Principes d'Homéostasie Acide Base PDF
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Toulouse III - Paul Sabatier University
Ivan Tack
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This document discusses the principles of acid-base homeostasis. It details the pH of body compartments, with a focus on the distribution of hydrogen ions. It also explains the role of carbon dioxide in metabolic processes and the production of non-volatile acids.
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Pr. Ivan Tack Physiologie Rénale Capsules Les CM 17,18 et 19 PRINCIPE HOMÉOSTASIE ACIDE BASE I. Le pH des compartiments liquidiens La notation pH correspond au cologari...
Pr. Ivan Tack Physiologie Rénale Capsules Les CM 17,18 et 19 PRINCIPE HOMÉOSTASIE ACIDE BASE I. Le pH des compartiments liquidiens La notation pH correspond au cologarithme de la concentration en ions H+. Un pH à 7,40, comme dans le compartiment extracellulaire, correspond à une concentration en ions H+ de 10-7,40, soit 40 nEq/L. La distribution des ions H+ dans les différents compartiments liquidiens de l’organisme se fait en majorité dans le secteur IC. En effet, c’est la zone où les ions H+ sont le plus concentrés car c’est là qu’ils sont produits. Nous retrouvons un pH de l’ordre de 7,00 - 7,10 à l’intérieur de la cellule. La concentration y est 2x voire 2,5x plus élevée que dans le milieu extracellulaire où le pH est de 7,40. Cette répartition intracellulaire du pH est inhomogène, avec un pH globalement un peu plus alcalin dans la mitochondrie (au environ de 7,10) et un pH < 7 dans les autres zones, comme les lysosomes. II. Bilan du CO2 : production métabolique Il existe un lien étroit entre la production de CO2 lors d'un métabolisme cellulaire et l’acidification de l’organisme. 1) Du CO2 au bicarbonate Les glucides, lipides et protides, en présence d’O2, sont oxydés et génèrent du CO2 et de l’eau (et de l’urée pour les protides). Exemple classique de fonctionnement du métabolisme basal : La consommation de 250 ml d’O2 / min va générer la production de 200 ml de CO2 / min. Cette production augmente au cours de l’exercice. Une partie de ce CO2 va être dissous et sera hydraté secondairement, donnant de l’acide carbonique, qui peut se dissocier en H+ et en bicarbonate. Le CO2 est essentiellement en phase gazeuse, mais une fraction va être dissoute en fonction de la constante de solubilité (dans le plasma cette constante correspond à 0,03 si la pression partielle de CO2 est mesurée en mmHg). Page 1 sur 14 Cette fraction de CO2 dissoute va s’hydrater et donner de l’H2CO3 qui se dissociera en fonction du pH en H+ et HCO3-. Ce système de transfert de CO2 vers l’acide carbonique est largement accéléré par la présence d’anhydrase carbonique comme dans certaines cellules épithéliales rénales et les érythrocytes. L’hydratation du CO2 donnera donc H2CO3 avec son potentiel d'acidification ou inversement la constante de dissociation tendant à le pousser vers la re-dissociation du CO2 permettra éventuellement d’éliminer le CO2 si on se rapproche de l’échangeur pulmonaire. Le système tampon carbonate/acide carbonique est intéressant pour deux raisons : - Son pKa relativement acide lui permet d’être présent dans le plasma sous forme de bicarbonates (molécule alcaline) , - Très abondant dans l’organisme dans le secteur extra-cellulaire et dans le secteur intra-cellulaire, où en dépit d’une concentration 2 fois moindre (comme le volume liquidien est 2x plus important), la quantité totale de bicarbonates est à peu près équivalente à celle du secteur plasmatique. Par ailleurs, c’est un système ouvert qui fait que lorsque l’acide carbonique formé se dissociera, il sera possible d’éliminer le CO2 ainsi libéré par simple diffusion au niveau du pulmonaire. 