L'entreprise et ses problèmes économiques PDF

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Ce document présente un aperçu des problèmes économiques des entreprises, y compris le calcul du profit et le coût de renonciation. Il aborde différents aspects de la gestion et de la comptabilité en lien avec les entreprises canadiennes.

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# L'entreprise et ses problèmes économiques ## Si les deux millions d'entreprises canadiennes different par leur taille et par leur secteur d'activité, toutes accomplissent les mêmes fonctions économiques fondamentales. En effet, par définition, une entreprise est une organisation qui mobilise et...

# L'entreprise et ses problèmes économiques ## Si les deux millions d'entreprises canadiennes different par leur taille et par leur secteur d'activité, toutes accomplissent les mêmes fonctions économiques fondamentales. En effet, par définition, une entreprise est une organisation qui mobilise et gère des facteurs de production afin de produire et de vendre des biens et services. Notre objectif est de prédire le comportement des entreprises. Pour ce faire, nous devons connaître le but et les contraintes qu'ont en commun toutes les entreprises. ## Le but de l'entreprise Lorsqu'ils demandent à des entrepreneurs de définir leurs objectifs, les économistes obtiennent différentes réponses. Certains entrepreneurs diront viser l'amélioration continue de la qualité de leur produit, d'autres, la croissance de l'entreprise ou sa part de marché, d'autres encore, la satisfaction du personnel, et de plus en plus aujourd'hui, il y en aura qui parleront de responsabilité sociale et environnementale. Si tous ces objectifs sont légitimes, aucun n'est fondamental. En fait, ce ne sont là que des moyens d'atteindre le but premier de l'entreprise. Ce but premier, c'est la maximisation du profit. L'entreprise qui ne cherche pas à maximiser son profit risque fort d'être éliminée ou absorbée par une entreprise qui, elle, cherche à maximiser son profit. ## Quel est exactement ce profit qu'une entreprise cherche à maximiser? Pour répondre à cette question, prenons l'exemple de Maille Maille, une petite manufacture de chandails fondée et dirigée par Nico. ## La comptabilisation du profit En 2009, la vente de ses chandails a rapporté 400000 $ à Maille Maille. Les dépenses de l'entreprise pour l'année sont les suivantes: 80000$ de laine, 20000$ de fournitures et services, 120000 $ de salaires, 5 000 $ pour la location d'un ordinateur et 5000 $ d'intérêts sur un emprunt bancaire. Avec des dépenses totalisant 230000$, Maille Maille a dégagé un surplus de 170000 $. Pour mesurer le profit de Maille Maille, le comptable de l'entreprise a soustrait 20000 $ du montant en surplus pour la dépréciation. La dépréciation est la perte de valeur du capital d'une entreprise. Les comptables calculent la dépréciation selon les règles de l'Agence du revenu du Canada, qui sont des normes comptables reconnues. Selon le bilan du comptable, le profit de Maille Maille s'est donc chiffré à 150000 $ en 2009. ## La comptabilité économique Les comptables calculent le profit pour s'assurer que les impôts que paie l'entreprise sont exacts et pour montrer aux investisseurs comment leur argent est utilisé. L'économiste, lui, mesure le profit en vue de prédire les décisions que prendra l'entreprise, et ces décisions ont pour but de maximiser le profit économique. Le profit économique d'une entreprise est égal à sa recette totale moins son coût de production, ce dernier étant équivalent au coût de renonciation de la production. ## Le coût de renonciation de la production Le coût de renonciation est la valeur de la meilleure possibilité à laquelle on renonce pour en obtenir une autre. Pour une entreprise, le coût de renonciation de sa production est la valeur du meilleur autre usage qu'elle aurait pu faire de ses ressources. Le coût de renonciation de la production est une autre possibilité réelle à laquelle l'entreprise a renoncé. On exprime ce coût en unités monétaires pour être