Cours de Géographie - Chapitre 1 & 2 - PDF
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Sorbonne Université
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Ce document présente une brève épistémologie de la géographie française, en retraçant l'évolution de la discipline depuis l'Antiquité jusqu'à nos jours. Il met l'accent sur les différentes méthodes et courants de pensée qui ont marqué l'histoire de la géographie.
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CHAPITRE 1: Brève épistémologie de la géographie française. Introduction. Philippe Pinchemel, “Un jour exista un homme, des êtres humains regardaient de loin se demandant ce qu’il y avait au loin de leur terrain de chasse. Ainsi naquit la curiosité géographique et commença l’histoire de la géographi...
CHAPITRE 1: Brève épistémologie de la géographie française. Introduction. Philippe Pinchemel, “Un jour exista un homme, des êtres humains regardaient de loin se demandant ce qu’il y avait au loin de leur terrain de chasse. Ainsi naquit la curiosité géographique et commença l’histoire de la géographie” Paul Claval, “Toute vie sociale repose sur des savoir-faire, des pratiques et des connaissances géographiques.” Comment expliquer que la géographie pratique, pourtant très ancienne, n'est accédée que tardivement (XIXe siècle) au statut de science? I. De l’Antiquité à la fin du XVIIIe siècle: la géographie une pratique au service de l’inventaire du globe (géographie pré-scientifique ou proto-géographie) a. Les Grecs antiques, premiers géographes, engagés dans une démarche d'élaboration d'un savoir théorique visant à l'acquisition d'une connaissance exhaustive du monde 1. D’un savoir ancestral oral et pratique… - Grèce Antique est un monde composé de sites, morcelées, qui par la cabotage, commerce, guerres, conquêtes, va avoir besoin d'une connaissance du territoire - culture fondée sur mythes: qui ont une fonction sociale et religieuse, voir politique et qui va donc chercher à localiser les lieux mythiques racontés - pratique orale qui attendra le VI siecle avant notre ère pour devenir une pratique savante 2. … a une ébauche de construction d'un savoir théorique… - Thalès et Anaximandre: démystifient la cosmologie par développement de savoir scientifiques - développement de l'astrophysique va notamment s'intéresser à la forme de la terre, mais la notion de géocentrisme reste dominante - premières théorisations, par Hérodote, Eratosthene, Hippocrate poussés par un soucis d'appréhension du monde dans sa totalité, qui vont notamment développer et suivre des méthodes empiriques et scalaires - oecoumene est une des notions qui reste encore importante aujourd'hui, malgré le dépassement de nombreuses autres connaissances développées pendant l'antiquité 3. … mais porteur de contradictions. - caractéristiques de la géographie sont en contradiction avec ses ambitions: son objet semble difficile à saisir, on a des orientations douteuses, confondant notamment l'astrophysique et l'astronomie, et on voit apparaître une distinction importante entre deux branches principales de la géographie qui seront très difficiles à concilier: on distingue géographie physique et géographie humaine - des techniques et méthodes apparaissent comme une pensée idiographique et nomothétique - peu de développement entre Antiquité et époque moderne, notamment car période d'obscurantisme, prise d'ampleur de la religion et perte de textes avec la chute de l'empire romain - arabes approfondissent après avoir redécouvert cependant de nombreux textes grecs avece le développement du commerce international dans la méditerranée comme c'est le cas du GRand Commerce, où sont échangés des livres, boussoles, etc, mais aussi avec les navigations et conquêtes, grande source d'échanges culturels - Al Idrissi, est un des plus importants géographes arabes, ayant vécu au XII siècle et ayant composé une géographie riche en carte, notamment sous la demande de Roger II de Sicile, représentant la Méditerranée - La Renaissance est une époque de progrès de la science avec la redécouverte de nombreux textes perdus - le renforcement de l'etat est également un facteur important, par le financement des explorations et découvertes mais aussi avec le développement d'une administration centrale importante, nécessitant une bonne connaissance du territoire - or on voit un déclin des explorations, les géographes se contentant de traiter les informations déjà présentes, nommés donc géographes de cabinet - institutionnalisation entre le XVII et le XVIII siècle lorsque la cartographie devient une affaire d'État, confiée à des militaires et mathématiciens. le développement d'autres sciences remet en question les bases de la géographie lui imposant un renouvellement la faisant notamment passer d'une science descriptive et explicative - Claude Bataillon, “La géographie, description du monde au départ, s'est trouvée peu à peu confrontée à la nécessité de prouver que ce qu'elle décrit est vrai. La géographie est alors devenue une activité scientifique” pour continuer à exister II. Du début du XIX siècle à 1960: la géographie en quete de legitimite et d'un objet detude A. Des pionniers allemands à l'innovation vidalienne: l'affirmation du statut scientifique de la géographie 1. Du positivisme et de l'évolutionnisme… - pionniers allemands: Alexander Von Humbolt, Karl Ritter et Friedrich Ratzel - Von Humboldt: explore Amérique du Sud, explique différence de végétation par différence d’altitude; présente notion de milieu pour expliquer impact de la nature sur les sociétés - Ritter: explique inégalités de progrès des sociétés humaines par l'impact du milieu et de ses contraintes qui les conditionne: suit méthode empirique et induction - zonage climatique: explique que milieux de même climat se ressemblent - Ratzel: synthèse entre notion de milieu et theorie de l'evolution de Darwin qui donne aspect scientifique a la geographie; Anthropogéographie: difference entre sociétés humaines s'explique par différence égale de milieux; distinction naturevölter et kulturvölter; déterminisme absolu expliquant que les hommes sont complètement déterminés par leur milieux et que l’organisation du territoire découle de lois physiques conditionnant les formes de vies 2. … au positivisme vidalien. - déterminisme relatif: reprend théories des pionniers allemands mais relativise: l'homme garde son pouvoir d'action, il peut utiliser le milieu, s'y adapter et le modifier malgré “l’influence souveraine du milieu” - méthode repose sur deux étapes: description puis synthèse - divise la géographie en deux branches: géographie générale et géographie régionale - formes de vie: forme matérielle d’existence de groupes sociaux adaptés à un lieu donné - région naturelle: unité lithographique, pédologique, climatique et topographique, mise en valeur par un mode de vie, exprimée visuellement par un paysage - paysage: étendu du pays qui s'offre à l'observateur, toujours unique, généralement immuable - paradigme de la géographie vidalienne est le rapport entre l'homme et le milieu - ecole française de géographie: composée d'anciens élèves de vidal après sa mort - emmanuel de martonne sortant de cette école, est un géomorphologue - géodynamique interne (qui crée les reliefs de la terre) et externe (qui détruit ces reliefs) - géographie reste rurale, mais la population de plus en plus urbaines demande une réinvention de la géographie, qui ne semble plus adaptée B. De la géographie scientifique à l’enseignement de la géographie: une institutionnalisation de la discipline - XIX: contexte colonial important, besoin de rattacher les français à la patrie, et développement du commerce international, du chemin de fer: besoin de développer l'enseignement de la géographie - 1802: géographie obligatoire dans l'enseignement secondaire - 1818: création de la fonction de prof dhistoire et geographie - 1831: creation de aggregation masculine de geographie - 1844: création de aggregation féminine de géographie - 1867: géographie obligatoire de l'enseignement primaire - 1871: défaite contre les allemands, besoin de réformer la géographie jusqu'à présent insuffisante d'après rapports d’Himly-Levasseur - 1874: nouveau programme jusque 1980 - 1892: Annales de Géographie, par Vidal - géographie de plus en plus vidalienne (percolation vidalienne), Isabelle Lefort souligne écart entre géographie scolaire, enseignée et la scientifique - géographie veut idéaliser la france, rattaché à la patrie et nation et préparer la colonisation et reconquête III. De la nouvelle géographie à la Géographie post-moderne: d’une géographie “en miette” a une géographie plurielle A. La nouvelle géographie: le passage d'une science naturelle a une science sociale et de science du milieu a science de l'espace - nouvelle géographie, se développe dans le monde anglo-saxon en arrive en france vers 1960 par la mention de ce mouvement dans des articles de Paul Claval; or terme est popularisé par Peter Gould dans The new geography where the movement is - renversement du paradigme opéré par Haggett, qui le fait passer du milieu, donné naturel, à l'espace, construit et modifiable par l'homme: on cherche à organiser et construire l'espace selon des méthodes hypothético-déductives et non plus empiristes et inductive - fin des années 60, on note de grands changements dans les populations, notamment avec des progrès techniques et industriels, depuis 1930 population urbaine est plus importante que la rurale, donc comme “toute science répond à une demande sociale”, après la guerre, celle-ci correspond a aider a une politique d'aménagement du territoire, notamment avec la création de la DATAR en 1963 par Charles de Gaulle dans le but de distribuer de façon plus juste et équitable le territoire, mais pour les rapports et états des lieux, besoin de géographes afin de proposer des prédictions - néopositivisme ou positivisme logique, a partir des années 20 s'opposant à la spéculation 1. L’analyse spatiale: une géographie quantitative et systémique qui témoigne de l' avènement du positivisme et du structuralisme. - géographie devient une science quantitative et non plus qualitative, reposant donc sur des chiffres et des systèmes - analyse spatiale est une nouvelle approche géographique chercher à expliquer lorganisation de lespace en cartographiant des objets et leurs liens entre eux - systeme: cadre permettant de conceptualiser des relations d'interdépendance à l'origine de l'organisation un espace et de ceux qui le caractérisent - tenants de la nouvelle géographie s'inspirent de la nouvelle économie (qui utilise l'informatique et les nouveaux modes de communication) et de la sociologie spatiale (expliquant que les structures spatiales façonnent l'action sociale) - ecole de chicago, 1926 par Ezra Park, mélange sociologie et organisation spatiale - pour expliquer la logique dorganisation de groupes sociaux au sain dagglomeration - modèle de Vonthunen: explique que le profit d'une production dépend de l'utilisation optimale de l'espace et des coûts de transports de la marchandise vers le marché - modèle de Christaller: théorie des places centrales: explique que l’importance d'une ville est définie par les services qu'elle propose: plus une ville propose de services, plus elle est importante et plus la zone qu'elle polarise est importante aussi - prise en compte de notions laissées de côté par la géographie classique comme les villes et espaces urbains, et redéfinitions de certaines notions: - réseau: système composé de lieux ou pôles, axes et flux - région: fonctionnelle et polarise: l'espace est organisé par des relations plus en moins visibles qui émanent de un ou plusieurs pôles et qui vont déterminer les centralités et périphéries - marginalisation d'autres notions comme le paysage: considéré restreint, subjectif, bougeant avec la société, et équivoque (phénomènes de divergence et convergence), reste de l'ordre de la géographie descriptive et inductive, et l'apparition des paysages de plus en plus urbains marque definitive mènent la banalisation du paysage - années 60: apparition de relations horizontales entre les espaces et non plus verticales comme c'était le cas dans la géographie vidalienne - nouvelle géographie est une science sociale, et non pas physique car pose des limites importantes notamment liées au déterminisme mathématique qui, selon Jean-Jacques Bavaux, déshumanise la géographie - devient une “science ignorante de l’épaisseur humaine des sociétés” 2. L’éclatement de la géographie: la marginalisation des courants classiques et l’émergence de nouveaux courants. - émiettement de la géographie, multiplication des branches - années 60/70: encore beaucoup de thèses classiques, vidaliennes, géomorphologiques: Olivier Dollfus, Les Andes centrales du Pérou, une étude géomorphologique - nouveau paradigme: n'est plus le lien entre l'homme et son milieu mais lorganisation de lespace par l'homme, se fondant sur de nouvelles méthodes comme la chorématique (développé par