BMCT: Interactions Médicamenteuses - CM2 PDF
Document Details

Uploaded by UnbeatableDouglasFir2202
Tags
Summary
Ce document est un cours magistral qui détaille les interactions médicamenteuses, incluant leurs définitions, les sources d'information pertinentes, et les différentes catégories d'interactions pharmacocinétiques et pharmacodynamiques. Il aborde également l'influence de l'alcool sur les médicaments et propose des QCM d'entraînement et des annales pour tester les connaissances.
Full Transcript
BMCT CM Interactions 2...
BMCT CM Interactions 2 médicamenteuses RT : Alexandre KALFON, Laura GORDIEN Date : Cristolink RB : Eloïse SEUILLOT Prof : Dr C.BARAU PLAN DU COURS I. Généralités sur les interactions médicamenteuses.................................................................2 A. Définitions........................................................................................................................2 B. Interactions médicamenteuses et incompatibilités physico chimique..............................2 C. Situation à risque d’interactions médicamenteuses........................................................2 D. Interactions médicamenteuses utiles en clinique............................................................3 E. Interactions médicamenteuses délétères........................................................................3 F. Classification des interactions médicamenteuses en fonction du risque.............................4 II. Sources d’informations sur les interactions médicamenteuses...............................................5 A. Résumé des caractéristiques du produit (RCP)..............................................................5 B. Thesaurus des interactions médicamenteuses (ANSM).................................................5 C. Thériaque........................................................................................................................5 D. Sources d’informations sur les propriétés inductrices et inhibitrices des médicaments..5 III. Catégories d’interactions médicamenteuses...........................................................................6 IV. Les interactions pharmacocinétiques......................................................................................6 A. Interactions médicamenteuses pharmacocinétiques à l'étape d'absorption des médicaments..............................................................................................................................6 B. Interactions médicamenteuses pharmacocinétiques à l'étape de distribution des médicaments..............................................................................................................................8 C. Interactions médicamenteuses pharmacocinétiques à l'étape de métabolisme des médicaments..............................................................................................................................8 D. Interactions médicamenteuses pharmacocinétiques à l'étape d'élimination des médicaments............................................................................................................................11 V. Les interactions pharmacodynamiques.................................................................................12 VI. Alcool et réponse aux médicaments.....................................................................................13 A. Interactions pharmacodynamiques......................................................................................13 B. Pharmacocinétique de l’alcool.............................................................................................14 C. Interactions pharmacocinétiques.........................................................................................14 VII. Conclusion.............................................................................................................................15 VIII. QCM d’entraînement et annales...........................................................................................16 A. QCM d’entraînement.....................................................................................................16 B. Annales..........................................................................................................................17 C. Correction QCM + QROC..............................................................................................19 Page 1 sur 20 I. Généralités sur les interactions médicamenteuses A. Définitions Interaction médicamenteuse : modification cliniquement significative de l’effet (pharmacologique ou indésirable) d’un médicament lorsqu’il est administré de façon concomitante avec un autre médicament ou une autre substance (aliments ou boissons par exemple), quel que soit le sens de cette modification (augmentation ou diminution des effets pharmacologiques ou indésirables). Cette modification d’effet est dite cliniquement significative si elle remplit une ou plusieurs de ces conditions : Entraîne une modification du rapport bénéfice/risque pour le patient (risque de majoration d’effets indésirables par exemple) Est responsable d’une contre-indication de la prescription de l’un des deux médicaments administrés Nécessite une adaptation posologique d’un des deux médicaments administrés. B. Interactions médicamenteuses et incompatibilités physico chimique Il est essentiel de distinguer les interactions médicamenteuses des incompatibilités physico- chimiques. Le terme « interactions médicamenteuses » s’applique aux interférences médicamenteuses qui surviennent in vivo, alors que le terme « incompatibilités physico-chimiques » désigne les réactions chimiques qui peuvent se présenter entre les médicaments in vitro, avant ou lors de leur administration au patient, ainsi que les interactions contenant-contenu. Les incompatibilités physico-chimiques se traduisent par des modifications visibles (changement de coloration, opalescence, dégagement gazeux, formation d'un précipité...) ou invisibles (changement de pH, diminution de la concentration en principe actif dans le conditionnement). Elles sont généralement prévenues aux stades de fabrication et de conditionnement des spécialités pharmaceutiques par de nombreux contrôles, le risque d’accidents est donc fortement minimisé. Il reste cependant la possibilité que des incompatibilités physico-chimiques apparaissent au moment de l’administration (mélange de plusieurs médicaments dans une même seringue ou dans un même liquide de perfusion, administration d’un médicament dans la tubulure de perfusion d’un autre médicament, présence dans un médicament de solvants organiques susceptibles de dissoudre le matériel plastique utilisé pour l’injection...). Ces incompatibilités physico-chimiques ne doivent pas être confondues avec les interactions médicamenteuses qui sont responsables d'une modification de l'effet pharmacologique attendu. C. Situation à risque d’interactions médicamenteuses Différentes situations sont à risque d’interactions médicamenteuses. Le risque est particulièrement élevé chez les patients poly-médiqués, c’est-à-dire les patients qui ont un grand nombre de médicaments : Ø Les patients âgés : ils ont en effet souvent des pathologies multiples (hypertension, diabète, hypercholestérolémie,...), leur traitement associe donc fréquemment plusieurs médicaments, ce qui constitue une source d’effets indésirables parfois graves liés à des interactions entre les différents médicaments. Ø Les patients atteints de pathologies chroniques : ces pathologies sont souvent lourdes et nécessitent la prescription de nombreux médicaments. Par ailleurs, le traitement de nombreuses pathologies chroniques (traitement immunosuppresseur, anti-diabétique...) peut facilement être déséquilibré : il faudra donc être particulièrement prudent lors de l’introduction d’un nouveau médicament. Chez ces patients, le risque d’interactions médicamenteuses augmente avec le nombre de médicaments prescrits. Les patients qui consultent plusieurs médecins différents et qui suivent plusieurs ordonnances différentes ont plus de risques de survenue d’interactions médicamenteuses. Une autre situation à risque d’interactions médicamenteuses concerne l’automédication, qui est la prise d’un ou plusieurs médicaments consommés ensemble ou séparément par un patient, sur sa propre initiative. L’automédication s’effectue donc sans avis médical et sans le conseil d’un pharmacien. Page 2 sur 20 Un patient fait de l’automédication lorsqu’il achète un médicament sans ordonnance en pharmacie et qu’il se l’auto-administre, ou lorsqu’il consomme un médicament qui lui a été prescrit antérieurement et qui est toujours présent dans la pharmacie familiale. Les médicaments disponibles sans ordonnance sont des médicaments à part entière et peuvent donc interagir avec de nombreux autres traitements. Pour cette raison, il faut fortement déconseiller aux patients de recourir à l’automédication lorsqu’ils suivent déjà un traitement régulier pour une autre maladie. En effet, la prise d’un médicament en supplément du traitement habituel pourrait induire des interactions médicamenteuses provoquant soit l’apparition d’effets indésirables, soit une diminution de l’efficacité du traitement pris régulièrement. Enfin, la prescription de médicaments métabolisés exclusivement par certaines voies métaboliques (notamment les cytochromes P450) sera plus à risque d’interactions en cas d’administration concomitante avec des médicaments inducteurs ou inhibiteurs de ces mêmes cytochromes. D. Interactions médicamenteuses utiles en clinique Les interactions médicamenteuses n’ont pas forcément que des conséquences délétères. Certaines peuvent même être recherchées en clinique pour leurs effets bénéfiques pour le malade, notamment si elles permettent une augmentation de l’efficacité des médicaments. 