Support de Cours Sociologie FMPA PDF 2022/2023

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Faculté de Médecine et de Pharmacie d'Agadir

2023

Pr Aharmouche Fatima Zahra

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sociology medical sociology family sociology social sciences

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This document is a sociology course support for first-year medical students at the Faculty of Medicine and Pharmacy in Agadir. The document covers various topics in sociology, including the history of sociology, family changes, and the sociology of health and illness.

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Module : Sociologie Support de cours destiné aux étudiants en médecine Premier semestre Pr AHARMOUCHE FATIMA ZAHRA Année universitaire : 2022/2023 1 Sommaire Introduction I. Général...

Module : Sociologie Support de cours destiné aux étudiants en médecine Premier semestre Pr AHARMOUCHE FATIMA ZAHRA Année universitaire : 2022/2023 1 Sommaire Introduction I. Généralités sur la sociologie 1. La sociologie, une tentative de définition 2. Les objectifs de la sociologie 3. La naissance de la sociologie : fille des trois révolutions 4. Aperçu général sur les grands courants sociologiques II. Les grands changements de la famille marocaine 1. Des généralités sur la famille 2. L'évolution de la famille marocaine III. La sociologie de la santé 1. La santé : une esquisse de définition 2. Les déterminants sociaux de la santé 3. La maladie et la médecine au prisme de la sociologie 4. La sociologie de la santé Introduction La sociologie est une branche des sciences humaines et sociales qui concerne l’étude de la vie sociale, des communautés et des sociétés humaines (Anthony Giddens, 2006). C’est un projet fascinant et à la fois complexe parce que son sujet principal est notre comportement en tant qu’être social et ce, dans un contexte en évolution, marqué par le recul de la tradition sous l'effet de la globalisation, l'affirmation croissante de l'individu et le poids grandissant des émotions qui bouleversent le jeu des acteurs dans la société (Nizet, 2007). De là, les études sociologiques couvrent un large spectre de la vie sociale qui s’étend de l’analyse des rencontres passagères entre étrangers, aux opérations sociales internationales. Le présent module ambitionne d’initier les apprenants a la sociologie générale et favoriser la compréhension de l’aspect socioculturel dans la relation de soin avec le patient et sa famille, et d’une manière plus globale dans l’exercice de la profession médicale. 2 I) Généralités 1- La sociologie, une tentative de définition Le terme de sociologie est premièrement nait dans les années 1780 de la plume d’Emmanuel-Joseph Sieyès ou Abbé Sieyès, Toutefois, sa découverte est massivement attribuée à Auguste Comte. Il se compose du préfixe « socio » du mot latin socius signifiant « compagnon, associé » ou (société) et du suffixe « logie » du terme grec ancien logos, signifiant « discours, parole », ou étude, science. La terme sociologie est un terme polysémite qui tourne autour de l’étude du social ". Le social es selon Henri Janne (1951), tout fait, tout acte, tout rapport dans la mesure où il comporte une action de la société ou une action sur la société, ou encore, si l'on veut, tout fait, tout acte, tout rapport à propos desquels la société apparaît comme objet ou comme sujet. 2- Les objectifs de la sociologie « La sociologie ne vaudrait pas une heure de peine si elle ne devait avoir qu’un intérêt spéculatif », dit Émile Durkheim, c’est dans ce sens qu’Anthony Giddens (2006), propose trois grands objectifs ou utilités de la sociologie : 2.1 Saisir les différences entre les cultures À travers des démarches et outils, la sociologie permet d’arriver à regarder le monde social d’une manière différente de la nôtre, comprendre mieux la méthode de vie de l’autre et arriver ainsi à une meilleure compréhension des problèmes. 2.2 Évaluer les effets des politiques : Les études sociologiques peuvent proposer une aide opérationnelle et pratique dans l’évaluation des résultats des politiques (urbanisation, santé, éducation…), et permettre ainsi aux décideurs de prendre des décisions plus rationnelles. 3 2.3 L’éveil de soi : Plus nous avons une meilleure compréhension de nous-même, de nos actions et de notre mode de vie, nous aurons une meilleure maitrise de notre futur a travers notamment, la création d’un contre-pouvoir (association de protection de l’environnement, de protection des consommateurs…). 