La Mémoire et ses Troubles PDF
Document Details
Uploaded by DazzledExponential
Tags
Summary
Ce document fournit une description des différents types de mémoire humaine, avec des exemples concrets, ainsi que l'anatomie sous-jacente. Il explore aussi certains troubles de la mémoire.
Full Transcript
LA MÉMOIRE ET SES TROUBLES I. Qu'est-ce que la mémoire ? Définition et fonctions : Stockage, récupération, apprentissage. Les différents types de...
LA MÉMOIRE ET SES TROUBLES I. Qu'est-ce que la mémoire ? Définition et fonctions : Stockage, récupération, apprentissage. Les différents types de mémoire : Sensorielle : provient des sens ( 100ms-1s) à court terme : temporaire, effort conscient ( 1s-10s) à long terme : (déclarative, non déclarative), durée indéterminée Le processus de mémorisation : Encodage, stockage, récupération. Les facteurs influençant la mémoire: Attention, émotions, contexte, interférences. Type de Description Durée Exemple mémoire Mémoire très brève liée aux sens Quelques millisecondes à L'image rémanente d'un Sensorielle (vision, audition, toucher, etc.). Permet quelques secondes objet après l'avoir vu de maintenir une perception continue. Mémoire temporaire utilisée pour les Numéro de téléphone que À court terme Quelques secondes à tâches en cours. Limité en durée et en l'on doit retenir pour (ou de travail) quelques minutes capacité. appeler Connaissances générales, Mémoire permanente pour le stockage À long terme Indéfinie souvenirs d'événements, d'informations sur une longue durée. compétences motrices Mémoire consciente et explicite. Peut être Déclarative divisée en : Souvenirs personnels liés à Épisodes de vie : Premier Épisodique un contexte spatio-temporel baiser, voyage à l'étranger précis. Connaissances générales sur Faits, concepts: Capitale Sémantique. le monde, le langage, les de la France, définition d'un concepts mot Non- Mémoire inconsciente et implicite. Indéfinie déclarative Compétences motrices et Actions automatiques: Procédurale habitudes. Conduire, faire du vélo Mémoire liée à la perception Reconnaissance de Perceptive des stimuli. formes, de sons Associations entre des stimuli Conditionnement Réflexes conditionnés et des réponses. II. anatomie de la mémoire mémoire à court terme : Associations entre un processeur central dans le lobe préfrontal et les différentes aires: linguistique, acoustique, visuelle… Le lobe préfrontal correspond à la mémoire de travail mémoire déclarative : test du labyrinthe : L’animal doit se souvenir de son parcours pour aller directement aux branches récompensées => relève de la mémoire déclarative Altérations de l’hippocampe affectent considérablement les résultats des rats L’hippocampe et le cortex : les gouts, les odeurs, les musiques = stockées dans les aires sensorielles correspondantes, liées entre elles par l’hippocampe pour former un seul souvenir et non des éléments séparés. Mémoire spatiale repose entièrement sur l’hippocampe Le système limbique du diencéphale : Renforcement des souvenirs, en fonction des émotions Les connections sont consolidées et deviennent finalement indépendantes de l’hippocampe: encodage dans le cortex (ex: mémoire sémantique) Lésion de l’hippocampe empêche alors la formation de nouveaux souvenirs, mais n’efface pas ceux qui ont été encodés avant circuit de Papez ou circuit hippocampo-mamillo-thalamique : Mémoire non déclarative (procédurale) : test du labyrinthe avec lumière qui signalent les branches récompensées : mémoire non déclarative = il faut associer lumière et récompense, et non retenir le trajet Lésion de l’hippocampe n’affecte pas cette épreuve Lésion des ganglions de la base diminue par contre fortement la performance les ganglions