Le sexe/Genre de la Personne - 2015 PDF

Summary

This document discusses the legal aspects of gender and sex, referring to case law and jurisprudence related to gender identity. It touches upon topics like the immutability of sex at birth, the recognition of gender identity, and changes in legal approaches. The text aims to analyze legal cases and jurisprudence.

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**B. Le sexe / genre de la personne** Le sexe fait historiquement partie de l'état des personnes Pendant longtemps, cet élément faisait l'objet d'un **principe d'immutabilité absolue** ; le sexe était fixé dès la naissance de la personne, et demeurait de façon permanente dans son état, et dans les...

**B. Le sexe / genre de la personne** Le sexe fait historiquement partie de l'état des personnes Pendant longtemps, cet élément faisait l'objet d'un **principe d'immutabilité absolue** ; le sexe était fixé dès la naissance de la personne, et demeurait de façon permanente dans son état, et dans les registres de l'état civil **Les progrès de la médecine, la reconnaissance de l'identité de genre et le droit à l'épanouissement personnel** expliquent que cet élément puisse désormais évoluer au gré de la vie de la personne Si **la mention du sexe de naissance demeure lors de la déclaration à l'état civil**, de nombreux arguments militent en faveur d\'une évolution globale La volonté de faire inscrire la mention « sexe neutre » à l'état civil a ainsi été portée en France et dans d'autres pays, pour les personnes ne se définissant ni du sexe masculin ni du sexe féminin De même, l'immutabilité de l'état des personnes a dû être remise en cause pour tenir compte **de la transidentité**, qui est désormais reconnue dans des conditions bien précises Aussi, nous verrons que le sexe biologique de naissance reste déterminant en principe pour la composition de l'état de la personne, mais qu'il peut exceptionnellement être modifié pour tenir compte du sexe psychologique de la personne, et des conséquences que celle-ci lui a attachées ***1) Le sexe biologique*** **L'article 57 du Code civil**, que nous avons déjà rencontré plus tôt, dispose que **le sexe de l'enfant doit figurer dans l'acte de naissance** Ici, le droit se borne, comme depuis toujours, à une simple constatation de l'apparence de l'enfant, et de la présence d'attributs féminins ou masculins C'est donc la réalité biologique apparente qui gouverne la rédaction de l'acte de naissance, et qui gouvernait la règle d'immutabilité de l'état des personnes sur ce point Qu'en est-il **en l'absence de sexe biologique** ? La question a connu un regain d'intérêt ces dernières années ; **elle concerne les personnes dont le sexe biologique ne peut être déterminé avec précision lors de la naissance**, essentiellement parce qu'elles présentent des attributs aussi bien masculins que féminins La tentation d'inscrire « sexe neutre » à l'état civil a ainsi vu le jour et a pu être suivie dans la pratique ; une affaire très importante l'a rappelé récemment Le **TGI de Tours, dans un jugement en date du 20 août 2015**, a ainsi admis cette mention s'agissant d'une personne née sans appareil génital, mais inscrite en tant que de sexe masculin à l'état civil La **Cour d'appel d'Orléans a infirmé cette décision, dans un arrêt du 2 mars 2016**, ce qui a été confirmé par la Cour de cassation dans un arrêt du 4 mai 2017 Selon la CA : « *admettre la requête de Monsieur Jean-Pierre D. reviendrait à reconnaître, sous couvert d'une simple rectification d'état civil, l'existence d'une autre catégorie sexuelle, allant au-delà du pouvoir d'interprétation de la norme du juge judiciaire et dont la création relève de la seule appréciation du législateur* »*.