentiellement constitué de NaCl et urée. Le NaCl est transporté de façon active dans la branche ascendante de Henlé contrairement à l’urée qui suit son gradient de concentration. 2) Mécanisme de concentration du NaCl a) Mécanisme physiologique Le NaCl est réabsorbé tout au long de l’anse de Henlé par plusieures étapes : - Le NaCl est réabsorbé grâce au symport Na/K/2Cl au niveau de la branche ascendante large et s’accumule dans l’interstitium augmentant sa tonicité. - Ensuite, au niveau du TCD, du tubule connecteur et du canal collecteur cortical, s’il y a de l’ADH, la tonicité s'équilibre car l’eau passe dans l’interstitium aboutissant à l’isotonie des urines - L’accumulation progressive de NaCl et d’urée dans l'interstitium via l’anse de henlé et les vasa recta est d’autant plus importante dans la médullaire interne profonde, ce qui favorise la réabsorption d’eau de plus en plus intense sur tout le canal collecteur et permet la concentration des urines à leur maximum. - La concentration des osmoles au niveau de l'interstitium de la médullaire externe et interne entraîne la sortie d’eau des branches descendantes et ascendantes fines de Henlé via une réabsorption passive de NaCl. Page 3 sur 6 b) Blocage de la concentration des urines ➔ Si on bloque la réabsorption du NaCl au niveau de la BALH par des diurétiques de l'anse, ➔ Si on bloque l’accumulation d’urée dans l'interstitium, notamment en réduisant l’apport en protéine (chez les végétariens ou vegan), ➔ Si on fait un wash out de la médullaire (en surchargeant le patient d’eau), ⇒ Alors, la capacité de concentration des urines va être considérablement altérée entraînant un volume de diurèse plus important. c) Pression osmotique La pression osmotique et la présence d’ADH déterminent les transferts d’eau entre les différents compartiments. En présence d’ADH dans le TCP et dans la branche descendante de Henlé, l’osmolalité croît progressivement jusqu’à atteindre un maximum de 1200 mOsm/kg d’eau. Ensuite, on observe une diminution systématique de la pression osmotique dans l’anse de Henlé avec la réabsorption de NaCl et la diffusion d'urée dans le secteur interstitiel permettant la formation d’un gradient osmotique. Enfin, lorsque les urines atteignent le canal collecteur, elles vont peu à peu se concentrer vers la médullaire en laissant fuir l’eau dans le compartiment interstitiel. III. Dilution des urines Le mécanisme de dilution des urines est assez similaire à celui de la concentration. Il existe toujours un mécanisme de concentration des urines entre le TCP et branche descendante de Henlé mais celui-ci est moins important, atteignant une valeur de 400 à 600 mmOsm/kg eau. Cette moindre concentration est permise grâce au défaut de perméabilité du canal collecteur puisqu’il n’y a pas d’ADH. Cela va aboutir à un moindre passage de NaCl sans diffusion d’urée dans le compartiment interstitiel responsable d’une faible pression osmotique interstitielle. La pression interstitielle étant moins élevée, l’eau reste dans le canal collecteur, ainsi la pression urinaire continue de décroître jusqu’à atteindre la valeur minimale de 50 mOsm/kg eau. Page 4 sur 6 IV. Charge osmotique et limites de la gestion rénale 1) Elimination de déchets et fluides La charge osmotique rénale dépend très largement de la quantité de déchets à éliminer. - Si on a beaucoup de déchets, il faudra un volume d’eau plus important pour éliminer ces déchets. - Si on a un excédent massif de fluide à éliminer (pression osmotique minimum 50 mOsm) l’eau sera éliminée à la hauteur des besoins en diluant au maximum les urines pour éviter les risques de dilution du plasma. 