Dossier 1 - Introduction et représentations de la comptabilité nationale PDF
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Ce document d'introduction à la comptabilité nationale expose ses définitions, objectifs et évolutions historiques. Il traite de la structure de l'économie nationale et de ses différentes fonctions, en utilisant des exemples.
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Macroéconomie, Semestre 1B, Licence 1 Sciences des Organisations Partie A – Comptabilité nationale Dossier 1 : Introduction et représentations de la comptabilité nationale Introduction "Croissance du PIB, stagnation du revenu disponi...
Macroéconomie, Semestre 1B, Licence 1 Sciences des Organisations Partie A – Comptabilité nationale Dossier 1 : Introduction et représentations de la comptabilité nationale Introduction "Croissance du PIB, stagnation du revenu disponible des ménages, amélioration du taux de marge des sociétés, déficit et dette des administrations publiques, creusement du déficit commercial français" : Autant d'informations économiques qui reviennent de manière récurrente dans les débats politiques et la presse, alors même que la grande majorité des lecteurs ne dispose pas nécessairement des compétences techniques pour les analyser et en mesurer la portée. Comment mieux appréhender, analyser, réagir face à l’abondance d’informations économiques ? La première étape consiste à bien cerner et définir les termes en jeu. Cela passe par une initiation à la comptabilité nationale, car elle en est, nous allons le voir, à la base. Pour reprendre une expression d’Edith Archambault (« Comptabilité nationale », Economica), la comptabilité nationale est destinée à « tous ceux qui estiment que l’information économique fait désormais partie de la culture de l’honnête homme ». La comptabilité nationale constitue donc une première approche de la macroéconomie, sous un angle descriptif. Elle est ainsi le préalable indispensable à toute démarche visant à expliquer les phénomènes économiques globaux. En effet, pour expliquer les phénomènes économiques d'ensemble que sont par exemple l'inflation, la croissance, le chômage ainsi que leurs évolutions, il convient de disposer de données chiffrées les quantifiant. De plus, dès lors que l'on accepte que les phénomènes globaux ne puissent pas être compris comme une simple transposition à un niveau collectif des principes énoncés au niveau individuel, il convient alors de construire des grandeurs économiques globales (agrégats) et d'adopter une analyse macroéconomique. I. Définition, objectifs et évolutions de la comptabilité nationale 1. Définition La comptabilité nationale est une maquette intelligible de l'économie nationale. Il est donc essentiel de ne pas confondre l'information statistique nationale et la comptabilité nationale. La comptabilité nationale utilise les statistiques nationales (INSEE, ministère, entreprises privées, collectivités locales...) pour construire une vue globale et organisée de l'économie nationale. Il s'agit d'agencer, de regrouper ces différentes sources statistiques dans un cadre de référence modélisant l'économie nationale pour en extraire une information analysable et synthétique. Il convient d'ores et déjà d'insister sur le fait que la comptabilité nationale, parce qu’elle crée une représentation schématique de l'économie, est nécessairement fondée sur des choix théoriques, qui peuvent être débattus, amendés, modifiés. En France, l'élaboration des comptes nationaux incombe à l'INSEE (Institut National de la Statistique et des Études Économiques), à la Banque de France, la direction des finances publiques et la direction générale du Trésor. 2. Fonctions de la comptabilité nationale La comptabilité nationale prend en charge quatre fonctions : L'organisation et la collecte d'informations statistiques qui émanent des agents « individuels » de l’économie (entreprises, ménages, etc.), La production de statistiques agrégées (au niveau national). A partir des données individuelles, l’INSEE (en France) élabore la construction d’agrégats (le PIB, le taux d’inflation, le taux de chômage, etc.), qui sont essentiels pour orienter les décisions de politique économique et effectuer des comparaisons (entre pays autant que dans le temps). La représentation du « circuit économique » : Elle permet de décrire et de quantifier les relations entre les différents agrégats macroéconomiques. 1 La production de prévisions : Il est en effet possible d’utiliser cette représentation agrégée de l’économie, issue de la comptabilité nationale, comme un outil de prévision de la conjoncture pour aider un gouvernement à trouver des solutions, donner les orientations de politique économique. 