Chapitre 3 Monnaie - 1 PDF
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This document provides an introduction to the concepts of value, money, and inflation in economics. It explores the evolution of value from use value to labor value and then to market price. The document also examines the various forms of money and the mechanisms of its creation and control, as well as concepts of inflation, deflation, and disinflation. It is likely intended for an undergraduate-level economics course.
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VALEUR, MONNAIE ET INFLATION INTRODUCTION Les valeurs monétaires sont l’unité de compte la plus souvent utilisée en économie, alors que la monnaie est un bien particulier : elle n’a pas de valeur en soi ! Dans ce chapitre, vous allez comprendre comment, en économie, la notion de valeur es...
VALEUR, MONNAIE ET INFLATION INTRODUCTION Les valeurs monétaires sont l’unité de compte la plus souvent utilisée en économie, alors que la monnaie est un bien particulier : elle n’a pas de valeur en soi ! Dans ce chapitre, vous allez comprendre comment, en économie, la notion de valeur est passée de la valeur d’usage à la valeur travail, puis à la valeur prix. Ensuite, nous aborderons l’évolution des formes de la monnaie, les mécanismes de sa création aujourd’hui, et les moyens de contrôles qui existent pour maîtriser son évolution. Dans un dernier temps, nous aborderons la notion d’inflation, de déflation et de désinflation. PLAN I. La valeur en économie II. Origine et formes de la monnaie III. Mécanismes de création et de contrôle de la monnaie IV. Inflation, désinflation, déflation I. LA VALEUR EN ÉCONOMIE De la valeur d’usage à la valeur prix en passant par la valeur travail A. LA VALEUR CHEZ LES CLASSIQUES : UNE THÉORIE DE LA VALEUR TRAVAIL VALEUR D’USAGE ET VALEUR D’ÉCHANGE Depuis Aristote, on pense que les biens qui s’échangent sont dotés de deux valeurs : une valeur d’échange (leur valeur dans l’échange qui va déterminer leur capacité à s’échanger, c’est-à-dire à permettre d’acquérir d’autres biens) une valeur d’usage (on s’intéresse alors à la valeur des biens lorsqu’on en use, c’est-à dire pour celui qui les possède et en fait usage : utilité). Idée : relier ces deux types de valeur et de fonder la capacité des biens à s’échanger (leurs valeurs d’échange respectives) sur leurs valeurs d’usage, c’est-à-dire leur utilité. Rejet de cette idée par Adam Smith et la plupart des économistes classiques (comme Ricardo). PARADOXE EAU / DIAMANTS ET REJET DE LA VALEUR D’USAGE Le Paradoxe eau/diamants L’eau, qui a une très forte valeur d’usage (elle est un bien extrêmement utile), a une très faible valeur d’échange (« à peine est-il possible de n’avoir rien en échange » dira Smith). Le diamant au contraire est doté d’une valeur d’échange élevée, sans rapport avec sa valeur d’usage qui est faible. Conséquences Rejet de l’explication de la valeur d’échange par la valeur d’usage Nécessité d’une certaine valeur d’usage = simple condition nécessaire pour qu’il ait une valeur d’échange mais pas suffisante Il faut chercher ailleurs cette qualité commune qui permet de comparer les biens dans l’échange. LA DISTINCTION ÉCHANGE / USAGE « Adam Smith a remarqué que le mot Valeur a deux significations différentes, et exprime, tantôt l’utilité d’un objet quelconque, tantôt la faculté que cet objet transmet à celui qui le possède, d’acheter d’autres marchandises. Dans un cas la valeur prend le nom de valeur d’usage ou d’utilité : dans l’autre celui de valeur en échange. « Les choses, dit encore Adam Smith, qui ont le plus de valeur d’utilité n’ont souvent que fort peu ou point de valeur échangeable ; tandis que celles qui ont le plus de valeur échangeable ont fort peu ou point de valeur d’utilité. » L’eau et l’air, dont l’utilité est si grande, et qui sont même indispensables à l’existence de l’homme, ne peuvent cependant, dans les cas ordinaires, être donnés en échange pour d’autres objets. L’or, au contraire, si peu utile en comparaison de l’air ou de l’eau, peut être échangé contre une grande quantité de marchandises. » David Ricardo, Des Principes de l'économie politique et de l'impôt, Chapitre I. De la Valeur, 1817 B. LA VALEUR CHEZ LES CLASSIQUES : UNE THÉORIE DE LA VALEUR TRAVAIL LE