2) Exemple de femme adulte jeune de 50 kg Pour un individu de 50 kg, jeune, de sexe féminin, on estime sa quantité de déchets à 600 mOsm/j, issus de l’apport protéino sodé (½ urée, ⅔ sodium et métabolites du catabolisme des protéines animales: phosphates + ammonium). a) Aucune concentration ni dilution Si elle élimine les déchets sans les concentrer ou les diluer, son volume de diurèse sera de 2L/24h avec une pression osmotique de 300 mOsm/kg eau ce qui équivaut à un volume isotonique par rapport à la pression osmotique du plasma. b) Concentration des urines Si elle se retrouve privée d'eau, elle concentrera au maximum ses urines pour économiser l’eau de l'organisme, tout en éliminant les 600 mOsm de déchets. Pour cela elle éliminera 0,5L d’urines qui deviendront hypertoniques (1200 mOsm). ➔ Soit une économie de 1,5 L d’eau pour 24h c) Dilution des urines Au contraire, si elle est exposé à un excédent d’eau, elle diluera au maximum ses urines atteignant une pression osmotique de 50 mOsm/kg d’eau (hypotoniques) pour 600 mOsm de déchets avec un volume de diurèse de 12L/24h. ➔ Soit une élimination de l'excédent d’eau à hauteur de 10 L/24h. => Ainsi on en déduit que le rein gère bien mieux la pléthore (= excès d’eau) que la restriction d’eau au vu de la différence de volume économisé et éliminé. Page 5 sur 6 V. Notion de clearance d’eau libre a) Notion de clairance d’eau libre Lors des phénomènes de concentration ou dilution des urines, la clairance d’eau libre varie en fonction des besoins d'élimination de fluide ou de déchets : Si les urines sont très concentrées (hypertonique par rapport au plasma) => Cl eau libre < 0 car l’organisme favorise la réabsorption d’eau pour l’épargne hydrique. Si les urines sont très diluées (hypotonique par rapport au plasma) => Cl eau libre > 0 afin d’éliminer l’excédent de fluide de l'organisme. Si les urines ne sont ni concentrées ni diluée (isotonique par rapport au plasma) => Cl = 0 b) Calcul de la clairance ⇒ Cl eau libre = Débit urinaire - Clairance osmolaire (débit d’urine contenant les osmoles à concentration isotonique par rapport au plasma) Ainsi, pour calculer la clairance d’eau libre, il suffit de connaître : le débit d’urine DU, l'osmolalité du plasma et l’osmolalité urinaire (Cl osmolaire). Page 6 sur 6 Pr TACK Physiologie Rénale - Capsule 10 Les CM HOMÉOSTASIE DU SODIUM Dans ce premier cours consacré à l’homéostasie du sodium, nous allons parler du bilan métabolique du sodium et de ses limites. I. Homéostasie du sodium : 5 messages Commençons par quelques notions très importantes concernant l’homéostasie du sodium. L’essentiel du sodium provient des aliments transformés L’essentiel du sodium alimentaire provient de la transformation des aliments et non pas des aliments eux-mêmes. Donc finalement, l’apport sodé est la conséquence de la cuisine des aliments plutôt que de leur contenu sodé proprement dit. L’humain est plus adapté à l’épargne sodée qu’à l’excrétion de son excédent L’humain, qui habituellement a un apport sodé naturellement assez faible (sauf dans un mode alimentaire moderne), est beaucoup plus adapté à l’épargne sodée (recycler le sel) plutôt qu'à un excédent massif (ce qui lui pose des problèmes en raison de difficultés à excréter la charge sodée trop importante). C’est un des mécanismes impliqué dans le développement anormalement fréquent de l'hypertension artérielle essentielle. Donc, l’humain peut se passer très facilement de sel (tant qu’il n’a pas de perte massive), alors que l’excédent chronique pose problème, comme c’est le cas dans nos régimes ouest occidentaux. La régulation du stock sodé permet l’ajustement du volume extracellulaire et de la pression sanguine artérielle à long terme La régulation du stock de sodium permet l’ajustement du volume extracellulaire et donc la régulation de la PSA à long terme, ce qui en fait un déterminant clé dans le développement d’un certain nombre d'hypertension artérielle. Ainsi, il constitue une cible thérapeutique importante. En effet, les régimes désodés ainsi que les diurétiques sont des outils classiquement mis en œuvre dans les phases les moins sévères de l’hypertension artérielle. Ce n’est pas le stock sodé qui est directement détecté, mais la volémie efficace : il existe des leurres Ce n’est pas le stock de sodium qui est mesuré directement par l’organisme, nous n’avons pas de capteur pour le stock de sodium. Cependant, nous avons des capteurs pour le sodium lorsque celui-ci circule de façon dynamique, c’est-à-dire sous forme de fluide intravasculaire circulant, c’est ce que l’on appelle la volémie efficace. Page 1 sur 5 Comme la détection du stock de sodium est indirecte (sous forme de volémie efficace), il existe des situations où la volémie efficace sera perçue comme augmentée ou