1. Exemple du triméthoprime et du sulfaméthoxazole Le triméthoprime et le sulfaméthoxazole sont deux antibiotiques qui ont chacun une activité bactériostatique (ils inhibent la croissance et la reproduction des bactéries mais ne les tuent pas) lorsqu’on les administre seuls. Lorsqu’on administre ensemble ces deux médicaments, comme dans la spécialité Bactrim® (qui contient 400 mg de sulfaméthoxazole et 80 mg de triméthoprime), l’association de ces deux antibiotiques produit un effet bactéricide (capacité à tuer les bactéries). 2. Exemple du lopinavir et du ritonavir De la même façon, le lopinavir, un inhibiteur de protéase utilisé dans le traitement de l’infection par le VIH, a une activité modeste contre le virus lorsqu’il est utilisé seul. En revanche, lorsqu’il est combiné au ritonavir dans la spécialité Kaletra® (200 mg de lopinavie et 50 mg de ritonavir), son efficacité est considérablement augmentée. Cette interaction médicamenteuse se retrouve pour tous les médicaments de la famille des inhibiteurs de protéase, pas seulement pour le lopinavir. En effet, le ritonavir est un inhibiteur du cytochrome P450 3A4, l’enzyme qui métabolise majoritairement les inhibiteurs de la protéase du VIH (saquinavir, indinavir, amprénavir...). L’inhibition de leur métabolisme par le ritonavir entraîne donc une augmentation des concentrations sanguines des inhibiteurs de protéase, ce qui permet de prolonger leur action. On peut ainsi diminuer les doses et la fréquence des prises des inhibiteurs de protéase ce qui contribue à améliorer l’adhérence des patients au traitement antirétroviral. E. Interactions médicamenteuses délétères Malheureusement, la plupart des interactions médicamenteuses entraînent des conséquences néfastes pour le patient, soient parce qu’elles sont susceptibles d’augmenter la survenue des effets indésirables, soient parce qu’elles risquent d’être responsables d’une diminution d’efficacité des médicaments. Cela constitue un problème majeur en pratique clinique. Page 3 sur 20 Exemples du kétoconazole et de la metformine : L’administration de kétoconazole (un antifongique azolé) chez un patient traité par de l’atorvastatine (un hypolipémiant) peut entraîner une augmentation du risque de survenue d’une rhabdomyolyse du fait de la diminution du métabolisme hépatique de l’atorvastatine provoquée par le kétoconazole. En conséquence, l’association atorvastatine – kétoconazole fait l’objet d’une contre-indication. Un autre exemple est celui de l’association de metformine (un antidiabétique oral) avec un produit de contraste iodé : le produit de contraste iodé est susceptible d’entraîner une insuffisance fonctionnelle qui va limiter l’élimination rénale de la metformine. Cette association multiplie le risque d’acidose lactique engendré par l’augmentation des concentrations sanguines de metformine et fait également l’objet d’une contre-indication. L’administration concomitante de ces médicaments est donc formellement interdite car le risque encouru par le patient est majeur. F. Classification des interactions médicamenteuses en fonction du risque Les interactions médicamenteuses sont classées en quatre niveaux en fonction du risque évalué pour le patient du plus faible au plus important : 1. Association à prendre en compte Le niveau de risque le plus faible est « l’association à prendre en compte » : Il correspond à un risque potentiel dont le prescripteur doit être conscient mais pour lequel aucune recommandation pratique de prise en charge n’est proposée. Par exemple, l’association d’une benzodiazépine ayant un effet sédatif comme le diazépam avec une autre benzodiazépine à effet sédatif comme le clonazépam est une association à prendre en compte. Le patient risque une altération de la vigilance qui peut s’avérer dangereuse s’il conduit par exemple 3. Précaution d’emploi Le second niveau de risque est la « précaution d’emploi » : l’association est possible, mais des précautions sont à prendre pour le suivi du traitement du patient, par exemple un suivi clinique, un suivi biologique renforcé ou bien des dosages sanguins réguliers des médicaments. Un exemple d’association médicamenteuse faisant l’objet d’une précaution d’emploi est l’association de tacrolimus, un médicament immunosuppresseur, et de fluconazole, un médicament antifongique. Des dosages sanguins réguliers de tacrolimus doivent être réalisés pour éviter la survenue d’une insuffisance rénale grave liée à l’accumulation du tacrolimus dans l’organisme. 4. Association déconseillée Le troisième niveau de risque est « l’association déconseillée » : Il s’agit d’une association devant être évitée au maximum, mais dans le cas où elle serait vraiment nécessaire (c’est-à-dire justifiée après l’analyse du rapport bénéfice/risque pour le patient), une surveillance étroite du patient doit être mise en place pour éviter la survenue d’effets indésirables graves. Par exemple, l’association de warfarine, un médicament anti-vitamine K, avec le diclofénac, un anti inflammatoire non stéroïdien, entraîne une augmentation majeure du risque hémorragique rencontré avec la warfarine du fait de l’agression de la muqueuse gastroduodénale par le diclofénac. Si l’association ne peut être évitée, il est nécessaire d’assurer une surveillance clinique voire biologique étroite. 5. Contre-indication Le niveau de risque le plus élevé est la « contre-indication » : la contre-indication constitue une interdiction absolue d’associer deux médicaments qui ne doit en aucun cas être transgressée. Par exemple, associer le bézafibrate avec le fénofibrate, deux médicaments hypolipémiants de la classe des fibrates, constitue une contre-indication. Il y a un risque majeur d’effets indésirables graves à type de rhabdomyolyse (destruction massive des muscles) pouvant conduire à une insuffisance rénale grave Page 4 sur 20 II. Sources d’informations sur les interactions médicamenteuses Les interactions médicamenteuses sont très nombreuses et peuvent concerner tous les médicaments présents sur le marché. Il ne s’agit pas de toutes les apprendre par cœur, mais d’acquérir quelques réflexes sur les situations à risque, sur les familles de médicaments à risque et surtout d’être capable de trouver l’information en cas de doute sur une prescription. Cette partie du cours a pour objectif de donner quelques exemples de supports facilement accessibles répertoriant les interactions médicamenteuses. A. Résumé des caractéristiques du produit (RCP) Dans le Résumé des Caractéristiques du Produit (RCP) de tous les médicaments, figure systématiquement une rubrique « Interactions médicamenteuses » qui décrit : ü Les classes médicamenteuses qui ne doivent pas être associées avec le médicament concerné ü Le mécanisme de l’interaction ü La conduite à tenir au cas où les médicaments seraient associés par erreur. NB : Dans le poly de la prof on peut retrouver un exemple de RCP de la metformine, l’antidiabétique oral utilisé en première intention dans le traitement du diabète de type II, avec un produit de contraste iodé. On constate notamment que la metformine fait l’objet d’une interaction avec les produits de contraste iodés, ceux-ci risquant d’entraîner une accumulation de metformine. Les conséquences seront une augmentation du risque d’acidose lactique, le principal effet indésirable observé avec la metformine. Le traitement par metformine doit donc être arrêté avant l’examen et peut être réintroduit 48 heures après l’exam. B. Thesaurus des interactions médicamenteuses (ANSM) L’ANSM édite régulièrement un « Thésaurus des interactions médicamenteuses » qui regroupe toutes les interactions décrites pour chaque médicament mis sur le marché avec le niveau de risque de l’interaction (association à prendre