2) Production de l’acidité non volatile Cette production relève du métabolisme cellulaire et correspond à la formation d’anions acides minéraux ou acides organiques qui ne sont pas volatiles, donc ils ne sont pas de l’acide carbonique. Ils proviennent : - Soit du métabolisme de certains acides aminés, comme des Acides aminés soufrés (méthionine, cystine et cystéine) qui vont donner de l’acide sulfurique ; - Soit du métabolisme des phosphoprotéines et des phospho lipoprotéines qui vont donner de l’acide phosphorique ; - Soit du métabolisme anaérobie du glucose qui donnera de l’acide lactique ; - Soit du métabolisme des acides nucléiques, qui donnera de l’acide urique. - Nous pouvons aussi rajouter de façon temporaire le métabolisme des corps cétoniques qui est générateur d’acidité. Si l’on considère un régime alimentaire équilibré de type ouest occidental, riche en protéines, la production d’acides fixes quotidienne ≈ 1mmol d’acidité/ kg de masse corporelle/ jours, soit ≈ 70 mmol/J. C’est une quantité colossale et qui augmente au prorata de la consommation protéique. Plus celle-ci est importante plus l’expression acide quotidienne devra être importante. Page 2 sur 14 La production d’acidité par la cellule relève de 2 mécanismes : - La production de CO2 en grande quantité qui peut être partiellement dissoute et pouvant donner de l’acide carbonique mais qui sera éliminée par l’échangeur pulmonaire. - Lors du métabolisme cellulaire il y a formation d’acidité non volatile, organique ou minérale, qui ne pourra pas être éliminée par simple diffusion pulmonaire et qui sera éliminée par métabolisme et excrétion rénale avec restauration des systèmes tampons temporairement consommés pour leur neutralisation. 3) Acidité et limites physiologiques Les limites physiologiques du pH sont régulées avec une extrême précision entre 42 et 38 nEq/L à l’état physiologique c'est-à-dire avec un pH compris entre 7,38-7,42.. Tandis que les limites viables du pH sont plus larges puisqu’il est possible de survivre avec une consommation d’ions H+ d’environ 160-16 nEq/L ce qui correspond respectivement à un pH compris entre 6.80-7.80. L’accumulation d’ions H+ va générer la titration progressive des protéines et en particulier des protéines enzymatiques. Cette titration c’est-à-dire la liaison des charges H+ avec les charges anioniques des protéines va modifier la charge électrique de la protéine, sa structure tertiaire et ses fonctions ce qui va altérer le bon fonctionnement des enzymes (en particulier mitochondriales). Il en résulte une diminution de la production d’ATP et une diminution globale du métabolisme énergétique aérobie cellulaire. Si cet état perdure et s’aggrave, cela va générer un coma métabolique, avec un moindre fonctionnement du métabolisme énergétique cellulaire des neurones, une insuffisance cardiaque puisque les cellules myocardiques seront secondairement atteintes et finalement un décès dans un statut de coma calme. 4) Lignes de défense Il existe 3 lignes de défenses contre l’acidité. La 1ère ligne de défense mise en jeu quasi instantanément est le système tampon qui va neutraliser les ions H+ aussitôt que produits et disponibles. La production d’ions H+ dans l’organisme est de l’ordre de 30 nmol/seconde. C'est colossal puisque en 2s le pH sanguin passerait de 7,4 à 7 s’il n’y avait pas de système tampon et en 5 secondes on serait mort d’une acidose aiguë… Page 3 sur 14 Mais heureusement cela ne survient pas parce que le métabolisme cellulaire, lorsqu’il génère les 70 mmol/j d’acidité fixe, va aboutir au tamponnement quasi immédiat de cette acidité fixe pour une moitié dans la cellule et l’autre moitié dans le secteur extra-cellulaire. Les systèmes tampons utilisés sont les mêmes mais dans des proportions différentes. Dans la cellule, une grande partie du système tampon est le système bicarbonate, mais aussi et surtout le système phosphate et les protéines qui peuvent être transformées en protéinates. En dehors de la cellule, l’ion tampon prédominant est le bicarbonate. Les phosphates jouent un rôle marginal et les protéinates jouent un rôle encore moins important que dans la cellule. Tous ces systèmes tampons vont permettre la neutralisation temporaire de l’excédent de l’acidité en consommant essentiellement des bicarbonates et en se couplant à des protéines ou des phosphates générant ainsi la nécessité pour le rein de régénérer les tampons et en particulier le principal tampon