Économie de l'Environnement Past Paper PDF

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This document appears to be an introduction to environmental economics, and it presents a discussion on environmental economics as a branch of general economics focusing on the relationship between humans and nature. The document also includes various questions regarding environmental issues, economic growth and possible solutions.

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Économie de l’Environnement Introduction Qu’est-ce que l’économie de l’environnement Économie de l’environnement Branche de l’économie politique générale au même titre que l’économie des transports, publique, de l’innovation… Cependant l...

Économie de l’Environnement Introduction Qu’est-ce que l’économie de l’environnement Économie de l’environnement Branche de l’économie politique générale au même titre que l’économie des transports, publique, de l’innovation… Cependant l’économie de l’environnement vise un champ spéci que. Elle étudie les relations entre les Hommes et la nature, les Hommes et le cadre de vie à l’occasion des activités productives. Elle s’intéresse aux modi cations et transformations de l’environnement (agriculture, défrichage, minage…). Lorsque l’Homme altère l’environnement, il produit des externalités (Alfred Marshall, principe d’économie politique 1890). Ces externalités peuvent être négatives et ainsi limitées grâce à des normes ou un système redistributif (pollueur-payeur). « La notion d’e et externe ou d’externalité désigne les e ets liés à l’interdépendance des agents qui ne sont ni rétribués, ni sanctionnés par le marché ». Le débat environnemental débute des le XIX° avec des auteurs tels que Thomas Robert Maltus, David Ricardo, William Stanley Gevons. C’est à partir de l’Après-Guerre que le débat s’intensi e et alerte sur les conséquences dévastatrices des activités humaines. La plupart des problèmes identi és restent encore présents et les éléments de politique publique mis en oeuvre ne sont pas toujours appliqués dans leur totalité ou sont faibles en contenu. Aussi bien au niveau local que supra-national, les mesures mises en oeuvre ne semblent pas en mesure d’in échir les tendances enregistrées et les points d’alertes se multiplient (migrations, air, eau, risques naturels et technologiques) et ce de manière quasi- irréversible, avec une amélioration insu sante. Quelques questions à venir En quels termes envisager l'analyse et la mesure de la richesse, du bien-être, des pollutions et autres nuisances qui sont des phénomènes « hors marché » ? Comment appréhender la croissance ? La croissance est-elle bonne ? Est-elle durable ? Peut-on se passer de la croissance ? Quel crédit accorder aux thèses de la décroissance alors qu'une partie importante de l'humanité est confrontée à la pauvreté et à la précarité ? Qu'est-ce que le développement durable ? Le développement durable est-il la réponse aux problèmes actuels de l'humanité ? Page 1 sur 37 fi fi ff fl fi fi ffi ff Les politiques publiques, au Nord et au Sud, sont-elles bien outillées pour relever les dé s techniques, économiques, sociaux et environnementaux que pose à l'humanité l'évolution du monde moderne ? Critères d’évaluation - Première session janvier 1h - Deuxième session juin 1h La problématique de l’économie de l’environnement Il ne faut pas confondre problématique et problématique, si le chômage et l’in ation sont des problèmes dans le sens où les pouvoirs publics doivent trouver des issues, les problématiques représentent l’art ou la manière de poser les questions justes. Ainsi face aux changements de la biosphère (réduction des capacités hydriques, augmentation des températures, réduction de la diversité des espèces…) au demeurant les solutions ne sont pas toutes présentes et appliquées. 1 - Retour à la notion d’externalité Une entreprise Industrielle conçoit un produit chimique et pollue une zone de pêche. Sans intervention de la puissance publique, il y aura minoration du bien-être global. La détérioration de la qualité, ou la diminution de la quantité de poisson disponible ne seront pas intégrées dans le prix du marché. En toute logique, il faudrait « internaliser » le phénomène, c'est-à-dire l'intégrer dans le prix nal de vente du produit. La puissance publique pourra, par exemple, imposer une « écotaxe » au « pollueur » dont le produit sera reversé ou non à la « victime ». L'acheteur, de son côté, acquittera le « vrai prix » du produit qu'il utilise, obtenu comme le prix de revient majoré du prix de la pollution… Pour protéger l’intérêt général (qu’est-ce que l’intérêt général ?), la puissance publique doit intervenir, parce que le coût social, économique et environnemental de la pollution va demeurer et s’aggraver mais n’apparaîtra pas dans le prix nal. L’intervention de la puissance publique prendra plusieurs formes (réglementaire, taxation…). L’économie de l’environnement est traversée par une multitude d’approches et de doctrines, des plus radicales (écologistes) aux plus libérales (Milton Friedman) ce qui nous amène au con it de soutenabilité faible et soutenabilité forte. Une approche en termes de « soutenabilité faible »1 - La substitution à l'in ni entre facteurs réduit l'acuité de la raréfaction de la terre et des ressources naturelles, - Le marché, un instrument potentiellement pertinent de régulation des ressources naturelles, Page 2 sur 37 fi fi fl fi fi fl - La croissance et le progrès technologique peuvent permettre de relever le dé de la raréfaction ou disparition des ressources… Une approche en termes de « soutenabilité forte »2 - La nature n'est pas réductible à une « marchandise » les biens communs forment le cadre extra-économique de la vie des hommes, - Les biens d'environnement sont di cilement régulables par le système des prix, - Deux écueils de la myopie du marché et l’impatience des « entrepreneurs », Adam Smith énonce le fait que le marché n’est apte à gérer seulement les problèmes présents ou d’un avenir proche, à l’inverse de la vision idéalisée d’un état au temps long. - Paul Krugman « si les marchés sont imparfaits, les politiques sont aussi imparfaites que le marché ». 1. Philippe Jurgansen, L'Économie verte : comment sauver notre planète, Odile Jacob, 2009. 2. Elinor Ostrom, Gouvernance des biens communs. Pour une nouvelle approche des ressources naturelles, De Boack, 2010. 2 - Distinction entre les biens privés et bien publics Bien privé Le principe de rivalité - Les biens privés sont divisibles et appropriables, deux agents ne peuvent donc béné cier simultanément de l'usage d'un même bien. Si un bien privé appartient à Jacques, Il ne pourra simultanément appartenir à Paul. - La possession d'un bien privé a pour e et que seul le propriétaire de ce bien - personne physique ou morale - peut déterminer l'usage qui peut en être fait, Le principe d'exclusion par les prix - Un agent ne peut disposer d'un bien que s'il en paie préalablement le prix sur le marché - De cette façon, si Jacques a la propriété d’un bien privé, c’est parce que c’est lui qui a payé le prix d’acquisition sur le marché. - Le dé de l’économie de partage ou économie collaborative : prioriser l’usage sur la propriété. Bien public Ils présentent des attributs opposés à ceux des biens privés. La consommation des biens publics est non rivale et l'exclusion par les prix impossible. Cette double qualité vient souvent de leur indivisibilité. Le principe de non rivalité - La non-rivalité signi e qu'une fois produits pour une personne, ces biens peuvent être utilisés par un grand nombre de personnes au-delà, sans coût de production supplémentaire. Page 3 sur 37 fi fi fi ffi ff fi Les biens « publics » n'ont pas de « marché » - La non-exclusion fait que beaucoup de personnes peuvent jouir de l’usage d'un « service collectif » sans en payer le prix. - Comme le coût marginal engendré par un utilisateur supplémentaire est nul, le prix est en théorie égal à zéro, tout comme le pro t. Ce bien ne pourra logiquement être produit par une entreprise privée. - Exemples: infrastructures publiques (jardins, squares, etc.) éclairage public, défense nationale,…). - Le rationnement par le prix est impossible puisqu’il ne dispose pas de prix de vente ni de marge et est proposé de manière ouverte aux agents. Vers de nouveaux rapports entre Homme, nature et société Tous les biens et services utiles à l'Homme ne sont pas marchands et n'ont pas de « prix » - Les biens « libres » : l'air, la lumière et la chaleur du soleil, etc. - Les biens « communs » : les poissons, les oiseaux - Les biens « collectifs » : la défense nationale, la sécurité publique, etc. - Les services « sociaux » : le bénévolat, les solidarités familiales et sociales. L'économie de l’environnement : de nouveaux horizons conceptuels et éthiques1 - L'économie de l'environnement œuvre au service d'une e cacité nouvelle qui ne se réduit pas aux dimensions économique et nancière (la rentabilité)2. - Une démarche qui nécessite de redé nir des notions de base de l'analyse économique : la richesse, le bien-être, la valeur, le marché, la monnaie, etc. - Vers une autre perception de l'économie et de la société ?3 À titre d’exemple, le terme de richesse est la somme de toutes les valeurs ajoutées produites au sein d’une région au cours d’un temps donné. 