Philosophie Q2 - 2023 - PDF
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UCLouvain
Tess Van der Eecken
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This document contains notes on philosophy, specifically focused on questions and the nature of knowledge. It explores different philosophical viewpoints and discusses the importance of questioning and critical thinking in philosophy, presenting some fundamental questions.
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Tess Van der Eecken Chapitre 4 : Peut-on trouver la vérité ? Plan. Introduction - Qu’est-ce qu’une bonne question? Le problème du Doute Dans la vie, on part avec l’idée qu’il y a des choses vraies. L’idée d’une vérité objective qui ne serait pas propre à chacun est compliquée. Il y a u...
Tess Van der Eecken Chapitre 4 : Peut-on trouver la vérité ? Plan. Introduction - Qu’est-ce qu’une bonne question? Le problème du Doute Dans la vie, on part avec l’idée qu’il y a des choses vraies. L’idée d’une vérité objective qui ne serait pas propre à chacun est compliquée. Il y a une grande valeur accordée à ce qui nous est présenté comme étant vrai. La philosophie c’est d’abord et avant tout une méthode de questionnement, et une réflexion sur cette méthode Remember... dans L’apologie de Socrate, Platon compare Socrate à un... taon. La philosophie c’est “aiguillonner” la société, questionner les évidences Socrate était accusé de 2 choses et on lui reprochait de poser des questions, de remettre en cause ce qui devait être admis. Platon légitimée ces questions, la prétique de la philo en disant que la philo est justement de questionner ces évidences. « Si, en effet, vous me condamnez à mort par votre vote, vous ne trouverez pas facilement un autre homme comme moi, un homme somme toute – et je le dis au risque de paraître 101 Tess Van der Eecken ridicule – attaché à la cité par le dieu, comme le serait un taon au flanc d’un cheval de grande taille et de bonne race, mais qui se montrerait un peu mou en raison même de sa taille et qui aurait besoin d’être réveillé par l’insecte. » (30e-31a) = la resprésentation de Platini est que Platon est un than qui aiguille la société pour la réveiller, poser des Q pour se réveiller. De ce point de vue, poser des Q est philosophes MAIS il ne faut pas poser des questions n’importe comment. Qsq une bonne Q ? On doit choisir ce qu’on remet en Q, c’est un choix nécessaire car il est matériellement impossible de poser toutes les Q possibles (question pratique) et surtout, il n’est pas évidemment légitime de tout remettre en cause n’importe comment du point de vue de notre action. = Mais pour philosopher, il ne faut pas poser n’importe quelle question, n’importe comment... Toute réflexion philosophique suppose un point de vue ou une réflexion sur ce qu’est une bonne question, qui mérite d’être posée. On doit choisir les questions qu’on pose.. Ce choix est nécessaire. De fait: il est matériellement impossible de choisir toute les questions possibles il ne paraît pas évidemment légitime, du point de vue pratique, c’est-à-dire du point de vue de notre action, de tout remettre en cause n’importe comment. Contre une forme de “scepticisme généralisé”, qui consisterait à soutenir a priori que rien n’est jamais certain, on peut soutenir que questionner n’est pas qu’un geste théorique, c’est aussi une attitude pratique, qui engage mon comportement. Or, d’un point de vue pratique, il semble nécessaire d’accepter des choses pour vivre... ex ; “Tu doutes de la gravité? Eh bien, saute par la fenêtre !” On se prémunit du fait de tout remettre en cause. Dans les faits on ne doute pas de tout ! Questionner cela a un prix qu’il faut prendre au sérieux, mesurer al gravité qu’il y a à interroger (Socrate a payé le prix de sa vie) donc ne pas le faire sans réfléchir. Mettons de l’ordre avec quelques définitions (tirées du Trésor de la Langue française et du Grand dictionnaire de la philosophie) Une question est une “interrogation plus ou moins explicite”, que l’on pose à autrui ou à soi-même. Le doute s’oppose à la certitude. Le doute vient du latin “dubius”, “hésitant, indécis, incertain”, lui-même hérité de “duo”, “deux. On doute donc à chaque fois qu’on n’est pas certain, ce qui peut prendre différentes formes, et peut être suscité par différentes raison. Selon le Grand dictionnaire de la philosophie, le doute est “l’état naturel de l'esprit qui s'interroge, caractérisé à des degrés différents, soit par l'incertitude concernant l'existence ou la réalisation d'un fait, soit par l'hésitation sur la conduite à tenir, soit par la suspension du jugement entre deux propositions contradictoires. L’incertitude n’est qu’une des formes du doute ! Ce ne sont pas des synonymes. Quelles sont les bonnes questions? Les questions qui doivent être posées? Ce questionnement lui-même semble universel, et ne pas avoir de réponse évident 102 Tess Van der Eecken On pourrait imaginer que le bon critère serait celui du bonheur (lorsqu’une situation ou un comportement nous rend malheureux, il paraît légitime de s’interroger à son sujet), mais ce critère n’est pas évident... Cf. la figure mythique des bergers d’Arcadie, dans les Eglogues de Virgile, commentés par Kant dans l’Idée d’une histoire universelle d’un point de vue cosmopolitique « Sans ces propriétés, certes en elles-mêmes fort peu engageantes, de l’insociabilité, d’où naît l’opposition que chacun doit nécessairement rencontrer à ses prétentions égoïstes, tous les talents resteraient cachés en germe pour l’éternité, dans une vie de bergers d’Arcadie (1), dans une concorde, un contentement et un amour mutuel parfaits; les hommes, doux comme les agneaux qu’ils paissent, ne donneraient à leur existence une valeur guère plus grande que celle de leur bétail, ils ne rempliraient pas le vide de la création quant à sa finalité, comme nature raisonnable. » ➔ Il nous dit qu’on pourrait imaginer des hommes qui vivent en harmonie parfaite, qui seraient doux comme des moutons et vivraient heureux MAIS Kant nous dit que dans ces cas ils n’auraient pas une + grande valeur que leur bétail car il manquera l’usage de la raison à cause de l’insociabilité. Donc ils utilisent pas la raison. = existance