Géodynamique interne (Géologie) PDF
Document Details
Uploaded by AccessibleMandelbrot
Université Sidi Mohamed Ben Abdellah
2024
Hachem SMAILI
Tags
Related
- Géodynamique Externe - Licence 1 - Université Felix Houphouët Boigny (PDF)
- Cours 1ère Année Bac Sciences Mathématiques et Expérimentales - Les Phénomènes Géologiques Externes - PDF
- Découverte Science de la Terre CM1 PDF
- Découverte Science de la Terre CM1 PDF
- Volcanisme - Cours PDF
- Examen de Géodynamique Interne PDF - Session Normale S1 2022
Summary
Ce document est un support de cours sur la géodynamique interne. Il détaille la théorie de la dérive des continents et les arguments qui la soutiennent, notamment morphologiques, paléontologiques, paléo-climatiques et géologiques. Il aborde ensuite la chaleur interne de la Terre, ses origines (chaleur initiale, différenciation, cristallisation) et les manifestations de cette énergie à la surface du globe.
Full Transcript
Université Sidi Mohamed Ben Abdellah Faculté des Sciences Dhar El Mahraz- Fès B.P. 1796 Fès – Atlas (Maroc) Département des Sciences de la Terre BCG (S2) ---------------------------------- Support de c...
Université Sidi Mohamed Ben Abdellah Faculté des Sciences Dhar El Mahraz- Fès B.P. 1796 Fès – Atlas (Maroc) Département des Sciences de la Terre BCG (S2) ---------------------------------- Support de cours Module de la Géodynamique (Géodynamique interne) Pr. Hachem SMAILI Année universitaire : 2023/2024 CHAPITRE I : LA DERIVE DES CONTINENTS I- INTRODUCTION La dérive des continents est une théorie proposée par le physicien météorologue Alfred Wegener, pour tenter d'expliquer, entre autres, la similitude dans le tracé des côtes de part et d'autre de l'Atlantique. Bien que cette similarité ait provoqué de nombreuses spéculations auparavant, ce n'est qu'au début du 20e siècle que les conséquences géologiques d'une dérive des continents ont été formulées de façon précise. En effet, A. Wegener n’était pas le premier à supposer une translation continentale, mais d’autres ont émis avant lui des idées mobilistes. Cependant, le titre de « père de la dérive » revient indiscutablement à Wegener, car il était le premier à étayer son hypothèse par un nombre considérable de « preuves » émanant d’observations très diverses pour en faire une théorie scientifique cohérente. Prises individuellement, ces observations ne suffisent pas à démontrer la validité de l'hypothèse de Wegener, mais c'est l'ensemble de ces preuves qui a donné du poids à sa théorie. Par cette théorie, Wegener avance que « les continents actuels n’étaient qu’un seul et même bloc (Pangée) qui se serait fragmenté. Les parties issues de cette fragmentation se seraient ensuite éloignées les unes des autres au cours des temps géologiques jusqu’à ce qu’elles acquièrent la position actuelle ». II- LES ARGUMENTS APPUYANT LA THEORIE DE WEGENER II.1- Arguments morphologiques : le parallélisme des côtes de l’océan atlantique. La ligne côtière Est du continent américain d’une part, et la ligne côtière Ouest des continents africain et eurasiatique d’autre part, sont parallèles, ce qui suggère que ces deux ensembles constituaient autrefois deux parties d'un même bloc et d’un même continent appelé par Wegener: Pangée (Fig.I-1). Toutes les terres émergées actuellement étaient regroupées jusqu’à la fin de l’Ere primaire (-250Ma) en un supercontinent. Vers -200 Ma, la Pangée se serait séparée en deux supercontinents : Gondwana et Laurasie. Le Gondwana était formé par l'Amérique du Sud, l’Afrique, l’Inde, l’Australie et l’Antarctique. La Laurasie, quant à elle, regroupait l'Amérique du Nord et l'Eurasie. La fracturation se poursuivait alors, jusqu’à l’obtention de la répartition actuelle (Fig.I.2). Fig.I.1 : Position des continents : A - Dans la Pangée de Wegener ; B- Position actuelle 1 Fig.I.2: Évolution de la répartition des continents de la fin du Paléozoïque à l’actuel II.2- Arguments paléontologiques De part et d'autre de l'Atlantique, On retrouve sur les continents actuels, des fossiles similaires de plantes et d'animaux terrestres datant de -240 à - 260 Ma. En regroupant les continents de l'hémisphère sud et en recréant le continent Gondwana, la distribution des différents types de fossiles forme des ensembles continus d'un continent à l'autre (Fig.I.3). Fig.I.3: Répartition de certaines espèces fossiles, témoignant du regroupement des continents qui formaient le Gondwana II.3- Preuve paléo-climatique (les anciennes glaciations) Sur certains continents actuels (Amérique du Sud, Afrique, Inde, Antarctique et Australie), on observe des dépôts glaciaires datant d’environ 250 millions d'années. La répartition sur la Pangée montre que le pôle Sud était recouvert d'une calotte glaciaire et que l'écoulement de la glace se faisait en périphérie de la calotte, comme il se doit. Cette glaciation contemporaine sur ces continents, actuellement éloignés et se trouvant pour la plupart dans des zones tropicales, ne peut être expliquée que s’ils étaient regroupés en un seul continent (Fig.I.4). 2 Fig.I.4: Répartition de la calotte glaciaire à 250MA (A) et à l’actuel (B) II.4- Correspondance des structures géologiques. La présence des blocs continentaux précambriens (boucliers) d’âge supérieur ou égale à 2 Milliard d’années, aussi bien en Afrique qu’en Amérique du Sud, témoignent d’une correspondance des structures géologiques entre ces deux continents, et appuie l'argument de Wegener de l'existence du méga-continent qui est la Pangée qui se serait disloqué (Fig.I.5) Fig.I.5: Répartition de certains boucliers, témoignant du regroupement des continents qui formaient le Gondwana. La correspondance des structures géologiques entre l'Amérique du Nord et l'Europe confirme l'idée de Wegener. Les trois chaînes de montagnes, Appalaches (Est de l'Amérique du Nord), Mauritanides (nord-est de l'Afrique) et Calédonides (Iles Britanniques, Scandinavie), ne formaient qu'une seule chaîne continue. on savait depuis longtemps qu’elles ont des structures géologiques identiques et se sont formées en même temps entre -470 et -350 Ma (Fig.I.6). Fig.I.6 : Correspondance de certaines chaines de montagnes entre l’Amérique du nord, l’Europe et l’Afrique. 3 III- LE REJET DE LA THEORIE DE WEGENER La force de la théorie de Wegener reposait sur la qualité et le nombre d’arguments de toutes natures qu’il avait proposé pour établir la continuité des continents actuellement séparés par des océans, et leurs positions géographiques au cours de leurs déplacements. En effet, Wegener s’est appuyé sur des preuves d’ordre morphologique, paléontologique, climatique et géologique pour démontrer que les continents actuels ne formaient autrefois qu’un seul méga-continent vers -240 MA, sans qu’il puisse déterminer avec précision le mécanisme de cette dérive à l’époque. Wegener suggérait, en effet, un glissement des blocs continentaux sur les matériaux constituant les fonds océaniques, sous l’effet de forces liées à la rotation de la Terre. Cependant, ni le comportement des roches, ni les forces évoquées n’apparaissaient compatibles avec de tels mouvements. Ainsi, la théorie de Wegener manquait de preuves quant au « moteur » à l’origine de la dérive des continents. Cette théorie, faute d'un mécanisme explicatif satisfaisant, a donc été dans un premier temps ignorée, puis en 1922, a violemment été rejetée par une majorité de la communauté scientifique. Les raisons de ce rejet sont multiples, dont certaines sont basées sur des faits scientifiques et rationnels. IV- LE PALEOMAGNETISME APPUIE LA THEORIE DE WEGENER Au milieu du 20e siècle, alors que fixistes et mobilistes s'opposent, une découverte majeure vient marquer le début de la confirmation et de la validation de l'hypothèse de la dérive des continents émise par Wegener en 1912, et qui arrive à être définitivement reconnue vers 1970. Il s’agit, en effet, de l’aimantation fossile permanente ou « l'aimantation naturelle rémanente (A.N.R.) », dont le principe se résume dans le fait que certaines roches gardent en mémoire les caractéristiques du champ magnétique terrestre qui régnait à l'époque de leur formation. Si l'on connaît l'âge des roches qui présentent une A.N.R., il devient possible d'établir l'histoire des variations du champ magnétique terrestre. Ainsi, on prélève sur plusieurs continents des roches de même âge. La "mémoire magnétique" de ces roches devrait indiquer la direction des pôles (nord et sud) de cet âge géologique. Or, les directions ne sont pas identiques et ces pôles paléomagnétiques ne peuvent occuper en même temps des positions différentes. Ceci montre que ce ne sont pas les pôles qui ont migré, mais ce sont les continents qui se sont déplacés différemment. Faire coïncider les trajectoires des dérives apparentes des pôles revient à rapprocher les continents les uns par rapport aux autres. La position initiale coïncide parfaitement avec la Pangée de Wegener (Fig.I.7). Fig.I.7: Vue de l'hémisphère Nord centrée sur le pôle Nord magnétique, selon la géographie actuelle et trajectoires apparentes du pôle nord magnétique terrestre sur les continents européen, nord-américain et indien. 4 CHAPITRE II CHALEUR INTERNE DE LA TERRE ET GEOMAGNETISME PREMIERE PARTIE : CHALEUR INTERNE DE LA TERRE I- INTRODUCTION Depuis sa formation il y a 4,5 Ga, la planète terre se refroidit en libérant des quantités considérables de chaleur. Cette chaleur terrestre fournit l’énergie motrice qui anime tous les processus géodynamiques, qu’il s’agisse du fonctionnement des réservoirs magmatiques, des mouvements qui animent le manteau, ou encore de la formation du champ magnétique terrestre et de son maintien pendant plusieurs milliards d’années. De nombreuses manifestations à la surface du globe attestent de la présence de matériaux chauds en profondeur et matérialisent la dissipation de la chaleur qui fait fonctionner la machine Terre. Les sources hydrothermales et les geysers qui libèrent des fluides chauds, mais aussi les éruptions volcaniques qui sont des manifestations ponctuelles et brutales de la libération d'énergie interne, sont des exemples manifestes de transferts de la chaleur des profondeurs du globe vers la surface, associés au lent refroidissement de notre planète. II- LES ORIGINES DE LA CHALEUR INTERNE DU GLOBE TERRESTRE Plusieurs sources de chaleur sont à l'origine de l'énergie interne du globe. II.1- Chaleur initiale de la terre : énergie d’accrétion Cette source de chaleur représentant 20% à 24% de la chaleur totale terrestre, est liée à la constitution même de notre planète, il y a 4,5 milliards d’années. Lors de la formation de la Terre, les poussières du nuage primitif, attirées entre elles sous l’effet des forces liées à la gravité, sont entrées en collision, libérant de l’énergie gravitationnelle, et cette énergie a été transformée sous forme de chaleur pendant la phase d’accrétion de la Terre. Une quantité sans doute considérable d’énergie a été stockée de cette manière a l’intérieure de la Terre. Ainsi, au fur et à mesure que la Terre grossit, la chaleur provenant des bombardements des astéroïdes contre la Terre, n’a plus la possibilité d'être évacuée et s'accumule en entrainant la fusion des matériaux. La chaleur initiale est donc la chaleur terrestre emmagasinée lors de la naissance de la planète. II.2- Chaleur due à un tri gravitationnel : énergie de différenciation Après la formation de la Terre, et une fois la température de fusion du fer a été atteinte, deux liquides immiscibles se forment : l’un constitué de fer ainsi que tous les éléments sidérophiles (fréquemment associés au fer) et un liquide silicaté contenant quant à lui les éléments lithophiles (ayant une affinité particulière pour l’oxygène). Par un processus de tri gravitationnel appelé différentiation, le liquide ferreux, plus dense, va se retrouver au centre de la planète, tandis que le liquide plus léger, silicaté, va se retrouver en périphérie. Ainsi, seront formés le noyau et le manteau terrestre (Fig.II.1). Les frottements produits par ce processus ont produit une chaleur considérable qui, comme la chaleur originelle, ne s'est toujours pas entièrement dissipée. 