1. Florence Jany-Catrice et Jean Gadrey, Les nouveaux indicateurs de richesse, La découverte, Coll. Repères, 2016. 2. Dominique Méda, Qu'est-ce que la richesse, Edition Aubier, 1999. Page 4 sur 37 fi fi fi ffi 3. Alternatives Économiques,Panique chez les économistes, n° 404, septembre 2020. Une approche « rénovée » de la croissance1 - Dans son sens traditionnel, la croissance économique désigne la variation de la production de richesse (biens et services) dans une économie sur une période donnée, généralement une année, ou éventuellement sur une période plus longue - Au sens large, la croissance désigne les transformations économiques et sociales censées produire une amélioration dans les conditions de vie des habitants : hausse du revenu, création - a d'emplois, diversi cation de la consommation, etc. - En économie de l'environnement, la dé nition de la croissance repose sur une conception de la richesse comme « l'ensemble des biens et des services sociaux et environnementaux utiles à l'homme ». 1. Alternatives économiques, La richesse autrement, mars 2011. 2. Patrick Viveret, Les nouveaux facteurs de richesse, Rapport pour le secrétariat d'Etat à l'économie solidaire, 2002. Qu'est-ce que la valeur des choses ? La valeur: pierre angulaire de l'analyse économique1 - Ne pas confondre valeur et prix. - La valeur : des approches multiples… - Exemple : quelle valeur monétaire donner à une forêt millénaire menacée par le projet de construction d'une autoroute ? Page 5 sur 37 fi fi Le prix de la nature : des réponses et des enjeux pluriels2 - Une valeur in nie: il faut arrêter la construction de l’autoroute. - Une valeur nulle : il faut poursuivre, coûte que coûte, la construction de l’autoroute. - Une valeur intermédiaire : le choix nal sera déterminé par la confrontation entre la valeur donnée à l'autoroute et celle donnée à la forêt, étant entendu que les méthodes d'évaluation dans chacun des cas sera particulière… 1. Claude Mouchot, L'es théories de la valeur, Economica-Poche, 1994, 2. Jean Gadrey, « La nature a-t-elle un prix ? », Alternatives Economiques n°279, avril 2009. Bibliographie - Abdelmalki L. et Mundler P., Economie de l'environnement et du développement durable, Editions de Boeck; 2010. - Bontems Ph. et Rotillon G., L'économie de l'environnement, La Découverte, Coll. Repères, 2013. - Gadrey J., Adieu à la croissance : bien vivre dans un monde solidaire, Les petits matins et Alternatives économiques, 2015. - Jackson T., Prospérité sans croissance : la transition vers une économie durable, De Boeck, 2010. - Karpik L., L'économie des biens singuliers, Gallimard, 2007. - Méda D., La mystique de la croissance, Flammarion, Coll. Essais, 2013. - Ostrom E., Gouvernance des biens communs. Pour une nouvelle approche des ressources naturelles, De Boeck, 2010. - Robin M.-M., Sacrée croissance, La Découverte, 2014. Page 6 sur 37 fi fi La nature et l’environnement dans l’évolution des idées économiques Ce chapitre entend à répondre à la question suivante : - Quelle est la place de la nature dans l’histoire des idées et des doctrines économiques ? Pour répondre à cette question exigeante nous allons regrouper les économistes en trois catégories, c’est le moyen d’appréhender les di érences entre les diverses sensibilités et époques. - Les optimistes, - Les pessimistes, - Les avant-gardistes. 1 - Les fondateurs, opposition des pessimistes et optimistes Des conceptions pessimistes des rapports homme-nature Des références anciennes1 - Thomas R. Malthus : une divergence inéluctable entre expansion de la démographie et croissance des ressources matérielles. Dans son essai Malthus pointe l’évolution divergente existant entre la croissance économique et démographique. En d’autres terme, la population croît plus rapidement que les ressources. Ce propos doit aujourd’hui être actualisé car il ne révèle plus l’entière vérité, le progrès technique ayant permis une meilleure gestion des ressources. - David Ricardo (Principes, 1817) : la générosité de la terre a des limites - Les notions de rendements décroissants et d'épuisement des ressources - La notion d'état stationnaire (cf. Adam Smith, 1776) - Le reproche a été fait à D. Ricardo de négliger le progrès technique : - Un paysan du XIX° pouvait en général uniquement faire vivre sa famille en Angleterre, - Aujourd’hui un agriculteur américain peut nourrir jusqu’à 40 000 personnes - Une perception insu sante des apports du progrès technique ? Page 7 sur 37 ffi ff Le « paradoxe de Jevons »2 - L'économiste britannique William Stanley Jevons s'était préoccupé de la raréfaction du charbon anglais et ses possibles conséquences économiques à - terme. Il s'était penché sur les exemples des locomotives ou des hauts-fourneaux, qui, au l des améliorations techniques, pouvaient fournir davantage d'e cacité en consommant moins de charbon. Toutefois, pour lui, le progrès technique ne ralentit pas l'épuisement du charbon mais, au contraire, en encourage la consommation car « il y a sans cesse plus de haut-fourneaux ou de locomotives ». - Il doute que le progrès technique soit une réponse dé nitive à la rareté des ressources, puisque il faut relativiser la notion d’éco-e cacité énergétique, puisque le progrès des machines permet d’améliorer l’e cacité de consommation des ressources du marché. néanmoins il persiste une rareté de ressource du fait de l’augmentation des capacités de productions. 1. Thomas R. Malthus, Essai sur le principe de population, 1798. 2. William Stanley Jevons, La question charbonnière, 1865. Notion d’état stationnaire Notion créée par Smith, reprise par Ricardo. État à venir de l’économie marqué par un arrêt de la croissance. Cette ré exion ne vaut que pour certaines activités économique dans une certaine mesure, ainsi pour les activités de réseau, le raisonnement ne fonctionne pas. Lorsque Orange possède deux abonnés, il y a deux liaisons possibles, mais l’augmentation des abonnés accroît d’avantage le nombre de liaisons possibles (4 abonnés, 6 liaisons) Peut-on envisager sérieusement comme étant une perspective sérieuse de l’état stationnaire ? En 1939, un économiste américain Marvin Hansen publie un article important dans lequel il met en avant la notion de stagnation séculaire. Stagnation séculaire Situation à laquelle se trouve confrontée une économie à trois obstacles : 1. Un ralentissement sévère de la croissance économique voire une stagnation, 2. Stagnation démographique, 3. Ralentissement du progrès technique. Ne sommes nous pas aujourd’hui confronté à la stagnation séculaire ? De nos jours Rapport du « Club de Rome » : « Halte á la croissance ! » - Le modele d'origine, Appelé World3, permet une simulation des interactions entre population, croissance industrielle, production de nourriture et limites des écosystèmes. Ce rapport a été maladroitement traduit sous sa forme française, étant plus fort qu’une ré exion des limites à la croissance, surtout en matière d’utilisation des ressources et activités polluantes. - Un nouveau rapport parait en 1974 : « Stratégie pour demain ». Il donne 60 ans au système économique pour s'e ondrer, confronté à la diminution des ressources et à la dégradation du cadre de vie. Graham Turner récidive en 2004 - Graham Turner; & The Limits to Growth » trente-deux ans après. - The Smithsonian Magazine : & The World is on track for disaster » Page 8 sur 37 fl ff ffi ffi fi ffi fl fi - Tout se déroule comme prévu pour que survienne le désastre.. Des regards optimistes sur les rapports homme-nature François Quesnay (1759) : les bienfaits illimités de la nature1 - « Ce sont les richesses des fermiers qui fertilisent les terres, qui multiplient les bestiaux, qui attirent et xent les habitants des campagnes et qui font la force et la prospérité de la nation ». Physiocrate Doctrine de l’époque des Lumières selon laquelle