bicarbonate, puisqu’il est volatile et qu’il faut le régénérer au fur et à mesure de sa consommation. C’est le rôle du rein par excrétion des ions acides non volatiles. La 2e ligne de défense contre l’acidification est l’excrétion de cette acidité volatile qui est produite lorsque le bicarbonate tamponne les ions H+. Si l’on considère le transport du dioxyde de carbone, après que la cellule l’ait produite, il va passer dans le secteur plasmatique, sera capté en partie dans les hématies, sera transporté d’une part sous forme de CO2 dissous, d’autre part sous forme de bicarbonate, en particulier dans les hématies où il existe une anhydrase carbonique. Celle-ci hydrate le CO2 qui diffuse, et produit de H2CO3 qui se dissociera en bicarbonate sécrété dans le milieu extracellulaire et en H+ qui réduit l’hémoglobine. Une partie du CO2 se couplera directement à l’Hb. L’ensemble de ce CO2 sera transféré progressivement vers le poumon et est éliminé avec un débit d’élimination rapide de l’ordre de 10 mmol/min. La 3e ligne de défense contre l’acidité correspond à la capacité du rein à excréter l’acidité fixe et régénérer en parallèle les bicarbonates du système tampon acide carbonique/bicarbonate qui ont été utilisés. Page 4 sur 14 III. Conclusion Il s'agit d’un résumé des principaux phénomènes liés à cette ré-excrétion acide et à la régénération des bicarbonates. Premièrement, le bicarbonate qui est présent dans le plasma sera librement filtré. Sa concentration plasmatique est de l’ordre de 27 mmol. Par 24h, il y a environ 180 L pour le débit de filtration glomérulaire, 25 mmol pour la concentration plasmatique et 4500 mmol de bicarbonates seront filtrés. La totalité de ces bicarbonates seront réabsorbés (tubule contourné proximal +++). Dans une deuxième étape, l’organisme va excréter l’acidité fixe et va produire de novo des bicarbonates qui remplaceront ceux déjà consommés. Il y aura donc fabrication d’H2CO3 avec sécrétion d’ions H+ côté apical qui sera fixé dans la lumière tubulaire et réabsorption d’un bicarbonate qui permettra donc à la fois de sécréter l’acidité et de régénérer les bicarbonates qui ont été consommés. Page 5 sur 14 HOMÉOSTASIE DE L'ACIDITÉ : RÔLE DU REIN I. Rôle du rein dans le maintien de l’état acide base Quotidiennement notre métabolisme cellulaire génère une charge d’acide fixe de 1 mmol/kg/j. Ces acides fixes sont tamponnés par différents systèmes tampons intra ou extracellulaire. Au niveau extracellulaire, le plus important est le système tampon bicarbonate/acide carbonique. Le rein a un rôle très important dans le maintien d’une bicarbonatémie constante afin de tamponner toutes charges acides supplémentaires. Il réabsorbe le bicarbonate filtré au niveau du glomérule et en régénère en parallèle de l'excrétion des acides fixes. Dans une situation d’excès de bicarbonates, le rein va l’excréter. II. Sécrétion de protons tout le long du néphron Que ce soit pour la réabsorption du bicarbonate filtré ou pour l'excrétion de la charge d’acides fixes, le rein sécrète des protons au pôle apical des cellules tubulaires en parallèle d’une réabsorption basolatérale de bicarbonates. Ceci a lieu tout au long du tubule. Dans la cellule tubulaire, l’anhydrase carbonique catalyse l'hydratation du CO2 en acide carbonique qui se dissocie en proton et bicarbonate. Le maintien du pH intracellulaire nécessite la sortie équimolaire de H+ et HCO3- ainsi formés : les protons sont sécrétés au pôle apical et les bicarbonates sortent de la cellule au niveau basolatéral. Ainsi, toute sécrétion apicale de protons est associée à une sortie basolatérale équimolaire de bicarbonates. Une fois dans la lumière tubulaire, les protons sont tamponnés. Cette prise en charge par des systèmes tampons est indispensable car seule une faible portion peut être excrétée sous forme libre. En effet, le pH minimal des urines est de 4,5 correspondant à une concentration de proton de 0,03 mmol/L. Si on prend l’exemple d’une production endogène de proton de 40 mmol/j, il faudrait un volume urinaire quotidien de 1333 L/j pour pouvoir excréter les protons libres à pH urinaire de 