3. Les origines de la comptabilité nationale a. Les précurseurs de la comptabilité nationale On peut faire remonter la mise en place d'une statistique publique à l'époque romaine et jusqu'à l'Ancien Régime, où les recensements et les statistiques générales servaient d'éclairage aux choix militaires et politiques du roi. Dans la seconde moitié du 17e siècle, les recherches de William Petty en 1665 aboutissent aux premières estimations du revenu national et de la richesse de l'Angleterre et traduisent également un intérêt croissant pour les questions de comptabilité nationale. En 1696, toujours en Angleterre, Gregory King réalisa un système intégré de statistiques qui peut être également être considéré comme un ancêtre de la comptabilité nationale. Cependant, c'est véritablement avec les travaux de François Quesnay en 1758 que le concept de « comptabilité nationale » apparaît. Celui-ci tente de construire une sorte de comptabilisation des valeurs économiques principales (le « produit net », à savoir la valeur ajoutée par l'exploitation des ressources naturelles et l'agriculture) au sein de son tableau économique, donnant ainsi une première représentation du « circuit économique ». b. La véritable naissance de la comptabilité nationale La comptabilité nationale telle qu'elle est pratiquée actuellement est une construction relativement récente, développée quand l'État a entrepris de contrôler et réguler l'activité économique (fonction de stabilisation conjoncturelle de l’Etat) dans la période qui a suivi la crise des années 1930. Après la Seconde Guerre mondiale, elle a été largement développée dans les pays capitalistes où la volonté interventionniste des États l’a rendue rapidement indispensable. A cette époque (début des années 1950), une double avancée va être à l'origine de la véritable naissance de la comptabilité nationale : Une révolution idéologique et théorique : une nouvelle conception du rôle de l'État et de la politique économique Une révolution des techniques de comptabilité nationale Une révolution idéologique et théorique : une nouvelle conception du rôle de l'État En 1936 intervient un événement décisif qui est directement à l'origine de la naissance de la comptabilité nationale. John Maynard Keynes publie en 1936 son ouvrage "Théorie Générale de l'Emploi, de l'Intérêt et de la Monnaie". Celui marque un renouveau théorique dans l’analyse des phénomènes macroéconomiques (d’ensemble) et intérêt renouvelé dans leur explication. Cependant, pour parvenir à les expliquer, nous l’avons vu dans les fonctions de la comptabilité nationale, un préalable est de les mesurer. C'est donc à partir de cette période que la construction d'agrégats macroéconomiques, autrement dit des grandeurs synthétiques caractéristiques de l'économie nationale (produit national, revenu national) a débuté. Par ailleurs, les conclusions keynésiennes sur la nécessité d’une intervention étatique stabilisatrice en cas de conjoncture défavorable ont accentué le besoin d’outils performants de comptabilité nationale. En effet, à l'origine, c'est notamment pour permettre aux gouvernements de mettre en place efficacement les recommandations de Keynes en matière de politique de stabilisation qu'a été créée la comptabilité nationale. Une révolution technique Dans les années 1930 et 1940, les travaux des économistes Colin Clark et Simon Kuznets permettent d'améliorer considérablement la mesure du revenu national en créant notamment un "modèle normalisé de la comptabilité nationale"1. La publication en 1936 de l'article de l'économiste américain Wassily Leontief est à l'origine des Tableaux 1 Dès 1932, avant même l'élection de Roosevelt et le New Deal aux Etats-Unis, le Congrès américain avait demandé à l'économiste Simon Kuznets (récompensé par le Prix Nobel en 1971), dans le cadre du National Bureau of Economic Research (NBER) d'estimer le recul de l'activité globale induit par l'épisode de récession. Il s'est alors avéré qu'elle avait chuté de 40% entre 1929 et 1932. 2 Entrées-Sorties (TES) qui joue un rôle important en comptabilité nationale encore aujourd'hui. En modélisant les interdépendances entre les branches productives, le TES va permettre d'étudier l'impact des décisions de politique économique dans une branche (par exemple la construction d'une nouvelle ligne de chemin de fer), sur les autres branches et ainsi de formuler des prévisions. La seconde guerre mondiale accentue encore davantage la nécessité de disposer d'outils de comptabilité nationale performants, tant en ce qui concerne l'effort de guerre que les impératifs de reconstruction par la suite. Ainsi, en Grande-Bretagne, en 1941, Richard Stone et John Meade proposent un système articulé de comptes. La même année, Jan