les phénomènes économiques relèvent d’un ordre naturel dont l’homme peut découvrir les lois par la raison, et en vertu duquel la terre est la source de toute richesse. Quesnay fut le chef de le de la physiocratie. La physiocratie inspira les réformes de Turgot. Nous avons évoqué le thon rouge, comment se xe le prix de cette ressource ? Comme d’autres espèces le prix est calculé par les producteurs, distributeurs et économistes comme une somme de coûts de production (extraction, transport, transformation, distribution…), mais dans cette équation, la valeur intrinsèque du poisson n’est pas prise en compte. L'erreur des « classiques » : les richesses naturelles sont inépuisables et gratuites - L'air, l'eau et les ressources naturelles ont longtemps été considérées comme des biens gratuits par les économistes. - Jean-Baptiste Say2: « Les richesses naturelles sont inépuisables, car sans cela nous ne les obtiendrions pas gratuitement. Ne pouvant être ni multipliées, ni épuisées, elles ne font pas l'objet des sciences économiques » (1803). Cette thèse s’explique du contexte rural et primitif de la France du début du XIX° siècle, avec ainsi une pression sur les ressources bien moindre. - David Ricardo : « On ne peut mentionner aucune manufacture dans laquelle la nature n'assiste pas l'Homme et, qui plus est, ne le fasse généreusement et gratuitement » (1817). L’avenir de l’Angleterre selon lui n’est pas agricole mais industriel et marchand, et qui permettra au Royaume-Uni de se placer au premier rang des nations pendant près d’un siècle. Il prône des salaires de niveau agricole et d’un libre échange fort, il s’oppose au Corn Law Act. 1. François Quesnay, Le Tableau économique, 1759. 2. Jean-Baptiste Say, Traité d'économie politique, 1803. 2. J.B. Say, Cours complet d'économie politique pratique, Bruxelles, 1843. Les pensées des avant-gardistes Avant-gardiste Personne dotée de la capacité d’anticiper les changement, d’être en avance. Les économiste pouvant y être rattachés sont John Stewart Mill et Karl Marx. Une évolution souhaitable vers l'art de vivre* L'état stationnaire : un état peu probable. L'état stationnaire : un état désirable. Page 9 sur 37 fi fi fi L'état stationnaire peut laisser la place à la « culture morale » (religion), à l'éducation (culture) et aux « progrès sociaux ». La croissance n'est pas la destinée obligée de l'homme « L'accroissement de la richesse n'est pas illimité (...). Je ne suis pas enchanté de l'idéal de vie que nous présentent ceux qui croient que l'état normal de l'homme est de lutter sans n pour se tirer d'a aire, que cette mêlée où l'on se foule aux pieds, où l'on se coudoie, où l'on s'écrase, où l'on se marche sur les talons, et qui est le type de la société actuelle, soit la destinée la plus désirable pour l'humanité »… John Stuart Mill, Principles of Political Economy, 1848, livre IV, chapter 6. Pour John Stuart Mill, l’état stationnaire est un état peu probable, il observe les changements structurels de son époque industrielle, et postule même que s’il adviendrait, il en serait désirable, car les progrès économiques laisseraient la place à d’autres progrès (moraux, culturels, sociaux,…). Ce propos avant-gardiste résonne également avec certains penseurs contemporains. Les thèses marxistes La terre a-t-elle de la valeur ? « La terre n'est pas un produit du travail et n'a donc pas de valeur. Mais, la terre a un prix parce qu'elle est source de revenu (...). Le marché foncier n'est pas un marché de marchandises, c'est un marché de droits » (Les Manuscrits). Le travail est la source de toute richesse ! K. Marx attribue l'origine de toute valeur et de toute richesse au travail humain, négligeant l'apport de la nature. Prisonnier de son schéma d'analyse, il semble ne pas avoir correctement perçu les limites naturelles au développement des forces productives. Dans le capitalisme, la nature devient une marchandise Avec le capitalisme, « la nature devient un objet pour l'homme, une chose utile. [Ce système] cherche à soumettre la nature aux besoins humains, soit comme objet de consommation, soit comme moyen de production » (Les Manuscrits). Laisser la terre en état amélioré aux générations futures « Même une société tout entière, une nation, en n toutes les sociétés contemporaines prises ensemble, ne sont pas des propriétaires de la terre. Ils n'en sont que les occupants, les usufruitiers (Nutzniesser), et ils doivent, comme des « boni patres familias », la laisser en état amélioré aux futures générations » (Le capital, Livre 3, p. 784). Hans Jonas (1903-1993) et le principe responsabilité - Le « Principe Responsabilité » paraît en 1979. - Pour Hans Jonas, qui se réfère à la biologie, l'existence de l'humanité, qui paraît pour beaucoup aller de soi, n'est plus du tout un fait assuré de nos jours. Au contraire, par son énorme pouvoir qu'il a grâce à la technique moderne, l'homme a désormais les capacités de s'autodétruire en peu de temps. C'est pourquoi il a la responsabilité de se reprendre… - Ces avancées marquent une nouvelle étape de destruction, de création et d’auto- destruction dans l’histoire de l’humanité Page 10 sur 37 fi ff fi - Une conception hostile au progrès ? Principe de précaution Mise en situation d’incertitude sur les conséquence d’une action ou d’un produit, en retardant son utilisation a n de mieux anticiper les e ets induits. Il est inscrit dans la constitution française depuis 2005, mais n’est pas appliqué de manière stricte. Il se doit d’être pensé de manière dynamique, il ne faut pas qu’il bloque le progrès technique et les innovations, même si le progrès se doit d’être stimulé et encadré, a n d’ensuite procéder aux ajustement nécessaires. Le dossier des OGM montre la complexité de la question, la transgenèse est une technique permettant de modi er l’ADN des espèces, a n de privilégier les plus productives et résistantes, mais cette technique possède des conséquences majeurs sur la biodiversité. C’est un principe originaire des biologistes allemand des années 1950. Ill - La rareté des ressources naturelles et la question de la rente : le cas du pétrole Les classiques se référaient souvent à la terre et au blé a n d’a uter leurs pensée économique et disserter sur la valeur et la rareté. De nos jours, ces deux métaphores ne sont plus aussi importantes, ce qui présente les traits caractéristiques d’une ressource sine qua none est le pétrole. En 2021, le pétrole était Quelle sont les causes de la variation du prix du pétrole ? - Un o re soumise dans une certaine mesure aux lois du marché, tout en étant cartéllisé par l’OPEP, siégeant à Vienne et seule entente o cielle des matières premières. - Une demande forte et cyclique. Page 11 sur 37 ff fi fi ffi ff fi fi ff fi Dans les principe de 1817, Ricardo énonce que c’est le blé le plus coûteux qui xe le prix du marché. En suivant cette démarche, si les canadiens vendent le pétrole à plus de $70, tous les autres o reurs se positionneront sur ce prix. Ainsi il résultera une rente di érentielle pour tous les o reur produisant en dessous de ce prix. Page 12 sur 37 ff ff ff fi Les principaux éléments de langage de l’économie de l’environnement Les pères fondateurs de la discipline - Alfred Marshall - Les principes d’économies politiques, 1890 - Arthur C. Pigou - L’économie du bien-être, 1920 - Ronald Coase - « The problem of Social Cost » Journal of Law and Economics, Volume 3 (October 1950), pages 1 to 44. Des externalités à leur internalisation Le principe de base Quanti er les e ets externes est une opération di cile. - A.C. Pigou propose d'associer à chaque externalité un « quasi-prix » (Shadowprice) libellé en monnaie car c'est « le seul instrument de mesure évidemment disponible dans la vie sociale »... De la notion de « Shadowprice » au « principe pollueur payeur » (principe 3P) Le mécanisme consiste à faire payer au pollueur l'équivalent du « coût social » de sa pollution a n de dédommager la victime... - Plusieurs pièges et di cultés de mise en œuvre : - Identi er et évaluer le dommage (découverte de la dangerosité de l’amiante) - Identi er le(s) pollueur(s) - Identi er la(les) victime(s) - Le problème épineux des « coûts de transaction » - Le principe « pollueur-payeur » est adopté par l'OCDE en 1972 Pourquoi faut-il un e et d’éviction sur le pollueur ? Mars 1967 Naufrage du Torrey Canyon dane la Manche avec 100.000 tonnes de pétrole. Selon un accord entre la compagnie Union Oil of California, la France et la Grande-Bretagne, les deux pays se partagent 6 M€. Mars 1978 Naufrage de l'Amoco Cadiz au large de la Bretagne avec environ 