qui n’aurait pas de grande valeur. Qu’est-ce que vivre une vie d’homme? Quelle place le doute doit-elle prendre? -> on y répond pas mais cela dépend de la vision de l’homme qu’on a. La question du doute est théorique, mais aussi pratique, et existentielle Et elle possède aussi une grande importance en droit. Cela apparaît clairement dans “12 hommes en colère”, où le héros, l’architecte joué par Henri Fonda, insiste que soient écartés tous les motifs de doute légitime, sa particularité première en tant que juré est qu’il voit et cherche des raisons de douter, là où les autres jurés se contentent a priori de leur impression première. Le doute est ici une garantie contre l’injustice. Et pour autant, est-il jamais possible d’écarter absolument tous les doutes? Une décision de justice, par définition, n’est pas mécanique, et ne peut écarter tous les doutes imaginables. L’enquête doit contribuer à la manifestation de la vérité, l’idéal du procès est que le verdict soit juste, qu’il corresponde à ce qui s’est effectivement passé mais... peut-on jamais être certain d’avoir atteint ces buts ? En droit comme dans les autres aspects de la vie, il faut adopter un positionnement juste par rapport au problème et à la possibilité du doute. I. Peut-on douter de tout ? 103 Tess Van der Eecken Le scepticisme antique et le problème du doute. Le scepticisme antique n’est pas une position vague, un peu désabusée, mais une vraie méthode de pensée, où la pensée et la vie sont façonnées, modifiées construites par le doute. On considère que le scepticisme antique a été créé par Pyrrhon (d’Elis), qui était contemporain d’Aristote et d’Alexandre le grand (-360 -275), et dont un disciple important fut Timon (de Phlionte). Pyrrhon est le fondateur de ce qu’on appelle le pyrrhonisme. Ensuite, au IIIe siècle, stoïcisme et épicurisme dominent. Puis émerge une nouvelle version du scepticisme : la “nouvelle académie” d’Arcésilas et Carnéade. Sextus Empiricus (qui vécut entre 100 et 250 ap. J-C) nous raconte cette histoire, et nous met en garde contre la confusion entre ces écoles, de même que Diogène Laërce* Le doute selon le scepticisme ; 1. Douter n’est pas nier, mais refuser le dogme C’est le refus d’un type de position particulier ; le dogme. Présentation habituelle du scepticisme : « Attitude, disposition d'esprit d'une personne portée à l'incrédulité ou à la défiance envers les opinions et les valeurs reçues. Synonyme ; incrédulité, méfiance » = qui ne fait confiance à rien et à personne. Le sceptique est d’abord pensé comme un incrédule, un être méfiant... qui ne croit en rien. Problème : Si rien n’est certain, d’où cette assurance nous vient-elle ? comment peut- on être sûr que rien n’est certain si rien n’est certain ? Le scepticisme peut-il être autre chose qu’une attitude absurde et contradictoire ? Le Mariage forcé, Molière, Scène V - MARPHURIUS, SGANARELLE -> vidéo MARPHURIUS : Que voulez-vous de moi, Seigneur Sganarelle ? SGANARELLE : Seigneur Docteur, j'aurais besoin de votre conseil sur une petite affaire dont il s'agit, et je suis venu ici pour cela. Ah ! voilà qui va bien : il écoute le monde, celui-ci. MARPHURIUS : Seigneur Sganarelle, changez, s'il vous plaît, cette façon de parler. Notre philosophie ordonne de ne point énoncer de proposition décisive, de parler de tout avec incertitude, de suspendre toujours son jugement ; et, par cette raison, vous ne devez pas dire : "Je suis venu"; mais : "Il me semble que je suis venu." SGANARELLE : Il me semble !! MARPHURIUS : Oui. SGANARELLE : Parbleu ! Il faut bien qu'il me semble, puisque cela est. MARPHURIUS : Ce n'est pas une conséquence ; et il peut vous sembler, sans que la chose soit véritable. SGANARELLE : Comment ? il n'est pas vrai que je suis venu ? MARPHURIUS : Cela est incertain, et nous devons douter de tout. SGANARELLE : Quoi ? je ne suis pas ici, et vous ne me parlez pas ? MARPHURIUS : Il m'apparaît que vous êtes là, et il me semble que je vous parle ; mais il n'est pas assuré que cela soit. 104 Tess Van der Eecken SGANARELLE : Eh ! que diable ! vous vous moquez. Me voilà, et vous voilà bien nettement, et il n'y a point de me semble à tout cela. Laissons ces subtilités, je vous prie, et parlons de mon affaire. Je viens vous dire que j'ai envie de me marier. MARPHURIUS : Je n'en sais rien. SGANARELLE : Je vous le dis. MARPHURIUS : Il se peut faire. SGANARELLE : La fille que je veux prendre est fort jeune et fort belle. MARPHURIUS : Il n'est pas impossible. SGANARELLE : Ferai-je bien ou mal de l'épouser ? MARPHURIUS : L'un ou l'autre. SGANARELLE : Ah! ah! voici une autre musique. Je vous demande si je ferai bien d'épouser la fille dont je vous parle. MARPHURIUS: Selon la rencontre. SGANARELLE: Ferai-je mal? MARPHURIUS: Par aventure. SGANARELLE: De grâce, répondez-moi comme il faut. MARPHURIUS: C'est mon dessein. SGANARELLE: J'ai une grande inclination pour la fille. MARPHURIUS: Cela peut être. SGANARELLE: Le père me l'a accordée. MARPHURIUS: Il se pourrait. SGANARELLE: Mais, en l'épousant, je crains d'être cocu. MARPHURIUS: La chose est faisable. SGANARELLE: Qu'en pensez-vous? MARPHURIUS: Il n'y a pas d'impossibilité. SGANARELLE: Mais que feriez-vous, si vous étiez en ma place? MARPHURIUS: Je ne sais. SGANARELLE: Que me conseillez-vous de faire? MARPHURIUS: Ce qui vous plaira. SGANARELLE: J'enrage. MARPHURIUS: Je m'en lave les mains. SGANARELLE: Au diable soit le vieux rêveur! MARPHURIUS: Il en sera ce qui pourra. SGANARELLE: La peste du bourreau! (Il prend un bâton.) Je te ferai changer de note, chien de philosophe enragé. MARPHURIUS: Ah! ah! ah! SGANARELLE: Te voilà payé de ton galimatias, et me voilà content. MARPHURIUS: Comment? Quelle insolence! M'outrager de la sorte! Avoir eu l'audace de battre un philosophe comme moi! SGANARELLE: Corrigez, s'il vous plaît, cette manière de parler. Il faut douter de toutes choses, et vous ne devez pas dire que je vous ai battu, mais qu'il vous semble que je vous ai battu. MARPHURIUS: Ah! je m'en vais faire ma plainte au commissaire du quartier, des coups que j'ai reçus. SGANARELLE: Je m'en lave les mains. MARPHURIUS: J'en ai les marques sur ma personne. SGANARELLE: Il se peut faire. MARPHURIUS: C'est toi qui m'as traité ainsi. SGANARELLE: Il n'y a pas d'impossibilité. MARPHURIUS: J'aurai un décret contre toi. SGANARELLE: Je n'en sais rien. MARPHURIUS: Et tu seras condamné en justice. SGANARELLE: Il en sera ce qui pourra. MARPHURIUS: Laisse-moi faire. SGANARELLE: Comment? On ne saurait tirer une parole positive de ce chien d'homme-là, et l'on est aussi savant à la fin qu'au commencement. Que dois-je faire dans l'incertitude des suites de mon mariage ? Jamais homme ne fut plus embarrassé que je suis. Ah ! voici des égyptiennes ; il faut que je me fasse dire par elles ma bonne aventure. 