Sémiologie de la douleur partie2 PDF
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Université de Franche-Comté
Magy-Bertrand
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These notes detail the diagnostic approach to organic pain, distinguishing between nociceptive and neuropathic pain. They cover the characteristics of superficial and deep pain, describing how to assess the location, intensity, and radiating nature of the pain. The document also emphasizes the importance of understanding the role of the nervous system in pain perception and different types of neuropathic pain.
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UE Sémiologie générale Binôme 11 : Docs and Roll Pr. Magy-Bertrand 30/09/21 10h à 11h Démarche diagnostique devant une douleur organique On va voir comment on procède au lit du malade, comment interroger un malade qui souffre. I. Douleur nociceptive On peut distinguer 2 types de douleur (il est important de faire préciser rapidement si la douleur est superficielle ou profonde : une douleur superficielle est facilement traitable, contrairement à une douleur profonde) : Plus la douleur est profonde plus la prise en charge doit être rapide, seule exception la brûlure qui est superficielle mais doit être vitre traitée. - La douleur superficielle : issue des structures cutanées ou immédiatement sous-cutanées. Elle est en général décrite comme une brûlure ou une piqûre. Elle est localisée en un point précis par le patient du bout des doigts, il est capable de la localiser facilement : « ça fait mal là ». - La douleur profonde : d’origine viscérale (cœur, poumon…) ou squelettique (fracture). Le patient va dire cette fois : « ça fait mal par-là ». C’est beaucoup moins précis, elle est plus difficile à préciser, à appréhender. Il faut en définir le caractère : sourde (qui n’empêche pas les actes de la vie quotidienne), intense (qui cloue au lit), en paroxysmes (= en pics de douleur : commence sourd, puis intense, puis disparaît, puis redevient sourd, etc.), intensité croissante (ex : début douleur 10h et à midi clouer au lit). Il faut essayer de faire préciser au patient vers ou va se diriger l’irradiation, quelle sensation elle lui provoque (brûlure, coup de poing, coup de poignard…) On va aussi définir comment se présente la douleur avec par exemple : la douleur « comme un coup de poignard » (→ douleur fine, qui transperce) ou « en étau » (→ douleur constrictive, en général poitrine ou poignet). Il faut toujours faire préciser au patient les irradiations d’une douleur profonde (« est-ce que vous avez mal ailleurs ? Est-ce que ça monte/descend ? en arrière/en avant ? sur un côté particulier ? etc.) II. Douleur neuropathique Pas de stimulus nociceptif ici, on distingue : - Les douleurs liées à une lésion intrinsèque d’un nerf périphérique (→ dysfonctionnement de l’axone ou de la gaine de myéline englobante), d’une racine (= groupe de nerfs périphériques), d’un plexus (= groupe de racines), du système nerveux médullaire (= de la moelle épinière = spinale= l’ensemble du système contrôlant le SNP) ou supra- spinal (= au-dessus de la moelle épinière = spinale). → c’est la structure/composition interne du nerf qui est atteinte : on parlera de douleur de désafférentation. Ex : sclérose en plaque (surtout chez la femme) avec disparition de la gaine de myéline autour de l’axone, douleurs de membre fantôme, le fait de perdre un membre mais de toujours avoir des sensations. Un neurone : corps neuronal et un axone, dans l’axone le centre et la gaine de myéline qui permet la conduction du courant nerveux. A savoir que quand on traite une douleur elle peut mettre jusqu’à 18 mois pour disparaître - Les douleurs qui ne sont pas de désafférentation (= ce qui est extrinsèque, mais qui reste du domaine des neuropathies). - Les douleurs de compression radiculaire ou tronculaire (racine ou tronc nerveux) : ▪ Le nerf fonctionne bien mais est comprimé. ▪ Ex : Hernie discale (au niveau de la colonne vertébrale, le disque Intervertébral entre 2 1 UE Sémiologie générale Binôme 11 : Docs and Roll Pr. Magy-Bertrand 30/09/21 10h à 11h vertèbres peut s'abîmer et ressortir de l’espace qui lui est réservé et venir comprimer la racine nerveuse qui sort au même endroit. Par exemple si hernie sort en L4-L5 -> compression du nerf