TRAVAIL, SOURCE DE LA VALEUR D’ÉCHANGE Un point commun entre tous les biens qui s’échangent est d’avoir été produits par le travail avant de pouvoir être portés au marché. C’est donc la quantité de travail qui a été nécessaire pour produire un bien et le porter au marché qui réglera sa valeur dans l’échange. Plus un bien sera difficile à produire, plus il faudra dépenser de travail humain pour y parvenir (exemple du diamant), plus sa valeur d’échange sera élevée et ce, sans rapport avec sa valeur d’usage. Au contraire, un bien, même doté d’une valeur d’usage élevée (tel l’eau), aura une faible valeur d’échange s’il n’y a pas eu besoin d’une forte dépense en travail pour le produire et l’amener au marché. LE TRAVAIL, SOURCE DE LA VALEUR D’ÉCHANGE « Le travail est […] la mesure réelle de la valeur échangeable de toute marchandise » Adam Smith (Recherches, Livre 1, chapitre V) « Les choses, une fois qu’elles sont reconnues utiles par elles-mêmes, tirent leur valeur échangeable de deux sources, de leur rareté, et de la quantité de travail nécessaire pour les acquérir. […] La règle qui fixe la quantité que l’on doit donner d’un objet pour un autre, ne dépend que de la quantité comparative de travail qui a été employée à la production de chacun d’eux. » David Ricardo (Principes, chapitre 1er) L’EXEMPLE DE LA CHASSE « Par exemple, si dans une nation de chasseurs il en coûte ordinairement deux fois autant de travail pour tuer un castor que pour tuer un daim, on donnera naturellement deux daims pour un castor, ou, en d’autres termes, un castor vaudra deux daims. Il est tout simple que ce qui est d’ordinaire le produit de deux journées ou de deux heures de travail, vaille le double de ce qui n’exige ordinairement qu’un jour ou une heure de travail. » Smith, cité par Ricardo UNE THÉORIE DE LA VALEUR TRAVAIL Selon les classiques, le travail est le « fonds primitif de toute richesse » et c’est la dépense en travail qui fonde la valeur des biens dans l’échange : les prix des biens devraient donc respecter les valeurs d’échange ainsi déterminées et refléter en conséquence les conditions de production. Les prix « naturels » sont des « prix de production » Smith : valeur travail commandé : addition des revenus (salaire, profit, rente) qu’il faut payer dans des conditions normales pour faire produire la marchandise ; Ricardo : valeur travail incorporé : le prix naturel dépend de l’addition du travail directement consacré à la fabrication du bien (cf. Smith) ET du travail indirect requis antérieurement pour produire la matière première et les outils nécessaires à la production du bien. nuance : le prix naturel dépend aussi du taux de profit, qui « modifie considérablement » cette loi de la valeur travail. C. LA VALEUR COMME PRIX D’ÉQUILIBRE CHEZ LES NÉOCLASSIQUES LE MARGINALISME: UNE ‘DÉCOUVERTE MULTIPLE’ RÉVOLUTIONNAIRE AUJOURD’HUI DOMINANTE Rupture avec la notion de valeur travail et fonde son analyse sur l’idée de la proportionnalité entre le prix d’un bien et son utilité marginale Rupture avec une logique par classes sociales et réduit le capitalisme à une économie marchande constituée d’Homo œconomicus indifférenciés Un exemple de « découverte multiple » William Stanley Jevons (1835-1882) (UK) Carl Menger (1840-1921) (Autriche) Léon Walras (1834-1910) (Suisse) LA VALEUR COMME UTILITÉ Les précurseurs (XVIIIe, Ferdinando Galiani, Jacques Turgot et Étienne de Condillac) : la valeur d’un bien ne réside pas dans une propriété du bien lui-même mais dans la perception subjective qu’a l’individu de sa capacité à satisfaire un besoin Rappel : remise en cause avec les classiques où la valeur d’usage est écartée au profit de la valeur d’échange Les marginalistes renversent cette démarche Lien entre l’ancienne notion d’utilité à la quantité consommé de ce bien Le calcul économique de l’agent porte donc sur l’utilité marginale du bien, c’est-à-dire celle de la dernière unité consommée. Ainsi l’utilité marginale d’un bien est le supplément d’utilité attendu (à la marge) de l’acquisition (dans l’échange) d’une unité supplémentaire de ce bien. LE PARADOXE EAU/DIAMANTS : LA SOLUTION Pourquoi l’eau, vitale (utilité totale élevée), est-elle peu chère alors que les diamants, inutiles (utilité totale faible), sont hors de prix ? Il faut