* Selon la C. Cass. : « *la dualité des énonciations relatives au sexe dans les actes de l\'état civil poursuit un but légitime en ce qu\'elle est nécessaire à l\'organisation sociale et juridique, dont elle constitue un élément fondateur*. » On doit alors déterminer le sexe de la **personne en fonction de son sexe chromosomique** et non de son apparence, autrement dit son phénotype sexuel **Seule une évolution législative pourrait sur ce point faire admettre le sexe neutre** D'autres Etats ont déjà pris cette voie ; en Allemagne par exemple, il est désormais possible de ne **pas faire figurer la mention du sexe dans l'acte de naissance** si la personne est intersexuelle ; il en est de même dans d'autres pays, comme la Nouvelle Zélande, où le sexe « neutre » est reconnu en tant que tel **Il arrive que des personnes naissent sous un sexe apparent déterminé**, mais sentent de manière irrépressible et profonde qu'elles appartiennent à l'autre sexe Longtemps ignoré par le droit, **la question s'est posée de savoir si l'on devait en tenir compte**, surtout depuis qu'il est possible d'effectuer une conversion sexuelle, grâce à des traitements chirurgicaux et thérapeutiques Les évolutions ont été les suivantes En 1975, la Cour de Cassation a rendu une décision dans laquelle elle estimait que **le sexe de la personne ne pouvait être rectifié à l'état civil**, quand bien même elle aurait effectué une opération de conversion sexuelle ; le principe d'indisponibilité de l'état des personnes avait été affirmé haut et fort pour écarter toute velléité à ce niveau Cette position a été maintenue jusqu'au début des années 90, et l'on admettait que la personne pouvait avoir « perdu » les attributs du sexe d'origine sans nécessairement avoir acquis ceux de l'autre sexe (voir not. C. Cass., Civ. 1, 21 mai 1990) Les choses ont changé avec **l'influence de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme**, qui accorde une part essentielle à la liberté individuelle, et particulièrement au droit à la vie privée, qu'elle estime être un droit à l'épanouissement personnel, mais aussi un droit à disposer de son corps dans une certaine mesure La CEDH a ainsi admis en 1992 (affaire ***B. c./ France*, 25 mars 1992**) qu'une personne transsexuelle pouvait **obtenir la rectification de son sexe à l'état civil pour que celui-ci corresponde à son identité sexuelle contemporaine** La Cour ne s'est pas départie de cette affirmation de principe depuis 1992 Elle l'a renouvelée en 2002, dans son **célèbre arrêt *Goodwin c./ Royaume Uni*, rendu le 11 juillet** Dernièrement, elle l'a encore confirmée dans un **arrêt en date du 9 juillet 2020, YT c./ Bulgarie** Les faits concernaient une personne inscrite comme étant de sexe féminin dans son acte de naissance, mais qui s'est toujours sentie être un homme, tant dans son apparence que dans sa psychologie, et a finalement effectué une opération de conversion sexuelle Les autorités bulgares ont refusé la rectification de son sexe à l'état civil ; la CEDH a condamné la Bulgarie, estimant que le refus de réassignation du sexe de l'intéressé était de nature à placer « *ce dernier, pendant une période déraisonnable et continue, dans une situation troublante lui inspirant des sentiments de vulnérabilité, d'humiliation et d'anxiété* » La Cour de cassation, en France, a dès lors tenu compte de cette évolution européenne et a immédiatement opéré un revirement de jurisprudence **L'assemblée plénière de la Cour a ainsi affirmé, dans un arrêt du 11 décembre 1992**, qu'il fallait **tenir compte de la réalité à la fois biologique, sociologique et psychologique** de la personne pour admettre un changement de sexe à l'état civil, et que celui-ci aurait dû être ordonné dès lors que la personne a manifestement changé de sexe et se comporte comme étant du sexe opposé à celui de sa naissance Il est à noter que **le changement de sexe s'accompagne bien entendu du changement de prénom à l'état civil**, celui-ci devant également correspondre à la nouvelle identité sexuelle de la personne Par la suite, la Cour a posé les conditions nécessaires à l'obtention du changement de sexe : que la personne **prouve la réalité du changement d'identité sexuelle** par une expertise judiciaire, ainsi que **le caractère définitif de la transformation de son apparence** (C. Cass., 7 juin 2012 et 13 février 2013) Précisément la Cour exigeait que « *lorsqu'à la suite d'un traitement médico-chirurgical, subi dans un but thérapeutique, une personne présentant le syndrome du transsexualisme ne possède plus tous les caractères de son sexe d'origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l'autre sexe auquel correspond son comportement social* », ces conditions devant être validées par une expertise judiciaire **Un arrêt de la Cour d'appel de Rennes, en date du 26 