sciatique=> névralgie sciatique) ▪ Ex : Canal carpien (nerf médian du poignet issu de C8 qui innerve la main passe par ce canal et peut être coincé par des tendons environnants épaissis avec âge et/ou en fonction de comment on fait marcher son poignet dans une activité professionnelle, cela entraîne une compression du nerf → fourmillements dans la main et l’avant-bras qui disparaissent le lendemain mais si on laisse les choses se prolonger la main va se rétracter => incapacité à relever la main. L’intervention consiste à libérer le nerf en agissant sur les tendons et en écartant le canal carpien. - Les causalgies : douleurs liées à des atteintes du système nerveux sympathique (qui commande l’érection des poils, la sudation, la vasodilatation des vaisseaux, etc.) => troubles vasomoteurs, troubles trophiques et dépilation. Les douleurs neuropathiques peuvent être continues ou paroxystiques. Survenues en l’absence de lésion tissulaire (muscles ou os intacts mais lésion du nerf donc douleur), elles ont une description évocatrice : un caractère fulgurant, une hyperalgésie, et une apparition retardée par rapport à la lésion (il faut plusieurs mois de lésions pour que les symptômes et douleurs apparaissent). Ex : carence en vitamine B12 ; il faut des années avant que l’on obtienne une sclérose combinée de la moelle. A l'inverse, lorsque l’on corrigera cette carence, il faudra des mois pour retrouver une proprioception normale. Il faudra autant de temps pour refaire tout ce qui a été défait. Quand un nerf commence à s'abîmer, il va moins bien fonctionner mais le patient ne s’en rendra pas forcément compte. Il faut beaucoup de temps pour que le patient le voit. III. Démarche face à un syndrome douloureux organique 1) Interrogatoire (vraiment essentiel) Point essentiel de la démarche diagnostique. (On n’a pas de dolorimètre, on compte sur l’interrogatoire pour essayer d’évaluer la douleur.) Attention : adapter l’interrogatoire à certaines situations, parfois en urgence on n’a pas le temps de faire toutes ces étapes. Démarche diagnostique devant une douleur nociceptive en 7 étapes, et chacune des étapes est importante. A. Siège : 1ère chose = où ? ▪ Localisé, très précis : évoque des douleurs superficielles. ▪ Ou diffus, syndrome du « mal partout » (souvent ce sont des douleurs musculaires, impression d'être passé sous un bulldozer, on n’arrive pas à se lever…). →Le mal partout est plus souvent un mal non organique, une façon pour le patient de globaliser la douleur. Mais plus la douleur est partout, moins c’est grave (sauf exceptions : courbatures diffuses du covid) : à priori on s’oriente plus vers une douleur psychogène. On arrive à démontrer aux patients qu’ils n’ont pas réellement mal partout (pas mal aux lobes de l’oreille, au nez). B. Irradiations Dans le cas où la douleur irradie (ex : rupture de rate qui irradie dans l’épaule gauche, atteinte du 2 UE Sémiologie générale Binôme 11 : Docs and Roll Pr. Magy-Bertrand 30/09/21 10h à 11h foie/ vésicule biliaire irradie dans l’épaule droite), il faut demander dans quelle direction « vers où ?» ou « vers quoi ? » : ▪ Avant/arrière Ex typique de la douleur épigastrique : si elle est épigastrique pure : on pensera à un ulcère de l’estomac, si elle est cette fois épigastrique et irradiante dans le dos : on pensera à une pancréatite aiguë. On recherche la présence de l’ulcère par une gastroscopie et celle de la pancréatite par un scanner abdomino-pelvien. Donc en fonction de si la douleur irradie ou pas on a une orientation différente du diagnostic et différents moyens complémentaires. Attention aussi de bien demander l’irradiation car le patient va toujours indiquer l’endroit où il a le plus mal, il ne commencera jamais par l’endroit où il a le moins mal. ▪ Haut/bas : Ex colique néphrétique : (= migration d’un calcul rénal vers les voies urinaires excrétrices : la vessie) la douleur va suivre le trajet du calcul (rein à OGE). On l’appelle la douleur frénétique car elle évolue par paroxysme croissant. Pour la soulager, le patient va se coucher sur le côté : en « chien de fusil » (replié sur lui-même, genoux vers lui). Position qui est très évocatrice de la douleur de la colique néphrétique. Ex colique hépatique : ici on a la migration de calculs qui sont dans la vésicule biliaire vers les voies