230.000 tonnes de pétrole. Les dommages sont évalués par la justice américaine à 183 M€ pour 'Etat français et 35 M€ pour les communes touchées. Page 13 sur 37 fi fi fi fi fi ff ff ffi ffi Mars 1980 Naufrage du Tanio en Bretagne avec 26.000 tonnes de pétrole l'Etat français perçoit du Fipol 62 M€ les communes et particuliers 3 M€. Mars 1989 Naufrage de l'Exxon Valdez en Alaska avec prés de 39,000 tonnes de pétrole. ExxonMobil verse 3,4 Mde$ pour le nettoyage des sites et les victimes. Décembre 1992 Naufrage de l'Aegean Sea au large de Le Corogne, avec 80.000 tonnes de fuel à bord. Un accord est signé entre l'armateur. le Fipol et l'Espagne, portant sur le versement de 80 M€. Décembre 1999 Naufrage de l'Erika avec 37.000 tonnes de pétrole, la Justice française évalue las dommages à 200 M€ payés par Total, l’armateur Savarese et le gestionnaire du navire, Pollara. Novembre 2002 Naufrage du Prestige au large de l'Espagne avec 77.000 tonnes de pétrole. Le gouvernement espagnol évalue le coût de la pollution à environ 1 Md€ payés par le Fipol et le London-Club, assureur du navire. Journal « 20 Minutes », 3 mai 2010 Il est question en économie de l’environnement du paradoxe de Pigou : - Qui a le plus droit sur les communs ? - Pigou illustre le cas d’un industriel qui pollue mais qui érige une longue cheminée dans l’atmosphère, car pour lui si l’atmosphère appartient aux promeneurs, il appartient également aux industriels En considérant le problème du transport routier sous le prisme de l’environnement, c’est à cause des blocages. Les statistiques montrent que 86,1% des transports de fret se font sur route en France. L'internalisation par les taxes et ses limites À partir des travaux d'Arthur C. Pigou - Les actifs naturels cessent d'être des biens « hors marché » : leur l'intégration dans l'analyse économique et le système des prix devient progressivement possible. - Nombre économistes libéraux vont suivre la voie ainsi préconisée par Pigou en proposant de compenser, par des taxes, les activités génératrices de pollutions à un niveau compatible avec l'optimum social (au sens de V. Pareto). L'opposition à Arthur C. Pigou viendra - Des écologistes qui reprochent à son instrument son caractère adaptatif qui n'empêche pas la pollution mais la sanctionne seulement a posteriori, la pollution ne disparait pas, - De Ronald Coase, quarante ans plus tard (1960), qui proposera le théorème portant son nom (cf. le théorème de Coase). Ronald Coase montrera qu'une autre solution est Page 14 sur 37 possible : en l'absence totale de coûts de transaction - hypothèse irréaliste -, les parties en présence peuvent négocier directement entre elles et trouver un arrangement. - Pour R. La règlement et la taxation ne sont pas toujours des solutions pour gérer les problèmes environnementaux L'épineuse question de la « monétisation » de la vie sociale et environnementale « Monétiser » (ou monétariser) : qu'est-ce à dire ?1 Traduire certaines dimensions de la vie sociale en valeurs monétaires. Par exemple, l'activité bénévole peut être considérée comme un « plus » pour la richesse alors que la déforestation sera envisagée comme un « moins ». L'objectif est de « corriger » - « positivement » en tenant compte des apports utiles (positifs) de certaines activités sociales: entraide sociale et familiale, bénévolat, solidarités de proximité, etc. - « négativement » en tenant compte des « coûts sociaux » liés par exemple à la pollution des eaux, à la détérioration de la qualité de l'air, etc. - Ce qui nous permet d’ajouter le bénévolat au PIB La monétarisation : les enjeux et les risques - La monétarisation est souvent le seul moyen d'objectiver (révéler) certaines réalités et d'agir pour « contraindre » les pollueurs a changer de comportement. - Inversement, il y a le risque d'une opacité des opérations pour les citoyens et d'une con scation de ces dernières par des « experts » (avocats, scienti ques, etc.). 1. Jean Gadrey et Florence Jany-Catrice, Les nouveaux Indicateurs de richesse, La Découverte, 2017. Le principe d’actualisation et ses applications Actualisation Mécanisme qui permet d’éclairer des situations où il est question d’exprimer une préférence présente ou future. Il est présent en économie mais également en nance. Il revient à arbitrer entre la valeur présente d’une ressource et sa valeur future. Imaginons que l’hiver 2024 soit rude à Lyon (températures atteignant les -25°C), que faut-il faire ? - Préserver le Parc de la Tête d’Or au béné ce des générations futures ? - Ou de le couper a n d’aider les générations présentes à passer l’hiver ? En nance, le principe d’actualisation consiste à comparer des sommes disponibles ou à percevoir à des dates di érentes. Position du problème : la préférence pour le présent ou le futur ? L'exploitation des biens environnementaux représente un gain, une sorte de « rente » prélevée sur la nature. Cette « rente » peut être exploitée (présent) ou laissée à la disposition des générations futures. - En économie publique, la justi cation de l'attente revient à un arbitrage entre la valeur actuelle de la ressource et sa valeur future. - En nance, le principe d'actualisation consiste à comparer des sommes disponibles ou à recevoir à des dates di érentes. Page 15 sur 37 fi fi fi fi ff ff fi fi fi fi Un outil pour évaluer la pertinence d'un choix d’investissement L'actualisation considère deux points : la préférence pour la jouissance immédiate (le coût du temps) et l'aversion au risque (il vaut mieux ce qui est certain). - Le coût du temps re ète le fait qu'un euro aujourd'hui vaut plus qu'un euro demain : un euro aujourd'hui peut être investi et valoir plus d'un euro demain. - Le coût du risque traduit le fait qu'un euro certain vaut plus qu'un euro espéré mais incertain. Ce qui se matérialise dans la « prime de risque ». Il faut pour tenter de résoudre ce problème donner une valeur future au biens d’environnement. Dans le domaine de l’environnement, le taux d’actualisation conduit assez fréquemment à une dépréciions forte des biens de l’environnement parce que T est élevé. C’est la raison pour laquelle un certain nombre d’experts plaident pour un T relativement faible pour donner la capacité d’agir aux pouvoirs publics. Actualisation et dépréciation du futur L'actualisation dans le domaine de la nance Vn = Vo(1 + t)n Vo = Valeur du ux à la date d'aujourd'hui Vn = Valeur du ux à plus ou moins long terme (au bout de n années) t = taux d'actualisation exprimé en % n = Temps exprimé en nombre d'années (positif si ux futur, négatif si ux passe). Une application Si je place une somme de 200 € aujourd'hui, au taux de 3% durant 4 ans, combien aurai- je au bout de la période si les intérêts en sont pas prélevés ? Pour l'analyse économique, le choix de dépenser 200,00 € aujourd'hui (préférence pour le présent) ou de di érer ses dépenses à plus tard (225,10 €) n'est pas indi érent, car intervient l'espoir d'une satisfaction accrue plus tard (préférence pour le futur) Le coe cient d’actualisation Quel taux d'actualisation pour solidariser présent et futur ? Le choix d'un taux « bon » d'actualisation est essentiel dans l'évaluation de projets, d'autant que l'horizon sur lequel porte le projet est lointain. C'est pourquoi la discussion sur le taux d'actualisation « approprié » a connu un regain d'intérêt à propos des « projets à caractère environnemental » caractérisés par un très grand éloignement dans le temps des coûts et/ou des béné ces, qui se trouvent réduits à un niveau insigni ant par l’actualisation. Actualiser revient à déprécier le futur Vn = Vo(1 + t)n Vo = Vn × 1/(1 + t)n k = 1/(1 + t)n K est appelé « coe cient d'actualisation » Page 16 sur 37 ffi fl fl fi ff ffi fl fi fl fi fl ff Faut-il dépenser aujourd'hui (préférence pour le présent) ou de di érer ses dépenses à plus tard avec l'espoir (incertain) d'une satisfaction accrue (préférence pour le futur) ? En matière d'environnement, le jeu revient à arbitrer entre les générations actuelles et les générations futures. Toutefois, l'arbitrage doit-il reposer sur des considérations purement économiques ou, plus généralement, légales, politiques, et/ou éthiques ? Éléments de calculs de l’actualisation Nota Lorsque « t » est élevé et « n » relativement grand, la dépréciation du futur est rapide et forte... Page 17 sur 37 ff Croissance et environnement La croissance, qu'est-ce à dire ? - Au sens strict, la croissance économique désigne la variation de la production de richesse (biens et services) dans une économie sur une période donnée, généralement une année, ou éventuellement