Tinbergen réalise le premier système pour les Pays-Bas. En France les premiers travaux théoriques sont l'œuvre d’André Vincent et les premiers comptes, portant sur l'année 1938, sont réalisés en 1945 à l'Institut de conjoncture par René Froment2. Au sortir de la seconde Guerre Mondiale, étaient ainsi réunies trois conditions qui vont permettre la naissance de la comptabilité nationale : Une théorie économique : la doctrine keynésienne devient suffisamment dominante pour imposer à tous ses concepts ; Une volonté politique : les Etats souhaitaient à l'époque disposer d'outils leur permettant d'intervenir efficacement dans la vie économique nationale dans une optique de régulation conjoncturelle, de stabilisation de la conjoncture ; Des appareils statistiques performants : les progrès effectués dans la mesure de l'activité économique et les utilisations de la comptabilité nationale. L’affaiblissement de la portée des théories keynésiennes avec la crise des années 1970, au profit de thèse plus libérales, et le changement dans la conception du rôle de l'État dans l'économie qui l’accompagnent, ne remettront en rien en cause la nécessité de disposer d'une comptabilité nationale. En effet, celle-ci fournit les moyens d'évaluer les conséquences des politiques menées par les dirigeants et donc est considérée comme un enjeu démocratique majeur. 4. L'harmonisation des cadres comptable nationaux Les premières tentatives de comptabilité nationale se réalisent en ordre relativement dispersé. Rapidement, ces comptabilités nationales hétérogènes ne répondent plus à tous les besoins, notamment celui de comparaison des performances entre pays. Devant ce constat, L'Organisation des Nations Unies (l'ONU) a mis au point un cadre commun, un système harmonisé de comptabilité nationale à partir de 1953 appelé Système de comptabilité nationale des Nations Unies (SCN). La construction européenne a également imposé une normalisation des comptes, des agrégats et de leur mesure, et des notions, notamment pour la mise en œuvre et le respect des traités : La définition d'objectifs de déficit et de dette dans le cadre du traité d'Amsterdam (1997) suppose une mesure commune de ces agrégats. Les prélèvements effectués pour le budget de l'Union Européenne sur la base du PIB de chaque État imposent une mesure harmonisée de celui-ci entre les différents États. Dans le cadre du Système Monétaire Européen (SME, 1979-1999), les systèmes de comptes nationaux ont été harmonisés autour de normes communes, et les États européens utilisent le même cadre comptable : le SEC (système européen de comptabilité). Est actuellement en vigueur le SEC 2010 (depuis le 1er janvier 2014). 5. L'adaptation constante des cadres comptables nationaux De nombreux cadres comptables ont été proposés depuis la normalisation initiale proposée en 1954 par l'ONU. Ces changements nécessaires répondent aux évolutions observées dans le fonctionnement des économies, le développement de nouvelles activités et le changement dans la conception de la richesse créée. 2 Par la suite, une équipe du Commissariat Général du Plan constituée de Dumontier, Froment, Gavannier et Uri fut chargée d'élaborer les comptes. 3 a. Les évolutions de la mesure de la richesse créée Il est possible de citer plusieurs exemples d'innovations mises en œuvre afin d'améliorer la représentation des économies produite par les comptabilités nationales. Le SCN de 1993 va intégrer la financiarisation croissante des économies avec une meilleure prise en compte de la richesse produite par les services financiers. Avant le SEC 95, la Formation Brute de Capital Fixe (FBCF), qui mesure l'investissement, ne comprenait que les biens durables acquis et excluait les investissements dits immatériels. La mise en place du SEC 95 apporte un premier élément de réponse en considérant que les logiciels font partie des actifs fixes. Dans le même ordre d’idées, le SEC 2010 inclut certaines dépenses militaires et les dépenses de Recherche et Développement, considérées jusque-là comme des consommations intermédiaires, dans la FBCF. Cet actif immatériel par excellence jusqu'ici laissé de côté représente l'équivalent de 2% du PIB dans les pays développés. Il est important d'avoir à l'esprit qu'un changement de cadre comptable n’est pas si simple à mettre en œuvre. Ainsi, une mesure telle que l'intégration des frais de recherche et développement dans la production, impose de recalculer le PIB sur toutes les années passées pour étudier les évolutions dans un cadre harmonisé et éviter les discontinuités dans les données liées à des changements de méthodes comptables. b. Une réflexion plus profonde sur les fondements de la comptabilité nationale Outre ces réflexions sur les