diminuée alors qu’en réalité la variation réelle du stock de fluide circulant est inverse. Le système Rénine-Angiotensine-Aldostérone joue un rôle déterminant dans la fonction d’épargne sodée Le système Rénine-Angiotensine-Aldostérone joue un rôle absolument déterminant dans la fonction d’épargne sodée. Pour rappel, nous sommes doués pour l'épargne sodée et l’une de ses caractéristiques les plus majeures c’est qu’un puissant système Rénine-Angiotensine-Aldostérone nous permet, si nécessaire, de verrouiller quasiment complètement l’excrétion rénale de sodium, de manière à nous mettre en épargne sodée maximale. Ce système Rénine-Angiotensine-Aldostérone est à la fois déterminant dans notre capacité d’épargne sodée mais représente aussi une cible élective pour les traitements antihypertenseurs. En effet, près de la moitié des médicaments à but antihypertenseur aujourd’hui, ont une influence directe ou indirecte sur ce système d’épargne sodée. II. Distribution du sodium Maintenant nous allons voir quelques informations sur la distribution du sodium dans l'organisme. Le sodium n'est pas distribué de façon homogène dans les compartiments liquidiens. Sur un total d’environ 2 100 mmol de sodium échangeable, la quasi totalité est située dans le secteur extracellulaire (150 mmol/L) et seule une petite partie est située dans le secteur intracellulaire (10 à 15 mmol/L). Il faut rajouter à cela environ 100 mmol de sodium trapé de le tissu conjonctif et dans l’os. 1 gramme de sodium représente 43 mmol de Na et représente 2,5 grammes de NaCl (chlorure de sodium). ⇒ 1 g Na = 43 mmol Na = 2,5 g NaCl De façon plus simple, en pratique médicale on se réfère souvent à ce moyen de calcul qui est que 1 gramme de NaCl est égal à 17 mmol de sodium et réciproquement que 17 mmol de Na est égal à 1 gramme de NaCl. ⇒ 1 g NaCl = 17 mmol Na Page 2 sur 5 III. Bilan du sodium Concernant le bilan de sodium, on reprend les éléments que l’on avait vu dans le bilan hydrique (capsule vidéo 7), à savoir : les secteurs liquidiens au milieu de la diapositive, à gauche le tube digestif et à droite le rein. L’apport quotidien de sodium est de l’ordre de 160 mmol/jour ce qui représente environ 8 à 9 grammes de sel par jour, avec une absorption quasiment totale, et une perte d’environ 10 mmol/jour de sodium dans les selles correspondant aux conséquences des sécrétions digestives et non pas d’un défaut d’absorption. Ces 160 mmol absorbés moins les 10 mmol excrétés dans le tube digestif et éliminés par les selles, 150 mmol vont se distribuer essentiellement dans le milieu extracellulaire et seront filtrés. Le débit de filtration de sodium par jour est de l’ordre de 25 000 mmol, ce qui est une quantité considérable, avec une réabsorption qui dépasse 99%. Donc, on pourrait considérer que 24 860 mmol sont réabsorbés et que 140 mmol/jour sont excrétés par le rein. Ensuite, il faut ajouter en moyenne 10 mmol/jour de sodium perdu par la transpiration. Cette quantité peut augmenter très sensiblement en cas d’augmentation de la transpiration (lors de l'activité physique ou lors d’une exposition à la chaleur) avec une adaptation possible de la concentration de sodium de la sueur lorsque la sudation est chroniquement élevée. IV. Apport alimentaire de sodium Concernant l’apport alimentaire de sodium, le message clé est que plus des ¾ de la consommation sodée quotidienne résulte de la préparation des aliments (comme l’indique le camembert en haut à droite de la diapositive) alors que le contenu initial ne représente pas plus de 10 à 15% et que le sel de cuisson et le sel de table eux mêmes ne représentent qu’une quantité marginale (la somme des deux est environ égale à 10 %). C’est donc dans la préparation des aliments, l’adjonction de sauces, de substances pré salées, qui va renforcer la teneur en sel. C’est aussi éventuellement l’adjonction de sel lors de la conservation des aliments qui posera problème. Page 3 sur 5 1) Contenu riche en sodium Si on cherche les aliments riches en sel, la liste est malheureusement longue, ce qui pose problème lorsque les personnes sont soumises à un régime désodé. Parmi les aliments très riches en sel, on retrouve le poisson fumé, les olives, la charcuterie, les sauces industrielles, les fromages, les conserves de poisson et même le pain. /!