en compte, précaution d’emploi, association déconseillée, contre- indication). Le thésaurus précise également le risque encouru et la conduite à tenir (surveillance clinique, surveillance biologique...). Nb de l’année dernière : Dans le poly, il y a un exemple de Thésaurus des interactions médicamenteuses concernant la simvastatine, un hypolipémiant qui fait l’objet de nombreuses interactions médicamenteuses car c’est un substrat du cytochrome P450 3A4, contre-indiquée chez les patients sous clarithromycine (un inhibiteur connu du CYP 3A4), du fait du risque majoré de rhabdomyolyse induit par l’inhibition du métabolisme hépatique de la simvastatine par la clarithromycine. L’association avec la carbamazépine (inducteur du CYP 3A4) et le jus de pamplemousse (inhibiteur du CYP 3A4) est déconseillée. Le Thésaurus des interactions médicamenteuses est disponible gratuitement sur le site de l’ANSM. C. Thériaque Différentes bases de données existent sur les médicaments, en particulier la base Thériaque®. Cette base donne accès gratuitement, sur simple inscription, à des informations similaires à celles contenues dans le RCP des médicaments, y compris des informations sur les interactions médicamenteuses. En particulier, la base Thériaque® propose un module d’analyse d’ordonnance et d’analyse d’interactions médicamenteuses qui peut être utile pour dépister certaines interactions cliniquement significatives peu connues. D. Sources d’informations sur les propriétés inductrices et inhibitrices des médicaments Enfin, une connaissance précise des voies métaboliques des médicaments et des substances connues pour leurs propriétés inductrices ou inhibitrices des principaux cytochromes P450 (CYP 3A4, 1A2, 2B6, 2C9, 2C19 et 2D6) et de la P- glycoprotéine est utile pour anticiper d’éventuelles interactions médicamenteuses. Page 5 sur 20 Des tableaux répertoriant ces molécules sont disponibles dans certains ouvrages ou publications scientifiques. III. Catégories d’interactions médicamenteuses Les interactions médicamenteuses résultent de l’association de deux ou plusieurs médicaments et peuvent être responsables d’effets indésirables parfois graves pour le patient. Ces interactions sont de deux types : interactions d’ordre pharmacodynamique ou d’ordre pharmacocinétique. IV. Les interactions pharmacocinétiques Les interactions pharmacocinétiques résultent d’une modification de la pharmacocinétique d’un médicament par un autre médicament, induisant une modification de sa concentration sanguine. Ces interactions peuvent survenir au niveau des différentes étapes pharmacocinétiques, absorption, distribution, métabolisme et excrétion. Il est possible d’anticiper ces interactions médicamenteuses pharmacocinétiques si l’on a une bonne connaissance de la pharmacocinétique des différentes molécules prescrites. Les interactions médicamenteuses pharmacocinétiques entraînent une modification du devenir de l’un des médicaments administrés dans l’organisme. L’un des médicaments administrés peut modifier (diminuer ou au contraire accentuer) l’absorption, la distribution, le métabolisme ou l’excrétion de l’autre. Ce type d’interaction entraîne nécessairement une modification des concentrations sanguines des médicaments. Elles vont donc être particulièrement à risque pour les médicaments à zone thérapeutique étroite, puisque pour ces médicaments, l’interaction peut conduire très rapidement à une toxicité résultant d’une augmentation des concentrations sanguines du médicament ou au contraire à un sous dosage rendant le traitement inefficace. Les interactions médicamenteuses les plus significatives en clinique sont celles qui ont lieu à l’étape d’absorption et de métabolisme et ce sont celles qui seront majoritairement développées dans la suite du cours. A. Interactions médicamenteuses pharmacocinétiques à l'étape d'absorption des médicaments Beaucoup d’interactions médicamenteuses se produisent lors de l’absorption des médicaments. Certains médicaments peuvent modifier de diverses façons l’absorption intestinale d’autres médicaments : Soit par création d’une barrière physique entre la lumière du tube digestif et l’épithélium digestif empêchant le passage des médicaments associés à travers l’épithélium digestif : c’est le cas des pansements gastriques ; Soit par précipitation ou chélation des médicaments associés dans la lumière du tube digestif aboutissant à la formation de complexes insolubles : c’est le cas notamment des antiacides ; Soit par modification du pH gastrique, ce qui entraîne une modification de l’ionisation et de la solubilité des médicaments associés : c’est le cas des inhibiteurs de la pompe à protons. Il en résulte une diminution du passage des médicaments à travers l’épithélium digestif, donc une diminution de la quantité de médicament qui atteint la circulation générale, ce qui se traduit par une diminution d’efficacité du médicament. Page 6 sur 20 On observe donc une modification des paramètres pharmacocinétiques permettant d’apprécier l’absorption des médicaments, c'est-à- dire la biodisponibilité (F), la surface sous la courbe (SSC), la concentration maximale (Cmax) et le temps nécessaire à l’obtention du Cmax (Tmax). En revanche, la demi-vie d’élimination (t1/2) est inchangée. Des interactions médicamenteuses peuvent également survenir avec l’alimentation. En effet, certains médicaments voient leur absorption diminuée ou augmentée lorsqu’ils sont administrés au cours d’un repas. Ces interactions médicament – alimentation se traduisent également par des modifications des paramètres pharmacocinétiques caractéristiques de la phase d’absorption des médicaments. 1. Création d'une barrière physique A titre d’exemple, lors de l’administration de clindamycine, un antibiotique, en même temps que de la diosmectite (Smecta®), un pansement gastrique, le pansement gastrique tapisse la surface de l’intestin et forme une barrière qui empêche l’absorption digestive de la clindamycine. La clindamycine n’étant plus absorbée, ses concentrations sanguines sont très faibles, ce qui se traduit par une diminution importante de l’efficacité de l’antibiotique. Lors de la prescription d’un pansement gastrique avec d’autres médicaments, il est essentiel d’administrer le pansement gastrique à distance des autres médicaments, c'est-à-dire au moins 2 heures après, de manière à ne pas perturber leur absorption digestive. 2. Chélation, précipitation De la même façon, les antiacides peuvent modifier l’absorption des médicaments co-administrés. Par exemple, les antiacides composés de sels d’aluminium (Al) ou de sels de magnésium (Mg) ou des résines comme la cholestyramine peuvent former des complexes insolubles avec les antibiotiques de la famille des tétracyclines ou des fluoroquinolones comme la ciprofloxacine. Ces complexes sont très difficilement absorbés à travers l’épithélium digestif, ce qui entraîne une diminution importante de l’absorption digestive de la ciprofloxacine et donc un risque d’inefficacité du traitement antibiotique. 3. Modification du pH gastrique Enfin, les médicaments capables de modifier le pH gastrique peuvent modifier l’absorption des médicaments co-administrés. En effet, si les médicaments co-administrés sont des acides faibles ou des bases faibles, leur absorption va dépendre en grande partie de leur degré d’ionisation, c'est-à-dire du pKa du principe actif et du pH local du tube digestif : Un acide faible se trouvera majoritairement sous forme non ionisée (seule forme du principe actif capable de traverser la barrière digestive) en milieu acide. Son absorption digestive sera donc favorisée dans l’estomac ; À l’inverse, une base faible sera très fortement ionisée en milieu acide et ne sera donc pas absorbée au niveau de l’estomac. Elle sera absorbée essentiellement au niveau de l’intestin où le pH est plus basique et où elle se trouvera majoritairement sous forme non ionisée. Par exemple, les inhibiteurs de la pompe à protons comme l’oméprazole entraînent une élévation du pH gastrique, ce qui va augmenter l’ionisation des acides faibles comme l’acide mycophénolique, un médicament immunosuppresseur utilisé en prévention du rejet de greffe. Page 7 sur 20 L’absorption de l’acide mycophénolique va donc être diminuée, ce qui augmente le risque de rejet de greffe pour le patient. Les conséquences d’une modification de pH gastrique vont être fonction de la nature chimique du médicament. La solubilité du raltégravir, un antirétroviral utilisé dans le traitement de l’infection par le VIH, par exemple, est très dépendante du pH du milieu. En présence d’oméprazole, la solubilité du raltégravir est augmentée du fait de l’augmentation du pH induite par l’inhibiteur de la pompe à protons, ce qui favorise l’absorption du raltégravir. La conséquence peut en être une augmentation de la toxicité du médicament. 