origines de la création de richesse économique et ses formes, des débats ont lieu sur la pertinence de centrer la comptabilité nationale sur une dimension économique du progrès, le PIB, et non sur une dimension humaine et environnementale. L’indicateur phare de la comptabilité nationale, le PIB, en effet souvent l’objet de critiques. Parmi les critiques, certains soulignent notamment le décalage croissant entre la conception de la richesse qu'il véhicule, et les problématiques actuelles de développement durable. Si la comptabilité nationale a pour vocation initiale la mesure de la création de richesse, sa relation avec la mesure du « progrès économique » (ou de la prospérité) dans son ensemble est aujourd’hui débattue. A partir de ce constat, un grand nombre d'indicateurs alternatifs et complémentaires au PIB ont été proposés et sont le fruit d'une réflexion plus profonde sur la nature même de la richesse dans la comptabilité nationale. II. Méthodes et cadre d’analyse de la comptabilité nationale 1. Le cadre d'étude de la comptabilité nationale a. Le cadre temporel Les comptes nationaux sont publiés pour chaque année civile. Des données macroéconomiques peuvent aussi être publiées sur un rythme trimestriel, pour notamment répondre au besoin d'information des décideurs, mais avec un degré de précision moindre. b. Le cadre spatial Afin de recenser les agents et les opérations appartenant au territoire économique national, il convient au préalable de définir ce dernier (qui ne recoupe pas nécessairement exactement le territoire national au sens géographique). Par convention, les publications statistiques emploient souvent l'expression « France entière » ou « France » pour désigner l'ensemble géographique comprenant la France métropolitaine et les 5 départements d'outre-mer Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion et Mayotte. Sont ainsi inclus dans le territoire économique national : La métropole, y compris Monaco et les Départements d'Outre-Mer (depuis le SEC 95) avec pour effet de gonfler mécaniquement le PIB français et de diminuer la valeur des importations et des exportations. Ainsi, 4 Mayotte, nouvellement établie comme le 101ème département français a contribué à augmenter le PIB français. L'espace aérien national, les eaux territoriales, les gisements offshores exploités. Les enclaves françaises à l'étranger en vertu de traités internationaux (les ambassades par exemple). Sont exclus du territoire économique national : La Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, les îles Wallis et Futuna, les Terres australes et antarctiques françaises, les îles éparses de l'Océan indien ainsi que Saint-Pierre-et-Miquelon. Ces derniers font partie du Territoire de la République française mais ne font pas partie de l'Union européenne. Ils sont assimilés à l'extérieur en comptabilité nationale. Les enclaves étrangères en France en vertu de traités internationaux (les ambassades étrangères par exemple). c. Le critère d’appartenance à l'économie nationale Quels sont les agents qui appartiennent au territoire économique national ? Et ceux qui n’en font pas partie ? La réponse à cette question passe par la définition du terme de « résident » (et de « non-résident »). Une unité est résidente d’un pays quand son centre d’intérêt économique prédominant est situé sur le territoire économique de ce pays, c’est-à-dire lorsqu’elle y exerce des activités économiques pendant une période relativement longue (une année ou plus). Il est donc possible pour un agent d’être résident mais de ne pas avoir la nationalité du pays concerné. Le critère de résidence n’est pas basé sur la nationalité. d. Une comptabilité de flux La comptabilité nationale mesure les flux ou opérations économiques durant un intervalle de temps, typiquement l’année (cf point a), qui conduisent à la création de richesses et leur circulation entre les agents économiques. On dit ainsi que la comptabilité nationale est une comptabilité de flux. Il ne faut ainsi pas confondre les flux et les stocks (qui sont traités dans des comptes particuliers, comme le compte de patrimoine). e. Le type de flux comptabilisés La comptabilité nationale est centrée sur les transactions marchandes donnant lieu à un échange monétaire. Une grande partie des transactions hors marché, qui ne donnent pas lieu à un échange monétaire, n'est pas comptabilisée. Par exemple, l'échange mutuel de service sur le modèle du "don / contre-don" n'est pas pris en compte. Cependant certaines opérations qui échappent à l'échange marchand sont évaluées, par exemple, l'occupation d'un logement par un propriétaire, ou encore l'autoconsommation de produits agricoles produits. f. L’unité de mesure La comptabilité nationale