sur une période plus longue - Au sens large, la croissance désigne les transformations économiques, sociales, politiques et institutionnelles qui ont pour e et une amélioration globale dans les conditions de vie des habitants : augmentation de la production et de l'investissement, hausse du niveau de vie, création d'emplois, diversi cation de la consommation, etc. L’examen statistique de la croissance en France montre deux réalité : - On peut parler des trois âges de la croissance France depuis le début des années 1950 - Phase d’accélération (1950-1995), - Phase d’atterrissage ou soft landing (2000-2014) - Phase d’oscillation rapide. La croissance en France ralentit fortement de décennies en décennies. La croissance a-t-elle véritablement un avenir ? (Et cela est-il souhaitable ?) La croissance est cyclique La stagnation séculaire de Alvin Hansen, qui postule d’une situation dans laquelle un pays est confronté conjointement au ralentissement du progrès économique, démographique et technique : L’Europe n’est-elle pas confrontée à la stagnation séculaire ? La France et l’Europe doivent a ronter l’atonie de la croissance, le vieillissement de la population et un progrès technique qui semble incrémental, loin des innovations structurelles et décisives des révolutions passées. Page 18 sur 37 ff ff fi Les déterminants de la croissance Ce titre nous invite à étudier les sources de la croissance. Les économistes s’intéressent à plusieurs vecteurs et facteurs économiques, W K. - Contribution des facteurs de productions ne représente que la moitié de la croissance au États-Unis, avec le progrès technique seconde moitié (améliorations des chaines de productions, Anciens et nouveaux facteurs de la croissance Les facteurs classiques de la croissance : les « facteurs »* La croissance extensive fait référence à une hausse de la production obtenue par une augmentation de la quantité de facteurs utilisés (travail). Valable là où la population croit fortement : travail bon marché (Chine, Inde). La notion de croissance intensive fait référence à une hausse de la production obtenue avec une économie de facteurs, notamment le facteur travail. Le progrès technique et la croissance Moses Abramovitz (USA) estime que la contribution des facteurs à la croissance est seulement de l'ordre de 50%. En France, J-J. Carré, P. Dubois et E. Malinvaud montrent, qu'entre 1961 et 1973, que 52% de la croissance économique s'explique par le « résidu de Solow » ou progrès technique. Des tendances historiques longues Une intensité capitalistique croissante. Une substitution du capital au travail accompagnée par un déversement interprofessionnel et intersectoriel du facteur travail, c’est à dire que la rapidité du progrès technique approvisionne et enrichi certains secteurs Les ressources naturelles et la croissance Les ressources naturelles : un déterminant historique1 Tous les pays qui se sont érigés en puissances économiques de premier plan disposaient de ressources de base en quantité su sante (Etats-Unis, Chine) ou pouvaient y accéder par les mécanismes de la colonisation (France, Royaume-Uni) ou du commerce international (Japon, Allemagne). L’étude de la matrice commerciale de ces deux nations permet de se rendre compte d’une forte importation de produits de base vers des biens à haute valeur ajoutée. Mais, des limites existent La consommation des ressources naturelles doit demeurer durablement inférieur au rythme de la croissance économique compte tenu de facteurs connexes : progrès technique, découverte de nouveaux gisements, rythme biologique de reconstitution des ressources naturelles... Un point d'Inquiétude : les ressources non renouvelables. 1. Pierre-Noel Giraud et Timothée Ollivier, Économie des matières premières, La Découverte, Coll. Repères, 2015. Page 19 sur 37 ffi Le pétrole : la courbe de la production mondiale a atteint son « pic »1 Marion K. Hubbert (1903-1989) Géophysicien américain, a longtemps travaillé chez Shell. Il est le premier à avoir illustré la théorie du pic pétrolier par une courbe qui porte son nom : la « Courbe de Hubbert » qui décrit l'évolution de la production de pétrole. Il montre que la courbe de production mondiale des pays hormis l'OPEP et la CEl a culminé en 2004. Ron Swenson Ingénieur américain, présente plusieurs situations pour l'après pétrole. L'intérêt de ces scénarios est de présenter des situations types qui pourraient se réaliser en fonction d'un manque, plus ou moins important, d'énergie après le passage du pic pétrolier conservation, changement de style de vie, substitution et, en n, privation... 1. Thierry Bréchet et Patrick Van Brusselen, Le pic pétrolier: un regard d'économiste », In Re ets et perspectives de la vie économique 2007/4, Tome XLVI, pp. 63-81. Page 20 sur 37 fl fi Le débat sur la croissance et son cout social et environnemental Un certain nombre de questions essentielles se posent à propos de la croissance : - Est-elle nécéssaire ? - Quelles en sont ses vertus ? - Quels sont se coûts ? Ces questions divisent en premier les philosophes, sociologues, politiques et économiques. En allant des points de vue les plus positifs sur la croissance jusque’’au plus critiques, voici quelques points de vues représentatifs. Le paradigme mécaniste Paradigme Ensemble de concepts et arguments explicatifs faisant système. Le paradigme mécaniste remonte à Descartes1 La science peut émanciper l'homme Grâce au savoir et à l'expérience, les hommes peuvent à se rendre « comme » maîtres et possesseurs de la nature… - Propos non-véri able et non-souhaitable dans sa version littérale, d’où l’avant mot « comme ». La vérité n’est pas dans des textes religieux étant des dogmes, ni dans ceux du clergé ou des régents mais dans la science. La seule chose étant d’intérêt est d’être prouvée par expérience, le reste étant spéculation. La raison peut domestiquer la nature « (...) Au lieu de cette philosophie spéculative qu'on enseigne dans les écoles, on en peut trouver une pratique, par laquelle, connaissant la force et les actions du feu, de l'eau, de l'air, des astres, des cieux, et de tous les autres corps qui nous environnent, aussi distinctement que nous connaissons les divers métiers de nos artisans, nous les pourrions employer en même façon à tous les usages auxquels ils sont propres, et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature. Ce qui n'est pas seulement à désirer pour l'invention d'une in nité d'arti ces, qui feraient qu'on jouirait sans aucune peine des fruits de la terre et de toutes les commodités qui s'y trouvent, mais principalement aussi pour la conservation de la santé, laquelle est sans doute le premier bien et le fondement de tous les autres biens de cette vie ». 1. Discours de la Méthode, 1637. Un point de vue social-démocrate : la croissance est utile à l’homme La croissance : le sens du progrès1 La croissance est immanente (consubstantielle) à la nature humaine. La croissance est la condition du progrès. Page 21 sur 37 fi fi fi Le destin de l'homme est de toujours chercher à augmenter son « champ des possibles ». La croissance a vraiment un avenir « La croissance est intimement liée, pour ne pas dire immanente, à la vie des sociétés humaines. Son existence témoigne de ce que nos ns sont inatteignables et, qu'en un sens, le destin de l'homme est de toujours se battre. Vouloir retrouver les rythmes de croissance des « trente glorieuses » est peut-être une illusion, mais prononcer un adieu à la croissance est certainement un contresens. Une société peut-elle renoncer à améliorer le sort de ses générations à venir alors qu'elle le pourrait ? Seule la myopie intellectuelle qui caractérise le temps présent nous empêche de penser que la croissance a vraiment un avenir ! ». 1. Jean-Paul Fitoussi, Anatomie de la croissance molle, Revue de l'OFCE, 1996, pp. 213-244 À la n du XIX°, l’économiste allemand Adolf Wagner nous laisse une loi éponyme : tout ce qui ne croît pas est destiné à périr. La Courbe environnementale de Kuznets (CEK) Une vision très optimiste Le modèle d'origine: les relations entre la croissance et les inégalités. L'optimisme du modèle d'origine a inspiré certaines études consacrées à l'étude des relations croissance-environnement. Les promoteurs de la CEK considèrent que la pauvreté est la cause première des problèmes environnementaux. De l'intuition à la réalité Certaines données empiriques véri ent la tendance : la pollution augmente lors des premières étapes du développement économique et commence, ensuite, à décroître dès le franchissent d'un certain seuil de revenu. Toutefois, d'autres in rment la relation. Cela donne à penser que la CEK est valable pour certains indicateurs environnementaux seulement. 