raisonner à la marge ! L’eau est très abondante donc son utilité marginale est faible : on n’est pas disposés à consentir des sacrifices élevés pour l’obtenir Les diamants sont très rares et leur utilité marginale est élevée Une limite : repose sur l’hypothèse que les consommateurs sont capables de quantifier très précisément l’utilité marginale liée à la consommation de tous les biens existants. Irréaliste ! UTILITÉ, RARETÉ ET PRIX : LES CLEFS DE LA VALEUR L’agent économique rationnel (homo oeconomicus rationalis) n’accepte de consommer davantage d’un bien (ce qui en fait diminuer l’utilité marginale) que si son prix baisse : la demande d’un bien est décroissante en fonction de son prix. L’agent économique maximise l’utilité de sa consommation totale lorsque les prix relatifs des différents biens sont proportionnels à leurs utilités marginales respectives. Puisque les utilités marginales dépendent des quantités disponibles, les prix des biens sont des indicateurs de leur rareté. Enfin, si ces quantités sont données, les prix des biens sont indépendants de leur coût de production : la théorie classique de la valeur est ainsi démentie. MARCHÉS, PRIX, PRODUCTION ET REVENU Atomicité vs. classes sociales Rupture avec l’approche par les classes sociales : la seule réalité est celle d’un grand nombre d’individus (hypothèse d’atomicité dans les modèles de concurrence pure et parfaite) libres, indépendants et souverains, qui vendent des facteurs de production sur des marchés : marché du travail, marché des biens et services, marché du capital Le revenu est issu d’un échange Le revenu des agents économiques découle uniquement du prix atteint par ces facteurs de production sur ces marchés (rémunération à leur productivité marginale) Le processus de production est une ‘boîte noire’, une pure activité technique qui consiste à combiner les facteurs de production échangés sur des marchés pour produire des biens qui à leur tour seront échangés et valorisés sur des marchés Pas de substance économique dans l’activité de production : dévalorisation de toutes les références de l’économie classique ancrées à la compréhension du processus de production (classes sociales, valeur travail, sur-profit marxien…) LE PRIX, RÉVÉLATEUR DE VALEUR Rien n’a de valeur ‘en soi’ : la valeur ne dépend pas du processus de production des biens. La valeur n’existe que dans le prix qui résulte de la confrontation des besoins (subjectifs) de chaque bien et de l’effort de production de ces biens La valeur perçue par chaque agent économique est subjective et le prix de marché en est la seule expression objective Le prix « naturel », celui devant s’imposer, est donc le prix « d’ équilibre » du marché. Il se dégage « spontanément » pour peu qu’on laisse fonctionner le marché librement (cf. Chapitre sur la notion d’ équilibre). Le rejet de la théorie de la valeur travail… « Il y a encore la question du travail comme élément de valeur. Il n’a pas manqué d’ économistes qui ont mis en avant le travail comme cause de la valeur, affi que tous les objets tirent leur valeur du fait que du travail a été incorporé entre eux ; et l’on implique ainsi, quand on ne le pose pas, que la valeur sera proportionnelle au travail. C’est une doctrine qui, étant directement opposée aux faits, ne peut subsister un seul instant […]. Il peut encore y avoir un écart entre la quantité de travail dépensée pour un objet et la valeur s’attachant à lui en fin de compte. Une grande entreprise, comme le Great Western Railway ou le tunnel sous la Tamise, peut incorporer un grand montant de travail, mais sa valeur dépend entièrement du nombre de personnes qui la trouvent utile. Si l’on ne pouvait trouver aucun usage au vapeur Great Eastern, sa valeur serait nulle, exception faite de l’utilité de certains matériaux. » Wiliam Stanley Jevons, La théorie de l’économie politique, 1871 … Et le développement d’une théorie subjective de la valeur « Ainsi, la valeur n’est pas inhérente aux biens ; elle n’en est pas une propriété ; elle n’est pas une chose qui existe en soi ; c’est un jugement que les sujets économiques portent sur l’importance des biens dont ils peuvent disposer pour maintenir leur vie et leur bien-être. Il en résulte que la valeur n’existe pas hors de la conscience des hommes. C’est