4,5. Page 6 sur 14 III. Mécanisme de la réabsorption de bicarbonate filtré Pour un débit de filtration glomérulaire normal de 180 L/j et une bicarbonatémie de 25 mmol/L, 4500 mmol de bicarbonates sont filtrés quotidiennement. Le maintien de la bicarbonatémie nécessite donc que ces 4500 mmol soient réabsorbés. La réabsorption a principalement lieu dans le tubule proximal. Dans toutes cellules tubulaires, l’anhydrase carbonique permet d’hydrater le CO2 en acide carbonique qui se dissocie en un proton et un bicarbonate. La sortie apicale du proton se fait via l’échangeur Na/H+. La sortie basolatérale du bicarbonate se fait via un cotransporteur Na/HCO3-. Une fois sécrété dans lumière tubulaire, le proton va être tamponné par les bicarbonates filtrés au niveau du glomérule. Cela va générer de l’acide carbonique qui, par une anhydrase carbonique ancrée dans la membrane apicale va se dissocier en CO2 et H20. Le CO2 rediffuse dans la cellule. IV. Sécrétion tubulaire de protons : réabsorption et régénération de bicarbonate Sur les 4500 mmol/j de bicarbonates filtrés au niveau du glomérule : - 80% est réabsorbé dans le tubule proximal ; - 15% est réabsorbé dans la branche ascendante large de Henlé ; - 5% est réabsorbé dans les segments distaux car il n’y a quasiment plus de bicarbonates dans la lumière tubulaire. En situation habituelle, c’est-à-dire lorsque l’on génère une charge d’acide fixe nette, il n’y a pas de bicarbonates excrétés au niveau urinaire. V. Principaux facteurs modifiant la réabsorption de bicarbonates La réabsorption se fait essentiellement au niveau du tubule proximal nécessitant l'échangeur Na/H+. Les situations de stimulation de réabsorption de HCO3- sont donc quand l’activité de ce transporteur est augmentée : acidose, diminution du volume extracellulaire ou la stimulation de l'échangeur par l’angiotensine II. Page 7 sur 14 Inversement, la réabsorption va diminuer en cas d’alcalose, d’augmentation du volume extracellulaire, de diminution de la synthèse d’angiotensine II (via un médicament ou augmentation du volume extra cellulaire) ou lorsque on inhibe l'activité de l’anhydrase carbonique (provoqué par certain diurétique comme le Diamox). VI. Sécrétion de protons et régénération de bicarbonates Dans les segments distaux et en particulier le canal collecteur, il y a très peu de bicarbonates en intra luminal. Les protons qui sont sécrétés vont être tamponnés par d’autres systèmes tampons autres que le bicarbonate et vont donc permettre cette fois une régénération de bicarbonates. C’est aussi dans ce segment tubulaire que les urines vont s’acidifier fortement. La sécrétion de protons au niveau du canal collecteur se fait au niveau des cellules intercalaires de type A. L’échangeur apical est une H + ATPase. A ce niveau-là du tubule, il n’y a quasiment plus de bicarbonates en intra luminale et les protons sont tamponnés par d’autres systèmes tampons. On peut en distinguer deux grands groupes : Tout d’abord un groupe de système tampons qui sont filtrés au niveau du glomérule. Parmi ceux-là, les phosphates HPO4 2- sont en quantité majoritaire. Ils vont tamponner les protons et former H2PO4 2-. Il y a d’autres systèmes tampons mais en nettement moins grande quantité filtrés au niveau du glomérule et on regroupe l’ensemble des phosphates et de ces autres systèmes tampons sous le terme d’acidité titrable. L’excrétion de ces systèmes tampons (qui ont tamponné les protons à ce niveau-là) est d’environ 30 mmol/24h. Le terme d’acidité titrable correspond à la quantité de base forte que l’on doit rajouter à des urines acides pour amener le PH urinaire au PH sanguin. Le 2ème grand groupe de système tampon est le système tampon ammoniac NH3/ammonium NH4+. Ce système tampon a la particularité d’être synthétisé au niveau tubulaire et excréter au niveau urinaire. L’excrétion d’ammoniac titré en ions ammonium NH4+ est d’environ 40 mmol/24h. Donc chaque proton tamponné, excrété soit sous forme d’acidité titrable, soit sous forme d’ammonium est associé cette fois à la régénération d’un bicarbonate. Page 8 sur 14 Lorsqu’il est nécessaire d’éliminer un