octobre 1998** avait cependant admis le changement de sexe à l'état civil y compris en l'absence de thérapie et d'intervention chirurgicale, eu égard à l'état de santé de l'intéressé (séropositif) ; elle s'en était tenu au simple changement d'apparence et au comportement social Mais ces conditions relatives au suivi d'une thérapie ont justement elles-mêmes été condamnées par la Cour européenne des droits de l'homme La **loi du 18 novembre 2016** a créé une section dans le Code civil relative à la modification de la mention du sexe à l'état civil, aux articles 61-5 et suivants Depuis, **l'article 61-5 du Code civil** dispose que la personne doit prouver son changement de sexe par une réunion suffisante de faits pour obtenir la rectification de cette mention à l'état civil Ces faits sont principalement les suivants : - La personne se présente publiquement comme appartenant au sexe revendiqué ; - elle est connue sous le sexe revendiqué de son entourage familial, amical ou professionnel ; - elle a obtenu le changement de son prénom afin qu\'il corresponde au sexe revendiqué. Il est précisé dans l'article 61-6 que « **Le fait de ne pas avoir subi des traitements médicaux, une opération chirurgicale ou une stérilisation** ne peut motiver le refus de faire droit à la demande. » ; autrement dit, c'est vraiment l'identité psychologique et sociale qui est seule prise en compte pour déterminer la légitimité de la demande de changement de sexe La décision est prise par le Tribunal judiciaire ; elle est ensuite transmise par le Procureur de la République au service de l'état civil, qui devra faire mention en marge de l'acte de naissance des changements de sexe et de prénoms **Le changement de sexe est sans effet sur les obligations auxquelles la personne est partie, ni sur les liens de filiation qui ont pu être établis auparavant** (art. 61-8 du Code civil) ; autrement dit, la personne conserve sa qualité initiale de père ou de mère à l'égard de ses enfants ; ceux-ci peuvent voir leur acte de naissance modifié pour tenir compte de la nouvelle identité du parent, mais seulement avec leur consentement ***2) Les conséquences attachées au changement de sexe de la personne*** De façon générale, l'appréhension juridique du genre de la personne, et plus particulièrement du changement de sexe, tend à renforcer l'égalité des sexes et concourt à la lutte contre les discriminations en fonction de l'orientation sexuelle ou de l'identité de genre Ainsi, la loi pour l'égalité entre les hommes et les femmes contient un certain nombre de dispositions qui n'ont d'intérêt que si l'on admet la distinction entre les deux sexes Plus généralement, **la lutte contre les discriminations fondées sur le sexe, l'identité de genre ou l'orientation sexuelle est devenue un enjeu majeur, à l'origine de nombreuses lois frappant différentes pratiques sociales et sociétales** ; il peut s'agir par exemple des discriminations à l'embauche, ou encore de la police des discours haineux Ces évolutions, qui sont nécessaires au titre du respect de la vie privée d'autrui, s'accompagnent de nombreuses revendications remettant en cause les bases sur lesquelles l'état des personnes s'est construit Ainsi, après avoir reconnu la possibilité pour une personne de changer de sexe dans son acte de naissance, c'est la référence à la conversion sexuelle biologique qui a finalement été écartée en 2016 De **nouvelles évolutions devraient à ce titre apparaître dans l'avenir**, dès lors qu'une personne pourra être considérée comme étant du sexe opposé à celui de sa naissance dans l'état civil, tout en ayant conservé les attributs de celui-ci Un autre exemple concerne la revendication de **faire disparaître la référence aux notions de** **« père » et de « mère » dans l'état civil**, et notamment les actes de naissance, pour lui substituer celle de « parent n° 1 » et « parent n° 2 » Pour l'instant, cette modification a été proposée pour les documents scolaires, où les parents d'un enfant auraient dû s'identifier comme tels La mesure vise encore à écarter tout risque de discrimination entre les couples homosexuels et les couples hétérosexuels, tout en préservant la vie privée de chacun Finalement, ce sont des termes plus neutres qui ont été choisis par **la loi du 26 juillet 2019 