biliaires extra-hépatique (cholédoque…). La douleur part de l’hypochondre droit et irradie en écharpe vers l’épaule. Ce n’est pas du tout la même évolution que la colique néphrétique. C’est une douleur sourde, avec de temps en temps un paroxysme. On l’appelle la douleur pathétique, car c’est une douleur progressive. ▪ Douleurs associées (ex : douleur de la poitrine peut correspondre à 4 choses différentes, mais seul l’infarctus du myocarde peut irradier la mâchoire et le bras gauche). Le patient peut consulter pour une douleur épigastrique et avoir en réalité un infarctus ! Donc lorsqu’un patient vient pour douleur épigastrique il ne faut en aucun cas oublier l’hypothèse de l’infarctus myocardique et ne pas hésiter à prescrire une échographie cardiaque et à faire un ECG. Attention aux douleurs projetées car le patient ne viendra pas forcément consulter pour une douleur ressentie au niveau de la véritable zone lésée ! C. Caractère de la douleur ▪ Essai d'obtention des points de comparaison : mal comme quoi ? Est-ce que ça brûle, pique, tort, fait vomir, donne mal à la tête. Est-ce que ça rappelle certaines douleurs ? Il faut essayer de comparer les douleurs, par exemple pour les femmes comparaison à l’accouchement. D. Son intensité ▪ Rappel des douleurs de l'accouchement chez la femme (contractions). ▪ Évoquer le passé douloureux du patient (ça vous fait penser à quel type de douleur ? Vocabulaire pas codifié, par objectif : ça dépend du patient, vocabulaire varié). ▪ Utilisation d’échelle « mal combien de 1 à 10 ? » ▪ Le seuil de douleur diffère selon l’âge, le sexe et le vécu. Faire attention avec l’échelle de 0 à 10 utilisée la plupart du temps, certains patients mentent sur leur chiffre pour être pris en charge plus rapidement aux urgences. E. Mode d’apparition ▪ Brutal (ex: j’étais en train de regarder les infos du 13h et à 13h01 j’ai reçu un coup de sabre dans la 3 UE Sémiologie générale Binôme 11 : Docs and Roll Pr. Magy-Bertrand 30/09/21 10h à 11h jambe et après j’ai plus sentis ma jambe et j’avais atrocement mal) on peut connaître l’heure d’apparition de manière assez précise. ▪ Progressif (lundi j'avais un peu mal, mardi un peu plus et mercredi c’est devenu intolérable). ▪ Intermittent (ex : patient qui avait mal mais qui n’a plus mal, ne sais pas pourquoi il a mal n’a pas trouvé de facteur déclenchant. Typique chez le dentiste ou le patient a eu mal pendant 10j et maintenant ne sais plus où il a mal.) Il faut aller voir le médecin le plus tôt possible après l’apparition de la douleur pour la caractériser au mieux (plus on attend, plus les explications seront vagues, moins le médecin pourra savoir de quoi il s’agit). F. Facteurs déclenchants (à ne pas négliger !) ▪ Repas (ex : Pesanteur gastrique après le repas, donc du mal à digérer si prend un trop gros repas par ex). peut déclencher une douleur abdominale « j’ai trop mangé, j’ai mal au ventre » ▪ Position (assis, baissé, ex : lumbago). ▪ Exposition solaire (coup de soleil : risque de brûlure) ▪ Mouvement (différentes positions, le patient dira parfois qu’il ne peut plus faire un mouvement et le fera devant le médecin pour lui expliquer). « Je déménage » d’un coup en bougeant des objets lourds on se fait mal au dos. ▪ Médicaments (ex: phénomène de raynaud: maladie où les doigts deviennent blancs qu’on traite par un vasodilatateur pour éviter la vasoconstriction. Celui-ci va agir sur tout le corps et peut donc donner un migraine au niveau de la tête. G. Facteurs soulageants (à ne pas négliger non plus !) ▪ Position : comment arrive le patient (penché, se tenant le dos, droit) Ex : position pour soulager une colique néphrétique (calcul qui fait très mal, surtout à chaque fois qu’il bouge) : allongé en chien de fusil, sur le côté qui fait mal, genoux repliés, aussi appelée « frénétique » (augmente jusqu’à un maximum puis diminue et ça recommence). Ex : La colique hépatique (progression de calcul originaire de la vésicule biliaire et qui vont progresser dans les voie hépatique) qui est appelée « pathétique » On peut avoir une douleur sur l’épaule droite, ce sont des douleurs sourdes et progressives. ▪ Médicaments Souvent les gens viennent aux urgences pour des douleurs mais ils n’ont rien pris pour se soulager, même pas du paracétamol, comme du Doliprane, qui augmente la production de NP (attention, il ne faut pas non plus tomber dans de l’automédication excessive). Une fois aux Urgences, le nombre de médicaments pris est un indicateur de l’intensité de la douleur. ▪ Repas En cas d'ulcère gastrique (= érosion de la paroi de l’estomac) : on est sensible à l'hyperacidité (acide chlorhydrique) de l'estomac. Plus on se situe à distance du repas, plus l'acidité augmente (douleur max à distance du repas) → le patient a mal et est soulagé quand il a mangé (car le repas va agir comme un tampon). Faim douloureuse/fringale douloureuse : manger va atténuer la douleur. 