en mesure d'additionner et de comparer les valeurs des possibilités auxquelles on a renoncé. Le coût de renonciation de la production d'une entreprise est égal à la somme des coûts d'utilisation des ressources. L'entreprise emploie trois types de ressources, selon leur provenance: * celles qu'elle achète sur le marché; * celles qui lui appartiennent déjà; * celles qui lui sont fournies par le propriétaire de l'entreprise. ### Les ressources achetées sur le marché L'entreprise supporte un coût de renonciation quand elle se procure des ressources sur le marché. Le montant dépensé à cet effet fait partie du coût de renonciation de la production parce qu'il aurait pu servir à acheter d'autres ressources pour produire d'autres biens ou services. Dans le cas de Maille Maille, les ressources achetées sur le marché sont la laine, les fournitures et services, la main-d'œuvre, l'ordinateur en location et l'emprunt bancaire. Les 230000 $ que Maille Maille a déboursés en 2009 pour les obtenir auraient pu être utilisés autrement. En conséquence, ils représentent une partie du coût de renonciation de la production de chandails. ### Les ressources qui appartiennent à l'entreprise L'entreprise supporte un coût de renonciation lorsqu'elle emploie son propre capital. Le coût d'utilisation de ce dernier fait partie du coût de renonciation de la production parce que l'entreprise pourrait vendre le capital qui lui appartient et louer du capital d'une autre entreprise. Quand elle utilise son propre capital, l'entreprise le loue implicitement à elle-même. Dans ce cas, le coût de renonciation s'appelle le loyer implicite du capital. Ce loyer implicite se compose de deux éléments: la dépréciation économique et l'intérêt sacrifié. #### La dépréciation économique La dépréciation est la diminution de la valeur du capital d'une entreprise. En comptabilité, on la mesure au moyen de formules qui n'ont pas de rapport avec l'évolution de la valeur marchande du capital. À l'opposé, la dépréciation économique correspond à la baisse de la valeur marchande du capital au cours d'une période donnée. Elle est égale à la valeur marchande du capital au début de la période moins sa valeur marchande à la fin de la période. Par exemple, si Nico pouvait vendre ses installations et ses métiers à tricoter pour la somme de 400 000 $ le 1er janvier 2009 et que le 31 décembre 2009, il peut vendre le même capital 375000 $, sa dépréciation économique pour l'année 2009 se chiffre à 25000$ (400000 $ - 375 000 $). Cette baisse de 25 000 $ fait partie du coût de renonciation de la production. #### L'intérêt sacrifié Les fonds utilisés pour acheter du capital auraient pu servir à d'autres fins. Le cas échéant, ils auraient rapporté un revenu d'intérêts. Ces intérêts dont on se prive font partie du coût de renonciation de la production. Supposons que Maille Maille a prélevé 300 000 $ sur ses propres fonds pour acheter du capital. Si elle avait acheté des obligations au lieu d'un atelier de tricot (prenant alors en location le capital dont elle a besoin pour produire ses chandails), l'entreprise aurait eu des revenus d'intérêts annuels de 15 000$. Ces intérêts sacrifiés font partie du coût de renonciation de la production. ### Les ressources fournies par le propriétaire de l'entreprise Le propriétaire d'une entreprise peut fournir à la fois son entrepreneuriat et son travail. #### L'entrepreneuriat Le propriétaire d'une entreprise, ou un entrepreneur qu'il engage fournit souvent son entrepreneuriat - facteur de production dont la fonction est d'organiser les activités de l'entreprise et de prendre les décisions. Le rendement de l'entrepreneuriat est le profit, et le profit habituel qu'un entrepreneur réalise sur le marché en exploitant ses habiletés entrepreneuriales s'appelle le profit normal. Le profit normal est le coût de l'entrepreneuriat et il fait partie du coût de renonciation de la production. Si Nico fournit son entrepreneuriat et que le profit normal qu'il peut tirer de ce service s'élève à 45 000 $ par année, il faut donc ajouter ce montant au coût de