4. Interactions médicament - alimentation Pour finir sur les interactions concernant la phase d’absorption des médicaments, certains médicaments voient leur absorption augmentée ou diminuée s’ils sont administrés au cours d’un repas. C’est le cas du kétoconazole, par exemple, pour lequel on observe une diminution du Cmax et une augmentation du Tmax avec l’alimentation. En effet, le bol alimentaire induit une augmentation du pH gastrique et ralentit la vidange gastrique, ce qui entraîne une diminution d’absorption doublée d’un retard à l’absorption du kétoconazole. Le tableau ci-dessous donne quelques exemples de médicaments dont la pharmacocinétique va être altérée par l’alimentation, les conséquences qui en résultent pour le patient et la conduite à tenir pour leur administration. B. Interactions médicamenteuses pharmacocinétiques à l'étape de distribution des médicaments Le mécanisme des interactions médicamenteuses se produisant à l’étape de distribution des médicaments implique essentiellement la fixation aux protéines plasmatiques. En effet, si deux médicaments possèdent le même site de liaison sur une protéine du plasma (albumine, α1-glycoprotéine acide), celui qui a l’affinité la plus importante pour la protéine peut alors déplacer l’autre de ses sites de liaison à la protéine. Il en résultera pour ce dernier une augmentation de sa fraction libre active et donc potentiellement de son effet. En réalité, cette augmentation de la fraction libre est temporaire, puisque s’instaure en parallèle une augmentation de la clairance rénale de la forme libre du médicament par filtration glomérulaire. Très rapidement, un nouvel équilibre s’instaure où la concentration libre redevient inchangée. Ce type d’interaction impliquant la phase de distribution des médicaments est donc rarement cliniquement significative. Cependant, un pourcentage de fixation aux protéines plasmatiques supérieur à 90% et un coefficient d'extraction hépatique élevé représentent des facteurs favorisants. C. Interactions médicamenteuses pharmacocinétiques à l'étape de métabolisme des médicaments En revanche, de nombreuses interactions se produisent au niveau de la phase de métabolisme des médicaments. Page 8 sur 20 Ce sont les interactions médicamenteuses les plus fréquemment rencontrées en clinique. Elles impliquent les enzymes du métabolisme des médicaments, parmi lesquelles : Les enzymes de phase I ou enzymes de fonctionnalisation, c'est-à-dire par exemple, les cytochromes P450 (CYP), l’alcool déshydrogénase et des estérases ; Les enzymes de phase II ou enzymes de conjugaison, c'est-à-dire par exemple, les UDP- glucuronosyl-transférases (UGT), qui sont les enzymes les plus fréquemment impliquées dans les réactions de phase II et qui assurent la conjugaison d’une molécule de médicament avec une molécule de sucre très hydrophile, les sulfotransférases, qui conjuguent les médicaments avec un radical sulfate et les glutathion-S-transférases, qui conjuguent les médicaments avec une molécule de glutathion. Ces interactions médicamenteuses sont responsables d’une modification du métabolisme des médicaments, on observe donc une modification des paramètres pharmacocinétiques permettant d’apprécier l’élimination des médicaments, c'est-à-dire la clairance d’élimination (ClT) et la demi-vie d’élimination (t1/2). Pour rappel, les cytochromes P450 constituent une famille d’enzyme majeure pour le métabolisme des médicaments et sont très fréquemment impliquées dans des interactions médicamenteuses. Il en existe un grand nombre d’isoformes qui sont regroupés en familles et sous- familles. Dans cet exemple, l’isoforme CYP 3A4, CYP désigne une enzyme appartenant aux cytochromes P450, 3 correspond au numéro de famille, A correspond à la sous-famille et 4 est le numéro attribué à l’isoenzyme. Les six enzymes de la famille des cytochromes P450 majoritairement impliqués dans le métabolisme des médicaments sont le CYP 3A4, le CYP 2C9, le CYP 1A2, le CYP 2C19 et le CYP 2D6. La figure ci-contre donne quelques exemples de médicaments substrats des principaux cytochromes P450. On constate que le cytochrome 3A4 métabolise un très grand nombre de médicaments et représente l’enzyme la plus fréquemment impliquée dans le métabolisme des médicaments. 1. Induction - Inhibition enzymatique Les interactions médicamenteuses impliquant le métabolisme sont de deux types : L’induction enzymatique ; L’inhibition enzymatique. En effet, des médicaments inducteurs enzymatiques sont capables d’augmenter la synthèse des enzymes hépatiques et vont donc accélérer le métabolisme des médicaments co-administrés métabolisés par ces mêmes enzymes. Les conséquences cliniques de l’interaction se manifestent en 10 à 21 jours, le temps que la synthèse enzymatique se fasse, et disparaissent de façon progressive après l’arrêt d’administration de l’inducteur enzymatique, en fonction de la demi-vie de l’inducteur et du temps nécessaire pour l’élimination des enzymes synthétisées en excès. L’induction enzymatique se caractérise par une augmentation de la clairance d’élimination (et donc une augmentation des concentrations sanguines des métabolites), une diminution de la demi-vie d’élimination et une diminution des concentrations sanguines (diminution de la SSC et du Cmax) des médicaments co-administrés. Il en résulte finalement une diminution de l’effet pharmacologique des médicaments co- administrés et donc un risque d’inefficacité du traitement. Au contraire, les médicaments inhibiteurs enzymatiques inhibent le métabolisme des médicaments co- administrés métabolisés par ces mêmes enzymes. Page 9 sur 20 L’effet est immédiat. Après l’arrêt d’administration de l’inhibiteur enzymatique en revanche, les effets ne disparaîtront qu’en fonction de la demi-vie d’élimination de l’inhibiteur s’il s’agit d’une inhibition enzymatique réversible, ou que lorsque de nouvelles molécules de CYP auront été synthétisées dans le cas d’une inhibition enzymatique irréversible. Les conséquences de cette inhibition enzymatique sont une diminution de la clairance d’élimination (et donc une diminution des concentrations sanguines des métabolites), une augmentation de la demi-vie d’élimination et une augmentation des concentrations sanguines (augmentation de la SSC et du Cmax) des médicaments co- administrés. Il en résulte finalement une augmentation de l’effet pharmacologique des médicaments co-administrés et donc un risque de toxicité du traitement. Le tableau ci-dessus récapitule les caractéristiques de l'induction et de l'inhibition enzymatique : Voici quelques exemples de médicaments inducteurs enzymatiques. Il est à noter qu’un même médicament peut induire l’activité de plusieurs cytochromes P450. C’est le cas par exemple de la rifampicine, l’inducteur enzymatique le plus connu, qui est capable d’induire l’activité du CYP 3A4 et du CYP 2C9. Certaines substances qui ne sont pas des médicaments, comme le tabac, le millepertuis ou l’alcool en prise chronique, peuvent également induire l’activité de certains cytochromes. On ne connaît pas pour l’instant d’inducteurs enzymatiques du CYP 2D6. 2. Exemple d'interaction médicamenteuse par induction enzymatique Voici un exemple d’interaction médicamenteuse par induction enzymatique. Un patient prend simultanément de la simvastatine, un hypolipémiant, et de la rifampicine, un antibiotique. La simvastatine est très largement métabolisée par le cytochrome P450 3A4 (CYP 3A4), alors que la rifampicine est un inducteur puissant de ce même cytochrome. Si on les administre ensemble, la rifampicine va entraîner une augmentation de la fabrication de CYP 3A4 par l’hépatocyte, et l’excès de CYP 3A4 ainsi formé va métaboliser de façon très importante la simvastatine. Les concentrations sanguines de simvastatine vont donc diminuer très fortement, il y a un risque élevé que le traitement par simvastatine s’avère inefficace. Page 10 sur 20 Voici quelques exemples de médicaments inhibiteurs enzymatiques. Le plus puissant inhibiteur enzymatique connu à ce jour est le ritonavir, un antirétroviral utilisé pour le traitement de l’infection à VIH. Le jus de pamplemousse est un inhibiteur des CYP 3A4 et peut surtout inhiber l’activité de protéines de transport comme la P-gp. 3. Exemple d'interaction médicamenteuse par induction enzymatique Voici un exemple d’interaction médicamenteuse par inhibition enzymatique. Un patient prend simultanément de la méthadone, un médicament utilisé pour le traitement substitutif de la dépendance aux opiacés, et du voriconazole, un antifongique. La méthadone est très largement métabolisée par le cytochrome P450 3A4 (CYP 3A4), alors que le voriconazole est un inhibiteur puissant de ce même cytochrome. Si on les administre ensemble, le voriconazole va se fixer sur le CYP 3A4 et l’empêcher de métaboliser correctement la méthadone. La méthadone va donc s’accumuler dans l’organisme, il y a un risque élevé de voir apparaître le principal effet indésirable de la méthadone, la dépression respiratoire. D. Interactions médicamenteuses pharmacocinétiques à l'étape d'élimination des médicaments Certaines interactions médicamenteuses pharmacocinétiques peuvent se produire à l’étape d’élimination des médicaments. Par exemple, la perfusion intraveineuse d’un soluté de bicarbonate de sodium va favoriser l’élimination urinaire de l’aspirine par modification du pH urinaire (alcalinisation des urines à un pH supérieur à 7,5), ce qui entraîne une modification de l’état d’ionisation des principes actifs éliminés par voie urinaire et donc une modification de leur réabsorption tubulaire. En effet, l’aspirine est un acide faible qui se trouve sous forme ionisée en milieu basique. La forme ionisée du médicament ne pouvant pas franchir aisément les membranes, la réabsorption tubulaire de l’aspirine sera limitée et son élimination urinaire sera alors favorisée. 