\ Sur la diapo est indiquée la teneur en sodium de chacun des aliments. Il faut multiplier par un facteur 2,5 la concentration qui figure sur la diapo pour obtenir l’équivalent en sel, c’est-à-dire en chlorure de sodium( NaCl). Par exemple, dans une baguette, la quantité de chlorure de sodium est d’environ 4 grammes, ce qui est une quantité non négligeable. 2) Sources inattendues de sodium Il y a certaines boissons qui contiennent du sodium, généralement ce n’est pas du chlorure de sodium mais du bicarbonate de sodium. C’est la cas de la Vichy St Yorre, riche en sodium mais pas en chlorure de sodium. On retrouve aussi certaines substances pharmacologiques anormalement enrichies en sodium, c'est le cas des comprimés effervescents dont la teneur en sodium n’est pas négligeable. On voit sur la diapo que pour un comprimé de vitamine C commerciale qui s’appelle la Laroscorbine il y a 257 mg de sodium par comprimé. 3) Contenu pauvre en sodium Si on cherche maintenant des aliments pauvres en sodium et bien c’est assez facile. Le tout est de ne pas rajouter de sodium lorsqu’on les cuisine. C'est le cas du poisson, de la viande, du lait, des œufs et de la plupart des légumes. Il faut, si l’on ajoute du sel, considérer que ces aliments deviennent potentiellement riches en sodium et inversement si on y ajoute des condiments mais pas de sodium, leurs consommations ne posera aucun problème en cas de régime désodé. V. Limites physiologiques du bilan sodé Les limites physiologiques du bilan sodé sont forcément dépendantes de la capacité du rein à excréter le sodium. La concentration urinaire maximale de sodium est aux environs chez l’Humain de 280 mmol/L. Donc, plus il y a de flux, de filtration glomérulaire et d’eau disponible, plus la capacité d’excrétion du sodium sera élevée. Page 4 sur 5 L’exemple type c’est ce qu’il se passe lorsque les gens sont naufragés. Un médecin généraliste français s’est intéressé à la dérive en tant que naufragé et il s’est rendu compte qu’il était tout à fait possible de boire de l’eau de mer diluée moitié-moitié avec une eau hypotonique (eau de pluie). Parce qu’en réalité l’eau de mer contient 30 à 35 grammes de NaCl / L et si on la dilue d’un facteur 2 on reste dans une valeur approximative de 280 mmol/L de concentration en sodium, de sorte à ce que l’excrétion reste possible. Inversement, boire de l’eau salée pure expose très rapidement à un accident hypertonique. Si on s’intéresse aux limites d’excrétions rénales de sodium, celles-ci sont extrêmes dans un sens comme dans l’autre: En cas de privation sodée ou de perte sodée importante (sans substitution immédiate par l’alimentation) : Notre rein est capable de verrouiller très fortement l'excrétion sodée jusqu’à descendre au-dessous de 2 mmol / 24 heures, c’est-à-dire pratiquement plus de perte rénale de sodium. Parce que, comme dit plus tôt, nous sommes des êtres particulièrement bien adaptés à la privation sodée. Le sodium étant le déterminant de notre volume extracellulaire et donc de notre pression sanguine artérielle, c’est donc une molécule absolument vitale qu’il convient de préserver. En cas d’excédent massif de sodium : Nous sommes capables d’excréter, du moins sur un temps relativement bref avec une bonne capacité, des quantités de sel colossales jusqu’à 500 mmol / 24 heures, sous réserve que l’hydratation soit suffisante et en sachant tout de même que sur le long terme cette surconsommation sodée exposera à une déviation progressive du bilan sodé vers un bilan légèrement positif et l’augmentation de la PSA. Alors, quelles sont les causes de rupture de l’équilibre du bilan de sodium ? Classiquement, c’est la plupart du temps des pertes, qu’il s’agisse de pertes digestives : vomissements incoercibles ou diarrhée abondante, pertes cutanées : hypersudation, ou encore d’anomalies rénales : excédent de perte (prise de diurétiques ou atteintes tubulaires avec un défaut de réabsorption de sodium comme le syndrome de levée d’obstacle (après levée d’une obstruction des voies urinaires basses)) ou défaut de capacité d’élimination par Insuffisance rénale chronique et lorsqu’elle est