donc une erreur de dire qu’un bien qui a de la valeur pour des sujets économiques est une ‘’valeur’’, et les économistes ont tort de parler de “valeurs” comme d’objets réels indépendants et d’objectiver, de cette façon, la valeur. » Carl Menger, Grundzätse Der VolksWirtschatftsLehre, 1871 II. ORIGINE ET FORMES DE LA MONNAIE A. LES TROIS FONCTIONS DE LA MONNAIE FONCTION 1. UNITÉ DE COMPTE La monnaie permet de mesurer la valeur des biens et services. Elle sert d’étalon de mesure de la valeur de tous les autres biens. Avant la monnaie courante, il y avait le système de troc, plus le nombre de prix relatifs est élevé Un prix relatif est un rapport d’échange particulier entre deux biens, deux services ou un bien et un service. LA MONNAIE SIMPLIFIE LE SYSTÈME DE PRIX Soit une économie de troc à deux biens A et B, supposons que 1A=3B. - Pour avoir 1u de A, il faut céder 3unités de B - Pour avoir 1u de B, il faut céder 1/3unités de A On a deux prix relatifs Supposons qu’on est dans une économie à N biens, il existe N(N-1)/2 transactions donc il faut définir N(N-1) prix relatifs. La monnaie simplifie le système de prix 25 15 Janvier 2009 FONCTION 2. INTERMÉDIAIRE DES ÉCHANGES La monnaie est un instrument des échanges. Elle fournit une contrepartie aux flux de biens et services. L’economie de troc est remplacée par une économie monétaire pour remédier aux inconvénients du troc. Un moyen d’échange unique (universel). LES INCONVÉNIENTS DU SYSTÈME DE TROC Le système de troc est très lourd à mettre en place et présente des inconvénients : imaginons que le bien A est une chèvre et le bien B est du pain ! Comment trouver la personne qui est prête à échanger une chèvre contre du pain ou inversement (Il faut trouver un partenaire avec des intentions symétriques). Comment établir et définir des prix relatifs pour échanger des chèvres et du pain? - Est-il possible d’échanger 1 pain pour 1/3 de chèvre? - Est-il possible de transporter les chèvres avec nous? L’AVANTAGE DE LA MONNAIE SUR LE TROC La monnaie remplace le besoin de troc par deux operations : une opération d’achat et une autre de vente 🡪 Pas de coûts de transaction 🡪 Diminution du nombre de marchés La valeur d’échange n’est pas déterminée par les deux parties, mais par la société dans son ensemble Contrairement à une chèvre, la monnaie est divisible Toutefois, les agents peuvent perdre confiance dans la valeur de la monnaie en période de crise, d’inflation et de conflits 3 CARACTÉRISTIQUES ESSENTIELLES Pour remplir cette fonction, ce mode de paiement doit être : 1. Indéterminé : la monnaie permet de tout régler à n’importe quel instant. 2. Général : elle est admise par tout le monde et en toutes circonstances dans un espace bien défini. 3. Immédiat : un simple transfert d’argent conduit à l’extinction de la dette. 29 15 Janvier 2009 FONCTION 3. RÉSERVE DE VALEUR La monnaie permet de dissocier l’achat d’un bien et la vente d’un autre bien dans le temps. La monnaie permet aux agents de prendre des décisions en fonction du temps: le présent, le passé ou le future. L’agent est libre d’acheter/vendre quand il veut (“la monnaie est la liberté frappée”, Dostoïevsky). En période d’inflation (hausse généralisée des niveaux de prix), le pouvoir d’achat baisse 🡪 cf. suite du cours 30 15 Janvier 2009 UN ACTIF PARMI D’AUTRES “La monnaie est la liquidité par excellence” (Keynes). Elle se distingue des autres actifs par la prime de liquidité : elle se transorfme rapidement en pouvoir d’achat et à un moindre coût. La monnaie est aussi considérée comme un actif de patrimoine que les agents peuvent transformer en : 1. Actifs réels sous forme de biens, d’immobiliers, d’équipements, … 2. Actifs financiers sous forme d’actions, d’obligations, les plus-values d’actifs 3. Actifs liquides comme la monnaie sous forme de billets, de dépôts à vue…ou encore la quasi-monnaie sous forme de bons du Trésor ou de dépôts à terme. LES FONCTIONS SOCIALES DE LA MONNAIE Vecteur de liens sociaux non marchands Alliances matrimoniales (la dot), alliances claniques (le tribut), alliance religieuse (l’obole) Substitution à la violence pour compenser les pertes dues à une mort, un accident… Symbole de l’appartenance à une communauté humaine sur un territoire donné. La monnaie représente une forme de « langage