5 Fig.II.1 : Différenciation de la Terre et énergie associée. II.3- La chaleur latente de cristallisation Ce type de chaleur est en relation avec l’interface du noyau externe et du noyau interne. Le noyau, principalement composé de fer, comporte en effet, une partie externe liquide enveloppant une graine sous un état physique solide. Les réactions de cristallisation se produisant en continu dans le noyau externe sont exothermiques et créent donc de la chaleur. En effet, avec le refroidissement terrestre, le métal liquide en cristallisant à la surface de la graine (avec une vitesse allant de 0.3 à 0.03 mm/an), dégage de la chaleur qualifiée de chaleur latente ou de cristallisation. Cette chaleur bien que très faible, est suffisante pour garder le noyau externe dans un état physique liquide et par conséquent permet d’entretenir des mouvements de convection thermique dans le noyau externe créant le champ magnétique terrestre. II.4- La désintégration d'éléments radioactifs La chaleur de la Terre provient essentiellement de la désintégration naturelle des isotopes radioactifs de certains éléments chimiques. En effet, le noyau atomique instable des isotopes radioactifs se fragmente spontanément en libérant un rayonnement et de l'énergie thermique. Quatre isotopes radioactifs sont abondants dans les roches du globe et dont la désintégration libère de l'énergie en quantité significative : le thorium 232 (232Th), deux isotopes de l'uranium (238U et 235U) et le potassium 40 (40K). Même si le manteau est moins concentré en ces isotopes que la croûte terrestre, il constitue par sa masse énorme, la plus grande source d'éléments radioactifs lui permettant de jouer le rôle prépondérant dans la production d'énergie interne. Remarque : Dans quelques milliards d'années, le noyau et le manteau pourraient se refroidir et se solidifier suffisamment et la Terre deviendra alors une planète froide et morte comme la Lune. Cependant, bien longtemps avant que cela ne se produise, le Soleil se sera probablement transformé en une étoile géante rouge et sera devenu assez volumineux pour engloutir notre planète. À ce moment, la chaleur du manteau de la Terre importera peu. III- DISSIPATION DE LA CHALEUR INTERNE III.1- Flux géothermique Plusieurs manifestations de la dissipation de chaleur sont observables à la surface de la Terre où un flux de chaleur est toujours existant et mesurable en tout point. Le flux géothermique, mesurée W.m-2, correspond à la dissipation d'énergie provenant des profondeurs de la Terre et traversant une surface donnée. Une telle mesure permet d'évaluer le transfert de chaleur de la profondeur vers la surface. Un taux de 95% de la libération d'énergie interne est ainsi dissipé de façon diffuse, les 5 % restants correspondent à des événements localisés brefs et épisodiques : séismes et éruptions volcaniques. 6 Le flux géothermique dont la valeur moyenne est d’environ 60 mW/m2, est très inégalement réparti à la surface de la Terre. On note en effet, des régions présentant un flux élevé, et des zones à faible flux n'excédant pas 20 mW. m-2 (Fig.II.2). Fig.II.2 : Aspects de flux de chaleur à la surface de la Terre III.2- Mécanismes de transfert de la chaleur terrestre L’énergie thermique produite par le globe terrestre est transférée au sein des différentes enveloppes selon des modalités diverses : III.2.1- La conduction La conduction correspond à un transfert de chaleur de proche en proche. Il n'y a pas, dans ce cas, de déplacement de matière (Fig.II.3). L'échange thermique entre une région chaude et une région voisine plus froide est dû à des phénomènes physiques microscopiques (agitation des atomes ou des molécules, flux d’électrons libres…). Cet échange peut être vu comme un transfert d’énergie des particules les plus énergétiques (les particules chaudes ayant une énergie de vibration élevée) vers les particules les moins énergétiques (les particules froides d’énergie de vibration moins élevée), dû aux collisions entre particules. Ce processus de transfert de chaleur est réalisé essentiellement au niveau des milieux solides. À l’échelle du globe, il intéresse surtout la lithosphère à comportement rigide et les limites des enveloppes de la Terre. L’ampleur du mécanisme de conduction dépend de la conductivité thermique des roches. Ainsi, et puisque les roches de la croûte n'étant pas de bons conducteurs de chaleur, celle-ci doit avoir du mal à s'évacuer. III.2.2- La convection La convection est un transfert thermique s’accompagnant de la mise en mouvement de la matière. Elle se met en place lorsque le matériau a le comportement d’un fluide ou solide visqueux et que, du fait d’un apport énergétique supérieur à ce qu’il peut évacuer par conduction, le matériau situé à la base s’échauffe, devient moins dense que le reste du matériau situé au-dessus et entame son ascension (Fig.II.3). Dans un fluide, ce processus se base donc sur les différences de température, qui produisent des différences de densité entrainant des mouvements de la matière, dits mouvements de convection. A l’intérieur de la Terre, considérée comme une sphère, existe une convection lente dans le manteau à l'origine des remontées et des descentes asthénosphériques. Celles-ci sont à l'origine de la dynamique lithosphérique et donc aussi à l'origine des manifestations de surface. Ces cellules de convection sont repérables par tomographie sismique. De part et d'autre de cette zone convective, existent deux couches où règne la conduction : la lithosphère et l'interface noyau/manteau. C'est la conduction à travers la lithosphère qui est responsable du flux géothermique mesuré. 7 Ainsi, l'énergie interne est efficacement transférée par convection de la profondeur vers la surface puis dissipée par conduction à travers la lithosphère, ce qui entraine un refroidissement très progressif du globe. La convection est donc, un mouvement de matière initié par un contraste de densité ici d’origine thermique. La convectabilité du manteau pose un problème physique en relation avec sa nature solide. Lord Rayleigh a montré que la « convectabilité » d'un système dépend de 6 facteurs : α, ΔT, g, h, κ et ν, définissant un rapport appelé « nombre de Rayleigh (Ra) » : 𝑅𝑎 = 𝛼. 𝛥𝑇. 𝑔. ℎ3 / 𝜅. 𝜈 α : coefficient de dilatation thermique de la péridotite (K−1) ΔT : différence de T° entre le sommet et la base du manteau (K) g : Accélération de la pesanteur (m.s−2) h : Epaisseur du manteau (hauteur de la couche aux limites de laquelle est mesurée la différence de température ΔT (m) κ : (kappa) : diffusivité thermique de la péridotite. Elle quantifie la capacité à transmettre l'énergie thermique d'un point à un autre (m2.s−1). ν : (nu) : viscosité cinématique du manteau asthénosphérique (m2.s−1) Si le nombre de Rayleigh est inférieur à une valeur critique voisine de 10 3, il n'y a pas de convection thermique mais seulement de la conduction. Si ce nombre est supérieur à cette valeur critique, il y a convection. La prise en compte des différents paramètres (α, ΔT, g, h, κ et ν) et de leur gamme de valeurs mesurées/estimées, aboutit pour le manteau terrestre, à un nombre de Rayleigh 106 < Ra < 108, supérieur à la valeur critique : la physique affirme donc que le manteau doit être affecté de mouvements de convection. A l’échelle du globe terrestre, il s’est avéré qu’il existe une convection à deux étages: Une convection très lente à l'état solide pour le manteau, Une convection très rapide à l'état liquide dans le noyau externe (source du géomagnétisme). Fig.III.3 : Mécanismes de transfert de chaleur III.3- Gradient géothermique et géotherme III.3.1- Gradient géothermique Il mesure la variation de la température en fonction de la profondeur. Le gradient moyen dans la lithosphère est d’environ 3°C tous les 100 mètres (30°C/Km), mais il est variable selon les régions. En effet, dans les régions géotectoniques stables, il n’est que de 1,5 à 2° C pour 100 m, tandis que dans les zones actives, il atteint jusqu’à 6 à même 10°C pour 100 m. III.3.2- Géotherme Il représente la courbe régulière de variation de la température en fonction de la profondeur (ou de la pression), tandis que le gradient géothermique est la pente du géotherme à une profondeur donnée. 8 III.3.3- Evolution du gradient géothermique à l’intérieur du globe terrestre Si on considère que le gradient géothermique (30°C/Km) était le même jusqu’au centre de la Terre (6400 km environ), la température interne au centre du globe serait de 192 000°C. Cependant, les calculs montrent que la température atteint 3500°C à la base du manteau inférieur, 5000°C au niveau de la discontinuité de Lehmann (limite noyau externe/noyau interne), et 5100°C au sein de la graine. Ces données attestent que l’évolution du gradient géothermique est en rapport avec les modes de transfert thermique. En effet, si la chaleur se transmet par conduction près de la surface, elle se transmet autrement en profondeur, par convection, ce qui homogénéise la température et limite très fortement son augmentation avec la profondeur (Fig.II.4). Remarque : Le gradient géothermique est une mesure qui se fait de haut en bas (de la surface vers la profondeur). Cependant, le flux géothermique est une mesure qui prend en compte la perte de chaleur de la Terre et représente donc une mesure qui se fait du bas vers le haut. En utilisant les données de la sismologie, combinées aux apports des études de laboratoire sur les caractéristiques physiques des minéraux terrestres soumis à haute pression et haute température, on peut modéliser l'évolution de la température avec la profondeur, comme l’illustre la figure II.4. Quand un gradient géothermique est fort (comme dans la lithosphère), cela signifie qu’en s’enfonçant profondément, on rencontre des matériaux de plus en plus chauds : la chaleur a donc été mal répartie dans les roches concernées. Ainsi, la valeur élevée du gradient géothermique dans les couches superficielles du globe est en relation avec le fait que l'essentiel de la chaleur interne y est transmis par un mode peu efficace qu’est la conduction, à travers des roches dont la conductibilité thermique est mauvaise. En revanche, quand un gradient est faible (comme dans le manteau), cela signifie que même si la profondeur augmente, la température est quasiment la même : la chaleur a donc été bien répartie dans l’ensemble de la couche concernée. Ainsi, dans le manteau terrestre, le gradient géothermique particulièrement faible (0,3 à 0,5 °C.km-1) est relation avec la convection représentant à ce niveau, le mécanisme dominant de l'évacuation de la chaleur interne. On constate donc que la température n'augmente très fortement avec la profondeur que dans deux zones restreintes : la lithosphère et au niveau de la couche D’’ (limite manteau/noyau). Ces deux zones correspondent à ce que les physiciens appellent des « couches limites thermiques ». Fig.II.4 : Évolution de la température de la Terre (en °C) en fonction de la profondeur (en km). 