relativement avancée la capacité d’excrétion sodée diminue avec l'apparition précoce d’une HTA éventuellement sévère qui va retentir sur le pronostic. Les oedèmes : Il ne s’agit pas d’une anomalie de bilan absolue, c’est-à-dire ni augmentation ni diminution dans l’absolu. Il s’agit de la redistribution des fluides sodés du secteur plasmatique vers le secteur interstitiel. Pourtant, l’apparition d’un phénomène oedémateux va s’associer systématiquement à un bilan positif. Dans un premier temps, il y a un stock total de sodium qui reste stable. Le transfert du secteur plasmatique vers le secteur interstitiel génère un défaut de volémie efficace qui sera compensé par une augmentation de la réabsorption rénale de sodium et un verrouillage de l’excrétion rénale, qui secondairement va positiver le bilan qui était initialement inchangé. Page 5 sur 5 Pr. Ivan TACK Physiologie Rénale - Capsules 11 et LEs CM 12 HOMÉOSTASIE DU SODIUM (SUITE) : TRANSFERTS RENAUX NB : Vous trouverez à la fin de cette partie (p6) un schéma récapitulant les éléments essentiels de la capsule 11, n’hésitez pas à vous en servir car ce cours est très schématique et ressemble beaucoup à celui de la pharmacologie des diurétiques. Bon courage ! I. Principaux sites de transport du sodium Commençons par quelques généralités sur les sites de transport et les quantités de Na réabsorbées dans les différents segments : Sachant que : - Le DFG (débit de filtration glomérulaire) = 180 L/j chez le sujet adulte jeune et sain. - Concentration plasmatique de Na = 140 mmol/L (attention, erreur sur la diapo) Nous obtenons une valeur de charge filtrée de l’ordre de 25 000 mmol/j qui va être réabsorbée à 99% tout au long du néphron. Ainsi : 2/3 de la charge filtrée (66,4%) est réabsorbée au niveau du tubule contourné proximal. 25% au niveau de la branche ascendante large de l’anse de Henlé. 5% au niveau du tubule contourné distal. 3% au niveau du canal collecteur (s’étend en réalité du canal connecteur (= fin du tubule contourné distal) jusqu’au canal collecteur médullaire) : Cette zone est, certes, responsable de la réabsorption la plus faible quantitativement mais c’est cependant la plus finement et fortement régulée. En pratique, l’excrétion fractionnelle de sodium représente moins de 1% (0,6%) de la charge filtrée initiale, soit 140 mmol/j. Page 1 sur 12 II. Bases de la réabsorption tubulaire du Na+ Le passage du liquide tubulaire de la lumière urinaire vers l’interstitium est un passage transépithélial (et non paracellulaire !) favorisé par : - Un gradient chimique favorable (facilité par la faible concentration en sodium : 10-20 mmol/L dans la cellule épithéliale contre 140 mmol/L dans la lumière urinaire). - Un gradient électrique favorable (la cellule est globalement électronégative (-4mV à -70mV) facilitant le passage du Na+. Transport également favorisé par le transfert électroneutre de glucose et de certains AA. - Un passage de la membrane basolatérale contre les gradients chimiques et électriques : via un transport actif Na/K ATPase. III. Réabsorption capillaire du Na+ Le retour du Na+ dans les capillaires péritubulaires se fait par réabsorption passive du Na+ et du fluide interstitiel, en fonction des déterminants de l'équation de Starling : - Le Δ Pression oncotique = 35 mmHg (πc - πi = 40-5) est favorable à la réabsorption de Na+ l’interstitium vers le capillaire. - La Δ Pression hydraulique = -15mmHg (P hydraulique capillaire > P hydraulique de l’interstitium : Pc-Pi = 20-5) est orientée du capillaire vers l’interstitium. La variation de pression est donc défavorable à la réabsorption du Na+ vers le capillaire. - La somme entre la pression oncotique et hydraulique nous donne une pression de réabsorption nette de 20 mmHg qui favorise le passage final du Na+ de l’interstitium vers le capillaire. Il est intéressant de se souvenir que le phénomène de balance tubulo-glomérulaire permet un ajustement de la réabsorption sodée en fonction du DFG (nous en reparlerons dans un autre cours). En effet, lorsque le DFG augmente, la quantité de fluide filtrée est plus importante diminuant le débit plasmatique après le filtre glomérulaire. Ainsi la pression hydraulique capillaire diminue tandis