commun » utilisé au sein d’une même « communauté » de paiement. En établissant des règles communes à tous les individus, elle permet de relier les individus : producteurs et clients. Elle contribue à l’émergence d’une conscience d’appartenir à un même monde. Elle forge une identité commune, permet de souder une population. La création de l’Euro a été ainsi le symbole d’une communauté de destin entre les peuples européens de la zone euro qui veulent éviter le retour des guerres fratricides. En ce sens, la monnaie est première dans le lien social. Importance de la confiance de tous en son acceptation par les autres. On accepte de se séparer d’une richesse matérielle contre de la monnaie parce que l’on sait qu’elle permettra l’acquisition d’autres richesses matérielles. Monnaie et confiance sont indissociables. En effet, Si la monnaie remplit ses fonctions économiques, c’est qu’elle est un instrument admis par tous et en toute circonstance. La confiance rend la monnaie légitime au sein d’une société B. LES FORMES DE LA MONNAIE LA MONNAIE MARCHANDISE Définition : la monnaie marchandise est un bien donné pour payer un achat. C’est la première forme historique de monnaie après l’ère du troc Des formes très diverses au cours des âges Dès l’Antiquité les objets vont servir d’unité monétaire : fers de hache, pièces de tissus, coquillages, bétail, moutons, sel, thé… En Afrique jusqu’au 19ème siècle on utilisait de la monnaie coquillage. En France après le Débarquement (et aujourd’hui en prison) : cigarettes, soupes Ramen LA MONNAIE MÉTALLIQUE Inconvénients de la monnaie marchandise : transport, volume, la monnaie peut “périmer” ou “mourir”, differences de qualité… Solution : utiliser des métaux précieux : pieces métalliques La valeur de la monnaie est donnée par son poids en métal précieux (or/argent : bimétallisme). Monnaie = lingots de métaux précieux qui doivent être pesés lors de chaque transaction : monnaie métallique pesée. Problème 1. Possibilité de modifier le poids des lingots / de remplacer le métal précieux par un métal de moindre valeur… Solution : le pouvoir politique garantit le système monétaire : pouvoir régalien de l’Etat + matérialisation par l’emblème du Roi LA MONNAIE MÉTALLIQUE Problème 2 - les pouvoirs publics peuvent aussi falsifier les pièces (la mauvaise monnaie). - lorsque deux monnaies circulent dans un pays, la mauvaise monnaie sache la bonne (la loi Gresham). Les agents vont garder les bonnes pièces Solution : imposer un rapport fixe entre l’unité monétaire et la quantité de métal précieux. Exemple : la loi de Germinal an XI (mars 1803) 1franc = 1g d’or + 15,5 g d’argent LA MONNAIE MÉTALLIQUE Problème 3 La valeur de ces métaux varie en fonction de leur valeur commerciale, qui dépend des réserves et des gisements d’Or et d’Argent. Il y a thésaurisation : s’il y a découverte de nouveaux gisements d’or, la valeur de l’argent augmente. Les agents conservent l’argent Il y spéculation : s’il n’y a pas de coûts de transaction/transport, les agents peuvent acheter de l’or (là où il coûte pas cher) et le vendre (là où il coûte très cher). LA MONNAIE MÉTALLIQUE Solution Passer du bimétallisme au monométallisme à partir de la seconde moitié du XIX siècle : l’étalon or. Toutes les monnaies sont définies en un poids non modifiable d’or. Le taux de change est défini par un rapport de quantités physiques d’or. LA MONNAIE PAPIER Les premiers billets : Banque d'Amsterdam (1609) puis Banque de Venise En régime d’étalon-or et jusqu’en 1914 tous les billets sont convertibles en or, les pièces de monnaie et les billets sont définis par un poids d’or le billet a un cours légal (la monnaie ne peut pas être refusée dans le paiement, on doit l'accepter) Abandon de la monnaie métallique : après 1914 le stock d’or détenu par les banques est insuffisant pour faire face aux demandes de conversion Aujourd’hui, les billets sont devenus inconvertibles en or ; ils ont un cours légal et forcé LA MONNAIE SCRIPTURALE C’est la monnaie qui circule sur simple écriture comptable sur les comptes bancaires/courants. Elle est constituée par les sommes inscrites sur les comptes à vue ou dépôts détenus par les intermédiaires financiers. Ces comptes peuvent prendre la forme de comptes ouverts dans les banques commerciales, de comptes chèques postaux ou de comptes ouverts auprès des comptables publics (Banque de France, CDC). AVANTAGES ET LIMITES DE LA MONNAIE SCRIPTURALE Trois avantages 1. Pas de déplacement/transport. 