9 CHAPITRE II/ DEUXIEME PARTIE : GEOMAGNETISME I- NOTION DE CHAMP MAGNETIQUE Le terme de champ magnétique désigne une région de l'espace soumise à l'action d'une force provenant d'un aimant. Ce champ est matérialisé par les lignes de force dont l’ensemble constitue le spectre magnétique. Les lignes de champ magnétique sont toujours orientées du pôle nord magnétique d’où elles sortent, vers le pôle sud magnétique au niveau duquel elles se rendent (Fig.II.5A). Leur espacement révèle l’intensité relative du champ magnétique ; en effet, plus les lignes sont rapprochées, plus le champ magnétique est fort. Expérimentalement, les limailles de fer permettent de visualiser les lignes imaginaires d’un champ magnétique droit en épousant leur direction (Fig.II.5B). Un champ magnétique se produit lorsque des charges électriques sont en mouvement. Autrement dit, seule l’électricité dynamique peut engendrer un champ magnétique qui ne peut exister donc que si le courant circule. Il existe donc un lien entre l’électricité et le magnétisme et c’est ce qui est appelé électromagnétisme. Fig.II.5 : A- Les lignes de champ magnétique sortant du pôle nord magnétique et se rendant au pôle sud ; B- les lignes de champ magnétique matérialisées par de la limaille de Fer. II- CHAMP MAGNETIQUE TERRESTRE II.1- Origine du champ magnétique terrestre La Terre, comme la plupart des planètes du système solaire, possède un champ magnétique appelé champ géomagnétique (Fig.II-6A) pouvant être détecté par les boussoles et dont l’origine est principalement interne. En effet, on considère que le champ magnétique terrestre est engendré par les mouvements de convection du noyau externe de la planète Terre, constitué de métal liquide (essentiellement Fe et Ni). Ainsi, le dégagement de la chaleur crée des mouvements du fluide conducteur (métaux ionisés) du noyau externe par convection, et dont la vitesse contraste avec celle de la rotation de la Terre, ce qui entraine des frottements générant des courants électriques induisant à leur tour un champ magnétique (Fig.II-6B et 6C). Le noyau liquide fonctionne donc comme une dynamo auto-excitée (on dit aussi auto-entretenue). 10 Fig.II-6 : A-Champ magnétique terrestre et position des pôles magnétique et géographique ; B et C- Relation entre le géomagnétisme et le courant électrique créé par les courants de convection. II.2- Caractéristiques du champ magnétique terrestre Le champ magnétique terrestre est une quantité vectorielle et possède donc, à chaque point de l'espace, une intensité et une direction particulières. Ainsi, l’orientation que prend une aiguille aimantée montre que celle-ci est sensible à cette grandeur orientée appelée vecteur champ magnétique désigné traditionnellement par B. II.2.1- Direction et sens du champ magnétique terrestre Le champ magnétique terrestre d'un lieu est caractérisé par un vecteur champ magnétique B ayant pour direction et sens ceux de l’axe SN de l'aiguille aimantée (Fig.II-7). On appelle méridien magnétique d'un lieu le plan vertical contenant le vecteur champ magnétique terrestre B en ce lieu. Il ne se confond généralement pas avec le méridien géographique du lieu, plan défini par la verticale du lieu et la ligne des pôles terrestres ; ceci revient à dire que l'horizontale GM du méridien magnétique n'a pas tout à fait la direction de l'horizontale GK qui indique le Nord géographique. La valeur du champ magnétique se mesure à l’aide d’un teslamètre qui, placé en un point de l’espace, donne la valeur du champ en ce point, et la valeur mesurée est exprimée en Tesla. II.2.2- Déclinaison et inclinaison magnétiques L'angle D que fait le méridien magnétique avec le méridien géographique est appelé déclinaison magnétique du lieu considéré (Fig.II-7). La déclinaison est dite occidentale (négative) ou orientale (positive) suivant que le méridien magnétique est à l'ouest ou à l'est du méridien géographique (Fig.II-8B). L’axe du champ magnétique terrestre se modifie au cours du temps en fonction des mouvements du noyau terrestre, ce qui induit des variations de la déclinaison magnétique. L'axe géomagnétique, passant par les deux pôles magnétiques, fait un angle de 11,5° par rapport à l'axe de rotation de la Terre et de ce fait, le pôle nord magnétique (NM) est à environ 1000km du pôle 11 nord géographique (NG) (Fig.8-A), mais il se rapproche actuellement du pôle nord géographique à une vitesse moyenne de 40 km/an. Fig.II-7 : Caractéristiques du champ magnétique terrestre Fig.II-8 : A- Position du pôle nord magnétique par rapport au pôle nord géographique ; B- Déclinaison magnétique occidentale et orientale L'inclinaison magnétique d'un lieu est l’angle I que fait le vecteur champ magnétique B avec l'horizontale (Fig.II-7). Elle est positive quand le pôle nord de l'aiguille aimantée pointe vers le sol, c’est le cas dans l’hémisphère Nord, et elle est négative dans le cas contraire. II.2.3- Influence du champ magnétique terrestre II.2.3.1- La magnétosphère Le champ magnétique terrestre est approximativement assimilable à celui d'un aimant droit placé au centre de la Terre. L’interaction de ce champ terrestre et le vent solaire développe une couche entourant la planète sous forme d’un bouclier protecteur appelé magnétosphère située entre 800 à 1000 km d'altitude. Il s’agit donc de l’interface entre le milieu interplanétaire et la haute atmosphère terrestre, formant une vaste région évoluant sous le contrôle du champ magnétique terrestre (Fig.II-9). 12 Fig.II-9 : Structure de la magnétosphère sous l’influence des vents solaires: aplatie du côté soleil et allongée du côté opposé. La magnétosphère, créée par le champ magnétique terrestre, joue un rôle essentiel pour le développement de la vie sur la Terre en déviant les particules de haute énergie du vent solaire et des rayons cosmiques. Ceci a permis à l’atmosphère terrestre de se maintenir au cours du temps, contrairement à ce qui s’est passé sur Mars, où en l’absence d’un champ magnétique important, le vent solaire a arraché à son passage, une grande partie de l’atmosphère de cette planète. La forme de la magnétosphère à caractère dynamique est déterminée par deux facteurs : l'intensité du vent solaire et l'intensité du champ magnétique terrestre. Ainsi, sa forme et sa densité varient considérablement, et plus le vent solaire est fort, plus la magnétosphère sera comprimée. Le champ magnétique terrestre a la capacité d'arrêter la majeure partie des rayonnements cosmiques et les particules chargées provenant du Soleil, à l'exception des pôles lorsque l'afflux de ces particules est trop massif (par exemple suite à une éruption solaire). En effet, lorsque ces particules parviennent à se glisser jusqu'à notre atmosphère, une des interactions avec cette dernière peut entrainer la formation d'aurores polaires. Ces dernières sont provoquées par l'interaction entre les particules chargées du vent solaire et la haute atmosphère, et se produisent principalement dans les régions proches des pôles magnétiques. Ces aurores qualifiées de phénomène lumineux atmosphérique, sont appelées aurores boréales dans l’hémisphère nord et australes dans l’hémisphère sud. II.2.3.2- Paléomagnétisme et inversions magnétiques II.2.3.2.1- Enregistrement du champ ambiant dans les minéraux En plus de son influence sur certains animaux, le champ magnétique terrestre influe également sur les roches. Ainsi, lorsqu'une roche se solidifie, les minéraux ferromagnétiques présents s'orientent en fonction du champ magnétique terrestre ambiant et conservent cette orientation (on parle alors de rémanence thermomagnétique). Dans cette optique, les minéraux ferromagnétiques du basalte et autres roches ignées peuvent préserver la direction du champ magnétique de la Terre lorsque ces minéraux refroidissent à leur température de Curie (température au-delà de laquelle le magnétisme d’un matériau se perd). La température de Curie de la magnétite (Fe3O4) contenu dans les roches basaltiques, est d'environ 580 °C, alors que la plupart des basaltes sont complètement cristallisés à des 13 températures supérieures à 900 °C. Cette caractéristique confère à ces roches la faculté de fossiliser et de garder en mémoire les propriétés du champ magnétique terrestre régnant au cours de leur formation (Fig.II-10). Fig.II-10 : Orientation de l’aiguille aimantée d’une boussole selon sa distance à un basalte Avec un magnétomètre, le sens et l’intensité du champ magnétique régnant peuvent être détectés et mesurés. Le paléomagnétisme est l’étude de l'histoire du champ magnétique terrestre, qui pourrait ainsi être reconstituée en étudiant l’aimantation thermorémanente fossilisée dans les roches. II.2.3.2.2 Les inversions magnétiques Les études paléomagnétiques entreprises sur des roches d’origine volcanique, ont permis de mettre en évidence des directions d’aimantations variables. Certaines mesures indiquaient une aimantation dans le même sens que le champ magnétique actuel, et dans ce cas les intensités actuelle et celle fossilisée s’ajoutent et donnent une anomalie magnétique positive. Dans le cas où les champs magnétiques actuel et fossilisé ont des sens opposés, leur intensité se retranchent et engendrent alors une anomalie magnétique négative (Fig.II-11). Fig.II-11 : Illustration des anomalies magnétiques négatives et positives 14 Ces observations ont été à l’origine de la naissance de l'idée que le champ magnétique terrestre puisse s'inverser de façon épisodique. Cette hypothèse a été étayée au fil du temps et il existe aujourd'hui des échelles de polarités magnétiques recensant et datant les différentes inversions ayant eu lieu au cours de l'histoire de la Terre. Ainsi, on est arrivé à établir une chronométrie précise des inversions du champ magnétique terrestre. Cette échelle de temps, intitulée « magnétostratigraphie » est actuellement couplée à la datation absolue d'évènements ponctuels et s'est notamment révélée très utile dans l'établissement d'une chronologie relative, car le signal magnétique est indépendant du milieu, global et précis. Ces échelles définissent des périodes de polarité « normale » correspondant à des anomalies positives dues à une aimantation acquise dans le même sens que le champ actuel, et par conséquent les deux valeurs s'ajoutent. En revanche, les périodes de polarité « inverse » correspondent à des anomalies négatives dues à une aimantation dans un champ opposé au champ actuel, lors d'une inversion des pôles et ainsi, les deux valeurs se retranchent. Ces variations de polarité magnétique en relation avec le phénomène des inversions ne sont ni régulières ni de durées égales. Une échelle des inversions du champ magnétique, qui se sont produites au cours des cinq derniers millions d'années a été établie (Fig.II.12) et montre la succession des périodes de polarité normale et celle inversée correspondant respectivement aux anomalies positives (en noir) et d’autres négatives (en blanc). Fig.II-12 : Echelle des inversions du champ magnétique au cours des cinq derniers millions d'années. (Les différentes époques magnétiques sont désignées par les noms des géomagnéticiens célèbres : Brunhes, Matuyama, Gauss, Gilbert). 