1. Simon Kuznets, Economic Growth and Income Inequality, The American Economie Review, vol. 45, no1, 1955, pp. 1-28 En France l’écart interdécile soit le revenu moyen des 10% des français les plus rémunérés sur le revenu moyen des 10% les moins rémunérés oscille aux alentour de 5. Page 22 sur 37 fi fi fi fi D’après cette courbe, lorsque la croissance s’accélère, les inégalités s’accentuent. Il est intéressant de confronter cette courbe à la réalité des économies émergentes. La courbe environnementale de Kuzenes est une adaptation du modèle originel a n d’étudier les rapports entre croissance et dégradation de l’environnement. « Lorsque une société est su samment riche, alors nous avons les moyens de réduire la pollution ». Nous verrons que les dix plus grands pollueurs sont précisément les pays les plus riches : États-Unis, Canada, Allemagne ou ceux en croissance rapide avec la Chine et autres pays d’Asie. Il nous est possible de critiquer la CEK - La croissance est assez globalement corrélée positivement à la pollution, - Elle culpabilise les pays en développement, Lier le prix des ressources et leur rareté relative Le prix des ressources doit re éter leur stock disponible1 Harold Hotelling (1931) étudie le cas d'une entreprise minière exploitant une ressource non-renouvelable. Pour parvenir à l'optimum, le prix de marché doit re éter la perte de bien-être des consommateurs futurs. Solution du problème : plus la rareté d'une ressource est avérée, plus son prix devrait augmenter indépendamment de son coût d’exploitation. Pour Hottelling si une entreprise minière était traitée analytiquement comme une entreprise lambda, le bin-être des générations futures est mis à mal : la ressource minière n’a pas de valeur intrinsèque, et leur coût résulte de l’agrégation des coûts d’extraction transport et transformations. En procédant ainsi, le minerais s’épuise, c’est pourquoi, plus le produit est rare, plus son prix augmente ce qui décourage la demande. La régulation des ressources par le marché est possible Le prix n'est pas le traducteur de « l'imperfection du marché », mais doit être le traducteur du rythme d'épuisement des ressources. L'intervention de la puissance publique n'est pas nécessaire : le seul mécanisme du marché devrait su re. Un e et positif indirect a rente produite permettrait à ses détenteurs de trouver des substituts e caces à la ressource menacée (EDF). 1. Harold Hotelling, The Economics of Exhaustible Resources, , Journal of Political Economy-Volume 39, April, N°2, 1931. Les points de vues critiques La nécessité de la croissance : un mythe La croissance n'est pas la condition nécessaire du bonheur1 Une société post-croissance est souhaitable. Elle est aussi une perspective nécessaire ! Une société post-croissance est indispensable Page 23 sur 37 ff ffi ffi ffi fl fl fi « Que des di cultés sociales apparaissent et la croissance économique paraît la solution la plus naturelle qui soit. Que la croissance s'avère prédatrice vis-à-vis de l'environnement et l'on recherche des formes qui assureraient une heureuse conciliation : croissance verte, croissance durable, etc. Ce baume miracle pour tout panser sans avoir à penser doit être dépassé. L'évidence s'impose, la croissance économique n'est pas le corollaire nécessaire du bonheur individuel. Au contraire, le « mieux-être » paraît déconnecté de l'obsession du « toujours plus ». En dé nitive, une société post-croissance est non seulement souhaitable, elle est aussi une perspective nécessaire et crédible de progrès social et de développement humain ». 1. Jean Gadrey, Adieu à la croissance : bien vivre dans un monde solidaire, Les petits matins et Alternatives économiques, 2015. Les politiques de développement durable sont dangereuses Un plaidoyer contre la croissance !1 L'économie humaine, un système en croissance, existe dans une biosphère qui ne croît pas. Il s'ensuit que la croissance de l'économie humaine doit, tôt ou tard, se heurter aux limites imposées par les dimensions et les ressources de la Terre. La croissance perpétuelle, sans contrainte, de l'économie et de la population humaine est donc impossible (Population : 750 M (1750) >>>> 7,3 Mds (2020). La croissance durable, une « impossibilité » « Le « développement durable », une expression qui a pris des connotations quasi- magiques, est en fait une expression contradictoire. L'expression est utilisée de nos jours comme synonyme de « croissance durable », un concept qui, lorsqu'il est appliqué à notre vie économique, entraînera les responsables politiques en matière d'environnement et de développement dans une voie sans issue. En deux mots, nous ne pourrons pas continuer de croître indé niment: la « croissance durable » est une impossibilité et les politiques qui se fondent sur ce concept sont irréalistes, voire dangereuses ». 1. Herman E. Daly ot John B. Cobb Jr, For the Common Good, Beacon Press, Boston, Deuxième édition, 1994. La décroissance ou un monde « simple » comme horizon Une critique virulente du développement1 Le développement n'est pas le remède, il est lui-même la source des maux dont sou re la société contemporaine. Le développement « durable », « humain », « social » ou « local » n'est qu'un habillage destiné à rendre acceptable le « développementisme ». La décroissance comme recours2 « La « décroissance » est une proposition nécessaire pour rouvrir l'espace de l'inventivité et de la créativité de l'imaginaire bloqué par le totalitarisme économiste et progressiste. Bien évidemment, elle ne vise pas au renversement caricatural qui consisterait à prôner la décroissance pour la décroissance. Celle-ci n'est envisageable que dans une « société de décroissance », c'est-à-dire dans le cadre d'un système reposant sur une autre logique. Reste le plus di cile : comment assurer la transition de notre société de croissance à la société de décroissance par les mesures appropriées ? » Page 24 sur 37 ffi ffi fi fi ff 1. Alternatives Economiques, Un monde sans croissance, c'est possible, n°405, octobre 2020. 2. Serge Latouche, La décroissanco, PUF, coll QSI, 2019. & Serge Latouche, Petit traité de la décroissance sereine, Fayard, 2007. Deux positions philosophiques irréconciliables Le biocentrisme ou « Deep Ecology » ou écologie radicale L'Homme n'a pas plus de droit sur la nature que n'importe quelle autre espèce. Les écosystèmes et les composantes de la nature ont une valeur intrinsèque. Le biocentrisme, une position philosophique antihumaniste. L'anthropocentrisme ou « l'humanisme moderne » L'Homme est une espèce privilégiée. Si les éléments de la nature doivent être défendus c'est parce qu'ils sont utiles à l'homme. Toutefois, si l'homme « dispose » de la nature, il a aussi le devoir - au minimum - de la conserver dans son intérêt et celui des générations futures. Bibliographie - Alternatives Economiques, Un monde sans croissance, c'est possible, n°405, octobre 2020. - Bolay J.-C.et Schmid M., Coopération et développement durable, Presses - CMED (sous dir. de Gro H. Brundtland), Notre avenir à tous, Montréal, Éditions du Fleuve, 2ème édition, 1989. - Gadrey J., Adieu à la croissance, Les petits matins et Alterna. économiques, 2015. - Jackson T., Prospérité sans croissance : la transition vers une économie durable, De Boeck, 2010. - Karpik L., L'économie des biens singuliers, Gallimard, 2007. - Méda D., La mystique de la croissance, Flammarion, Coll. Essais, 2013. - Ostrom E., Gouvernance des biens communs. Pour une nouvelle approche des ressources naturelles, De Boeck, 2010. - Robin M.