3- La naissance de la sociologie : fille des trois révolutions À partir du XIXème siècle, la pensée sociologique se consolide, se précise et s’approfondit grâce à trois révoltions : 3.1 La révolution culturelle L’éclosion des théories sociales séculières (Locke, Montesquieu, Rousseau) entre 1730 et 1775 et la diffusion plus large des théories sociales ; Un début de « disciplinarisation » (Auguste Comte) entre 1814 et le milieu du XIXème siècle. La loi des trois états : les trois étapes de l'espèce humaine, de la connaissance : théologique, métaphysique et positiviste. 3.2 La révolution politique : la Révolution française Elle a provoqué des bouleversements sociaux en France au 18ème siècle. La monarchie absolue a été remplacé par un régime républicain Elle a permis par la suite la Déclaration des droits de l‘Homme et du citoyen de 1789 qui proclame l'égalité des citoyens devant la loi, les libertés fondamentales, et la souveraineté de la Nation. Elle a entraîné la suppression de la société d'ordre (féodalité, privilèges…), une plus grande division de la propriété foncière, la limitation de l'exercice du pouvoir politique, le rééquilibrage des relations entre l'Église et l'État et la redéfinition des structures familiales. 4 3.3 La révolution industrielle La révolution industrielle du XIXe siècle a fait basculer une société dominée par les activités de l’agriculture et de l’artisanat, vers une société commerciale et industrielle ; Cette transformation a eu une grande influence sur l'économie et le droit (le capitalisme), la société (les luttes de classes), l'environnement (l’urbanisation massive), et la politique (colonisation). Apparition de phénomènes sociaux menaçant l’ordre social : exode rural massif, pauvreté, violence, …. Le besoin de solutions pour faire régner l’ordre, « savoir pour prévoir afin de pouvoir », (Auguste Comte), d’où la nécessité des études sociales. 4- Aperçu général sur les grands courants sociologiques 4.1 Émile Durkheim (1858-1917)  Dans « Les règles de la méthode sociologique », le fondateur de la sociologie française, définit la Sociologie e tant que « La science des institutions, de leur genèse et de leur fonctionnement »  Les institutions sont « toutes les croyances et tous les modes de conduite institués par la collectivité ».  La sociologie est l’étude des faits sociaux : des manières d’agir, de penser ou de sentir, extérieures à l’individu, et qui sont douées d’un pouvoir de coercition en vertu duquel ils s’imposent à lui »  Le fait social est tout ce que fait l’être humain pour garder l’image qu’il a de lui- même et qu’ils ont les autres de lui dans la société, c’est un moyen qui facilite les rapports entre les individus du même groupe social.  Les faits sociaux ont tous quatre propriétés : 1) collectifs, 2) relativement stables 3) extérieurs aux individus et 4) et contraignants pour les individus. 5 Selon Durkheim : La recherche en sociologie consiste d’abord à respecter des principes scientifiques et à suivre une démarche rigoureuse : - Étudier un objet sociologiquement pertinent ; - Ne pas déduire de conclusions générales à partir des points de vue personnels ; - Rompre avec les préjugés, les notions préconstruites (qu’on dit à l’avance) et les sens communs (stéréotype). - Ne pas produire des jugements de valeur et chercher plutôt à comprendre ; - Abandonner les explications non scientifiques « métaphysiques » ; - Expliquer les phénomènes sociaux par la recherche de leurs causes ; - Exemple : le suicide, l’étude quantitative du suicide montre qu’il s’agit d’un phénomène social et non strictement psychologique, les différences entre les taux de suicide renvoient à des variations dans le degré d’intégration et de régulation des comportements des individus à l’intérieur des groupes sociaux. 4.2 Max Weber (1864 – 1920) Contrairement à Durkheim, Weber ne considère pas les faits sociaux comme des choses indépendantes de leur auteur mais comme des interactions entre des comportements individuels obéissant à des motivations et des intérêts qu'il faut reconstituer. Pour M. Weber, « la sociologie est : « La science qui se propose de comprendre par interprétation l'activité sociale et par là d'expliquer causalement son déroulement et ses effets » Une démarche en trois étapes : la compréhension, l’interprétation et l’explication de l’activité sociale. Selon Weber, le monde social est une agrégation d’actions sociales, qui représentent des comportements humains auxquels l’acteur attribue un sens subjectif : Une discussion entre amis est une action sociale, en revanche, une collision entre deux cyclistes ne l’est pas car les individus ne se sont pas dirigés volontairement l’un vers l’autre. 