105 Tess Van der Eecken ➔ Scepticisme extrème qui rend la discussion impossible – paralysie de l’action qui se retourne cintre le philosophe = critique d’une forme de la philosophie Douter de tout tout le temps est parfaitement ridicule... Alors, que font vraiment les philosophes sceptiques ? Le scepticisme de Pyrrhon refuse d’affirmer qu’il y a une vérité absolue MAIS il refuse aussi d’affirmer, comme le faisaient les sophistes, qu’il n’y en a pas. Il soutient que l’on ne peut pas décider. Il faut s’abstenir de dire quoi que ce soit : c’est l’épochè = la suspension du jugement (mais attention, pas la suspension de toute idée), le refus de tout dogme. Un dogme, c’est une « Proposition théorique établie comme vérité indiscutable par l'autorité qui régit une certaine communauté. » = refuser de reconnaître une autorité qui va dire ce qui ets le cas et ce qui n’est pas le cas. Il s’agit, non pas de n’émettre aucun jugement, mais de refuser de s’attacher à aucune opinion, de conserver l’idée qu’aucune opinion n’est jamais définitive... Le scepticisme s’oppose à la pensée verouillée par les autorités, il affirme la nécessité de libérer les opinions, conserver un esprit critique. Problème cela ne conduit-il pas à vivre dans la plus complète incertitude ? On reproche constamment aux sceptiques l’idée que leur scepticisme est impossible à vivre dans les faits, qu’il mène à l’inactivité (cf. reproche de Hume – sceptique modéré- au pyrrhonisme (le scepticisme extrème – il reproche que si on prend jamais rien pour acquis on va être léthargique et va mourrir) dans l’”Enquête sur l’entendement humain”) !! Pourtant, initialement, le scepticisme n’est pas censé conduire à l’inactivité, mais à l’indifférence : refusant tout dogme, toute position figée, le sceptique doit avoir l’esprit tranquille, sans trouble. Le sceptique vit dans l’ataraxie (l’absence de trouble) et la métriopathie (l’équilibre des passions). La quiétude suit la suspension du jugement “comme son ombre” Correspond au texte ; Les sceptiques grecs. Textes traduits et choisis par Jean-Paul Dumont, Paris, PUF, 1992. Extraits de Sextus Empiricus, Hypotyposes pyrrhoniennes, I, 25-30 106 Tess Van der Eecken Donc quand on croit qu’une chose est belle ou laide, on est inquiet pcq si il nous manque ce su’on croit être un bien, on sera à la poursuite de ce bien et va se donner du mal et être dans des tourments. Et si on l’a, on est dans l’inquiétude de le perdre, on va tout faire pour le garder Ex ; l’argent, la santé Tout cela est source de soucis Mais si on ne pense pas que qqch est bon ou mauvais on a aucune raison d’essayer de le garder, de l’avoir, on n'a rien à craindre, pas de soucis. Image ; un peindre veut représenter la transpiration du cheval mais n’y arrive pas donc il abandonne et c’est à ce moment qu’il y arrive. Le sceptique, comme les autres, veut être tranquille et heureux mais il ne sait pas comment l’être donc il renonce, ne pense plus rien. En réalité, Sextus dit que c’est au moment ou on renonce à savoir qu’on va trouver la tranquilité. Il dit que le sceptique va aussi avoir des sensations désagréables mais il va souffrir que de ces sensations et ne pas pas souffrir en + le soucis, l’angoisses, les opinions qui vont nous troubler. 107 Tess Van der Eecken ➔ Donc, image du peindre montre que le scepticisme est un idéal de vie, pas une certitude. Il consiste littéralement à jeter l’éponge et c’est à ce moment qu’on est heureux. Mais jeter l’éponge, ce n’est pas décider de jeter l’éponge ! Le sceptique se rend compte qu’il n’est certain de rien DONC il jeté l’éponge. Le scepticisme est initialement une position par rapport au dogme qui correspond à un idéal de vie, à une éthique : ne pas être dogmatique pour être heureux. Le doute est censé être équilibrant, et non destructeur, suspensif et non ravageur. Mais le doute doit conduire en tout cas à une forme d’imperturbabilité, d’indifférence Mais alors, plus de précautions face aux précipices ? aux véhicules ? aux chiens dangereux ? aux tempêtes ? Si on suit la logique de Pyron on doit être comme un cochon qui mange tranquillement dans une tempête. En réalité, on peut penser que tout cela est >< à Pyron. Il était un homme apprécié et intégé dans la société donc on peut penser qu’il n’était pas du genre a laisse un ami s’enfoncer dans un marrais… mais cela mène à une question … Comment agir sans croire à quoi que ce soit ? Quelle est l’étendue du domaine de la suspension des jugements ? Absolument tous ? Seulements lesquels ? On peut opposer 2 scepticisme “rustique” (s’interdirait toute croyance, radical) / “urbain” (adapté à la vie en société, il s’accommode des croyances communes et s’en prend uniquement aux dogmes des philosophes et des savants – refuse les vérités philos) Important ; de fait, Le sceptique ne peut pas douter de tout, mais il se mefie de tout ce qui ressemble à un dogme, qui paralyse la pensée... Conséquence théorique: il ne peut pas y avoir d’école sceptique à proprement parler. Sextus Empiricus parle d’ailleurs de « sceptike agoghé », de conduite de vie sceptique Pyrrhon, n’est pas un théoricien (n’établit pas des vérités) (et ne peut pas l’être), mais a été pris comme modèle philosophique par des auteurs qui vécurent parfois des siècles après lui (Montaigne, Marcel Conche)* = le scepticisme est tradition plus que doctrine (ce serait contradictoire car ne peut pas être dogmatique) 108 Tess Van der Eecken Exercice : Faux c’est dans l’appologie de Socrate Faux car ca ne s’oppose pas à l’incertitude mais c’est distinct de l’incertitude Vrai Vrai Faux ce n’est pas une doctrine mais une attitude, une conduite