-M., Sacrée croissance, La Découverte, 2014. - Tietenberg T. et Lewis L., Economie de l'environnement et du développement durable, Pearson, 2013. Page 25 sur 37 De la croissance au développement durable Une vision restrictive du développement durable Le développement durable est souvent représenté sous forme de croisement de cercles (trois), représentant chacun un des piliers de la vie sociétale, (volets social, économique et environnemental se rejoignant pour former la durabilité), mais plus récemment une nouvelle notion de participation citoyenne s’est mise en place, à l’inverse de la verticalité historique à la prise de décisions. Le rapport Brundtland transforme le débat sur la croissance Les origines du concept En 1980, l'expression « sustainable development » est apparue, pour la première fois, dans un document intitulé : « Stratégie mondiale de la conservation » (Union internationale pour la conservation de la nature). En 1987, paraissait le rapport de la CMED : « Notre avenir à tous ». Le rapport vulgarise l'expression de « développement durable » (ou « développement soutenable »). Le rapport de la CMED dé nit le développement durable comme : « un développement qui répond aux besoins du présent, sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». Plus de trente ans (1987-2020) de ré exions et d'actions Le texte est à l'origine d'un formidable foisonnement de travaux de recherche et d'initiatives de terrain : plans nationaux, agendas locaux... Les Etats, les institutions internationales, les ONG, mais aussi les FMN, en font un thème de référence et une source d'action... Près de 1000 « Agendas 21 » en France en 2020: succès ou dérive ? Il n’y a pas d’équivalent à « sustainable » en français d’où les appellations « durable » ou « soutenable ». Page 26 sur 37 fi fl Le rapport Brundtland propose une solution générique, comme un développement qui répond « au besoin du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». En 2020, un rapport est produit au regard de l’Agenda 21 (programmé au sommet de Rio visant à décentraliser les décisions politiques). S’agit-il d’un succès ou d’une dérive ? Une chose est certaine, si le développement durable est décentralisé, il faut au minimum une coordination entre les programmes. Les six objectifs du développement durable selon la CMED Objectif économique - Favoriser la croissance et en modi er la qualité Objectif social - Répondre aux besoins essentiels, en priorité des plus démunis Objectif démographique - Maîtriser la croissance et la répartition de la population Objectif écologique - Préserver et mettre en valeur les ressources naturelles Objectif technique - Réorienter les techniques et gérer les risques Objectif politique - Associer la population et les pouvoirs décentralisés à la réalisation des objectifs du développement durable 80% des français vivent aujourd’hui en ville, avec une tendance vers les 90%. Cette manière de vivre prose plusieurs problèmes de pollution et de coûts. Page 27 sur 37 fi Le « prix de la nature » en débat La nature doit-elle avoir un prix ? Cette question ne dérange aucun économiste dès lors qu’il s’agit de biens marchands, cependant les biens publics en raison de leur nature n’ont pas de prix. Pourtant un certains nombre de problématiques nécessitent d’évaluer le prix de la nature. I - Evaluer les biens environnementaux : mesures et problèmes Le « prix de la nature » en débat Pourquoi le patrimoine naturel doit avoir un prix ?1 « Un indicateur de valeur n'est pas synonyme d'une approche libérale. La puissance publique peut, en e et, intervenir au nom de l'intérêt général et des générations futures. La contrainte prend alors le plus souvent la forme d'une norme. Or, à travers une norme, on xe un prix qu'on peut calculer, mais qui n'apparaît pas de façon explicite. Si on xe une norme sur les émissions de gaz carbonique on peut xer un prix par tonne de CO2 émise dans l'atmosphère. On peut ensuite laisser agir le marché. L'industriel qui pourra réduire les émissions de son activité le fera pour réduire ses coûts. Le prix - une sorte de prix d'usage de l'atmosphère pour y rejeter du CO2 - sera la valeur de conservation ou de protection du milieu naturel... » (P. Point). Une démarche contestée par l'économie écologique2 Pour les tenants de l'économie écologique, la nature a une valeur en soi (vs pour soi). La nature est sa propre nalité. Il y a donc incompatibilité entre la monétarisation de la nature et son caractère « intrinsèque ». 1. Patrick Point, Pourquoi le patrimoine naturel doit-il avoir un prix, Libération, 19 février 1992. 2. Virginia Maris, Nature à vendre, Éditions Qua, 2014. Un pari : mettre un prix sur ce qui n’en a pas1 Combien coûte le loup en France ? En 2004, le coût global du loup en France était de 1, 794 M€. Une somme nancée par l'Etat en grande partie (80%), le reste étant à la charge des éleveurs (20%). Un loup coûte donc en moyenne à la collectivité 60,4 K€, avec l'hypothèse d'une meute estimée à environ 500 têtes (estimation des pouvoirs publics). En 15 ans, le montant du coût du loup a été multiplié par presque 17 ! En 2019, le coût se répartit ainsi : 3 070 000 € pour l'indemnisation des pertes aux éleveurs, 26 840 000 € pour la mise en place des moyens d'urgence, 110 000 € de crédits d'urgence et en n 200 000 € de rémunérations versés aux agents de l'O ce français de la biodiversité (OFB). 1. Hervé Boyac, Le loup : un nouveau dé français, Editions De Borée, 2017. Page 28 sur 37 fi fi ff fi fi fi ffi fi fi Les autres méthodes d’évaluation : les mesures d’impact L'empreinte écologique met en relation la consommation de matières et d'énergie d'une population avec la surface terrestre ou marine, exprimée en hectare/hab., biologiquement productive nécessaire pour (re)produire les ressources consommées et absorber les déchets qui en résultent. Page 29 sur 37 En fonction de la mesure de calcul, la Chine ou bien l’Arabie Saoudite deviennent premier pollueur mondial Bibliographie indicative - Boutaud A. et Gondran N., L'empreinte écologique, Kindle, 2018. - Desaigues B. et Bonnieux F., Economie et politiques de l'environnement, Dalloz, 1998. - Draperi J.-F., Rendre un autre monde possible : économie sociale, coopératives et développement durable, Presses de l'économie sociale, 2009. - Larrue C., Analyser les politiques publiques de l'environnement, L'Harmattan, 2006. - Larrue C., Les politiques publiques d'environnement, Editions Harmattan, 2000. - Lascoumes P., Action publique et environnement, PUF, coll. Que-Sais-Je ?, 2018. - Lascoumes P., Gouverner par les instruments, Presses de Sciences Po, 2005. - Sterner Th., Les instruments de la politique environnementale, Collège de France- Fayard, 2016. - Thoenig J.-C., Politiques publiques comparées : Le cas des politiques de l'environnement, Association française de science politique, 1984. - Van Lang A. (sous dir.), Penser et mettre en œuvre les transitions écologiques, Mare & Martin, 2018. Page 30 sur 37 Les instruments de politiques publiques de protection de l’environnement Une fois admis la nécessité pour la puissance publique à tous les échelons d’intervenir pour protéger l’environnement, il persiste la question des moyens d’y arriver. La grande variété d’instruments utilisables et disponible permettent des chances de succès et d’e cacité variable. Les principaux outils de politique publique de protection de l’environnement Les instruments réglementaires (la « Loi ») Ils correspondent aux mesures d'ordres institutionnel et législatif, de caractère généralement contraignant, qui visent à empêcher les e ets externes de se manifester. La loi vise à défendre l'intérêt général en mettant à égalité les citoyens et les entreprises sauf spéci cations catégorielles ou sectorielles. Les instruments économiques (les taxes) Ils laissent (en principe) aux agents la liberté d'agir de la manière qu'ils considèrent pour eux comme la plus béné que. Ils visent à internaliser les e ets externes par des moyens divers (contrats, négociations, compensation, etc.). Les instruments volontaires (le consentement des citoyens) Ils jouent sur la sensibilité des populations, leurs préférences ou leur militantisme en faveur de l’environnement. I - Les instruments juridiques de protection de l’environnement Les instruments réglementaires: la justi cation de la loi Expression du pouvoir discrétionnaire de la puissance publique Une première vertu : la loi est préventive (en amont de la production des externalités). Une deuxième vertu : l'Etat-protecteur qui se préoccupe de l'a santé et de du cadre de vie des citoyens (un mythe français ?) Une justi cation : l'approche « Command and control » - L'approche fait appel au système légal et à des activités de contrôle et de surveillance pour atteindre les résultats recherchés. - La réglementation impose des normes de performances ou de moyens, que les agents économiques doivent respecter. Elle met en place des mécanismes de surveillance pour s'assurer qu'ils le font. - L'approche réglementaire a fait ses preuves dans certains domaines ou secteurs (sites Seveso) malgré un coût élevé en termes d'interventions bureaucratiques et , de charges pour l’industrie. Page 31 sur 37 ffi fi fi fi fi ff ff Les normes réglementaires et leurs limite1 Les normes réglementaires et leur variété - Les normes de rejet (rejet du CO, dans l'industrie du ciment) - Les normes de produit (ou de qualité) : xent les caractéristiques des produits. - Les normes de procédé ou de processus (normes thermiques pour les bâtiments). - Les normes sont une solution e cace d'un point de vue écologique : on connait sans di cultés le résultat de la politique mise en place. De plus, le non-respect des normes induit généralement une sanction nancière de l'État. Les limites et la critique de la réglementation - Argument idéologique : l'État, mauvais gestionnaire (sanctions généralement peu élevées, contrôles di ciles à réaliser, etc.). - Argument économique : coût élevé car la création d'une norme nouvelle suppose des investigations et des expérimentations très larges. - Argument technique : e cacité faible car il y a peu d'incitation à améliorer le niveau technologique de la production ou des produits au-delà du seuil légal. 