est une comptabilité monétaire en ce sens que tous les éléments sont valorisés en unité monétaire. La monnaie a une fonction d'étalon de valeur commune qui permet d'agréger des opérations et des produits très différents et dans des unités initialement différentes. Ainsi, une évaluation monétaire est obtenue en multipliant une quantité par un prix, selon : 𝑉𝑎𝑙𝑒𝑢𝑟 = 𝑞𝑢𝑎𝑛𝑡𝑖𝑡é × 𝑝𝑟𝑖𝑥 Cette évaluation monétaire réalisée par la comptabilité nationale n'est pas sans poser des problèmes notamment concernant les comparaisons intertemporelles. L’évolution d’une valeur peut relever de deux phénomènes : le changement des volumes et/ou le changement de l'unité de mesure (la monnaie) dont la valeur ne reste pas stable dans le temps (typiquement du fait de l’inflation). Nous illustrons ce point au travers de l’exemple ci-dessous. Dans les deux cas la valeur de la production a augmenté, mais dans le premier cas en raison de l’augmentation des volumes, dans le second, d’une augmentation des prix plus forte que la baisse des volumes. La comptabilité nationale mesure donc : Des variables réelles (ou en volume), corrigées de l’évolution des prix (on parlera du PIB en volume, ou du PIB réel). On pourrait alors par exemple prendre le prix de l’année N comme référence. Le PIB réel de l’année N serait égal à 190 dans le cas 1 et 2. En revanche, pour l’année N+1, valorisée aux prix de N, la richesse réelle créée serait alors de 380 dans le cas 1 mais seulement de 95 dans le cas 2. On observe alors 5 bien que la valeur de la production ait été divisée par deux l’année N+1 dans le cas 2. On dit alors qu’on a mesuré un PIB à prix constants. Des variables nominales (ou en valeur) qui incorporent l’influence des variations de prix (on parlera du PIB nominal). Le PIB nominal de l’année N serait égal à 190 dans le cas 1 et 2 et de 380 dans le cas 1 et 2. On le mesure aux prix courants (de l’année courante). Cette distinction entre le PIB en volume ou le PIB en valeur (réel ou nominal) s’applique à d’autres agrégats également (Consommation, investissement, etc.). On pourra alors utiliser un indice de prix adapté à l’agrégat considéré. Dans le cas du PIB, l’indice de prix utilisé est appelé le déflateur du PIB. Pour la consommation, on pourra aussi utiliser l’indice de prix à la consommation. 2. L'analyse de l'économie nationale sous forme d’un circuit La représentation du circuit économique national a pour point de départ la production qui est à la base de l'activité économique. La logique du circuit peut se résumer ainsi : la production crée des revenus, qui créent eux-mêmes des dépenses qui suscitent la production et donc des revenus, et ce, de manière quasi ininterrompue. Pour cela, la nécessité d’agréger et de synthétiser l’information économique impose des simplifications : les agents sont regroupés au sein de grands ensembles ; les opérations économiques sont regroupées au sein de grandes catégories d’opérations. On a pour habitude de représenter le circuit économique grâce au schéma suivant : 6 a. Les catégories d’opérations Les transactions entre les agents peuvent être catégorisées dans les trois types d'opérations : Des opérations sur les produits (OP) : Elles décrivent 1°) la mise à disposition des ressources en produits (production et importation) et 2°) leur utilisation (les emplois de ces produits : consommation intermédiaire, investissement, consommation finale, stockage). Les opérations sur les produits permettent de comprendre l’origine de la richesse créée par l’économie nationale. Les dossiers 2 et 3 permettront une étude plus poussée des opérations sur les produits. Des opérations de répartition (OR) : Elles décrivent les flux de revenus entre les agents et leur nature. A la différence des opérations sur les produits, elles vont détailler la manière dont la richesse est répartie dans l’économie nationale et non pas la manière dont elle est générée. Précisément, on distingue deux types d’opérations de répartition : o Les opérations de répartition (ou de distribution) primaire de la richesse créée : elles constituent le premier revenu qui rémunère les facteurs qui ont participé à la production et à la création de valeur, le travail et le capital. o Les opérations répartition (ou de redistribution) secondaire de la richesse créée : elles constituent le second niveau de formation du revenu, après que l’Etat ait orchestré une redistribution sur la base des revenus primaires au moyen du système d’impôts et de transferts. Des opérations financières (OF). Les opérations financières retracent : o Les flux d’actifs financiers (les créances et les dettes, acquises, cédées, etc.) qui ont lieu entre unités institutionnelles. C’est tout ce qui permet aux unités qui