15 L'inversion du champ magnétique terrestre est un phénomène récurrent dans l'histoire géologique terrestre. Ce phénomène est le résultat d'une perturbation de la stabilité du noyau de la Terre pouvant modifier ses structures convectives. Le champ magnétique s’affole alors pendant une courte période (de 1000 à 10 000 ans) au cours de laquelle les pôles magnétiques se déplacent rapidement sur toute la surface du globe. Au cours de cette transition, les pôles magnétiques semblent suivre des trajectoires complexes et sinueuses en association avec une diminution drastique de l'intensité du champ magnétique, mais sans que celui-ci disparaisse complètement. Cette forte chute de l'intensité du champ magnétique peut entrainer une exposition de la surface de la planète au vent solaire, potentiellement dangereuse pour les organismes vivants. À la fin de cette période de transition, soit que les pôles magnétiques reprennent leurs positions initiales, et dans ce cas on considère qu’il s'agit seulement d'une excursion géomagnétique (considérée comme une inversion avortée), soit que ces pôles permutent et là on parle d'inversion. Le champ terrestre s'est inversé environ 300 fois ces derniers 200 millions d'années. La dernière inversion est survenue il y a 780 000 ans et la dernière excursion il y a 33 000 ans. III-CONCLUSION La Terre s'est formée par accrétion et ce sont essentiellement des matériaux en fusion qui la composaient à l'origine. De cette formation sont nées les différentes enveloppes qui la constituent aujourd'hui. Dès lors, la Terre s'est refroidie, rapidement pour la croûte, et plus progressivement pour ses couches plus profondes. Plusieurs manifestations de la dissipation de chaleur sont observables à la surface de la Terre. Outre les manifestations violentes (tremblements de terre, volcans...), la surface du globe se caractérise par l'existence d'un flux de chaleur inégalement réparti à la surface de la Terre, mais mesurable en tout point. Ce flux géothermique correspond à la chaleur ayant diffusé par conduction à travers les roches de la croûte. Les différences de température, de composition et de pression qui se produisent avec le noyau externe, provoquent un mouvement convectif du fluide. De plus, la force de Coriolis agissant sur le fluide organise ce mouvement en rouleaux alignés avec l’axe de rotation de la Terre. Le courant électrique est généré à l’intérieur de chaque rouleau, qui est la source de son champ magnétique. Comme ces champs magnétiques agissent dans la même direction, leur effet s’ajoute pour créer le champ géomagnétique global qui s’étend loin dans l’espace et protège l’atmosphère de notre planète contre le vent solaire. 16 CHAPITRE III L’EXPANSION DES FONDS OCEANIQUES I- INTRODUCTION La théorie de la dérive des continents présentée par Alfred Wegener en 1912 n’a pas été reconnue par la communauté scientifique faute d'un mécanisme explicatif satisfaisant, relatif aux moteurs des déplacements des continents, malgré la présentation d’arguments de nature diverse. Par ailleurs, ces arguments reposaient uniquement sur l'observation des continents, alors que les fonds océaniques représentant les deux tiers de la surface terrestre et dont la connaissance est cruciale pour appréhender la Terre dans son ensemble, restaient largement inexplorés. Grâce au développement de la géophysique marine, de l'océanographie et des techniques de reconnaissance sous-marine (échosondeur, écoute sismique, détection magnétique), les fonds marins commencent à être explorés, ce qui a permis de mettre en évidence des différences fondamentales entre la lithologie des océans et celle des continents. La découverte progressive des fonds marins va permettre ainsi à d’autres idées mobilistes, de s'implanter. En effet, l’hypothèse de l’expansion des fonds océaniques surgit et permettra de réactualiser l’idée d’une mobilité horizontale en constituant une étape importante sur la voie de la tectonique des plaques. II- HYPOTHESE DE L’EXPANSION DES FONDS OCEANIQUES II.1- Données en faveur de l’expansion des fonds océaniques II.1.1- Topographie des fonds océaniques Le relief sous-marin, ou topographie sous-marine, qui constitue 71% de la surface de la Terre, représente l’ensemble des irrégularités qui forme les planchers des mers et des océans. L’exploration des fonds océaniques montre que leur morphologie est variée. La distance au continent, la profondeur de l'eau et la variation de la pente topographique permettent de définir plusieurs zones de reliefs (Fig.III-1): II.1.1.1- Plateau continental Le plateau continental, appelé aussi plate-forme continentale, est le prolongement du continent sous la surface de la mer ou de l'océan. Cette zone, dont la profondeur varie entre 150 et 200 m, est généralement plane et légèrement inclinée vers le large. II.1.1.2- Le talus continental Cette zone de profondeur pouvant atteindre 3000 m environ, est un relief qui marque la fin du plateau continental. Elle diffère de ce dernier par une pente importante et bien marquée. La rupture de pente marquant le talus continental assure le glissement des sédiments provenant de l’érosion des continents. Ce talus est parfois entaillé de profonds canyons ou vallées sous-marines. Le plateau continental et le talus continental formant deux zones de la topographie sous-marine, sont en réalité des zones appartenant au domaine continental, et sont donc à rattacher à la marge continentale couverte par l’océan. 17 II.1.1.3- La plaine abyssale La plaine abyssale est une vaste dépression à tendance plane qui s’étend au pied du talus continental. Sa profondeur est de l’ordre de 5000 m. Elle est tapissée de sédiments plus ou moins épais reposant sur une croûte océanique de nature volcanique. II.1.1.4- Les dorsales médio-océaniques Une des premières surprises résultant de l'exploration des fonds marins est la révélation d'une topographie très caractéristique. En effet, sur la carte topographique des fonds marins, apparaît un très vaste système de montagnes sous-marines appelées dorsales ou rides médio-océaniques s'élevant au sein des plaines abyssales, souvent en leur milieu. Ces dorsales océaniques, abondamment fracturées, tissent à la surface du globe un réseau de près de 65 000 km de chaînes montagneuses, dominant ces plaines de 2000 à 3000 m, larges de 500 à 1500 km, et sont parfois occupées par un fossé central, ou «rift ». Ce dernier est limité par des failles dont la nature témoigne d’une zone de distension. Les dorsales médio-océaniques sont constituées exclusivement de roches volcaniques (basaltes essentiellement). II.1.1.5- Les fosses océaniques Une fosse océanique est une longue dépression sous-marine, profonde de plusieurs milliers de mètres, longeant des continents ou des archipels volcaniques. La fosse des Mariannes, située le long de l’archipel des îles Mariannes dans l'océan Pacifique, est la fosse sous-marine la plus profonde du monde, avec 11034 mètres. Toutes les fosses océaniques sont le siège d'une importante activité sismique. N.B : Par opposition à la marge passive, la marge active est une marge continentale marquée par une fosse océanique (Fig.III-1). Fig.III-1 : Topographie des fonds océaniques II.1.2- Etude du flux géothermique L’étude du flux géothermique au niveau des fonds des océans, montre son inégale répartition suivant les zones sous-marines. En effet, ce flux se révèle particulièrement important à l'aplomb des dorsales, témoignant de la grande proximité en profondeur de matériaux à haute température. Ces résultats ont permis en 1945 à Arthur Holmes d’émettre l’hypothèse que les dorsales océaniques sont les témoins à la surface de mouvements de convection ascendants du manteau. 18 II.1.3- Etude des dépôts sédimentaires marins Les dragages et les forages effectués au niveau des fonds océaniques montrent que le plancher océanique est constitué par une croûte formée surtout de basaltes recouverts, en dehors des rides océaniques, par des couches sédimentaires. En outre, des mesures sismiques ont été entreprises sur les sédiments du plancher océanique dans le but d’estimer leur épaisseur. Les dépôts reposant directement sur une couche basaltique plus vieille, montrent des épaisseurs qui augmentent lorsqu'on se déplace de la dorsale vers les plateaux continentaux. Par ailleurs, l’étude du plancher océanique de l’Atlantique entre l’Afrique et l’Amérique du sud, montre que les sédiments ainsi que les basaltes sous-jacents sont de plus en plus anciens à mesure que l'on s'éloigne de l'axe de la dorsale (Fig.III-2). Ce constat montre que les formations basaltiques qui naissent au niveau de la dorsale, et celles sédimentaires les surmontant immédiatement, s’épaississent en s’éloignant de cette structure axiale vers le littoral. Par ailleurs, les sédiments et les basaltes les supportant sont disposés symétriquement selon des bandes parallèles de part et d’autre de l’axe de la dorsale (Fig.III-2). L’ensemble de ces données portant sur la symétrie des formations du fond océanique par rapport au rift, leur épaississement et leur vieillissement en se rapprochant du littoral, confirme le déplacement latéral du plancher océanique. Fig.III-2 : Cartographie du plancher océanique montrant une symétrie par rapport à l’axe de la dorsale II.1.4- Etude des anomalies magnétiques A l’aide de magnétomètres embarqués sur un navire océanographique, des mesures systématiques du champ magnétique enregistré dans les basaltes du plancher océanique ont été effectuées. Ainsi, les relevés de l’intensité du champ magnétique avaient montré, sur ces fonds océaniques, l’existence d’une succession de bandes magnétiques. La mise en place de ces bandes est en relation avec les inversions du champ magnétique terrestre qui se sont produites au cours des périodes géologiques différentes. La polarité actuelle étant normale, les bandes d’intensité élevée 19 résultant d’un effet d’addition, correspondent aux bandes de polarité normale induisant des anomalies positives. En revanche, les bandes d’intensité faible correspondent aux bandes de polarité inverse, résultant d’un effet de soustraction et produisent une anomalie négative (Fig.III-3). Ainsi, on constate une correspondance entre la succession des bandes d'anomalies du plancher océanique et la chronologie des inversions magnétiques établies sur les échelles paléomagnétiques. Fig.III-3 : Alternance des bandes d’anomalies positives et celles négatives au niveau d’un plancher océanique. L’analyse des résultats de ces enregistrements à l’échelle des fonds océaniques montrent que : Les bandes des anomalies magnétiques différentes sont parallèles entre elles. Existence d’une nette symétrie des anomalies magnétiques par rapport à l’axe de la dorsale médio-océanique. Plus ces bandes sont éloignées de la dorsale, plus elles sont plus âgées. L’étude de la répartition des inversions de champ magnétique sur la croûte océanique prouve que le plancher océanique est en perpétuelle expansion à partir de la dorsale océanique et de part et d’autre de son axe, à la manière d’un double tapis roulant. L’existence de ces bandes d’anomalies magnétiques venait donc supporter l’hypothèse de l’étalement des fonds océaniques de Hess en 1960 et R.S. Dietz en 1961. En effet, la remontée du manteau sous la dorsale crée cette dynamique en écartant les deux croûtes, ce qui prouve donc que les dorsales sont les zones de genèse ou zones d'accrétion (de croissance) de la croûte océanique. 