de vie 2. Mais comment déterminer ce qu’est un dogme ? Comprendre le scepticisme suppose de définir ce qu’il nous encourage à suspendre, et donc ce qu’est un dogme. L’idée fondamentale du scepticisme procède d’un argument : l’isosthénie = l’égalité de force des arguments contraires on ne peut pas choisir entre des conceptions contraires Choisir, dans ce genre de cas, c’est dogmatique. Cf. “les tropes”, ces arguments destinés à montrer qu’il n’y a pas de critère qui permette de distinguer le vrai du faux « ce n’est pas plus ainsi qu’ainsi ou que ni l’un ni l’autre » Donc quand on a 2 possibilités ce n’est pas + ainsi qu’ainsi et ce n’est pas = vrai que les 2 sont faux non plus, on n ne peut pas choisir. Si on choisit, on a une attitude dogmatique qd on choisit une des conceptions contraires. Pas de critère qui permet de distinguer le vrai du faux. Ex : pour être heureux il faut être riche et qqun dit ce non Si c’est l’humain qui doit décider ce qui est vrai, il y a un tas d’arguments (des tropes) qui permettent de distinguer le vrai du faux. Qui va décider ? Comment ? Le sceptique va montrer des arguments pour montrer qu’on ne peut jamais être certain qu’on a choisi ce qui est vrai : toujours imaginer un argument inverse. 109 Tess Van der Eecken Conséquence ; on est face à un tas de désaccords insurmontables entre les gens, face à la Q de ce qui est vrai ou faux. Face au désaccord insurmontable, le sceptique suspend son jugement (pas prendre parti car ce serait dogmatique) sur la nature réelle des choses « Disons, pour parler d’une manière très générale, que la suspension est le résultat de la mise en opposition des choses. Nous opposons les représentations aux représentations, les conceptions intellectuelles aux conceptions ou encore les unes aux autres. Par exemple, […] c’est opposer les conceptions aux conceptions que d’objecter à qui veut démontrer l’existence d’une Providence à partir de l’ordre des choses célestes, que les honnêtes gens connaissent souvent des revers et les méchants des succès, ce qui nous prouve bien qu’il n’y a pas de Providence » 2 arguments qui s’opposent sur la providence divine (dieu) Pourtant, les sceptiques sont quand même frappés par certaines choses plutôt que d’autres... mais comment le dire sans dire des choses auxquelles on pourrait opposer des arguments contraires ? De l’isosthénie, les sceptiques ont tiré des conséquences différentes (ils n’opposaient pas des arguments contraires au même nombre de thèses...) Quelle est l’extension du doute sceptique ? Peut-on opposer à toute opinion une opinion d’égale valeur ? Le point central du désaccord concerne le rapport des sceptiques aux apparences sensibles. La position du Sextus Empiricus relève du phénoménisme (ou phénoménalisme) Un phénomène, c’est une « représentation relative aux sens et au sensible » Ex ; la douceur des poils d’un chat = représentation sensible = phénomène (je le perçoit par mes sens). Attention : le phénomène est matériel, pas subjectif, c’est la « rencontre de deux effluves lumineux, animés d’une translation très rapide qui en se rencontrant, donnent naissance – par un mouvement lent – au phénomène » = ce qu’on perçoit est toujours une sensation relative à nos sens La réalité en soi des choses demeure cachée (on a seulement accès aux choses dont la manière nous apparaît) - c’est une théorie héritée de Pythagore Voici l’univers des possibles pour un Grec du 4e siècle ° la réalité est phénoménale, et donc corporelle et empirique ■ Position des sophistes: Le plus habile doit exercer la fonction de critère sur ce qui est juste. la “techné” joue contre “l’episteme” 110 Tess Van der Eecken ■ Position de Sextus Empiricus (et Pyrrhon?): il n’y a pas de mesure prétendument universelle, et chacun est juge de ses propres phénomènes ° il existe en plus des objets absolus et intelligibles ■ Position de Platon: L’intelligence peut les saisir. ■ Positon de la “Nouvelle Académie”: l’intelligence ne peut pas les saisir (elle dit qu’il y a des objets absolus mais on ne peut pas les connaitres) Application à la douceur du miel : La sensation de douceur n’indique rien de sa nature réelle, parce qu’on n’y a accès OU Parce qu’il n’y a pas de nature réelle déterminée des choses, parce que les choses sont « indifférentes, indéterminées et indécises » ? Dans un cas, on ne parle pas de la nature réelle des choses et l’autre thèse consiste à dire que la nature réelle est indéterminée. On pense parfois que la 2 e thèse est celle de Pyrrhon. La conséquence de cette 2e Thèse serait qu’on ne peut employer que des thermes prudents, le mondes est indéterminé. Sextus s’oppose à tous ceux qui prétendent dire quoi que ce soit de la nature des choses ; il faut s’en tenir uniquement aux phénomènes (ce qui nous apparaît à nous). De ce point de vue, le scepticisme ne parle que de ce qu’il perçoit, on suspend notre jugement au sujet des choses cachées MAIS ce qu’on perçoit par nos sens on peut en parler. Sextus dit que la représentation sensible existe pour nous mais on remet en cause son interprétation. (15) – décrire sans ajouter un avis, sans interpréter = l’idéal du sceptique 111 Tess Van der Eecken Selon Sextus Empiricus, il faut s’en tenir strictement à ce qui apparaît, sans se prononcer en aucun sens sur les choses cachées: le scepticisme doit être empiriste, et non métaphysique (opposition en cela à Pyrrhon??) Nous ne pouvons parler que de la manière dont les choses nous affectent, et non de ce qu’elles sont. Le scepticisme ne concerne ici que “ce qui est obscur”, et non les phénomènes eux-mêmes, qui sont ce qu’ils sont Mais que peut-on dire des phénomènes? Que signifie “s’en tenir strictement à ce qui apparaît”? Exercices ; Vrai Faux Vrai Faux Faux – phénoménaliste (on peut parler que des phénomènes qui sont des illusions, des choses qui nous apparaissent) 3. Peut-on refuser le dogme & agir ? Un doute qui ne correspondrait à aucun changement pratique correspondrait à un pur jeu intellectuel mais certaines conséquences pratiques du doute ne semblent pas raisonnables : ne rien dire du tout, par peur de ne parler de rien de réel, ne plus rien décider, par peur de ne pas prendre de bonne décision... L’attitude pyrrhonienne, telle