renonciation de la production de Maille Maille. #### Le travail du propriétaire En plus de son entrepreneuriat, le propriétaire d'une entreprise peut également fournir son travail, et ce, sans rémunération. Le coût de renonciation du travail du propriétaire est le salaire que ce dernier a sacrifié en renonçant à l'emploi le plus rémunérateur qu'il aurait pu avoir. Si Nico fournit du travail pour assurer la bonne marche de son entreprise et qu'il renonce à un autre emploi dont le salaire est de 55000 $ par année, le montant de ce salaire fait partie du coût de renonciation de la production de Maille Maille. Distinguer, dans la rémunération que reçoit Nico, la part attribuable à son entrepreneuriat de celle qui provient de son travail a ici un intérêt limité. Cette distinction est un rappel que l'entrepreneuriat est une fonction très différente de celle du travail. En particulier, contrairement au salaire, la rémunération de l'entrepreneuriat est incertaine: Nico n'obtiendra un bénéfice de l'exploitation de Maille Maille que dans la mesure où il est doué pour les affaires et... que les conditions du marché lui sont favorables. ## La comptabilité économique en bref Le tableau 10.1 résume les concepts de la comptabilité économique. Les recettes totales de Maille Maille se chiffrent à 400 000 $, et son coût de renonciation de la production, à 370000$; son profit économique est donc de 30 000 $. | Poste | Montant | |---|---| | Recettes totales | 400 000$ | | Coûts des ressources achetées sur le marché | | | Laine | 80 000$ | | Fournitures et services | 20 000$ | | Salaires versés | 120 000$ | | Location d'un ordinateur | 5 000$ | | Intérêts payés | 5 000$ | | Coûts des ressources appartenant à l'entreprise | 40 000$ | | Dépréciation économique | 25 000$ | | Intérêt sacrifié | 15 000$ | | Coûts des ressources fournies par le propriétaire | 100 000$ | | Profit normal de Nico | 45 000$ | | Salaire auquel Nico a renoncé | 55 000$ | | Coût de renonciation de la production | 370 000$ | | Profit économique | 30 000$ | ## Le revenu personnel de Nico comprend les 30000 $ de profit économique et les 100000 $ qu'il gagne en fournissant des ressources à Maille Maille. ## Les décisions Pour atteindre son but, c'est-à-dire maximiser son profit économique, l'entreprise doit prendre des décisions concernant: 1. la nature et la quantité des biens et services à produire; 2. les techniques de production à utiliser; 3. la gestion et la rémunération de ses gestionnaires et de ses travailleurs; 4. la mise en marché et le prix de ses produits; 5. les composantes qu'elle produira elle-même et celles qu'elle achètera à d'autres entreprises. L'entreprise doit prendre chacune de ces décisions en tenant compte des contraintes qu'elle subit, et sur lesquelles nous allons maintenant nous pencher. ## Les contraintes de l'entreprise L'entreprise est soumise à trois types de contraintes qui limitent le profit économique qu'elle peut réaliser: * les contraintes technologiques; * les contraintes d'information; * les contraintes de marché. ### Les contraintes technologiques Les économistes donnent un sens très général au terme technologie, qu'ils définissent comme toute méthode ou tout procédé permettant de produire un bien ou un service. La technologie d'une entreprise inclut toutes les techniques auxquelles elle recourt, de la conception détaillée des machines à l'agencement du lieu de travail, en passant par sa propre organisation. Ainsi, le centre commercial découle d'une technologie destinée à la production de la vente au détail qui differe de la technologie du comptoir de vente par catalogue ou du magasin du centre-ville. La technologie est en constante progression. Avec des ordinateurs capables de communiquer verbalement et de reconnaître notre voix, et des voitures pourvues d'un dispositif pour trouver l'adresse que nous cherchons dans une ville inconnue, nous pouvons accomplir de plus en plus de choses. Pour les entreprises, le progrès technologique multiplie les nouvelles occasions de profit. Cependant, à tout moment donné, l'accroissement