6. Interactions pharmacocinétiques impliquant des transporteurs Enfin, quelques interactions médicamenteuses pharmacocinétiques impliquent des transporteurs. Les transporteurs membranaires ont un rôle très important dans l'absorption cellulaire ou à l'intérieur des organites et l’efflux à l'extérieur de la cellule de nombreux composés indispensables au métabolisme de la cellule comme les sucres, les acides aminés, les nucléotides, les ions inorganiques. Ils participent également à la diffusion des médicaments dans les différents tissus de l’organisme. Page 11 sur 20 Il existe deux grandes familles de transporteurs membranaires : Des transporteurs d’influx, qui facilitent l’entrée du médicament dans la cellule. C’est la famille des transporteurs SLC (Solute Carrier) qui comprend notamment les transporteurs OATP, OAT et OCT ; Des transporteurs d’efflux, qui permettent l’export des médicaments hors de la cellule. Ce sont les transporteurs ABC (ATP Binding Cassette) comme la P-gp, les transporteurs MRP ou le transporteur BCRP. Ces transporteurs membranaires sont présents dans toutes les cellules, mais ils sont beaucoup plus nombreux dans certaines cellules comme les entérocytes, les hépatocytes, les cellules épithéliales des tubules rénaux, les cellules de la barrière hémato-encéphalique et les cellules du placenta. Voici un exemple d’interaction médicamenteuse pharmacocinétique impliquant des transporteurs. En effet, le méthotrexate, un anticancéreux, et le diclofénac, un AINS, deux médicaments éliminés principalement par voie urinaire, passent tous les deux par le transporteur OAT présent à la surface des cellules du tubule proximal pour diffuser de la circulation sanguine dans l’urine (sécrétion tubulaire). Il va donc y avoir compétition entre le méthotrexate et le diclofénac sur le transporteur OAT, ce qui va diminuer la sécrétion tubulaire du méthotrexate. Le méthotrexate ne peut donc plus être correctement éliminé par voie urinaire, sa clairance rénale va diminuer, il va donc s’accumuler au niveau sanguin ce qui risque d’augmenter fortement sa toxicité hématologique. L’association entre le méthotrexate et le diclofénac est donc déconseillée. Un autre transporteur fréquemment impliqué dans les interactions médicamenteuses d'origine pharmacocinétique est la P-glycoprotéine (P-gp). En effet, les médicaments inhibiteurs ou inducteurs du CYP 3A4 sont généralement inhibiteurs ou inducteurs également de la P-gp. Il existe également des médicaments qui sont inhibiteurs de la P-gp sans avoir de propriétés inhibitrices sur le CYP 3A4. V. Les interactions pharmacodynamiques En parallèle de ces interactions médicamenteuses pharmacocinétiques, il existe également des interactions médicamenteuses pharmacodynamiques qui peuvent survenir lorsque l’un des médicaments administrés modifie l’effet d’un autre médicament associé. Les interactions pharmacodynamiques correspondent à une modification des effets (pharmacologiques ou indésirables) d’un médicament par un autre médicament sans modification de leurs concentrations sanguines. Il n’y a donc pas de modification de la pharmacocinétique de l’un ou l’autre des médicaments impliqués. Ces interactions sont liées au mécanisme d’action des médicaments et se produisent donc au site d’action. Il existe deux types d’interactions pharmacodynamiques : La synergie, qui correspond à une addition d’effets ; L’antagonisme, qui correspond à une opposition des effets. Il est possible d’anticiper ces interactions médicamenteuses pharmacodynamiques si l’on a une bonne connaissance des mécanismes d’action des différentes molécules prescrites. Parmi les interactions pharmacodynamiques, la synergie correspond à une addition d’effets, c'est-à-dire que l’effet d’un médicament est augmenté par l’administration simultanée d’un autre médicament : Lorsqu’il s’agit d’une addition d’effets pharmacologiques, cette interaction médicamenteuse est souvent prévue et bénéfique pour le patient. Page 12 sur 20 Par exemple, la synergie d’action existant entre le sulfaméthoxazole et le triméthoprime permet à l’association de ces deux médicaments d’exercer un effet bactéricide ; Lorsqu’il s’agit d’une addition d’effets indésirables, cette interaction médicamenteuse est non souhaitée pour le malade. Ce type d’interaction est souvent détecté après plusieurs années d’utilisation du médicament, d’où le rôle primordial de la pharmacovigilance. Par exemple, l’association de bézafibrate et de fénofibrate, deux médicaments hypolipémiants, majore le risque de rhabdomyolyse. Il s’agit d’une contre-indication. Le deuxième type d’interaction pharmacodynamique est l’antagonisme qui correspond à une opposition d’effets. Deux médicaments sont dits antagonistes lorsque l’un d’entre eux est capable de s’opposer partiellement ou totalement aux effets de l’autre. Par exemple, les corticoïdes, qui possèdent une activité hyperglycémiante intrinsèque, vont atténuer les effets antidiabétiques des sulfamides hypoglycémiants. Les effets bénéfiques des sulfamides hypoglycémiants disparaissent, le traitement hypoglycémiant devient alors inefficace. En revanche, certaines interactions médicamenteuses par antagonisme peuvent être recherchées, notamment l’association de flumazénil et de médicaments de la classe des benzodiazépines. En effet, dans les surdosages aux benzodiazépines, le flumazénil va déplacer la benzodiazépine de son site d’action et arrêter son action. Cet antagonisme est recherché pour mettre fin à l’intoxication. Bien connaître les effets pharmacologiques et indésirables des médicaments à associer ainsi que leur mécanisme d’action permet donc d’éviter ou d’anticiper les interactions pharmacodynamiques. Le tableau ci-contre récapitule les différents types d'interactions pharmacodynamiques : VI. Alcool et réponse aux médicaments Il existe deux types de consommation d’alcool : L’alcoolisme aigu : qui correspond à une surconsommation occasionnelle de boissons alcooliques, entraînant une intoxication. L’état ébrieux ou ébriété, forme initiale de l’ivresse, apparaît à partir d’une concentration sanguine allant de 0,5 à 1,5 g/L. Au dessus de 2 g/L, la marche est difficile sinon impossible. Après 3 g/L, le patient est généralement dans le coma ; L’alcoolisme chronique : également appelé « alcoolodépendance », c’est le fait de présenter une addiction à l’alcool. Par accoutumance, les alcooliques chroniques tolèrent des concentrations élevées d’alcool dans le sang. Contrairement aux idées reçues, l'alcoolisme aigu n'est pas moins dangereux que l'alcoolisme chronique : les dangers sont bien plus immédiats et violents. Compte tenu du nombre important de personnes consommant de l’alcool de façon chronique ou aiguë et de personnes consommant des médicaments, la fréquence des consommations associées ne peut qu’être importante. Or des interactions médicamenteuses entre l’alcool et certains médicaments peuvent survenir, avec des conséquences parfois graves. Les mécanismes des interactions alcool-médicament peuvent être d’origine pharmacodynamique ou pharmacocinétique. A. Interactions pharmacodynamiques D’un point de vue pharmacologique, l’alcool est un dépresseur du système nerveux central qui induit somnolence et sédation. A forte dose, il peut même entraîner le coma. Cette dépression centrale est précédée par une phase d’euphorie et d’excitation psychomotrice, définissant l’ébriété. Page 13 sur 20 L’alcool agit au niveau du système nerveux central en provoquant une modulation allostérique de l’activité du récepteur GABA-A. Il provoque une augmentation de la durée d’ouverture du canal chlore, c’est-à- dire l’entrée d’ions chlorure dans la cellule cérébrale, créant ainsi une