Summary

Ce document explore les premières manifestations de comparatisme juridique à l'époque moderne, se concentrant sur les mutations du XVIe siècle et la naissance d'un droit national en France. Il examine également le droit anglais et sa résistance au droit romain. Au travers des juristes français et anglais, il analyse les différentes approches et conceptions du droit de cette période.

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§2 : Le tournant de l’époque moderne, les premières manifestations de comparatisme revendiqué Les mutations du XVIe siècle : - La renaissance - Les grandes découvertes - L’humanisme - La réforme et les guerres de religion Plusieurs manifestations créées de profondes mutations. Il y a des découver...

§2 : Le tournant de l’époque moderne, les premières manifestations de comparatisme revendiqué Les mutations du XVIe siècle : - La renaissance - Les grandes découvertes - L’humanisme - La réforme et les guerres de religion Plusieurs manifestations créées de profondes mutations. Il y a des découvertes territoriales qui impliquent la découverte de l’autre (ex : découverte de l’Amérique). Ça pose des interrogations. Dans la même période, il y a la remise en cause de l’Eglise et c’est toute la question protestante qui se pose. Il y a aussi l’humanisme qui fait un retour aux écrits antiques. On redécouvre les écrits antiques. On retraduit des auteurs qu’on avait perdus. Il y a une passion pour le savoir et une nouvelle façon d’appréhender ce savoir. C’est aussi un moment où le droit va se nationaliser. L’autorité royale va s’imposer sur les acteurs politiques locaux et c’est une façon d’imposer son droit. Les juristes vont accompagner ce mouvement. Ils vont s’interroger sur un droit national qui aurait sa propre logique. Le droit devient à nouveau un objet de réflexion. Un peu plus tard, au XVIIIe siècle, il va y avoir des avancées scientifiques, une rationalité propre qui se dessine et qui pousse au comparatisme dans d’autres domaines (domaine anatomique, géologique, etc.). Il va y avoir par exemple un mouvement d’anatomie comparée avec l’idée que l’anatomie d’un animal permet de mieux comprendre l’anatomie d’autres animaux. A / Le comparatisme intercoutumier en France Dans cette période, la diversité coutumière est très importante. Klimrath avait établi une carte des ressorts coutumiers. Ça pose la question de l’articulation entre la volonté politique d’unification et la diversité liée au pluralisme juridique. Est-ce qu’il y a un droit national, un droit propre puisqu’il y a déjà une unité politique qui se dessine ? Est-ce que dans le cadre du royaume de France, les rapports de droits sont des rapports qui relèveront d’un même logique ? Défendre cette affirmation, c’est se poser la question du droit romain. Le droit romain vient de Rome. Alors, Rome est-ce que c’est du droit national ? C’est une question qui se pose. Les juristes vont défendre la thèse selon laquelle le droit national peut s’émanciper du droit romain. Etienne Pasquier, pose la question d’un droit national émancipé d’un droit romain. Il affirme que le royaume par-delà le pluralisme juridique peut trouver des logiques de droit qui sont parfaitement valables indépendamment de ce que le droit romain postule. Par ailleurs, ces juristes vont défendre l’idée que la législation royale est légitime que le droit est législateur, qu’il est producteur de la norme et qu’il est possible de s’émanciper du droit romain. On va quand même être amené à comparer les coutumes les unes aux autres. Il va falloir se pencher sur la question de la diversité coutumière. Il faut démontrer que les coutumes ne sont pas le résultat du hasard. Elles offrent des solutions parfois extrêmement techniques, précisent et fines. Certaines coutumes peuvent porter un certain ascendant dans le droit national. Dans la matière, un juriste comme Charles Dumoulin est essentiel. Il entend décrire un droit national qui transcende le pluralisme juridique. Les coutumes peuvent s’étudier et peuvent se comparer entre elles, c’est une approche très rationnelle et très doctrinale du droit et de ses coutumes. Dumoulin, étudie la coutume de Paris et va perfectionner cette coutume. En perfectionnant la coutume de Paris, il va réfléchir aux autres coutumes. Il montre que les coutumes sont dignes d’intérêt, dignes de réflexion et dignes d’étude. Il va s’efforcer d’écrire un droit national. Rien qu’avec son titre Discours sur la concorde et l’union des coutumes de France, on voit l’effort sur le texte et sur la technique du droit pour faire du comparatisme intercoutumier. On va systématiser les points de convergence. On va essayer de s’émanciper du droit romain. On va essayer d’avoir une réflexion sur la diversité coutumière. Siegfried Brie s’intéresse au comparatisme intercoutumier et dit que ça fait référence à la « puissance unificatrice du droit coutumier ». Certains vont rédiger des agrégatives de coutumes, des conférences coutumières. On va essayer d’avoir une réflexion sur la diversité coutumière en comparant les coutumes. On va mobiliser une culture juridique qui est extrêmement vaste. Nos juristes sont habitués à une réflexion de comparatisme. Il y a une démarche de revendication pour le droit national, pour dire qu’il est légitime par lui- même. B / Les timides initiatives anglaises Le droit anglais à quand même des spécificités remarquables. Le droit romain est beaucoup moins présent dans le droit anglais. Les Anglais résistent au droit romain dès le début, et la présence