20 II.2- Estimation de la vitesse d’expansion des fonds océaniques À partir de l’âge des sédiments océaniques au contact avec le plancher lithosphérique ou de l’âge de formation des basaltes évalué par les inversions magnétiques, on peut estimer la durée de l'expansion (t). La largeur de la bande de sédiments par rapport à la dorsale apporte une valeur de la distance (d) parcourue par le plancher océanique. Ainsi, la vitesse d’expansion est donnée par v = d/t (en cm/an). Ce même calcul peut se faire par la mesure de la distance entre un volcan éteint et le volcan encore actif d'un point chaud. En effet, le mouvement horizontal du plancher océanique crée un alignement d’îles volcaniques suivant le sens du déplacement. L’âge d'un volcan s'apprécie facilement, ce qui permet de déterminer aussi bien la vitesse du déplacement du fond océanique ainsi que la direction et le sens de ce mouvement (Fig.III-4). Fig.III-4: Témoignage de l’expansion océanique par un point chaud. Le système GPS (Global Positioning System) est un système de navigation mondiale utilisant une constellation de 24 satellites opérationnels à tout moment. Il permet de déterminer les coordonnées géographiques de n'importe quel point situé à la surface du globe. L’installation d’un certain nombre de stations réceptrices de signaux GPS à différents endroits de la Terre permet de calculer la vitesse de l’expansion océanique. Le calcul de la vitesse d’étalement des fonds océaniques à l’échelle des océans différents a permis de distinguer des dorsales lentes avec une vitesse de 0,5 et 3 cm/an (exemple dorsale Sud-Ouest- Indienne) et celles rapides avec une vitesse de 8 à 16 cm/an (exemple dorsale Est pacifique). II.3- Conclusion Les observations concernant la topographie des fonds océaniques, celles des épaisseurs des sédiments marins ainsi que les âges des basaltes sous-jacents en fonction de leur éloignement par rapport à l’axe de la dorsale, constituent un ensemble de données qui vérifient l’idée de l’étalement des fonds océaniques. Par ailleurs, la répartition des bandes magnétiques normales et inverses parallèlement à la dorsale et d’une façon symétrique par rapport à son axe, vient conforter le modèle du tapis roulant océanique. Ainsi, l'histoire du mouvement des continents est imprimée dans les propriétés magnétiques de la croûte océanique nouvellement formée, et ces dernières permettent à l'hypothèse de l’expansion des fonds océaniques de Hess de recevoir sa légitimité. 21 L'histoire associera les noms de Hess et de Dietz (1961-1962) à cette théorie de l'expansion des fonds océaniques : le premier à mis en évidence le constant renouvellement des fonds océaniques, alors que le second, à l'aide d'arguments faisant appel à la rhéologie des roches, avance que le tapis roulant ne se limite pas à la seule croûte océanique, mais correspond à une couche plus épaisse et rigide qu'il appelle la lithosphère. L’importance de cette notion réside dans le fait que les continents ne flottent plus librement sur un liquide comme le pensait Wegener, mais sont enchâssés dans la lithosphère et se déplacent avec elle. C’est d’ailleurs, à la base de cette idée que naîtra plus tard, la théorie de la tectonique des plaques. On considère que l’existence de courants de convection dans le manteau, crée dans la croûte continentale des forces de tension qui contribueraient à la fracture de cette croûte. Les fractures ainsi ouvertes seraient envahies par le magma en provenance du manteau, ce qui engendrerait la création de la croûte océanique composée essentiellement de basalte. La récurrence d’un tel processus fera en sorte que les masses continentales s’éloigneraient l’une de l’autre. D’autre part, on considère que la surface terrestre est un espace fini, ce qui implique que s'il y a distension dans certaines zones, il doit y avoir compression au niveau d’autres. Autrement dit, s’il y a formation de nouvelle croûte terrestre par endroits, il faut qu'il y ait destruction ailleurs. Cette destruction se ferait dans les zones de compression où la croûte s'enfoncera dans le manteau, donnant naissance à des fosses océaniques profondes. Ces zones de compression seraient celles où se construiraient des chaînes de montagnes. Tous ces arguments confortent la théorie d’une mobilité horizontale de la lithosphère océanique dont le moteur serait des mouvements de convection du manteau. Ainsi les océans s’étendent, s’élargissent, c’est le modèle de l’expansion océanique. 22 CHAPITRE IV THEORIE DE LA TECTONIQUE DES PLAQUES I- LITHOSPHERE OCEANIQUE ET CONTINENTALE La lithosphère est constituée de la croûte et du manteau lithosphérique. Ces deux enveloppes rocheuses à caractère rigide et cassant, sont séparées par la discontinuité de Mohorovicic. La limite inférieure de la lithosphère, c'est à dire la limite entre le manteau supérieur rigide et l’asthénosphère ductile, est situé vers 1300 °C. Cette température correspond à des conditions qui rendent les péridotites ductiles et même prêtes à commencer leur fusion partielle. La profondeur de cette limite est variable, proche de 0 km au niveau de l'axe des dorsales océaniques jusqu'à plus de 300 Km sous les vieux continents. La transition entre la lithosphère et l'asthénosphère, se caractérise par une diminution de la vitesse des ondes sismiques, due à la présence de matériel partiellement fondu, et permet de définir la LVZ (Low Velocity Zone). Cette zone est donc en relation avec la transformation du matériel mantellique rigide au niveau de la lithosphère, en un manteau plus déformable (ductile) au niveau de l'asthénosphère. Deux types de lithosphères sont identifiables, en fonction de la nature lithologique de la croûte terrestre (Fig.IV-1): La lithosphère continentale comportant la croûte continentale, essentiellement granitique, et le manteau lithosphérique péridotitique. La lithosphère océanique comportant la croûte océanique composée de roches mafiques (basalte et gabbro) et du manteau lithosphérique. Fig.IV-1 : Nature lithologique des croûtes continentale et océanique II- MISE EN EVIDENCE DES PLAQUES TECTONIQUES II-1- Notion de plaque lithosphérique L’étude de la répartition des séismes et des principaux édifices volcaniques à l’échelle du globe montre que l’activité sismique et celle volcanique, se situent dans des zones bien précises. Ces activités sont en effet, concentrées sur des bandes, où les déformations paraissent plus importantes qu'ailleurs (Fig.IV-2). Ces bandes délimitent des calottes sphériques rigides et peu déformées à l'exception de leurs frontières : Il s’agit des plaques tectoniques ou plaques lithosphériques. 23 Fig.IV-2 : Répartition des activités sismique et volcanique à l’échelle du globe La plaque tectonique ou plaque lithosphérique est une portion de lithosphère rigide délimitée par des frontières ayant une activité sismique et volcanique importante. C’est donc un fragment de la lithosphère résultant d’un découpage par un système de failles, de dorsales et de fosses océaniques, et qui repose sur l'asthénosphère à comportement ductile à l’échelle du temps géologique. On distingue deux types structuraux de plaques (Fig.IV-3): Les plaques continentales composées de croûte continentale et océanique (plaque africaine, plaque eurasienne, plaque indienne, etc.). Les plaques océaniques composées exclusivement de croûte océanique (plaque des Cocos, plaque de Nazca, etc.). Fig.IV-3 : Les différentes plaques lithosphériques 24 Suivant leur taille, on peut également différencier deux types de plaques : plaques tectoniques majeures au nombre de 15, et environ 42 plaques mineures (Fig.IV-3). II-2- Les différentes limites de plaques Le principe clé de la tectonique des plaques est que la lithosphère rigide est formée de plaques distinctes et indépendantes, qui flottent sur l'asthénosphère viscoélastique. La ductilité de l'asthénosphère permet aux plaques tectoniques de faire des mouvements dans différentes directions. Le modèle actuel admet donc que les plaques tectoniques sont portées par les mouvements du manteau asthénosphérique sous-jacent qui agit comme un tapis roulant de part et d'autre de l’axe de la dorsale médio-océanique. Le glissement de ces plaques lithosphériques sur l’asthénosphère induit des mouvements de divergence, de convergence ou de coulissage horizontal entre les plaques. II.2.1- Les limites divergentes II.2.1.1-Phénomène de rifting II.2.1.1.1-Données géophysiques L’étude du flux thermique montre qu’il est anormalement élevé au niveau des dorsales. En effet, l’établissement des isothermes à ce niveau montre que ces lignes d’égale température, se resserrent et s’élèvent au niveau des dorsales médio-océaniques (Fig.IV.4). La tomographie sismique établie au niveau des dorsales révèle une anomalie de vitesse des ondes, traduisant la présence d’un matériau chaud à faible profondeur, ce qui corrobore les données de la répartition du flux thermique. Fig.IV-4 : Organisation des isothermes aux alentours de la dorsale océanique Le redressement de l’isotherme 1300°C, considéré comme limite ente l’asthénosphère et la lithosphère, au niveau des dorsales témoigne de l’existence d’une branche ascendante du mouvement convectif amenant en surface un matériau ductile et chaud apte à entrer en fusion. II.2.1.1.2 - Interprétation Dans l’asthénosphère, les courants de convection ascendants apportent la matière solide et chaude. La concentration de chaleur chauffe les roches, les dilate et un bombement thermique de la lithosphère s’installe (Fig.IV-5A), La dilation des matériaux entraine l’étirement et l’amincissement de la croûte continentale. L'expression morphologique de cette extension est la formation d’un long fossé d'effondrement se traduisant par l'apparition de failles normales généralement listriques et de blocs basculés donnant une structure en graben. Cet effondrement en escalier produit une vallée appelée « rift continental » pouvant être caractérisé par un début de volcanisme (Fig.IV-5B). Ce processus d'amincissement de la lithosphère continentale jusqu'à déchirure du continent est appelé rifting. Il est actuellement en cours en Afrique de l'Est, et on parle du rift Est-Africain. 