6 Exemple « Le savant et le politique » : Max weber dans sa sociologie de domination, définit trois idéaux-types de domination : La domination charismatique : repose sur le charisme d’une personne (et non sur les règles ou les lois), comme par exemple Che Guevara ou un Roi. La domination traditionnelle : repose sur la soumission et la croyance en la tradition. Exemple des communautés religieuses, tribus ; La domination légale rationnelle : repose sur la croyance en la légitimité des règlements et de ceux qui les exercent. Code de la route, réglementation d’une société ; 4.3 Karl Marx (1818-1883) : Économiste philosophe et militant Il définit la société en tant que « produit de l'action réciproque des Hommes... L’État politique, qui n'est que l'expression officielle de la société civile », « L’histoire de toute société jusqu’à nos jours est l’histoire de la lutte des classes » ; Son apport se focalise sur le conflit structurel au sein d’une société ou organisation, autour de la possession des moyens de production ; De l'infrastructure qui régule l'activité de production, découle la superstructure. L’infrastructure (base): c’est ce qui est en rapport avec la production (les conditions de production, les moyens de production et les rapports de production), et la superstructure : la totalité des idées d'une société, c'est-à-dire ses productions non matérielles. 7 II) Les grands changements de la société marocaine 1) Des généralités sur la famille 1.1 Définition de la famille : Selon l’anthropologue français Claude Lévi-Strauss: « La famille est à la fois une institution sociale, juridique et économique, qui existe dans toutes les sociétés humaines. » La famille au sens sociologique est un groupe social primaire qui est constitué d’un ensemble de personnes qui possèdent des liens entre eux. 1.2 Les types de familles La typologie de la famille obéie à plusieurs critères, la taille, la forme, le milieu de vie,… - La famille traditionnelle : famille élargie orientée vers la reproduction de la vie ; centrée sur la transmission du patrimoine matériel, biologique, symbolique, de génération en génération. Au sein de ce type de famille les normes, les coutumes sont celles de la société et de la culture commune et les conduites sont soumises aux règles. Quant aux rôles, ils sont hiérarchisés et indiscutables. - La famille moderne : famille nucléaire apparue après la Deuxième Guerre mondiale dans un contexte de développement socioéconomique, caractérisé par la tendance à l’individualisme où les parents cherchent un équilibre entre la famille-institution et le bonheur personnel pour chacun. La famille est détachée de la tradition; l’avenir est projeté sur les enfants, ainsi la logique familiale-collective laisse la place à l’individualité où chacun est acteur de sa propre vie. - La famille recomposée est une famille avec un ou plusieurs enfants dont l’un des deux conjoints n’est pas le parent. Une famille recomposée c’est la cohabitation d’un des parents naturels, de ses enfants, de son nouveau conjoint et d’enfants issus d’une première union. - La famille monoparentale : elle est composée d’un seul parent vivant avec ses enfants qui ne sont pas encore mariés. Pour être considéré comme famille 8 monoparentale, il est nécessaire que le parent assume seul les responsabilités éducatives et financières concernant les enfants. 1.3 Les fonctions de la famille La famille a plusieurs fonctions par rapport aux individus qui la composent, ainsi qu’aux groupes sociaux avec lesquels elle interagit dans son milieu social (Martin, 2004), dont on cite :  Fonction de reproduction et maintien de l’espèce humaine: La famille est une force sociale de reproduction et de renouvellement des générations.  Fonction de socialisation: Le processus par lequel un individu apprend et intériorise les différents éléments de la culture de son groupe, ce qui lui permet de former sa propre personnalité sociale et de s’adapter au groupe dans lequel il vit.  Les fonctions économiques: Sur ce plan elle assure les activités de consommation, c’est dans le cadre familial que les individus consomment la plus part de leurs achats. Et de production la famille est une entité économique de production dans le cas des activités agricoles ou artisanales. à caractère familial.  Les fonctions sociales: Les individus s’attachent à la famille car c’est un cadre principal d’expression des sentiments et de l’affection entre les enfants et les parents.  