ont des capacités de financement de les transférer aux unités qui ont des besoins de financement. o Cela inclut notamment tous les transferts de moyens de paiement entre les unités. Celles-ci sont les contreparties de la plupart des OP, des OR et des OF. o Par exemple. Si une banque prête de l’argent à un ménage, il y a deux opérations : le transfert de créance du ménage vers la banque (OF) et le transfert d’argent de la banque vers le ménage (OF). Si le ménage utilise l’argent pour acheter une voiture, il y a à nouveau deux opérations : le transfert de propriété du vendeur vers l’acheteur (OP) et le transfert d’argent de l’acheteur vers le vendeur (OF). Si un ménage achète une voiture payable à crédit sans rien payer à la livraison, il y a deux opérations : le transfert de propriété du vendeur vers l’acheteur (OP) et le transfert de créance de l’acheteur vers le vendeur (OF). b. Les regroupements d’agents Afin de représenter synthétiquement l’économie nationale, la comptabilité nationale effectue des regroupements d’agents pour construire des agrégats. En termes quantitatifs, en France, on dénombre près de 25 millions de ménages et 3.14 millions d'entreprises en 2011 (donc 3 millions de microentreprises) ce qui donne une première idée du nombre d’agents économiques et de la nécessité de les regrouper. 7 On distingue deux modes de classement : Une nomenclature fonctionnelle des unités résidentes pour l’analyse des opérations sur les produits. Une nomenclature institutionnelle des unités résidentes pour l’analyse de la répartition des revenus dans l’économie nationale. 1) La nomenclature fonctionnelle des agents La nomenclature fonctionnelle est utilisée pour décrire la création de richesses par l’activité productive. Ainsi, nous aurons recours à un classement par branche tel que nous allons le présenter ici. L’idée est de « classer » les agents selon le type de biens qu’ils produisent (leur activité). Les unités de production homogènes D'après le SEC 95, une unité de production homogène est une unité "exerçant une activité exclusive sur un produit ou un groupe de produits". Ce produit peut-être un bien ou service défini par la comptabilité nationale comme tel (produit) et classé selon une nomenclature qui permet de définir la branche à laquelle appartient un produit. Il existe de nombreux niveaux de classification plus moins détaillés qui explicitent les catégories de produits. Ainsi, une entreprise unique réalisant plusieurs productions pourra être découpée en différentes unités de production homogènes. Les branches (ou branches d'activité) Une branche est un regroupement d'unités de production homogène (UPH) par référence au produit qu'elle réalise ou élabore. Précisément, selon l’INSEE, « Une branche (ou branche d'activité) regroupe des unités de production homogènes, c'est-à-dire qui fabriquent des produits (ou produisent des services) qui appartiennent au même item de la nomenclature d'activité économique considérée ». Les nomenclatures d’activités et de produits françaises utilisées par l’INSEE sont présentées annexe. La branche 14 « industrie de l'habillement » donc l'ensemble des unités de production produisant des produits issus de cette industrie. Bien entendu, plus la branche est définie de manière large, plus les branches vont regrouper des unités avec des productions diverses. La branche « industrie de l'habillement » appartient elle-même à la branche C « Industrie manufacturière ». A l'inverse, plus le produit est défini finement, plus les unités de production vont être homogènes au sens où elles produiront un bien ou un service quasi identique : les produits de la catégorie 14.12 « Vêtements de travail » comprennent les produits de la catégorie 14.12.12 « Pantalons, salopettes, culottes et shorts de travail pour hommes ». Le choix de la finesse de classification d’activité retenue dépend de l’objectif de l’étude. 2) La nomenclature institutionnelle des agents La nomenclature institutionnelle est utilisée quand on cherche à détailler les étapes de la formation du revenu des agents. A la base de la définition des secteurs institutionnels, se trouve celle « d’unité institutionnelle ». Les unités institutionnelles Une unité institutionnelle est un centre de décision autonome pouvant être une personne physique, (on dit alors qu'il s'agit d'un ménage), ou une personne morale, c'est-à-dire une entreprise, une administration publique ou une association. Ces unités institutionnelles sont susceptibles de posséder elles-mêmes des actifs, de souscrire des engagements, de s'engager dans des activités économiques et de réaliser des opérations avec d'autres unités. Les secteurs institutionnels Les unités institutionnelles sont regroupées en