excès de bicarbonate, la réabsorption tubulaire proximale de bicarbonate diminue mais il existe aussi une sécrétion de bicarbonate dans le canal collecteur cette fois qui se fait au niveau des cellules intercalaires de type B qui comprend au niveau apical un échangeur chlore/bicarbonate. VII. Facteurs modifiant la sécrétion de protons dans le canal collecteur Quels sont les principaux facteurs qui modifient la sécrétion de protons dans le canal collecteur ? La sécrétion de proton H+ au niveau du canal collecteur est stimulée par l’acidose mais aussi par toutes les situations qui entraînent une augmentation de la réabsorption de Na+ au niveau de la cellule principale via le canal apical ENaC. En effet, l’augmentation de la réabsorption de Na+ à ce niveau favorise comme on l’a déjà vu la sécrétion de potassium mais aussi de protons au niveau de la cellule intercalaire de type A. Du coup, l’augmentation de l’aldostérone ou l’augmentation du débit délivré en Na+ au niveau du canal collecteur augmente la réabsorption de Na+ par ENaC et donc favorise la sécrétion de protons. Inversement la sécrétion de protons est diminuée dans les situations d’alcalose mais aussi dans les situations où la réabsorption de sodium par ENaC diminue : - Soit les situations d’hypoaldostéronisme - Soit lorsque ENaC est inhibé par exemple lors de l’administration d’un diurétique Amiloride qui bloque ce canal ENaC. VIII. Conclusion : En résumé, en situation physiologique où le métabolisme quotidien génère une charge d’acide fixe, le rein va maintenir constante la bicarbonatémie en réabsorbant l’intégralité du bicarbonate filtré soit 4500 mmol/24 h. Ceci ne permet pas d’éliminer la charge d’acide fixe mais permet de ne pas perdre les bicarbonates. En parallèle de la réabsorption de bicarbonates filtrés, le rein va excréter les protons de la charge d’acide fixe et régénérer le bicarbonate tamponné par cette même charge d’acide fixe. L’élimination de ces protons, à peu près 70 mmol par 24h, se fait sous forme d’acidité titrable, c’est-à-dire tamponné au phosphate pour 30 mmol/24 h et sous forme d’ammonium pour 40 mmol /24h. L’excrétion de protons libres, elle, est négligeable mais détermine la valeur du PH urinaire. Aussi le débit urinaire de protons, c’est-à-dire l’excrétion nette d’acide, ce qui correspond à la régénération de bicarbonates, correspond à la somme de l’acidité titrable et de l’ammoniurie moins la bicarbonaturie. Page 9 sur 14 L'HOMÉOSTASIE DE L’ACIDITÉ : EXCRÉTION RÉNALE DE L’AMMONIUM I. Adaptation normale à une charge acide chronique Le rein joue un rôle crucial dans le maintien de l’homéostasie acide/base en éliminant la charge d’acide fixe avec une régénération parallèle de bicarbonates. Si l’on regarde ce qui se passe lors d’une charge d’acide chronique, on observe une diminution initiale de la bicarbonatémie qui se maintient ensuite à une valeur sub normale de 22 mmol/L représenté sur le graphique du bas. Si l’on observe ensuite les modifications de l’excrétion acide de protons libres, le pH urinaire, d’ammonium NH4+ ou de l’acidité titrable, on observe : - Une diminution initiale du PH urinaire, c’est-à-dire une augmentation de l’excrétion urinaire de protons libres qui ré-augmentent ensuite pour se stabiliser à une certaine valeur. - L’acidité titrable augmente mais modérément et se stabilise rapidement. - L’excrétion d’ammonium augmente de façon colossale puisqu’elle est multipliée par 4. Aussi l’excrétion d’ammonium est le principal mécanisme d’adaptation rénale à l’acidose. Pourquoi est-ce que l’ammonium joue un rôle à part dans l’excrétion d’acide ? Parce que contrairement au système tampon phosphate et les autres systèmes tampons regroupés dans l’acidité titrable, l’ammonium n’est pas filtré au niveau du glomérule mais synthétisé directement au niveau du rein ce qui permet donc d’adapter la production et l’excrétion à la charge d’acide fixe. Page 10 sur 14 II. Ammonium : système tampon L’ammonium est donc un système tampon synthétisé par le rein. L’ammoniogenèse a lieu dans les cellules du tubule proximal, principalement par le métabolisme de la