pour l'école de la confiance** : « père », « mère », « représentant légal » Cette dernière mention permet de respecter la diversité des situations familiales ainsi que le droit à la vie privée de chacun, sans subir de risque de discrimination La question de la filiation a été posée frontalement aux juridictions lors d'une affaire médiatique dont l'aboutissement est tout récent En effet, la loi du 18 novembre 2016 avait bien indiqué que le changement de sexe à l'état civil d'une personne **n'entraînait aucune conséquence sur les filiations antérieurement reconnues** ; mais le législateur est resté **silencieux sur les filiations à venir** après le changement de sexe Etant donné que la conversion sexuelle n'est plus exigée pour obtenir la rectification de cette mention, **la procréation naturelle entre deux personnes du même sexe à l'état civil** devait nécessairement être appréhendée par les tribunaux La **Cour d'appel de Montpellier, dans un arrêt du 14 novembre 2018**, a tenté d'y apporter une solution en imposant **la mention « parent biologique »** dans l'acte de naissance d'un enfant né de l'union de deux personnes mariées, dont l'une, initialement de sexe masculin, avait été reconnue comme femme sans conversion sexuelle, soit sans avoir pour autant renoncé à ses facultés de procréation initiales La **Cour de cassation, dans un arrêt du 16 septembre 2020**, a cassé cet arrêt ; tout en reconnaissant la nécessité d'établir la filiation à l'égard des deux parents, elle a rejeté l'innovation suggérée par la Cour d'appel, estimant que la création d'une nouvelle catégorie à l'état civil était impossible, les mentions de « père » et « mère » étant d'ordre public Enfin, **la Cour d'appel de Toulouse, saisie après renvoi, a rendu encore une autre solution dans un arrêt du 9 février 2022**, en reconnaissant **une double filiation maternelle** dans l'acte de naissance de l'enfant ; L'argumentaire de la Cour, très poussé, repose sur **la nécessaire conciliation entre l'intérêt supérieur de l'enfant** de voir sa filiation reconnue à l'égard de ses deux parents biologiques et **le droit au respect de la vie privée de ceux-ci**, ce qui inclut le droit à l'autodétermination sexuelle, la protection de l'identité de genre La cour prend également appui sur la **loi bioéthique du 2 août 2021 qui a ouvert la PMA aux couples de femmes**, et permis, dans les **articles 342-11 et suivants du Code civil**, l'établissement d'un acte de naissance comprenant une **double filiation maternelle**, mais dans ce seul cas ; là encore, le législateur a ignoré l'hypothèse d'une procréation naturelle entre deux personnes du même sexe La Cour d'appel de Toulouse estime, pour cette raison, qu'il n'y a **aucun obstacle à étendre cette double filiation à l'hypothèse d'une procréation naturelle**, celle-ci n'entraînant aucune contrariété à l'ordre public, et étant la solution la plus respectueuse des droits des personnes intéressées De façon générale, l'appréhension juridique du genre de la personne, et plus particulièrement du changement de sexe, tend à renforcer l'égalité des sexes et concourt à la lutte contre les discriminations en fonction de l'orientation sexuelle ou de l'identité de genre Ainsi, la loi pour l'égalité entre les hommes et les femmes contient un certain nombre de dispositions qui n'ont d'intérêt que si l'on admet la distinction entre les deux sexes Plus généralement, **la lutte contre les discriminations fondées sur le sexe, l'identité de genre ou l'orientation sexuelle est devenue un enjeu majeur, à l'origine de nombreuses lois appréhendant différentes pratiques sociales et sociétales** ; il peut s'agir par exemple des discriminations à l'embauche, ou encore de la police des discours haineux Nous en reparlerons ultérieurement avec l'interdiction légales des thérapies de conversion **C. Le domicile** Le domicile est le troisième élément constituant l'état des personnes considéré comme primordial Bien qu'il puisse historiquement faire l'objet de fluctuations et d'évolutions, on comprend bien sûr sa fonction, qui est celle de **pouvoir localiser juridiquement la personne**, de lui adresser des correspondances, des actes juridiques par lesquels elle s'engage,... mais aussi de la poursuivre en justice ! Là encore, comme nous