du profit que peut réaliser l'entreprise est limité par la technologie dont elle dispose. Pour produire davantage et accroître ses revenus, l'entreprise doit mobiliser davantage de ressources et engager des coûts plus élevés. Ainsi, avec les installations et la main-d'œuvre dont elle dispose actuellement, Ford ne peut produire qu'une quantité donnée d'automobiles par jour. Pour en produire un plus grand nombre, l'entreprise devra mobiliser davantage de ressources, ce qui accroîtra ses coûts et limitera la hausse du profit qu'elle espérait réaliser en vendant les voitures supplémentaires. ### Les contraintes d'information Nous ne détenons jamais toute l'information dont nous aurions besoin pour prendre des décisions. Nous manquons d'information tant sur l'avenir que sur le présent. Supposons par exemple que vous ayez l'intention d'acheter un nouvel ordinateur. Quand devriez-vous l'acheter? Cela dépend de l'évolution des prix. Où devriez-vous l'acheter? Cela dépend des prix que pratiquent des centaines de boutiques informatiques. Pour trouver la meilleure affaire possible, il vous faudrait comparer la qualité et les prix qu'offre chacune des boutiques. Mais le coût de renonciation de cette information dépasserait alors celui de l'ordinateur! Comme vous, l'entreprise subit la contrainte d'une information incomplète sur la qualité et l'effort de sa main-d'œuvre, sur les intentions d'achat actuelles et futures de ses clients et sur les projets de ses concurrents. Il se peut que ses travailleurs se la coulent doce, que des clients se tournent vers des concurrents, ou encore qu'un de ces derniers s'apprête à lancer un produit révolutionnaire qui dépréciera la valeur de sa production. Les entreprises tentent de créer des systèmes incitatifs pour les travailleurs afin de s'assurer qu'ils travaillent fort même sans supervision. Elles font des études de marché pour en savoir plus sur les désirs et les dispositions de leurs clients, et elles se surveillent étroitement les unes les autres pour tenter de deviner ce que la concurrence leur réserve. Or, ces efforts n'arrivent pas à éliminer les problèmes d'incertitude et d'information incomplète, qui limitent le profit économique réalisable. ### Les contraintes de marché Le volume des ventes et le prix des produits d'une entreprise sont limités par le consentement à payer des clients ainsi que par les prix que pratiquent ses concurrents et par leurs efforts commerciaux. De même, les ressources qu'une entreprise peut acheter et le prix qu'elle les paie dépendent de la disposition des gens à travailler et de leur disposition à investir dans l'entreprise. Les entreprises dépensent des milliards de dollars par année pour la mise en marché et la vente de leurs produits, recrutant les gens les plus créatifs pour concevoir des messages publicitaires capables d'émerger du flot de publicité qui inonde le petit écran. Les contraintes de marché et les dépenses qu'engagent les entreprises pour les surmonter limitent leur profit. ## L'efficacité technique et l'efficacité économique Research in Motion emploie une main-d'œuvre considérable, et la plupart de ses travailleurs possèdent un capital humain (leur savoir et leurs habiletés) important; par contre, cette entreprise n'utilise qu'une faible quantité de capital physique (machines et installations). Une compagnie minière utilise au contraire une énorme quantité de matériel d'exploitation des mines (capital physique), mais emploie une main-d'œuvre très réduite. Pourquoi? La réponse réside dans l'efficacité. En matière de production, on distingue deux concepts d'efficacité: l'efficacité technique et l'efficacité économique. L'efficacité technique s'observe quand il n'est pas possible de produire plus avec des quantités de facteurs données, et l'efficacité économique s'observe quand le coût de production d'une quantité donnée est le plus bas possible. Prenons un exemple pour clarifier ces deux concepts. Supposons qu'il existe quatre méthodes pour produire des téléviseurs: * le montage robotisé, où une seule personne surveille