glutamine (un AA contenant deux groupements NH2). La glutamine provient soit d’une absorption au pôle apical de la glutamine filtrée, soit par le pôle basolatéral. Dans la mitochondrie de la cellule tubulaire, une enzyme catalyse la désamination de la glutamine en glutamate ce qui génère un ion NH4+ puis une 2ème enzyme catalyse la désamination du glutamate en alpha-cétoglutarate produisant un 2ème ion NH4+. L’alpha cétoglutarate est ensuite soit convertie en glucose par la néoglucogenèse, soit oxydé dans le cycle de Krebs. Quelle que soit la voie ultérieure de l’alpha cétoglutarate, celle-ci génère deux ions bicarbonates. Les bicarbonates sortent au niveau basolatéral alors que les ions NH4+ sont sécrétées au pôle apical empruntant l’échangeur sodium proton, prenant la place du proton sur cet échangeur. La sécrétion apicale d’un NH4+ est associée à une régénération baso latérale d’un bicarbonate. III. Transfert d’ammonium L‘ammonium est donc synthétisée au niveau du tubule proximale et sécrétée dans la lumière tubulaire. Mais une fois sécrétée à ce niveau-là, seule une minorité de l’ammonium reste dans le fluide tubulaire. Au niveau de la branche ascendante large de Henlé, et en particulier dans sa partie médullaire, une majorité de l’ammonium est réabsorbé par une voie trans cellulaire empruntant le cotransporteur Na+/K+/2Cl-, l’ammonium prenant la place du potassium. Une fois réabsorbé au niveau de la branche ascendante large de Henlé, l’ammonium retourne en partie dans la lumière tubulaire au niveau de la branche descendante de l’anse de Henlé. Cette boucle de réabsorption /sécrétion de NH4+ de l’anse de Henlé génère un gradient de concentration d’ammonium, la concentration augmentant du cortex vers la médullaire. Page 11 sur 14 L’ammonium accumulé dans l’interstitium est ensuite sécrété dans le canal collecteur mais pas directement sous forme de NH4+. C’est le NH3 qui va diffuser au travers de l’épithélium favorisé par le gradient de concentration. Le NH3 provient de la réaction d’équilibre qui existe en permanence entre le NH4+ et le NH3. Parallèlement à la diffusion de NH3, il existe une sécrétion apicale de protons au niveau des cellules intercalaires de type A. IV. Sécrétion de protons et de NH3 dans le canal collecteur Voici ce qui se passe au niveau du canal collecteur et plus précisément d’une cellule intercalaire de type a. Comme nous le savons, cette cellule secrète au pôle apical du proton par une pompe H+ATPase couplée à la sécrétion baso-latérale de bicarbonates permettant donc de régénérer du bicarbonate. Le NH3, lui, diffuse au travers l’épithélium par un gradient de concentration. On a longtemps pensé que le NH3, qui est un gaz, diffusait librement au niveau de la cellule. On sait à l’heure actuelle qu’il existe des transporteurs spécifiques de NH3 qui ne sont pas représentés sur le schéma. Dans la lumière tubulaire, le NH3 tamponne les protons sécrétés pour former du NH4+ excrétée ensuite au niveau urinaire. On peut s’interroger sur l’intérêt d’avoir ces transferts tubulaires d’ammonium. L’intérêt principal que l’on peut citer est de pouvoir moduler l’expression d’ammonium indépendamment de sa synthèse proximale. En effet, le mécanisme d’ammoniogenèse prend du temps. Or l’expression d’ammonium peut être modifiée de façon extrêmement rapide. Par exemple lors d’une acidose aiguë, la sécrétion de protons augmente au niveau de la cellule intercalaire de type A du canal collecteur ce qui diminue le pH urinaire à ce niveau-là favorisant la diffusion du NH3 depuis l’interstitium médullaire vers la lumière tubulaire permettant d’augmenter instantanément l’excrétion de NH4+. V. Facteurs modifiant l’excrétion rénale d’ammonium Quels sont les principaux facteurs qui modifient l’excrétion rénale d’ammonium ? Tout d’abord l’excrétion d’ammonium est augmentée dans les situations : - D’acidose : en effet, l’acidose stimule l’ammoniogenèse proximale, stimule l’activité de l’échangeur sodium/proton du tubule proximale et donc augmente la sécrétion de NH4+ dans la lumière tubulaire au niveau du tubule proximal, stimule la réabsorption de