le verrons, la définition du domicile s'efforce de coller le plus possible à la réalité ; pour autant, il y a encore **une dimension abstraite très importante**, le domicile pouvant ne pas être le lieu exclusif où la personne a établi son lieu de vie Cela tient encore au recoupement avec la conception concrète, qui a gagné de plus en plus de terrain en faisant triompher le subjectivisme et la possibilité pour la personne de faire varier le lieu où elle vit Surtout, la notion de domicile est maintenant « habitée » par un droit de la personnalité qui est essentiel : le droit au respect de la vie privée Nous verrons d'abord la définition du domicile (1), la détermination de celui-ci (2) puis ses principales fonctions (3) ***1) Définition du domicile*** Il faut distinguer le domicile de deux autres notions Le domicile est le **lieu du principal établissement de la personne, c'est-à-dire celui où sont centralisés ses intérêts personnels et professionnels** Il se distingue en cela de **la « résidence », qui est un second lieu où la personne peut avoir des intérêts mais d'une moindre importance** ; classiquement, il s'agit de la résidence dite « secondaire » ; c'est un lieu où la personne ne se trouve pas de façon permanente mais quand même de façon stable et habituelle Enfin, il se distingue aussi de **« l'habitation »,** qui est une notion encore plus diffuse ; il s'agit de tous **les lieux où la personne peut se trouver pour une raison ou une autre, du point de vue strictement physique, pour une durée temporaire** ; tel est le cas par exemple de la chambre d'hôtel occupée par un client Dans ce dernier cas, on considère évidemment que la personne n'est pas dans son lieu principal d'établissement, mais **cela ne la prive pas de certains droits qui lui sont propres, tels que le droit au respect de la vie privée** Exemple : c'est ainsi que les clients d'un hôtel peuvent invoquer le droit au respect de la vie privée contre les autres clients mais aussi contre l'hôtelier lui-même ; il importe peu à cet égard qu'ils ne sont que des occupants précaires des lieux, et que l'hôtelier soit propriétaire ; il ne pourra pas, notamment, installer des caméras de vidéosurveillance qui risqueraient de surprendre des moments relevant de l'intimité de ses clients, y compris pour des motifs de sécurité De la même manière, **le domicile de la personne peut être établi sans égard pour sa qualité de propriétaire ou de locataire** Exemple : un étudiant locataire d'un studio ou d'une chambre chez l'habitant a aussi droit au respect de la vie privée et peut l'invoquer contre le propriétaire ; celui-ci ne pourra pas par exemple entrer dans les lieux loués sans le consentement de l'occupant, même en son absence, ni prendre des photos, ni relever lui-même le courrier de sa propre initiative,... **Cour de cassation, 1^ère^ Chambre civile, 7 novembre 2006, n° 05-12.788** « *Attendu* \[...\] *que le droit de chacun au respect de sa vie privée s\'étend à la présentation interne des locaux constituant le cadre de son habitat et, d\'autre part, que l\'utilisation faite des photographies qui en sont prises demeure soumise à l\'autorisation de la personne concernée* » ***2) La détermination du domicile*** Souvent la détermination du domicile est assez simple **L'article 102 du Code civil dispose qu'il se trouve au lieu où la personne a son principal établissement** Pour les personnes ne disposant que d'une seule adresse, il y a superposition de l'adresse postale et du domicile, sans égard pour les critères précités Cela est corroboré par **l'article 103 du Code civil**, qui dispose que le changement de domicile s'opère par le **fait d'une habitation réelle dans un autre lieu avec la volonté d'y fixer** son principal établissement **L'article 104 invite à confirmer cette intention par une double déclaration**, tant à la mairie du domicile que l'on quitte qu'à celle du domicile où l'on emménage, mais cela n'est pas obligatoire Tout dépend donc en fait du comportement de la personne, ce qui ouvre déjà une part au subjectivisme Et si la personne occupe de manière équivalente ses diverses adresses ? Les juges, en cas de litige, **apprécieront laquelle semble être le principal établissement de la personne**, ce qui n'est pas toujours évident Exemple : c'est