2. Faible probabilité de perte ou de vol. 3. Les écritures sont des preuves. Limites - Falsification facile - Avec Internet, possibilité de monnaies échappant au contrôle des États (bitcoins…) Lire l’article sur les monnaies solidaires [sur le site de ConsoGloble] LES FORMES DE LA MONNAIE Plusieurs formes de monnaie co-existent aujourd’hui 1. Monnaie divisionnaire : pièces (0,03% des moyens de paiement) 2. Monnaie fiduciaire : billets (10% des moyens de paiements) 3. Monnaie scripturale : écritures comptables (90% des moyens de paiement) 🡪 Marche vers la dématérialisation Disparition des pièces au Danemark Paiement Izzly obligatoire sur le campus Paiement par QR code ou contact de son téléphone B. LES AGRÉGATS MONÉTAIRES DÉFINITION : AGRÉGAT MONÉTAIRE Un agrégat monétaire permet de mesurer statistiquement la monnaie. Il est composé des ‘‘moyens de paiement détenus par les agents non financiers et, parmi leurs placements financiers, ceux qui sont susceptibles d’être transformés aisément et rapidement en moyens de règlement sans risque important de perte en capital’’ Un agrégat est une mesure comptable de la monnaie en circulation (i.e. de la masse monétaire) DÉFINITION : MASSE MONÉTAIRE Définition : la masse monétaire est la quantité totale de monnaie mise à la disposition des agents non financiers résidents par le système bancaire et financier. Remarques - Cette définition implique que la monnaie échangée par les agents financiers ne fait pas partie de la masse monétaire - Les dépôts en devises de agents non résidents dans des banques françaises ne sont pas comptabilisés dans la masse monétaire - Le contenu de la masse monétaire évolue avec le temps - Si un actif remplit les deux fonctions (intermédiaire d’ échanges/réserve de valeur), il peut être comptabilisé dans la masse monétaire 45 LES AGRÉGATS MONÉTAIRES M1: formes de monnaie les plus liquides, immédiatement utilisaables grâce à différents moyens de paiement monnaie fiduciaire (billets et pièces en circulation) monnaie scripturale (monnaie inscrite sous forme de chiffres sur un compte de dépôt à vue) M2 M1 Dépôts rémunérés (livrets A, comptes d’épargne‑logement, livrets de développement durable et solidaire, dépôts à terme jusqu’à deux ans…) considérés comme liquides, très facilement transférables sur un compte de dépôt à vue pour être utilisés, et donc circuler dans l’économie M3 M2 Instruments financiers émis par les établissements financiers et souscrits par des épargnants et investisseurs pour une durée inférieure à deux ans : actifs sont considérés comme pouvant être relativement disponibles et donc transférables assez rapidement sur un compte de dépôt à vue pour être utilisés par les agents économiques. * M0 = base monétaire ou “monnaie banque centrale” monnaie fiduciaire réserves obligatoires et excédentaires que les banques commerciales déposent auprès de la banque centrale facilités de dépôt Source : site de la Banque de France III. LA CRÉATION MONÉTAIRE ET SON CONTRÔLE LES CRÉDITS FONT LES DÉPÔTS La théorie des réserves fractionnaires a été soutenue par nombre d’ économistes jusque dans les années 1970. Selon cette théorie, les dépôts de certains clients de la banque seraient un prérequis pour tout octroi de crédits à d’autres demandeurs. En d’autres termes, les dépôts précéderaient toujours les crédits. Cette théorie, qui a pu, par le passé, être vraie pour certaines banques, ne correspond plus à la réalité. Aujourd’hui, il est en admis que les « crédits font les dépôts » : c’est le système bancaire qui est à l’initiative de la création monétaire. Par un simple jeu d’écriture, un crédit devient immédiatement un dépôt, et cette écriture comptable vient gonfler la monnaie en circulation dans l’économie. Tout crédit octroyé par le système bancaire équivaut à de la création monétaire. C’est le besoin de financement des agents économiques, donc leur demande de crédits, qui est à la source de la création monétaire ; cette dernière accompagne ainsi l’activité économique. CONTRÔLE DE LA CRÉATION MONÉTAIRE Réglementation prudentielle Ratio de solvabilité