Fonction de soins et de satisfaction des besoins: comme le logement, l’habilement, l’alimentation, l’hygiène, les soins, et les loisirs… 2) Évolution de la famille marocaine: Selon le Haut-commissariat aux plans HCP (2018), l’évolution de la famille marocaine s’est traduit par une mutation démographique notable dont témoignent : - La Diminution de l’Indice synthétique de fécondité 2.2 au lieu de 7.2 en 1962 - La Diminution de l'âge au premier mariage ; 9 - L’Augmentation du nombre des ménages et diminution du nombre moyen d’adulte par ménage; - La diminution de la dominance masculine des chefs de ménage; - Le Vieillissement plus rapide de la société. Actuellement 11,1 % de la population, elles représenteraient 15,4% de la population totale à l’horizon 2030. d’après El Harras (2006) Ces transformation sont notamment le fruit de : - La diminution du travail traditionnel familial (agriculture) au profit d’un travail individuel (ouvrier journalier) - La scolarisation des filles; - La sortie des femmes au travail hors du foyer; - La promulgation de la loi n° 70.03 constituant Code de la famille au Maroc en 2004; - L’accès aux droits et l’émancipation; - La domination de la famille nucléaire. Ainsi, les aspects de l’évolution sociale de la familiale marocaine sont comme suit : - La transformation des liens familiaux caractéristiques d’une famille traditionnelle élargie à une famille « moderne» et la tendance grandissante à la mobilité de ses membres; - Les principes d’autorité qui caractérisaient les relations entre parents et enfants, entre hommes et femmes et entre aînés et cadets sont de plus en plus en voie de disparition et laissent la place à de nouveaux modèles de liens. - La transformation de la famille, d’une unité de production à une unité de consommation - Le morcellement du patrimoine familial. - La complexité des réseaux de relations et liens. 10 III) La sociologie de la santé 1) La santé : une esquisse de définition « La santé » d’une définition négative à une définition positive Les essais de la définition de la santé ont toujours existé (médecine grecque, médecine arabe,...) et ont évolué au fur et à mesure du progrès médical. À titre d'exemple, dans la Rome antique, Cicéron disait que « la santé procure l'absence de douleurs et la possibilité d'accomplir les fonctions du corps ». Au début du XX siècle, Claude Bernard, maître de la médecine expérimentale disait que « c'est par l'activité normale des éléments organiques que la vie se manifeste à l'état de santé ». Dans le même sens, Leriche précisait en 1936 que « la santé, c'est la vie dans le silence des organes ». ainsi, la santé faisait allusion à l’hôpital et la fonction de soin dans le domaine de la santé est la seule guérison de la maladie. Dans son fameux livre « le normal et le pathologique », en 1943, Georges Canguilhem (1904-1995) propose une conception différenciée des définitions de la santé et de la maladie. « Le monde pathologique s’impose comme une moins grande adaptation à la vie : “Le propre de la maladie, c’est d’être une réduction de la marge de tolérance des infidélités du milieu”, et s’oppose à “la santé, c’est une marge de tolérance des infidélités du milieu”. Et il atteste ainsi qu’ « Il existe une “faculté d’improvisation”, une adaptabilité de la vie, qui n’existe pas dans la machine. » Du fait qu’« Il y a en nous, à chaque instant beaucoup plus de possibilités que n’en dit la physiologie » L’OMS (1946) considère la santé comme « un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en l'absence de maladie ou d'infirmité » Cette définition donne de la santé une conception positive, « démédicalisée », car elle insiste sur l'aspect multidimensionnel et exigeant de la santé : le bien-être est voulu « complet ». Selon cette vision l’Homme est conçu comme un être à la fois bio-psycho-social. L'état 11 de santé serait dans cette approche caractérisée par la satisfaction d'un certain nombre de besoins (c'est-à-dire de nécessités). Ainsi Virginia Henderson, citée par Pellissier (2006), distingue 14 besoins fondamentaux de la personne humaine (notion très utilisée dans les soins infirmiers) : 1.Respirer normalement. 2. Manger et boire tel que requis. 3. Éliminer par toutes les voies d'élimination. 4. Se mouvoir et maintenir une bonne posture. 5. Dormir et se reposer. 6. Choisir des vêtements convenables, s'habiller et se déshabiller. 7. Maintenir sa température dans les conditions normales au moyen de vêtements appropriés ou en modifiant l'air ambiant. 8. Veiller à la propreté du corps et à une bonne apparence ainsi qu'à protéger son épiderme. 9. Éviter les risques d'accidents pour soi et les autres. 10. Communiquer avec d'autres personnes pour exprimer ses émotions, besoins, craintes etc... 11. Pratiquer le culte de sa religion. 