que la pression oncotique augmente (si le fluide sort, la concentration protéique ↗ = πc ↗). En se rappelant que la Pression oncotique est favorable à la réabsorption du Na+ vers le capillaire, nous pouvons en déduire que la conséquence d’une augmentation du DFG sera un environnement plus favorable à la réabsorption interstitielle. Page 2 sur 12 ☞ Donc plus la charge de Na+ filtrée par le DFG est importante, plus la réabsorption péritubulaire le sera aussi dû au fait que le gradient de pression net sera plus favorable à la réabsorption. Si DFG ↗ ➪ Charge de Na+ filtrée ↗ ➪ (πc ↗ & Pc ↘) ➪ Réabsorption ↗ IV. Étude des transports post-proximaux Le professeur nous présente cette image dans le but de nous rappeler comment la plupart des travaux qui ont permis de comprendre la réabsorption tubulaire tout au long des segments néphroniques ont été développés. Dans les années 70/80 de nombreuses équipes de chercheurs ont appris la micro dissection des segments néphroniques. Ils ont, du coup, été capables de cathétériser des segments tubulaires identifiables de façon histologique et de les micro-perfuser avec un soluté pour en étudier les transferts de la lumière vers le fluide interstitiel qui les baignaient. Cela a permis de comprendre le sens des transferts et leurs principaux déterminants. V. Tubule proximal et réabsorption du Na+ La première zone de réabsorption massive du Na+ est le tubule proximal (étudié par microponction grâce à des animaux dont le TCP est très à la surface du cortex rénal, permettant ainsi une ponction à travers la surface du rein). Il existe un gradient électrochimique favorable qui permet la réabsorption nette d’environ 67% de la charge filtrée. Cette réabsorption tubulaire proximale est peu régulée, ou en tout cas, avec peu de finesse contrairement à la partie distale du néphron. Les facteurs de régulation sont l’angiotensine II et le système orthosympathique et cette régulation se fait en partie via la balance tubulo-glomérulaire et par le phénomène de back leak (Cf cours sur les transferts tubulaires III.2 = reflux de Na+ de l’interstitium vers la chambre urinaire). La réabsorption tubulaire proximale est peu susceptible d’être bloquée (heureusement car la fuite sodée serait massive !). Néanmoins on peut l’atténuer en bloquant partiellement l’anhydrase carbonique exprimée à la surface des cellules épithéliales proximale par Acétazolamide (Diamox°). Ce médicament va générer un défaut de production de CO2 intraluminal, un défaut d’activité de l’échangeur Na+/H+ et donc diminution de la réabsorption de Na+ qui est peu importante mais qui se manifeste par un effet diurétique (car une partie du Na+ reste dans la lumière tubulaire et attire l’eau). Le Syndrome de Fanconi est un déficit de la Na+/K+ ATPase, qui va générer un défaut global de la réabsorption sodée au niveau du tubule proximal mais aussi des co-transports associés. On retrouve une fuite de glucose, de bicarbonates, d’acides aminés et de phosphates. Il peut être congénital ou acquis (notamment par la toxicité mitochondriale induite par certains médicaments (# Cas clinique du TD1 de physio rénale avec la trithérapie antirétrovirale). Page 3 sur 12 VI. B.A.L.H et réabsorption du Na+ La 2ème zone de réabsorption quantitativement la plus importante se trouve au niveau de la branche ascendante large de l’anse de Henlé (BALH). Il n’y a pas de réabsorption de Na+ au niveau descendant qui est, en revanche, perméable à l’eau ! Au niveau de la branche ascendante nous avons donc une : - Réabsorption passive paracellulaire de Na+ le long de la branche ascendante fine peu importante quantitativement. - Réabsorption par transport actif secondaire au niveau de la branche ascendante large (BALH). Le transport est beaucoup plus important, en tout = 25% de la charge filtrée. On retrouve, au pôle apical un symport NaK2Cl bloqué par les diurétiques de l’anse (Furosémide, Bumétanide). Ces médicaments vont donc fortement limiter la réabsorption de Na+ dans ce segment malgré l’activité des autres canaux et de la pompe Na+/K+ ATPase basolatérale. Des mutations des transporteurs et canaux de la BALH peuvent générer une fuite sodée importante responsable d’un hyperaldostéronisme