NH4+ au niveau de l’anse de Henlé et donc augmente le gradient de concentration d’ammonium dans l’interstitium médullaire et Page 12 sur 14 enfin stimule la sécrétion de protons dans le canal collecteur ce qui donc favorise en parallèle la sécrétion de NH3 et donc la formation de NH4+ dans le canal collecteur pour être ensuite excrété. - L’hypokaliémie de même, stimule l’excrétion d’ammonium en augmentant l’ammoniogenèse proximale mais aussi en stimulant la réabsorption de NH4+ au niveau de l’anse de Henlé et donc favorisant ce gradient de concentration qui est nécessaire et même indispensable à la sécrétion finale de NH3 au niveau du canal collecteur. Inversement l’excrétion d’ammonium est diminuée dans les situations : - D’alcalose. - D’hyperkaliémie diminue vraisemblablement l’ammoniogenèse proximale mais diminue surtout la réabsorption d’ammonium au niveau de la branche ascendante large de Henlé et donc altère la capacité de concentrer l’ammonium dans l’interstitium médullaire. - De diminution de la sécrétion d’H+ dans le canal collecteur, diminue l’excrétion de NH4+. - D’insuffisance rénale chronique est une situation où l’excrétion d’ammonium est diminuée, vraisemblablement liée à une diminution de la synthèse proximale et de l’accumulation d’ammonium dans l’interstitium médullaire. VI. Caractériser la réponse rénale lors d’acidose à trou anionique plasmatique normal Le rein est donc l’organe qui élimine les acides fixes. Dans les situations où l’acide fixe est de l’acide chlorhydrique, c’est-à-dire les acidoses métaboliques à trou anionique plasmatique normal, il faut départager entre une cause d’origine rénale et une cause extra-rénale, c’est-à-dire une perte digestive de bicarbonate. Pour savoir si la réponse rénale est adaptée à une acidose métabolique à trou anionique plasmatique normal, il convient donc de savoir si l’expression d’ammonium est augmentée, c’est-à-dire adaptée à cette acidose métabolique puisque l’excrétion d’ammonium est le principal mécanisme d’adaptation rénale à l’augmentation d’une charge d’acide fixe. Le dosage de l’ammonium ne se fait pas de façon diffuse dans tous les laboratoires. Ce que l’on va faire quotidiennement, c’est estimer l’augmentation de l’excrétion d’ammonium en calculant ce que l’on appelle le trou anionique urinaire (TAU). Le principe de ce calcul repose sur l’électro neutralité des liquides et sur le fait que les anions indosés urinaires ne sont pas changés ce qui exclut donc les situations d’acidose métabolique à trou anionique augmenté. Dans les urines, les principaux cations sont évidemment le sodium et le potassium et tout un ensemble de cations regroupé sous le terme de Ci pour cations indosés et parmi ceux-là, il y a bien sûr l’ammonium NH4+. Parmi les anions, on a principalement du chlore et toute une autre quantité d’anions différents regroupés sous le terme d’anions indosés Ai. Les urines étant électro neutres, la somme du sodium, du potassium et des cations indosés est égale à la somme du chlore et des anions indosés. Le trou anionique urinaire est la différence entre les cations et les anions que l’on mesure habituellement, c’est-à-dire le sodium, le potassium et le chlore. Donc la somme du sodium, du potassium moins le chlore urinaire est égale à la différence entre les anions indosés moins les cations indosés. Page 13 sur 14 Comme représenté sur le schéma ci-dessous, le trou anionique urinaire, c’est-à-dire en situation physiologiques où il n’y a pas d’anomalies de l’homéostasie acide base, est positif, c’est-à-dire qu’il y a plus d’anions indosés que de cations indosés. En cas d’acidose métabolique, le rein adapte l’excrétion acide en augmentant l’excrétion d’ammonium et donc le trou anionique urinaire se négative du fait de l’augmentation de l’excrétion de NH4+. La réponse rénale appropriée est donc d’avoir un trou anionique urinaire négatif. Si le trou anionique urinaire ne se négative pas lors d’une acidose métabolique à trou anionique plasmatique normal, c’est que l’excrétion d’ammonium n’est pas adaptée et que donc l’acidose métabolique est d’origine rénale. Page 14 sur 14