romaine a été beaucoup plus réduite qu’ailleurs. L’unité anglaise à conduit à la coexistence de structurations juridiques plus fortes. Dans la tradition anglaise, la conquête normande a poussé à une activité judiciaire importante, ça c’est accompagné d’une réflexion des juristes un peu particulière. La Common law s’est structurée autour d’une place de la justice du roi qui est très importante. Les juristes anglais, très tôt, ont souligné les spécificités de leur droit. Ils vont s’ingénier à souligner cette originalité tant dans leur droit que dans leur système politique. Ils vont revendiquer cette originalité, mais lorsqu’on franchi le pas de la revendication, on n’est plus vraiment dans le droit comparé. Exemples de juristes anglais : Fortescue, c’est un juriste dans une période très trouble de l’histoire anglaise : la guerre des Deux-Roses. Il va partir en exil avec le fils d’Henry VI, car Henry VI est vaincu et va mourir. Il part donc en exil en France avec l’épouse d’Henry et son fils. Il écrit les Éloges des lois d’Angleterre. Dans ce texte, il s’est efforcé de réfléchir à l’Angleterre, à son système politique et à son droit. Il revendique la comparaison, souvent, au tout début des chapitres qu’il aborde. Cette comparaison tourne à l’avantage de l’Angleterre. Ce comparatisme est systématiquement à l’avantage du modèle anglais. Ce n’est pas du droit comparé, car le but, c’est de minorer l’apport d’un droit pour souligner l’apport d’un autre droit. Il n’y a pas de démarche scientifique. Pollock se tourne vers William Fulbeck. Fulbeck fait des conférences entre le droit romain, le droit canonique et la common law. Il choisit un dialogue entre le chancelier et le prince. Il s’agit de se poser la question de comment exposer du savoir, ça pose la question de la méthode. Fulbeck choisit un dialogue entre plusieurs protagonistes. C’est sous cet angle-là que Fulbeck est intéressant, même si ici il n’y a pas vraiment de comparaison mais plutôt un exposé des savoirs. William Murray comte de Mansfield (1705-1793), c’est un très grand juriste britannique, il a été pendent 32 ans, lord juge en chef. Mansfield mobilise le droit romain, il mobilise aussi la législation royale française. Il a laissé une empreinte très forte, car il jette les bases du droit maritime moderne. Dans une jurisprudence de 1759, il mentionne l’ordonnance sur le marine de Colbert de 1681, et affirme la liberté des mers. Il utilise le droit étranger pour construire son raisonnement. Il n’hésite pas à souligner que les lois étrangères peuvent être mobilisées. Il dit que les lois étrangères peuvent servir le raisonnement du juriste. Pour Mansfield, c’est un instrument de persuasion, ce n’est pas du droit comparé. Autrement dit, la méthode fait défaut, car il va emprunter parce qu’il en a besoin, l’objet ce n’est pas du droit comparé, c’est un objet qui est conjoncturel. C / Montesquieu, précurseur de la modernité Montesquieu, tout petit, déjà, a le soucis de ce qu’il se passe ailleurs. Au XVIIIe siècle, une certaine élite intellectuelle voyage beaucoup, et Montesquieu n’y échappe pas. Au tout début du XVIIIe siècle, il voyage, et va écrire Les lettres persanes de 1721, c’est un roman épistolaire. Il va y avoir des protagonistes essentiels ce sont deux individus qui viennent de Perses qui se baladent en Europe et qui séjournent assez longtemps en France. Montesquieu essaye de s’extraire pour porter un regard critique sur ce qu’il voit en France. Montesquieu est français (bordelais) et il a une démarche de l’esprit qui consiste à feindre d’être étranger à son droit et a sa culture pour avoir un regard nouveau et critique. Il a une observation critique, et parfois, quand il a du mal à trancher, il va prendre des exemples complémentaires. Montesquieu essaye d’être au plus près d’une analyse critique pour susciter l’interrogation. Puis, il y a De l’esprit des lois de 1748, Montesquieu était juriste, mais les juristes qui lisent Montesquieu ne le comprennent pas. L’esprit des lois, nous dit Montesquieu, ce sont les rapports nécessaires qui dérivent de la nature des choses. Il veut dire que ces rapports, il va falloir les mettre en évidence. Les choses ce sont la géographie, le climat, la démographie, la religion, etc. Montesquieu va nous dire que tous ces éléments hétérogènes s’articulent nécessairement. Le droit ce n’est pas un acte de volonté et s’il y a acte de volonté, il est conditionné par la nature des choses. Montesquieu peut opérer une critique politique et une critique de certaines dispositions juridiques mais toujours, selon lui, de façon scientifique. Il trouve mieux ailleurs, il trouve mieux géographiquement en Angleterre, et mieux dans le temps avec la royauté médiévale, car Montesquieu est pour la monarchie absolue. La démarche scientifique chez Montesquieu n’induit pas qu’il n’y a pas de jugement de valeur. Il y a chez Montesquieu une méthode expérimentale, cette méthode expérimentale est poussée très loin. Cette méthode, c’est comprendre, comprendre ce n’est pas justifié, comprendre, c’est éviter les préjugés, éviter les jugements de valeurs, éviter l’anachronisme. Pollock, dit que Montesquieu a « initié le mouvement de la pensée ». Il dit que c’est l’initiateur. Constantinesco a conscience de la démarche initiée, que cela suppose une démarche qui soit la plus scientifique possible. Cependant, les défauts méthodologiques de Montesquieu font que ça ne fait pas de lui le père du droit comparé.

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