Roger Brunet qui cherche à mettre en avant la singularité de l'espace en représentant des éléments élémentaires de celui-ci) et qui tente de faire une synthèse en expliquant que l'homme construit l'espace mais que cela ne suffit pas pour l'explique car est aussi influencé par des lois spatiales - la geographie amenagement devient source de probleme apres son développement en 1963 en france en tant que première géographie physique concrète - George Bertrand développe les géosystèmes: approche systémique de données biologiques, physiques et sociales, pour mettre en avant le fait que l'homme influence son espace mais que celui ci a une action réciproque sur lui: rétroaction - Yves Lacoste, Hérodote, développe géopolitique, en contexte de guerre froide et de mondialisation, reproche à la géographie d'ignorer l'aspect politique de l'espace, tenant compte de l'influence qu'ont les rivalités entre Etats sur celui-ci, sa construction et les questions de souveraineté - géographie économique: rivalités économiques influencent aussi - question énergétique apparaît et est étudiée notamment par Mazzucchi dans son étude sur le gaz en Méditerranée orientale - géographie humaniste et sociale: Eric Dardel reproche à la géographie vidalienne dtre trop détachée et mécaniste, ne veut pas de géographie qui cherche à étudier un espace objectif mais un qui appréhende la subjectivité de l'individu par la géographicité - 2 tendances: question sociale par lecture spatiale, et sociale de l'espace, comme vécu et perçu comme le présente Alain Frémont, La region, espace vecu par différentes groupes sociaux - région: vue comme échelle, entre régional et local et qui est un bassin de vie - géographie comportementale qui considère inutile d'étudier un espace objectif mais qui pousse à s'intéresser à un espace cognitif, au mental de l'individu, dépendant de son appartenance ethnique, menant à des cartes mentales - géographie radicale, développée en amérique du nord afin d'expliquer les inégalités sociales, montrant l'espace comme un produit social dépendant d'un rapport de dominant et dominé, construit par des forces de production et de reproduction - post moderne: postmodernité (époque après deux chocs pétroliers) et postmodernisme (courant intellectuel qui rejette et remet en question vision progressiste) qui amène à géographie postmoderniste B. La sortie de la crise. 1. Une géographie réunifiée. - années 80 et 90 est une période de fin de crise, la géographie s'affirme comme science sociale mais quel paradigme conserver? sachant qu'on a une importante volonté d'utilité sociale - territoire semble le plus approprié: est concret, tangible (“terre”) mais est également une construction physico-histoire, donc produit de l'histoire des sociétés humaines 2. Une géographie plurielle. - 2 courants pendant postmodernisme: écologique et culturel - prise de conscience écologique, notamment avec les rapprots de Meadows (1972) et de Brundtland (1987): croissance continue est incompatible avec la survie du territoire terrestre: besoin de mettre en place un développement durable, permettant à cette génération de satisfaire à tous ses besoins sans compromettre pour cela les besoins des générations suivantes - géographie culturelle: le territoire n'est pas considéré tel qu'il est mais tel qu'il est vécu, pensé et représenté - ceci est appliquée à d'autres domaines tels que l'alimentation par Gilles Fumey qui montre que l'alimentation n'est pas seulement un acte biologique mais aussi une produit culturel - renouvellement de certains concepts, comme c'est la cas du paysage, avec Yves Luginbühl qui l'étudie selon une approche plus sensible et de représentations - justice spatiale se développe pour souligner les inégalités sociales, montrant que le territoire est bien un produit d'un rapport dominant/ dominé, comme le montre Judicaëlle Dietrich en travaillant sur la pauvreté à Jakarta C. Des difficultés d’adaptation à l’enseignement. - peu de professeurs - difficulté de la géographie de assumer comme science en soi: contestée au concours, difficulté de s'accorder sur un paradigme et conflits débouchent sur période de crise - si la crise sur le paradigme semble terminée, la question de l'utilité sociale devient cependant de plus en plus importante: difficulté de faire reconnaître l'utilité sociale de la géographie