fonction de comportements économiques analogues, au sein de « secteurs institutionnels ». Précisément, les unités institutionnelles résidentes ayant la même fonction principale et la même source principale de revenu sont regroupées en cinq secteurs institutionnels résidents, à savoir : Les ménages, Les sociétés non financières (SNF) Les sociétés financières (SF) Les administrations publiques (APU) 8 Les institutions sans but lucratif au service des ménages (ISBLSM) L'ensemble des unités non-résidentes, dans la mesure où elles entretiennent des relations économiques avec des unités résidentes, sont regroupées dans un 6e secteur institutionnel appelé reste du monde. Les ménages Fonction principale : Le secteur des ménages regroupe les unités dont la fonction principale est la consommation et la production marchande dans le cadre d'entreprises individuelles. Les entreprises individuelles sont comptabilisées dans le secteur institutionnel des ménages car leur personnalité juridique n'est pas distincte de l'entrepreneur et on ne peut distinguer entre le patrimoine de l'entreprise et celui de l'entrepreneur. Le revenu perçu est appelé revenu mixte car il rémunère indifféremment l’apport en capital et le travail effectué dans le cas de l’entreprise individuelle. Les différentes formes d'entreprises individuelles sont principalement composées des commerçants, artisans, professions libérales, agriculteurs. Ressources à disposition : Les ressources des ménages sont composées des rémunérations des facteurs de production (capital, travail, terre,...) et des transferts en provenance des autres secteurs institutionnels, ainsi que par les produits de la vente pour les entreprises individuelles. Les ménages produisent également leurs propres ressources comme dans le cas de la production pour emploi final propre (production agricole autoconsommée, travail domestique salarié, production de service de logement). Ces activités sont intégrées au secteur institutionnel des ménages car elles n’ont pas vocation à faire l’objet d’échanges marchands avec d’autres unités institutionnelles. Les Sociétés non financières (SNF) Fonction principale : produire des biens et services non financiers et marchands. Le caractère « marchand » de l’activité signifie que les biens et services sont vendus à un prix économiquement significatif, dans le but de réaliser un gain. Précisément, ce critère est le suivant : Le prix de vente couvre au minimum 50% des coûts de production (coût de revient), sinon l'unité est classée dans le secteur des administrations publiques. Décomposition : ce secteur comprend des entités ayant une personnalité juridique propre (des personnes morales), mais leurs statuts peuvent être très variés : Sociétés Anonymes (SA), Sociétés en Nom Collectif (SNC), Établissements Publics à caractère Industriel et Commercial (EPIC), association (dès lors que les ventes de biens et services correspondent à plus de 50% de leurs ressources). Elles comprennent des quasi-sociétés (la Poste par exemple) ainsi que certains morceaux d'administrations publiques (la Régie des alcools par exemple) en raison de la nature marchande des produits vendus. Ressources à disposition : Les ressources proviennent majoritairement de la vente des biens et services. Les Sociétés Financières (SF) Ce secteur institutionnel regroupe en réalité deux catégories d'unités avec des fonctions distinctes3. Les institutions financières : Unités dont la fonction principale est de financer, c'est-à-dire de collecter, transformer et répartir des moyens de financement, ou de gérer ces moyens de financement. Elles assurent une activité d'intermédiation financière. On y retrouve notamment la Banque centrale, les autres institutions de dépôts (banques) et les autres intermédiaires financiers (SICAV par exemple). Ressources à disposition : Les institutions financières tirent leurs ressources de la rémunération des services financiers fournis de même que la rémunération des capitaux qu'elles placent. Les sociétés d'assurance : Ce sous-secteur intègre les compagnies d’assurance, ainsi que les mutuelles, institutions dont les ressources sont des cotisations volontaires. La fonction de ces sociétés d'assurance (au sens large) est la mutualisation des risques, c'est à dire la transformation des risques individuels en risques collectifs. 3 Il est important de noter que l'évolution récente des institutions financières et la diversification croissante de leurs activités conduit à rendre cette distinction entre institutions financières et sociétés d’assurance de plus en plus floue. En effet, les institutions financières proposent à présent des services d’assurance. 