secondaire marqué avec une hypokaliémie profonde (qui sera le signe d’appel biologique en général) et une hypovolémie modérée parfois symptomatique. Ex : syndrome de Bartter Remarques non dites à l’oral mais qui peuvent aider à comprendre :) : Rq 1 : Maladie de Bartter = maladie caractérisée par une mutation des transporteurs et canaux de la BALH entraînant une hypokaliémie, une hypochlorémie et une hyponatrémie associée à des taux plasmatiques élevés de rénine et d’aldostérone. Rq 2 : L’augmentation de la natriurèse et la diminution de la volémie sont détectées par l’appareil juxta-glomérulaire qui conduira à l’activation du SRAA par une augmentation de la production de rénine puis d’aldostérone (expliquant l’hyperaldostéronisme secondaire). L’aldostérone agira sur les Rc aux minéralocorticoïdes favorisant la réabsorption de Na+ et d’eau (= régulation de la volémie) mais favorise aussi l’excrétion de K+ (expliquant l’hypokaliémie profonde). On sait que les cours de pharmaco de tonton Senard vous manquent… VII. Tubule distal et réabsorption du Na+ Le 3ème segment de réabsorption du Na+ est quantitativement beaucoup plus faible correspond au tube contourné distal. Le transport est actif secondaire et favorisé par un gradient électrochimique favorable. Ce segment est imperméable à l’eau (en omettant le tubule connecteur) et insensible à l’ADH. Il permet la réabsorption d’environ 5% de la charge filtrée. Celle-ci est possible par l’expression d’un transporteur apical : le symport NaCl (isoélectrique) et d’un transporteur basolatéral : la pompe Na/K ATPase. Page 4 sur 12 Le symport NaCl est bloqué par les diurétiques thiazidiques (chef de file = hydrochlorothiazide). En le bloquant, ces médicaments provoquent un effet natriurétique sensible sans pour autant générer d’hypovolémie brutale (sauf à long terme où leur usage peut poser des problèmes). Les mutations inactivantes de ce symport NaCl (aussi nommé mutation SLC12A3) causent un syndrome proche du syndrome de Bartter avec un défaut de réabsorption du NaCl dans cette zone, un hyperaldostéronisme secondaire responsable d’une hypokaliémie avec une sécrétion de potassium au niveau du canal collecteur profond. Cela provoque une fuite de sodium et une hypokaliémie profonde mais non dangereuse car paradoxalement elle est bien tolérée du point de vue électrophysiologique. → Ce syndrome est le syndrome de Gitelman. Les mutations des protéines régulatrices du symport NaCl (WNK1, WNK 4) entraînent, quant à elles, un gain de fonction du symport NaCl qui va causer une réabsorption augmentée de Na+ avec une expansion volémique, l’apparition d’une HTA et une freination de la sécrétion d’aldostérone responsable secondairement d’une tendance hyperkaliémique. → C’est une des rares formes d’HTA avec hyperkaliémie : c’est le syndrome de Gordon. VIII. Canal collecteur et réabsorption du Na+ Le dernier segment de la réabsorption tubulaire du Na+ est le canal collecteur. C’est un segment particulièrement crucial : c’est le segment de la régulation fine de l’homéostasie sodée. On retrouve un ajustement extrêmement précis de l’excrétion sodée en fonction de la volémie efficace et de la balance sodée. Le transport du sodium est actif secondaire dépendant, au pôle basolatéral, de la Na/K ATPase et, au pôle apical, de la perméabilité conditionnée par l’expression d’un canal sodé, le canal ENaC. Cela représente 2-3% de la charge filtrée. La réabsorption du sodium est là aussi conditionnée par un gradient électrochimique favorable. On retrouve aussi la sécrétion parallèle de K+ et H+ qui permet de maintenir la charge électrique intracellulaire nécessaire à ce gradient. Elle se fait grâce à un canal de rectification potassique se trouvant à la partie basse de la cellule principale du canal collecteur. Donc, plus le Na+ est réabsorbé dans ce segment, plus il y aura sécrétion de K+ et H+, ce qui peut induire une hypokaliémie et une tendance à l’alcalose métabolique. Ce segment est également sensible à la réabsorption de l’eau conditionnée par l’ADH. L’expression d’ENaC dans la cellule principale du canal collecteur est stimulée par l’aldostérone. En effet, le couplage de l’aldostérone au récepteur minéralocorticoïde induit