qu’on la présente habituellement, est fondée sur une radicale indifférence à l’égard de toutes les solutions qui se présentent, dont aucune n’est 112 Tess Van der Eecken plus fondée que les autres. C’est censé libérer la manière d’agir (libérer la spontanéité de chacun, ce qu’on fait sans réfléchir) propre à chacun, sans le frein de la réflexion, des normes ou des discours généraux. Cela semble aboutir à un relativisme général. Sextus Empirique pense qu’il faut se méfier des dogmes, des idées arrêtées sur le bien et le mal, mais qu’il y a quand même des guides, grâce à l’expérience des sens. Chacun est “capable de choisir et d’éviter”, et pour cela, il faut “prendre la vie pour guide” ; suivre les indications et les suggestions des sens suivre les impulsions nécessaires de nos “dispositions passives” (la fiam & la soif) suivre les lois et coutumes de notre pays par habitude ; préférer la piété à l’impiété par exemple dans une société. acquérir le savoir purement pratique qui permet d’exercer un art Dans tous les cas, sont en cause non des croyances, mais un savoir pratique, une habileté acquise au fil du temps (le savoir pratique qui a fait ses preuves pragmatiquement ; on a appris à faire du vélo et ca marche dont on le fait sans réfléchir). On renonce donc à atteindre la vérité (rationnelle) et à porter des jugements par la raison, mais on s’en tient à nos instincts naturels = donc on a une suspension du jugement intellectuel et le calme, la tranquilité conquise de cette manière est intellectuelle (la seule tranquilité à notre portée d’après lui) ! Ex ; un sage a droit mais ne va pas se fatiguer à raler et vouloir être ailleurs ➔ Problème ; Conservatisme (acceptation de ce qui est car on ne délibère plus, on se prive d’une source de changement) ? et manque d’autonomie, in fine? quid de la capacité qu’a chacun de proposer une description originale du monde = il y a des apparences (le miel parait doux), on a des sensations et on doit prendre ça comme critère de nos décisions Il ne faut pas avoir de dogme mais un a un guide qui est la vie = prendre la vie pour guide (les sensations) !! Cela suppose qu’il y a des infos dans nos sens II. Peut-on surmonter le doute ? Le triomphe de la raison avec René Descartes Descartes n’est pas sceptique, il a un usage + constructif. Il a le but de trouver la vérité. 1. L’origine de la démarche cartésienne : la critique de la scolastique Descartes (31 mars 1596 - 10 février 1650) né en France Base de son éducation au collège de la Flèche: scolastique (viens de scola-école) = philosophie pratiquée dans les universités depuis le Moyen Âge, qui vise à concilier la philosophie d’Aristote et la théologie chrétienne, en mettant en oeuvre un ensemble 113 Tess Van der Eecken de procédés méthodiques de discussion et d’exposition. Descartes la critique pour son obscurité et sa stérilité. Il découvre les maths, le droit… Renonce à une carrière juridique, voyage, vit... Importance de la rencontre d’Isaac Beeckmann (scientifique), et du modèle de la physique mathématique de Galilée et Newton Principales oeuvres philosophiques : Règles pour la direction de l’esprit en la recherche de la vérité, Discours de la méthode, Méditations métaphysiques, Principes de la philosophie, Passions de l’âme... et sa correspondance ! La pensée de Descartes s’est construite à partir de et contre sa formation intellectuelle : constat d’un défaut d’efficacité et de pertinence scientifique de la physique scolastique “Le grand livre de la nature se lit en termes mathématiques” ➔ Volonté de faire de la science à partir d’un autre modèle, celui de la physique mathématique (application des maths à l’explication de la nature, et donc à partir de rapports entre quantités) Pour cela, nécessité de refonder la science à partir de principes incontestables et de se purger (se nettoyer l’esprit) pour cela de toutes les fausses idées anciennes, qui résistent. Descartes dit justement qu’il avait le + grand mal à se détacher de sa formation. C’est à ce que doivent servir les méditations méta-physiques. Les Méditations métaphysiques = méditations à accomplir, pas seulement démonstration à comprendre, dans un but précis : purger l’esprit des fausses idées, notamment touchant le rapport corps-âme = Pour la Scolastique le corps & l’âme sont liés mais Descartes veut distinguer cela !! = table raze pour reconstruire de manière certaine ce qu’on doit penser. NB: Descartes va tirer le doute à la limite, pratiquer un doute dit “hyperbolique”, et sur cette base, il va reconstruire pas à pas de nombreuses certitudes, à partir d’une certitude initiale = on doute de tout comme ca ce qu’il reste à la fin est vraiment vrai. !!!!!Et comme on le verra: s’il le fait, c’est qu’en réalité, quoi qu’il en dise, il ne maintient pas dans la durée son doute radical du début, et notamment il fait fond sur une certaine foi dans la fiabilité de la raison... (car il prétend démontrer rationnellement que notre raison est fiable, mais en réalité, sa démonstration présuppose ce qu’elle doit démontrer = circularité) Mais de fait, est-il possible de vivre et de penser sans se fier en quelque manière à notre pensée?... cf. conclusion de cette partie 2. Le doute radical de Descartes, un doute destiné à être surmonté 114 Tess Van der Eecken Il doute de tout ce dont il est possible de dçoute ; de son existence, des objects sensibles = toutes les conclusions que l’on tire habituellement de ce qui nous apparaît Ex : il doute carrément que le miel nous apparaît Dans les Méditations métaphysiques, Descartes doute de tout (des objets sensibles, de lui-même, du monde entier, de tout ce qu’il prend pour acquis, et de tout ce dont il n’est pas radicalement impossible de douter...) Mais le but n’est pas de montrer qu’on peut douter de tout! Le but est au contraire de surmonter le scepticisme, et de trouver quelque chose dont on ne puisse pas douter et sur lequel on puisse s’appuyer pour refonder les sciences. = c’est un doute instrumentalisé (le but est la certitude) C’est la raison pour laquelle Descartes commence par déployer toutes les raisons qui rendent possible le doute (le but étant donc de leur faire un sort définitif) Pourquoi douter de tout ? Arguments ; 1er argument : la tromperie des sens « j'ai quelque fois éprouvé que ces sens étaient trompeurs » ex : les illusions d’optiques = les sens nous trompent. Ex ; qd on voit une tour carrée de loin, elle paraît ronde. Ex : baton dans l’eau qui paraît tordu. 