25 Avec la poursuite de l'étirement, le rift s'enfonce sous le niveau de la mer et les eaux marines envahissent la vallée. Le volcanisme sous-marin forme un premier plancher océanique basaltique (croûte océanique) de part et d'autre d'une dorsale embryonnaire ; c'est le stade de mer linéaire (Fig.IV- 5C). Avec l’élévation de l’isotherme 1300°C sous la dorsale en formation, les roches du manteau asthénosphérique subissent une diminution de pression au droit de l’amincissement. Ainsi, les péridotites chaudes de l’asthénosphère se trouvent dans des conditions thermodynamiques qui facilitent leur fusion partielle. Le magma ainsi formé se rassemble ; plus léger, il tend à monter dans les fissures et va s’épancher en surface sous forme de coulées basaltiques. L'élargissement de la mer par accrétion continue du plancher océanique conduit à la formation d'un océan de type Atlantique (Fig.IV-5D) (dorsale, plaines abyssales, plateaux continentaux). Fig.IV-5 : Étapes de l’ouverture d’un océan et formation du plancher océanique II.2.1.1.3- Notion de marge passive Les marges passives correspondent aux zones de transition entre la lithosphère continentale et la lithosphère océanique. Leur histoire est liée à celle de l’ouverture de l’océan qu’elles bordent. La formation d’un océan est précédée du phénomène de rifting dû à une tectonique extensive de la lithosphère continentale. L’étirement de la croûte continentale, engendre des failles profondes à l’origine de la formation de blocs constitués du socle qui s’enfoncent et basculent. Par ailleurs, les marges passives sont le lieu d’une sédimentation caractéristique en provenance du continent. À leur niveau, on peut distinguer trois types de sédiments (Fig.IV-6) Sédiments anté-rift : ce sont des sédiments qui se sont déposés avant la fracturation de la croûte terrestre et la mise en place des failles. Ces dépôts surmontent directement le socle et font donc partie des blocs basculés individualisés par les failles listriques. Sédiments syn-rift : Ce sont les sédiments qui se sont déposés pendant le fonctionnement des failles. Ils présentent la particularité d’avoir un dépôt en éventail. En effet, les failles listriques 26 provoquent une rotation des blocs. De ce fait, le mur de la couche en cours de dépôt est en pente alors que le toit de celle-ci sera forcément horizontal. Sédiments post-rift : Ce sont les sédiments qui recouvrent en discordance les précédents (anté et syn-rift). Ces sédiments sont disposés en couches parallèles horizontales, et leur mise en place s’opère donc après la phase de rifting, c’est à dire après l’arrêt du fonctionnement des failles survenues au cours de l'ouverture océanique. Fig.IV-6 : Étapes de la formation de la marge passive II.2.1.2-Formation de la croûte océanique II.2.1.2-1- Données du terrain En 1987, des explorations sous-marines de la dorsale atlantique, au niveau de la faille VEMA, permettent d’observer pour la première fois les roches de la croûte océanique en place. De la surface vers la profondeur, on identifie : des sédiments, des basaltes en coussins des basaltes en filons (dolérite) et des gabbros (Fig.IV-7). Fig.IV--7 : Les différentes formations de la croûte océanique 27 Les basaltes et les gabbros sont des roches magmatiques dont la composition minéralogique est identique : ils sont principalement constitués de pyroxènes, d'olivines et de feldspaths plagioclases ; en revanche, leur texture est différente : Pour le gabbro, toute la roche est cristallisée et les minéraux sont visibles à l'œil nu, ce qui lui confère une texture qualifiée de grenue. Ainsi, le gabbro est considéré comme roche plutonique. Dans les basaltes, seuls certains minéraux sont visibles (olivine et pyroxène), alors que d’autres ne sont visibles qu’au microscope (microlites) et l’ensemble baigne dans une pâte non cristallisée (verre). Ainsi, la texture de la roche basaltique est qualifiée de microlitique. La géologie de l’Islande confirme les observations faites au niveau des dorsales immergées. De nombreuses failles normales, parallèles bordent un fossé d’effondrement dans l’axe de l’île. L’ile connait un volcanisme basaltique effusif intense, et la datation des coulées volcaniques indique des âges croissants depuis l’axe du fossé. Existence d’une séismicité active mais superficielle et de faible magnitude L’ile est caractérisée par un flux géothermique très élevé. II.2.1.2.2- Fonctionnement des dorsales et mise en place de la lithosphère océanique A cause du mouvement ascendant dû à la convection, la péridotite chaude appartenant à l’asthénosphère (à environ 100 km de profondeur) remonte vers la surface à une vitesse de quelques cm/an. Par ailleurs, les études expérimentales concernant les conditions de la fusion de la péridotite mantellique, montrent que cette roche entre en fusion partielle dans différentes combinaisons de températures et de pressions. Ainsi, si la péridotite entre en fusion partielle sous une dorsale c’est qu’elle rencontre des conditions de pressions-températures qui le permettent et qui sont en relation avec un déséquilibre thermodynamique qui s'instaure localement. Au cours de son ascension, la température de ce matériau asthénosphérique reste quasi-constante en raison de la mauvaise conduction de la chaleur par les roches encaissantes, alors que sa pression diminue progressivement. Cette diminution de la pression à température constante est qualifiée de décompression adiabatique. Le liquide qui résulte de cette fusion n'a pas la même composition chimique que la péridotite initiale dite « lherzolite » , car une fusion partielle d’environ 15% permet en effet, l’obtention d’un magma basaltique, et une péridotite résiduelle appauvrie dite « harzburgite ». Ce taux de fusion est atteint pour une pression de 1.5 Gpa et une température de 1300°C. Ce sont les conditions que l'on trouve à environ 50 – 100 km sous la dorsale, engendrant un magma à composition basaltique. Les gouttes de liquide magmatique qui se forme migrent en raison de la faible densité et se réunissent dans une chambre magmatique à quelques km de profondeur sous la dorsale (Fig.IV-8): Le refroidissement progressif du liquide magmatique, en particulier au contact des bords de la chambre magmatique, entraine l’apparition des cristaux d'olivine en premier, puis ceux de pyroxène et enfin les cristaux de plagioclase. L’ensemble de ces cristaux ainsi formés par un refroidissement lent, donne naissance au gabbro de texture grenue. Au sommet de la chambre magmatique, une lentille de magma sommitale se forme et une partie remonte en s'infiltrant par les failles normales présentes dans la croûte au niveau de l'axe de la dorsale. Au sein de ces fractures, le liquide magmatique cristallise et aboutit à la formation d’une roche filonienne dont les grains sont plus fins que ceux du gabbro : c’est la dolérite à texture microgrenue qui forme le complexe de dykes de la croûte océanique. Lorsque les conditions de pression le permettent, une partie du magma empreinte les conduits lui permettant de parvenir à la surface en entraînant avec lui de gros cristaux (phénocristaux) formés 28 préalablement. Au contact de l’eau de mer, la lave se refroidit rapidement donnant du verre volcanique. Ainsi se forme un basalte dont la roche est caractérisée par une texture microlitique. En outre, ce basalte formant la surface du plancher océanique se présente sous forme de coussins (en pillow-lavas), en raison des pressions d’eau en profondeur. Fig.IV-8 : Fonctionnement d’une chambre magmatique et formation du plancher océanique. II.2.1.3- Types de dorsales océaniques Les taux d'accrétion des dorsales océaniques peuvent être déterminés grâce à l’analyse des anomalies magnétiques enregistrées au sein des laves basaltiques des planchers océaniques. Ces taux d’accrétion qui contrôlent les taux d’ouverture océanique, peuvent être extrêmement variables d'une dorsale à une autre, ce qui permet de distinguer généralement deux types de ces structures divergentes : dorsales lentes et dorsales rapides. II.2.1.3.1- Les dorsales rapides (Fig.IV-9B) Les dorsales rapides ont une morphologie bombée en horst à l’aspect d’un dôme et relativement lisse, avec une vallée axiale peu marquée. Le dôme peut avoir des formes différentes, en fonction de la production magmatique en profondeur. Plus le dôme est large, plus la production magmatique est intense. La vallée axiale assez étroite, est occupée par un lac de lave ou recoupée par des failles d'où s'écoulent les basaltes en coussin. Dans ce type de dorsales, la profondeur des foyers sismiques est généralement faible (inférieure au kilomètre). La chambre magmatique permanente induit une remontée continue de magma, ce qui entraine une vitesse d’expansion importante dépassant les 5cm/an et peut atteindre 17 cm/an (dorsale de l’océan pacifique Est). II.2.1.3.2- Les dorsales lentes (Fig.IV-9A) La tomographie sismique montre que les dorsales lentes sont caractérisées par un flux thermique assez faible. Elles présentent une dépression axiale d’environ 2 km de profondeur et une largeur pouvant atteindre 50 km. Cette dépression est formée de grabens emboîtés dont le rift est marqué de foyers sismiques profonds. 29 Par rapport aux dorsales rapides, celles lentes sont donc plus froides. En effet, la fracturation axiale assez poussée du rift permet une circulation intense de l’eau de mer à l’origine de phénomènes d’hydrothermalisme. Cette circulation va jouer un rôle important dans le refroidissement de la croûte et son évolution. L’apport magmatique au niveau des dorsales lentes est beaucoup plus faible et la lithosphère y est épaisse. Aucune chambre magmatique n'est identifiée sous l'axe dans ce cas. Le magma est cependant présent sous la forme de petites poches isolées et temporaires. L'activité magmatique au niveau des dorsales lentes est donc variable et intermittente, expliquant la vitesse d’expansion assez réduite avoisinant 1 à 2 cm/an (dorsale atlantique). Fig.IV-9 : Morphologie des dorsales lentes (A) et rapides (B) II.2.1.4-Conclusion Au niveau de l’axe de la dorsale, le manteau asthénosphérique remonte près de la surface et fond partiellement par une décompression adiabatique. Ainsi, la formation de la dorsale océanique est associée à des remontées de magmas mantelliques occasionnant un volcanisme intense à l’origine des roches composant le plancher océanique. Ce processus entraine un écartement de la lithosphère océanique de part et d’autre de l’axe de la dorsale, assurant ainsi la formation et le déplacement des plaques lithosphériques au rythme de quelques centimètres par an. En effet, les roches volcaniques consolidées s’écartent de chaque côté de la dorsale, ce qui laisse la place à de nouvelles arrivées de laves qui forment de nouvelles roches volcaniques. Pour cette raison, les zones de dorsale océanique, appelées zones divergentes, sont aussi nommées des limites constructives. Elles sont le siège d'une importante production de magma basaltique, à l'origine du développement des fonds océaniques, et sont de ce fait qualifiées également de zone d’accrétion. Par ailleurs, au cours de son renouvellement, le plancher océanique enregistre les anomalies induites par les inversions des pôles magnétiques, et l'histoire du mouvement des continents est ainsi imprimée dans les propriétés magnétiques de la croûte nouvellement formée (Fig.IV-10). Fig.IV-10 : Enregistrement des anomalies magnétiques lors de l’extension du plancher océanique 30 II.2.2- Les limites convergentes II.2.2.1- Mise en évidence des zones de subduction Diverses données et méthodes d'étude ont été mises en œuvre pour affiner la connaissance des phénomènes se déroulant au niveau des zones de convergence des plaques tectoniques. L’observation séduisante d’un âge relativement "jeune" du plancher océanique le plus ancien, daté à environ 180 Ma, au regard des âges des roches continentales les plus anciennes, datées à ce jour à environ 4.03 Ga sur un orthogneiss au NW de Canada, a bien évidemment suggéré l’existence d’un processus permettant la disparition de la lithosphère océanique au niveau des zones de convergence des plaques où s’opère un phénomène de subduction. Le phénomène d’accrétion qui se produit au niveau de toutes les dorsales entraine l’extension des planchers océaniques, ce qui aboutirait en principe au développement continu du volume du globe terrestre. Cependant, les études géodésiques, confirment que ce volume reste quasi-constant au fil des temps géologiques. Ces données poussent à supposer l’existence d’un phénomène qui serait complémentaire à celui de l’accrétion et qui permettrait, en compensation, de maintenir le globe terrestre dans ses dimensions supposées fixes. La chaîne andine fait partie de la ceinture sismique et volcanique péripacifique appelée « ceinture de feu » (Fig.IV-11a). A ce niveau, on constate que les zones marquées par une fosse océanique (Fig.IV-11b) présentent des foyers sismiques qui sont d’autant plus profonds qu’ils sont loin de la fosse. En coupe, les foyers sismiques se répartissent selon un plan incliné d’une épaisseur de 100 Km qui part de la fosse et plonge en profondeur : on parle du plan de Wadati‐Benioff (Fig.IV- 11c); or à cette profondeur (à partir de 100 Km), la péridotite est ductile, non cassante et aucun séisme ne devrait être présent au‐delà de 100 km de profondeur. Le plan incliné ainsi identifié matérialise donc le plongement d’un matériel qui reste cassant malgré la profondeur : c’est la lithosphère océanique qui plonge plus vite qu’elle ne se réchauffe à l’intérieur du manteau. Fig.IV.11 : Mise en évidence d’une zone de subduction par la répartition des foyers sismiques Au niveau des fosses océaniques (Tonga‐Kermadec), la tomographie sismique révèle la présence des anomalies positives et d’autres négatives. Ce sont en fait des anomalies de vitesse interprétées en termes d'anomalies de température traduisant une hétérogénéité du manteau fait de péridotite, avec un matériau froid et un autre chaud (Fig.IV-12). 