de la base : Régions gérant notre motricité : Cervelet ganglions de la base (noyau caudé, globus pallidus et putamen) cortex moteur III. Bases cellulaires et moléculaires de la mémoire La mémoire à l’échelle cellulaire : mémoire = procédé associatif qui nécessite grande communication intercellulaire Elle repose sur le renforcement de certaines synapses, qui est à l’origine de la plasticité des circuits neuronaux La mémoire à l’échelle cellulaire: le renforcement synaptique : 1973, Bliss et Lomo: dans l’hippocampe, une brève stimulation électrique d’une voie excitatrice renforce à long terme les synapses activées La potentialisation à long terme : Bliss et Lomo: stimulation à fréquence élevée. Mais ce n’est pas une nécessité absolue Condition essentielle : la simultanéité entre l’activation des synapses et la dépolarisation du neurone Pour qu’il y ait dépolarisation, il faut : Une fréquence de stimulation assez élevée => sommation temporelle des PPSE Nombre de synapses suffisant => sommation spatiale des PPSE => Coopérativité entre synapses Rappel: le fonctionnement synaptique : Cas d’une synapse glutamatergique de l’hippocampe, avec récepteurs AMPA et NMDA 1. Fixation du glutamate sur récepteur AMPA: entrée Na+ (et sortie K+) => Dépolarisation classique 2. Les récepteurs NMDA sont inactifs car bloqués par les ions Mg2+ 3. Quand l’activation présynaptique devient intense, avec une fréquence élevée (>100Hz): dépolarisation du neurone postsynaptique libère le Mg2+ des récepteurs NMDA --> entrée de Ca2+ par ces canaux 4. Activation des récepteurs AMPA 5. Désinhibition des récepteurs NMDA 6. Entrée de Ca 2+ 7. Cascades de signalisation (CamKII, MAPK, PKA) 8. Phosphorylation des récepteurs AMPA et NMDA : renforcement de leur activité 9. Synthèse de nouveaux récepteurs AMPA 10. Formation de nouvelles épines dendritiques => Mise en place et maintien de la LTP IV. Les troubles de la mémoire L'oubli et l'amnésie : Oubli (normal, car encodage pas assez solide) ≠ Amnésie (perte de mémoire excessive due à une lésion ou un traumatisme) Pour ne pas oublier…. Amélioration de la mémoire : Pas de pilule miracle! Bonne hygiène de vie et notamment assez de sommeil Entraîner sa mémoire: répétition, élaboration Les types d’amnésie : Selon le trauma qui est à l’origine : 1. lésions cérébrales : Suite à trauma crânien, AVC, tumeur, hypoxie, alcoolisme chronique … Cas du patient H.M. Alzheimer syndrome de Korsakoff ictère amnésique 2. origine psychologique : Pas de lésion détectable, ni de dysfonctionnement cérébral avéré.- Dû à des évènements traumatisants (agression, stress chronique, peur intense, viol, inceste,…) Réversible mais peut durer qq jours à plusieurs jours, parfois des mois.. en fonction de l’effet de l’amnésie : 1. rétrograde : On ne se souvient plus de ce qui s’est passé avant la lésion Les événements les plus anciens sont plus résistants (souvenirs de l’enfance ne sont pas perdus) Récupération partielle possible Mémoire épisodique est plus atteinte que mémoire sémantique Souvent associé à des pathologies neurodégénératives: démences séniles, maladie d’Alzheimer. 2. antérograde : On ne peut plus acquérir de nouveaux souvenirs à partir de la lésion Affection du circuit de Papez empêche la mise en mémoire de nouveaux souvenirs. La mémoire à court terme et la mémoire procédurale sont conservées. Apparaît suite à un évènement ponctuel: trauma crânien, arrêt cardiaque, crise d’épilepsie … Le patient H.M Henry Gustav Molaison (1926-2008), patient de Brenda Milner et Suzanne Corkin, étudié pendant 40 ans! Epileptique : ablation en 1953 de l’hippocampe et des lobes temporaux (chirurgie expérimentale!) Amnésie antérograde profonde + Amnésie rétrograde