hyperpolarisation membranaire responsable d’une inhibition synaptique entraînant la sédation. D’autres médicaments exercent également un effet dépresseur sur le système nerveux central, que cet effet soit recherché ou indésirable, notamment les benzodiazépines et les barbituriques qui agissent sur ce même récepteur GABA-A. L’utilisation concomitante d’alcool et de ces médicaments majore l’effet sédatif de ces deux produits. A dose élevée, le risque est celui d’une dépression respiratoire. A dose modérée, les conséquences sont une diminution de la vigilance, de l’attention et de la concentration, ce qui entraîne un accroissement des risques dans le cadre de la conduite automobile et de certaines activités de travail ou de loisir. Les mêmes types d’effets, et donc le même type de risques, peuvent se retrouver avec tous les dépresseurs du système nerveux central (sédatifs, anxiolytiques, hypnotiques, antidépresseurs sédatifs, neuroleptiques). Certains médicaments ont des effets sédatifs qui ne sont pas recherchés mais qui accompagnent l’effet principal du produit : certains antihistaminiques (utilisés contre les manifestations allergiques), myorelaxants, antalgiques et antidépresseurs. B. Pharmacocinétique de l’alcool L’alcool est une petite molécule facilement résorbée par la muqueuse digestive, au niveau du duodénum et du jéjunum principalement. Son Tmax est d’environ 30 minutes à jeun. Le repas retarde l’arrivée de l’alcool dans la circulation générale. La distribution de l’alcool est très rapide, surtout dans les organes très vascularisés comme le cerveau, le foie, le poumon... L’alcool diffuse à travers la barrière placentaire. L’alcool est métabolisé principalement par l’alcool déshydrogénase et l’aldéhyde déshydrogénase, mais son métabolisme fait également intervenir un cytochrome P450, le CYP 2E1. La voie d’oxydation des alcools en acétaldéhyde via le CYP 2E1 est secondaire chez les consommateurs occasionnels (la voie principale étant celle de l’ADH), mais devient plus importante chez les consommateurs chroniques, le CYP2E1 étant inductible par l’éthanol. Il est éliminé sous forme inchangée dans l’air expiré, les urines, la sueur et le lait maternel. C. Interactions pharmacocinétiques La prise d’alcool peut influencer la concentration sanguine des médicaments. 1. Absorption Les médicaments accélérant la vidange gastrique, comme le métoclopramide, avancent donc l’apparition du pic d’éthanolémie, alors que les médicaments retardant l’ouverture du pylore, comme les anticholinergiques, retardent son apparition. Les alcools forts entraînent un spasme pylorique qui retarde la vidange gastrique et peuvent ainsi favoriser l’absorption des médicaments au niveau de l’estomac (médicaments acides comme l’aspirine ou certains anti-inflammatoires). En prise unique, l’alcool diminue donc la vidange gastrique, augmente le débit sanguin intestinal et provoque une irritation de l’estomac. Chez l’alcoolique chronique, les muqueuses gastriques et intestinales sont atrophiées. Mais malgré ces variations, l’alcool ne semble que peu modifier l’absorption des médicaments. Page 14 sur 20 2. Métabolisme En revanche, l’influence de l’alcool est prépondérante sur le métabolisme. La prise conjointe de médicaments et d’alcool (en aigu ou en chronique) peut donner lieu à des interactions au niveau des voies enzymatiques impliquées dans le métabolisme de l’alcool. Du fait des voies enzymatiques impliquées dans le métabolisme de l’alcool, il y a un risque d’interaction médicamenteuse avec les médicaments substrats du CYP 2E1 comme le paracétamol (cf. cours sur les médicaments antalgiques) ou les anesthésiques inhalés. En effet, en consommation aigue, l’alcool est un inhibiteur enzymatique du CYP 2E1, mais l’alcool induit le CYP 2E1 lorsqu’il est consommé de façon chronique. Ainsi, si l’on absorbe simultanément dans un but suicidaire par exemple, une importante quantité d’alcool et du paracétamol, c’est l’alcool qui sera métabolisé préférentiellement : la production du métabolite toxique du paracétamol étant inhibée, la toxicité du paracétamol diminuera et l’éthanol jouera dans ce cas un rôle « protecteur ». Au contraire, si une personne buvant régulièrement des quantités relativement élevées d’alcool prend ponctuellement du paracétamol, celui-ci sera plus rapidement métabolisé, avec deux conséquences : un raccourcissement de l’effet antalgique du paracétamol et une production plus rapide du métabolite toxique. En cas d’absorption de grandes quantités de paracétamol, les capacités de neutralisation du métabolite toxique peuvent être débordées et des hépatites graves peuvent survenir. L’induction du CYP2E1 par l’éthanol a d’autres conséquences, notamment le métabolisme accéléré de certains anesthésiques (enflurane et halothane) chez un sujet dont le CYP2E1 est induit nécessite de plus grandes quantités de produit pour obtenir l’anesthésie. Les médicaments les plus sensibles à l’effet de l’alcool sont les médicaments à faible coefficient d’extraction hépatique (EH < 0,3). VII. Conclusion En conclusion, il existe de très nombreuses possibilités d’interactions médicamenteuses, du fait du grand nombre de médicaments disponibles sur le marché. Mémoriser toutes les interactions décrites est bien sûr illusoire, mais il est en revanche indispensable de bien connaître les différentes sources possibles d’information sur ces interactions. Quelques conseils sont à prendre en compte pour limiter la survenue des interactions médicamenteuses chez les patients : Il faut se limiter aux traitements indispensables pour éviter de polymédiquer le patient ; Les patients doivent être informés des risques de l’automédication. Les médicaments pris sans ordonnance peuvent provoquer des interactions médicamenteuses avec les autres médicaments prescrits ; Lors de l’instauration d’un nouveau traitement, il faut être attentif aux signes avant-coureurs d’effets indésirables ou d’inefficacité du traitement qui pourraient indiquer une interaction médicamenteuse ; Il est indispensable de respecter les conditions d’administration des médicaments pour éviter de générer des interactions médicamenteuses supplémentaires. Les interactions médicamenteuses pharmacocinétiques se produisent le plus souvent au niveau de la phase d’absorption ou de métabolisme des médicaments. Page 15 sur 20 Il est essentiel d’être prudent lors de la prescription de pansements gastriques (administration décalée par rapport aux autres traitements prescrits au patient), de médicaments exclusivement métabolisés par les cytochromes P450 (qui vont être les plus à risques d’interactions par induction ou inhibition enzymatique) et d’inducteurs ou d’inhibiteurs enzymatiques (qu’il est donc nécessaire de bien connaître). Les interactions pharmacodynamiques sont généralement mieux connues et plus faciles à détecter car le mécanisme d’action des médicaments est souvent bien documenté. Les interactions entre alcool et médicaments sont complexes car elles mettent en jeu des mécanismes très divers. Cependant, elles sont assez bien connues et peuvent donc être prévues et modélisées. Il semble important d’informer les patients des interactions possibles entre l’alcool et les médicaments, afin de les inciter à une grande prudence en cas de consommation d’alcool lors de traitements médicamenteux. Les prescripteurs doivent également être sensibilisés à cette question afin d’adapter leur prescription chez les consommateurs habituels d’alcool. VIII. QCM d’entraînement et annales A. QCM d’entraînement QCM1. Quelles sont les conséquences possibles des interactions au niveau de l’absorption des médicaments ? A. Diminution de l’absorption par chélation B. Diminution du pH gastrique C. Augmentation de la clairance rénale D. Formation de complexes insolubles E. Création d’une barrière physique dans l’intestin QCM 2. Quels types d’interactions pharmacodynamiques peuvent survenir ? A. Synergie d'effets B. Opposition des effets (antagonisme) C. Modification de la distribution plasmatique D. Modification du métabolisme hépatique E. Addition des effets indésirables QCM 3. Quelles sont les conséquences possibles de la prise d’alcool avec des dépresseurs du système nerveux central ? A. Majoration de l’effet sédatif B. Risque accru de dépression respiratoire C. Diminution de la vigilance D. Amélioration des capacités cognitives E. Opposition des effets QCM 1 QCM 2 QCM 3 ADE ABE ABC QCM1. Cochez les réponses vraies : A. Les interactions médicamenteuses sont un type d’incompatibilités physico-chimiques. B. Le risque est particulièrement élevé chez les patients mono-médiqués. C. Les interactions médicamenteuses n’ont pas forcément que des conséquences délétères. D. Lorsqu’on administre ensemble du triméthoprime et du sulfaméthoxazole, on obtient un effet