l'ensemble du processus, lequel est commandé par ordinateur; * la chaîne de montage, où chaque travailleur se spécialise dans une tâche précise qu'il accomplit à mesure que les téléviseurs en cours d'assemblage passent sur la chaîne de production; * le montage manuel, où chaque travailleur assemble un téléviseur à l'aide de quelques outils manuels; * le montage traditionnel, où chaque travailleur se spécialise dans une tâche précise, mais se déplace d'un établi à l'autre pour l'accomplir. Le tableau 10.2 donne les quantités de travail et de capital requises pour produire 10 téléviseurs par jour avec chacune de ces quatre méthodes. Laquelle est la plus efficace? | Méthode | Main-d'œuvre | Capital | |---|---|---| | A Montage robotisé | 1 | 1000 | | B Chaîne de montage | 10 | 1000 | | C Montage manuel | 100 | 1 | | D Montage traditionnel | 100 | 10 | ## L'efficacité technique Rappelez-vous qu'il y a efficacité technique quand la production d'une quantité donnée requiert le moins de facteurs possible. En examinant les chiffres du tableau 10.2, on constate que la méthode A est celle qui requiert le plus de capital et le moins de main-d'œuvre, et que la méthode C'est celle qui utilise le plus de main-d'œuvre et le moins de capital Les méthodes B et D se situent entre les deux précédentes; elles requièrent moins de capital mais plus de main-d'œuvre que la méthode A, et plus de capital mais moins de main-d'œuvre que la méthode C. Comparons les méthodes B et D. La méthode D requiert 100 travailleurs et 10 unités de capital pour produire 10 téléviseurs, alors que la méthode B ne requiert que 10 travailleurs et 10 unités de capital pour produire ces mêmes 10 téléviseurs. Comme elle requiert la même quantité de capital et beaucoup plus de main-d'œuvre que la méthode B, la méthode D est techniquement inefficace. Parmi les autres méthodes, y en a-t-il une autre qui soit techniquement inefficace? La réponse est non. La méthode A requiert plus de capital mais moins de main-d'œuvre que la méthode B, et la méthode C requiert plus de main-d'œuvre mais moins de capital que la méthode B. ## L'efficacité économique On s'en souvient, il y a efficacité économique quand le coût de production d'une quantité donnée est le plus bas possible. La méthode D, techniquement inefficace, est également économiquement inefficace. Comme elle requiert la même quantité de capital que la méthode B mais 10 fois plus de main-d'œuvre, elle est plus coûteuse. Une méthode techniquement inefficace n'est jamais économiquement efficace. Autrement dit, une méthode efficace économiquement est nécessairement efficace techniquement. L'une des trois méthodes efficaces sur le plan technique est aussi efficace économiquement. Les deux autres ne le sont pas. Ce sont les prix des facteurs de production qui déterminent laquelle est efficace. Dans le tableau 10.3(a), la main-d'œuvre coûte 75$ par jour et la location du capital se chiffre à 250 $ par jour. | Méthode | Main-d'œuvre | Capital | Coût de la main-d'œuvre (75$ par jour) | Coût du capital (250$ par jour) | Coût total | |---|---|---|---|---|---| | A | 1 | 1000 | 75$ | 250 000$ | 250 075$ | | B | 10 | 1000 | 750$ | 2500$ | 3250$ | | C | 1000 | 1 | 75 000$ | 250$ | 75 250$ | On constate alors que la méthode B est la moins coûteuse et que, par conséquent, elle est économiquement efficace. Dans le tableau 10.3(b), la main-d'œuvre coûte 150$ par jour et le capital se loue 1 $ par jour. Dans ce cas, la méthode A est moins coûteuse et est donc économiquement efficace. En fait, le capital est si peu coûteux par rapport à la main-d'œuvre que la méthode qui requiert le plus de capital s'avère la méthode économiquement efficace. Au tableau 10.3(c), la main-d'œuvre ne coûte que 1 $ par jour alors que la location du capital monte à 1000$ par jour. La méthode Cest la moins coûteuse – la méthode économiquement efficace. Ici, la main-d'œuvre est si peu coûteuse par rapport au capital que c'est la méthode nécessitant le plus de main-d'œuvre qui s'impose comme la méthode économiquement efficace. Ces exemples montrent