31 Fig.IV-12 : Mise en évidence d’une zone de subduction par des données de la tomographique sismique. Les anomalies relevées par la tomographie sismique sont corroborées par celles définies par la répartition du flux thermique au niveau des zones où les plaques convergent. En effet, les anomalies négatives de ce flux s’observent au niveau de la fosse, en suivant le plan de Bénioff, dessiné par les foyers des séismes. En revanche, les anomalies positives sont situées au-dessus de la plaque plongeante vers 100 Km de profondeur à la verticale d’une zone volcanique traduisant la signature thermique d’une activité magmatique (Fig.IV-13a). Fig.IV-13 : Flux thermique (a) et isothermes (b) au niveau d’une zone de subduction En étudiant la répartition des isothermes (courbes reliant les points de même température), on constate qu’ils sont généralement parallèles à la surface terrestre, mais au niveau des fosses océaniques ils plongent et migrent en profondeur d’une façon inclinée suivant le plan de bénioff. Ces isothermes se redressent, au niveau des zones marquées par l’activité volcanique (Fig.IV-13b) II.2.2.2- Interprétations L’étude de l’ensemble des données relevées au niveau des zones de convergence de deux plaques tectoniques, montre qu’il s’agit de zones marquées par un dynamisme à l’échelle sismique, thermique et volcanique. De ce fait, ces zones de convergence sont qualifiées de marges actives, par opposition aux marges passives où la transition océan-continent s’effectue au sein de la même plaque. La subduction est donc le processus par lequel une plaque tectonique océanique froide et dense s'incurve et plonge sous une autre plaque avant de s'enfoncer dans le manteau. La plaque plongeante est dite subduite et peut, suivant les cas, s’enfoncer sous une plaque continentale (subduction océan- continent : cas de la subduction de la plaque de Nazca sous le continent de l’Amérique du sud) ou sous 32 une autre plaque océanique (subduction océan-océan : C’est le cas à l’ouest du Pacifique, notamment au niveau des arcs insulaires comme le Japon). Les zones de subduction font partie intégrante des mouvements de convection qui animent le manteau terrestre. Ces zones représentent des limites convergentes, où s’opère un rapprochement des plaques lithosphériques et leur résorption. Ces zones correspondent ainsi, à des zones de disparition d’une plaque océanique sous une autre, et de recyclage de la matière en profondeur. II.2.2.3- L’évolution thermique de la lithosphère océanique (Fig.IV-14) Le principe de l'isostasie énonce que la lithosphère repose en équilibre sur l'asthénosphère. Cet équilibre est réalisé tant que la densité moyenne de la lithosphère océanique est inférieure à la densité moyenne de l'asthénosphère. Cela revient à dire que l'équilibre est réalisé tant que la masse d'une colonne de lithosphère océanique est inférieure à la masse d'une colonne d'asthénosphère de même hauteur et de même section. Aux alentours de la dorsale, la lithosphère océanique jeune qui vient de naître est d'abord peu épaisse et peu dense, car à ce niveau l'isotherme 1300 °C qui la sépare de l’asthénosphère est situé à faible profondeur. La densité de la lithosphère océanique (3,1 g/cm3) est une moyenne pondérée entre la densité de la croûte océanique (2,9 g/cm3) et du manteau lithosphérique (3,3 g/cm3). Ainsi, au niveau de la dorsale, la lithosphère repose sur l’asthénosphère, de densité plus importante (3,25 g/cm3). Cependant, en s’éloignant de la dorsale, le manteau lithosphérique refroidit, s’hydrate et s’épaissit en vieillissant et sa densité ne cesse d’augmenter, alors que l’épaisseur de la croûte océanique reste constante. Ceci s’explique par le fait que lorsque la roche est plus chaude, elle est ductile et fait partie de l'asthénosphère et lorsqu'elle est plus froide, elle devient solide et s’intègre à la lithosphère. Ainsi, au fur et à mesure de l’éloignement de la dorsale, l’isotherme séparant le manteau lithosphérique et le manteau asthénosphérique va progressivement s’enfoncer (Fig.IV.14). Par conséquent, lorsque la densité de la lithosphère océanique a dépassé celle de l’asthénosphère, l’équilibre commence à se rompre, et la lithosphère se trouve donc obligée de s’enfoncer : la subduction débute. La différence de densité entre la lithosphère océanique et l’asthénosphère est à la base du mécanisme constituant l'un des principaux moteurs responsables du mouvement des plaques à la surface de la Terre. Ce mécanisme explique pourquoi les plaques océaniques se déplacent toujours en direction de l'endroit où elles plongent en subduction. En outre, la subduction d’une plaque lithosphérique entraine la mise en place d’une force de traction qui est un élément essentiel de la dynamique des plaques. Cette traction est à l’origine des mouvements horizontaux du manteau asthénosphérique. Le mouvement de convection peu profond localisé sous la dorsale permet de combler le vide occasionné par la subduction de la plaque. Fig.IV-14 : L’évolution thermique d’une lithosphère océanique 33 II.2.2.4- Quelques types de subduction Les critères de classification des zones de subduction sont assez diversifiés, et l’on peut toujours les ranger suivant tel ou tel critère morphologique, mécanique, géographique ou autre. Chacun de ces grands types de subduction associe un certain nombre de caractères comme l’âge de la plaque subduite, la géométrie du panneau plongeant, le régime tectonique de la plaque supérieure…etc. Par ailleurs, la classification la plus commune distingue deux grands types de zone de subduction suivant la plaque chevauchante : soit la lithosphère océanique s’enfonce sous une lithosphère continentale (cas de la chaine Andine), soit la lithosphère océanique s’enfonce sous une autre lithosphère océanique (subduction intra-océanique). II.2.2.4.1- Subduction intra-océanique Dans ce cas la subduction a lieu en plein domaine océanique. Ainsi, la lithosphère plongeante (plaque chevauchée) est normalement une lithosphère océanique froide, épaisse et dense qui s’enfonce sous une autre lithosphère également océanique. Ce modèle est bien illustré par la convergence des plaques Pacifique et Philippine, où l’on assiste à la formation d’une fosse de subduction (fosse des Mariannes représentant le relief terrestre le plus profond avec une profondeur d’environ 11km), puis un bassin avant arc suivi d’un arc insulaire sous forme d’un chapelet d’îles volcaniques et enfin un bassin d’arrière arc créé par une dynamique extensive à l’arrière de la subduction (Fig.IV-15). Fig.IV-15 : Caractéristiques morphologiques d’une subduction intra-océanique II.2.2.4.2- Subduction océan-continent Lorsque la plaque sus-jacente (plaque chevauchante), est constituée d’une lithosphère continentale, on peut assister à la formation d’une chaine de subduction, comme la cordillère des Andes, en Amérique du Sud (c’est le modèle andin). Dans ce cas, on assiste au glissement de la plaque lithosphérique océanique froide, celle de Nazca, d’une façon oblique sous la plaque sud-américaine. A environ 100 à 150 km de la fosse, sur la plaque chevauchante, se trouve un arc volcanique caractérisé par une chaîne volcanique subaérienne avec une topographie importante. La dynamique du volcanisme mis en évidence dans ce contexte est de type essentiellement andésitique à caractère explosif, car les laves émises à ce niveau sont assez visqueuses. L’intense activité volcanique enregistrée au niveau de l’arc, s’accompagne d’une activité sismique importante suivant le plan de Bénioff, avec des séismes superficiels, intermédiaires et profonds. En outre, en profondeur de la plaque chevauchante, des roches magmatiques peuvent cristalliser et forment des roches plutoniques de nature granitoïdique. Par ailleurs, au niveau de cette zone de subduction, on peut également assister à la formation d’une structure engendrée par l’accumulation de matériaux sédimentaires déformés, localisés à la 34 frontière entre la plaque plongeante et la plaque chevauchante et correspondant à ce qu’on appelle « prisme d’accrétion » (Fig.IV-16). II.2.2.5- Autres caractéristiques des zones de subduction Des études d’imagerie sismique (tomographie sismique) ont montré que les zones de subduction sont divisées en plusieurs unités morphostructurales très spécifiques. Ces unités reflètent une variation remarquable de la surface topographique (reliefs positifs) et bathymétrique (reliefs négatifs) génétiquement associées à la dynamique des plaques qui y convergent. II-2.2.5.1- Fosse océanique En convergeant, la plaque océanique subduite subit un fléchissement créant un relief négatif très remarquable, connu sous le vocable de « fosse océanique », qui peut dépasser 11000 m de profondeur (fosse des Mariannes). Ces fosses, qui marquent la frontière entre les deux plaques, sont de longues dépressions, plus ou moins marquées selon les zones de subduction. Elles sont la plupart du temps courbes et convexes vers l’océan (ex : Mariannes, Sandwich, Caraïbes). Cependant, elles peuvent néanmoins être beaucoup plus rectilignes (ex : Tonga). Une même fosse peut s’étendre sur des milliers de kilomètres ou être beaucoup plus étroite. Fig.IV-16 : Caractéristiques morphologiques de la zone de subduction océan-continent La cinématique des fosses océaniques est fondamentale dans la dynamique de la subduction, puisqu’elle influence de nombreux paramètres, telles que la déformation de la plaque chevauchante et la géométrie du panneau de subduction. II-2.2.5.2- Prisme d’accrétion Au niveau d’une zone de subduction, lorsque la lithosphère s'enfonce, les sédiments océaniques qu'elle porte sont rabotés par la plaque chevauchante, se compriment, se déforment et s'empilent sous forme d'écailles en éventail, et la structure ainsi engendrée forme un prisme d’accrétion. Il s’agit donc d’une accumulation de matériaux sédimentaires déformés, localisés à la frontière entre la plaque plongeante et la plaque chevauchante. Ces matériaux raclés peuvent parfois se redresser formant un bourrelet qui s'épaissit jusqu'à émerger totalement (exemple prisme formant l’ile de la Barbade ; Fig.IV-17). 