plus légère (2 ans) Illustre le fait que les supports physiques de ces mémoires sont différents 1. Mémoire déclarative profondément affectée Ne retient rien de nouveau au delà de qq secondes, sauf qq rares infos 2. Mémoire à court terme intacte et mémoire procédurale intacte ⇒ informations très répétitives ou émotionnellement chargées Le syndrome de Korsakoff Cause: alcoolisme chronique Troubles psychiques, affabulations, apathie, déficit sévère de mémoire Déficience en vitamine B1 (thiamine): dégâts du thalamus et des corps mamillaires de l’hypothalamus Amnésie antérograde qui va en s’aggravant, + parfois amnésie rétrograde Mémoire à court terme intacte Les ictères amnésiques => Amnésie globale transitoire Amnésies brèves de 6-10h, apparaissent brutalement Souvent sujets > 50 ans Causes mal connues, aucune lésion cérébrale définitive. Peut-être insuffisance vasculaire temporaire du tissu cérébral (ischémie cérébrale) Amnésie antérograde majeure (oublie instantanément tt ce qui vient de se passer) + amnésie rétrograde sur plusieurs décennies V. La maladie d’Alzheimer Sporadique : Qui de temps en temps. Qualifie ce qui touche seulement quelques individus au sein d'une population, cas par cas, sans qu'il se forme une chaîne de transmission continue. Un individu présentant une maladie génétique est qualifié de cas sporadique lorsqu'après enquête génétique dans sa famille, on ne découvre aucun parent malade de génération antérieure ou de même génération Epidémiologie : Premier cas décrit en 1906 par Aloïs Alzheimer Environ 1 million de cas en France aujourd’hui, 50M dans le monde 2,1M estimés en 2040 en France 40% hommes / 60% femmes 2-4% au-delà de 65 ans, 15% au-delà de 80 ans ⇒ Enjeu de santé publique, mais aussi économique et social majeur Formes de la maladie Formes familiales à développement précoce 40-50 ans < 5% des cas Forme sévère, évolution plus rapide Transmission génétique: Dues à des mutations de gènes APP Amyloid Precursor Protein), Préséniline 1 ou préséniline 2 Formes sporadiques, à développement plus tardif > 60-65 ans 95% des cas Facteurs de risque des formes sporadiques 1. Age = principal facteur de risque Facteurs de risque génétiques: Les allèles de plusieurs gènes semblent impliqués: ApoE, Cytochrome Oxydases I et II, CLMH, clusterine (ApoJ)… 2. Hygiène de vie sédentarité stimulation du cerveau alimentation (oestrogènes et soja seraient protecteurs chez les femmes) Risque supérieur chez catégories socioprofessionnelles plus basses. 3. Prise de médicaments ? Des études montrent une association entre benzodiazépines et Alzheimer (mais attention ce n’est pas un lien causal!) 4. Autres maladies Hypertension, athérosclérose lésions vasculaires dans le cerveau de la quasi-totalité des malades d’Alzheimer Symptômes Troubles de la mémoire = 1er signes d’alerte: Conduite automobile, utilisation du téléphone, oubli du repas de la veille, gestion des traitements médicamenteux, …. Perte progressive de la mémoire sur quelques années Mémoire épisodique --> puis mémoire court terme --> puis mémoire sémantique: troubles du langage Enfin mémoire procédurale Maladie des 4A : Amnésie = troubles mémoire Aphasie = troubles langage Apraxie = difficulté à effectuer certains gestes Agnosie = difficultés à reconnaître des objets/visages Physiopathologie Atrophie corticale: Perte 8-10% poids cerveau tous les 10 ans Contre 2% chez un sujet sain Atrophie compensée par une augmentation du volume liquidien : augmentation taille ventricules et sillons corticaux Atrophie particulièrement importante des zones du langage et de la mémoire Double processus pathologique, atteignant principalement les neurones cholinergiques du néocortex et de