bactériostatique. E. Le lopinavir, un inhibiteur de protéase utilisé dans le traitement de l’infection par le VIH, a une activité modeste contre le virus lorsqu’il est utilisé seul. QCM2. Classer les interactions médicamenteuses du risque le plus faible au plus élevé : A. Précaution d’emploi, association à prendre en compte, association déconseillée, contre-indication. B. Précaution d’emploi, association déconseillée, association à prendre en compte, contre-indication. C. Association à prendre en compte, association déconseillée, précaution d’emploi, contre-indication. D. Association à prendre en compte, précaution d’emploi, association déconseillée, contre-indication. E. Association déconseillée, association à prendre en compte, précaution d’emploi, contre-indication. QCM3. Cochez les réponses vraies : A. Il existe 2 types d’interactions pharmacodynamiques : synergie et antagonisme. B. Les interactions pharmacodynamiques n’ont pas d’effets sur la pharmacocinétique. C. Les interactions pharmacocinétiques agissent au niveau du site d’action. D. Les interactions pharmacocinétiques modifie la concentration sanguine des médicaments. E. Les IPP sont les représentants des interactions médicamenteuses par modification de pH gastrique. Page 16 sur 20 QCM4. Parmi les propositions suivantes, laquelle/lesquelles est/sont exactes ? A. L’ingestion d’un médicament au cours du repas diminue son absorption et la retarde B. L’augmentation de la fraction libre active du médicament déplacé est définitive C. Les enzymes de la phase I sont les enzymes de fonctionnalisation D. Les enzymes de la phase II sont les enzymes de conjugaison E. Les interactions médicamenteuses impliquant le métabolisme sont les inhibitions métaboliques QCM5. Parmi les propositions suivantes, laquelle/lesquelles est/sont exactes ? A. Les manifestations cliniques des inductions enzymatiques se manifestent immédiatement B. Les manifestations cliniques des inhibitions enzymatiques se manifestent entre 10 et 21 jours C. La durée de l’effet d’un inducteur enzymatique dépend en partie de la demi-vie de l’inducteur D. L'induction enzymatique est caractérisée par une augmentation de la clairance d'élimination E. L’induction enzymatique induit un risque d’inefficacité du traitement. QCM6. Parmi les propositions suivantes, laquelle/lesquelles est/sont exactes ? A. Les inhibiteurs enzymatiques induisent un risque de toxicité du médicament B. Il n’existe toujours pas d’inducteur de CYP2D6 C. Sinvastatine est un hypolipémiant D. Le jus de citron entrave l’activité de la protéine de transport comme P-gp E. Le ritonavir est un antiviral contre le VIH et inhibiteur enzymatique QCM7. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont vraies ? A. Les interactions médicamenteuses pharmacocinétiques peuvent modifier la concentration sanguine des médicaments. B. Une interaction médicamenteuse peut être intentionnelle pour améliorer l’efficacité d’un traitement. C. L’induction enzymatique entraîne une augmentation de la concentration du médicament dans l’organisme. D. La liaison aux protéines plasmatiques est un facteur clé des interactions pharmacodynamiques. E. La prise simultanée de kétoconazole et de simvastatine peut entraîner un risque accru de rhabdomyolyse. QCM8. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont vraies ? A. La rifampicine est un inducteur enzymatique du CYP3A4. B. Les inhibiteurs enzymatiques entraînent une diminution de la clairance des médicaments. C. L’effet des inhibitions enzymatiques est immédiat, contrairement aux inductions enzymatiques. D. La rifampicine peut diminuer l’efficacité de nombreux médicaments métabolisés par le CYP3A4. E. L’alcool en consommation aiguë agit comme un inducteur enzymatique. QCM9. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont vraies ? A. La P-glycoprotéine (P-gp) favorise l’élimination de certains médicaments en les expulsant des cellules. B. B. L’association méthotrexate-diclofénac peut entraîner une toxicité accrue du méthotrexate. C. C. L’alcalinisation des urines par le bicarbonate de sodium favorise l’élimination des médicaments acides faibles comme l’aspirine. D. D. Le jus de pamplemousse inhibe la P-glycoprotéine, ce qui peut augmenter l’absorption de certains médicaments. E. E. Un médicament faiblement lié aux protéines plasmatiques est plus susceptible d’être éliminé par filtration glomérulaire. QCM 1 QCM 2 QCM 3 QCM 4 QCM 5 QCM 6 QCM 7 QCM 8 QCM 9 CE D ABDE ACD CDE ABCE ABE ABCD ABCDE B. Annales Années 2012-2013 (QCM) QCM1. L’induction de l’activité d’un cytochrome P450 par un médicament (une ou plusieurs bonnes réponses): A. A une intensité variable d’un sujet à l’autre B. Apparaît de façon progressive C. A le plus souvent pour conséquence une diminution de l’effet thérapeutique du médicament métabolisé par ce cytochrome D. Est spécifique d’un cytochrome P450 E. Disparaît progressivement à l’arrêt de l’administration du médicament inducteur QCM2. La P-glycoprotéine diminue (une ou plusieurs bonnes réponses) : A. La résorption digestive de certains médicaments B. La pénétration intra-cérébrale de certains médicaments C. La réabsorption tubulaire rénale de certains médicaments D. Le passage transplacentaire de certains médicaments E. L’excrétion des médicaments dans les canaux biliaires Page 17 sur 20 QCM3. Parmi les médicaments, classes thérapeutiques ou substances suivantes, lequel (ou lesquels) est (ou sont) un (ou des) inducteurs(s) enzymatique(s) ? A. Les antibiotiques de la classe des macrolides B. La rifampicine C. Le millepertuis D. Le ritonavir E. Les inhibiteurs calciques Années 2013-2014 (QROC1) Question 4. Afin d’étudier les éventuelles interactions médicamenteuses dont fait l’objet le médicament G, une substance X et le médicament G sont administrés à un patient simultanément. Les figures ci-dessous représentent l’évolution des concentrations du médicament G administré par voie intraveineuse en bolus (à gauche) et par voie orale (à droite) en présence de la substance X (administration en IV bolus). L’axe des ordonnées est en coordonnées semi logarithmiques. 1. Que pouvez-vous dire de la SSC, de la Cmax et de la demi-vie d’élimination du médicament G lors de son administration par voie IV et orale ? 2. / 3. Sachant que l’interaction entre la substance X et le médicament G n’est pas de nature physico- chimique ; que le médicament G n’a pas de propriétés acido-basiques et que le médicament G est exclusivement métabolisé par glucuronoconjugaison, quelle hypothèse pouvez-vous faire sur la substance X expliquant l’interaction ? Années 2014-2015 (QROC2) Exercice : Une femme de 70 ans suit un traitement par un anti-vitamine K (anticoagulant oral), l’acénocoumarol, depuis 15 ans pour des troubles du rythme cardiaque. Le traitement par acénocoumarol est mensuellement surveillé par l’International Normalized ratio (INR), avec un objectif d’INR entre 2 et 3, sans fluctuation importante depuis l’instauration du traitement. Les principales caractéristiques pharmacocinétiques de l’acénocoumarol sont : Absorption : l'acénocoumarol est rapidement absorbé par voie orale, et au moins 60% de la dose est biodisponible dans le compartiment systémique. Les pics de concentration plasmatique et les aires sous la courbe sont proportionnels à la dose lorsqu'elle est située dans l'intervalle de dose 8-16 mg. Les concentrations plasmatiques interindividuelles présentent une telle variabilité qu'aucune corrélation ne peut être établie entre la dose, les concentrations plasmatiques d'acénocoumarol et le niveau apparent de prothrombine. Distribution : le volume apparent de distribution est de 0,16-0,18 L/kg Biotransformation : l'acénocoumarol est largement métabolisé par le cytochrome P450 2C9. La variabilité génétique liée au CYP 2C9 participe à 14% de la variabilité interindividuelle de la réponse pharmacodynamique de l'acénocoumarol. Elimination : l'acénocoumarol est éliminé du plasma avec une demi-vie de 8 à 11 heures. La clairance plasmatique apparente est de 3,65 L/h après administration orale. En raison d’une pathologie intercurrente, un traitement par amoxicilline et fluconazole (un comprimé par jour pendant 7 jours) est prescrit à la patiente. 48 heures après le début de la prise de ce traitement, l’état de la patiente s’aggrave. Un scanner cérébral retrouve un volumineux hématome intracérébral et l’INR est à 9, témoin d’un surdosage. Question 1. Donnez la définition d’une interaction médicamenteuse. Question 2 : 1. Quelle catégorie d’interaction médicamenteuse évoquez-vous avec l’acénocoumarol ? Pourquoi ? 2. Expliquez le mécanisme de cette interaction. Question 3. Citer deux autres médicaments dont la prescription chez cette patiente aurait pu entraîner un surdosage en anticoagulant ? Question 4. Dans le thésaurus des interactions médicamenteuses de l’ANSM, l’association de acénocouramol avec certains médicaments est classée dans le niveau de contrainte «Précaution d’emploi». 