12. S'occuper à quelque chose qui donne le sentiment d'être utile. 13. Jouer à quelque chose ou participer à diverses formes de récréation. 14- Apprendre, découvrir ou satisfaire une saine curiosité qui mène à un développement « normal » de la santé. Selon (A. Maslow) (1954), la hiérarchisation des besoins est comme suit : les besoins physiologiques (la faim, la soif, la chaleur), puis les besoins de sécurité et de protection (le désir d'un toit ou d'une bonne protection par exemple sociale ou assurance), ensuite les besoins d'appartenance, c'est -à-dire les besoins sociaux d'appartenance à une famille, un groupe, une tribu, ensuite encore les besoins d'estime de soi (reconnaissance), et enfin au sommet de la hiérarchie, les besoins de réalisation de soi (créativité) qui impliquent le désir de se réaliser soi-même au travers d'un engagement moral ou encore matériel (à travers une œuvre d'art par exemple). 2) Les déterminants sociaux de la santé Selon l’OMS (2008), Les déterminants sociaux de la santé sont « les circonstances dans lesquelles les individus naissent, grandissent, vivent, travaillent et vieillissent ainsi que les systèmes mis en place pour faire face à la maladie ». Ces déterminants sociaux 12 comprennent les conditions de la petite enfance et l’accès à l’éducation, la nature de l’emploi et les conditions de travail, l’accès à des aliments sains et un revenu suffisant, l’inclusion sociale, l’accès au logement et la qualité du milieu créé et du milieu naturel où vivent les personnes. Ils touchent également la capacité d’accéder aux soins de santé et de les utiliser, ce qui a des conséquences sur la promotion de la santé et du bien- être, la prévention de la maladie, ainsi que le rétablissement et la survie à la suite d’une maladie. L’équité en santé serait possible lorsque « toute personne a l’occasion d’atteindre sa pleine capacité en matière de santé et que personne n’est défavorisée en raison de son statut social ou d’autres circonstances sociales déterminées. 3) La maladie et la médecine au prisme de la sociologie La maladie est un concept qui supporte diverses significations. Mervyn Wilfred Susser (1973) en distingue trois usages : La maladie ressentie « Ilness » : à savoir la perception subjective d’un malaise ; 13 La maladie en tant que phénomène social « Sickness » : les conceptions culturelles et sociales liées aux affections de santé ; La maladie diagnostiqué « Disease » : les processus pathologiques qui peuvent ou non produire des symptômes et qui sous-tendent la maladie telle est perçu par le patient. Pour Claudine Herzlich (1984), « La maladie est d’abord un fait social : sa nature et sa distribution sont différentes selon les époques, les sociétés et les conditions sociales. », c’est dans ce sens que pour Anne Bargès (2004), « la maladie serait même un “ fait social total ” car elle mobilise différentes dimensions de la société: familial, économique, politique, éducative, professionnelle, religieuse, symbolique… Il existe aussi une évolution des rapports usagers- soignants, plus négociés. » Talcott Parsons (1902-1979) considère la maladie en tant que déviance sociale. Ainsi, Le rôle du malade se définit selon les critères suivants : Le malade est exempt des responsabilités normales (selon la gravité de son cas); Il ne peut pas s'en tirer seul par un acte de décision, de ce fait il n'est pas tenu pour responsable de son incapacité; La maladie est indésirable et le malade doit souhaiter aller mieux, c'est une légitimation conditionnelle du rôle du malade; Le malade doit rechercher une aide compétente et coopérer avec ceux qui ont la charge de soigner. La sortie de l'état de déviance sociale résulte uniquement du recours à la médecine. Dans ce sens Parsons qualifie le médecin de « contrôleur social ». Claudine Herzlich (1969) étudie l’interaction entre le malade et sa maladie et distingue trois conceptions: 1- La maladie destructrice : le sujet qui se reconnaît malade ressent l'inactivité, l’incapacité et l’inutilité ; 14 2- La maladie libératrice : le sujet la ressent cette fois comme un allégement des charges sociales qui pèsent sur lui ; 3- La maladie métier : la fonction reconnue au malade est de lutter contre la maladie. Elle possède certains caractères d'un métier ; elle se prépare et s'apprend. Everett Hughes (1897-1983) s’intéresse au travail du médecin comme interaction sociale. Il précise que « le médecin jouit d’un prestige grandissant ancré dans l’histoire et ce n’est pas tant sui generis qu’en vertu de sa place dans la structure spécifique de la division médicale du travail. » Les deux caractéristiques aujourd’hui sont : La très grande confiance du public dans la compétence technique et l’intégrité morale du système médical ; L’intégration presque complète de toutes les fonctions médicales dans un vaste système, étroitement lié et strictement contrôlé par les médecins. Selon le même auteur, la division du travail dans un établissement de santé va bien au-delà de simple phénomène technique, elle contient d’infini nuances psychosociologiques. Dans la mesure où toutes les taches relevant d’une profession donnée, ne sont pas également agréables à remplir (Dirty work (le sale boulot)), et toutes n’ont pas le même prestige. 