4 UE Sémiologie générale Binôme 11 : Docs and Roll Pr. Magy-Bertrand 30/09/21 10h à 11h H. Mais ce n’est pas si simple… ▪ En général : les réponses des patients sont souvent vagues, évasives, « à côté de la plaque » imprécision souvent = véracité (le rôle du médecin est donc de faire préciser les réponses du patient). ▪ Apprendre également à se méfier du patient trop précis, précision livresque… (attention à internet, liste de symptômes de la maladie que le patient croit avoir et s’attribue la maladie à partir de 2 ou 3 signes qu’il a). ▪ Difficultés pour le patient de mettre en forme la douleur qui le concerne (sauf s’il est médecin ou fait partie du corps médical), l’entourage lui y parvient mieux. ▪ Il faut s’adapter au patient que l’on a en face de nous, adapter notre langage, la façon de présenter les choses ! Essayer d'aider le patient: ça vous fait mal comme quoi ? Ou comme si quoi ? Certaines douleurs sont néanmoins décrites de manière identique par l'ensemble des malades : ▪ Douleur angineuse : douleur de l’angine de poitrine (= angor, spasme des artères coronaires), constrictive, en étau. Mains en crochet. Douleur thoracique, souvent associée au bras gauche irradiant vers les carotides -> typiques pré-infarctus du myocarde (urgence, plus on agit tôt moins on aura de dégâts). ▪ Douleur ulcéreuse : crampe épigastrique avec une sensation de fringale douloureuse (soulagée par la prise du repas). ▪ Douleur de perforation d'un organe creux : ulcère qui n’a pas été diagnostiqué, coup de poignard, transfixiante (exemple de l’ulcère qui perfore l’estomac si il est non traité, douleur dans le dos). ▪ Douleur du zona (infection par une réactivation du virus varicelle-zona) : sensation de brûlure, cuisson mais rien de visible (ne s’attrape que si le patient (âgé) a eu la varicelle, se manifeste sur le trajet d’un nerf et peut laisser des séquelles : une éruption cutanée et vésicules apparaît plus tard, similaire à la varicelle sur le trajet du nerf, tel que le nerf intercostal) → il faut souvent poser le diagnostic sans les vésicules, ne pas hésiter à attendre un jour ou deux pour vérifier qu’elles apparaissent bien, sinon il faudra sûrement se projeter sur un autre diagnostic. => Le zona est très contagieux /!\ ▪ Douleur névralgique : décharge électrique, morsure, coups de dysesthésie (douleur neurogène). ▪ Douleur de l'embolie artérielle (= caillot dans une artère qui obstrue, ≠ de la phlébite qui est une embolie veineuse) : coup de sabre, coup de fouet (douleur brutale et très intense, très précise + horaire précis), jambe qui blanchit. ▪ Douleur de brûlures mictionnelles : « pisser des lames de rasoir » infection urinaire, impression de brûlure lors de la miction. 2) Opposition douleur organique/psychogène 5 UE Sémiologie générale Binôme 11 : Docs and Roll Pr. Magy-Bertrand 30/09/21 10h à 11h Douleur fonctionnelle = traduction d'un état anxio dépressif qu'il faut savoir dépister ! (Il faudra peut-être envisager une orientation psychologique…) Le faire de manière subtile, pour pas qu’il ne croie qu’on le prend pour un fou, mais il faut prendre en compte le patient et croire en lui. 3) Conclusion ▪ Douleur trompeuse qui peut être localisée à un endroit mais qui trouve son origine à un autre endroit (ex : infarctus du myocarde, colique hépatique). ▪ Patient trompeur (volontaire ou non) ; le médecin peut se tromper aussi ! ▪ Imprécision du patient = source de sa bonne foi. ▪ Interrogatoire = élément-clef du diagnostic pour faire progresser la démarche (même si parfois il est difficilement réalisable). ▪ Avec contre-interrogatoire (histoire du patient reproductible d’un médecin à l’autre) si les versions changent beaucoup, c’est un manque de crédibilité. 6