de ce type d'appréciation qu'étaient saisis les juges dans l'affaire de l'héritage de Johnny Hallyday Un point essentiel à signaler : il existe **un principe de libre choix du domicile**, qui est un corollaire du droit au respect de la vie privée Ce droit permet à toute personne de choisir librement le lieu où elle va établir ses principales activités, en fonction de **critères qui lui sont purement personnels** ; ce droit ne saurait subir de restrictions trop importantes Par exemple, le fait d'imposer à un avocat stagiaire d'établir son domicile à proximité du cabinet constitue une atteinte disproportionnée au libre choix de son domicile, quand bien même elle poursuivrait une finalité d'intégration dans l'environnement local (C. Cass., Ch. Soc., 12 juillet 2005) Il arrive que le domicile soit déterminé par la loi pour certaines personnes Tel est le cas pour **les fonctionnaires nommés à vie** où le lieu d'exercice des fonctions vaut domicile, pour les mineurs non émancipés, qui ont leur domicile chez leurs parents, aux majeurs sous tutelle, qui ont leur domicile chez leur tuteur Pour les couples mariés, le domicile peut être séparé sans que cela affecte les règles relatives à la communauté de vie ; cela arrive lorsque les deux époux ont des vies professionnelles différentes Certaines personnes doivent également **choisir comme domicile** un lieu différent de celui où elles vivent, lorsqu'elles n'ont pas de domicile stable ; tel est le cas pour les gens du voyage ou les bateliers, qui doivent choisir leur domicile dans une commune figurant dans une liste fixée par le ministre de la justice Enfin, il est aussi possible **de faire « élection » de domicile pour certains actes juridiques seulement** ; tel est le cas par exemple dans un contrat ; cela signifie que les correspondances et les autres actes qui lui sont relatifs seront envoyés à une adresse précise, qui n'est pas forcément celle des parties à cet acte ; il peut s'agir d'un cabinet d'avocat ou d'une étude de notaire Il faut néanmoins savoir que **les cas dans lesquels l'élection de domicile sont limités en matière civile**, alors qu'elle est libre en matière commerciale (à condition d'être très clairement stipulée dans le contrat) De plus, **l'élection de domicile est toujours spéciale**, elle ne vaut que pour les conséquences d'un acte déterminé, et entre les personnes en ayant convenues ; elle ne permet donc pas d'échapper à la totalité de ses obligations ou correspondances juridiques Enfin, l'élection de domicile est relative, au sens qu'il serait **toujours possible de s'adresser à l'une des parties à son domicile réel et habituel**, où elle est censée être présente ; il n'en va différemment que si l'élection de domicile a été convenue dans l'intérêt des deux parties ***3) Les fonctions du domicile*** Comme nous l'avons vu, le domicile est le lieu de fixation de nombreux actes juridiques, jusqu'aux plus simples Il détermine ainsi **le lieu où certains actes de la vie civile vont être accomplis**, tels que les mariages, les lieux d'ouverture d'une succession, Il détermine aussi la compétence des juridictions : classiquement, en matière civile, **le lieu du domicile du défendeur** sera pris en compte pour déterminer la juridiction compétente C'est aussi au domicile que seront envoyés des actes extrajudiciaires (assignations, saisies, commandements,...) La résidence peut suppléer le domicile dans un certain nombre d'hypothèses Ainsi par exemple, **l'article 74 du Code civil** admet que le mariage puisse être célébré au lieu où l'un des époux possède une résidence De même, à défaut de domicile connu, le lieu de signification d'un acte pourra être la résidence, car il faut bien que la personne prenne connaissance de ses obligations d'une manière ou d'une autre L'élection de domicile est aussi **obligatoire pour les sans domiciles fixes**, qui doivent choisir pour cela un centre communal d'action sociale Enfin, et cela est logique, le domicile, tout comme la résidence ou l'habitation, est le lieu où la personne peut exercer le plus pleinement son **droit à la vie privée** ; il s'agit de l'espace de « tranquillité » dans lequel elle peut s'épanouir, sans avoir à craindre d'intrusions extérieures

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