1. Jacqueline Morand-Deviller, Le droit de l’environnement, n° 2334, PUF, coll. Que Sais- Je ?, 2019. II - Les instruments économiques de protection de l’environnement Nous sommes ici dans la sphère créée par Arthur Pigou avec son ouvrage « Économie de bien-être ». La doctrine et les avantages de la taxation1 La doctrine générale1 Une croyance partagée : la taxe est préférable à la contrainte. Des outils reliés, directement ou indirectement, au principe « pollueur-payeur ». Les avantages de la taxation La scalité écologique peut être associée à d'autres dispositifs, comme les permis d'émission, o rant à l'Etat la possibilité de contrôler l'ensemble du dispositif anti- pollution. La scalité écologique permet de réduire la pollution grâce aux contraintes qu'elle est supposée exercer sur les agents économiques. La taxation est-elle réellement contraignante ? Peut-elle induire un changement de comportement des individus ? Le dispositif ne permet pas de régler toujours les problèmes de pollution puisque le coût supporté par les entreprises n’est pas assez coercitif. Les recettes scales qu'elle procure permettent d'agir pour l’environnement. La scalité permet de faire porter le coût de la dépollution principalement sur les agents qui peuvent plus facilement réduire leurs émissions : les agents qui ont les coût de dépollution les plus faibles seront ceux qui contribueront le plus à la lutte contre la pollution. 1. Pierre Lascoumes, Action publique et environnement, PUF, coll. Que-Sais-Je ?, 2018 Page 32 sur 37 ffi fi fi fi fi ff ffi ffi ffi fi fi OCDE Organisation de Coopération et de Développement Économique. Soit le regroupement des 36 pays les plus développés, ayant pour siège le 16° arrondissement de Paris. Données sur les taxes environnementales La scalité environnementale regroupe près d'une quarantaine d'impôts taxant des produits ou activités nuisibles à l'environnement, comme les énergies fossiles ou les émissions de polluants dans l'air et l'eau. Basée sur le principe pollueur-payeur, son objectif premier est d'inciter les ménages et les entreprises à adopter des comportements favorables à l'environnement, en augmentant le coût des activités qui lui sont nuisibles. Si les taxes environnementales restent, pour les trois quarts, assises sur les consommations énergétiques, principalement sur les énergies fossiles, elles s'appliquent également aux autres problématiques environnementales : changement climatique, pollutions, biodiversité, consommation des ressources naturelles, etc. Direction générale des douanes et droits indirects, Données sur les taxes environnementales, 2018. Le montant consolidé des taxes environnementales, énergétiques, transports et ressources avoisine les 56 milliards d’euros en France. Page 33 sur 37 fi Les désavantages de la taxation Les inconvénients et problèmes de la taxation 1. La taxation est assise sur la teneur en « externalités » qui est par nature di cile à évaluer, 2. Le problème du seuil : il est di cile de dire quel montant de la taxe appliquer pour une e cacité maximale, 3. L'acceptabilité de l'impôt : di cile de faire accepter un impôt supplémentaire, 4. La taxe n'empêche pas la pollution : si les agents préfèrent payer plutôt que de changer leur activité. Les redevances - Les redevances de déversement : eau et bruit (construction de stations d'épuration ou de séparations anti-bruit), - Les redevances pour services rendus : perçues pour le nancement du traitement collectif des rejets (déchets), - Les redevances sur produits : intégrés aux prix des produits polluants (pétrochimie), - Les redevances administratives : droits sur permis (pêche, chasse). La variété des instruments économiques Les consignes et la consignation Généralement appliquées à des produits (bouteilles de verre), L'e cacité est mesurée par le taux de retour, Faible impact en France mais bien plus présent dans les pays outre-Rhin. Les péages et droits d’entrée Un nombre croissant de domaines d'application : autoroutes, voies express urbaines, parcs de loisirs, etc, Deux domaines privilégiés : le transport et le stationnement urbain, De nombreux progrès attendus dans le tra c autoroutier: péage en fonction de l'heure, de la journée et/ou de la densité de la circulation, Des solutions de substitution doivent être o ertes aux usagers. TER Travaux d’Étude et de Recherche, soit un rendu condensé de mémoire. Les autres instruments économiques Une grande variété d'aides nancières - Les subventions, - Les prêts à taux d'intérêt réduits, - Les allègements scaux, - Les Bonus-Malus, - Objectif : encourager les agents à modi er leurs comportements, - Limites : les aides doivent être modérées, ciblées, transitoires et ne pas entrer en con it avec d'autres règles (commerce international). Subvention Transfert nancier réalisé par une institution publique au béné ce d’un agent privé. Page 34 sur 37 ffi fl ffi fi fi ffi fi ffi fi fi ff fi fi ffi III - Les instruments volontaires de protection de l’environnement Un symbole de la responsabilité individuelle et collective1 Un phénomène non neuf Lors des premières pénuries de bois, en Angleterre (XVIll° siècle), des responsables ont pris la décision que pour tout arbre coupé, un autre serait planté. Henry Ford (1933) : « une entreprise qui ne fait pas de pro t meurt, mais si elle pense seulement à faire du pro t, elle meurt aussi ». Des instruments volontaires à la RSE La RSE désigne la prise en compte par les rmes, sur une base volontaire, des enjeux environnementaux, sociaux et éthiques dans leurs activités, à la fois au niveau des interactions internes et externes. Les rmes doivent contribuer à l'amélioration de la société et à la protection de l'environnement. Cette responsabilité exige de respecter la loi et les conventions collectives, et d'intégrer les préoccupations en matière de droits de l'homme et des consommateurs dans toutes les activités et les décisions de l’entreprise. 1. Khermimoun Jamel, Ethique et environnement : face aux enjeux écologiques, quelle alternative humaine et durable, L'Harmattan, 2016. Le volontariat écologique : un phénomène particulièrement à la mode Pourquoi les instruments volontaires ? Un palliatif aux di cultés et aux coûts d'application des outils réglementaires, Un palliatif au conservatisme des outils économiques, souvent à la remorque des problèmes écologiques. Une grande variété d'instruments volontaire - Les labels écologiques (ou écolabels). - Les normes ISO 14001 et 50 001 (environnement). - Les normes Haute Qualité Environnementale et Qualité Sécurité de l’Environnement. - La norme ISO 26 000 (RSE). Der Blaue Engel Créé en 1977 par le ministère de l'écologie allemand, « Blaue Engel » est la plus vieille certi cation environnementale dans le monde. En 40 ans (1977-2017), le label a été attribué à quelques 10 000 références appartenant à plus de 80 catégories de produits di érents. Les écolabels : e cacité et limites Les facteurs d'e cacité des écolabels Ils reposent sur la sensibilité écologique des agents, Ils augmentent le consentement à payer des acheteurs (produits bios), Une réponse à l'imperfection des marchés : Ils corrigent l’asymétrie Informationnelle entre rmes et acheteurs. Page 35 sur 37 fi ff fi fi ffi ffi ffi fi fi s fi Les di cultés et les problèmes 1. La multiplicité des labels augmente la complexité de l'information délivrée aux consommateurs, 2. Qui labellise ? Se pose le problème de la crédibilité des organismes de labelisation, 3. Les labels se traduisent par un e et d'aubaine pour les producteurs (les labels source de pro ts commerciaux). Ce détournement de tra c ne joue pas fatalement à l'avantage du bien-être global. Quelques exemples d’écolabels français Au niveau européen Page 36 sur 37 ffi fi ff fi Labels complémentaires Page 37 sur 37

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