que l'efficacité économique dépend du coût relatif des facteurs. La méthode économiquement efficace est celle qui requiert une petite quantité d'un facteur plus coûteux et une plus grande quantité d'un facteur moins coûteux. La différence entre le coût comptable et le coût de renonciation distingue le message des économistes de celui des comptables. De même, la différence entre l'efficacité technique et l'efficacité économique distingue le propos des économistes de celui des ingénieurs. De nouvelles solutions technologiques sont régulièrement proposées pour produire différemment les biens et services que nous consommons. Par exemple, on construit aujourd'hui des maisons dotées de systèmes de chauffage géothermique et on fabrique des voitures hybrides. Lorsqu'on présente ces solutions, on insiste sur leur efficacité technique: la géothermie requiert moins d'énergie (mais nécessite un lourd investissement lors de la construction de la maison) et la voiture hybride consomme moins d'essence (mais coûte actuellement plus cher à l'achat). L'économiste ne remet pas en cause l'efficacité technique de ces solutions, mais insiste sur le critère de l'efficacité économique pour décider de leur adoption. Dans les débats qui entourent l'adoption de ces nouvelles techniques, on évoque souvent le coût de renonciation social de la production, par opposition au coût de renonciation privé que nous avons considéré jusqu'à présent. Le coût de renonciation social de la production inclut, en plus du coût de renonciation privé, le coût indirect qu'entraîne la production pour la société; le plus souvent, ce coût indirect est le coût de la pollution que génère la production. En dernière analyse, les meilleures décisions économiques devraient être fondées sur le coût social de la production. Cela colore les débats sur l'adoption de nouvelles techniques: une méthode de production peut être techniquement efficace, économiquement inefficace lorsqu'on ne prend en considération que le coût privé, mais économiquement efficace lorsqu'on tient compte du coût social. La production du papier illustre ces distinctions. Au XIX siècle, on produisait le papier à partir de fibres provenant de chiffons. La matière première coûtait cher et l'industrie du recyclage était florissante: les chiffonniers recueillaient les tissus usagés et les vieux papiers. Les producteurs de papier maximisaient leurs profits en produisant une bonne partie du papier à partir de fibres recyclées. En 1844, le Canadien Charles Fenerty découvrait un nouveau procédé pour obtenir du papier à partir des fibres vierges du bois. Ce n'était que la première d'une série d'innovations technologiques qui devaient bouleverser l'industrie papetière, de sorte que, au milieu du siècle dernier, il était devenu économiquement efficace pour les producteurs de papier de réaliser le plus gros de leur production à partir des fibres du bois. L'industrie du recyclage du papier, quant à elle, avait disparu. À la fin des années 1980, les coûts d'enfouissement des vieux papiers grimpaient rapidement et causaient bien des maux de tête aux municipalités responsables de la gestion des déchets. En ne prenant en considération que les coûts privés des producteurs, le recyclage du vieux papier n'était pas une solution économiquement efficace, mais il le devenait lorsqu'on tenait compte du coût social de l'enfouissement. La << crise des déchets», comme on l'a appelée, a amené la mise en place de systèmes de récupération du papier (le bac bleu) financés par les entreprises une activité disparue depuis plus d'un demi-siècle. En 2002, elle a abouti à l'adoption par le Québec d'une loi sur la récupération et le recyclage. Ainsi, pour la société comme pour les entreprises, il ne suffit pas d'adopter une technique efficace de production. Il faut qu'elle soit économiquement efficace compte tenu des prix du marché. Une entreprise qui n'utilise pas la méthode de production économiquement efficace ne maximise pas son profit. Nous verrons que, dans un marché concurrentiel, les entreprises qui produisent au moindre