rapportant le montant total de leurs fonds propres à leurs engagements au moins égal à 8 %. Exemple : Si une banque détient 100 € de fonds propres, elle ne pourra prêter plus de 1 250 €. Procédures de contrôle interne destinées à leur permettre d'apprécier la capacité de remboursement des demandeurs de crédit et limiter ainsi les risques de défaut de paiement. Politique monétaire Le rôle de la banque centrale est de gérer la masse monétaire de façon à ce qu'elle soit adaptée aux besoins des agents économiques. Dans la zone euro, c’est la Banque Centrale Européenne, qui régule la quantité de monnaie en circulation. Elle est indépendante des États et des autres institutions européennes. La banque centrale doit s'assurer qu'il y ait suffisamment de monnaie dans l'économie mais pas trop non plus. Il faut éviter à la fois la récession et l'inflation. Elle a un objectif d'une inflation inférieure à 2 %, mais proche de ce niveau. LA BANQUE CENTRALE, UN MONOPOLE NÉCESSAIRE - Elle sert de chambre de compensation entre les banques commerciales : simplification de la compensation interbancaire quotidienne - Elle peut servir de prêteur en dernier ressort auprès des banques commerciales - Elle régule l’activité de création monétaire des banques, ce qui est fondamental car celle-ci repose sur la confiance - Son monopole empêche la prolifération des monnaies privées (cf. monnaies virtuelles ou monnaies solidaires actuelles) et garantit la cohésion du système économique - Elle contrôle les échanges monétaires avec le reste du monde LA MONNAIE BANQUE CENTRALE Les banques « de second rang » ont un compte à la BC - Lors de la compensation interbancaire quotidienne, elles dégagent un excédent ou un déficit qui s’inscrit sur ce compte en monnaie « centrale » - Elles doivent également payer en monnaie centrale la monnaie fiduciaire distribuée à leurs clients (dont le monopole d’émission revient à la Banque Centrale) Si une banque de second rang accorde trop de crédit : fuite de monnaie centrale - Ses clients vont demander beaucoup de monnaie fiduciaire - Ils vont payer des agents domiciliés dans une autre banque (= dette de la banque sur le marché interbancaire) Source LE TAUX D’INTÉRÊT DIRECTEUR Si une banque « de second rang » a un besoin de financement - Elle peut souscrire un crédit auprès d’une de ses consœurs (cher) : taux d’intérêt interbancaire [voir : scandale du LIBOR] - Elle peut également réescompter ses créances auprès de la Banque Centrale : taux d’intérêt directeur Ce taux d’intérêt est l’outil central de la politique monétaire : il est la base à partir de laquelle s’établissent tous les taux LE RATIO PRUDENTIEL Les banques de second rang doivent déposer une fraction de leurs encours auprès de la Banque Centrale (ratio relevé après la crise de 2008). Cela limite l’effet multiplicateur. LIMITES DE L’ACTION DE LA BC Les banques de second rand peuvent se refinancer sur les marchés financiers Les taux directeurs n’ont qu’un effet d’entraînement : pas de contrôle DIRECT de la création monétaire Si une banque commerciale est en situation de monopole, pas de nécessité de compensation interbancaire Le multiplicateur bancaire décuple la création monétaire privée III. INFLATION, DÉSINFLATION, DÉFLATION DÉFINITIONS (1) INFLATION 🡪 Augmentation positive et continue du niveau des prix à la consommation (situation la plus fréquente dans le monde) Inflation DÉFINITIONS (2) DÉSINFLATION 🡪 La variation des prix est positive mais décroissante : les prix augmentent mais de + en + lentement Désinflation DÉFINITION (3) DÉFLATION 🡪 La variation des prix est négative : les prix diminuent Déflation Retour sur : valeurs nominales / valeurs réelles Compte tenu de l'inflation, les fluctuations des prix peuvent "masquer" les évolutions de la valeur des agrégats (par ex. le PIB), et rendre difficiles les comparaisons temporelles (entre périodes) ou spatiales (entre pays) On distingue les agrégats "en valeur" (= "nominaux" = "à prix courants") : bruts, sans correction "en volume" (= "réels" = "à prix constants") : corrigés des prix Relation entre un agrégat nominal et un agrégat réel Relation entre les taux de croissance du niveau des prix θi, d'un agrégat nominal θA et de sa correspondante réelle θa LES CAUSES DE L'INFLATION 1. inflation par la