2e argument : l’expérience du rêve. On fait l’expérience de sensations qui semblent réelles et ne correspondent pourtant à rien de réel. En + on ne peut même pas être certain qu’on est dans un monde réel, peut-être qu’on vit dans une immense illusion ??? 3e argument : l’argument décisif du Dieu trompeur, ou “Malin génie” Il est impossible de tirer du rêve ne serait-ce que la certitude qu’il existe des éléments simples (« la nature corporelle en général, et son étendue ; ensemble la figure des choses étendues, leur quantité ou grandeur, et leur nombre ; comme aussi le lieu où elles sont, le temps qui mesure leur durée, et autres semblables ») car aucun de mes sentiments n’a de validité a priori « qui me peut avoir assuré que ce Dieu n'ait point fait qu'il n'y ait aucune terre, aucun ciel, aucun corps, aucune étendue, aucune figure, aucune grandeur, aucun lieu, et que néanmoins j'ai les sentiments de toutes ces choses » in. Texte des méditations. = peut être que tous nos raisonnements sont les produits de l’action de Dieu sur nous. = je me trompe sans m’en rendre compte pcq un malin génie m’a donné l’impression de justesse. Un Malin génie nous manipule = je peux douter de tout ce qui me parait évident, on ne peut plus se fier à rien ! Pour cette raison, Descartes suspend alors méthodiquement son jugement à l'égard de tout ce qu'il croyait juger correctement antérieurement, et même de tout ce dont il n'est 115 Tess Van der Eecken pas absolument impossible de douter (et ce, rappelez-vous, afin de fonder la connaissance sur une base absolument indubitable) ➔ Doute “hyperbolique” de Descartes” « je supposerai donc que […] le ciel, l'air, la terre, les couleurs, les figures, les sons et toutes les choses extérieures que nous voyons, ne sont que des illusions et des tromperies » « je me considérerai moi-même comme n'ayant point de mains, point d'yeux, point de chair, point de sang, comme n'ayant aucun sens » = il considère tout ce qui l’entoure comme étant peut être une illusion, même lui. Il n’en sait rien. Exercice ; Faux, il voulait les remettre en cause Vrai = l’illusion des sens Faux, c’est l’argument du rêve Faux, à ce stade de son argumentation, Descartes ne s’interdit rien Vrai, un doute qui a une vraie méthode pour montrer qqch 3. Le cogito comme fondement de la certitude Donc, dans la 1e méditation, il doute et dans la seconde, il trouve une raison de l’interrompre, le cogito. Dans la seconde Méditation, Descartes dit qu’il va prolonger la démarche de doute méthodique entreprise dans la première Méditation jusqu'à ce qu'il trouve une bonne raison de l'interrompre, c’est-à-dire quelque chose dont il serait impossible de douter. « Je m'efforcerai néanmoins, et suivrai derechef la même voie où j'étais entré hier, en m'éloignant de tout ce en quoi je pourrai imaginer le moindre doute, tout de même que si je connaissais que cela fût absolument faux ; et je continuerai toujours dans ce chemin jusqu'à ce que j'ai rencontré quelque chose de certain, ou du moins, si je ne puis autre chose, jusqu'à ce que j'aie appris certainement qu'il n'y a rien au monde de certain. » = des qu’il a un petit doute, il considère que c’est faux comme cela il ne restera que ce qui est vrai. 116 Tess Van der Eecken = il rencontre une évidence (c’est ce qui résiste au doute) La rencontre de l’évidence L’évidence, par définition, résiste au doute. Percevoir une idée comme évidente, c'est ne trouver aucune raison d'en douter, et être irrésistiblement incité à y adhérer. Objection : n'y a-t-il pas mille exemples de cas où une chose nous semble évidente alors qu'il nous apparaît ensuite qu'elle est fausse ? Comment peut-on se fier à la sensation d'évidence des hommes en termes de vérité ? Nous le pouvons, répond Descartes, tout simplement parce que nous le devons. Aucun critère de vérité ne peut être utilisé sans que l'on se fie, à un moment ou à un autre, à la certitude selon laquelle ce critère est rempli ou non. Sans foi dans l'évidence, nulle fondation possible de la science Mais alors, peut-être n'y a-t-il nulle science possible ? L'homme pourrait être fortement persuadé de la véracité de ses jugements mais serait incapable d'accéder à une réelle science... Cela est pour Descartes exclu, car, comme il le démontre dans la Troisième Méditation, Dieu existe, il est parfait, et donc il n'est pas trompeur ! Il serait contraire à la bonne nature divine que nos jugements soient faux alors même que nous usons de ce que Dieu nous a donnés de la manière dont on doit en user.* * Reste alors bien sûr à établir quelle est la « bonne manière » d'user de nos facultés. Les Règles pour la direction de l'esprit ou le Discours de la méthode y sont consacrés = si on admet pas le sentiment d’évidence, on ne pourra le transformer par aucun autre critère (pas un thermomètre par exemple). Mais si on essaye d’utiliser un autre critère, il y aura tjs un moment ou on devra utiliser le sentiment d’évidence pour vérifier si ce critère est “utilisable”. Le critère de la vérité, c’est donc l’évidence. Et dans les Méditations métaphysiques, c'est bien l'existence de Dieu qui permet à Descartes d’établir la fiabilité de ce critère, c’est-à-dire de fonder la véracité de nos jugements clairs et distincts. Ce qui paraît évident (elle a résisté aux doutes de Descartes !!) à mon entendement au point de forcer mon assentiment, vaut donc nécessairement pour les choses. C’est un principe scientifique extrêmement puissant. Descartes se dit d’ailleurs capable « d'acquérir une science parfaite touchant une infinité de choses » (MM5) = ce qui a résisté au doute est réel. NB: la démonstration de l’existence de Dieu elle-même dépend d’une certaine confiance dans notre pouvoir démonstratif… Il y a une dimension circulaire de la démonstration cartésienne. Peut-être est-il au fond impossible de démontrer rationnellement notre 117 Tess Van der Eecken confiance dans notre raison et dans notre sentiment d’évidence ? (cf. la fin du chapitre, et la pensée de John Austin) Caractère circulaire dans son argumentation ; il démontre l’existence de dieu amsi cela grâce au sentiment d’évidence. Donc il ne peut pas démonter l’existence de l’évidence par dieu qui vient de l’évidence. En réalité on ne peut pas démontrer ce qui est au principe de la démonstration (l’évidence) – obligé de la reconnaître. Toute cette argumentation sur l’évidence & dieu, dans les méditations, arrive + tard. Dans le cours de l’argumentation r éelle c’est bcp + intuitif. Il découvre le cogito “je pense”. Ce qui résiste d’abord au doute, chez Descartes, c’est le cogito, le “je pense”. = il est impossible de penser que je ne sois rien tant que je pense qqch. Qlq soit ce qu’on pense, on pense ! Il se passe donc qqch. « Enfin, il faut conclure, et tenir pour constant que cette proposition : je suis, j'existe, est nécessairement vraie, toutes les fois que je la prononce ou que je la conçois en mon esprit » = je pense donc je suis je suis « une chose qui doute, qui conçoit, qui affirme, qui nie, qui veut, qui ne veut pas, qui imagine aussi, et qui sent » ➔ Certitude des idées (au moment ou il doute, même si un malin génie le trompe, et bien il pense, et au moment ou il pense il existe ! Il existe au moins en tant que chose qui pense – il existe de manière minimale) ➔ Constate que dans son esprit il y a toutes ses idées qui correspondent à ses différentes pensées dans son âme et on est sur que ce “je “ qui pense existe indépendamment de ses idées. 4. La démonstration de l’existence du monde et de la possibilité de la science Point de départ: certitude des idées sensibles (= idées qui correspondent à une sensation ; bruit de la table) Réception involontaire des idées sensibles, donc passivité de l’esprit qui renvoie nécessairement à quelque cause externe à cet esprit (pas pour autant des choses matérielles !) L’âme a une tendance à penser (une inclination) que ces sensations sont crées par des choses matérielles. Cette inclination à inférer que les idées sensibles sont causées par les objets matériels est fiable car, dans le cas contraire, on n’aurait aucun moyen de corriger cette inclination (nous n’avons aucune véritable raison, aucune raison rationnelle de le faire), et cela serait contraire au caractère non trompeur de Dieu 118 Tess Van der Eecken = aucun argument de penser que ce qui nous fait penser que c’est du matériel est impossible. Donc si les objets matériels n’existaient pas, on aurait aucun moyen de penser que c’est faux (aucun moyen de corriger) Si on a aucun moyen de le corriger, c’est que c’est vrai L’enjeu, ici, est de distinguer les bonnes inclinations des mauvaises (elles existent bien sûr, mais il faut que l’on puisse les corriger) ex : avec une latte Si on peut se corriger, les erreurs ne sont pas de la faute de la bienveillance divine ; si on ne peut pas se corriger c’est que c’est vrai. Le socle de l’argument est que nous sommes faits pour la vérité = pour distinguer le V du F. Nous sommes faits pour être capable de nous corriger. Tout cela réponse sur la certitude de l’existence de dieu. Exercice ; Faux – ce n’est pas explicite (on pourrait penser qu’il y a un cercle mais ce n’est pas le cas), l’existence de dieu suit le cogito. Vrai – il s’agit de sa première certitude et sur cette base il va démontrer l’existence de dieu, du monde matériel etc. Faux Faux Vrai Conclusion. Mais en réalité, qu’est-ce que douter ? Remettre la question dans son contexte 1.Des injonctions du philosophe à la description du langage ordinaire John L. Austin (1911-1961) Figure très importante de l’Université d’Oxford de WW2 (seconde guerre mondiale) à son décès Très peu de textes publiés mais très grande influence, par ses conférences, ses cours et son groupe de recherche : les “Saturday morning” Textes importants : Le langage de la perception, ainsi que ses Ecrits philosophiques et Quand dire, c’est faire. 119 Tess Van der Eecken Source de ce cours : “Autrui” (“Other minds”), publié en 1946 et la philosophie du langage ordinaire : le philosophe ne peut pas décider ce qu’il faudrait que les autres pensent ou non, ce dont il faudrait – dans un monde idéal – douter ou pas, mais il peut décrire la manière dont les hommes, dans leurs pratiques quotidiennes, distinguent un bon et un mauvais doute. = décrire la manière dont, de fait, nous doutons, c’est une manière de dire que le langage ordinaire est extrèmement riche déjà. Austin et la philosophie du langage ordinaire Le philosophe ne peut pas décider ce qu’il faudrait que les autres pensent ou non, ce dont il faudrait – dans un monde idéal – douter ou pas, mais il peut décrire la manière dont les hommes, dans leurs pratiques quotidiennes, distinguent un bon et un mauvais doute. La méthode pour cela consiste à étudier “le langage ordinaire”, c’est-à-dire ce que les êtres humains disent dans les différentes occasions de la vie. Le principe de cette méthode est que le langage ordinaire n’est pas “le dernier mot”, mais qu’il est le “premier mot”: le philosophe utilise le même langage que les autres, et ses énoncés sont donc soumis aux mêmes règles. Or, il n’est pas permis de faire n’importe quoi avec le langage : certains énoncés n’ont pas de sens, au sens où ils ne correspondent à ce qu’un homme peut dire de manière pertinente sur le monde qui l’entoure, ils ne correspondent pas à la manière dont un homme communique de façon sensée avec ses semblables. Il faut donc avant toute chose remettre nos problèmes théoriques dans leurs contextes ordinaires. 2. De quoi est-il légitime de douter? La critique austinienne du scepticisme L’objet apparent d’ “Autrui”: affronter les arguments sceptiques qui portent sur notre capacité à connaître l’esprit des autres, et sur l’idée qu’on ne peut jamais vraiment savoir si quelqu’un est en colère ou pas, mais uniquement si quelqu’un a l’air en colère ou pas Portée de l’article: tous les arguments qui soutiennent qu’on ne sait jamais ce que sont vraiment les choses, mais qu’on ne peut savoir que ce dont elles ont l’air (ex de l’argument du rêve) = on ne sait jamais ce que sont les choses, on sait seulement ce dont ont l’air les choses ! On n'a pas accès à la réalité. Question d’Austin : est-ce que la conception de la connaissance (quand on dit ; je sais…) en jeu dans ce type d’argument sceptique est conforme à nos pratiques ordinaires, c’est-à-dire à la manière dont, dans la vie, on dit que l’on sait telle ou telle chose ? Réponse.... NON ! Tous ces doutes sceptiques sont une conception de la connaissance insensée. 