Cours 10 : Le Pouvoir des Algorithmes PDF
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Ce document présente une introduction à l'économie de l'attention et au rôle des algorithmes dans le monde numérique actuel. Le document explore comment les algorithmes influencent notre attention et comment les entreprises comme Google utilisent cette attention pour générer des revenus. Les sujets tels que le capitalisme algorithmique et les systèmes de recommandation sont aussi abordés.
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COM 1600 - COURS 10 LE POUVOIR DES ALGORITHMES Quelle est la relation entre notre attention et l’économie ? DÉFINIR L’ÉCONOMIE DE L’ATTENTION Concept qui est proposé dans les années 1990 dans un texte de Georg Franck (1993) Par attention, on entend « la concent...
COM 1600 - COURS 10 LE POUVOIR DES ALGORITHMES Quelle est la relation entre notre attention et l’économie ? DÉFINIR L’ÉCONOMIE DE L’ATTENTION Concept qui est proposé dans les années 1990 dans un texte de Georg Franck (1993) Par attention, on entend « la concentration de l’activité mentale sur quelque chose ou quelqu’un » (Dictionnaire Antidote). Par économie, on parle de l’ensemble « des activités de production, de distribution et de consommation des ressources, des biens d’une collectivité donnée » (Dictionnaire Antidote) L’économie de l’attention désigne un secteur de l’économie, qui émerge de la convergence de phénomènes suivants : - Une abondance de produits de consommation et de contenus médiatiques - La stabilisation des modèles économiques des médias autour de revenus fondés sur la la mesure de consommation des médias (quantitative) - l’émergence de stratégies (de marketing ou technologiques) de captation de l’attention mises en place par les grandes entreprises Exemple de la télévision : Le modèle économique des anciens médias de masse — la télévision et la radio — repose sur une consommation de contenu gratuite ou à bas coûts en « échange » de notre attention. LA CRISE DES MÉDIAS ET L’ATTENTION La « crise » que vivent actuellement les médias de masse est une crise de l’attention : plus l’attention des auditoires— le temps passé devant du contenu — est redirigée vers les médias sociaux (Facebook, TikTok, Instagram) et les plateformes numériques (Google, Bing), moins les médias de masse peuvent bénéficier des revenus publicitaires. Ce faisant, ils ne peuvent plus financer leurs activités. Comment Google, dont les services ont pour la plupart gratuits, fait-il de l’argent ? Quel rôle jouent les algorithmes dans cette logique ? UN OCÉAN D’INFORMATIONS Dans la culture en réseau qui émerge du web, l’information disponible décuple. « On prend alors conscience de l’abondance exponentielle de textes à lire, de musiques à échanger, d’images à regarder. On perçoit à ce moment-là l’entrée dans un monde nouveau, lié aux appareils numériques. Et ce monde nouveau est un monde de surabondance de l’o[re » (Yves Citton, 2020, p. 13) Les moteurs de recherche ont o[ert une solution technique à la recherche d’informations sur le web en nous aidant à « naviguer » à travers des millions de pages web et en proposant un classement (une hiérarchie) fondé sur la pertinence des pages web proposées lors d’une recherche. L’EMPIRE GOOGLE En quelques années, Google s’est assuré une position de quasi-monopole dans le monde (excluant la Chine), constituant la porte d’entrée vers 90% des recherches sur le web. Pour le mois de mars 2024 uniquement, on estime qu’il y a eu 85 milliards de visites individuelles sur Google. Google a réussi à dominer le marché des moteurs de recherche grâce à la création de l’algorithme page rank En novembre 2024, la valeur de Google, devenu Alphabet Inc. était estimé à 2 882 milliards de dollars Américains, ce qui est équivalant au PNB du canada. QU’EST-CE QU’UN ALGORITHME ? Un algorithme est une séquence d'instructions intégrées à un logiciel qui servent à prendre des décisions sur la base de l’analyse d’informations (données) entrantes. Les algorithmes modifient leurs réponses selon les contextes (ce qui, pour nous les usagers, donne l’impression d’une personnalisation) Si X alors Y ; Si X et A alors RM ; etc. En bref, les algorithmes dirigent notre attention. L’ALGORITHME PAGE RANK L’algorithme Page Rank de Google se fonde sur deux principes de classement : L’autorité. Le nombre