3) La sociologie de la santé Elle étudie des phénomènes allant des aspirations à la santé sans relation nécessaire avec des états morbides, jusqu’à la perception des risques, en passant par l’organisation des systèmes de santé. Dans cette perspective, le sociologue établit notamment des liens avec les sciences politiques, l’économie ou la santé publique. Elle s’intéresse à la médecine, aux soins, aux pratiques de soins mais aussi aux malades, aux professionnels de la santé, aux systèmes et entreprises de production de soins, etc. Dans tous les cas, il s’agit d’analyser et d’interpréter les caractéristiques et les problématiques propres à la relation individu/société ou groupe/société dans le 15 contexte particulier de la santé. La sociologie de la médecine étudie les pratiques soignantes et professionnelles, ainsi que le rapport des patients à la maladie. Elle rejoint des questionnements anthropologiques, ethnologiques ou psychologiques.(Adam, Herzlich, 1994 ; Ménoret, Carricaburu, 2004) La sociologie de la santé s’intéresse à diverses dimensions en rapport avec la santé telle que la dimension professionnelle, la dimension « patients », la dimension organisationnelle, la dimension institutionnelle, la dimension inégalités sociales de santé et la dimension innovation Conclusion La sociologie est une discipline qui approfondit de plus en plus son implication dans les domaines de la santé et de la maladie à raison des changements constants des dynamiques du pouvoir au sein et autour du système de santé. Le présent document synthétique consiste en un bref aperçu de certains apports de la sociologie traités plus amplement en classe et il est conçu à des fins purement pédagogiques. Bibliographie Adam, P., & Herzlich, C. (1994). Sociologie de la maladie et de la médecine, éditions Nathan. Bargès, A. P. Bagros, Le Faou, Lemoine.. [et al.]. (2004). Anthropologie-sociologie. ABCDaire des sciences humaines en médecine, Ellipses. Canguilhem, G. (1966). Le normal et le pathologique. Carricaburu, D et Ménoret, M (2004), Sociologie de la santé. Institutions, professions et maladies. Paris, Armand Colin, Durkheim, É. (1894). Les règles de la méthode sociologique. Revue Philosophique de la France et de l'Étranger, 37, 465-498. 16 Durkheim, É. (1922). De la division du travail social. F. Alcan. El Harras, M. (2006). Les mutations de la famille au Maroc. 50 ans de développement humain au Maroc. Giddens, A. (2006). Sociology. Cambridge Herzlich, C. (1984). La problématique de la représentation sociale et son utilité dans le champ de la maladie (Commentaire). Sciences sociales et Santé, 2(2), 71-84. Janne, H. (1951). Introduction à la sociologie générale. Revue de l'Institut de Sociologie, n°3 Lévi-Strauss C, (1986). Histoire de la famille. I Mondes lointains, mondes anciens, Paris, Lévi-Strauss, C, (1994). Histoire de la famille. 1. Mondes lointains, Paris, Librairie générale Martin, C. (2004). Les fonctions de la famille. Les Cahiers français: documents d'actualité, 322, pp-29. Marx, K., & Engels, F. (1897). Manifeste du parti communiste. V. Giard & E. Brière. Max, W. (1971). Économie et société. Paris, Plon, 470-471. mondiale de la Santé, O. (1946). La définition de la santé de l’OMS. In Préambule à la Constitution de l’Organisation mondiale de la Santé, tel qu’adopté par la Conférence internationale sur la Santé (Vol. 2). Nizet, J. (2007). La sociologie de Anthony Giddens. La Découverte. Organisation mondiale de la Santé. (2008). Combler le fossé en une génération : Instaurer l’équité en santé en agissant sur les déterminants sociaux. Pellissier, J. (2006). Reflexions on the philosophies of care. Gérontologie et société, 29118(3), 37-54. Weber, M. (2003). Le savant et le politique: une nouvelle traduction. Éd. la Découverte/Poche. Yardley, W. (2014). Mervyn Susser, 92, Dies; Studied Illness and Society. New York Times, B16. 17

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