120 Tess Van der Eecken Exemple du touriste qui se blesse et demande à un passant s’il sait où se trouve l’hôpital le plus proche A quelle(s) condition(s) est-il acceptable qu’il soutienne qu’il ne le sait pas ? Cas de l’infirmier qui travaille dans l’hôpital = si on croise un passant qui est infirmier (il ne sait pas car il était peut-être entrain de rêver et n’était donc pas sur d’où était l’hôpital, ou pcq il n’était pas sur que ce n’était pas un dieu trompeur qui l’influence ???) – tous ces arguments sceptiques paressent inacceptables dans ces situations. Cas du riverain qui vit ici depuis peu = s'il est pas sur été u’il faut dmd à qlq d’autre c’est + acceptable Cas du touriste qui passe par là par hasard = pareil Tout ne peut pas compter comme un défi légitime à la connaissance ! Tout doute n’est pas un doute légitime qui justifie que l’on s’abstienne de dire que l’on sait (l’infirmier aurait du dire qu’il savait). Bien au contraire, il y a des contraintes fortes sur ce qui compte comme un doute légitime ou pas De ce point de vue, un défi légitime, ce n’est pas n’importe quelle hypothèse cohérente qui serait contraire à ma connaissance (en cela, Austin critique donc l’usage de l’isosthénie que font les sceptiques) = pas pcq il y a une hypothèse contraire à ce que je crois qu’il faut que je doute !!!! >< scepticisme…. Il y a des raisons illégitimes, scandaleuses qui permettent de se masquer et pas agir (ex : pas sur donc on ne fait rien pour sauver la planète) “Je sais que l’oiseau au fond du jardin est un chardonneret parce qu’il a la tête rouge” Exemple d’objection possible : « Pour être un chardonneret, il ne faut pas seulement avoir une tête rouge, il faut aussi avoir des marques autour des yeux. Ou Comment savez- vous que ce n’est pas un pic ? Les pics ont aussi la tête rouge. » Mais il y a des limites à ce qu’une personne doit faire pour montrer qu’elle sait : « “Assez, c’est assez !” Et cela ne veut pas dire n’importe quoi. Cela signifie que cela a suffit pour montrer que (dans des limites raisonnables, et compte tenu de nos intentions et objectifs présents) ce “ne peut” être autre chose, qu’il n’y a pas de place pour une description différente, ou rivale. Cela ne signifie pas, par exemple, que ça suffit pour montrer que ce n’est pas un chardonneret empaillé. » = il y a des limites raisonnable sà ce qu’on doit montrer en fonction des objectifs (on ne m’a pas dmd si il est vivant donc on ne démontre pas cela). Ex ; empaillé, supra. ces intentions et ces objectifs correspondent à des exigences très différentes en matière de certitude et de connaissance : les limites dans lesquelles on peut considérer que l’on sait telle ou telle chose sont très différentes selon les différents contextes (on ne demandait pas à l’infirmier de récuser l’argument du Malin génie). Parfois selon le contexte on ne sait assez compte tenu de nos objectifs & intentions du moment. 121 Tess Van der Eecken Il y a donc des limites au doute légitime. Négliger qu’il y ait des limites au doute, c’est tout simplement ne pas admettre le fait que nous sommes des êtres humains avec des capacités limitées (faillibles), et ne pas admettre que, de ce fait, toutes nos connaissances, toutes nos promesses, etc., n’ont de sens que compte tenu de ces capacités limitées – mais qu’elles ont un sens tout de même. = la base est admettre que nous sommes faillibles, c’est le point de départ sinon on doute trop. John L. AUSTIN, “Autrui”, pp. 71-72. « Si vous avez conscience de pouvoir vous tromper, vous ne devriez pas dire que vous savez ; de même, si vous êtes conscients de ne pas pouvoir tenir parole, vous n’avez pas à promettre (sceptique). Mais, bien entendu, être conscient du fait que vous puissiez vous tromper ne signifie pas simplement avoir conscience d’être un humain, donc faillible : cela veut dire que vous avez quelque raison concrète (une bonne raison) de supposer que vous pourriez en l’occurrence vous tromper. De même que « mais il se peut que je ne tienne pas ma promesse » ne signifie pas simplement « mais je ne suis qu’un faible être humain » (ce qui ne serait guère plus intéressant que d’ajouter « si Dieu le veut ») ; cela veut dire que j’ai quelque raison concrète de supposer que je ne tiendrai pas parole. Il est bien entendu toujours possible (« humainement » possible) que je me trompe ou ne tienne pas parole, mais, en soi, ça ne m’empêche pas d’employer les expressions « je sais » et « je promets » comme nous le faisons. » (). = pour s’interdire de dire qu’on sait il faut UNE BONNE RAISON Ex ; j’ai promis mais pas sur de pouvoir la tenir dons pas de ma faute = NON c’est tjs le cas, on est jms absolument certain de la tenir, ce n’est pas une excuse ; on promet alors même qu’on n'est jamais complèmenet certain. Pour douter de quelque chose, il faudrait donc avoir une bonne raison de le faire, c’est-à- dire, comme Austin l’écrit dans « Autrui », « avoir à l’esprit un manque plus ou moins précis ». Il faut que, selon nos intentions et nos objectifs du moment, l’idée émise manque de quelque chose… Comme par ailleurs, ces limites dépendent des circonstances, de nos « intentions et objectifs du moment », ce qui compte comme étant suffisant est impossible à déterminer hors contexte, a priori. !!! Cela ne veut pas dire qu’on n peut pas douter de choses qui ont l’air certains ; c’est ainsi que fonctionne la science. On peut remettre en cause ce qu’on pensait avant mais il faut avoir une bonne raison de douter ; Ex de la théorie de la relativité restreinte inventée par Einstein : il n’y pas de doute trop grand ou déraisonnable a priori Le fait que tout dépende « de nos intentions et objectifs présents » peut conduire à limiter le champ du doute raisonnable, mais cela peut aussi exiger de nous – comme lorsqu’il s’agit de la science la plus pointue – de rouvrir les possibles au maximum. 122