d’autres pages web qui o[rent un lien hypertexte vers la page en question. La popularité. Le nombre d’usagers qui ont choisi ce lien lors de la même recherche LE MODÈLE ÉCONOMIQUE DE GOOGLE Google a ensuite développé ses services Google Adwords (maintenant Google Ads) et Google AdSense. Adwords permet aux entreprises de sélectionner des mots-clés liés à leur entreprise et de payer pour s’assurer d’une visibilité dans la liste des résultats de recherche. Adsense, quant à lui, est la possibilité pour les créateurs web d’ajouter des publicités Google qui génèrent des revenus de leur trafic. En bref, si les médias de masse nous o[raient de l’information et du divertissement contre une exposition à la publicité, Google nous o[re une aide à la navigation sur le web également contre de l’exposition à la publicité. MAIS, les médias de masse avaient encore le fardeau de produire du contenu pour nous attirer, ce que Google n’a pas à faire. Dans quels autres domaines les algorithmes jouent-ils un rôle autour de notre attention ? CAPITALISME ALGORITHMIQUE À peu près partout … c’est le stade actuel du capitalisme selon plusieurs sociologues Tout comme Google, la proposition des plateformes de di[usion de biens culturels (Spotify, Netflix, Disney, Prime, YouTube) est de nous accompagner dans l’océan des choix possibles. Et comme pour Google, ce sont les algorithmes qui sont au cœur des logiques de consommation de produits culturels. LES SYSTÈMES DE RECOMMANDATION DE BIENS CULTUELS -MARC MÉNARD « Un système de recommandation de biens culturels est un dispositif de médiation technique entre le consommateur et le marchand dont l’objectif est de capter l’attention des internautes en leur proposant des suggestions de biens supposés correspondre à leurs préférences. » Marc Ménard, p. 69 SUR QUELLES BASES LES RECOMMANDATIONS SONT-ELLES FAITES ? 1 Filtrées sur la base du contenu : caractéristiques ou qualités similaires (ex. film d'animation, Marvel, héros féminin, acteur de Friends, année de production, etc.) 2 Filtrées de manière collaborative : comment d'autres usagers ont-ils réagi au contenu (par ex. nos amies ; d'autres personnes qui ont aimé les mêmes films que moi) 👍 Pour la plupart des consommateurs, les algorithmes sont non seulement invisibles (comme les infrastructures), mais ils sont les bienvenus car ils personnalisent l’expérience de consommation de biens culturels (comme avoir un disquaire ou un libraire personnel qui nous fait des recommandations). « Personnaliser une suggestion consiste à filtrer les contenus afin de ne conserver que les plus pertinents pour un utilisateur donné. » Ménard, p. 72 - 👎 Pour les chercheurs critiques, les algorithmes ne sont toutefois pas neutres et parce qu’ils prennent des décisions pour nous (et que nous ne comprenons pas le fonctionnement de ces décisions) nous perdons une forme de liberté. 3 Enjeux : 1 L'orientation et la manipulation des choix des consommateurs 2 La nature réductrice de ces systèmes : biens culturels sont réduits à des attributs mesurables et comparables 3 La réduction de diversité dans la consommation L’HYPOTHÈSE DE LA BULLE FILTRE - Selon Ménard et d’autres, les algorithmes auraient tendance à uniformiser nos goûts et nos attitudes en créant un environnement où les mêmes tendances sont répétées. C’est l’hypothèse de la bulle filtre : - « Les systèmes de recommandation sont donc susceptibles d’enfermer leur utilisateur dans un couloir de « déjà vu », dans un univers spécialisé qu’il connaît et apprécie déjà. Fini les surprises, l’inattendu et les agréables découvertes qui vous surprennent vous-même, les coups de cœur qui vous sortent de votre zone de confort. » Ménard 2023, p. 88 Toutefois, selon Farchy et Tallec (2023), l’hypothèse de la bulle filtre doit être nuancée et il faut relativiser le pouvoir des algorithmes : 1. D’abord, même quand nous opérons des choix sans l’aide d’un algorithme, nous avons tendance à répéter des choix qui sont relativement semblables et cohérents 2. Les systèmes de recommandation sont « une forme d’incitation — non contraignante » (p. 261) et nous avons toujours une « porte de sortie » (p. 260) : la possibilité de faire nos recherches et choix nous-mêmes 3. Certaines études montrent qu’au contraire, les recommandations ont augmenté la diversité des contenus (p. 253) et la possibilité de découvertes