coût sont favorisées. Les entreprises inefficaces ferment leurs portes ou sont achetées par des entreprises dotées de coûts plus faibles. ## Les marchés et l'environnement concurrentiel Les marchés où évoluent les entreprises varient considérablement. Certains sont très concurrentiels, et il est difficile d'y réaliser des profits; d'autres semblent pratiquement exempts de concurrence, et les entreprises qui les dominent dégagent d'énormes bénéfices. Certains marchés sont submergés par des campagnes publicitaires acharnées, chaque entreprise tentant de persuader les acheteurs de la supériorité de ses produits; et dans d'autres marchés, les acteurs se comportent comme s'ils jouaient un jeu de stratégie. Les économistes distinguent quatre structures de marché: * la concurrence parfaite; * la concurrence monopolistique; * l'oligopole; * le monopole. ### La concurrence parfaite La concurrence parfaite est une structure de marché où de nombreuses entreprises vendent un produit identique, où les acheteurs sont nombreux, où aucune restriction ne limite l'entrée de nouvelles entreprises dans l'industrie, et où toutes les entreprises et tous les acheteurs sont bien informés des prix pratiqués par chacune des entreprises du marché. Les marchés mondiaux du maïs, du riz et d'autres céréales sont des exemples de concurrence parfaite. ### La concurrence monopolistique La concurrence monopolistique est une structure de marché où un grand nombre d'entreprises se font concurrence en proposant des produits similaires mais légèrement différents. La différenciation du produit – technique qui consiste à mettre en valeur les caractéristiques permettant de distinguer un produit de ses concurrents – confere à chaque entreprise un certain pouvoir de monopole dans le marché puisqu'elle est la seule à offrir cette version particulière du produit. Par exemple, dans le marché des pizzas, des centaines d'entreprises proposent chacune leur version de la pizza idéale – chacune est la seule à afficher une marque particulière. Notons que les produits différenciés ne sont pas nécessairement des produits différents, l'important étant que les clients les perçoivent comme tels. Par exemple, les diverses marques d'acide acétylsalicylique (aspirine) sont chimiquement identiques; seul leur conditionnement (emballage, présentation) differe. ### L'oligopole L'oligopole est une structure de marché où un petit nombre d'entreprises se font concurrence tout en étant conscientes que leurs actions influent les unes sur les autres et déterminent leurs gains respectifs. La production de logiciels, la construction d'avions et le transport aérien sont des exemples d'industries oligopolistiques. Certains oligopoles proposent des produits presque identiques, comme les colas de Coke et de Pepsi; d'autres offrent des produits différenciés, comme les avions de Boeing et d'Airbus. ### Le monopole Le monopole est une structure de marché où une seule entreprise produit un bien ou un service pour lequel il n'existe aucun substitut proche et où des barrières empêchent de nouvelles entreprises de pénétrer le marché. Dans certains endroits, les entreprises qui fournissent les services de téléphone, de gaz, d'électricité, de télévision par câble et d'eau courante sont des monopoles locaux, c'est-à-dire des monopoles restreints à une zone géographique donnée. La société par actions Microsoft, qui a mis au point Windows et Vista, jouit par exemple d'un monopole mondial presque complet sur le marché des systèmes d'exploitation. La concurrence parfaite est la forme la plus extrême de la concurrence, et le monopole est la forme la plus extrême d'absence de concurrence. Les deux autres structures de marché se situent entre ces extrêmes. Un marché oligopolistique se distingue d'un marché en concurrence monopolistique par l'influence que peut exercer une entreprise sur le marché. Dans un marché en concurrence monopolistique, cette influence se limite à la variété de produits qu'offre l'entreprise: si Nike réduit sa production de chaussures, cela influence très peu le prix des