demande (excès de demande / déficit d'offre sur marché donné) 2. inflation par les coûts des entreprises (salaires, prélèvements obligatoires, taux d'intérêt) 3. inflation par la monnaie (augmentation des crédits accordés aux agents et maintien de l'offre) 4. inflation structurelle (monopoles) 5. inflation importée (augmentation du prix des consommations 6. intermédiaires, dévaluation de la monnaie) LES CONSÉQUENCES DE L'INFLATION Positives Allègement de la dette en cas d'emprunts à taux fixe : soutien de l'activité et de la demande globale (30 glorieuses) Paix sociale ("course à l'inflation") Négatives Pénalise les titulaires de revenus fixes (rentiers) ou à adaptation retardée (salariés, retraités) N'incite pas les entreprises à effectuer des gains de productivité Pénalise les créanciers (les placements perdent de la valeur) Pénalise les exportateurs si le taux de change n'est pas ajusté Peut entraîner une perte de confiance dans la monnaie OUTILS DE LUTTE CONTRE L’INFLATION Si la Banque centrale prévoit une reprise d'une hausse générale des prix, elle peut : Augmenter son taux d’intérêt : les banques vont répercuter cette hausse sur le coût du crédit ce qui devrait dissuader les agents économiques d’emprunter à court terme, ce qui devrait limiter la création de monnaie supplémentaire ; Augmenter les réserves obligatoires : ceci privera les banques d’une partie de leurs ressources pour faire des crédits ; Diminuer le volume de crédit qu’elle est prête à accorder aux banques ou même leur vendre des titres pour les priver de liquidités. L'hyperinflation : billet de 50 milliards de marks (1923) LE SPECTRE DE LA DÉFLATION Toute baisse du niveau général des prix est une mauvaise nouvelle Sphère réelle Les entreprises vendent à des prix qui ne couvrent plus leurs coûts : elles préfèrent liquider leurs stocks et réduire leur activité 🡪 augmentation chômage, diminution de l'investissement Les consommateurs ont intérêt a attendre de futures baisses de prix 🡪 cercle vicieux de la baisse de la demande globale Sphère financière La baisse des prix induit l'augmentation du taux d'endettement des entreprises (dette/fonds propres), ce qui entretient le "crédit crunch" (rationnement du crédit par les banques) Exemples historiques : Grande Dépression (1929) / Japon (1990s) LE CHOC D’INFLATION POST_COVID Source : EUROSTAT CAUSES CONJONCTURELLES "Effet de base” : l'inflation est habituellement mesurée sur un an et, à la suite de deux ans de pandémie, le niveau d'inflation qui sert de référence est particulièrement bas ; Réouverture après la pandémie ○ rattrapage de la demande reportée ○ lenteur de la ermise en marche des processus de production Guerre en Ukraine (baisse des exportations ukrainiennes, sanctions contre la russie) Relance budgétaire massive pendant la période Covid (en France, +5,1% de dépenses publiques en 2020, +4% en 2021, aides de soutien au pouvoir d'achat en 2022 ; aux États-Unis, programme de rénovation des infrastructures Faiblesse de la monnaie unique : renchérit le prix des importations, dont notamment le prix des énergies fossiles et renforce ainsi l'effet d'inflation importée. CAUSES STRUCTURELLES Augmentation structurelle des prix de l’énergie : tensions géopolitiques, épuisement des énergies fossiles, transition écologique Choc de demande pour certains biens (biens informatiques et électroniques, matériel d'amélioration de l'habitat, etc.) qui adépassé les stocks des entreprises. Politique monétaire d'assouplissement quantitatif (quantitative easing) des banques centrales entre 2008 et début 2022. ○ Acheter massivement des actifs financiers, y compris la dette publique, pour injecter un maximum de liquidités dans l'économie, afin de relancer l'économie et l'inflation. ○ Longtemps, cette politique a surtout créé de l'inflation du côté des actifs financiers (notamment actions) et de l'immobilier. ○ Aujourd'hui, les volumes colossaux de liquidités ainsi créés font face à une économie dont le potentiel de production est plus limité qu'autrefois (effets de la pandémie et économie mondiale plus fragmentée). UNE DÉSINFLATION RAPIDE L’inflation resterait inférieure à +2,0 % d’ici la fin de l’année, et s'établirait à +1,6 % sur un an en décembre 2024. Source : INSEE, note de conjoncture de septembre 2024