9 Ressources à disposition : Pour les compagnies d’assurance, leurs ressources sont constituées des primes d'assurance versées et des revenus financiers tirés de leurs placements. Pour les mutuelles, il s'agit pour les ressources des cotisations volontaires. Les Administrations Publiques (APU) Fonction principale : La production des services non-marchands et/ou la redistribution des revenus ou du patrimoine constituent leur fonction. Contrairement à ce que le nom pouvait laisser supposer, ce n'est pas le statut privé ou public qui conditionne l'appartenance au secteur institutionnel des Administrations publiques. En effet, ce secteur se distingue par le caractère non-marchand de sa production. Une production est non-marchande si elle est vendue à un prix non-économiquement significatif (c’est-à-dire, inférieur à 50% des coûts de production). L'enjeu autour de la définition du secteur institutionnel des administrations publiques est central dans la mesure où il détermine le chiffre de la dette et du déficit public. Ce sont les APU qui « consomment » les services gratuits qu’elles produisent (armée, justice, partie gratuite de l’éducation…). Composition : Ce secteur institutionnel regroupe en réalité trois catégories d'unités. Les APU centrales : Leur compétence s'étend sur tout territoire économique. Les administrations publiques centrales regroupent l’État, y compris ses services déconcentrés comme les directions départementales des ministères, ainsi que les organismes divers d’administration centrale, ODAC, comme par exemple : Météo France, Pôle emploi ou les universités). Les APU locales : Leur compétence s'étend sur une partie du territoire économique. On y trouve notamment : les collectivités locales (régions, départements, communes) et certains organismes d'administration centrale en dépendant (régie, district, chambres de commerce). Les administrations de sécurité sociale : Elles rassemblent toutes les unités qui distribuent des prestations sociales à partir de cotisations sociales obligatoires (régime d'assurance sociale) et les unités auxquels ses organismes procurent leurs ressources (hôpitaux publics) également appelés organismes dépendant des assurances sociales. Ressources à disposition : Elles sont principalement composées des prélèvements obligatoires (fiscalité directe et indirecte et contributions de sécurité sociale) versés par les autres secteurs institutionnels, mais également de ressources non fiscales (recettes commerciales des administrations, produits de cession d'actifs publics). Les Institutions Sans But Lucratif au Service des Ménages (ISBLM) Fonction principale : Ces entités, pour être distinguées des ménages, doivent avoir une personnalité juridique. Leur fonction commune est de produire des services non-marchands, et au bénéfice des ménages. A titre accessoire (cela ne saurait être l'essentiel de leur activité), ces entités peuvent vendre des biens ou services marchands aux ménages. En réalité, leur importance est relativement limitée et les sources statistiques disponibles pour établir leurs comptes sont rares. Composition : Ce secteur institutionnel regroupe notamment les associations de consommateurs, les partis politiques, les syndicats, les églises, les organismes de charité, de l'enseignement privé, les fondations,... Ressources à disposition : Leurs ressources sont constituées de cotisations volontaires et de subventions de la part des Administrations Publiques. Si ces subventions en provenance des APU constituent plus de 50% de leurs recettes, ils sont considérés comme des Administrations publiques et intégrés dans ce secteur institutionnel. De même, s'ils tirent plus de 50% de leurs recettes de la commercialisation de produits ou de services, ils sont considérés comme des Sociétés Financières ou non Financières selon la nature du service proposé (financier ou non). Ainsi, ce secteur est largement amputé d'un grand nombre d'unités institutionnelles et est considéré comme un secteur résiduel. Le reste du monde (RdM) Ce secteur institutionnel intègre les unités non-résidentes uniquement dans la mesure où elles effectuent des opérations économiques pendant l'année avec les résidents de l’économie nationale. Les relations entre les unités résidentes et non-résidentes peuvent aussi bien concerner : Des opérations sur les produits : importations et exportations de biens et services ; 10 Des opérations de répartition : comme la rémunération par des agents résidents de travailleurs non-résidents ou d’apporteurs de capitaux non-résidents (et inversement). Des opérations financières : comme les prêts de non-résidents à des résidents ou encore achat de titres de propriétés de non-résidents par des résidents (et inversement). 11 Annexe sur les branches et les produits. 12 13