chaussures en général puisqu'il y a beaucoup d'autres fabricants. En revanche, dans un marché oligopolistique, l'influence de chaque entreprise sur l'industrie est assez importante pour que celle-ci en tienne compte dans ses décisions. Par exemple, si Coke réduit sa production de colas de moitié, elle sait que cela aura une incidence directe sur le marché. On dit que les entreprises qui font partie d'un marché oligopolistique se comportent stratégiquement. ## Les mesures de concentration Pour déterminer la structure d'un marché, il faut considérer plusieurs facteurs, notamment son degré de concentration, qui indique jusqu'à quel point le marché est dominé par un petit nombre d'entreprises. Les économistes évaluent cette caractéristique des marchés à l'aide d'indicateurs qu'on appelle les mesures de concentration. ### Les mesures de concentration Les économistes ont élaboré deux mesures de concentration industrielle: * le ratio de concentration fondé sur quatre entreprises (RC4); * l'indice de Herfindahl-Hirschman (IHH). #### Le ratio de concentration fondé sur quatre entreprises Le ratio de concentration fondé sur quatre entreprises (RC4) mesure (en pourcentage) la valeur des ventes comptabilisées des quatre plus grandes entreprises d'une industrie par rapport aux ventes totales de cette industrie. Le ratio de concentration va de presque 0 pour la concurrence parfaite à 100% pour le monopole; c'est la principale mesure utilisée pour évaluer la structure de marché. Le tableau 10.5 présente deux exemples fictifs de calcul d'un ratio de concentration, l'un concernant des fabricants de pneus et l'autre, des imprimeurs. Dans le premier exemple, 14 entreprises se partagent le marché des pneus; comme les quatre plus importantes réalisent 80% des ventes totales de l'industrie, le ratio de concentration s'élève à 80%. | Entreprise | Ventes (M$) | Entreprise | Ventes (M$) | |---|---|---|---| | Pneus 9 inc. | 250 | Première Impression | 2,5 | | Pneus Ronds inc. | 200 | Forte Impression | 2,0 | | Pneus Lys inc. | 150 | Vive Impression | 1,8 | | Pneus Micheline inc. | 100 | Nette Impression | 1,7 | | Ventes des 4 plus grandes entreprises | 700 | Ventes des 4 plus grandes entreprises | 8,0 | | Ventes des 10 autres entreprises | 175 | Ventes des 1000 autres entreprises | 1592,0 | | Ventes de l'industrie | 875 | Ventes de l'industrie | 1600,0 | Par contre, dans l'industrie de l'imprimerie, qui compte 1004 entreprises, les quatre plus grands imprimeurs ne réalisent que 0,5% des ventes totales; dans ce cas, le ratio de concentration n'est que de 0,5%. Un RC4 faible indique une concurrence très vive; un RC4 élevé, une concurrence très faible. Le ratio de concentration d'un monopole est de 100%; la plus grande (et la seule) entreprise réalise la totalité des ventes de l'industrie. On considère qu'un RC4 supérieur à 60% dénote un marché très concentré et dominé par quelques entreprises en oligopole, alors qu'un RC4 inférieur à 60% indique un marché très concurrentiel. Au Canada, le Bureau de la concurrence ne s'oppose pas aux fusions si le RC4 demeure inférieur à 65%. #### L'indice de Herfindahl-Hirschman L'indice de Herfindahl-Hirschman (IHH) est la somme des carrés des parts du marché (en pourcentage) de chacune des 50 plus grandes entreprises (ou de toutes les entreprises s'il y en a moins de 50) d'une industrie. Ainsi, dans un marché de quatre entreprises où la part de chacune est respectivement de 50%, 25%, 15% et 10%, on calcule l'indice de Herfindahl-Hirschman de la manière suivante: IHH = 502 +252 + 152 + 102 = 3 450. Quand la concurrence est vive, l'IHH est faible. Par exemple, si chacune des 50 plus grandes entreprises d'une industrie a une part de marché de 0,1%, l'IHH est égal à 0,12 × 50 = 0,5. Dans un monopole, l'IHH est de 10000 une seule entreprise détient 100% des parts du marché: 1002 = 10000. L'IHH permet de classifier les types de marchés. Si l'IHH est inférieur à 1000, on considère qu'il s'agit d'un marché concurrentiel, et plus l'indice est faible

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