1. Quelle est la conduite générale à tenir quand la mention « Précaution d’emploi » est indiquée ? 2. Quelle aurait dû être la conduite spécifique dans le cas présent ? Question 5. L’activité anticoagulante de l’acénocouramol présente une grande variabilité interindividuelle liée à des facteurs génétiques. Quelle(s) est (sont) la (les) enzyme(s) impliquée(s) dans la pharmacocinétique ou la pharmacodynamie de l’acénocoumarol qui peut (peuvent) subir des modifications d’activité d’origine génétique ? Années 2015-2016 (QROC3) Page 18 sur 20 Exercice : La daptomycine est un antibiotique utilisé pour le traitement des endocardites infectieuses à Staphylococcus aureus notamment. Elle a une activité concentration-dépendante rapidement bactéricide (en 1,6 à 2h) vis-à-vis des bactéries Gram positif. Des augmentations des taux de CPK plasmatique associées à des douleurs et/ou une faiblesse musculaire ainsi que des myoglobinémies ainsi que des cas de rhabdomyolyses ont été rapportés lors d’un traitement par la daptomycine. Dans les essais cliniques, des augmentations notables du taux plasmatique de CPK supérieures à 5 fois la limite de la normale sont survenues plus fréquemment chez les patients traités par la daptomycine que chez ceux recevant les traitements comparateurs. D’un point de vue pharmacocinétique, les concentrations d’équilibre sont atteintes juste avant la troisième administration chez des patients recevant des doses 4 à 6 mg/kg administrées en perfusion intraveineuse de 30 minutes en dose unique quotidienne pendant une durée allant jusqu’à 14 jours. A ces doses, la pharmacocinétique est proportionnelle à la dose et les paramètres pharmacocinétiques sont les suivants : VD= 0,1 L/kg Fixation aux protéines plasmatiques : 10% ClT :10mL/min Fe=0,7 Le processus de sécrétion tubulaire active est inexistant pour la daptomycine. Question 1. En vous basant sur les informations ci-dessus, quelle est la demi-vie de la daptomycine ? Question 2. Que signifie la phrase « pour des doses de 4 à 6 mg/kg/jour, la pharmacocinétique est proportionnelle à la dose » ? Question 3. 1. Commentez le VD de cet ATB 2. Que pouvez-vous en conclure sur les propriétés physico-chimiques de cet ATB ? 3. Quelle est la voie d’élimination majoritaire de ce médicament ? Question 4. 1. Sachant que le débit de filtration glomérulaire chez un patient jeune est de 100 mL/min, calculez la clairance rénale et la clairance de filtration glomérulaire de la daptomycine ? 2. Que pouvez-vous conclure sur le mécanisme d’élimination de ce médicament ? Question 5. Le résumé des caractéristiques du produit (RCP) indique que l’association de la daptomycine avec une statine est déconseillée. 1. Quel est le mécanisme de cette interaction ? 2. Pourquoi cette association est-elle déconseillée ? 3. Si l’association est inévitable, quelle surveillance biologique allez-vous mettre en place ? Question 6. L’association concomitante de daptomycine et d’AINS doit également être évitée. A. Sachant que les AINS peuvent entrainer une réduction de la filtration glomérulaire, quel est le mécanisme de l’interaction entre la daptomycine et les AINS ? B. Quelle pourrait en être la conséquence ? C. Correction QCM + QROC Années 2012-2013 (QROC1) QCM 1 QCM 2 QCM 3 ABCE ABD BC Années 2013-2014 (QROC1) 1. La SSC décroit linéairement par voie IV : la courbe est une droite décroissante, tandis que par voie orale, elle augmente, atteint son maximum puis diminue : la courbe est une parabole. Cela traduit une Cmax d’emblée maximale pour la forme IV tandis que par voie orale, il faut attendre le Tmax pour atteindre cette concentration maximale. Par ailleurs, on peut constater que la Cmax est un peu plus élevée avec la voie IV. Le t1/2 est identique puisque la demi-vie ne dépend pas de la voie d’administration du médicament. 2. On observe sur la courbe d’administration per os que la Cmax du médicament G + substance X est supérieure à la Cmax du médicament G seul. L’interaction n’est pas de nature physico-chimique, on élimine donc la création d’une barrière physique, la chélation et précipitation. Le médicament n’a pas de propriétés acido-basiques donc on élimine la modification du pH gastrique. En revanche, le médicament G est exclusivement métabolisé par glucuronoconjugaison, ce qui pourrait suggérer que la substance X est un inhibiteur d’UGT, augmentant donc la concentration sanguine du médicament G, donc le Cmax. Années 2014-2015 (QROC2) Question 1. Une interaction médicamenteuse correspond à une modification cliniquement significative de l’effet d’un médicament lorsqu’il est administré de façon concomitante avec un autre médicament ou une autre substance, quel que soit le sens de cette modification. Page 19 sur 20 Question 2. 1. Nous sommes face à une interaction pharmacocinétique à la phase de métabolisme et plus précisément une interaction médicamenteuse par inhibition enzymatique. En effet, l’acénocoumarol est largement métabolisé par le cytochrome P450 2C9, or le fluconazole est un inhibiteur de ce même cytochrome. 2. Le fluconazole étant un inhibiteur du cytochrome P450 2C9, il va se fixer sur celui-ci et va donc l’empêcher de métaboliser l’acénocoumarol. Ce dernier s’accumule alors dans l’organisme, ce qui provoque une toxicité et des complications éventuelles, comme l’hématome cérébral. Question 3. L’amiodarone qui est un anti-arythmique ou un autre anti-infectieux tel que le métronidazole auraient pu engendrer un surdosage en anticoagulant, étant donné qu’ils sont tous deux des inhibiteurs du cytochrome P450 2C9 également. Question 4. 1. La « précaution d’emploi » caractérise une interaction médicamenteuse à risque de niveau II, ce qui veut dire que l’association est possible mais on doit effectuer un suivi clinique et biologique renforcé. 2. Dans ce cas, il aurait fallu effectuer des dosages sanguins réguliers et notamment surveiller l’INR. Question 5. Le cytochrome P450 2C9 peut subir des modifications d’activité d’origine génétique. En effet, il est dit dans l’énoncé que la variabilité génétique liée au CYP 2C9 participe à 14% de la variabilité interindividuelle de la Réponse pharmacodynamique de l'acénocoumarol. D’après les courbes, le médicament G est plus efficace lorsqu’il est associé à la substance X que quand il est administré seul. On élimine donc la compétition au niveau de la sécrétion tubulaire. L’hypothèse est donc que la substance X joue sur la distribution avec un déplacement de la liaison aux protéines plasmatiques. On aboutit à une augmentation temporaire de la concentration active du médicament. Années 2015-2016 (QROC3) Question 1. VD = 0,1 L/kg = 100 mL/kg =100x70= 7000 Ml t1⁄2 = 0,7 x VD / ClT = (0,7x7000) /10 = 490 mL Question 2. Cette phrase signifie que pour ces doses, la cinétique est linéaire. Question 3 1. VD = 0,1L/kg. Ainsi, le VD est inférieur à 1 donc il est faible. 2. Un VD faible correspond à un médicament hydrophile. 3. Ce médicament est majoritairement éliminé par voie rénale, comme le montre la Fe, qui est supérieur à 50% (Fe = 0,7). De plus, cela concorde avec le fait qu’il s’agisse d’un médicament hydrophile. Question 4. 1. Clairance Rénale = ClT x Fe = 10 x 0,7 = 7mL/min. Clairance de filtration glomérulaire = Fu x DFG = 0,9 x 100= 90 mL/min. NB : Fu (fraction libre = non liées aux protéines) = 1 – pourcentage de liaison aux protéines plasmatiques = 0,9 2. Clairance rénale < Clairance de filtration glomérulaire donc le médicament est majoritairement réabsorbé. Question 5. (NB : pré-requis « Hypolipémiant » nécessaire pour répondre !!!) 1. Il s’agit d’une interaction pharmacodynamique. En effet, les statines peuvent entrainer des effets secondaires sur les muscles et provoquer une fatigue musculaire, des crampes, des myalgies, voire des rhabdomyolyses. 2. Cette association de statine et de daptomycine est donc déconseillée car elle risque d’augmenter la toxicité musculaire et de provoquer une rhabdomyolyse. Ainsi, l’association doit être évitée. 3. Si l’association est inévitable, il est indispensable de surveiller les CPK. Question 6. 1. Sachant que les AINS peuvent entrainer une réduction de la filtration glomérulaire, quel est le Mécanisme de l’interaction entre la daptomycine et les AINS ? Il s’agit ici d’une interaction pharmacocinétique à l’étape d’élimination. Les AINS diminuent la filtration glomérulaire et le processus de sécrétion tubulaire active est inexistant pour la daptomycine. Ainsi, la clairance rénale d’élimination diminue, ce qui entraine par la même occasion une baisse de la clairance totale. 2. Cette diminution de la clairance totale peut entrainer une accumulation de daptomycine. Page 20 sur 20