35 Fig.IV-17 : Exemple du prisme d’accrétion de la Barbade au niveau de l’Atlantique montrant une puissance sédimentaire importante induisant l’emplacement d’un bassin d’avant arc. Par ailleurs, au niveau des prismes d’accrétion, les forces compressives mises en jeu, s’expriment par de nombreuses failles inverses (Fig.IV-18) et autres structures témoignant d'un raccourcissement important imposé par la convergence dans les zones de subduction. Fig.IV-18 : Bloc diagramme montrant une faille inverse II-2.2.5.3 -Géométrie du slab Le slab représente la partie d'une plaque lithosphérique engagée dans une subduction. Son pendage est une caractéristique très déterminante, permettant de comprendre certaines spécificités qui différencient entre les zones de subduction. Ainsi, dans le cas où le pendage du slab est faible ( 600°C) - Géobaromètres, dont la présence apporte des informations sur la pression (ex : Jadéite P > 6 kbar). Chacune de ces zones représente un volume de terrain ayant un degré de métamorphisme, et dont les limites sont matérialisées par des isogrades. Un isograde est une courbe de même degré métamorphique, c’est-à-dire une ligne d’égale intensité métamorphique marquée par l’apparition (+) ou la disparition (-) de certains minéraux suivant leur champ de stabilité. Deux isogrades successifs délimitent une zone métamorphique. Actuellement, on connait une zonéographie dont on distingue les zones suivantes: L’anchizone forme la transition entre la diagenèse et le métamorphisme, pour une T° à 200° C et une P = 1kbar. Cette zone est marquée par la présence constante de la chlorite. L’épizone : Elle est caractérisée par des températures et des pressions lithostatiques basses et des pressions orientées fortes. Cette zone correspond à un métamorphisme relativement faible. Dans ce domaine les roches sont riches en minéraux hydroxydés (mica, talc, chlorite, épidote, actinote). La mésozone, ou zone intermédiaire caractérisée par des températures plus élevées que celles de la zone précédente et correspond à un métamorphisme moyen. C’est la zone des micaschistes et des gneiss à deux micas. La catazone : Cette zone est caractérisée par une température encore plus élevée, une pression lithostatique forte et des pressions orientées modérées. Le tableau VI-1 donne quelques caractéristiques de ces zones métamorphiques Tableau VI-1: Caractéristiques des zones du métamorphisme régional 70 V-2-2-4- Relation du métamorphisme thermodynamique et l’anatexie Au niveau des racines des chaines de montagne, en particulier celles de collision, et sous un haut degré de métamorphisme, certaines roches métamorphiques de composition favorable subissent une fusion partielle plus ou moins poussée aboutissant à la création de liquides silicatés de composition souvent granitique : on parle alors d'anatexie. Le magma de nature granitique qui vient de s’individualiser est caractérisé par une faible mobilité étant donné son faible pouvoir d'assimilation. En cristallisant au sein même de la roche qui lui a donné naissance, le liquide aboutit à la formation d’une roche comportant alors deux parties : l'une, qui a évolué à l'état solide, formée par le résidu de fusion (appelée restite), et l’autre, magmatique, formée par le matériau granitoïdique. De telles roches mixtes, métamorphiques et magmatiques, sont appelées des migmatites (Fig.VI.8). Ainsi, ces dernières, montrent une partie gneissique avec une alternance de lits sombres riches en mica noir, et de lits clairs quartzo-feldspathique (foliation), mais aussi des poches claires discontinues à texture grenue, formées de quartz et de feldspaths et constituent la partie granitique de la migmatite. Ces migmatites expriment donc le lien entre le gneiss comme roche métamorphique et le granite comme roche magmatique plutonique, et leur faciès reflète leur genèse et leur mémoire. En atteignant des valeurs extrêmes, les conditions de température et de pression favorisent une fusion totale engendrant un liquide granitique. Si les conditions permettent la cristallisation de ce liquide là où il s’est formé, un granite de grande étendue se mettra en place et dit « granite d’anatexie », en position concordante avec l’encaissant avec lequel aucune limite franche n’est établie. Si une partie de ce liquide arrive à migrer vers la partie supérieure de la croûte continentale, sa cristallisation engendrera un granite intrusif qui induirait un métamorphisme de contact (Fig.VI-9) Fig.VI-8 : Aspect d’une migmatite avec alternance d’une partie gneissique et une partie granitique Fig.VI-9 : Aspect du granite d’anatexie et sa relation avec les roches du métamorphisme thermodynamique. 71 V-3- Autres types de métamorphisme V.3.1- Métamorphisme hydrothermal Ce type de métamorphisme est lié à des circulations de fluides à température élevée. Ces fluides réchauffent les roches traversées et leur apportent des éléments chimiques (phénomène appelé métasomatose). V.3.2-Métamorphisme d’impact (ou de choc) Ce métamorphisme est en relation avec l'impact d'une météorite et engendre un type de roche appelée impactites. La figure VI-10 présente les principaux types de métamorphisme dans un diagramme tenant compte des conditions de la température et de la pression. Fig.VI-10: Diagramme des domaines des principaux types de métamorphisme. VI- CLASSIFICATION DES ROCHES METAMORPHIQUES Contrairement aux roches magmatiques ou sédimentaires, il n’existe pas de classification de référence pour les roches métamorphiques. En effet, la classification de ces dernières est plus complexe que celles des autres types roches, car il faut tenir compte: De la structure et la texture De la roche originelle (protholite) Des compositions chimiques et minéralogiques Du type de métamorphisme Des facteurs du métamorphisme (température et/ou pression) Tenant compte de toutes ces conditions, on ne peut vraiment, trouver une classification simple de roches métamorphiques, mais il s’agit plutôt de trouver leurs conditions de formation. VI-1- Classification selon la texture des roches métamorphiques Dans les nouvelles conditions de T° et de P sous lesquelles se forme une roche métamorphique, les différents minéraux qui composent la paragenèse stable nouvellement formée, prennent naissance d’une facon simultanée, à la différence de la cristallisation des roches ignées qui se produit selon un ordre bien défini. L’espace occupé par les minéraux métamorphiques néoformés provient de la disparition simultanée des minéraux de l’association minéralogique originelle, dont les éléments (ions et groupes d’ions) sont utilisés pour la construction des réseaux de ces minéraux nouvellement formés. Les minéraux d’origine métamorphique sont qualifiés de blastes. D’après leur agencement et leur taille, la roche métamorphique acquiert une texture particulière contribuant à sa classification ; ainsi une diversité de texture est à distinguer : Texture granoblastique : Ce type de texture est caractérisé par un développement des minéraux sous forme de grains et sans orientation privilégiée. La texture granoblastique caractérise 72 essentiellement les cornéennes et autres roches du métamorphisme de contact. Cette texture peut être granoblastique isogranulaire ou hétérogranulaire. Texture lépidoblastique : Elle est caractéristique des roches formées par des cristaux lamellaires ou en paillettes (micas, chlorite) en quantités notables et disposés parallèlement les uns aux autres. Texture nématoblastique (némato = fil) : C’est une texture en baguettes ou en aiguilles (habitus des amphiboles ou de la sillimanite). C’est une texture propre aux roches métamorphiques contenant des minéraux à formes prismatiques allongées et disposés parallèlement. Texture porphyroblastique : C’est une texture analogue par son aspect à la structure porphyrique des roches ignées. Elle consiste en la présence de quelques cristaux, appartenant généralement à la même espèce minéralogique, de dimensions plus grandes que les autres cristaux de la roche, lesquels sont de taille moyenne. VI-2- Classification selon la séquence métamorphique VI.2.1- Etude d’un exemple de roches du métamorphisme thermodynamique des zones de collision VI.2.1.1- Etude de la composition chimique On considère un ensemble de roches métamorphiques rencontrées dans les zones de collision (schiste, micaschiste et gneiss). Le Tableau VI-2 donne la composition chimique de ces roches. L’analyse des données relatives aux roches métamorphiques étudiées, montre que leur composition chimique est semblable et dominée par la silice et l’aluminium, d’où on qualifie leurs minéraux de silicates d’alumine. Cependant, on constate que la composition minéralogique de ces mêmes roches est différente. Ces roches proviennent donc d’un même protolithe ayant connu un métamorphisme progressif. Tableau VI-2 : Composition chimique des roches du métamorphisme thermodynamique VI.2.1.2- Etude de la composition minéralogique La figure VI-11 présente la composition minéralogique de l’argile comme protolithe et de quelques roches métamorphiques qui en dérivent, ainsi que les domaines de stabilité de quelques-uns de leurs minéraux. 73 Fig. VI-11 : Composition minéralogique de quelques roches métamorphiques et leur protolithe argileux L’étude des données de la Figure VI-11, permet de définir les notions suivantes : VI.2.1.3- Notion de minéral indicateur (ou index) C’est un minéral qui ne peut être stable que dans des conditions précises de P et T° ; son domaine de stabilité est réduit (ex : séricite, chlorite). La présence de minéral indicateur dans une roche métamorphique renseigne sur les conditions de formation de cette roche qui le contient. VI.2.1.4- Notion de séquence métamorphique La séquence métamorphique est un ensemble de roches métamorphiques qui ont été métamorphisées à des degrés différents, et reconnues comme issues d'un même type de roche, ce qui justifie leur composition chimique semblable. Exemple 1 : Exemple 2 : Selon la nature du protolithe, plusieurs types de séquences métamorphiques sont à distinguer : La séquence pélitique : Dans le cas, le protolithe est une roche sédimentaire appelée pélite composée presque exclusivement d'argile. Les roches de cette séquence comportent des schistes, puis des micaschistes, des gneiss, et, au stade le plus avancé du métamorphisme, des leptynites. La séquence carbonatée : La transformation métamorphique des calcaires et dolomies aboutit à la formation du marbre, du cipolin et des skarns. La séquence calcaro-pélitique a pour protolithe une roche marneuse aboutissant par métamorphisme à la formation d’un calcschiste. La séquence basique : A partir de roches magmatiques basiques (basalte et gabbro), le métamorphisme aboutit à la formation des schistes verts, des schistes bleus, des amphibolites et des éclogites. La séquence granitique : le métamorphisme du granite donne essentiellement des orthogneiss. 74 VI.3- Classification selon le facies métamorphique et la série métamorphique VI.3.1- Notion de faciès métamorphique « Un faciès métamorphique est une association déterminée de minéraux caractéristiques. Cette association permet de définir les conditions de pression et de température qui régnaient lors de la formation de la roche métamorphique indépendamment de sa composition chimique. (Basalte ou argile aura un faciès d’amphibolite à une pression et une température élevée ». La figure VI-12 représente les différents faciès des roches métamorphiques. Remarque : A l’aide du diagramme des faciès métamorphiques, il est possible de suivre la successio