l’hippocampe, responsable des problèmes de mémoire initiaux : Formation de plaques amyloïdes (=séniles) Dues à une accumulation de peptide β-amyloïde Neurodégenerescence fibrillaire La neurodégénérescence fibrillaire Liée à une hyperphosphophorylation anormale de la protéine Tau, essentielle à la stabilité des microtubules, qui s’accumule dans le cytoplasme sous forme de filaments appariés en hélice (PHF) ⇒ Déstabilisation des microtubules ⇒ Neurodégenerescence fibrillaire Les plaques amyloïdes Agrégation extracellulaire de peptide β-amyloïde (Aβ42), plus quelques autres substances (ApoE, protéoglycanes), et cellules inflammatoires (inflammation modérée) Diamètre 5-100 µm Attention ! pas rare d’observer des plaques amyloïdes chez les personnes âgées non malades Peptide Aβ est obtenu par clivage de APP (Amyloid Protein Precursor) par des sécretases β puis γ Le clivage normal par les sécrétases α puis γ produit un peptide Aα soluble, qui ne produit pas de plaques Mutations de la préséniline augmentent l’activité des γ-sécrétases La cascade amyloïde hypothétique ! Toxicité synaptique pourrait être liée également à Aβ soluble, qui ne forme pas de plaques mais a des effets toxiques sur les synapses Implique inflammation, stress oxydant, troubles de l’homéostasie calcique Hyperphosphorylation de Tau serait plutôt une conséquence qu’une cause …mais encore débattu La toxicité glutamatergique Trop de glutamate -> trop d’entrée de Ca2+ -> apoptose Balance acétylcholine / glutamate serait déséquilibrée Diagnostic Outil principal : Mini Mental State Evaluation (MMSE) ou Test de Flostein = Série de questions simples pour évaluer globalement la mémoire du patient et le stade de la maladie : nommer des objets, retenir 3 mots, recopier un schéma... Autres outils : Ponction lombaire : recherche Aβ42, Tau Imagerie : 1. IRM du lobe temporal permet de visualiser l’atrophie de l’hippocampe au fil du temps (mesure de volume) 2. Tomographie par Emission de Positons (TEP) permet de mesurer le taux d’absorption du glucose dans différentes régions du cerveau. 3. Stades légers d’Alzheimer: diminution de consommation de glucose 4. TEP couplée au marqueur PiB, molécule fluorescente se liant au peptide Aß : visualisation de plaques amyloïdes Traitements IACE = Inhibiteurs de l’acétylcholine estérase: (Rivastigmine, galantamine, donépézil) --> correction du déficit en acétylcholine de l’hippocampe Antagonistes du récepteur NMDA (mémantine) --> Diminuent la toxicité glutamatergique Uniquement symptomatiques, pas de traitement curatif Dans les 2 cas : au mieux, retardent la progression des troubles, mais n’empêchent pas la dégénérescence Traitements ? Autres pistes : agonistes de récepteurs muscariniques Neuroprotecteurs : améliorent le métabolisme cérébral, propriétés anti-radicaux libres, anti inflammatoires... Ex: propentofylline Vaccin contre la protéine β-amyloïde : chez la souris et l’homme, permet l’élimination des plaques et une régression des déficits fonctionnels. Mais effets secondaires trop importants chez l’homme Pistes de développement envisagées à l’heure actuelle: Facteur de croissance neural (NGF): stimule survie neuronale, mais difficile à manipuler (injection cérébro- ventriculaire) prévention de la formation de la plaque amyloïde : promotion du clivage par les sécrétases α et inhibition des sécrétases γ, inhibition de l’agrégation des peptides Aβ par compétition Stabilisation de l’homéostasie calcique Thérapie cellulaire (cellules souches ou IPS) : tests prometteurs chez l’animal, essais cliniques en cours sur des patients A côté des médicaments, d’autres approches permettent de « vivre mieux avec » : ateliers mémoire, ergothérapie, art- thérapie, musicothérapie